Désorienté dans une histoire d’Angleterre, se sentirait-il moins libre et moins inspiré que dans ces essais circonscrits et variés qui, réunis sous le commun titre de Miscellanies, forment une si brillante mosaïque intellectuelle ?
La tige de Crétineau-Joly (et elle était de fer), c’est le chouan, le chouan qui soutient tout en lui et autour duquel se moulent les divers traits qui forment l’ensemble de l’homme entier, sous l’action de la vie et le pouce de la circonstance.
Écoutez cette plainte fatiguée : « Toutes les personnes, — écrit Gogol à un de ses amis, — toutes les personnes qui lisent, en Russie, sont persuadées que l’emploi que je fais de ma vie est de me moquer de tout homme que je regarde et d’en faire la caricature… » Bientôt, cette société qu’il avait blessée par cette suite de caricatures qui forment les divers chants de son poème des Âmes mortes, les fonctionnaires de cette Chine de fonctionnaires dont il avait dit les bassesses, les petitesses, le néant, l’aristocratie puérile, les femmes, les prêtres, tout se souleva contre lui.
Il est assez indifférent pour le quart d’heure de savoir si c’est le métaphysicien qui éveille en lui l’esprit politique ou si c’est l’esprit politique, effrayé des tempêtes qui dorment sous nos pieds à fleur de sol, qui a repoussé le métaphysicien sur lui — même ; mais ce qui est visible jusqu’à la splendeur, c’est que le métaphysicien et l’esprit politique, dont l’union fait un homme presque aussi merveilleux qu’une Chimère, forment en M.
Est-ce l’idée, qu’il dit être la plus générale de la philosophie positive, « que toutes les connaissances humaines doivent être dominées par un petit nombre de sciences fondamentales et former un tout… » ?
Il n’a pas écrit une biographie intellectuelle du penseur, et replacé, après coup, les idées de l’homme, sous le jeu de ses facultés bien étudiées et par l’étude redevenues vivantes, pour voir comment ces idées s’étaient formées, développées et fixées, dans l’action et sous la pression de ces facultés.
Il n’était pas, d’ailleurs, de vocation absolue, un romancier, quoiqu’il ait fait aussi des romans, et, entre autres, ces Docteurs du jour, qui ont un cadre romanesque dessiné pour y mettre bien autre chose que des romans, et qui pourtant en contiennent un, si ce n’est deux… Brucker avait d’autres facultés que celles-là avec lesquelles on crée des fictions intéressantes ou charmantes, et ces facultés impérieuses et précises avaient trop soif de vérité pour s’arrêter beaucoup aux beautés du rêve, qui traversèrent cependant son imagination dans la chaleur de sa jeunesse, quand, par exemple, il écrivit en collaboration ce roman des Intimes, oublié, comme s’il l’avait fait seul, malgré les diamants d’esprit qu’y jeta Gozlan et qui ne firent point pâlir les rubis que lui, Brucker, plaça à côté… La gerbe de facultés différentes qu’avait Brucker et qui se nuisaient peut-être les unes aux autres par le fait de leur nombre, avaient, au centre du magnifique bouquet qu’elles formaient, deux fleurs superbes et excessivement rares : la métaphysique, — non pas froide chez lui comme chez les autres métaphysiciens, mais de feu, — et une puissance de formule algébrique qui donnait à ses idées et à son style — même littérairement — une rigueur et une plénitude incomparables.
L’Idée de Dieu de Caro et les Sophistes de l’abbé Gratry forment, à eux deux, un redoutable boulet ramé, très suffisant pour nettoyer la situation.
IV Parmi les nombreux romanciers modernes qui forment chaque jour un genre plus formidable, les plus romanciers, c’est-à-dire les plus incroyables, ce sont ces romanciers qui se croient bonnement les historiens de la nature.
On ouvre en vain la poule aux œufs d’or, on n’apprend pas comment se forment ces œufs d’or, dans le mystère de ses entrailles !
Mais y en a-t-il assez pour être plus que des zig-zags de feu qui passent, et pour former l’étoffe de ce tonnerre, qui est le génie, et qui, de sa puissance continue, emplit tout le cintre du ciel ?
Ils appartenaient à ces idées…, mais ils appartenaient aussi, et par leur destinée et par les premières observations de la vie pensante, qui forment, pièce à pièce, la mosaïque intérieure de notre génie, à ce peuple dont ils avaient à traduire les sentiments, le langage et les inspirations !
Athènes, Alexandrie, Tarse, Smyrne, Éphèse et Byzance étaient des écoles sans cesse ouvertes ; là se formaient et régnaient ces orateurs ; ils parcouraient les villes les plus célèbres de l’Europe et de l’Asie.
Il en est qui se sont formés en parcourant l’Europe ; il en est dont la pensée solitaire et profonde n’a vécu qu’avec elle-même.
Les trois personnages, le mari, la femme et l’amant qui forment l’éternelle et l’inévitable trilogie, sont une fois de plus en présence. […] Ceux qui voudront se former dans l’art si difficile du récit devront avoir sans cesse sur leur table, lire, relire, profondément étudier Colomba. […] Tous les deux se formèrent par des voyages, tous les deux publièrent leur chef-d’œuvre dans la pleine maturité de l’âge, l’un à quarante-cinq ans, l’autre à quarante-quatre. […] Dès cette première grande scène du mariage, on sent l’adultère menacer et envahir cette union formée du matin. […] Toutes leurs forces, toutes leurs pensées vont à elle et la forment.
Car ce consentement, qui suffit pour former et conserver les sociétés, ne suffit plus s’il s’agit d’établir la supériorité d’un poète sur un autre. […] Selon l’usage des saints de l’Égypte, il se retira dans le désert et vécut cinq ans dans un de ces tombeaux anciens taillés dans le roc et formés de vastes salles, parfois couvertes de peintures. […] Ils formaient une armée nombreuse et disciplinée, contre laquelle les pouvoirs publics ne pouvaient lutter en ces temps de troubles et d’anarchie. […] Léon Hennique a grandi et s’est formé dans le naturalisme. […] Elle refusa de baiser le ciboire et se tordit sur elle-même au point que ses pieds touchaient sa tête et qu’elle formait parfaitement une roue.
Ces sortes de bons avis, ces opinions du sens commun sur les premiers essais du génie, formeraient un curieux chapitre dans l’histoire des vocations contrariées. […] Malgré les préjugés régnants sur l’indignité de l’idiome vulgaire en matière philosophique, malgré la difficulté extrême de rendre des idées abstraites dans une langue populaire à peine formée, Dante écrit il Convito en prose italienne, afin de mettre à la portée des humbles, de ceux qui ne se repaissent que d’une nourriture bestiale, la nourriture spirituelle, le pain des anges, comme il l’appelle, qui fait la joie des âmes d’élite. […] Et ces vertus héroïques dont Florence était si fière, ces vertus fatalistes, superbes et vindicatives des Farinata, des Cavalcanti qui ne s’humilient pas même dans l’enfer, n’étaient-elles pas formées sur le modèle stoïcien bien plus que sur l’idéal de la sainteté chrétienne ? […] À la droite et à la gauche du char, sept dames forment une danse sacrée. […] À Naples, à Palerme, il entre en possession d’une intensité de vie dont il ne s’était formé jusque-là aucune idée.
Pareillement, il n’importe qu’à peine si Mme Guyon était malade ou folle : le fait est qu’elle a formé des disciples, et que son enseignement a porté des conséquences. […] Évidemment ce serait aller trop loin, beaucoup trop loin que de prétendre qu’ils forment le fond et la substance de la doctrine de Massillon. […] Je ne le crois pas, car, n’ayant reçu qu’une éducation première, à ce qu’il paraît, fort incomplète, il s’est formé plus tard dans un petit monde singulièrement hostile à la mémoire du poète. […] Mais les économistes avaient osé former secte et se poser en rivaux de popularité des encyclopédistes. […] Romancier, peintre, ou poète, le réaliste est un homme qui croit qu’une addition de détails vrais suffit à former un ensemble, et partant de là » qui peint ou qui décrit « le puceron » comme il ferait « l’éléphant ».
Si vous allez les entendre dans le pays et si vous écoutez l’accent vibrant et profond avec lequel on les prononce, vous verrez qu’elles y forment un poëme national, toujours compris et toujours efficace. […] Tout est d’accord, le lieu, le chant, le texte, la cérémonie, pour mettre chaque homme, en personne et sans intermédiaire, en présence du Dieu juste, et pour former une poésie morale qui soutienne et développe le sens moral356. […] On voit alors se former une littérature nouvelle, élevée et originale, éloquente et mesurée, armée à la fois contre les puritains qui sacrifient à la tyrannie du texte la liberté de l’intelligence, et contre les catholiques qui sacrifient à la tyrannie de la tradition l’indépendance de l’examen, également opposée à la servilité de l’interprétation littérale et à la servilité de l’interprétation imposée. […] Il n’a point de peine à les appeler ou à les former. […] It made me greatly ashamed of the vileness of my former life, and confounded me with the sense of my own ignorance ; for there never came thought into my heart before now that shewed me so the beauty of Jesus Christ.
On eût dit qu’elle le sentait et qu’elle voulût mettre son cœur et son esprit à l’unisson de cette idéalité, car jamais elle n’aborda devant moi des sphères aussi élevées, et elle y monta d’elle-même avec cette simplicité candide qui formait souvent en elle un puissant contraste avec l’ardente et charmante exubérance de son esprit de saillies. « Je ne crois, me dit-elle, à aucun mystère et à aucun miracle transmis ou expliqués par les hommes. […] Il est bien certain que là l’émotion gagne à la rapidité colorée de l’expression ; mais quand il discute, il est obscur et procède par des réticences qui arrivent à former de véritables lacunes dans son esprit, dans le mien par conséquent. […] L’élégance et la diversité de ces récipients, les uns en marbre, les autres en poterie, quelques-uns en matière plus précieuse, forment une charmante galerie, avec les lampes, les statuettes, les petits bustes, les monnaies, et ces fioles lacrymatoires, dont le verre est devenu, par reflet du temps, d’une si belle irisation, qu’il n’existe pas de pierres précieuses plus brillantes. […] Pourtant, je ne le crains pas. — Je vois sortir de terre un spectre sombre et terrible qui ressemble à une divinité infernale ; son visage est caché dans les plis d’un manteau et des nuages sinistres forment son vêtement. […] Je l’avais d’abord repoussé et raillé dans mon coin, dans ma solitude, dans mon for intérieur ; et puis j’y avais pris goût, je m’en étais enthousiasmé, et mon goût, qui n’était pas formé, flottait entre le passé et le présent, sans trop savoir où se prendre, et chérissait l’un et l’autre sans connaître et sans chercher le moyen de les accorder.
Son discours, qui est moins un éloge qu’une discussion historique, remporta le prix et fut publié en 1787 ; il a reparu plus tard corrigé, augmenté, ou plutôt totalement refondu, en tête de l’édition de Boileau (1809), et de nouveau modifié en 1825 ; mais, dans sa première formé, il donne mieux idée des principes et du but de l’auteur. […] Il arrivait ainsi que la conclusion logique était en raison inverse du résultat que rendaient les événements, et qu’un coup d’œil plus étendu eût fait présager : cette conclusion si nettement déduite eût été triomphante, si les hommes eussent formé une classe de logique et de géométrie, une classe docile, et non pas un peuple. […] Parmi les opinions arrêtées de Daunou qui en avait tant, on n’en aurait pas trouvé de plus fixe et de plus justifiable assurément que celle qu’il s’était formée de la Terreur, des principaux personnages qui y figurent, et particulièrement de Robespierre. […] Pendant des années, grâce à la constance inaltérable de son régime et à la rigoureuse économie de ses heures, il sut mener de front trois ordres de travaux importants, dans lesquels son talent patient et sobre, arrivé à sa plénitude, trouvait des développements appropriés, suffisamment divers et parfois brillants : 1° le Journal des Savants dont il fut, dès la Renaissance (1816-1838), le rédacteur principal ou éditeur, comme on disait ; 2° la continuation de l’Histoire littéraire, dont il était une colonne, la colonne la plus ornée (1809-1838) ; 3° son Cours d’histoire au Collége de France, professé durant onze ans (1819-1830), dont on n’avait imprimé jusqu’ici que quelques extraits et analyses, qu’on publie enfin aujourd’hui pour la première fois, et qui ne formera pas moins de seize volumes très-remplis.
Elle s’est formée de quelques jeunes fous, au nombre desquels il figurait, et de lady Bennett (comtesse d’Arlington), avec ses dames de compagnie et ses femmes. […] C’est à ce prix qu’une génération finit par former le style soutenu qui est nécessaire pour porter, publier et prouver les grandes choses. […] Les mœurs, la conversation, le style, le théâtre, le goût, tout est français ou tâche de l’être ; ils nous imitent comme ils peuvent et vont se former en France. […] La seconde continue la première, la troisième achève la seconde, la quatrième complète le tout ; un courant s’est formé qui nous porte, nous emporte et ne nous lâche plus. […] The former is free from controversy and dispute, because it consisteth in comparing figure and motion only, in which things truth and the interest of men oppose not each other.
Plus souvent, il s’est formé des syndicats d’admiration mutuelle où l’on considérait comme non avenues les tentatives qui se produisaient en dehors des dogmes promulgués par le groupe. […] Nous aimons notre pays parce qu’il est beau et parce que sa terre, ses productions, son climat, le mélange de races qui s’y est opéré jadis contribuèrent à former une variété de l’espèce apte à fournir celle-ci d’idées et de sentiments qui aident à son expansion. […] Mais qu’ils ne s’imaginent pas que leur tâche sera facile. — D’abord, ils ne feront que préparer l’évolution future : pour que la pensée humaine enfante l’homme nouveau, ils auront beaucoup à souffrir, car tout enfantement est douloureux et, à cette heure, l’embryon commence à peine à se former. […] Au bout d’un laps de temps, plus ou moins long, si le milieu leur est favorable, elles forment de nouvelles espèces très différentes de celle qui les produisit. […] On sait comment les choses se passent : chaque arrondissement contient quelques malins qui se forment en comité pour envoyer siéger dans cette caverne d’Ali-Baba qu’on appelle la Chambre un notable choisi à cause de sa fortune, de sa voix sonore ou de son habileté à tromper les simples.
Enfin l’humanisme forme, ou a de très grandes chances de former une littérature d’imitation indéfinie. […] Les gens lisant dans le grec formaient une sorte de franc-maçonnerie. […] Il en faut dire autant des désirs, des vœux que nous formons sans cesse. […] La Pléiade était formée. […] Elle n’indique pas la manière de former des mots nouveaux.
L’aridité des yeux est en parfaite harmonie avec la sécheresse des cœurs formés par cet homme qui ne parut pas capable d’amour et ne voulut pas être aimé. […] Le grand Dumas aime ce peuple formé par lui et meurt universellement regrette après un règne de quarante ans, ayant dansé devant Dieu et devant les hommes la plus admirée et la plus sublime des Bamboulas littéraires. […] Nous nous serions remplis de la douceur de nous faire universellement détester et nous aurions formé ensemble quelques élèves dans l’art de déplaire souverainement aux romanciers et aux poètes que nous aurions fait griller à petit feu après leur avoir arraché la peau de la tête. […] Il paraît que c’est une chose terriblement difficile à comprendre, puisque non seulement les imbéciles qui forment l’immense majorité de toute nation, mais encore bon nombre de gens d’esprit, ne sont pas encore parvenus à s’en pénétrer. […] — me paraissent se rejoindre mystérieusement et former au-dessus du fleuve houleux et mugissant de ses poésies comme un pont idéal du haut duquel il doit être moins difficile d’en conjecturer la grandeur.
Son talent, qui n’a cessé de progresser, est aujourd’hui pleinement formé et maître de soi. […] Mais en outre on devine bien que la pensée de l’écrivain s’est formée dans la méditation solitaire. […] Ils forment une école. […] Ces trois romans forment le cycle des « romans de la rose ». […] Mais c’est qu’en effet les éléments qui ont concouru à former ce talent très complexe ne sont pas tous de même valeur.
Si les œuvres de la poésie primitive, non encore arrivées à une culture régulière, peuvent se comparer à des fruits sauvages, assez âpres ou quelquefois fort doux, produits par des arbres francs et détachés au hasard sous la brise ; si, au milieu de cette nature agreste, quelques grands poëmes divins, formés on ne sait d’où, semblent tomber des jardins fabuleux des Hespérides ; si les œuvres de la poésie régulièrement cultivée sont comme ces magnifiques fruits savoureux, mûris et récoltés dans les vergers des nations puissantes et des rois, on peut prétendre que les œuvres de cette poésie des époques encombrées et déjà grêlées ne sont pas des fruits, à vrai dire ; ce sont des produits rares, précieux peut-être, mais non pas nourrissants. […] Je vous ferai porter, quand vous les voudrez, vos beaux vers qui sont miens, et j’ai le projet de vous adresser la douzième de mes Élévations qui pourront un jour former un recueil.
Sa poésie, ce semble, n’a plus qu’à éclore ; elle est toute formée en elle par le malheur ; elle a reçu tour à tour le soleil et les larmes. […] Comme il n’y avait pas assez de pièces pour former un volume, on y ajouta la petite nouvelle en prose de Marie, qui se retrouva depuis imprimée dans les Veillées des Antilles (1821).
Le petit avis au lecteur y répond bien mieux d’un seul mot : « Il faut prendre garde…, il n’y a rien de plus propre à établir la vérité de ces Réflexions que la chaleur et la subtilité que l’on témoignera pour les combattre141. » Voltaire, qui a jugé les Maximes en quelques lignes légères et charmantes, y dit qu’aucun livre ne contribua davantage à former le goût de la nation : « On lut rapidement ce petit recueil ; il accoutuma à penser et à renfermer ses pensées dans un tour vif, précis et délicat. […] La plupart des défauts qui éclatent dans la seconde moitié de la vie existaient en nous tout formés bien auparavant ; mais ils étaient masqués, en quelque sorte, par la pudeur de la jeunesse.
Du milieu social où elle naquit, comme de celui où se forma son aînée, Mlle Pauline de Meulan, on peut dire (et je m’appuie ici pour plus de facilité sur des paroles sûres) que « c’était une de ces familles de hauts fonctionnaires et de bonne compagnie, qui sans faire précisément partie ni de la société aristocratique, ni même de la société philosophique, y entraient par beaucoup de points et tenaient du mouvement du siècle, bien qu’avec modération, à peu près comme en politique M. de Vergennes, qui contribua à la révolution d’Amérique, fut collègue de Turgot et de M. […] Sa place désormais et celle de son mari étaient dans le parti constitutionnel de la Restauration, dans cette nuance d’opinion qui formait le Centre gauche d’alors.
Obligé, d’après les conditions universitaires, d’obtenir le grade de docteur-ès-lettres, Charles Labitte prit pour sujet de thèse une période fameuse de notre histoire politique, ou du moins un point de vue dominant dans cette période, et qui s’étendit aussitôt sous sa plume jusqu’à former le volume intitulé De la Démocratie chez les Prédicateurs de la Ligue (1841). […] Pourtant cette vie de Rennes, loin de Paris, et malgré tous les dédommagements des amitiés qu’il s’était formées, coûtait à ses goûts ; il ne tarda pas à désirer de nous revenir.
Avec des réussites moindres, et par des combinaisons de toute sorte, les éléments qui ont formé les talents principaux forment aussi les talents secondaires : au-dessous de Rousseau, les écrivains éloquents et sensibles, Bernardin de Saint-Pierre, Raynal, Thomas, Marmontel, Mably, Florian, Dupaty, Mercier, Mme de Staël ; au-dessous de Voltaire, les gens d’esprit vif et piquant, Duclos, Piron, Galiani, le président de Brosses, Rivarol, Chamfort, et, à parler exactement, tout le monde.
Je ne sais au fond ce qu’était Cornélie, cette mère des Gracques qui élevait des conspirateurs contre le sénat de Rome et qui les formait à la sédition, vertu des ambitieux populaires. […] Le gouvernement provisoire lui avait remis, à ma requête, le ministère de la guerre et le commandement général de toutes les troupes militaires ou civiles : quatre-vingt mille hommes de toutes armes dans Paris ou dans le rayon de Paris ; seize mille hommes de gardes mobiles, jeunesse intrépide de la capitale, formée par moi-même dans la nuit du 24 février, et brûlant de se signaler par un service héroïque à l’ordre ; la garde républicaine à pied et à cheval, vigoureuse élite de l’ancienne gendarmerie de Paris ; enfin trois cent mille hommes à peu près de garde nationale, dont la majorité était disposée à défendre au moins ses foyers et ceux des citoyens : en tout environ quatre cent mille baïonnettes, dont cent vingt mille au moins de troupes de ligne.
» On voit par ces lettres que la mère du Tasse était une de ces femmes rares qui forment de leur sang les hommes supérieurs, poètes, philosophes, héros. […] Heureusement pour lui, le duc d’Urbin, qui estimait son caractère et son talent, apprit par hasard son passage à travers ses États ; il l’arrêta à Pesaro et lui donna l’hospitalité dans une maison de campagne située sur les collines qui entourent la ville, où les prairies, les bois, les eaux et la vue de la mer Adriatique, formaient un horizon inspirateur pour le poète fatigué des vicissitudes du sort.
c’étaient de bons moments, monsieur, et puis je lui répondais ensuite sur tout ce qu’il me demandait de mon pauvre et beau Hyeronimo, le vrai portrait en force de sa cousine en grâce : comme quoi sa taille dépassait de la main la tête de la jeune fille, comme quoi ses cheveux moins bouclés étaient noirs comme les ailes de nos corneilles sur la première neige ; comme quoi son front était plus large et plus haut, ses joues plus pâles et plus bronzées par le soleil ; ses yeux aussi fendus, mais plus pensifs sous ses sourcils ; sa bouche plus grave, quoique aussi douce ; son menton plus carré et plus garni de duvet ; son cou, ses épaules, sa taille plus formés. […] Le terrain sur lequel nos pères l’avaient plantée et les vieux ceps tortus et moussus comme la barbe des vieillards ne nous restaient pas en propriété ; seulement les vieux pampres qui sortaient du terrain enclos de pierres grises, qui avaient grimpé de roc en roc jusqu’à la maison, et qui formaient une treille devant la fenêtre et un réseau contre les murs de la cabane et jusque sur le toit, nous restaient ainsi que les grappes que ces branches pouvaient porter en automne ; c’était assez pour notre boisson, car les enfants et ma belle-sœur ne buvaient que de l’eau, et je ne buvais du vin moi-même que quelques petits coups les jours de fêtes.
Nous nous croyions sûrs, après nous être ainsi rejoints, de rencontrer une bonne heure dans tant d’heures devant nous, et nous jouissions de nos minutes d’entretien comme si elles avaient formé des heures et que les heures n’eussent pas formé des semaines.
Le xive et le xve siècle forment entre le moyen âge et la Renaissance une longue époque de transition, pendant laquelle tout l’édifice intellectuel et social du moyen âge tombe lentement, tristement en ruines, mais pendant laquelle aussi pointent de ci, de là, les germes épars encore et chétifs de ce renouvellement universel qui sera la Renaissance. […] L’Église ne peut consommer, placer, régir tout ce qu’elle a formé.
Mais la plupart des graves et sérieux bourgeois qui abordaient la tribune, les libéraux notamment, étaient des hommes de goût classique, formés à l’école du xviiie siècle et des idéologues, nourris de Voltaire et de Montesquieu, philosophes, juristes, dialecticiens, de sensibilité médiocre ou restreinte, d’imagination froide, et plus que modérément artistes. […] Il voyait, comme par une direction providentielle, toute l’histoire européenne depuis l’invasion des barbares tendre partout, et particulièrement en France, à former, élever, éclairer, enrichir une classe moyenne : son œuvre d’historien a consisté à dessiner ce mouvement.
N’est-ce pas le propre esprit révolutionnaire des évangiles, candide, tout formé d’amour et totalement dénué de « prudence » humaine ? […] Un beau jour, il confia à l’excellente Mme Lagut son amour naissant pour Ondine et le projet qu’il avait formé de demander sa main.
Né d’un vieux sang républicain et très pur ; muni des meilleures « humanités » ; formé à la fois par la fréquentation du monde, par l’étude de l’histoire et de l’économie politique, et par de longs voyages en Amérique et en Allemagne (tout à fait l’éducation d’un homme politique d’outre-Manche, comme vous voyez) ; honnête homme avec raffinement ; très courageux, et du courage le plus allègre ; et, par surcroît, ayant eu l’esprit de n’être pas encore ministre, il m’apparaît, j’ai plaisir à le dire, comme une des grandes espérances de notre pays. […] Là, puis sur la rive historique de la Seine « aux peupliers d’or », et le lendemain, chez le Roi Soleil, sa bienvenue lui fut souhaitée en des vers magnifiques ou gracieux, dont le tour propre et toute la composition secrète témoignaient de l’antiquité d’une langue lentement formée et à la fois épurée et enrichie par toutes les savantes lèvres qui l’ont parlée depuis le Serment de Strasbourg.
Elle est plus malaisée à saisir si le tissu sonore se complique, et pourtant elle me paraît demeurer parfaitement juste, car les suites d’accords les plus inextricables ne sont jamais formées que par la réunion et l’interpénétration de groupes harmoniques relativement simples. […] Le rythme ne me paraît se confondre avec la mesure que dans un cas particulier : lorsqu’il offre le retour périodique des mêmes mouvements, c’est à-dire lorsqu’il est formé de groupes semblables entre eux ; la mesure coïncide alors avec chacun de ces groupes, sinon elle est le multiple du rythme ou son diviseur naturel.
Si j’eusse exécuté le dessein que j’avais formé, je serais à présent errant dans les forêts de la Volhynie, combattant avec des Sarmates qui ne se battront pas encore longtemps. […] Vous auriez pu, ce me semble, y joindre les circonstances qui ont accompagné ce vol, et les soupçons légitimes que raisonnablement vous pouvez former.
Ce répertoire de la connaissance humaine, formé sous les yeux d’Euclide, et par les soins de Callimaque, de Diodore Cronos, de Théodore l’Athée, de Philétas, d’Apollonius, d’Aratus, du prêtre égyptien Manéthon, de Lycophron et de Théocrite, eut pour premier bibliothécaire, selon les uns Zénodote d’Éphèse, selon les autres Démétrius de Phalère, à qui Athènes avait élevé trois cent soixante statues, qu’elle mit un an à construire et un jour à détruire. […] Il la formait, il la déforme.
Un homme tel que toi ne pouvait être formé que par la nature ; ton excellente organisation fut entièrement son ouvrage, et portait un caractère original, indépendant de toute imitation. […] Le crime et la vertu, représentés, l’un par Narcisse, l’autre par Burrhus, et se disputant l’ame de Néron, formaient un tableau sublime, mais qui devait d’abord échapper aux regards de la foule.
Le flanc de la montagne tourné au couchant ne voit le soleil que plus tard ; cette pente ruisselle, à ces heures de la matinée, de fraîcheur et de rosée ; ce n’est qu’aux extrémités des coudes et des caps élevés, formés par les sinuosités de la rampe, qu’on aperçoit à sa gauche les vagues éclairées du fleuve roulant dans la vallée à travers les brumes roses, les scintillations et les éblouissements du soleil levant. […] Sur son front, dégagé du panache vainqueur, Des lauriers lumineux formaient une auréole.
Voici une réimpression audacieuse et superbe, comme la librairie qui tiendrait à bien mériter des Lettres devrait plus souvent en risquer : ce sont les Contes drolatiques 6 de Balzac, qui devaient former un collier de cent pierres précieuses, collier brisé tout à coup sous les doigts découragés du merveilleux joaillier qui les avait serties et qui en opposait et en accordait les feux comme s’il avait été le musicien de la lumière. […] La plaisanterie, l’ironie et le rire, ces trois rayons dont est formée la foudre joyeuse de ce Jupiter de l’orgie, sont toujours près de partir d’une phrase française.
D’autres, à la suite de ce Grec retrouvé qui se nomme André Chénier, eussent voulu recréer et former, à leur usage, dans un coin de notre société industrieuse, une petite colonie de l’ancienne Grèce ; ils aimaient les fêtes, la molle orgie couronnée de roses, les festins avec chants, les pleurs de Camille, et la réconciliation facile ; chaque matin une élégie, chaque soir une poursuite et une tendresse.
On est bien près de former des vœux pour l’ennemi du dehors, quand on désire que les choses aillent très mal au dedans.
Goujon, par une de ses dédicaces, m’avertit qu’il y a eu dans ces dix dernières années tout un groupe de poëtes provinciaux rallié à l’appel de Thalès Bernard, et qui formait, — qui forme peut-être encore « l’Union des poëtes44. » Parmi ceux que la Bourgogne revendique, M.
Les douze ou treize pièces amoureuses, élégiaques, qui forment le milieu du recueil dans sa partie la plus vraie et la plus sincère, sont suivies de deux ou trois autres, et surtout d’une dernière, intitulée Date Lilia, qui a pour but, en quelque sorte, de couronner le volume et de le protéger.
Ce désaccord, qui tenait à la rapidité des temps et à l’empressement honorable des premières générations, a graduellement cessé ; depuis une douzaine d’années surtout, l’Université ne se lasse pas de former dans ses écoles, d’exercer dans ses concours, une jeune et forte milice qui soutiendrait le choc dans les luttes philologiques contre nos rivaux d’outre-Rhin, et qui n’a pas à rougir non plus devant les souvenirs domestiques, devant les traditions exhumées de la vieille Université d’avant Rollin.
Les mœurs d’Angleterre, par rapport à l’existence des femmes, n’étaient point encore formées du temps de Shakespeare ; les troubles politiques avaient empêché toutes les habitudes sociales.
Garat, dans ses Leçons aux Écoles normales, modèle de perfection en ce genre, et Rivarol, malgré quelques expressions recherchées, font concevoir parfaitement la possibilité de cette concordance entre l’image tirée de la nature physique, et l’idée qui sert à former la chaîne des principes et de leurs déductions dans l’ordre moral.
I Me voici donc à l’aise, libre de rechercher toutes les causes qui ont pu former mon personnage et sa poésie ; libre de voyager et de conter mon voyage.
Les prédicateurs, les philosophes, les poëtes se forment en choeur pour chanter la beauté imposante des moeurs réglées, et la littérature est un motet solennel accompagné par l’orgue ecclésiastique.
En même temps s’était formé un public curieux de tels récits, et qui dans l’antiquité même ne goûtait rien tant que les vies, les portraits d’âmes grandes et hautaines se dépeignant par leurs actions.
et je fais serment de ne pas lui donner de dégoût, et de la recevoir au contraire comme une libératrice 608. » Ne voyons-nous pas se former dans les cœurs et déborder sur les lèvres les sentiments romantiques, le lyrisme éperdu de l’amour ou du désespoir ?
Nous pouvons nous former par là une idée de la science des décors et des machines où les Italiens étaient parvenus grâce à Baldassare Peruzzi et à ses élèves ; mais là n’est pas le véritable intérêt du recueil de Flaminio Scala.
Le Dantec dans son livre : L’Individualité et l’erreur individualiste, qu’une intégration jamais achevée de petites personnalités secondaires p, p′, p″… qui s’ajoutent les unes aux autres et forment une série de médaillons dissemblables et discontinus, malgré l’apparence de continuité du moi, que l’individualité ne soit, suivant la conception de Stirner lui-même, qu’une série d’instantanés ; peu importe pour la question qui nous occupe : celle de l’indépendance de l’individualité relativement aux influences sociales et du conflit possible entre l’originalité individuelle et les conformismes sociaux.
Or, ces vitesses, on croit maintenant les avoir réalisées ; les rayons cathodiques et ceux du radium seraient formés de particules très petites ou d’électrons qui se déplaceraient avec des vitesses, plus petites sans doute que celle de la lumière, mais qui en seraient le dixième ou le tiers.
Le malheur est que la frivolité générale les condamne à former un monde à part et que l’aristocratie du siècle, qui est celle de la richesse, ait généralement perdu le sens idéal de la vie.
Essayez un peu de démêler l’écheveau embrouillé que forment les croisements de sang dans un pays composite où se sont mêlés, dès les premiers temps, des Celtes, des Romains, des Germains, des Basques, des Israélites !
L’exemple qui précède met dans tout leur jour les deux principales doctrines de la psychologie à posteriori la plus avancée : 1° Que les phénomènes les plus abstrus de l’esprit sont formés de phénomènes plus simples et plus élémentaires.
Avant de vouloir former des héros, devenons donc tels nous-mêmes.
Où se former en se récréant ?
Car tous les instincts et tous les vouloirs, tous les sentiments, toutes les pensées dont sont formés les hommes, ils auront à les découvrir, à les manier, et les joindre.
Mais pour nous, qui n’en sommes plus à croire que l’âme humaine, à travers les âges, reste imperturbablement égale à elle-même ; qui la concevons en perpétuel devenir, formée par toutes les capitalisations du passé et de l’hérédité, par toutes les acquisitions et par toutes les influences du savoir et des milieux, il est difficile d’admettre que le poète se doive complaire indéfiniment dans la contemplation de deux ou trois phénomènes généraux de la nature, signalés, d’ailleurs, depuis fort longtemps sous toutes les latitudes.
La naïveté de son caractère, la simplicité de son âme, son goût pour la retraite le mettent vite à la place de ceux qui forment des vœux pour le séjour de la campagne, pour la médiocrité, pour la solitude.
On aime à voir que les entrailles du destructeur des villes sont formées comme celles du commun des hommes, et que les affections simples en composent le fond.
Sa tête n’est pas mal, en comparaison du reste, c’est celle d’un joli petit ange ou d’un petit amour, tant les traits en sont formés.
Mais au point de vue du nombre, la faute, qu’on lui faisait commettre était encore plus grave ; car ces vers forment une strophe de six vers couplés, menés deux à deux, avec, ce qui est très conforme aux lois générales du rythme, un repos assez fort après le premier distique, un repos un peu moins fort, mais un repos encore, après le second distique : Depuis le jour où le voyant vainqueur, D’être amoureuse, amour, tu m’as forcée, || Fût-ce un instant, je n’ai pas eu le cœur De lui montrer ma craintive pensée, | Dont je me sens à tel point oppressée, Mourant ainsi, que la mort me fait peur.
Les générations naissantes viendraient se former par nos conseils à la vie du monde et de l’art.
Philosophie peu compliquée qui succède à toutes les autres et vient engloutir les systèmes qui demandaient au moins un effort de cerveau pour les créer ou pour les comprendre, elle est simple comme les quatre planches très simplement jointes qui forment un cercueil !
Ce plan hardi de s’emparer de la Sonora, d’insurger le pays outré, presque révolté, n’en pouvant plus, et d’y établir un gouvernement quelconque, n’apparut, ne se forma et ne se clarifia dans son esprit que quand il eut vu le pays dont il était question et dont il nous a laissé, dans des pages magnifiquement rapides et caractérisées, une vue qui simplifie et justifie tous les projets.
V Telle pourtant s’exerce, sans échouer jamais, depuis trente ans, la capacité littéraire de Buloz, de cet homme à la fois obscur et célèbre, que j’ai appelé une puissance, une puissance qui aurait pu être bienfaisante et féconde, et qui n’a été que malfaisante et stérile… Ne vous demandez pas quels sont les talents qu’il a distingués et formés, mis en évidence et en lumière, à qui on l’ait vu prêter généreusement l’épaule ou la main !
Son règne, pour qui comprend les institutions qui formaient la monarchie française, est une véritable vacance du trône, car sa reconnaissance du chef du parti protestant, comme héritier présomptif de la couronne de France, était le suicide du pouvoir dont l’ensemble des institutions l’avait investi.
En vain les Germains invoquèrent-ils une barbarie commune pour fausser et briser le lien qui attachait Rome à la Gaule, le faisceau qu’elles formaient résista.
Elles ont même de la hardiesse dans le génie, par le mépris qu’elles font des événements qui forment la trame vulgaire de la vie, et par la préoccupation des sentiments que sa noblesse est d’exprimer.
Leur langue, formée du vieux toscan, composée de sons âpres et rudes, n’eut d’abord ni variété, ni précision, ni douceur.
Joignez à cela une calme philosophie sous laquelle on sent percer, très adoucie, une pointe des contes de Voltaire, et vous pourrez vous former une idée de ce livre exquis par la pureté de sa forme. […] De même pour l’Hôtel de Ville dont la description formerait un volume. […] Les colonnes commencèrent à déboucher par les deux ponts du Sig, et se formèrent sur la rive droite, pendant que tous les chameaux conduits, tantôt par des chameliers à pied, tantôt par des nègres qui, perchés au haut des bagages, indiquaient par leurs oscillations le balancement de l’animal, passaient le gué pour prendre leur place dans le convoi. […] En tournant ces feuillets, je vois passer ce nom : « Je désire, dit le prince, qu’on prévienne Cambis que je m’occupe ici à former une ménagerie ». […] Ce pont, dont la base était à deux cents pieds au-dessus de nos têtes, suspendu sur un gouffre sans fond ou planaient des bandes de vautours, un pignon de rocher surmonté d’aloès en fleur à cinq cents pieds à pic sur le torrent, ce mélange de cactus et de rochers d’une couleur admirable, les maisons et quelques palmiers éclairés par le soleil couchant au-dessus de cet abîme sombre : tout cela formait le spectacle naturel le plus imposant.
Des trois nouvelles qui forment le volume que M. […] Ludovic Halévy vient de réunir six charmantes nouvelles qui forment un volume paru chez Calmann-Lévy. […] Ceci posé, je dirai que les vingt et quelques lettres de femmes que je viens de lire forment un ensemble d’une lecture très attrayante, aussi sérieuse par le fond qu’elle est vive et légère par la forme. […] Les débris du régiment s’étaient formés en carré sous les ordres d’un chef de bataillon ; il fallait essayer de sauver ces braves gens qui allaient infailliblement être hachés par l’ennemi. […] C’était l’heure où sur le boulevard du Temple la queue des petits théâtres commence à se former.
Il lui envoie soixante à quatre-vingts pages de laborieux et longs raisonnements pour lui prouver qu’il n’est pas malheureux ; et là-dessus il lui cite toutes les colonies qui se sont formées dans le monde. […] Je vais passer rapidement sur les Lettres qui suivent ; on formerait un volume de ce qu’elles offrent de remarquable. […] « La nature nous a formés pour la vertu… » C’est le préjugé d’un homme de bien qui a oublié ce qu’il a fait d’efforts et de sacrifices pour devenir vertueux. […] Ce ne serait peut-être pas de vingt siècles, à compter de celui-ci, que la physique expérimentale aurait rassemblé les faits nécessaires pour former une base solide à la spéculation. […] Tel qu’il est, cependant, il faut le feuilleter, mais lorsqu’on aura le goût formé, et qu’on se sera affermi dans un genre d’éloquence plus austère.
Là, des arbres vénérables sont exposés aux efforts des rafales qui les déracinent et les jettent sur le Gave de Lutour où ils forment des ponts champêtres. […] Les modérés avaient d’abord gouverné la ville ; ils formaient ce que l’on appelait alors la Société des Amis de la Constitution. […] Rivadeneyra avait formé le plan de joindre quelques volumes catalans à sa grande bibliothèque des classiques castillans. […] mais qu’il s’est formée et que sa force consacre. […] Une église, l’ayuntamiento (mairie), l’école et quelques maisons, forment le gros du bourg ; le reste des habitants est éparpillé dans les champs ou caché dans quelque bois, en un creux de montagne.
Mais le goût latin n’était pas encore formé. […] Ils plaisent comme les manières d’une petite fille qui joue à la grande dame ; mais ils n’ont qu’une heure fugitive de grâce, et il est clair qu’en voulant prolonger leur existence, quand la personne est formée et quand la langue est faite, ils deviendraient agaçante et ridicules. […] Il s’est formé autour de M. […] Les poètes sont là-haut, bien loin, sur la cime du Parnasse ; ils y forment une sorte de cénacle glorieux et tranquille où chacun jouit sans trouble de l’admiration des belles choses lues en commun et ne tient compte que du jugement de ses pairs. […] La connaissance du crime et du vice peut être utile à l’intelligence qu’elle développe, mais elle ne sert à rien pour former le cœur.
Quand Maurice se dirigea vers le château, un soleil d’or inondait encore la campagne, mais une bande d’un bleu sombre s’était déjà formée à l’horizon occidental, et elle envahissait rapidement l’étendue du ciel. […] Elle se tenait debout dans cette toilette parfumée, souriait de bonne grâce et semblait si belle et si bien formée qu’on était un peu intimidé devant elle. […] Bientôt des liens nouveaux se formèrent d’eux-mêmes entre nous, et ces liens ne seront que trop solides : c’est la communauté des fatigues et des peines qui les forme. […] Rien n’est plus varié que son œuvre, et chacun de ses ouvrages est un étonnement pour le monde de ses lecteurs ; je ne dis pas de ses « petits lecteurs », puisque les grands forment la majeure partie de son public. […] Il se formera ainsi une race dure, pratique, calculatrice, positive à outrance dans le mauvais sens du mot.
Napoléon III avait une canne en rhinocéros, dont la poignée était formée par une tête d’aigle en or. […] Avez-vous remarqué, à Paris surtout, les cercles de curieux qui se forment autour des entreprises de démolitions ? […] Comment peuvent-elles devenir un fardeau insupportable, un instrument de tyrannie, ou s’implanter dans les mœurs, s’associer aux libertés publiques et former la base de la puissance nationale ? […] Formé par ces anciennes disciplines, qui prenaient l’âme tout entière, il se trouva muni de fières maximes dès qu’il fut obligé, par sa conscience, de passer du discours à l’acte. […] Molé le soin de former un nouveau cabinet.
Bientôt de savants chanteurs en formèrent-ils des poèmes plus parfaits pour de plus délicates oreilles ? […] que, non sans ressemblance avec l’ode par les laisses, sortes de stances aux vers monassonants, se formera notre épopée : la Chanson de Geste. […] L’une, l’aînée, conçoit mystérieusement la beauté, et s’en extasie en des balbutiements, l’autre, qui écouta, ou devina, exprime en paroles qui ne se tairont plus, en images qui ne s’effaceront pas, le rêve primitif, ingénu, comme inconscient, presque muet, de la première ; et le grand chant des lyres est formé de l’antique et universel chuchotement des foules. […] C’est, au contraire, d’un mystérieux instinct que dérive l’accentuation des syllabes ; les gens de science ou d’art n’y peuvent rien du tout ; il ne dépend pas du plus obstiné des grammairiens ou du plus impertinent des poètes, qu’une syllabe formée d’une consonne et d’un e muet devienne longue, ni que, dans le mot amour, par exemple, mour soit bref et a long. […] et je ne pense point que les vers-libristes aient formé seulement le médiocre dessein de se dérober à un effort ; il ne faut jamais, quand on veut gagner le beau, enjeu suprême, « jouer la facilité ».
— ou bien elle voudra se retremper à ses sources vives et se fortifier par une sympathie tendre et ferme en même temps pour toutes ses manifestations sur le sol où elle s’est formée. » Je ne sais si M. […] Par exemple, il n’est pas prouvé que la matière épique de nos Chanson de geste se soit formée sur notre sol gaulois, et M. […] et le projet tant de fois formé, jamais exécuté, de fonder une Académie anglaise « pour la langue », à l’imitation de la nôtre, n’en serait-il pas un second, puisqu’il paraît qu’on y reviendrait de nouveau ? […] Cependant il n’est question que de reconnaître et de préciser les caractères des genres, qui, s’ils en marquent les limites, c’est parce qu’ils en forment, à vrai dire, la définition. […] Émile Montégut, — n’a pas contribué médiocrement à répandre la connaissance parmi nous, s’est formé le naturalisme.
Nous oublions volontiers que cet esprit si rare s’est formé non point dans les cénacles de gens de lettres, mais dans les ateliers scientifiques et dans les laboratoires d’érudition. […] L’étude des langues l’amène à se former un système sur l’apparition de l’humanité et la succession des races de l’ancien continent. […] L’idée d’une obligation se formait. […] Renan, le plus grave, peut-être, est d’avoir formé, sans le vouloir, ces imitateurs singulièrement incomplets et quelque peu présomptueux qui prennent le ton, le langage et l’humeur désabusée du maître, sans y être autorisés, comme lui, par l’abondance des notions exactes et l’accumulation du savoir. […] Le chapitre XXXI, où l’on voit des politiciens former un ministère, est une excellente caricature.
Et c’en est assez pour former un bien grand public, encore que select. […] Ne devraient-ils pas former une seule famille ? […] Précisément parce que les humains sont divisés comme peuples, ne devraient-ils pas être réunis et ne former qu’une seule famille au moins à titre d’enfants de Dieu ? […] Les autres sont des tissus spéciaux et fonctionnels, qui se forment au sein de la masse homogène. […] Maeterlinck se tiennent, s’enchaînent et forment système.
Il s’agissait en ce temps-là de recruter, de composer, de former le public ; et — pour ne parler que du genre sérieux, — puisque les Mystères avaient cessé de plaire, il s’agissait d’inventer, pour les remplacer, quelque autre chose qui procurât à peu près le même genre d’émotions et le même plaisir. […] Il ne forma certes point le projet de substituer la liberté du drame espagnol à la régularité commençante des tragédies de Garnier. […] Morel-Fatio « d’avoir formé le projet, comme il dit, de raviver autant que possible le goût des choses de l’Espagne, en les expliquant de son mieux ». […] Vrais ou faux, les « dévots » lui étaient suspects de vouloir lui imposer une autre volonté que la sienne, peut-être même, comme les protestants jadis, de prétendre former un parti, un État dans l’État. […] Mais les libertins en forment un troisième, et Molière en est le plus illustre représentant.
, et le poète nous apparaît enfin mûr, formé tout entier : il avait quarante-quatre ans. […] Essayez de lire une ode de Malherbe devant le peuple, devant une assemblée formée au hasard : sera-t-elle comprise ? […] Le poëte qu’on a vu apparaître déjà mur, tout formé, dans ces pleines années qui suivirent la paix de Vervins, pénétré d’un sentiment national si sain et si juste, et comme prédestiné de longue main à être le chantre des joies, des craintes, des satisfactions sensées et pacifiques de la France sous le plus réparateur des règnes, survivant à ce règne trop tôt interrompu, ne se démentit pas un seul jour ; il resta le poëte de la Régente, de la fidélité, de toutes les louables et patriotiques espérances.
On sent là un acteur inné, formé par la nature et ayant deviné l’expérience. […] La troisième armée, dite de réserve, dont les éléments existaient à peine, devait se former entre Genève et Dijon, et attendre là l’issue des premiers événements, prête à secourir Moreau s’il en avait besoin. […] La pratique avait singulièrement formé et étendu son coup d’œil militaire.
On sait que Rome formait par ses institutions des hommes tout entiers, précisément parce qu’elle les employait tout entiers, au forum, au sénat, dans les magistratures, dans les pontificats, dans les proconsulats, dans les lettres, à la guerre. […] Les Caton l’employaient à modérer le peuple ; les Gracques, formés par leur mère Cornélie, à le soulever ; Hortensius, à le charmer ; Catilina, à renverser la société romaine ; César, à corrompre la multitude afin de l’asservir par ses vices à son ambition naissante. […] Cet excès, dit-il, n’est pas conforme à la nature complexe d’un être formé d’âme et de corps, et qui a été doué d’un instinct de conservation.
La Grèce, l’Ionie, l’Assyrie, l’Égypte, la Perse, les bords du Pont-Euxin, la Scythie ou la Russie, quelques parties du littoral de l’Italie et de la Sicile forment la carte de ses voyages. […] Je n’en formais même pas le désir, et j’ai su m’abstenir d’une demande indiscrète. […] Ce projet formé, il résolut avant tout d’éprouver les oracles de la Grèce et de la Libye, en envoyant des députés aux plus célèbres, tels que ceux de Delphes, d’Abas en Phocide, de Dodone, d’Amphiaraüs, de Trophonius et des Branchides, dans le pays des Milésiens ; tous oracles renommés chez les Grecs et que Crésus désirait consulter.
Ces trois grands génies ont formé le cœur et l’esprit des hommes de ma génération. […] Dans ces conditions, attendu que ces six splendides physionomies poétiques ont chacune leur génie personnel, je trouve que mon poète est formé de l’agglomération de ces six génies. […] J’en formerai ton nom miraculeux, Shelley !
Ils renforçaient simplement chez les initiés l’esprit religieux en le doublant de cette satisfaction que les hommes ont toujours éprouvée à former de petites sociétés au sein de la grande, et à s’ériger en privilégiés par le fait d’une initiation tenue secrète. […] C’était de ne pas rêver pour l’élan mystique une propagation générale immédiate, évidemment impossible, mais de le communiquer, encore que déjà affaibli, à un petit nombre de privilégiés qui formeraient ensemble une société spirituelle ; les sociétés de ce genre pourraient essaimer ; chacune d’elles, par ceux de ses membres qui seraient exceptionnellement doués, donnerait naissance à une ou plusieurs autres ; ainsi se conserverait, ainsi se continuerait l’élan jusqu’au jour où un changement profond des conditions matérielles imposées à l’humanité par la nature permettrait, du côté spirituel, une transformation radicale. […] Elle l’eût vu se former par la compression de toutes les idées en une seule.
II Il l’était déjà par le discours qui précède l’Essai sur l’Homme : mais, ici, il ne se renfermera plus dans un jugement formé à loisir sur des œuvres passées et déjà classées : c’est à la critique actuelle, polémique, irritable, qu’il met la main. […] Mais un orage se forma : Napoléon était en Espagne, et de là il eut l’idée d’envoyer douze drapeaux conquis sur l’armée d’Estramadure au Corps législatif, comme un gage de son estime. […] Il ne pouvait s’empêcher pourtant de trouver, à travers son admiration, que, dans le potentat de génie, perçait toujours au fond le soldat qui trône, et il en revenait par comparaison dans son cœur à ses rêves de Louis XIV et du bon Henri, au souvenir de ces vieux rois qu’il disait formés d’un sang généreux et doux. […] M. de Chateaubriand, à l’époque où il forma, avec le duc de Richelieu, le premier ministère Villèle, avait voulu rétablir la Grande-Maîtrise de l’Université en faveur de M. de Fontanes. […] Tel était le plan que je m’étais formé.
Les premières origines du romantisme forment entre historiens de la littérature le sujet d’un vaste et complexe débat, qui ouvre des vues riches d’instruction et d’intérêt, mais qui n’admet pas de solution nette et tranchante. […] Philosophie moderne, socialisme, ou bien encore christianisme, protestantisme, encyclopédisme, positivisme, sont des objets trop compréhensifs pour n’être pas difficiles à définir ; encore se laissent-ils assez nettement définir pour que des esprits divers n’aient pas trop de peine à se former une idée commune, sinon de ce qu’ils contiennent, au moins de ce qu’ils excluent, de ce qui s’accorde ou ne s’accorde pas avec eux, de ce qui va dans leur sens général ou contre ce sens. […] Il s’agit seulement de savoir quelles sont ces inspirations, et si elles forment quelque chose d’un, si elles ont quelque marque commune. […] Ces leçons forment un livre délicieux qui a pour précédent dans notre littérature les Entretiens sur la pluralité des mondes, de Fontenelle, et qui évoque la merveilleuse fable dédiée à Mme de La Sablière, où La Fontaine, non content de mettre en pièces avec une maîtrise légère l’automatisme des bêtes, selon Descartes, propose sur la nature de l’âme animale une théorie dont le ravissant langage n’exclut pas la remarquable pertinence philosophique. […] Qu’on ne m’attribue pas cette idée barbare que la même musique pourrait naître partout, et qu’une race, un peuple, une communauté humaine formée par des liens de tradition ou de sang, n’aient pas leur chant propre, le chant de leur âme, de leur passé, de leurs rêves !
L’Académie française, qui venait de se former, choisit ses membres parmi les familiers de l’hôtel de Rambouillet. […] Des brebis et des chèvres en grand nombre se pressaient dans un parc, et il y avait alentour une enceinte formée de pierres bien affermies, de grands pins et de peupliers chevelus. […] Cependant, je me tourmentais encore, et je formais des souhaits sans raison. […] Les allusions à la favorite, Mme de Pompadour, formaient presque tout le fond de ce ballet. […] Et elle arrachait des planches pour en former un radeau.
C’est ce qui fait que les Jacobins forment un genre dans l’espèce homme. […] Par lui, pendant un tiers de siècle, les petits théâtres avaient fait rire chaque soir, du rire de la raison en gaieté, les descendants de ce « Français né malin » qui, au dire de Boileau, « forma le vaudeville d’un trait de la satire ». […] N’est-ce pas de ce qui manque au dicendi peritus, qu’est formé le peritus scribendi ? […] Un comité électoral où l’on s’occupe de former une liste de conciliation — c’est le rêve de tous les politiques des temps d’anarchie — amène sur la scène des originaux d’une autre catégorie. […] Enfants de la France, chères générations qui avez à venger les injures de votre pays, laissez les études qui ont formé vos pères aux douceurs de la vie civile et aux plaisirs délicats de l’esprit.
Former sur elles des projets de conquérant, ce serait un crime contre la société humaine et la vie divine du monde, crime aussi grand « que de tuer son père ou de brûler le Capitole », comme disait Marc-Aurèle. […] Il importera toujours que les écrivains flamands usent du français et se forment à notre culture, s’ils désirent être lus et connus ailleurs qu’à Bruges, Gand ou Anvers. […] De Harlem et d’Amsterdam, nous passons en Île de France : la région de Melun, Bellevue, les méandres de la Seine formeront le cadre de ces peintures nouvelles. […] Les années vécues hors de Belgique développèrent chez lui l’amour de la vie d’abord, puis d’un lyrisme plus large, plus ample ; il conçut ce poème assez long pour former tout un livre, La Chanson d’Ève. […] Elle est formée de l’énergie, des désirs, des pensées, des souffrances, des passions de nos frères, et nous devrions connaître ces passions puisqu’elles sont pareilles aux nôtres.
ou l’ascète douloureusement attentif à la fermentation du « mauvais levain mis dans l’homme dès l’heure qu’il est formé » ? […] Zola crée des simulacres géants, les images très claires qui se forment en Maupassant ne dessinent aucun monstre, laissent leur taille aux hommes et aux choses, mais éliminent, ordonnent, abrègent. […] Les mémoires authentiques, qui forment une littérature, finissent de pousser dans le sens du vrai. […] Il l’a traitée durant une année de cours, devant un auditoire de jeunes gens, de ceux à qui l’État donne mission professionnelle de former l’âme française. […] Mais que des autres à lui un lien d’obligation puisse se former, que ces objets de curiosité deviennent jamais objets de devoir, cette pensée lui répugne.
Il faut dire aussi que pendant longtemps on ignorait plus ou moins comment s’était formé et développé le mouvement, quelle part d’initiative revenait à chacun des membres de l’école, quelle cohésion existait entre eux : un certain nombre d’ouvrages publiés dans ces trois dernières années nous ont enfin livré, non des matériaux complets, mais quelques renseignements sur ces divers points. […] Dans la continuation du Laocoon, Lessing disait déjà : « Il semble que la nature n’ait pas seulement destiné la Musique et la Poésie à marcher ensemble, mais plutôt à se fondre en un art unique… Il y a certainement eu un temps où elles ne formaient qu’un seul et même art. […] Mais, à ce qu’il semble, un grand mouvement, comme fut par exemple le mouvement romantique de 1830, aurait beaucoup de peine à se former et à se propager de ville en ville, arrêté qu’il serait sans doute, en presque tous les endroits, par des courants d’idées opposées ou par des influences locales. […] Octave Feuillet forment une espèce de noyau autour duquel d’autres talents sont venus se ranger ; de même, pour MM. de Goncourt, Zola et Daudet. […] On est forcé de les mettre en lumière, puisqu’ils servent à éclairer le tempérament de l’auteur ; on ne pourrait raisonnablement s’attendre à les voir s’atténuer dans la suite, M. de Amicis est encore jeune et produira sans doute encore beaucoup ; mais il n’est pas probable que ses livres futurs modifieront sensiblement l’opinion qu’on a pu se former de lui jusqu’à ce jour.
Certes il est marqué par l’accent, et non par la quantité, et bien qu’il lui manque cet élément de force soutenue que constitue la terminaison dissyllabique du vers latin, et qu’il ait, dès lors, une tendance à former des couplets, la facilité à rimer qui résulte de ce changement n’est pas un mince avantage. […] Les modèles anglais forment une classe complètement à part. […] Thiodolf ne leva pas un instant les yeux vers le ciel, ni vers les arbres, en parcourant le sol semé de cosses, que formait la pelouse, mais ses yeux regardaient droit devant lui, vers le point qui formait le centre de la pelouse. […] Je ne saurais dire comment cela finira, mais ce que je puis vous dire, c’est que vous formez, vous élevez une race, qui en viendra un jour à étonner l’humanité par l’éducation que vous lui donnez ». […] Et l’armée qu’ils forment, tremble, et frissonne dans la rude étreinte de sa main comme un oiseau sous les filets.
Lord Chesterfield écrivait, en janvier 1750, à son fils, qu’il voulait former au parfait bon ton, et dont l’étoffe était si rebelle : Lorsque vous voyez qu’un homme est universellement reconnu pour agréable, bien élevé, aimable, en un mot pour un parfait gentilhomme, tel, par exemple, que le duc de Nivernais, examinez-le, suivez-le avec soin, remarquez de quel air il s’adresse à ses supérieurs, sur quel ton il est avec ses égaux et comment il traite ses inférieurs. […] Il la présida souvent, et il lui servait volontiers d’organe ou même d’avocat en Cour quand elle en avait besoin66 : il partageait cette charge flatteuse avec le maréchal de Richelieu et le prince de Beauvau, et formait un de ces liens précieux dont on ne pouvait se passer alors.
La Rochefoucauld, qui eut plus que personne qualité pour la juger, nous a dit déjà, et je répète ici ce passage trop essentiel au portrait de Mme de Longueville pour ne pas être rappelé : « Cette princesse avoit tous les avantages de l’esprit et de la beauté en si haut point et avec tant d’agrément, qu’il sembloit que la nature avoit pris plaisir de former en sa personne un ouvrage parfait et achevé ; mais ces belles qualités étoient moins brillantes, à cause d’une tache qui ne s’est jamais vue en une personne de ce mérite, qui est que, bien loin de donner la loi à ceux qui avoient une particulière adoration pour elle, elle se transformoit si fort dans leurs sentiments, qu’elle ne reconnoissoit plus les siens propres. » La Rochefoucauld ne put d’abord se plaindre de ce défaut, puisqu’il lui dut de la conduire. […] C’est qu’il y a vingt-cinq ans de différence dans l’âge de ces deux illustres personnes : Mme de La Vallière est une contemporaine exacte de La Bruyère, presque de Fénelon ; Mme de Longueville était formée entièrement avant Louis XIV.
Tantôt, comme dans l’institution du droit d’aînesse, il fallait former et désigner d’avance le commandant militaire auquel obéirait la bande, ou le chef civil qui conserverait le domaine, conduirait l’exploitation et soutiendrait la famille390 S’il y a des raisons valables pour légitimer la coutume, il y en a de supérieures pour consacrer la religion. […] En regard de la loi positive et de la pratique établie, on expose, avec des intentions visibles, les autres constitutions et les autres mœurs, despotisme, monarchie limitée, république, ici l’Église soumise à l’État, là-bas l’Église détachée de l’État, en tel pays des castes, dans tel autre la polygamie, et, de contrée à contrée, de siècle à siècle, la diversité, la contradiction, l’antagonisme de coutumes fondamentales qui, chacune chez elle, sont toutes également consacrées par la tradition et forment toutes légitimement le droit public.
Une ligue d’indignation, formée entre les grands d’Écosse contre elle et Bothwell, se noua contre les deux régicides. […] Ils se jetèrent à ses pieds, l’entraînèrent dans leurs montagnes, levèrent leurs vassaux catholiques, lui formèrent une armée, révoquèrent son abdication, combattirent sous ses yeux pour sa cause, à Longside, contre les troupes de Murray, et furent vaincus une seconde fois.
Mais jusqu’à ce qu’on ait formé sa croyance, il faut, pour le lieu et le pays où l’on vit, adopter une conduite provisoire, afin d’éviter l’irrésolution et de vivre heureusement. […] Il regardait l’inconvénient d’être trop connu comme une distraction dangereuse au dessein qu’il avait formé, disait-il, de ne jamais sortir de lui-même que pour converser secrètement avec la nature, et de ne quitter la nature que pour rentrer en lui-même.
L’art, lorsqu’il l’aura tout à fait formé, le marquera quelquefois des signes de cette origine. […] Une légende formée en Crète, d’un germe de l’Osiris égyptien, personnifie ce supplice.
L’immortel Rousseau, dont le suffrage est d’un si grand poids, en matière de jugement, a formé, depuis, la même plainte. […] La Le Couvreur enterrée sur les bords de la Seine, & L’Olfids à Westminster à côté de Newton & des rois, forment un contraste singulier & caractérisent le génie des deux nations.
. — Ils avaient formé une société qui s’appelait des altérés.
Pourquoi ne pas supposer que ces hommes sages et, ce me semblea, exempts de passion, avaient à cœur en effet de maintenir en France la religion de nos pères, et qu’ils estimaient le rétablissement en question un contrepoids utile à cette confédération formée et à cette petite république protestante qui subsistait au sein de l’État ?
On aime aujourd’hui à revenir aux sources, et l’on se pique de former son jugement sur les pièces mêmes : il y aura toujours bien peu d’esprits, je le crois, qui prendront sérieusement cette peine, mais chacun aime du moins à se dire qu’il le peut.
Tant que d’autres esprits puissants et vigoureux, mais déjà en partie formés, imbus d’une forte éducation antérieure, nourris de la tradition et de la moelle des siècles passés, avaient pris du cartésianisme avec sobriété, à petites doses, en le combinant avec les autres éléments reçus, on n’avait eu que de ces résultats moyens, agréables, sans paradoxe, sans scandale, tels qu’on les rencontre chez Arnauld, chez Bossuet, chez Despréaux, chez La Bruyère ; mais quand le cartésianisme, je veux dire la méthode cartésienne, toute autorité étant mise de côté, présida dès l’origne à la formation et à la direction entière d’un esprit, on fut étonné du chemin qu’elle faisait faire en peu de temps sur toutes les routes.
Ce latinisme intime et si sensible de Bossuet dans sa parole française me paraît plus qu’un accident, qu’un trait curieux à noter ; c’est fondamental chez lui, c’est un caractère constant ; il nous en a avertis quand il a dit, dans ses Conseils pour former un orateur sacré : « On prend dans les écrits de toutes les langues le tour qui en est l’esprit, — surtout dans la latine dont le génie n’est pas éloigné de celui de la nôtre, ou plutôt qui est tout le même. » Il réintègre ainsi, par l’acception qu’il leur donne, quantité de mots dans leur pleine et première propriété et sincérité romaine ; il en renouvelle ainsi la saveur, la verdeur.
Le temps ne sait encor de quel nom te nommer ; Un long frémissement circule dans les mondes, Quand l’un d’eux a trouvé dans ses veines profondes Quelques lettres pour le former !
Dans le groupe d’hommes supérieurs ou distingués qui formaient son cortège, Frochot n’a rien qui le signale au regard, et il ne se remarque que par la profondeur et la fidélité de son attachement.
Les siècles en ce genre sont héritiers des siècles ; les générations partent du point où se sont arrêtées les générations précédentes, et les penseurs philosophes forment à travers les temps une chaîne d’idées que n’interrompt point la mort ; il n’en est pas de même de la poésie, elle peut atteindre du premier jet à un certain genre de beautés qui ne seront point surpassées, et tandis que dans les sciences progressives le dernier pas est le plus étonnant de tous, la puissance de l’imagination est d’autant plus vive que l’exercice de cette puissance est plus nouveau.
Il faut soutenir chaque absurdité dont est formée la longue chaîne qui conduit à la résolution coupable ; et le caractère resterait, s’il est possible, plus intact encore après des actions blâmables que la colère aurait inspirées, qu’après ces discours dans lesquels la bassesse ou la cruauté se distillent goutte à goutte avec une sorte d’art que l’on s’efforce de rendre ingénieux.
Ces groupes forment les chapitres d’un livre, les paragraphes d’un chapitre ou d’une courte composition.
Donc il ne la formera pas sur le goût d’un public ignorant et léger : il bravera, s’il le faut, le ridicule ; mais il écrira ce qu’il doit écrire, conformément aux grands modèles et au sentiment de son âme.
Les formés de la vie, et l’activité de la vie, c’est cela que l’artiste doit s’attacher à rendre : plus ces formes auront de particularité, plus cette activité sera intense, et plus il y aura de beauté dans l’être.
Il donne ses études sur les individus pour une « série d’expériences » qui forment « un long cours de physiologie morale ».
Là même où domine l’idée, où la vérité plus que la beauté a été l’objet de l’écrivain, l’impression et l’interprétation personnelle sont à leur place : tout le monde ne voit pas tout ; les œuvres fortes ne se livrent qu’aux forts esprits ; et l’on se propose précisément, par l’exercice dont nous parlons, de former chez les jeunes gens une habitude d’aller au-delà du sens grossier que nul ne manque d’apercevoir, et un art de rassembler — dirai-je de mobiliser rapidement toutes leurs facultés, pour arracher au texte le plus possible de son secret.
Il est certain que la fin du premier vers et tout le second forment une cheville ou que, tout au moins, si le poète avait écrit en prose, il n’aurait guère senti le besoin d’apostropher ici son cœur.
Les femmes aiment la spiritualité, la douceur ; elles n’ont pas besoin de revêtir leurs émotions d’un caractère exceptionnel, leur cœur étant très accessible à la poésie des sentiments communs ; par là et par d’autres traits, il semble que l’âme du grand poète, qui avait exprimé ces choses avec tant de puissance, appartienne elle-même au type féminin, si l’on ajoute à ce type la force qui s’y joint pour former la figure de l’ange.
Le choral primitif suppose non seulement un groupe d’hommes, mais un groupe d’hommes qui concertent leurs voix ainsi que leurs gestes, qui forment une même masse dansante41… » Pour établir que les éléments communaux prédominent dans la poésie primitive, M.
Après quelques velléités de résistance, l’individu ne peut manquer de se soumettre, « Pour amener l’individu à se soumettre de son plein gré, il n’est nécessaire de recourir à aucun artifice ; il suffit de lui faire prendre conscience de son état de dépendance et d’infériorité naturelles — qu’il s’en fasse par la religion une représentation sensible et symbolique ou qu’il arrive à s’en former par la science une notion adéquate et définie116. » La science sociologique assumera donc la même fonction qu’ont assumée jusqu’ici les religions ; elle courbera l’individu devant la société.
Mademoiselle Hermine de Sternay formera, du reste, avec Jacques Vignot, un couple assorti ; tous deux sont de même trempe et de même métal.
Une certaine fraîcheur, que les couleurs empruntées ne sauraient imiter, formait son teint.
L’administration civile de l’armée, les divers corps de service qui dépendaient de l’Intendance générale, passés en revue à Wilna par le maréchal Berthier, formaient déjà toute une armée qui, chargée de pourvoir à l’autre, ne savait où se pourvoir elle-même.
Cyr, & c’est là qu’elle fit connoissance avec l’abbé de Fénélon : c’est là que se formèrent leurs liaisons innocentes, leur commerce de dévotion & de spiritualité si fatal à tous deux.
Il étoit attentif à lui former des élèves, & même il employoit dans cette vue une partie de son bien.
Dans le sens propre, il désigne cette portion de l’encéphale qui remplit la plus grande partie de la cavité crânienne, et qui est distincte du cervelet, de la moelle allongée et de ses annexes ; il est le renflement le plus considérable formé par l’axe médullo-encéphalique : sa forme est celle d’un ovoïde irrégulier, plus renflé vers le milieu de sa longueur, et il se compose de deux moitiés désignées sous le nom d’hémisphères, réunies entre elles par un noyau central que l’on appelle le corps calleux.
L’organe de l’amour des enfants ou philogéniture, placé par Gall à l’extrémité postérieure des hémisphères cérébraux, formait, suivant lui une saillie très-frappante chez les femmes et chez les femelles des animaux.
Si j’avais eu à former la place de Louis XV où elle est, je me serais bien gardé d’abattre la forêt.
III Mais la manière dont doivent être formées ces séries diffère selon les cas.
Au lieu des cinq actes qui sont le terme des plus longues comédies, celle-ci en a seize, qui sont des chapitres… Malgré l’ancienneté des noms qui forment son titre, monsieur Adam et madame Ève ne sont pas les personnages historiques de ces noms vieux comme l’univers.
Cette introduction n’était que cette élimination même ; elle exprimait la nécessité où se trouve l’intelligence humaine d’étudier la réalité partie par partie, impuissante qu’elle est à former tout d’un coup une conception à la fois synthétique et analytique de l’ensemble.
Ou mieux, pensons à ce jouet d’enfant formé de tiges articulées le long desquelles sont disposés des soldats de bois.
Ils débrouillent ce chaos, et d’un monceau de matériaux entassés, ils forment un édifice.
Enfant, son esprit fut formé par des émigrés, MM. de Montfort, Rousselot, Xavier de Maistre ; son père savait par cœur Molière, son oncle mourut en lisant Béranger. […] Quelques-uns discutent avec chaleur, d’autres engagent des paris ; mais la majorité est formée de ces gens qui regardent tout l’univers et tout ce qui s’y passe en se fourrant les doigts dans le nez. […] On recommandait aux gendarmes ces missionnaires suspects de l’Occident, et on en renvoyait d’autres se former à la même école. […] Les deux grandes écoles intellectuelles qui se disputent la Russie contemporaine et y tiennent lieu de partis politiques se formaient à cette époque et partageaient les esprits. […] Comme la plupart de ses contemporains, il alla achever de se former en Allemagne ; nous le trouvons en 1838 à Berlin, digérant la philosophie de Kant et de Hegel.
On ne se dit pas : Nous allons former une école ; mais il y a, fatalement, convergence d’individualités, d’où manifestation collective. […] Toutefois Dieu restait l’Idée : l’Idée de ces Idées qui formaient la Beauté. […] Il y a un poète, un seul formé de tous les poètes : il y a le poète ! […] Un courant se forma qui devint à la longue l’unanime opposition, la lassitude intransigeante que vous constatez à présent. […] Car, enfin, on ne saurait soutenir qu’il y ait dans la langue française une quantité syllabique comparable à celle dont se formaient le vers grec et le vers latin, et dont se forment, incomplètement d’ailleurs, le vers anglais et le vers allemand !
Puissent l’importance du sujet et les forces de celui qui l’aborde ne pas former un contraste choquant dans un portrait où tout contraste ; dans l’histoire d’un homme de lettres qui connut le monde et la cour, d’un ornement de son siècle qui fut protégé, d’un philosophe qui fut comédien ! […] C’est à cette époque que Racine, qui avait formé le projet de se vouer au théâtre, arriva d’Uzès, où ses parents l’avaient envoyé pour embrasser l’état ecclésiastique. […] Non content de lui donner lui-même les leçons de cet art dans lequel Baron excella depuis, il chercha encore à former son jeune cœur à la vertu, par une sage direction et par de bons exemples. […] Les deux premiers actes de Mélicerte, que Molière n’acheva jamais, et la Pastorale comique, dont il brûla depuis le manuscrit, formèrent le contingent qu’il avait à fournir en cette occasion. […] Elle était d’un caractère altier et dominant, et la crainte de trouver un maître dans un mari l’avait jusque-là détournée de former une union.
L’intelligence de Griffin a été formée par les images et les concerts de nos plaines et de nos collines. […] Plotin parle quelque part de ceux qui voient les yeux formés, μύσαντα ὄψίν, c’est-à-dire avec les yeux de l’âme. […] Là, les feuillages sans cesse variés, les jeux d’ombre et de lumière toujours nouveaux forment une chose vivante en perpétuel devenir ; on n’en pourra jamais consommer l’attrait. […] Dans La Belle Thérence, par exemple, l’élément fixe, formé de cinq syllabes, est au premier hémistiche. […] Si l’on descend plus avant dans l’analyse du sujet ainsi porté par ce souffle universel, ce vouloir inconscient, cette tendance à plus de vie, on s’aperçoit que l’exaltation est formée d’une infinité d’aspirations — comme la vague d’une multitude de gouttelettes — ou de puissances qui, pour employer le langage d’Aristote, s’efforcent à l’acte.
Et j’hésiterais, moi qui l’aime de toute la force de mon âme, et qui suis, en quelque manière, responsable de son infortune ; car c’est moi qui ai formé dans mon ventre ce corps manqué dont il souffrira tant ! […] » Seulement nous nous demandons pourquoi, dans quel dessein, le Dieu de Claude a pu former des créatures aussi inexpiablement mauvaises, aussi évidemment damnées d’avance, que Césarine. […] — que, entre le mariage et la séduction, votre bienfaiteur optera pour le mariage, tout cela, si je ne m’abuse, correspond peut-être insuffisamment à l’idée que nous pouvons nous former d’un honnête homme Pensez-vous comme moi ? […] Le drame individuel et le drame européen y sont inséparables, et tous deux sont pour ainsi dire formés de la même trame d’événements. […] Et il formera, avec sa fille et son gendre, un joli trio de pourritures… Donc, Pierre Martigny se laissera séduire par Yoyo, comme une fille des champs.
Les Anglais discutent sur d’imperceptibles détails, et les questions sur lesquelles ils se divisent sont quelquefois tellement subtiles, qu’on peut dire sans paradoxe que chez d’autres peuples elles formeraient au contraire des points de contact. […] Lorsque la conquête eut lieu, l’enfant était formé ; Guillaume et ses Normands pratiquèrent l’accouchement par le forceps et coupèrent le cordon ombilical. […] L’imagination populaire s’est formé des peintures assez exactes des autres grands types humains, mais on peut dire hardiment que, sans le vouloir et le savoir, elle a calomnié celui de l’homme de génie. […] C’est en vain que vous lui présenteriez les images les plus vivantes, celle qu’elle s’est formée lui semble, paraît-il, plus vénérable. […] Il sortait d’une famille appartenant à cette classe si nombreuse de la gentry qui a formé de tout temps la grande force de résistance, le lest politique de la solide Angleterre.
Il aime surtout une vaste salle de verdure, formée par de vieux frênes, aux environs de Francfort. « Oh ! […] Il en est une, peut-être, qui peut figurer ici sans former un contraste avec elles. […] Il est pressé de souvenirs et il n’a plus le courage de former des espérances. […] Manfred, Lara, le Corsaire, forment donc une trilogie qui, avec quelques variantes, offre un personnage unique tenant plus du démon que de l’homme. […] Si l’on vous disait : il est un jeune homme, heureusement doué par la nature et formé par l’éducation ; il a ce qu’on appelle du talent, etc., etc.
La mystique nous montre, dans le paradis, d’étranges figures d’aigles ou de roses tournantes formées d’une multitude harmonique de bienheureux. […] Formée d’idiomes méridionaux refroidis, elle a un centre ardent, une surface polie et tranquille. […] Dans l’œuvre même des deux célèbres frères si brillante, formée de joyaux si splendides, il éclate comme un pur diamant noir. […] Ainsi se trouve réalisée la nécessité mère, selon moi, de toute œuvre d’art : une vue d’ensemble formée de pièces méticuleuses. […] Ces livres de critique qui forment le faisceau d’une multitude de feuilletons épars complètent une figure curieuse et malheureusement encore peu connue.
Je sais bien que le désarmement serait une folie de la part du peuple qui le tenterait actuellement, mais tant que nous vivrons dans cet état de paix armée marquée par la pince de Bismarck, il vous sera impossible de former des démocraties supérieures, saines et ordonnées, il vous sera impossible de voir apparaître ces races d’or dont nous souhaitons tous la future éclosion. […] Deux camps ennemis se formeraient bientôt. […] On devra lire les réflexions de Proudhon sur la guerre, sur la révolution, sur la stratégie, sur l’esprit voltairien, sur la tyrannie, toutes ces idées accidentelles qui forment pourtant le meilleur de ce livre et qui lui confèrent un grand prix. […] L’Écriture a formé les chrétiens.
Cependant, il formait encore des projets, dont celui de rédiger enfin ses Mémoires. […] J’accomplis méthodiquement et sagement ma tournée, mais il était dit que je ne franchirais ni la porte de Mme de Loynes, ni, cette fois, celle de l’Académie, car la mort subite de Mme de Loynes empêcha le projet qu’avait formé Albert Vandal de se réaliser. […] Du Golfe Persique et de l’Inde il avait rapporté de précieux spécimens et il s’était formé une importante collection personnelle qu’il étiquetait et classait avec amour. […] Elles sont soigneusement arrosées, et si l’eau qu’on leur distribue n’est pas puisée à l’antique puits qu’elles environnent et fleurissent, cette eau n’entretient pas moins en fraîcheur la petite académie qu’elles forment et qui tient séance dans la cour de l’Institut.
Renan est le seul, parmi ces très grands, qui ait commencé par quelque chose de plus profond que cette religiosité où se complaisaient les hommes de 1830 ; le seul qui soit né et qui ait été formé dans l’ombre même du sanctuaire, qui ait cru d’abord avec tendresse et larmes, qui ait été clerc tonsuré et qui ait porté la robe du prêtre. […] Puis elles se rapprochent entre elles, forment des rondes plus serrées, et tourbillonnent alors comme tourbillonnent les flocons de neige fouettés par le vent. […] Mais les deux derniers actes forment un drame d’une rare noirceur, et que nous ne sentons venir qu’avec une sorte de pénible appréhension. […] Ce nom, ils s’en forment une idée à quoi rien ne répond plus dans la réalité ; et ils font d’autant plus frénétiquement les gestes de la vie aristocratique qu’ils ne peuvent plus en accomplir les actions. […] Et l’idée qu’il se formait du rôle de la noblesse s’assouplit et s’humanise… « Vous devenez républicain », lui dit Hélène.
Il n’appartenait à aucun parti et entendait bien n’appartenir jamais qu’à celui qui se serait formé autour de lui. […] On était tout naturellement porté, malgré les vœux formés et exprimés par Célestin, vers la jeunesse et la verdeur. […] Ces lettres décrétales forment environ trois cents chapitres du Corpus juris canonici, et les lettres particulières (sur tous sujets) qu’on a conservées de lui sont au nombre de six mille. […] On peut dire qu’il se forma ainsi une nouvelle classe, une classe de gens qui n’étaient pas nobles ; mais qui avaient des prétentions à la noblesse. […] Il y avait deux noblesses, l’ancienne et la nouvelle ; mais ni l’une ni l’autre ne formait un ordre particulier dans l’État.
Quelques mètres plus loin, le chemin formait un coude, et, grâce au brouillard du bas, on aurait pu se croire à l’extrême bord de quelque précipice Un ordre fut donné. […] C’est un recueil de nouvelles, d’impressions, de notes de voyage dont : Pasquala Ivanovitch, le Voyage de quatre officiers de l’escadre internationale au Monténégro et Suleïma, forment l’ensemble. […] C’est l’histoire charmante d’un brave savant qui, au bout de sa vie, s’est mis à écrire le récit de son unique passion ; passion chaste s’il en fût, et dont les étapes forment une suite d’idylles au sein de Paris. […] Il s’était formé sur les choses de ce monde, et particulièrement sur les femmes, qu’il méprisait, quelques idées assez médiocres qu’il érigeait en principes et en systèmes, simplement parce qu’elles avaient l’honneur de lui appartenir. — « J’ai pour principe… Il entre dans mes principes… J’ai pour système… Voilà mon système ! […] On connaît maintenant la femme qui donna le jour à Mirabeau ; on sait à quelle guerre domestique le tribun fut mêlé, on pourrait dire dès son enfance, et sous quelles influences se formèrent son caractère et son esprit.
Et c’est la grâce de ces contes, où l’anecdote et le décor, la fantaisie et la pensée forment une harmonie parfaite et ont tant de vérité attrayante et persuasive. […] Et, plus encore qu’étudiées, soumises au goût le plus parfait, le mieux formé à l’intelligence de l’art, de la pensée et de la rêverie française. […] Le vieux catholicisme et la jeune philosophie, la féodalité mourante et la liberté naissante ont contribué à les former avec leurs piquants contrastes et leur riche diversité. […] Léonard Clan, formé par d’autres pédagogues, savez-vous ce qu’il devenait ? […] Et sans doute l’on ne conclura pas que l’enseignement des Jésuites n’est destiné qu’à former des notaires bedonnants et rustauds, dont les fils ont la rougeole : on ne conclura pas davantage que l’enseignement des Jésuites forme des rêveurs découragés et malheureux.
Certaines laideurs sont nécessaires et forment pour l’œuvre d’art comme une condition de la vie. […] De là la supériorité du mouvement curviligne ; la ligne courbe, formée d’une infinité de lignes qui se fondent sans interruption l’une dans l’autre, est comme le schema d’un mouvement dans lequel très peu de force se perd, où aucun effort inutile n’est demandé à aucun muscle. […] Nous croyons que sa supériorité, admise sans raisonnement par les poètes, peut se démontrer d’après les deux lois suivantes : 1º Toute succession de syllabes, surtout lorsqu’elle excède le nombre huit, ne peut être dénombrée facilement par l’oreille si elle n’est pas divisée au moins en deux parties, de manière à former une phrase musicale d’au moins deux mesures. […] L’hiatus sera d’autant plus sensible que chacune des voyelles portera un accent tonique plus caractérisé : au contraire, si la première est plus faiblement accentuée, elle tendra à se fondre dans l’autre et à former un son composé, une sorte de diphtongue où tout hiatus disparaît : c’est pour cela que la rencontre des voyelles à l’intérieur des mots n’offre en général rien de choquant pour l’oreille : suavité, jouet, poète, Danaé, etc. […] La voyelle émise, avec l’accord qu’elle produit, l’esprit reste sur une idée de ressemblance plutôt que de différence ; lorsque la voyelle est longue ou suivie de consonnes sonores, la différence même tend à disparaître : c’est plus qu’il n’en faut pour constituer le vers. — Quant à la rime proprement « riche » ou superflue, formée par la double consonance de deux syllabes à la fois, elle vaut précisément parce qu’elle n’est et ne sera jamais trop fréquente.
Molière, content des comédiens qu’il a formés, se rapproche de la capitale ; il passe le carnaval à Grenoble, l’été à Rouen ; de-là il fait de fréquents voyages à Paris, et, grâce à la protection du Prince de Conti, qui lui valut celle de Monsieur, il obtint la permission de s’y établir ; ce fut le 23 octobre, que sa troupe joua la tragédie de Nicomède devant la Cour, sur un théâtre élevé dans la salle des gardes du Vieux-Louvre10. […] Les scènes n’en sont pas détachées, bien s’en faut, mais les divers moyens que Mascarille imagine forment chacun une petite pièce, qui n’a aucun rapport avec celle qui la précède et celle qui la suit ; mais elles tendent toutes au même but, toutes font ressortir les caractères du Fourbe et de l’Étourdi. […] Une stature colossale interdit à l’esprit, comme au corps, les mouvements prestes ; ils font plutôt souffrir qu’ils ne font rire : la nature avait formé Desessard exprès pour peindre les lourds Midas, et tous les ridicules de l’épaisse finance. […] Tant de bons procédés auraient dû attacher pour toujours l’auteur des Frères ennemis à Molière ; et l’acteur, dont celui-ci va former les mœurs et les talents, n’aurait pu que rendre cette union plus durable, plus utile. […] Thomas Corneille la mit en vers après la mort de l’auteur, et la fit donner sur le théâtre de Guénégaud, par la troupe formée en 1673, des débris de celle du Marais, et de celle du Palais-Royal ; alors la pièce attira un concours prodigieux de spectateurs ; les censeurs les plus austères applaudirent aux mêmes choses qui avaient excité leur indignation : la poésie de Thomas Corneille leur prêta des charmes, me dira-t-on ?
III Ce peuple compte, comme la France, environ quarante millions d’habitants ; originairement, il a été formé par la race des Tartares civilisés, des mahométans sous les califes. […] Il est de trente-huit perles orientales, de vingt-trois carats pièce, toutes bien formées, de même eau et de même grosseur. […] Les deux pendants d’oreilles, qu’elle me fit voir aussi, sont deux rubis balais, cabochons, mal formés, mais nets et de bonne couleur, qui pèsent deux gros et demi chacun.
En montant au-dessus de la montagne, à l’endroit de cette grande ouverture, on voit, par un soupirail qu’a formé la nature, l’eau dans le sein de la montagne, semblable à un lac dormant, qui n’a point de fond: car en jetant des pierres dedans, on entend le retentissement du son répercuté dans les concavités avec un fort grand bruit. […] La princesse, désespérée de ce qu’il ne servait pas sa fureur sur-le-champ, conjura le lendemain avec une personne de qualité, qu’elle savait dans ses intérêts, pour faire assassiner Janikan ; mais celui-ci, qui avait déjà semé d’espions la cour et la ville, découvrit la conjuration avant qu’elle fût formée. […] Ce fleuve a cela de particulier, que, lorsque l’on l’arrête tout entier dans un endroit, il s’en échappe encore assez d’eau par la filtration pour former un grand fleuve.
L’esprit de société se forma de ce rapprochement des deux classes, et du mélange des deux esprits propres à chacune. […] Ces traditions sans origine connue, qui se transmettent de livre en livre, forment, à côté de l’histoire authentique, une sorte d’histoire légendaire qui l’explique et la confirme. […] La grandeur personnelle du prince, celle que tiraient de lui, non seulement la royauté d’alors, mais l’idée même du pouvoir suprême parmi les hommes, servirent à Bossuet à se former des images plus hautes de la grandeur de Dieu.
Ce sont les règles qui ont formé les modèles ! […] Il s’est formé, dans les derniers temps, comme une pénultième ramification du vieux tronc classique, ou mieux comme une de ces excroissances, un de ces polypes que développe la décrépitude et qui sont bien plus un signe de décomposition qu’une preuve de vie, il s’est formé une singulière école de poésie dramatique.
Ces essais formaient comme une suite logique des études de Taine, et, malgré ce redoutable voisinage, ils furent bien accueillis. […] L’idée générale n’est que la résultante fortuite des groupements d’images qui forment des images composites ; de même si l’on photographie tous les membres d’une même famille, on peut obtenir, en superposant les clichés obtenus, une photographie type. […] Burnouf l’ont établi, reposent sur des inspirations analogues et que le bouddhisme, le brahmanisme, l’hermétisme, les doctrines de Pythagore et probablement le christianisme des très grands esprits qui s’en tiennent à cette explication du monde, forment une suite étonnante d’une même idée.
Paul Bourget ou à M. d’Annunzio ; sa thèse est hardie, car il essaye de mettre aux prises une âme noble avec un sacrifice trop beau, trop haut pour durer ; il s’agit d’un mari à qui sa femme avoue un adultère consommé ; le mari pardonne et se heurte ensuite à tout l’impossible d’une situation fausse ; de là des scènes d’où le talent de l’auteur a su faire jaillir l’angoisse et la pitié ; les pages où se trouvent les aveux de la femme, celles où le mari use de clémence forment la partie capitale du livre. […] Et plus loin : Une Compagnie formée exclusivement de grands hommes serait peu nombreuse et semblerait triste. […] Les Trophées forment pour ainsi dire, par leurs divisions, une sorte de petite Légende des Siècles. […] Lui, le baron, parlant avec un entrain juvénile et me faisant boire, au dessert, un verre, de son vin de Cestas, pour trinquer à ses quatre-vingts où quatre-vingt-un ans, formait un étonnant contraste avec l’aspect glacial de la baronne. […] Alors même que paraissaient les chefs-d’œuvre datés de Guernesey, une école se formait, composée de ses admirateurs et de ses disciples, qui affectait de vouloir continuer la tradition du lyrisme dont il restait le suprême pontife ; mais que ces descendants illusoires étaient déjà loin de lui, et que la froide source du Permesse ressemblait peu au flot ardent et amer de l’Océan !
Je prends les années déjà lointaines de 1846 et 1847, parce qu’elles marquent l’apogée d’influence et de gloire où s’éleva le nom de George Sand, une gloire formée dans la tempête. […] Elle s’est formée au milieu des luttes que le sang du peuple a soulevées dans son cœur et dans sa vie, « et si plus tard certains livres firent de l’effet sur elle, c’est que leurs tendances ne faisaient que confirmer et consacrer les siennes ». […] Ajoutez à cela qu’elle se trouve, presque à son coup d’essai et par le miracle d’une nature prodigue, en possession d’un style merveilleux, qui semble fait tout exprès et comme préparé pour recevoir son ardente pensée, qui s’était formé tout seul et sans conseils, depuis la longue série des petits cahiers consacrés à l’épopée de Corambé jusqu’au premier roman qu’elle donnera au public. […] Ce n’est que beaucoup plus tard que l’école, s’étant formée, attribua au chef un système absolu qui n’avait été d’abord qu’une préférence de goût. […] Cependant, dès le début, sa langue était formée, déjà ample et souple, pleine de mouvement et de feu.
Le diable était là, visible pour lui seul, tout vert, avec ses cornes et ses ailes de chauve-souris larges étendues, qui formaient comme un paravent noir aux trois conseillers de noir vêtus, fourrés et long cravatés de blanc. […] Il y a aussi dans l’assez gros volume que forment ces Nuits qui tiendraient plutôt, pour la variété, le pittoresque et le haut amusement des Mille et une Nuits que des Nuits d’Young plus haut rappelées, — des interludes de campagne et de nature : La Vallée de Llangollen, par exemple Aux champs et aux prés encore ! […] J’en citerai les tout derniers vers qui forment comme la morale horacienne plus encore qu’anacréontique de l’excellent poète, du vrai « Sage » et du cher ami, Gabriel Vicaire : Contemple, tout ravie La bataille de la vie, Accueille avec un bouquet Le vainqueur, s’il est coquet, Vide devant sa bannière Ta corbeille printanière Et tant pis pour les blessés Qui râlent dans les fossés ! […] Je pris ensuite le parti de rire de ces choses, et formai même, de ces témoignages d’art enfantin anglais, une intéressante collection dans son genre, que j’ai longtemps conservée. […] À Londres et dans les grandes villes, le repas de midi, qui formait ici le principal repas, est le moins important de tous ; il est appelé lunch.
On sépare ce qui semble former les extrêmes de la figure et de la couleur, sans s’inquiéter des familles de peuples qui échappent à ces grandes classes et que l’on a nommées, tantôt races scythiques, tantôt races allophyliques. […] Dans ce tableau que nous avons eu déjà l’occasion de signaler ailleurs, Ovide montre le sol se soulevant en forme de colline par la force des vapeurs intérieurement comprimées, comme une vessie gonflée, ou comme une outre formée de la peau d’un chevreau. » XVII Pline l’Ancien décrit en prose la nature ; les Indes orientales et la Perse offrent des modèles de belles descriptions.
Elle s’est formée elle-même, hors de l’influence d’une mère ; et notez que Léonor et Ansélique sont orphelines : leur éducation les a donc faites fortes plutôt que tendres391. […] A la mort de celui-ci, il passa à l’Hôtel de Bourgogne ; puis il fut de la troupe formée, en 1680, par la réunion des trois troupes de l’Hôtel, du Palais-Royal et du Marais, réunion d’où date la Comédie-Française.
Tout ce qui est circonstance, réalité, forme visible de l’être s’efface : chaque Méditation n’est guère qu’un soupir, et Lamartine gagne cette gageure impossible d’établir par des mots entre son lecteur inconnu et lui ces intimes communications qui se forment dans la vie réelle par le silence entre deux âmes sœurs. […] Puis il lâcha de loin en loin quelques pièces, qui formèrent avec trois ou quatre autres le recueil posthume des Destinées (1864) : en tout, une trentaine de poèmes, qui tiennent en un petit volume.
Le génie de Pascal se forma d’abord, comme celui de Descartes, seul et sans secours. […] Il faut que j’édifie moi-même l’œuvre de ma sagesse ; il faut qu’à la lueur de ces flambeaux qui brillent si loin de moi, je me guide dans un monde plein de ténèbres, moi-même formé de ténèbres et d’incertitudes, et que je me gouverne par des vérités provisoires au milieu des autres et au milieu de moi.
Rien de plus proche et de plus semblable que la parole et la musique, cette dernière étant née de l’une, et formée, selon l’essai de Spencer, de tous les éléments de timbre, de rhythme, d’accent et d’intonation qui différencient la parole émue de la parole calme. […] Et comme celle-ci, formée d’éléments originairement semblables, les associe en les différenciant et les subordonnant, l’esthétique de Wagner substitue à des ensembles relativement homogènes, la musique, la poésie, la mimique, le spectacle purs, une œuvre plus hétérogène, dans laquelle les traits propres de ces trois arts, bien qu’harmonieusement fondus, multiplient les parties, étendent et compliquent l’émotion produite.
C’est la région des vérités abstraites, des lois, des formules, accessible seulement à l’esprit pur, le domaine mystérieux de l’impalpable et de l’invisible où règnent les principes de toutes choses comme les Mères du second Faust « qui trônent dans l’infini, éternellement solitaires, la tête ceinte des images de la vie, actives, mais sans vie. » Tous deux créateurs à leur manière : l’un parce qu’il sait manier les couleurs, les mots, les formés pittoresques qui donnent aux idées le vêtement et la vie ; l’autre parce qu’il croit avoir saisi les ressorts cachés qui font mouvoir le monde, les formules fécondes qui traduisent les lois de l’univers et d’où le flot des phénomènes s’échappe comme d’une source indéfectible. […] Comme le résultat inévitable du progrès dans toute science c’est d’y produire la division et la subdivision du travail, on peut bien prévoir qu’une psychologie étendue, vraiment complète se scindera en plusieurs branches, qu’il se formera en elle des sous-sciences qui pourront devenir un objet spécial d’études.
Sous ce rapport, la psychologie ressemble à la biologie, qui considère chaque fonction de l’être vivant comme conditionnée par le tout et solidaire des autres, ou le tout comme réagissant dans chaque fonction, de manière à former une sorte de cercle vital. […] Ce quelque chose, est-ce vraiment une chose, un objet venant apparaître après les autres pour former un nouveau dessin interne ?
Il porte une épingle de cravate, formée de deux cœurs, reliés par une croix : l’épingle de la haute gomme du faubourg Saint-Germain. […] Samedi 30 décembre Au milieu de la gaieté et du tapage des conversations, Nittis adossé à son bureau du fond de l’atelier, me dit dans sa jolie langue enfantine, sur une note mélancolique : « Oh, quand on a passé la première jeunesse… quand il n’y a plus dans les veines, un certain bouillonnement du sang… la vie, ce n’est plus guère attachant… et moi encore tout enfant — j’avais dix ans — j’ai entendu : « Il y a un « monsieur qui s’est tué… » c’était de mon père qu’il s’agissait… vous concevez la vie fermée que ça m’a fait là-bas… deuil et solitude… et des notions tout élémentaires… lire et écrire : ç’a été tout… le reste c’est moi qui me le suis donné… je me suis entièrement formé par la réflexion solitaire… cela m’a laissé une naïveté… et vous concevez que dans la société actuelle cette naïveté… » Nittis ne finit pas sa phrase.
Elles sont également propres à former le goût & les mœurs. […] Un ton de sentiment très-bien soutenu, de la douceur & du naturel, de la naïveté même, & cet air de facilité qui convient au genre, forment le caractère de ses fables.
Que si, au contraire, les deux images se forment ensemble, la continuité de l’illusion se comprend mieux, mais le rejet de l’une d’elles dans le passé appelle plus impérieusement encore une explication. […] Mais cette situation, même avant d’être arrivée à son terme, nous semble devoir former un tout, étant découpée dans la continuité de notre expérience par l’intérêt du moment.
Amaury s’enchaîne aux projets du marquis, sans espoir ni enthousiasme ; car il a cet instinct de jeune homme qui se refuse aux espérances des vieillards ; M. de Couaën n’est point un vieillard ; mais les plis de son âme se sont formés dans le monde que la Révolution vient de clore ; il appartient à un passé qui, tout récent encore, n’en est pas moins une antiquité. […] Tout à son affection, Amaury oublie les premiers engagements qu’il a formés et suit à Paris M. et Mme de Couaën. […] On peut se décider dogmatiquement pour le symbole contre le miracle, et reconnaître toutefois que la croyance au miracle entoure le catholique spirituel d’une atmosphère particulière dont, sous l’empire d’une autre croyance, on a peine à se former l’idée. […] De ce qu’il y a certaine, conceptions que l’individu isolé ne formerait pas, nous n’avons pas voulu conclure que l’intelligence de l’humanité soit substantiellement autre chose que le résultat et la somme des intelligences de tous. […] Car l’individu trouve ainsi un appui pour sa conscience dans une conscience générale qu’il a concouru à former, et dont les inimitables accents ne fussent jamais sortis de son sein si articulés ni si solennels.
Toute cette première partie de la carrière parlementaire et politique de Jeannin est pour nous d’un intérêt secondaire, et a été éclipsée par la seconde moitié, dans laquelle il appartient non plus à sa province, mais aux affaires de la France et de l’Europe : il n’y arriva cependant que formé par ce long apprentissage.
Semblable à ce météore terrible qui, formé de mille courants divers, menace du haut de la nue les sommets escarpés et semble être destiné par la nature à maintenir l’égalité physique sur le globe, la foudre révolutionnaire qui est en vos mains, et que dirige habilement votre génie, continuera de renverser les trônes, fera tomber les têtes superbes qui voudraient s’élever au-dessus du niveau que vous avez tracé ; elle établira l’égalité politique et (l’égalité) morale, qui sont les bases de notre liberté sainte… Voilà jusqu’où l’exaltation de la peur et l’espoir de se faire pardonner de Couthon, Saint-Just et consorts, pouvaient conduire le ci-devant médecin de la reine, un écrivain académique élégant.
Chacun s’empresse d’en être ; nous avons la composition de cette brillante armée, dont la tête est formée de princes et des plus beaux noms de noblesse et de guerre.
Molé concevait et représentait en homme formé à la grande école.
Il a eu ce beau cadre pour carrière ; il s’y forma tout entier.
Ils sont d’une tout autre étoffe, d’une tout autre provenance que tant de contes imaginés et fabriqués depuis, à l’usage des petits êtres qu’on veut former, instruire, éduquer, édifier même, ou amuser de propos délibéré : Contes moraux, Contes philanthropiques et chrétiens, Contes humoristiques, etc.
L’idée que le ministre saxon s’est formée et qu’il veut nous donner du spirituel et pétulant abbé est faite pour surprendre un peu et paraîtra assurément exagérée.
La nature ne manque pas de faire naître dans tous les pays des esprits et des courages élevés, mais il faut lui aider à les former.
« Des chèvres, des canards, des poules et des paons forment à peu près tout le peuple de nos serviteurs : ou plutôt ils exigent des soins ; et des soins assidus, mais exempts d’inquiétude, s’accordent très-bien avec le paisible mouvement de nos journées. « Pour moi, je ne manque point d’occupations importantes ; tantôt je dirige l’eau dans le potager, tantôt j’écarte la neige qui embarrasserait les sentiers.
Le joli volume, avec ses élégies à la pauvre villageoise qui reviennent à des intervalles et comme à des nœuds égaux, avec les autres pièces noblement calmes et unies qui y sont entremêlées, me paraît exactement comparable à cette houlette pastorale dont il est dit dans l’églogue, Formosum paribus nodis atque ære, Menalca : De nœuds égaux formé, garni d’un bout de fer.
Cette certitude, cette confiance, si douce à la faiblesse, est souvent importune à la force ; la faiblesse se repose, la force s’enchaîne ; et dans la réunion des contrastes dont l’homme veut former son bonheur, plus la nature l’a fait pour régner, plus il aime à trouver d’obstacles : les femmes, au contraire, se défiant d’un empire sans fondement réel, cherchent un maître, et se plaisent à s’abandonner à sa protection ; c’est donc presque une conséquence de cet ordre fatal, que les femmes détachent en se livrant, et perdent par l’excès même de leur dévouement.
Ainsi comprises, les études communes, poursuivies avec le même esprit dans tous les pays civilisés, forment au-dessus des nationalités restreintes, diverses et trop souvent hostiles, une grande patrie qu’aucune guerre ne souille, qu’aucun conquérant ne menace, et où les âmes trouvent le refuge et l’unité que la cité de Dieu leur a donnés en d’autres temps. » Et voici une autre page où cet amour de la vérité s’exprime comme ferait la foi jalouse d’un croyant, en laisse voir les scrupules, les délicatesses, les pieuses intransigeances : … Il y a au cœur de tout homme qui aime véritablement l’étude une secrète répugnance à donner à ses travaux une application immédiate : l’utilité de la science lui paraît surtout résider dans l’élévation et dans le détachement qu’elle impose à l’esprit qui s’y livre ; il a toujours comme une terreur secrète, en indiquant, au public les résultats pratiques qu’on peut tirer de ses recherches, de leur enlever quelque chose de ce que j’appellerai leur pureté.
Dans « l’Explication des décorations du théâtre et les arguments de la pièce32 », imprimés en guise de livret, on remarque les ballets par lesquels chacun des trois actes se termine ; le premier est composé de « quatre ours et quatre singes, lesquels, au son de petits tambours, font une plaisante danse » ; le second est composé d’autruches, « lesquelles, s’abaissant à une fontaine pour boire, forment une danse » ; le troisième n’est pas moins ingénieux : « Cependant, dit le livret, arrive un Indien, lequel ayant fait la révérence au roi Nicomède, raconte que, parmi les marchandises qu’il conduisait dans son navire, il y avait cinq perroquets dont il lui faisait offre, et les fait apporter dans une cage.
Des soldats lui mirent sur le dos une casaque rouge, sur la tête une couronne formée de branches épineuses, et un roseau à la main.
Il y a des auteurs qui étalent ce qu’ils pensent de la religion, de la politique, de la destinée humaine et dont les opinions forment un système fort bien lié : tel est Bossuet, par exemple, ou Montaigne.
Nous vomirions d’horreur si l’on nous présentait dans un large plat, mêlés à du vin, à du bouillon, à du café, les divers aliments, depuis les viandes jusqu’aux fruits, qui doivent former notre repas successif ; l’horreur serait aussi forte si l’on nous faisait voir l’amalgame répugnant des vérités contradictoires qui sont logées dans notre esprit ».
Avec un mari qui n’est pour elle qu’un père, et qui, dans sa philosophie indulgente, lui permettrait beaucoup, avec des opinions et des doctrines positives comme celles qu’elle s’est formées, on est réduit à reconnaître que Julie ne peut être protégée dans ses longs tête-à-tête avec son jeune ami (et elle en convient) que par son mal même et par la singularité de sa nature.
Toutes les quatre, elles forment dans leur ensemble une œuvre qu’un même sentiment anime et qui a ses harmonies, ses correspondances habilement ménagées.
Dans une très belle lettre, adressée au comte de Mercy-Argenteau, où on lit ces mots, elle disait encore, après avoir exposé un plan désespéré (août 1791) : J’ai écouté, autant que je l’ai pu, des gens des deux côtés, et c’est de tous leurs avis que je me suis formé le mien ; je ne sais pas s’il sera suivi, vous connaissez la personne à laquelle j’ai affaire (le roi) : au moment où on la croit persuadée, un mot, un raisonnement la fait changer sans qu’elle s’en doute ; c’est aussi pour cela que mille choses ne sont point à entreprendre.
Cette poussière lumineuse, comme telle, ne saurait former une conscience.
Il fait l’éloge de plusieurs orateurs formés sur de tels modèles.
A un certain âge, ces pièces se soudent et n’en forment plus qu’une : c’est ce phénomène qui a lieu plus ou moins tard, selon les races et les individus.
Nous ne parviendrons point à soulever le dernier voile qui couvre la statue d’Isis ; mais du moins il nous sera permis d’admirer le tissu merveilleux dont il est formé.
Il n’en est pas moins vrai qu’on peut chercher, dans les rapports mêmes de ces consciences, la raison, ou du moins l’une des raisons des idées qu’elles forment.
Ainsi peu à peu il s’est formé dans les esprits un caractère d’élévation, ou plutôt de justice.
Le poëte romain n’avait rien gardé du contraste charmant et tout lyrique qui formait en partie l’exposition du drame d’Euripide, rien de ce chœur de jeunes Chalcidiennes venues au camp des Grecs pour attendre la souveraine de Mycènes, et accueillir de leurs saluts et de leurs chants le char où paraît Iphigénie près de sa mère, qui tient sur ses genoux le petit Oreste endormi.
Le mépris des anciennes mœurs dans ce qu’elles avaient eu de simple et d’austère, la dérision de toute croyance à la loi morale, le recours suprême à la force, l’ambition impitoyable dans les chefs, toutes les convoitises serviles, le parjure, la perfidie, la bassesse dans les instruments, c’était le spectacle qu’avait eu devant les yeux le jeune Octave ; c’était l’école où il se forma pour l’empire.
J’exprime franchement l’impression que j’ai reçue, mon opinion s’est formée par une lecture attentive, et je crois que, parmi les compatriotes de Giusti, le mérite littéraire de ses œuvres ne sera jamais sérieusement affirmé. […] Dès ce moment, Beauséant et Glavis forment le projet de se venger. […] Il suffit de la raconter, et chacun, en parcourant ce rapide sommaire, pourra se former une opinion précise sur la pièce de M. […] Les prolégomènes généraux qui devaient éclairer une question spéciale ont acquis une telle importance, qu’ils forment par eux-mêmes une œuvre complète, et le lecteur n’attend plus rien lorsqu’il achève la dernière page de cet exorde démesuré. […] Les œuvres qu’il a baptisées de ce nom forment un genre à part, dont la poétique française ne s’est jamais occupée.
Les premières sont nécessairement continuées par cela seul qu’elles sont internes et forment ensemble un tout continu qui est la figure considérée. Mais il ne s’ensuit pas que les parties limitantes forment nécessairement un tout continu avec celles qui les avoisinent ; puisque, par hypothèse, elles en sont séparées. […] Mais je laisse de côté ce qu’il y a d’inexplicable dans l’idée de forces aveugles produisant cette œuvre si merveilleusement ordonnée ; je me contente de répéter que l’homme ainsi formé par rencontre et combinaison n’a point de centre. […] Littré Deux courants principaux ont contribué à former la philosophie nouvelle : d’une part, les sciences exactes et positives ; de l’autre, la philosophie allemande.
C’est lui seul qui a formé les legislateurs, les sçavans, les héros, les souverains ; les plus grands hommes ne seront à jamais que ses éléves ; et pour en revenir à la poësie, il l’a portée à un point de sublimité qui fait moins l’émulation que le désespoir des meilleurs poëtes. […] Sur les opinions établies en matiere d’ouvrages d’esprit, les hommes forment d’ordinaire deux sortes de jugemens ; l’un public, l’autre secret ; l’un de parade et de cérémonie, l’autre de réserve et à leur usage particulier. […] Ce n’est pas que quand les grecs eussent lû eux-mêmes les poëmes d’Homere, ils eussent été en état de les admirer moins ; car comme leur goût n’étoit pas encore formé par de bons ouvrages, la médiocrité leur eût toûjours tenu lieu de la perfection, et ils n’eussent pas été blessés des fautes, parcequ’ils n’avoient pas encore des principes qui leur aidassent à les reconnoître. […] Je me flatte de l’avoir fait, et je crois même avoir rapproché les parties essentielles de l’action, de maniere qu’elles forment dans mon abrégé, un tout plus régulier et plus sensible que dans Homere.
Il se forma à Londres sous Charles II et Jacques II toute une école de poètes, dont l’ambition hautement déclarée était de faire, pour ainsi dire, du Molière. […] Coquelin semble avoir été formé à plaisir par la nature pour les rendre à merveille. […] Elles forment le fond de cette critique indirecte que La Bruyère a hasardée du Tartuffe, en peignant son Onuphre. […] C’est une personne d’esprit qui s’est formée et fortifiée dans son naturel par les travers mêmes de ses parents. […] Cela est tout à fait dans l’idée que nous nous sommes formée d’elle.
L’acte par lequel la race se perpétue, les relations des sexes et tous les sentiments qui naissent de là, forment, par la force des choses, une part éternelle et essentielle de la vie de l’humanité. […] Tout cet acte formerait une peinture très dramatique et très bien graduée de la jalousie, et même des diverses espèces de jalousie dans une même âme, si le cas de Théodore était un cas ordinaire et si son cœur seul était enjeu. […] Mais cette intervention momentanée du surnaturel dans une action formée, le reste du temps, par la lutte de passions naturelles, est tout à fait propre à nous désorienter. […] j’entends par ce monde l’infime coin de l’univers où nous vivons et dont nous pouvons nous former une image) ait un sens, une raison d’être, une fin. […] Les gentilshommes qui forment la petite cour du duc d’Enghien entrent à leur tour.
Les principes immédiats inorganiques (sels terreux, phosphates, chlorures, sulfates, etc.) entrent comme éléments constitutifs essentiels dans la Composition des corps vivants, mais ils sont pris au monde extérieur directement et tout formés. Les principes immédiats organiques sont également des éléments constitutifs du corps vivant, mais ils ne sont point empruntés au monde extérieur ; ils sont formés par l’organisme animal ou végétal ; tels sont l’amidon, le sucre, la graisse, l’albumine, etc., etc. […] L’emblème antique qui représente la vie par un cercle formé par un serpent qui se mord la queue donne une image assez juste des choses. […] Je crois avoir été le premier à considérer l’étude des poisons à ce point de vue, car je pense que l’étude attentive des modificateurs histologiques doit former la base commune de la physiologie générale, de la pathologie et de la thérapeutique. […] Mais cette impossibilité d’obtenir de l’oxygène du sang d’un chien empoisonné par l’oxyde de carbone fut pour moi une deuxième observation qui me suggéra de nouvelles idées d’après lesquelles je formai une nouvelle hypothèse.
Il a formé plusieurs comédiens sincères. […] S’ils valent quelque chose, c’est uniquement par les épisodes particuliers dont ils sont formés. […] Si elle commençait avec le premier et ne finissait qu’avec le quatrième, et si elle formait un tout compact et serré comme un nougat, sans doute elle vaudrait mieux, ou du moins on le pourrait démontrer par le raisonnement. […] Ils ne sont jamais rectifiés par une repartie piquante, ni formés par la conversation. […] Or, si nous reconnaissons au théâtre le droit d’être aussi inepte qu’il voudra dans son fond, pourvu qu’il nous divertisse ou nous remue (ce qui n’est peut-être pas s’en former une bien fière idée), au moins faut-il qu’il nous remue en effet ou nous divertisse.
Et les dieux supérieurs forment les âmes, et les dieux inférieurs forment les corps, et les dieux supérieurs mettent dans les âmes un mélange de bien et de mal, de bonnes et de mauvaises passions, et les dieux inférieurs forment les corps où il n’y a presque rien qui ne soit mauvais. […] Ce Dieu, Platon veut non seulement qu’il soit bon, ab initio, bon comme créateur ou ordonnateur du monde, et qu’il ait formé le monde par bonté, mais qu’il continue à être bon, c’est-à-dire qu’il soit providentiel. […] Avons-nous encore quelque autre vœu à former ? […] Il a les yeux fixés sur sa pensée intérieure, laquelle s’est formée d’abord par contemplation des objets naturels, puis par méditation ; et cela lui est nécessaire et suffisant. […] Il est de bon sens que la science politique, « la science royale », si l’on nous passe ce mot expressif, consistera à tempérer les uns par les autres et à former de ces forces diverses, de ces éléments divers, si l’on préfère, comme un tissu solide, résistant et souple.
Le rêve qu’ils forment à son occasion leur appartient en propre, et ils ne lui en dévoilent pas la beauté, persuadés qu’elle ne comprendrait pas cette poésie dont elle est la cause involontaire. […] De vaste conscience nationale, elle n’en laisse point se former, tant elle éparpille les intérêts et les passions. […] Comment se sont formées ces espèces littéraires ? […] Des poèmes d’abord, de quoi former un volume d’anthologie qui tiendra sa place dans la grande histoire des Lettres françaises ; — une technique en second lieu qui, longtemps encore, imposera aux nouveaux venus le souci de la beauté de la forme20. […] Taine s’est formée de l’art d’écrire l’histoire.
Il y eut deux partis bien formés, les bouffonistes & les anti-bouffonistes. […] Les peintres, les sculpteurs & les graveurs ne forment qu’une même académie. […] L’université déclare cette société périlleuse en matière de foi, ennemie de la paix, de l’église & de l’état ; formée pour la ruine des fidèles, plutôt que pour leur édification. […] Il parvint à former une opposition, au nom de toute l’université, à l’enregistrement des lettres patentes accordées aux jésuites. […] Parmi les élèves qui s’y formèrent, on compte les Bignon, les Harlai, les Bagnol & l’illustre Racine.
Vous avez vu de ces beautés vraies et naturelles qui éclatent et se font jour du milieu de la misère, de l’air malsain, de la vie chétive ; vous avez, bien que rarement, rencontré de ces admirables filles du peuple, qui vous apparaissent formées et éclairées on ne sait d’où, avec une haute perfection de l’ensemble, et dont l’ongle même est élégant : elles empêchent de périr l’idée de cette noble race humaine, image des Dieux. […] Nul doute qu’entre Molière fort enclin à l’amour, et les jeunes comédiennes qu’il dirigeait, il ne se soit formé des nœuds mobiles, croisés, parfois interrompus et repris ; mais il serait téméraire, je le crois, d’en vouloir retrouver aucune trace précise dans ses œuvres, et ce qui a été mis en avant sur cette allusion, pour laquelle on oublie les vingt années d’intervalle, ne me semble pas justifié. […] Elle devint troupe du Roi en 1665 ; et plus tard, à la mort de Molière, réunie à la troupe du Marais d’abord, et sept ans après (1680) à celle de l’hôtel de Bourgogne, elle forma le Théâtre-Français.
On eût attaqué ces raisons par des raisons contraires, une controverse se serait établie ; l’infaillibilité de l’Académie eût été mise en doute, et la considération dont elle jouit eût pu recevoir quelque atteinte parmi les gens qui ne s’occupent, que de Rentes et d’argent, et qui forment l’immense majorité dans les salons. […] En tête des dialogues si vrais et si passionnés qui forment la partie la plus entraînante des poésies d’Homère, imprimez le mot tragédie, et à l’instant ces dialogues, qu’ils admiraient comme de la poésie épique, les choqueront et leur déplairont mortellement comme tragédie. […] Si de jeunes Français de vingt ans, habitant Paris, et formés au raisonnement par les leçons des Cuvier et des Daunou, savaient écouter leur propre manière de sentir, et ne juger que d’après leur cœur, aucun public en Europe ne serait comparable à celui de l’Odéon.
IV Voyons d’abord comment la nature et la société avaient formé ces deux hommes d’élite presque contemporains, Shakespeare et Molière. […] Molière, qui aimait les bonnes mœurs, n’eut pas moins d’attention à former celles de Baron que s’il eût été son propre fils : il cultiva avec soin les dispositions extraordinaires qu’il avait pour la déclamation. […] L’amour qui nous attache aux beautés éternelles N’étouffe pas en nous l’amour des temporelles : Nos sens facilement peuvent être charmés Des ouvrages parfaits que le ciel a formés.
Je crois que, pour être général en chef, il faut être égoïste ; moi, je ne puis pas l’être ; j’aime mes soldats et je souffre de leurs maux. » Nommé par le général Bugeaud au commandement supérieur de Milianah (juin 1842), avec trois bataillons sous ses ordres, soixante cavaliers, de l’artillerie, du génie, « enfin une petite brigade, complète et organisée », il s’exerce à l’administration, à la conduite de la guerre ; il gagne en expérience, en aplomb ; il fait son apprentissage de commandant en chef : « Si jamais je suis général, j’arriverai tout formé. » Dans les expéditions qu’il dirige alentour, il y a tel petit combat « où il y a tactique en miniature et combinaison de trois armes ». […] Tandis qu’en France les autres généraux illustres de la première génération africaine s’emploient utilement et s’usent aussi (et tous, sauf Changarnier, s’usèrent vite) dans les assemblées, dans les luttes et les compétitions civiles, lui, il va continuer de se former militairement et de mûrir.
Ballanche aurait infusé tous les passages des Écritures qui se trouvaient traduits par Bossuet et autres grands écrivains sacrés : « Car, ainsi qu’il l’a remarqué depuis dans les Institutions sociales, Bossuet, ce dernier Père de l’Église, a une merveilleuse facilité à s’approprier les textes sacrés et à les fondre tout à fait dans son discours qui n’en éprouve aucune espèce de trouble, tant il paraît dominé par la même inspiration. » Ce projet n’eut pas de suite, quoique M. de Chateaubriand ait commencé quelque chose des discours ; mais il se forma du moins à ce sujet, entre le grand poëte et M. […] Les ultra-royalistes ou illibéraux devaient croire à la société instituée divinement, au langage révélé, à l’autorité de la tradition ; et les libéraux, à la société formée par contrat, au langage inventé par l’homme, à l’émancipation graduelle et au progrès.
Nous aurons à rappeler tout à l’heure les impressions de son enfance précoce, les orages de son adolescence émancipée, cette vie de frontière aux lisières des monts, aux années d’émigration et d’anarchie, entre le Directoire expirant et l’Empire qui n’était pas né ; car c’est bien alors que son imagination a pris son pli ineffaçable, et que l’idéal en lui à grands traits hasardeux, s’est formé. […] Un nouveau cercle d’habitudes se forma.
Nobles ou anoblis, ecclésiastiques et laïques, ceux-ci sont privilégiés entre les privilégiés et forment une aristocratie dans une aristocratie. […] Par leur résidence habituelle ou fréquente au centre, par leurs alliances ou leurs visites mutuelles, par leurs mœurs et leur luxe, par l’influence qu’ils exercent et les inimitiés qu’ils soulèvent, ils forment un groupe à part, et ce sont eux qui ont les plus vastes terres, les premières suzerainetés, les plus larges et les plus complètes juridictions.
D’espace en espace les deux files d’arbres opposées étaient reliées entre elles par les pampres grêles de la vigne sauvage qui formaient autant de guirlandes mollement agitées par le vent du matin. […] De toutes ces âmes consonantes aux autres belles âmes formées pour la plus divine fonction de l’âme, aimer, Pétrarque est, selon moi, la plus justement immortelle ici-bas par ses chants.
Le maître, au lieu de simplifier les questions par la simplicité et par la sincérité de l’argumentation, semble se complaire, pour faire preuve d’ingéniosité, de fécondité et de dialectique, à les compliquer de cinquante questions préalables ou secondaires, et à les embrouiller dans un tel écheveau d’arguments que lui seul puisse à la fin en retrouver le fil et dénouer le nœud gordien qu’il a formé. […] « Mais, poursuit-il, si elle sort de la vie toute chargée des liens de l’enveloppe matérielle, enveloppe pesante, formée de terre et sensuelle, l’âme, mes amis, chargée de ce poids, y succombe, et, entraînée vers le monde des corps par son incompatibilité avec ce qui est immatériel, elle va errant, à ce qu’on dit, parmi les monuments funèbres et les sépulcres, autour desquels on a vu parfois des fantômes ténébreux, tels que doivent être les apparences d’âmes coupables qui ont quitté la vie avant d’être entièrement purifiées, etc. » De là, il part pour faire à ses amis l’exposé édifiant des vertus, des sagesses, des abnégations, des dévouements à la vérité, à Dieu, aux hommes, en un mot de la philosophie pratique, à l’aide desquels l’âme perfectionnée et purifiée peut remonter d’une seule épreuve à sa source après la mort.
Non seulement de nouvelles associations organiques, des aptitudes nouvelles organiques, de nouveaux instincts ne peuvent plus se former, mais encore presque toutes les aptitudes et tous les instincts que présente l’homme antérieur à la civilisation sont dissous. […] Formera-t-il avec eux une élite intellectuelle, une aristocratie qui imposera au peuple des pensées nouvelles et supérieures ?
On raille le comte de Brûlon avec son bataillon formé, dit une chanson, de cinq hommes et de quatre tambours. […] Il faut économiser le temps et la peine des enfants du peuple, qui n’ont que peu d’années à consacrer à l’école, et c’est ainsi que, servant les intérêts de la démocratie, des réunions d’instituteurs, des comités formés à Paris, en Belgique, en Suisse, travaillent à la suppression des pièges sans nombre dont est semée notre orthographe.
Dickens avait essentiellement une nature affective, sentimentale, émotionnelle, c’est-à-dire que chez lui, plus qu’en d’autres, les impressions que ses sens recevaient du monde intérieur, les images générales, les idées qu’il s’en formait, étaient toutes accompagnées de vives sensations d’agrément ou de peine, qu’ainsi elles se transformaient presque immédiatement en sentiments, en émotions, et que celles-ci enfin, étant non pas de source intellectuelle, comme par exemple l’exaltation d’un géomètre à la vue d’une belle démonstration, mais de source sentimentale, étaient presque purement bornées à l’affection et à l’aversion simples. […] Micawber, sa mère la femme geignarde, bavarde et sans tête qu’est Mme Nickleby, Charles Dickens fut élevé avec des frères et sœurs qui ne le valaient guère, d’abord à Chatam, au bord de la mer, puis dans une de ces désolantes petites maisons basses qui forment les faubourgs de Londres.
Il s’est formé depuis quelque temps, dans notre Europe, en Allemagne et surtout en France, une école de philosophie bien intentionnée, mais un peu trop superbe. […] La terre, la mer, la pierre s’entrouvrent pour rendre au jour, sous les bandelettes des momies ou dans les sépulcres de marbre, les squelettes des hommes qui vivaient sur la terre avant que le marbre lui-même fût formé.
IX Toutes ces émotions éparses ou réunies forment pour l’homme la poésie de la mer ; elles finissent par donner au contemplateur le vertige de tant d’impressions. […] « Son corps était droit et ferme », dit ici le poète, « son sein de marbre, son visage plus resplendissant, d’une lueur plus douce que la lune ; ses sourcils formaient un arc majestueux au-dessus des yeux, ses paroles résonnaient comme une musique enivrante.
Il les passait à lire ou à ramasser sur le rivage des coquillages et principalement des insectes, car il aimait l’histoire naturelle comme tous ceux qui en ont fini avec les hommes, et il s’était formé une collection entomologique « qu’un Swammerdam aurait enviée ». […] Si les poésies individuelles de Poe annoncées par Baudelaire ne lèvent pas la pierre de matérialisme sous laquelle il se débat, elles formeront une littérature plus horrible et qui méritera plus le nom de satanique que celle de Shelley l’athée et de Mathurin.
Dans la messe grecque dite de saint Jean Chrysostome, la liturgie formait un drame lyrique, où, pendant la prière à demi-voix récitée par le prêtre, la voix du peuple éclatait par cet hymne : « Dieu saint qui reposes dans le sanctuaire199, chanté trois fois par les séraphins, glorifié par les chérubins, et adoré par toute vertu céleste ! […] De l’Unité sort la Triade, et de la Triade l’Unité ; non pas de la même manière que la source, le ruisseau, le fleuve, ne forment qu’une seule onde chassée en trois jets différents sur la terre ; non pas comme la flamme du bûcher s’en détache et revient s’y réunir ; non pas comme la parole s’élance de l’esprit, et pourtant y demeure ; non pas comme des eaux frappées par les traits du soleil jaillit une splendeur réfléchie sur les murailles, çà et là mobile, qui fuit au moment d’approcher, et se rapproche à l’instant où elle va fuir.
Mais traversée en bien des sens et formée d’une population mi-partie française, italienne et germanique, Genève aurait fort à faire pour garder une langue pure.
Cette armée de pèlerins, formée en vue de conquérir la Palestine, va se trouver subsidiairement engagée à des expéditions d’un autre ordre et qui la détourneront de son but : il semble donc qu’il y a une raison morale, et peut-être un devoir chrétien, de se dérober à ces incidents successifs qui allongent le chemin et qui profanent l’épée.
On le lui passe comme à quelqu’un qui tient d’Amyot, qui est venu avant Bossuet et qui s’est formé avant Malherbe.
Léopold Robert ne commença à s’en former un meilleur jugement que dans le voyage qu’il y fit pendant l’été de 1831.
Dans son trajet de l’abbaye d’Engelberg au Dittlisberg, Ramond rencontre bien des difficultés, des dangers, mais aussi de ces jouissances sans nom qu’il décrit de la sorte : Du haut de notre rocher, nous avions une de ces vues dont on ne jouit que dans les Alpes les plus élevées : devant nous fuyait une longue et profonde vallée, couverte dans toutes ses parties d’une neige dont la blancheur était sans tache ; çà et là perçaient quelques roches de granit, qui semblaient autant d’îles jetées sur la face d’un océan ; les sommets épouvantables qui bordaient cette vallée, couverts comme elle de neiges et de glaciers, réfléchissaient les rayons du soleil sous toutes les nuances qui sont entre le blanc et l’azur ; ces sommets descendaient par degrés en s’éloignant de nous, et formaient un longue suite d’échelons dont les derniers étaient de la couleur du ciel, dans lequel ils se perdaient.
Le marquis de Dangeau, à qui Boileau a dédié sa cinquième satire, forma cet établissement.
Qu’on veuille songer à ce qu’était autrefois, et il n’y a pas longtemps encore, parmi nous la réputation de Dante et l’idée qu’on se formait de son poème.
Ce vieux guerrier simple, rude, opiniâtre, qu’on vient de voir dans toute sa grandeur militaire à Essling et à Wagram, mais qui par ses manières fait déjà contraste avec les généraux plus jeunes formés à l’école de Napoléon, est dessiné par l’historien, dans cette campagne de Portugal, en traits naturels et ineffaçables.
Pour comprendre qu’elles le parussent de son temps à d’autres que lui, on a besoin de se rappeler que ce temps était celui où l’art, le génie épistolaire, qui allait briller et éblouir dans la correspondance de la charmante cousine de Bussy, était encore à s’essayer et à se former.
Au second chapitre de la Genèse, il est dit d’Adam « que le Seigneur Dieu ayant formé de la terre tous les animaux terrestres et tous les oiseaux du ciel, il les amena devant Adam, afin de voir comment il les appellerait : et le nom qu’Adam donna à chacun des animaux est son nom véritable. » Mais cette langue primitive d’Adam est perdue ; et puis il s’agit ici de nommer les pareils d’Adam, ou, pour ne pas sortir de notre ton et de notre sujet, il s’agit de trouver une juste nomenclature à des esprits et des talents humains, matière essentiellement ondoyante et flottante, diversité et complication infinie.
On n’avait point jusqu’ici un recueil des lettres de Buffon ; on n’en avait que des extraits qui avaient servi de pièces à l’appui dans des biographies ingénieuses et savantes ; mais le lecteur aime, en fait de correspondance, à se former lui-même un avis ; il prend plaisir, quand il le peut, à aborder directement les hommes célèbres et à les saisir dans leur esprit de tous les jours.
Il s’y forma de lui-même : Je n’avais à peu près aucune leçon, nous dit-il, j’étais l’heureux enfant de la nature, livré à mon bonheur et à ma pensée personnelle.
C’est ainsi que la biographie de Georges Le Sage, esprit plus singulier encore qu’original, et qui d’ailleurs n’a rien produit, me paraît tenir trop de place, venant après les études sur Charles Bonnet et sur l’illustre Saussure, les deux noms qui forment le véritable couronnement de ce beau siècle littéraire et scientifique de Genève.
Molé devait tôt ou tard laisser voir sa faiblesse au sein des Chambres, pourquoi devancer l’heure, brusquer l’opinion et former contre lui cette entreprise générale où l’on apporta pour l’abattre le feu et la hache, comme s’il s’agissait d’un grand chêne, et comme si la nouvelle monarchie elle-même, tout à côté, était assez enracinée déjà pour n’en pas ressentir le contrecoup ?
Michelet n’a pas été injuste, et je lui en sais gré, envers ce jeune prince qui aurait eu bien de la peine à devenir un grand roi et qui, autant qu’on le peut conjecturer, n’aurait jamais réussi qu’à faire un saint roi par anachronisme, ironiquement placé à la tête du xviiie siècle déjà tout formé et avide d’éclater et de déborder.
Ensuite je rendis au comte Gyllenbourg son écrit, comme il m’en avait priée, et j’avoue qu’il a beaucoup servi à former et à fortifier la trempe de mon esprit et de mon âme. » Si nous suivons le parallèle des deux intelligences et des deux caractères si mal appareillés par le sort, quel contraste !
Je le prendrai surtout par ses côtés accessoires et où il aurait pu exceller très-vite, pour peu qu’il s’y fût adonné : il y avait en lui l’étoffe d’un savant littérateur autant peut-être que d’un grand musicien ; et il le montra bien lorsque, dans ses dernières années, il eut si peu d’efforts à faire pour être aussitôt un secrétaire perpétuel tout formé, un orateur académique des plus spirituels et des plus avenants Ce n’est pas de lui, certes, qu’on aurait dit, comme d’un autre compositeur célèbre en son temps : « C’est une bête, il n’a que du génie. » Il était un beau talent servi par un habile esprit.
Voici le portrait du taureau, du mezenc pur-sang, et qui rappelle les portraits d’animaux au livre III des Géorgiques ( optima torvæ forma bovis… ) : Portant haut, bien campé sur un jarret d’acier, Trapu, tout près de terre, encore un peu grossier ; Groupe longtemps étroite, et déjà suffisante ; Le rein large et suivi, l’encolure puissante, Le garrot s’évasant en un large plateau, L’épaule nette, — et forte à porter un château ; La poitrine, en sa cage, ample et si bien à l’aise Qu’il faudrait l’admirer dans une bête anglaise ; Sobre et fort, patient et dur, bon travailleur, À ce point qu’un salers à peine fût meilleur, Lent à croître, mais apte à la graisse à tout âge, Tel est le pur mezenc, taureau demi-sauvage ; Et tel voici Gaillard, roi de mes basses-cours, Sultan de mon troupeau, connu dans les concours, Lauréat de renom, vainqueur en deux batailles, Et qui n’est pas plus fier ayant eu deux médailles.
Un jour, l’impatience le prenant, il a fait une addition, une somme totale de toutes les petites piqûres qu’il avait reçues, et cela formait une blessure large et profonde qui tout d’un coup s’est découverte : son amour-propre a parlé par la bouche de sa blessure.
De tous ses javelots, cette fois rassemblés, il a formé le faisceau et l’a noué d’un lien indissoluble.
Edouard Lefebvre de Behaine, premier secrétaire d’ambassade à Berlin, en a disposé une seconde édition qui doit prochainement paraître, et il y a joint divers morceaux ou chapitres très-développés qui avaient été publiés par l’auteur dans la Revue des Deux Mondes ; le tout formera une Histoire diplomatique du Consulat et de l’Empire presque sans interruption et sans lacune, depuis 1800 jusqu’en 1814.
On sent que tout l’homme est désormais formé chez Loyson.
Mais ces petits groupes très-mobiles, et formés d’ordinaire à l’encontre d’une seule personne, n’avaient rien de persistant ; ce n’étaient pas des partis.
Si Racine, dans les vingt-six années environ qui forment sa pleine carrière depuis les Frères ennemis jusqu’à Athalie, avait eu le temps de voir une couple de révolutions politiques et littéraires, s’il avait été traversé deux fois par un soudain changement dans les mœurs publiques et dans le goût, il aurait eu fort à faire assurément, tout Racine qu’il était, pour soutenir cette harmonie d’ensemble qui nous paraît sa principale beauté : il n’aurait pas évité çà et là dans la pureté de sa ligne quelque brisure.
La philosophie ne peut rendre, sans doute, les impressions fraîches et brillantes de l’enfance, son heureuse ignorance de la carrière qui se termine par la mort ; mais c’est cependant sur ce modèle qu’on doit former la science du bonheur moral, il faut descendre la vie, en regardant le rivage plutôt que le but.
Les mousquetaires de Louis XVIII et les grenadiers à cheval de l’Empire ne formaient, ce jour-là, qu’une même illustration ; l’éclat de la noblesse relevait la sévérité de la démocratie militaire.
Elle ne conçoit rien de plus beau que la faculté de former et de formuler des idées : il n’y a pas de supériorité qu’elle admire plus en autrui, et dont elle soit plus fière en elle.
On achève la réforme romantique, en faisant disparaître les derniers vestiges de césure à l’hémistiche, dans les vers qui ne sont plus expressément formés sur le type classique.
En mesurant une œuvre, il se souvient de toutes celles qu’il a déjà mesurées : il porte en lui une sorte d’étalon immuable ; Il demeure le même en face des œuvres multiples qui lui sont soumises : et c’est pour cela que l’on comprend les raisons de tous ses jugements et qu’ils peuvent former un corps de doctrine.
C’est l’âme qui transparaît, et qui à tous, riches ou pauvres, issus du peuple et formés par eux-mêmes ou élevés selon les cérémonials suprêmes, dicte et inspire une beauté saisissante et imprévisible.
Desjardins cesse d’être théorique et ennuyeux, pour devenir pratique et dangereux : « Nous travaillerons dans le sens de la démocratie libérale… Le protectionnisme et toutes les formes du socialisme d’état nous le combattrons… Une société de secours moral se formera ; ce sera le commencement d’une période militante ; ce que fera cette Société, je ne suis ni capable ni digne de l’exprimer.
Mais les Pensées de Pascal n’ont pas fait tort au livre des Maximes, et ces deux grands exemples de l’art de penser et d’écrire ont formé La Bruyère.
Les symbolistes n’ont rien innové, non plus, dans la formé.
Voltaire, malheureux pour la première fois, s’exila en Angleterre ; il y étudia le gouvernement, les mœurs publiques, l’esprit philosophique, la littérature, et il revint de là tout entier formé et avec sa trempe dernière.
Le goût est fait alors, il est formé et définitif ; le bon sens chez nous, s’il doit venir, est consommé.
En sortant du Temple, si on ose se former l’idée de ces mystères de la douleur, il me semble que la vie comme l’âme de Madame Royale était achevée dans ce qu’elle avait d’essentiel ; elle était fermée du côté de l’avenir : toutes ses sources et toutes ses racines étaient désormais dans le passé.
Lorsqu’il eut été exilé dans son diocèse, Madame ne cessa de lui écrire et de désirer, de demander son rappel ; cette instance même allait contre le but : Le roi, dit Cosnac, crut que Madame ne pouvait pas conserver un si violent et si continuel désir de mon retour, sans que nous eussions ensemble de grandes liaisons, et sans que je lui fusse fort nécessaire ; et ces liaisons, selon les idées qu’on lui en avait données, lui paraissaient une cabale formée, qu’on ne pouvait détruire avec trop de soin.
Le grand malheur des révolutions fréquentes et périodiques auxquelles notre France s’est vue sujette depuis quarante ans, a été de faire de vastes coupes réglées dans les générations qui formaient la tête de la société, de les déposséder presque en masse du pouvoir en un seul jour, et de donner aux générations survenantes le caractère d’une conquête et d’une invasion.
C’est sur de tels exemples que s’est formé le code de l’honneur.
Ces spectacles et ces récits, brouillés encore de l’incohérence, et de l’oppression des rêves qui les interrompent, forment la matière d’étranges livres ; dénués de toute poésie expresse, sombres, tristes, sales et bas, ils évoquent sourdement comme une haute fantasmagorie où les rues, les maisons et les êtres, d’abord stables ou marchants, vacillent tout à coup et planent, ombres ou noirs profils de songes.
Les fleurs rares et étranges dont le duc Jean garnit son vestibule, ne lui présentent que des images de charnier et d’hôpital : « Elles, affectaient cette fois une apparence de peau factice sillonnée de fausses veines ; et la plupart comme rongées par des syphilis et des lèpres, tendaient des chairs livides, marbrées de roséoles, damassées de dartres ; d’autres avaient le teint rose vif des cicatrices qui se ferment, ou la teinte brune des croûtes qui se forment ; d’autres étaient bouillonnées par des cautères, soulevées par des brûlures ; d’autres encore montraient des épidermes poilus, creusés par des ulcères et repoussés par des chancres ; quelques-unes enfin paraissaient couvertes de pansements, plaquées d’axonge noire mercurielle, d’onguents verts de belladone, piquées de grains de poussière, par les micas jaunes de la poudre d’iodoforme.
Un peuple, séparé du reste de l’Europe par ses mœurs beaucoup plus que par les montagnes qui forment ses limites naturelles, se saisit du mouvement progressif.
Les six nouvelles qui forment les Païens innocents s’appellent : la Gloriette, — le Curé de Minerve, — le Dernier Flagellant, — l’Hercule chrétien, Jean de l’Ours, — l’Histoire de Pierre Azam, — et la Chambre des Belles Saintes, et elles sont, à notre avis, de petits chefs-d’œuvre d’expression, comme doit l’être, de rigueur, cette simple création d’une nouvelle, intaille ou relief d’une seule idée, travaillée avec les caresses de l’Amour.
Supposons qu’un historien accepte cette idée générale ou toute autre, et la développe, non pas en termes généraux, comme on vient de le faire, mais par des peintures, par un choix de traits de mœurs, par l’interprétation des actions, des pensées et du style, il laissera dans l’esprit du lecteur une idée nette du dix-septième siècle ; ce siècle prendra dans notre souvenir une physionomie distincte ; nous en discernerons le trait dominant, nous verrons pourquoi de ce trait naissent les autres ; nous comprendrons le système des facultés et des passions qui s’y est formé et qui l’a rempli ; nous le connaîtrons, comme on connaît un corps organisé après avoir noté la structure et le mécanisme de toutes ses parties.
On m’accordera, je l’espère, qu’ils méritent tous en effet quelque admiration et ne forment pas une société trop mêlée. […] Le champ de ruines, qui fut le sanctuaire d’Apollon, s’étage au flanc de la montagne, dans une sorte de cirque naturel, formé par les contreforts du Parnasse. […] Il estimait aussi que le monde n’était peut-être pas construit par un démiurge, mais lentement formé par la nature. […] Il avait formé une longue parenthèse, après laquelle le monde affranchi reprenait sa vie normale interrompue pendant dix siècles. […] Un enseignement purement scientifique et soi-disant moderne arrêterait l’avancement de la science pour ne former que de vulgaires techniciens.
On voit s’allonger une des interminables rangées de maisons qui forment les côtés de la place. […] « Il peut d’abord sembler étrange que, pour former le cœur des petits enfants de Paris, on ait eu l’idée de leur mettre sous les yeux la peinture la plus vive, la plus brûlante de l’amour, l’histoire d’une passion furieuse, désordonnée, qui va jusqu’au meurtre, à la folie et au suicide. […] Et Titania appelle les sylphides, et les sylphides accourent, enguirlandent de roses la tête du baudet adoré et forment autour de lui des danses harmonieuses. […] » Eugène a pu se former ainsi, peu à peu, une philosophie de l’amour assez semblable à celle de M. […] Il se pourrait, dans trente ou quarante ans, quand les nouveaux programmes auront eu le temps de porter leurs fruits, quand les générations formées par l’enseignement nouveau n’auront même plus de l’antiquité grecque la teinture qu’en ont Mistingue et Lenglumé, il se pourrait que le succès de la Belle Hélène en fût sérieusement compromis.
Fut-ce l’intérêt, la vanité, ou la conformité de principes, de caractère et de mœurs qui forma et cimenta cette inaltérable intimité ? […] L’un, c’est Rurrhus, de mœurs austères, formait Néron à l’art militaire : l’autre, Sénèque, tempérant d’affabilité la sagesse, lui enseignait l’éloquence. […] les actions, le caractère, la teneur de la vie d’un homme de bien, malheureusement accusé, ne formeraient aucune présomption en faveur de son innocence ? […] Néron s’avance au-devant d’elle sur le rivage, à la descente d’Antium ; il lui présente la main, il l’embrasse et la conduit à Baules, maison de campagne baignée par les eaux qui forment un coude entre le promontoire de Misène et le lac de Baïes. […] Il y a des vertus dont on ne loue pas les particuliers ; ce sont celles qui, communes à la pluralité des citoyens, forment les mœurs nationales ; qualités du siècle, et non de l’homme.
La vision se formait depuis plusieurs lignes déjà sous la phrase, mais elle ne devient précise, d’une précision aiguë et subite, que lorsque le nom du peintre nous monte aux lèvres. […] C’est que Fosca n’a pas seulement les références les plus étendues : de mêmes que ses sensations s’amalgament, ses références recomposent pour ainsi dire : elles forment des faisceaux, et en le lisant se dessinent des parentés là où sans lui peut-être on n’aurait aperçu que des juxtapositions. […] ses cheveux forment une masse d’une seule coulée, immobile et compacte : on dirait un fleuve de pierre. […] On peut se former quelque idée de ce que les autres feront parce que les autres participent de notre nature à tous, mais pas lui. […] Du mystère spirituel il a au plus haut point la curiosité, mais il n’a pas foi dans l’attaque directe et il y répugne : en chacun de ses personnages il respecte une zone d’ombre, — celle où il devine que si l’on portait brutalement la main, une ombre nouvelle et plus épaisse aurait tôt fait de se former.
Un style nouveau, étrange, surchargé, s’est formé, et va régner jusqu’à la Restauration, non-seulement dans la poésie, mais aussi dans la prose, même dans les discours de cérémonie et dans les prédications théologiques280, si conforme à l’esprit du temps, qu’on le rencontre en même temps par toute l’Europe, chez Ronsard et d’Aubigné, chez Calderon, Gongora et Marini. […] Ils chantent infiniment et forment des danses allégoriques ; deux troupes s’avancent, les serviteurs de la Raison et les serviteurs de la Passion ; on décrit tout au long leurs chapeaux, leurs rubans et leurs tuniques. […] C’est lui qui, apaisant la discorde primitive, a formé l’harmonie des sphères et soutient ce glorieux univers. […] En regardant les croûtes arborescentes et foliacées qui se forment à la surface des liqueurs qui gèlent, il se demande si ce n’est point une résurrection des essences végétales dissoutes dans le liquide. […] One with great bellowes gathered filling ayre, And with forst wind the fewell did inflame ; Another did the dying bronds repayre With yron tongs, and sprinkled ofte same With liquid waves, fiers Vulcans rage to tame Who, maystring them, renewd his former heat.
Ces derniers nous montrent l’intention et la physionomie du récit ; ils forment l’élément lyrique de la petite épopée que l’on nous raconte. […] Ce n’est d’abord tout au plus qu’une couple d’impressions, — deux pointes, pour ainsi dire, — qui forment un thème, varié en quatre ou cinq strophes. […] Évidemment il ne s’était pas encore formé une opinion nette sur l’écrivain. « Voyez-vous », me dit-il, « je me tiens sur mes gardes. […] Ici, à Paris, dans un grand centre de la civilisation où les artistes forment une nation à eux, cette ressemblance s’accentue davantage et je crois avoir le droit de parler comme je l’ai fait. […] « Bath » ou « bate », qui en argot signifie beau et bon, est formé artificiellement, suivant, l’opinion de Marcel Schwob.
Il ne faut pas seulement observer le visage, bien des choses concourent à former un portrait, les vêtements, les gestes sont encore des révélateurs. […] « Aussi régnait-il sur tous les cœurs, jeunes et vieux, tous, hommes et femmes, enchaînés, vivaient avec lui par la pensée, ou lui formaient un cortège respectueux partout où il apparaissait. […] — Et cet instant fut doux, et nous nous embrassâmes. — Nous mêlâmes tes pleurs, mon sourire et nos âmes. » Ces vers avec quelques autres formeront évidemment la base de quelque futur Nouveau Testament emprunté à l’autre ; J. […] Soit ; mais cette boue sera comme celle dont fut formé Adam, une boue qui se change en chair et en sang et qui donne la vie. […] Ni Musset, ni Hugo, ni Lamartine, ni Barbier, ne forment une société bien sympathique à la nature ; si nos pères « les aimèrent », c’est qu’il n’y avait pas à choisir.
Il y aurait économie de travail et d’argent, aussi bien qu’augmentation de résultats, si l’on se décidait à coordonner tout cela pour en former un véritable organisme, harmonieux et solidarisé. […] Il existe, pourrait-on dire, deux Schopenhauer, intimement unis d’ailleurs, puisqu’ils ne forment qu’une seule et même personne. […] Les deux camps sont formés. […] Faguet n’aime pas à replacer les hommes dont il s’occupe dans le milieu où ils se sont formés. […] Or, de même qu’il existe une dépendance mutuelle entre les différents membres qui composent le corps d’un animal, de même il existe une harmonie visible entre les diverses personnes qui forment cet être à la fois un et multiple.
« Un jour, elle est avertie par un de ses amis que deux sicaires ont formé le projet de se rendre à l’île d’Elbe pour assassiner Napoléon. […] Son nom étant pour nous inséparable de deux ou trois idées essentielles, nous cédons à l’illusion de croire que ces idées ont jailli un beau jour toutes formées en son esprit, et qu’il les a jusqu’au bout appliquées sans défaillance. […] Tandis que jadis la tradition fournissait à l’activité d’une nation un cadre, souple d’ailleurs et qui pouvait lui-même évoluer, le public met sa vanité à se former une opinion qui sorte des voies traditionnelles. […] Le tout formait un composé qui réjouissait par l’incohérence. […] Ces minces plaquettes qui, du vivant de Verlaine, paraissaient isolément, tapageuses et furtives tout à la fois, forment maintenant un corps compact de cinq forts volumes qui font monument.
Il y a trois histoires mêlées et confondues dans ce volume : l’histoire du sentiment de la nature, les conceptions diverses que l’humanité s’est formées de ses rapports avec Dieu, et enfin le développement de l’activité humaine sous la loi du beau, ou l’histoire de l’art. […] La langue qu’il avait à sa disposition était presque entièrement formée à l’image de celle d’Athènes ou de Rome, saturée d’images antiques, encombrée de mythologie. […] C’est que, formée en nous depuis notre naissance, Ta nature, ô Justice ! […] Chacun de nous devient ainsi le mandataire et le gardien de l’honneur de la Terre qui a formé et nourri l’espèce humaine, ouvrière inconsciente de ce qu’il y a de plus beau et de plus grand dans le monde, un cœur qui bat pour la justice et la vérité. […] Or, pour former la passion comme pour former la vertu, il faut pouvoir vivre en soi et pour soi.
Mais avec quelle ivresse J’embrassais, je baignais de larmes de tendresse Le vieillard qui jadis guida mes pas tremblants, La femme dont le lait nourrit mes premiers ans, Et le sage pasteur qui forma mon enfance ! […] Dans les châteaux, dans les familles, en province, partout, abondaient les poèmes de Delille ; on y trouvait, sous une forme facile et jolie, toutes choses qu’on aimait à apprendre ou à se rappeler, des souvenirs classiques, des allusions de collège à la portée de chacun, des épisodes d’un romanesque touchant, des noms historiques, des infortunes ou des gloires aisément populaires, des descriptions de jeux de société ou d’expériences de physique, des notes anecdotiques ou savantes, qui formaient comme une petite encyclopédie autour du poëme, et vous donnaient un vernis d’instruction universelle.
XV Sous l’avant-toit formé par le plancher proéminent de la galerie, et tout près de la première marche de l’escalier, on voyait une porte ouverte ; à droite et à gauche un banc de bois blanc ; devant la porte une vasque de pierre grise, entourée de seaux de cuivre et surmontée d’une tige de fer creux d’où ruisselait un filet d’eau, retombant avec une mélodie assoupissante dans la vasque. […] C’était la plus belle et la plus pittoresque population de tout âge et de tout sexe qu’il fût possible d’imaginer pour un poète et de reproduire pour un peintre : la taille élevée, les membres dispos, les fières attitudes, les costumes sauvages des hommes ; les profils purs, les yeux d’un bleu noir, les cheveux dorés, les épingles d’argent semblables à des poignards, les corsets pourpres, les tuniques lourdes, les sandales nouées sur les jambes nues des femmes ; les groupes formés naturellement, çà et là, le long des murs, par les captifs, les épouses ou les fiancées demi libres, s’entretenant, les joues rouges de passion ou pâles de pitié, avec leurs maris ou leurs amants, à travers les gros grillages de fer des lucarnes des cachots, ouvrant sur les cours ; les hommes assis et pensifs sur la poussière, le coude sur leurs genoux, la tête dans leur main ; les jeunes filles se tressant mutuellement leurs cheveux de bronze avec quelques tiges de fleurs de leurs montagnes, apportées par leurs aïeules la veille du dimanche, les regards chargés des images de la patrie, des arrière-pensées de la vengeance, des invocations ardentes à la liberté de la montagne ; les enfants à la mamelle allaités en plein soleil de lait amer mêlé de larmes ; toute cette scène, que nous avons contemplée souvent nous-même alors, laissait dans le souvenir, dans l’œil et dans l’imagination un pittoresque de nature humaine qui ne s’efface plus.
Prenons la figure de Goethe à cette époque fugitive où la fleur de la jeunesse éclate encore sur les traits, mais où le fruit de la pensée ou du sentiment commence à se former et à s’entrevoir sous cette jeunesse qui s’effeuille. […] Goethe, Charlotte et son fiancé ne formaient qu’un cœur.
V Une cheminée à cintre très élevé, à large tuyau, au sommet duquel on voyait le jour, à chaînes noircies par la fumée et la suie, à chenet unique, qui portait jour et nuit un arbre tout entier, brûlant par un bout, formait à son sommet une couronne ou plutôt une corbeille d’acier, polie par les mains des bergers. […] En continuant de monter l’escalier sombre et à spirale du Cayla, on rencontrait çà et là de petits paliers de quelques marches détachées du grand escalier, qui formaient un angle rentrant sous une porte en rosace, donnant entrée à quelques séries de petits appartements, et enfin, très haut, aux chambres des domestiques.
Les mœurs du théâtre de Destouches, plus douces que vraies, ses caractères qui se corrigent invariablement à la fin de la pièce, son dialogue obligeant et qui sent la négociation, les bonnes manières de ses personnages qu’on dirait formés autour du tapis vert de la table d’un congrès55, tout cela veut être joué en famille. […] Boileau l’a dit : Et mille fois un fat finement exprimé Méconnut le portrait sur lui-même formé.
Comme il est mûr et formé et bien portant : le scalpel a remplacé le blasphème. […] Un rude homme, qui n’avait pas eu toujours sa canne sur sa chaise, et qui, dans son château de Sommérecourt, dont il fatiguait la cantonade des colères de sa voix, avait façonné et formé, à coups de canne, une domesticité, qu’il avait trouvé le moyen de s’attacher ainsi.
La démocratie, si sainte en morale parce qu’elle est la justice, est ignoble en littérature parce qu’elle est la médiocrité ; elle a le sens de l’utile ; elle n’a pas formé ni exercé encore en elle le sens du beau. […] Après le dîner, on rentra dans le cabinet de conversation, où un cercle d’hommes éminents de Florence et d’étrangers des différentes capitales d’Italie se forma autour de la comtesse.
qui a formé les gouttes de la rosée ? […] S’il se désintéresse de lui-même pour se dévouer, en vue de Dieu, à l’amélioration de sa race, au progrès de la raison et des institutions humaines, il a la dérision ou le martyre pour récompense ; il s’aperçoit que les hommes, formés, depuis le premier jour jusqu’au dernier, de la même fange, changent de forme sans changer de nature ; qu’on peut les pétrir différemment de limon, mais jamais transformer ce limon en bronze ; que le progrès indéfini sur cette terre est le rêve de l’argile qui veut être Dieu et qui ne sera jamais que poussière.
Ainsi, prisonniers volontaires de l’analyse psychologique et par conséquent du sens commun, il semble qu’après avoir exaspéré les conflits que le dualisme vulgaire soulève, nous ayons formé toutes les issues que la métaphysique pouvait nous ouvrir. […] Mais n’est-il pas vrai, comme nous l’avons montré au début de ce livre, que, dans la perception visuelle d’un objet, le cerveau, les nerfs, la rétine et l’objet lui-même forment un tout solidaire, un processus continu dont l’image rétinienne n’est qu’un épisode : de quel droit isoler cette image pour résumer toute la perception en elle ?
Une lettre piquante adressée à son ancien ami Ségur qui avait donné quelque adhésion aux premiers actes de la Révolution, nous montre le prince de Ligne à la date d’octobre 1790, dans le premier instant de son irritation et de sa colère : La Grèce avait des sages, dit-il, mais ils n’étaient que sept ; vous en avez douze cents à dix-huit francs par jour, … sans mission que d’eux-mêmes, … sans connaissance des pays étrangers, sans plan général, … sans l’Océan qui peut, dans un pays dont il fait le tour, protéger les faiseurs de phrases et de lois… Messieurs les beaux esprits, d’ailleurs très estimables, ont bien peu de talent pour former leurs semblables.
Non : il connaît trop bien le caractère particulier de ces doutes et de ceux qui les forment, ou plutôt qui les ont appris et qui les répètent tout vulgaires et usés déjà.
Son caractère n’était pas formé tout d’une chaîne, ou du moins dans cette chaîne il y avait un anneau peut-être d’un meilleur métal et plus pur que le reste : mais précisément c’était cet anneau qui rompait.
M. de Joyeuse avait une fille qui avait de l’esprit et de la beauté ; Maucroix la voyait se former et grandir : « Comme ce garçon est bien fait, a beaucoup de douceur et beaucoup d’esprit, et fait aussi bien des vers et des lettres que personne, à quinze ans elle eut de l’inclination pour lui. » C’est Tallemant qui nous peint ainsi son ami, et qui nous raconte l’historiette romanesque.
… » Mais c’est la réponse de l’Amiral qui est belle de tristesse, de prévoyance et de prophétie ; tout un abrégé de sa destinée tragique s’y dessine ; il répond : « Puisque je n’ai rien profité par mes raisonnements de ce soir sur la vanité des émeutes populaires, la douteuse entrée dans un parti non formé, les difficiles commencements (et il revient ici à l’énumération des obstacles)… ; — puisque tant de forces du côté des ennemis, tant de faiblesse du nôtre ne vous peuvent arrêter, mettez la main sur votre sein, sondez à bon escient votre constance, si elle pourra digérer les déroutes générales, les opprobres de vos ennemis et ceux de vos partisans, les reproches que font ordinairement les peuples quand ils jugent les causes par les mauvais succès, les trahisons des vôtres, la fuite, l’exil en pays étrange… ; votre honte, votre nudité, votre faim, et qui est plus dur, celle de vos enfants.
Je sais qu’il a soin de définir le peuple ou vulgaire comme étant formé, à ses yeux, d’esprits de toutes classes, de même qu’il appelle du nom de pédants beaucoup de ceux qui ont des robes et beaucoup aussi qui n’en ont pas ; malgré ces distinctions judicieuses, on peut dire toutefois qu’il est contre le vulgaire avec excès42, et qu’il se met par là en contradiction avec son propre but, qui est avant tout de vulgariser la sagesse.
La Bruyère, chargé de raccommoder ces petites déchirures, écrivait à Santeul, ou le chapitrait quelquefois dans l’embrasure d’une croisée ; mais Santeul était difficile à former, et il fallait toujours en revenir sur son compte à cette conclusion du grand moraliste et du censeur amical, qui lui disait : « Je vous ai fort bien défini la première fois : vous êtes le plus beau génie du monde et la plus fertile imagination qu’il soit possible de concevoir ; mais pour les moeurs et les manières, vous êtes un enfant de douze ans et demi. » Cette insigne faveur de Santeul à Chantilly faisait grand bruit dans la rue Saint-Jacques et ailleurs, et ne laissait pas de donner quelque jalousie : « Santeul est fier, Santeul nous néglige depuis que des altesses lui font la cour ; il ne daigne plus venir même à Bâville, il ne s’abaisse plus jusqu’à nous. » Ainsi disait-on en bien des lieux.
Nos poètes de 1827 n’avaient pas fait, comme Goethe, leurs études dans des universités allemandes d’où l’on sortait en emportant L’Odyssée dans ses promenades ; comme Byron ou les lakistes, ils n’avaient pas été formés dans des écoles où l’on finit par lire les chœurs des tragiques grecs en se jouant.
Voiture était né l’esprit le plus fin et le plus délicat, formé par la nature pour la compagnie la plus choisie, pour en être l’enfant gâté et les délices : il fut quelque temps avant de rencontrer ce doux climat auquel il était destiné.
Il s’était formé par l’étude, et il avait auprès de lui un secrétaire et factotum des plus distingués par l’esprit et les connaissances, Priolo.
Cet entourage se formait, se renouvelait presque au hasard et sans qu’il s’en mêlât.
Un certain oncle Bouvet, personnage un peu solennel, le lui prédisait dès 1804, en lui rappelant l’exemple des hommes de talent qui s’étaient formés d’eux-mêmes : « La mesure de votre gloire sera celle des difficultés que vous aurez vaincues ; j’aime à me le persuader et vous attends impatiemment au but. » Un second point qui me frappe dans ce commencement de la Correspondance et qui a été contesté cependant, c’est la gaîté, une gaîté entremêlée de réflexion, de travail, de méditation même ; mais je maintiens la gaîté.
On y sent, sous l’écrivain, le père de famille spirituel, sensé, pressé d’instruire, ne perdant ni une occasion ni une minute pour former agréablement ces petits êtres qui vont être des hommes.
Lerambert, homme distingué, des plus instruits, formé dès l’enfance aux meilleures études, initié à la littérature anglaise (il a, pendant quelques années, habité l’Angleterre), a exprimé dans un volume de Poésies 36 des sentiments personnels vrais et délicats, entremêlés d’imitations bien choisies de poëtes étrangers.
Craufurd devait passer par Londres, et il avait les communications libres avec les ministres anglais ; lui écrire, c’était donc s’adresser par son intermédiaire aux hommes d’État qui dirigeaient la politique de l’Angleterre, et percer sur un point le blocus diplomatique exact que la Coalition formait autour de la France.
C’est ainsi qu’il s’était formé après lui, en dehors de lui, une génération de romantiques (comme ils s’intitulaient), suscitée et guidée par les Schlegel, et qui était très-distincte de la première grande génération des Herder, Gœthe, Schiller.
Les Mystères qui avaient mis deux siècles à croître et à se former eurent ainsi leur promotion finale : le bas moyen âge est l’époque de leur entière célébrité et de leur triomphe.
Il est à observer que le roi n’avait pas envoyé des troupes en Béarn par rapport aux affaires de la religion, mais pour former le camp que Sa Majesté avait résolu d’établir sur la frontière d’Espagne.
Imaginez une armée de 40 mille hommes, entassée dans une sorte d’hippodrome formé par la montagne, la double entrée de la gorge barrée par des rochers qu’on y a fait rouler, ou par une herse inexpugnable, et là, dans cet immense cul-de-basse-fosse, sur ce radeau de la Méduse en terre ferme, ces 40 mille hommes dévorant les animaux, les mulets, et, après neuf jours de souffrance, en venant à manger leurs propres morts.
S’ils manquèrent de la politique du moment, ce fut positivement parce que cette politique instantanée ne leur avait jusqu’alors inspiré que du mépris ; mais les affaires les auraient formés, parce qu’elles ont seules la puissance de courber les esprits forts jusqu’aux considérations honteuses qu’exigent l’état et les intérêts d’une société presque en dissolution.
Formé à cette école, nourri et abreuvé de ces sources, faut-il s’étonner que Térence ait fait entendre le premier des accents de bonté et d’humanité universelle à Rome, dans cette dure Rome de Caton l’Ancien ?
Que celui qui aurait osé, s’il avait été Romain, reprocher à l’antique Sénat sa politique persévérante, conquérante et assimilatrice à tout prix, cette politique qui agissait et opérait uniquement en vue de la grandeur et des destinées de Rome, que celui-là jette la pierre à Louvois, tout occupé de former et de remparer d’une enceinte infranchissable ce vaste quartier de terre, ce pré carré, comme l’appelait Vauban, ce beau gâteau compacte qui constitua depuis lors l’unité de notre territoire !
L’action, l’arrangement dramatique, les caractères, les mœurs, la langue, tout enfin, les vers même offrent les défauts les plus graves ; et la barbarie d’un art qui commence à peine à se former ne suffit pas, il s’en faut, à les excuser.
D’où l’homme, d’où la planète, d’où ce système solaire tout entier, qui est le nôtre, sort-il et vient-il, et comment les choses se sont-elles formées ?
Pour lui, il est des premiers à reconnaître et il se fait fort d’établir que « la solution des problèmes sociaux se trouvera désormais de moins en moins dans les institutions qui maintiennent systématiquement l’inégalité entre les hommes, et qu’il faut la chercher de plus en plus dans les sentiments et les intérêts qui créent entre toutes les classes l'harmonie encore plus que l'égalité. » C’est cette harmonie sociale, dont l’histoire, découvre des exemples dans le passé sous le règne d’un autre principe, qu’il voudrait voir renaître et se former aujourd’hui autour du principe nouveau et fécond de la liberté.
Les détails de cette pénitence sont touchants ; La Fontaine la consacra publiquement par une traduction du Dies irae, qu’il lut à l’Académie, et il avait formé le dessein de paraphraser les Psaumes avant de mourir.
L’esclavage, la féodalité, les querelles religieuses elles-mêmes n’exciteront plus aucune guerre ; la lumière est assez généralement répandue sur ces objets, pour qu’il ne reste plus aux hommes véhéments l’espoir de les présenter sous des aspects différents, de former deux partis fondés sur deux manières diverses de juger et de faire voir les mêmes idées.
La vie va former ce « niais », et rabattre son vol : un peu d’instinct, beaucoup de poltronnerie l’écartent de la grosse malhonnêteté ; il cède à l’occasion, ou à la nécessité, mais, tout compte fait, il aime mieux faire fortune sans risquer les galères ni l’infamie.
C’est l’intérêt philosophique des idées qui a donné accès à quelques écrits scientifiques auprès des hommes que la chimie ou l’histoire naturelle n’intéressent pas par elles-mêmes ; telles pages924, par exemple, qui précisent sur certains points la conception qu’un homme de notre âge peut se former de l’univers, ou telles discussions sur le darwinisme925, d’où nous sortons mieux renseignés sur la valeur générale de la doctrine.
I Des circonstances uniques ont contribué à former le talent de Pierre Loti.
Et quelle idée biscornue de nous raconter, dans le rythme sautillant de Remy-Belleau chantant Avril, l’origine de la vie aux profondeurs de la mer : C’est en elle, dans ses flots, Qu’est éclos L’amour commençant son ère Par l’obscur protoplasma Qui forma La cellule et la monère.
Les molécules changent incessamment de place et dans ces déplacements continuels, les figures qu’elles forment passent successivement par toutes les combinaisons possibles.
Tandis que les sentiments rangés sur les neuf titres qui précèdent sont simples, irréductibles, les émotions esthétiques et les émotions morales qui forment les deux derniers groupes, sont composées.
Les belles et spirituelles nièces de Mazarin furent pour beaucoup dans cette transmission d’esprit d’une régence à l’autre, les duchesses de Mazarin, de Bouillon et tout leur monde ; Saint-Évremond et les voluptueux de son école ; Ninon et ceux qu’elle formait autour d’elle, les mécontents, les moqueurs de tout bord.
C’est le cas de se former une idée juste du personnage célèbre qui nous est ainsi montré en pleine lumière.
On trouvera qu’il était bien prompt à se former une pensée et une impression ; mais cette première impression, en effet, était capitale dans une Cour et sur une scène où il s’agissait avant tout de réussir en entrant, et de représenter toujours.
Elle l’a nourri et formé à la lettre ; elle l’a bien jugé de bonne heure, et on retrouve dans ce premier jugement, on y devine toutes les qualités et les limites que la vie de ce prince a manifestées depuis.
On a une lettre de Louis XIV datée du jour même, et dans laquelle il rend compte des moindres détails de l’exécution à la reine mère : J’ai discouru ensuite sur cet accident, dit-il, avec ces Messieurs qui sont ici avec moi ; je leur ai dit franchement qu’il y avait quatre mois que j’avais formé mon projet ; qu’il n’y avait que vous seule qui en eussiez connaissance, et que je ne l’avais communiqué au sieur Le Tellier que depuis deux jours, pour faire expédier les ordres.
Guizot, depuis deux ans, n’a cessé, indépendamment de ses écrits historiques, de recueillir et de publier, en les revoyant, d’anciens morceaux très distingués15, qui vont former toute une bibliothèque morale et littéraire : Méditations et études morales ; — Études sur les beaux-arts en général ; — Shakespeare et son temps ; — Corneille et son temps.
Je suis obligé de citer encore l’Angleterre ; car la manière dont s’est formée la constitution anglaise est un fait si considérable dans ce moment, que nous ne pouvons pas nous abstenir d’avoir toujours les yeux sur ce qui s’est passé dans cette île.
Ainsi s’est formée cette catégorie esthétique qui, éternellement instable, allant du réalisme à l’idéalisme (un certain idéalisme), du sentimentalisme à la brutalité, de la religiosité au sensualisme, n’en est pas moins un jardin clos. […] Née d’une imperfection du système nerveux, l’idée de beauté s’est agrégée en chemin toutes sortes de règles, de préjugés, de croyances, d’habitudes, et il s’est formé un canon dont la forme, sans être absolue, n’oscille à un moment donné qu’entre certaines limites. […] Dans la combinaison où entrent des motifs de diverses natures, les motifs homogènes se grouperont nécessairement pour former des principes déterminants. […] Une dame lui vola son chapeau, le remplaçant par un neuf, mais sans se préoccuper s’il convenait au genre de cône que formait sa tête. […] Une confrérie se forma pour exploiter le crédit de la sainte entêtée.
C’est pour cela que le présent volume est formé de petits chapitres que j’ai placés les uns à côté des autres, sans aucunement prétendre à les lier par le fil d’une dialectique ; et c’est la marque de mon désespoir : j’ai renoncé à composer l’image de mon temps. […] La pensée première, et lentement formée, se dégagea des tentatives inutiles ; elle se fortifia de la méditation perpétuelle que la douleur filiale excitait. […] Ainsi, par les jours chauds d’été, l’atmosphère s’alourdit peu à peu ; on voit les nuages arriver les uns après les autres, s’accumuler, former la menace des catastrophes. […] Ainsi se mêlent, se croisent, se combinent celui-ci et celui-là, ceux-ci et ceux-là, de manière à former une émouvante polyphonie, que les mots ne savent pas rendre ; mais seule y suffit la musique. […] Et les bataillons énergiques vont et viennent, se font place mutuellement, concertent leur entrain, forment une colonne complexe, ordonnée et victorieuse.
La douleur de madame d’Ermel, ses alternatives d’attendrissement et de rigueur à l’égard de ce pauvre fou, qui compromet en quelques minutes une amitié de quarante ans, la pénitence qu’elle impose au docteur, les hésitations de celui-ci, son repentir et son pardon, forment un ensemble exquis, délicieux, adorable, digne de rivaliser de ténuité et d’élégance avec la dentelle de Malines ou d’Alençon. […] Aussi ses Poëmes antiques, malgré des détails d’une beauté remarquable, forment-ils, dans leur ensemble, une lecture très pénible pour quiconque n’est pas parfaitement initié à la généalogie officielle-ou apocryphe de ces dieux et de ces déesses, à cet Almanach de Gotha de l’Hélicon et de l’Olympe. […] Il y a enfin une série de pièces unies entre elles par une même pensée ou plutôt par un même amour, qui forment une sorte de roman en vers, dont l’héroïne, nommée Julie, a été l’Elvire du jeune poëte ; chacune de ces inspirations différentes mériterait une mention à part ; mais il m’a semblé plus opportun de faire ressortir ce qui est l’attrait particulier et l’originalité distinctive du recueil de M. […] À part cette légère tache, cette dissonance formée par un nom propre, l’impression générale que l’on garde de ces Études morales et littéraires est une sympathie profonde, un acquiescement qui touche au respect. […] L’intrépide baron de Batz, celui-là même qui, le 21 janvier, avait essayé de sauver Louis XVI, s’associe Cortey, Michonis et vingt-huit autres braves, chargés de former une patrouille, toute composée d’hommes dévoués, et qui pourra cacher entre ses rangs la sortie nocturne des prisonniers.
Solmes, et pour la défense de l’autorité du père. » À présent la chose est une affaire de politique et de guerre. « Puisque vous avez déployé vos talents et tâché d’ébranler tout le monde, sans être ébranlée vous-même, c’est à nous maintenant de nous tenir plus fermes et plus serrés ensemble. » Ils forment « une phalange rangée en bataille », où chaque conviction alourdit les autres de tout son poids. […] Ces orages de coups de poing, ces clabauderies d’hôtellerie, ce retentissement de bassinoires cassées et d’écuelles lancées à la tête, ce pêle-mêle d’incidents et cette grêle de mésaventures, finissent par former la plus joyeuse musique. […] La vertu protestante et anglaise n’a point formé un modèle plus éprouvé et plus aimable.
Donc ici je la vois pleinement sincère, grâce à la valeur de l’émotion directe qui commande l’inspiration et dicte l’expression — il faut insister sur ce mot : dicte — puisque le vrai poème, celui qui est digne de ce nom, doit se former dans le cerveau du poète sous la secousse directe qu’est la sensation : Car votre chair n’était qu’une fugace rose, Et si, quand vous pliiez sous l’amour exigeant, Vous sentiez tristement s’émietter vos argiles, Vous saviez bien que l’Homme est solide et changeant, Vous saviez bien qu’avec les fleurs longtemps écloses, Et les jours longtemps clairs qui sombrent dans le soir, Qu’avec l’automne vient la douleur de déchoir, Et que la Femme est brève entre toutes les choses ! […] Nous nous formons aujourd’hui et transmettons à nos enfants une tout autre idée de la vie littéraire. […] Sait-il pas en effet que, parmi les quelques centaines ou quelques milliers de lecteurs qui forment la clientèle d’un auteur d’imagination, la grande majorité vient chercher dans ses livres l’histoire qui la pourra divertir un instant ? […] En ce sens, le beau mythe de Parsifal n’est que la plus glorieuse illustration contemporaine d’une vérité qui persiste à travers les âges, dont nous sentons l’immortelle portée dès la première défaillance du héros, quand les bras souples de l’Enchanteresse inclinent cette tête juvénile sur son sein parfumé… Ce sont ensuite les joies de former une âme, de la plier à son idéal, de croire du moins qu’on atteindra à la convaincre : décevant espoir, car on ne transforme pas l’essence d’un être… on ne saurait qu’y ajouter, et la visite à Port-Royal, le plus beau morceau du livre à mon avis, n’est qu’un délicieux tableau psychique, où deux âmes se confrontent entre elles, sans aucune chance de se pénétrer.
En attendant, il est temps de dire comment et par quelles aventures s’est formé ce cénacle, si longtemps bafoué. […] » Ces injures échangées, les deux jeunes gens se serrèrent la main ; et ce fut le commencement du groupe qui devait se former. […] Les Sérénades y sous-intitulées poèmes ingénus, formaient un tout petit ensemble de toutes petites pièces amoureuses. […] Elle le savait, l’ingénue, Et qu’une influence des cieux L’avait formée exprès menue Comme tout joyau précieux. […] Maintenant, d’ailleurs, ce travail de reconstruction, fût-il salutaire, serait impossible : on ne rebâtit pas le temple quand les pierres dont il était formé, sont cassées, émiettées, en un mot, poussière.
Dans cette prévision, une Société en commandite s’est formée pour la construction d’une arche de sauvetage. […] Grâce à ses relations, il entre dans la littérature comme les gens qui arrivent en retard à la porte d’un théâtre, rompent avec violence la queue formée, et se mettent à la tête, de façon à pénétrer les premiers dans la salle, sans avoir eu les ennuis de l’attente. […] *** Je m’aperçois que ces remarques ne sont pas à leur place au milieu de ces lignes frivoles, — qui auraient pu, sans que personne y perdît, rester dans le carnet, où les jetaient les hasards de la flânerie ; — mais il est bien difficile de ne point parler de misère à propos d’un pays où l’haleine d’une population mourant de froid pendant l’hiver suffit pour former un brouillard qui cache la vue du soleil. […] Les plus grandes dames d’aujourd’hui auraient pu consulter mademoiselle Rachel sur la manière de s’envelopper dans un châle. — Elle possédait, avec la merveilleuse intuition que donne l’art, le sens intime des grandes élégances de l’attitude et du vêtement. — Dans le moulage qui aurait reproduit les plis formés par son cachemire, un statuaire aurait pu, sans commettre d’anachronisme, couler la tunique destinée à revêtir les lignes harmonieuses d’une figure antique. […] Avant peu, ces deux interjections finiront par former à elles seules le fond de la langue.
De quelle façon s’est-il formé ? […] À peine a-t-il quelques heures pour former et pour écrire son avis sur un ouvrage qui a coûté des mois et des années de travail. […] Son développement témoigne à la fois d’une logique et d’une décision qui ont à bon droit fait de lui un chef d’école, autant qu’une école littéraire peut se former dans notre époque d’éparpillement. […] Avons-nous démêlé ici tous les éléments qui forment sa personnalité complexe ? […] Deux étangs, qui jadis n’en formaient qu’un seul, mais qui sont séparés à jamais par une bande de terre, lui apparaissent comme deux amoureux dont le temps a fait deux étrangers.
Et l’on est tenté de regretter l’image trop compliquée, mais beaucoup plus intéressante, qu’on s’en formait auparavant. […] Ce dernier mot était formé des initiales de ses quatre maris : André, Louis, Jacques et Othon. […] C’est que, plus nous « inventons » une créature vivante ou morte, plus nous mettons du nôtre dans l’image que nous nous formons d’elle, et plus nous l’aimons. […] Il n’a donc point prétendu former un honnête homme, mais un homme du monde ; par conséquent, il n’a point voulu corriger les vices, mais les ridicules, et il a trouvé dans le vice même un instrument très propre à y réussir. […] Les événements dont elle se compose forment un tout indivisible et sacré.
., plus hardiment que jamais, formait des synthèses calamiteuses ; et tout cela se ruait à l’assaut des cervelles démoralisées, qu’en même temps échauffait leur concupiscence juvénile. […] Or, ce n’est point assez de dire que nul esprit ne résiste à pareille débauche : disons que toutes les idées ne coexistent pas sans former une tourbe d’émeute où il y a des tueries. […] Pour la première fois, depuis la grande dispersion, depuis qu’ils ont formé un nouveau foyer, ils reçoivent leur Supérieur. Autour de la table, sous la pauvre lumière d’une lampe, ils forment une petite société d’amis vérifiés par le malheur. […] Un tel lyrisme n’a point, dans la littérature antique, son équivalent ; et il ne l’a point dans notre littérature classique, formée à l’école de l’antiquité, formée à l’école de la raison.
Cet esprit, d’ailleurs, a formé ce cadre à l’image de la compagnie qui s’y rencontre et qui peut reconnaître sa complexité personnelle dans la complexité de son ameublement. […] L’homme supérieur se distingue de l’homme de génie, lequel est parfois assez inintelligent, et de l’homme de talent, lequel n’est souvent qu’un spécialiste, par la capacité de se former sur toutes choses des idées générales. […] L’homme qui pense, en tant qu’il pense, peut s’opposer à la nature, puisqu’il peut se former des choses une idée qui le mette en conflit avec elle. […] Mais précisément ces théories ont formé des disciples, ces procédés ont rencontré des fidèles, et à travers cette initiation de rhétorique, une initiation intellectuelle et sentimentale s’est accomplie, qu’il faut caractériser pour que cette étude sur le rôle psychologique de l’auteur de Madame Bovary ne soit pas trop incomplète. […] Le milieu De ce que le philosophe ne calcule pas le retentissement direct de sa doctrine, il ne suit point que cette doctrine soit absolument indépendante du milieu où elle a été formée.
de plus fatigant, si ce n’est pas sans doute une petite affaire que de se former sur la Révolution une opinion raisonnée ; de plus inutile, puisqu’enfin M. […] C’est une conséquence qu’il tire d’une certaine idée qu’il s’est formée de Dieu, dont la « toute-puissance » ne serait qu’un leurre, et la « bonté » qu’un mot, si ce monde, qui passe pour être le chef-d’œuvre de ses mains, était radicalement mauvais. […] Je sais bien pourquoi nos poètes et nos romanciers ne veulent plus aujourd’hui d’écoles : c’est que, pour former une école, il faut être au moins deux, un maître et un disciple ; et personne aujourd’hui ne veut être « disciple », mais chacun a la prétention de ne ressembler qu’à lui-même. […] Ou encore, et si nous généralisons, ce qu’il y a d’étrange, d’insolite, et de contradictoire au bon sens dans la conception que les Baudelaire et les Flaubert se sont formée de l’art, n’est-ce pas, justement ce qu’ils y ont mis quand ils étaient, malades ? […] Si l’objet de l’enseignement secondaire est de former l’esprit, et non de l’accabler sous un fastueux amas de connaissances prétendues positives, aucune littérature, non pas même la nôtre, qui cependant lui ressemble le plus, ne vaudra pour cet usage la littérature latine… Mais ce n’est pas la question que je veux examiner aujourd’hui.
Il voit dans cette nouvelle industrie des soies, « plutôt méditative, oisive et sédentaire », une cause d’affaiblissement, même au moral ; il craint que cet emploi d’un nouveau genre ne désaccoutume la population de la vie laborieuse et pénible qui est propre à former de bons soldats.
« C’est dans les plus beaux fruits, dit saint Augustin, que les vers se forment, et c’est aux plus excellentes vertus que l’orgueil a coutume de s’attacher. » Bourdaloue partait de là pour montrer que, si la sévérité évangélique est le fruit le plus exquis et le plus divin que le christianisme ait produit dans le monde, « c’est aussi, il le faut confesser, le plus exposé à cette corruption de l’amour-propre, à cette tentation délicate de la propre estime, qui fait qu’après s’être préservé de tout le reste, on a tant de peine à se préserver de soi-même ».
Les jolies descriptions de paysage, les vues si bien présentées du lac de Côme et de ses environs, ne sauraient par leur cadre et leur reflet ennoblir un personnage si peu digne d’intérêt, si peu formé pour l’honneur, et si prêt à tout faire, même à assassiner, pour son utilité du moment et sa passion.
Jeunes, les gens de lettres sont éloignés du monde, dont le commerce modéré, recherché sans avilissement d’un côté, accordé sans orgueil de l’autre, servirait infiniment à les former : dans un âge plus avancé ils y sont portés, fêtés, absorbés, de manière qu’il ne leur reste plus de temps pour l’étude ou le travail.
Ce qu’on ne saurait oublier en le lisant, c’est qu’il a été élève de l’École normale, qu’il s’y est formé dans le recueillement et la méditation, que sa première jeunesse, dont il est à peine sorti, a été forte, laborieuse, austère.
il ne faut pas, celui-là, qu’il sorte de ton école, mon cher Sénèque, mais bien de l’école de Celui qui seul peut enseigner excellemment et changer les âmes de ses disciples, et les former selon qu’il le veut.
Mais on en a bien assez pour se former dès à présent une juste et complète idée : la suite des lettres à M.
Ce qu’on a appelé ses Œuvres et ses Mémoires, et qui ont été remis en lumière récemment47, nous le montrent dès 1661, et dans les années qui précédent la guerre de 1667, déjà formé par l’âme et le caractère.
Ses théories, telles que je viens de les recomposer ; forment évidemment un tissu de vérités, de taquineries et d’impertinences.
La fin du journal de Mlle de Guérin offre plus de variété que le début : elle est formée, elle est mûre : elle a reçu tous les enseignements de la douleur.
Gachard, dans deux Introductions de la plus exacte analyse qui précèdent les pièces et documents publiés par lui et tirés des archives de Simancas, et dans ces pièces mêmes, nous a donné et distribué, en les interprétant, les éléments positifs à l’aide desquels chacun peut désormais se former un jugement propre.
Né de lui-même, formé par des lectures personnelles, par des comparaisons directes, incessantes, et par une rude expérience première des choses de la vie, l’auteur dont nous parlons s’est de bonne heure tracé une route et a obéi à une vocation dont il n’a jamais dévié.
Les premières sont adressées à Sedaine, un homme de génie dans son genre, inégal, mais qui trouve du neuf à chaque pas, et qui s’était formé seul.
De petits séminaires dirigés avec zèle et habileté formèrent de nombreux élèves.
Ainsi, du côté paternel et maternel, tout avait contribué à faire d’Horace l’homme du crayon, un peintre involontaire, irrésistible : sa main fine, mince, longue, élégante, naissait avec toutes les aptitudes, toute formée et dressée pour peindre, comme le pied du cheval arabe pour courir.
Sa nomination, proclamée avec d’autres en séance solennelle au Louvre, fut accueillie par une double salve d’applaudissements, Quelque temps après, Gavarni, qui s’entend peu aux compliments, alla chez M. de Nieuwerkerke : « J’ai voulu voir, lui dit-il, celui qui a eu l’idée de décorer Gavarni. » Arrivé à la plénitude de la vie, à la conscience du talent satisfait qui désormais peut indifféremment continuer ou se reposer, et qui a fait sa course, — après bien des traverses et une de ces douleurs cruelles qui éprouvent à fond le cœur de l’homme35, — Gavarni ne formait plus qu’un souhait : rêver, travailler encore, et trouver son dernier bonheur, comme Candide, à cultiver son jardin.
Toute notre langue n’est fondée que sur l’usage ou l’analogie, « laquelle encore n’est distinguée de l’usage que comme la copie ou l’image l’est de l’original, ou du patron sur lequel elle est formée. » Ainsi il n’y a, à le bien voir et en définitive, qu’un seul et même principe et fondement.
J’ai souvent fait un rêve, ou plutôt (car la chose est irréparable) j’ai formé et senti un regret : c’est que parmi toutes ces générations qui se sont succédé dans notre France légère depuis tant de siècles, il ne se soit pas trouvé, à chaque génération un peu différente, un témoin animé, sincère, enthousiaste ou repentant, présent d’hier à la fête ou survivant le dernier de tous et s’en ressouvenant longtemps après ; lequel, sous une forme quelconque, ou de récit naïf, ou de regret passionné, ou de confession fidèle, nous ait transmis la note et la couleur de cette joie passagère, de cette ivresse où l’imagination eut bien aussi sa part.
Vers l’âge de seize ans son goût était formé, disait-il, autant qu’il le fut plus tard.
Il était trop bon, de cette bonté naïve, expansive, qui se confie en celle des autres, qui va au-devant, qui abonde dans l’idée de l’amour des peuples comme en des amours de nourrice ; qui ne compte pas assez sur les sentiments très mélangés, très équivoques, dont est formée en soi et par lesquels se présente surtout à un prince la nature humaine.
Giguet, on aura remarqué que les traces qu’il signale de la colère d’Achille, dans les chants IV, V et VII de l’Iliade actuelle, sont des fils bien légers pour former ce qu’on appelle un nœud.
Le maréchal de Noailles, commandant à la frontière du Nord, a obtenu du roi la liberté de lui écrire directement sur les affaires militaires : il lui demande la même permission pour la politique en général : « Il est presque impossible, écrit-il au roi, de former aucun plan particulier avec solidité, sans embrasser le tout.
C’est à l’œuvre et par la pratique qu’ils se sont formés.
D’Alembert, dans l’article qu’il lui a consacré comme à un membre de l’Académie (article qu’il s’est bien gardé d’intituler Eloge), a raconté une singulière idée que le prince mita exécution quand il eut vingt ans : « Il avait formé une Société littéraire, aux assemblées de laquelle il assistait quelquefois, et qui avait pris le titre de Société des Arts.
Qu’il chante ouvertement ou sous voile d’allusion les douleurs et les oppressions de la patrie, qu’il se reporte aux calamités, aux espérances ou aux plaintes de l’Italie et de la Grèce, qu’il raille au théâtre certains préjugés, qu’il flétrisse certaines tyrannies, il est toujours aisément d’accord avec ce que sont tentées de penser et de sentir sur ces sujets la plupart des natures droites et saines, des jeunes âmes écloses du milieu de notre société et formées par notre éducation libérale.
Supposez, dans l’enfance ou dans l’adolescence du monde, un homme à demi sauvage, doué seulement de ces instincts élémentaires, grossiers, féroces, qui formaient le fond de notre nature brute, avant que la société, la religion, les arts eussent pétri, adouci, vivifié, spiritualisé, sanctifié le cœur humain ; supposez qu’à un tel homme, isolé au milieu des forêts et livré à ses appétits sensuels, un esprit céleste apprenne l’art de lire les caractères gravés sur le papyrus, et qu’il disparaisse après en lui laissant seulement entre les mains les poésies d’Homère !
Ces dons, ou ces conditions nécessaires pour former un historien immortel, sont presque impossibles à réunir dans un même homme.
Elle a été un des procédés les plus féconds qui aient contribué à former le langage humain ; et dans le développement et l’évolution de chaque langue, son rôle a été immense.
Les ouvrages, de genres si différents, qu’il produisit avec une verve intarissable pendant l’espace de quarante-trois ans, forment à peu près soixante volumes : on les a réduits à six sous le titre de Chrestomathie de Jean Paul, et ce livre est regardé comme le vade mecum de tous les penseurs de la Germanie.
Si simple que soit le style de Pascal, et quoiqu’on ait eu raison de dire que, « rapide comme la pensée, il nous la montre si naturelle et si vivante, qu’il semble former avec elle un tout indestructible et nécessaire », ce style, dès qu’il se déploie, a des développements, des formes, du nombre, tout un art dont le secret n’est pas celui du héros qui court à sa conquête.
Il croissait sous la triple garde de ces fortes vertus ; il croissait comme un enfant de Sparte et de Rome, ou pour mieux dire encore, et pour dire plus vrai, il croissait comme un enfant chrétien, en qui la beauté du naturel et l’effusion de la Grâce divine forment une fête mystérieuse que le cœur qui l’a connue ne peut oublier jamais.
Mohl, on peut se former jusqu’à un certain point une idée du génie personnel de Ferdousi.
Resté le dernier survivant de la génération d’écrivains à laquelle il appartenait, il lui faisait honneur à nos yeux ; il la personnifiait par les meilleurs côtés ; c’est en la jugeant par lui qu’on s’en pouvait former l’idée la plus favorable.
Qu’on se rappelle cette nuit qu’il passe à la belle étoile au bord du Rhône ou de la Saône, dans un chemin creux près de Lyon : Je me couchai voluptueusement sur la tablette d’une espèce de niche ou de fausse porte enfoncée dans un mur de terrasse ; le ciel de mon lit était formé par les têtes des arbres ; un rossignol était précisément au-dessus de moi, je m’endormis à son chant ; mon sommeil fut doux, mon réveil le fut davantage.
Il y a eu, au milieu du xviiie siècle, un homme jeune et déjà mûr, d’un grand cœur et d’un esprit fait pour tout embrasser, qui s’était formé lui-même et qui ne s’en était pas enorgueilli, fier à la fois et modeste, stoïque et tendre, parlant le langage des grands hommes du siècle précédent, ce langage qui semblait n’être ici que l’expression naturelle et nécessaire de ses propres pensées ; sincèrement et librement religieux sans rien braver, sans rien prêcher ; réconciliant, en un mot, dans sa personne bien des parties opposées de la nature en montrant l’harmonie.
Car, pour l’aimable traducteur Amyot, ce n’est qu’avec un peu de complaisance qu’on s’est accoutumé à l’associer d’ordinaire à ces deux grands auteurs originaux ; et en ce qui est de Calvin, qui contribua certes à former la langue à la discussion, à serrer, à tremper et à raffermir dans le discours la chaîne exacte du raisonnement, ce mérite notable ne suffit pas à l’élever au-dessus des bons écrivains : il n’a point gagné sa place entre les grands.
Et il continue de les montrer travaillant jusqu’à l’extrémité, même dans leur douleur, même dans leurs maladies, jusqu’au moment où la force leur manque : « Celui-là qui fouit mon jardin, il a ce matin enterré son père ou son fils… ils ne s’alitent que pour mourir. » Tout ce chapitre est beau, touchant, approprié, se sentant à la fois d’une noble élévation stoïque, et de cette nature débonnaire et populaire de laquelle Montaigne se disait à bon droit issu et formé.
Ces filles sont élevées de manière qu’il faudrait, de toutes, en faire des dames du palais, sans quoi elles sont malheureuses et impertinentes51. » Je ne serais pas étonné, en effet, que, dans cette institution formée sous l’influence unique de Mme de Maintenon, il ne se fût glissé un peu de vaine gloire.
Émile Augier ont formé une sorte d’école ou l’élégie grecque et latine est venue s’essayer et faire épisode au théâtre.
Envoyé à Rome pendant l’occupation de 1799, témoin de cette émulation de rapines que le gouvernement du Directoire propageait partout dans les républiques formées à son image, il écrit à son ami Chlewaski qu’il a laissé à Toulouse : Dites à ceux qui veulent voir Rome qu’ils se hâtent, car chaque jour le fer du soldat et la serre des agents français flétrissent ses beautés naturelles et la dépouillent de sa parure… Les monuments de Rome ne sont guère mieux traités que le peuple.
Le roi d’abord à part et seul dans un vers ; Condé de même, qui le méritait bien par son sang royal, par son génie, sa gloire et son goût fin de l’esprit ; Enghien, son fils, a un demi vers : puis vient l’élite des juges du premier rang, tous ces noms qui, convenablement prononcés, forment un vers si plein et si riche comme certains vers antiques : …………………… Que Colbert et Vivonne, Que La Rochefoucauld, Marcillac et Pomponne, etc.
Le premier effet qu’il éprouve, en arrivant surtout à Rome et en voyant les immenses richesses d’antiquités qui y sont accumulées, c’est l’étonnement et presque le découragement : N’espérons plus, s’écrie-t-il, de former de pareilles collections ; nous vivons dans un pays de fer pour les antiquaires.
Ces organes se sont formés peu à peu parce qu’il est utile à l’animal d’être averti avant d’être blessé : il en est résulté un avantage sur les animaux doués de systèmes d’avertissement moins rapides.
On étonnerait fort Solon, fils d’Exécestidas, Zenon le Stoïcien, Antipater, Eudoxe, Lysis de Tarente, Cébès, Ménédème, Platon, Épicure, Aristote et Epiménide, si l’on disait à Solon que Ce n’est pas la lune qui règle l’année ; à Zenon, qu’il n’est point prouvé que l’âme soit divisée en huit parties ; à Antipater, que le ciel n’est point formé de cinq cercles ; à Eudoxe, qu’il n’est pas certain qu’entre les Égyptiens embaumant les morts, les Romains les brûlant et les Pæoniens les jetant dans les étangs, ce soient les Pæoniens qui aient raison ; à Lysis de Tarente, qu’il n’est pas exact que la vue soit une vapeur chaude ; à Cébès, qu’il est faux que le principe des éléments soit le triangle oblong et le triangle isocèle ; à Ménédème, qu’il n’est point vrai que, pour connaître les mauvaises intentions secrètes des hommes, il suffise d’avoir sur la tête un chapeau arcadien portant les douze signes du zodiaque ; à Platon, que l’eau de mer ne guérit pas toutes les maladies ; à Épicure, que la matière est divisible à l’infini ; à Aristote, que le cinquième élément n’a pas de mouvement orbiculaire, par la raison qu’il n’y a pas de cinquième élément ; à Epiménide, qu’on ne détruit pas infailliblement la peste en laissant des brebis noires et blanches aller à l’aventure, et en sacrifiant aux dieux inconnus cachés dans les endroits où elles s’arrêtent.
Pour assembler ces unités et leur donner la cohésion de façon qu’elles forment un vers il les faut apparenter.
Mais, repliquera-t-on, il faut du moins tomber d’accord que la logique, que l’art de penser est aujourd’hui une science plus parfaite que ne l’étoit la logique des anciens, et il doit arriver par une consequence necessaire, que les modernes qui ont appris cette logique et qui ont été formez par ses regles, raisonnent sur toute sorte de matieres avec plus de justesse qu’eux.
C’est que, non seulement toutes les forces de l’univers viennent aboutir en elle, mais de plus, elles y sont synthétisées de manière à donner naissance à un produit qui dépasse en richesse, en complexité et en puissance d’action tout ce qui a servi à le former.
Des vapeurs, au moins, ont formé ce météore qui semble grandir et s’avancer vers nous.
Peu soucieux, d’ailleurs, de se contredire et de se prendre honteusement dans sa propre inconséquence, Saint-Simon ne craignit pas d’écrire que cet esprit foncièrement médiocre était capable de « se former et de s’élever…, qu’il voulait l’ordre et la règle…, qu’il était né sage, modéré, maître de ses mouvements et de sa langue, et le croira-t-on ?
Les dissertations qui forment l’ensemble de ce volume n’ont pas, il est vrai, le même mérite et la même importance, mais toutes ont l’empreinte de la robuste main qui a équarri et taillé leurs quelques blocs.
Je ne l’insulterai pas, moi, de ce mot dont il s’est insulté : j’aime mieux dire que c’était un poète qui n’a pas assez respecté la virginité de ses impressions premières, mais chez qui pourtant les premières impressions ont résisté aux élégances d’école auxquelles il se forma plus tard.
Eh bien, c’est un ensemble encore plus large et plus étreint que celui de Callot, qu’a voulu réaliser, dans un autre genre d’Art et d’expression, un jeune homme qui n’a pas été un bohémien comme Callot, mais tout au plus un bohème comme on l’est quelquefois, quand on a vingt ans, à Paris, au xixe siècle, et ce jeune homme s’est cru de force à mettre dans un livre de sentiment et d’observation, et de chanter ou de faire chanter en des poésies personnelles ou impersonnelles, toutes les misères de son temps, ces misères invincibles à la philanthropie, et qui, sous le costume et les vices de chaque siècle, forment la Misère éternelle !
Presque tous les provinciaux aisés traversent Paris plusieurs fois l’an, beaucoup de leurs fils font leur éducation à Paris, les autres rencontrent dans les collèges, et dans les lycées, dans les maisons d’enseignement libre et dans celles de l’État, des professeurs formés à Paris ou parlant le plus pur français.
Supposez qu’un physiologiste chargé de décrire l’estomac s’amuse à raconter les différents états de la puissance digestive et des capacités motrices, sécrétives, innervatrices, au lieu de remarquer que l’organe est une poche en forme de cornemuse, formée par quatre tuniques, munie de trois sortes de glandes, aboutissant d’un côté au cardia et de l’autre au pylore, animée par des rameaux du nerf pneumogastrique et du plexus solaire ; non-seulement il aura fait des barbarismes, mais il n’aura rien dit.
L’esprit, le goût, l’éloquence, la langue même, rien n’était formé.
Derrière le camp s’est formée une espèce de marché ou de foire. […] Avec les deux volumes de l’Essai sur les Révolutions, les deux volumes des Natchez forment la plus grande masse de pages désespérées par où un écrivain de génie ait jamais débuté. […] Le vide qui s’était formé au fond de son âme ne pouvait plus être comblé. […] « Peu à peu mon imagination fatiguée de repos… vit se former de lointains fantômes. […] Ils tombent, la neige les couvre ; ils forment sur le sol de petits sillons de tombeaux… Des corbeaux et des meutes de chiens blancs sans maîtres suivent à distance cette retraite de cadavres.
L’ignorance pas plus que le silence ne sont des crimes en pareil cas ; il est impossible de connaître toutes les petites églises de gens de lettres qui se sont formées depuis une dizaine d’années, et par conséquent d’en parler. […] Ces raisons m’ont fait adopter le système des citations qui, encadrées de réflexions écrites au jour le jour, forment ces quatre volumes. […] Naturellement, on avait voulu voir dans l’incandescent Roumestan, avocat, député, ministre, l’homme qui devait former le grand cabinet, et on ne s’était pas gêné pour souligner à l’ami les prétendues perfidies de l’ami. […] — La vérité, c’est que le germe de cette dernière œuvre était formé dans son esprit longtemps avant qu’il fût question pour lui de penser à devenir un immortel. […] Dans son cou maigre et tendu, des creux profonds se formaient à chaque aspiration.
Quand on relit Chateaubriand et Flaubert dans l’unique but de cette comparaison littéraire, on reste confondu de voir pour ainsi dire à chaque page naître et se former la pensée et le style de Flaubert. […] C’est donc surtout dans Chateaubriand et par Chateaubriand que Flaubert s’est formé. […] On connaît son procédé travail : il remplit, un peu chaque jour, des pages volantes qui, à la longue, finissent par former un livre, fixant ainsi involontairement sa propre vie, qui devient de l’art à son insu. […] Cette perpétuelle intimité avec le ciel et les bois formera la substance même de son talent. […] La nouveauté des sujets, la violence de l’exécution rendent infiniment attrayantes les qualités classiques qui forment pour ainsi dire la base du style de Flaubert, comme elles sont la base de tous les styles possibles.
Tous trois sont, en réalité, formés d’un élément simple et commun : la Sensation. […] Certaines notes, par leur réunion, formèrent d’autres notes : à l’octave furent joints, chargés de significations spéciales, les accords de quarte et de quinte. […] Mallarmé, un florilège ; mais les fleurs qu’on y a choisies suffisent à former un bouquet précieux et rare, et je ne me lasse pas d’en respirer le parfum. […] L’univers que nous croyons réel est formé de nos idées, et nos idées sont la création de notre âme. […] Même elle avait pressenti la valeur pédagogique des leçons de choses : car c’est en d’abondantes narrations qu’elle développait cette science, destinée à me former un esprit.
La poésie est l’arithmétique de l’imagination, à ce que prétend un mien ami, un autre dit que c’est trop lui accorder, et soutient que ce que les poètes prennent pour un don du ciel et ont en joie, est une infirmité, une sécrétion maladive d’hémistiches qui se forment dans un cerveau décomposé et suintent plus ou moins péniblement. […] Le mot appartient à Schiller ; la doctrine s’est formée parce qu’on a reconnu, par la comparaison des talents, que les écrivains qui avaient peint sincèrement leur époque étaient supérieurs aux autres comme artistes, comme exécutants, avaient une intelligence et un sentiment plus profonds. […] Cette peinture était incomplète, vague et mal conçue, on le voit, les passants s’y arrêtaient à peine, hésitaient, cherchaient et n’y formaient pas foule comme autour de l’autre, dont ils avaient peine à se rassasier. […] J’ai vu aussi quelques drames, un grand mouvement de groupes formés par les relations des gens entre eux, et se rencontrant sur tous les terrains, à l’église, dans la salle à manger, au salon, au cimetière, sur le champ de manœuvre, à l’atelier, partout. […] D’autres demandent quelle est d’ailleurs la manière d’être réaliste, puisqu’il y a deux manières de peindre ; la peinture de l’être extérieur, et la peinture de l’être intérieur, qui forment deux voies séparées.
Ivan Tourgueneff (suite) I Jacques Passinkof, Faust, le Ferrailleur, les Trois Portraits, l’Auberge de grand chemin, quelques essais dramatiques et enfin Deux journées dans les grands bois, magnifique scène descriptive des plaines ténébreuses de la Grande Russie, forment le premier et le second volume de cette collection étrange, pittoresque et attachante. […] Il s’avançait en lignes ondoyantes, ou, pour parler plus exactement, en petites murailles dentelées, formées de langues de feu rejetées en arrière par le vent qui emportait la fumée. […] » Lavretzky se leva et s’éloigna doucement ; personne ne s’en aperçut, personne ne le retint ; les cris joyeux retentissaient plus fort encore derrière le mur épais et verdoyant formé par les grands tilleuls.
Les personnages, qu’on voit ailleurs s’agiter stérilement dans leur coin isolé, se cherchent ici, se mêlent, se concertent : Mme Chappe, la vieille fille Ursule Creton, les demoiselles Jérusalem, laissant à la maison leurs petites pratiques et leurs petites manies, accourent au même dessein, se réunissent pour former la toile où se prendra cette pauvre Louise… Et, une fois prise, comme elles lui retourneront agilement dans le cœur leurs aiguilles à tricoter ! […] Le dénouement de la Vertu de Célimène serait-il une concession, une caresse au public qu’a formé Scribe ? […] Comment ce monstre s’est-il formé ? […] — Veut-on, demandais-je, exprimer par là que les situations se mêlent, s’emboîtent, se superposent avec une logique inattaquable ; que, parties de la donnée, elles aboutissent si directement à un dénouement nécessaire, fatal, qu’elles forment un édifice dramatique d’une solidité à défier les boulets de la critique ? […] je n’ignore pas quelles bassesses et même quels crimes formaient l’envers de cette grandeur, quel tissu de hontes ces broderies pompeuses ornaient et cachaient !
qui, après avoir fait l’homme à votre image, lui avez donné pour aide inséparable la femme, que vous avez formée de lui-même, pour nous apprendre qu’il n’est jamais permis de séparer ce qui n’a jamais été qu’une même chose dans l’institution que vous en avez faite ! […] Le roman, qui s’est formé dans les nuées de l’imagination, en descend pour se nouer par deux fois dans la boue et se dénoue dans le suicide. […] Mais ceux dont le jugement est plus ferme et plus formé éprouvent une véritable fatigue, malgré les agréments de la composition et du style, à suivre l’auteur dans le développement de ce petit drame où la fantaisie déborde et où la vérité tient si peu de place. […] Vous ajoutez que « 93 n’est qu’un coup de tonnerre sorti d’un nuage qui s’est formé pendant quinze cents ans ». […] Alors le nuage a commencé à se former avant la naissance de Clovis, ce qui le fait remonter un peu haut.
Il y a eu, et datant aussi de la même époque, la fondation de la Congrégation de Saint-Sulpice, dont le but était de former un clergé instruit des dogmes de la théologie, de principes moraux, alors que, jusque-là les prêtres des campagnes et des petites villes de province demeuraient aussi ignorants et aussi peu respectés que les popes de la Russie contemporaine. […] L’observation, les souvenirs, les « on-dit » des gens, forment la trame du récit. […] — pour ceux qui, au point de vue religieux trouvent autant de satisfaction aux rudes blasphèmes de Mme Ackermann qu’aux émouvantes effusions mystiques de Verlaine ; qui aiment toutes les couleurs pourvu que ces couleurs forment un beau tableau, cette évolution ne les intéresse qu’en ce qui concerne l’art. […] Ce mathématicien, ce polytechnicien, formé par les Jésuites de la rue des Postes, n’a pas été tendre pour ses maîtres. […] D’abord, précisément parce qu’ils sont involontaires, qu’ils se forment d’eux-mêmes, ils ont seuls, attirés par la ressemblance d’une minute identique, une griffe d’authenticité.
Un chimiste suédois, Scheele, avait découvert, en 1770, en analysant les croûtes épaisses de tartre formées dans les tonneaux de vin, un acide qu’il avait appelé l’acide tartrique. […] Qui ne connaît la précocité de Pascal enfant et avec quelle ardeur son intelligence à peine formée s’appliquait d’abord à la géométrie, puis à la physique ? […] Il a vraiment, et jusqu’au terme de sa longue carrière, réalisé, sans une défaillance, l’idéal que sa studieuse jeunesse s’était formé à l’art d’écrire, idéal qu’il traduisait dans son hommage à Gautier : Heureux qui, comme Adam entre les quatre fleuves, Sut nommer par leur nom les choses qu’il sut voir. […] Eux aussi, ne furent-ils pas des riverains de cette Méditerranée autour de laquelle s’est formée toute notre civilisation ? […] Il a parlé quelque part de « l’aptitude des lieux à former les âmes ».
Leopardi attribuait une grande importance aux bonnes traductions, une importance proportionnée à l’idée qu’il s’était formée de l’excellence des anciens. […] On se rappelle, au livre IV de l’Odyssée, le beau passage où Ménélas exprime devant Télémaque sa tendre amitié pour Ulysse, et le vœu qu’il avait autrefois formé de le réunir à lui : « Je lui aurais, dit-il, fondé une ville dans le pays d’Argos et bâti des palais, le faisant venir d’Ithaque avec ses biens et son fils et tous ses peuples… et là nous aurions vécu unis ensemble, et rien autre chose ne nous aurait pu séparer dans cette douceur de nous aimer et de nous conjouir, avant que le noir nuage de la mort nous vînt envelopper. » Ici s’exprime et déborde dans sa plénitude le sentiment de bonheur des deux amis.
Ayant repris courage, je m’attachai à mon colosse qui était ma statue de Mars, dont la carcasse était formée de morceaux de bois artistement entrelacés et revêtus de plâtre ; et je raconterai une anecdote plaisante à laquelle cette statue donna lieu. […] J’allai voir aussitôt mon fourneau, où le métal avait formé une espèce de pâté ; mais j’envoyai chercher du bois de chêne, qui fait un feu plus vif que les autres ; j’en remplis la fournaise, et bientôt je vis ce pâté s’amollir.
Nous devons, suivant nos talents, nos penchants, notre situation, développer chez nous, fortifier, rendre plus générale la civilisation, former les esprits, et surtout dans les classes élevées, pour que notre nation, bien loin de rester en arrière, précède tous les autres peuples, pour que son âme ne languisse pas, mais reste toujours vive et active, pour que notre race ne tombe pas dans l’abattement et dans le découragement, et soit capable de toutes les grandes actions quand brillera le jour de la gloire. — Mais, pour le moment, il ne s’agit ni de l’avenir, ni de nos vœux, ni de nos espérances, ni de notre foi, ni des destinées réservées à notre patrie ; nous parlons du présent, et des circonstances au milieu desquelles paraît votre journal. […] Ces moyens extérieurs font plus qu’on ne croit, et l’on doit venir au secours de l’esprit de toutes les manières. » Goethe fit apporter ce manuscrit nouvellement broché, et je fus surpris de sa grosseur ; il formait un bon volume in-folio.
Galton a reproduit artificiellement un travail analogue par des procédés purement mécaniques, en combinant plusieurs portraits de manière à former ce qu’il appelle un portrait générique ou typique. […] Un concept relatif à des objets de perception, comme le cheval, l’homme, la couleur, le triangle, etc., ne peut être formé lui-même que de perceptions ; le total, ici, ne peut différer en nature de ses parties ; il est plus vague, mais il est toujours une représentation, une image, fut-ce à l’état naissant.
On a fait bien des tableaux de Paris… la plus ressemblante de ces images est, à coup sûr, l’image du dessein le plus formé et le plus net. […] que j’ai formé » disait Baron !
De toutes les facultés qui forment son talent très complexe, la première et la plus caractéristique, c’est l’observation et le sentiment de la comédie, et nous en avons été frappé il y a longtemps. […] (historique aussi sous sa forme militante et enflammée) aurait pu d’ailleurs faire pressentir ; mais il n’y a vraiment que ceux qui liront ces Merveilles du Mont Saint-Michel, lesquelles forment une merveille de livre, qui la trouveront justifiée.
La question est alors de savoir comment nous réussissons à former une série de ce genre avec des intensités, qui ne sont pas choses superposables, et à quel signe nous reconnaissons que les termes de cette série croissent, par exemple, au lieu de diminuer : ce qui revient toujours à se demander pourquoi une intensité est assimilable à une grandeur. […] Delbœuf dans les conclusions qu’il a tirées de ces remarquables expériences : la question essentielle, la question unique, selon nous, est de savoir si un contraste AB, formé des éléments A et B, est réellement égal à un contraste BC, composé différemment.
La première commotion passée, il se dit avec ce bon sens et cette réflexion sans amertume dont il était pourvu et qui formait la base de son caractère : « Je n’ai plus de fortune à faire : je n’ai qu’à remplir honnêtement la carrière de mon état, et à m’acquérir la considération qui doit accompagner une grande dignité : pour cela la retraite est merveilleuse. » C’est sous cette dernière forme, non plus politique, non plus tout à fait mondaine, non pas absolument ecclésiastique, mais agréablement diversifiée et mélangée ; c’est dans cette retraite suivie et couronnée bientôt d’une grande ambassade, qu’il nous sera possible de l’étudier désormais en sa qualité de cardinal, et que nous aimerons à reconnaître de plus en plus en lui le personnage considérable, d’un esprit doux, d’une culture rare et d’un art social infini.
Au lieu de voir en lui ce qu’il était avant tout, un caractère et une capacité rare, diverse et complexe, formée avec travail et appliquée au fur et à mesure aux diverses circonstances et difficultés de son temps, on lui prêta une doctrine générale, philosophique, d’après le Télémaque ou d’après les économistes.
Mais Mme Necker, à qui il ne craignait pas de s’ouvrir de ses tristesses, et en laquelle, vers la fin, il retrouvait une dernière amie comme elle avait été la première, lui disait : Gardez-vous, monsieur, de former un de ces liens tardifs : le mariage qui rend heureux dans l’âge mûr, c’est celui qui fut contracté dans la jeunesse.
Il tient à former Joinville, à le fortifier dans la foi en même temps qu’à lui donner tous les bons conseils de civilité, de régime et de mœurs, qui pouvaient convenir à un jeune homme comme il faut d’alors.
Ils différaient tous trois dans leurs croyances ; je pris la quintessence de leurs opinions et m’en formai ma religion. » Dans cette religion catholique ainsi définie en gros, qu’elle crut et qu’elle pratiqua en toute bonne foi, il restait des traces et bien des habitudes de son premier culte.
Il commença à se former et à s’émanciper en suivant les cours de l’École centrale, institution fondée en 1795 par une loi de la Convention, et, en grande partie, d’après le plan de M.
Il était de Caen ; il s’était formé presque tout seul aux lettres, n’ayant commencé à apprendre Musa qu’à douze ans ; pour le grec particulièrement, où il excellait, il n’avait eu de maître que pendant très peu de mois, et s’était avancé à force de lire et d’étudier directement et aux sources.
Le président eut le prix en 1707, à l’âge de vingt-deux ans, pour un discours sur ce sujet proposé par l’Académie, « qu’il ne peut y avoir de véritable bonheur pour l’homme que dans la pratique des vertus chrétiennes. » En 1709 il n’eut qu’un accessit sur cet autre sujet, « que rien ne rend l’homme plus véritablement grand que la crainte de Dieu. » Les approbateurs, qui sont le théologal de Paris et le curé de Saint-Eustache, ne peuvent contenir leur admiration pour ce discours, « que la piété et l’éloquence, est-il dit, semblent avoir formé de concert ».
Louis XIV écrivit à Villars (20 septembre) une lettre d’une entière et magnanime satisfaction : Mon cousin, vous m’avez rendu de si grands et de si importants services depuis plusieurs années, et j’ai de si grands sujets d’être content de tout ce que vous avez fait dans le cours de la présente campagne, en arrêtant par vos sages dispositions les vastes projets que les ennemis avaient formés, et vous m’avez donné des marques si essentielles de votre zèle et particulièrement dans la bataille du 11 de ce mois, dans laquelle mes troupes, encouragées par votre bon exemple, ont remporté le principal avantage (Louis XIV, on le voit, accepte la version de Villars) sur nos ennemis, que j’ai cru devoir vous témoigner la satisfaction que j’en ai en vous accordant la dignité de pair de France ; vous avez bien mérité cet honneur, et je suis bien aise de vous donner cette distinction comme une marque particulière de l’estime particulière que je fais de vous.
La Beaumelle convient de tous les avantages de M. de Voltaire, et il attaque très malignement les faiblesses et les travers dont il n’y a point de grand homme qui ne soit susceptible, mais qui, présentés par une main ennemie, forment un tableau de ridicule. » Il ne lui conteste point que ses ouvrages ne soient d’un très bel esprit, il s’attache à y relever les traits de petit esprit. « Naître avec de l’esprit, dit-il quelque part, c’est naître avec de beaux yeux.
Je l’ai promis cependant, et je dois dire ici comment la personne que l’on commence, ce me semble, à entrevoir par bien des traits originaux, et qui nous arriva de Russie toute mure, toute formée, et douée d’une autorité précoce qui s’accrut considérablement avec les années, m’inspira, lorsque j’eus l’honneur de la connaître, plus de respect et de vénération que d’attrait.
L’église, d’une architecture moderne, en occupait le fond, et deux ailes en formaient les côtés.
C’est ainsi qu’une nuit, en Italie, il rêva qu’il était à Genève, en tiers avec sa sœur et une autre dame genevoise ; celle-ci se mit à lui parler avec franchise de ses qualités et défauts, et, entre autres vérités un peu dures, elle lui dit : « J’ai encore un reproche impardonnable à vous faire : c’est d’avoir abandonné votre patrie, et d’avoir voulu renoncer au caractère de citoyen genevois. » — Je me défendis d’abord, nous dit Sismondi, qui a pris soin de relater par écrit ce songe, en représentant que la société n’était formée que pour l’utilité commune des citoyens ; que, dès qu’elle cessait d’avoir cette utilité pour but et qu’elle faisait succéder l’oppression et la tyrannie au règne de la justice, le lien social était brisé, et chaque homme avait droit de se choisir une nouvelle patrie.
Le duc de Guise avait pris les armes ; la Ligue se formait et s’étendait : Henri III était débordé ou bien près de l’être.
Seul, au milieu du silence profond, un vent doux qui venait du Nord-Ouest et nous amenait lentement un orage, formait de légers murmures autour des joncs du marais.
Très-bourgeois en tout, Collé s’était pris, sur le tard, d’une vive amitié pour un petit cousin qui était surnuméraire dans les fermes, et c’est à ce jeune homme, pour le former au monde et aussi le pousser dans sa carrière, qu’il adresse, au nom de sa femme et au sien, de longs et minutieux conseils.
Les événements s’accélérant chaque jour et le péril croissant, la reine fut bientôt obligée d’être sérieuse, de peser des résolutions graves, de se former un avis sur le mode d’agir, d’avoir enfin de la décision et de la volonté pour deux : ici s’ouvre tout une autre vie pour elle, et elle suffit avec noblesse à ce second personnage qui put et dut commettre bien des fautes, mais qui ceignit la couronne d’épines, épuisa tous les calices et porta sa croix jusqu’au martyre.
Formé à la grande école des Condé, des Turenne, des Créqui, des Luxembourg, il expose, analyse et critique avec beaucoup de précision les quatre premières campagnes de Catinat (1690, 91, 92 et 93) ; il discute les deux batailles de Staffarde et de La Marsaille, et fait sa part exacte à chacun des combattants.
Rien n’est cependant plus du sien, et Sa Majesté est persuadée qu’il convient tout à fait à son service, de faire entrer son armée en Piémont la campagne prochaine… Vous devez avoir reçu une lettre de Sa Majesté par laquelle elle vous marque que, voulant absolument que son armée entre en Piémont la campagne prochaine, elle ne vous rendra en aucune façon responsable des événements de la campagne, et c’est ce qu’elle m’a encore ordonné de vous confirmer… Comme je crois que vous voulez bien me compter au nombre de vos amis, j’ai cru ne pouvoir vous donner une plus grande marque que j’en suis que de vous avertir pour vous seul, s’il vous plaît, que Sa Majesté est persuadée que, si votre goût n’était point aheurté à une guerre défensive, il ne se trouverait peut-être pas tant de difficultés à en faire une offensive cette année : ainsi, quoique je ne sois pas capable de vous donner des conseils, cependant je crois devoir vous donner celui de renouveler de soins et d’attentions pour essayer de rendre facile, par l’avancement de la voiture (du voiturage) des farines, une chose que le roi désire aussi ardemment. » Catinat répondait en remerciant Barbezieux de cet avis amical, et il protestait que la défensive n’était point chez lui un parti pris et que son goût n’était point aheurté à ce genre de guerre ; qu’elle lui tenait, au contraire, l’esprit dans une continuelle inquiétude dont il aimerait mieux se décharger en agissant ; il ajoutait : « Le roi me demande des mémoires sur les dispositions de l’offensive : je ne puis que me donner l’honneur de les lui envoyer aussi détaillés qu’il m’est possible avec les difficultés qui se rencontrent dans leur exécution, afin qu’il lui plaise de donner ses ordres pour les surmonter. » Louis XIV se rendait en dernier ressort aux raisons et démonstrations de Catinat ; mais il se formait de lui peu à peu une idée qui n’était plus aussi avantageuse qu’auparavant, ni aussi brillante.
Marie-Thérèse voudrait à la fois que la jeune reine eût de la discrétion et de l’influence, qu’elle ne s’ingérât point dans les affaires, mais qu’elle y entrât doucement et s’accoutumât à les bien entendre : « Je vous recommande toujours la lecture, unique moyen pour nous autres, et pour former nos idées et cœurs.
Parmi les souvenirs lointains que s’efforçait plus tard de ressaisir Mme Valmore, il en était qui évidemment se confondaient pour elle avec la réminiscence, et qui dans leur vague formaient une sorte de légende.
Tout sentiment généreux vous était naturel ; tout le feu des passions était dans votre mâle intelligence ; l’amour lui était nécessaire, il devait l’alimenter ; il eût achevé de la former pour de grandes choses ; mais rien ne vous a été donné, et le silence de l’amour a commencé le néant où s’éteint votre vie. » Le génie du paysage se révèle à chaque pas dans les récits d’Oberman.
On pourrait pousser longtemps cette suite de remarques ; mais, en réunissant des traits que je crois vrais de toute vérité, je ne prétends pas former un tableau.
Gresset, dans son séjour d’Amiens, s’était extrêmement préoccupé, comme font volontiers les écrivains retirés en province, du néologisme qui s’introduisait en quelques branches du langage : « Il avait été frappé justement, mais beaucoup trop, dit Garat dans sa Vie de Suard, du ridicule d’une vingtaine de mots qui avaient pris leurs origines et leurs étymologies dans les boutiques des marchandes de modes, même dans les boutiques des selliers. » Il en forma comme le tissu de son discours ; toutes ces locutions exagérées dont il s’était gaiement raillé vingt-cinq ans auparavant dans le rôle du jeune Valère : Je suis comblé, ravi, je suis au désespoir, Paris est ravissant, délicieux, il les remit là en cause, il fit d’une façon maussade comme la petite pièce en prose à la suite du Méchant ; et tandis que Suard plaidait avec tact pour la raison, alors dans sa fleur, et pour la philosophie, Gresset souligna pesamment des syllabes, anticipant l’office que nous avons vu depuis tant de fois remplir à feu M.
Le François, né malin, forma le vaudeville, Agréable indiscret, qui, conduit parle chant, Passe de bouche en bouche et s’accroît en marchant.
Depuis quelque temps, on appelle un caractère décidé celui qui marche à son intérêt, au mépris de tous ses devoirs ; un homme spirituel, celui qui trahit successivement avec art tous les liens qu’il a formés.
Chênedollé, poëte loyal et royaliste constant ; madame de Vintimille, captive sous la République, et dont la sœur, captive aussi, avait été chantée avant de mourir par André Chénier, suprême honneur rendu à la victime encore vivante, formaient ce cénacle.
Il disait, dans l’avant-propos de celle-ci, quelques années avant sa mort : « Il y a plus d’un demi-siècle, élève de troisième année à l’École normale, j’avais, avec l’ambition ordinaire à cet âge, formé le projet de consacrer ma vie scientifique à écrire une Histoire de France en huit ou dix volumes.
Au contraire, souvent une série de symboles sont réunis ensuite pour former une œuvre d’ensemble et les formes diverses en demeurent sans lien.
Les républicains que forma M.
Ainsi quand on voit, dans notre moyen âge, nos chansons de geste se former comme les poèmes homériques, puis les trois grands genres littéraires, (épique, lyrique, dramatique) se succéder dans le même ordre que dans la Grèce ancienne, comme il est impossible d’attribuer à l’ignorance de nos ancêtres une imitation voulue ou même inconsciente de la civilisation hellénique, il faut bien convenir que la marche de l’évolution en France a dû être déterminée par une similitude des conditions ambiantes ou par une loi générale gouvernant le développement intellectuel des nations dans leur âge primitif.
Les cinquante Danaïdes agglomérées en un groupe unique, n’ayant qu’une âme et qu’une voix, forment l’héroïne de cette tragédie collective ; et, quand on se rappelle leur origine aquatique, on croit voir une sorte d’Hydre féminine à têtes de vierges, qui prieraient et gémiraient à la fois.
Baron, son élève, formé tout entier par ses leçons, tint parole pour lui.
Avec une intelligence qui se formait et s’étendait chaque jour, avec une aptitude d’esprit qui pouvait s’appliquer à bien des objets, mais sans aucun de ces talents et de ces dons impétueux qui se déclarent d’eux-mêmes, il cherchait son propre emploi ; et tâtonnait un peu sur sa direction.
L’auteur, en les terminant, a eu vraiment le droit d’en juger comme il l’a fait : « Je crois pouvoir dire qu’il n’y en a point eu jusqu’ici qui aient compris plus de différentes matières, plus approfondies, plus détaillées, ni qui forment un groupe plus instructif ni plus curieux. » Ces vastes mémoires, qui n’ont paru au complet qu’en 1829-1830, étaient dès longtemps connus et consultés par les curieux et les historiens ; Duclos et Marmontel s’en sont perpétuellement servis pour leurs histoires de la Régence.
Si l’on prenait Fontenelle dans ses autres écrits, vers cet âge de trente ans, à cette date où il était à la fois raillé avec justesse et méconnu avec injustice par La Bruyère, on le trouverait déjà tout formé quant aux idées et aux vues.
Durant quelque temps elle lutta encore et essaya de se maintenir à l’état littéraire ; mais, tout centre politique étant détruit dans le Midi, cette langue, la première née ou du moins la première formée des modernes, tomba décidément en déchéance et passa à l’état de patois.
Pour en finir sur ce chapitre, qui ne saurait être le nôtre, je dirai que ce ne fut qu’après un assez grand nombre de volumes que Buffon, instruit peu à peu par la pratique et par les descriptions auxiliaires de Daubenton, en vint à former des classifications plus réelles et plus fondées sur l’observation comparée des êtres en eux-mêmes.
. — La démocratie meurt d’elle-même ; la nation est affectionnée à ses rois. » C’est surtout aux émigrés, on le sent, qu’il parle ainsi ; et, tandis que les partis se nourrissaient de leurs illusions et de leurs rêves, les Jacobins seuls marchaient constamment au but : « Les Jacobins seuls formaient une faction, les autres partis n’étaient que des cabales. » Et il montre en quoi consiste cette faction, son organisation intérieure, son affiliation par toute la France, ses moyens prompts, redoutables, agissant à la fois sur toutes les mauvaises passions du cœur humain.
Cette ode se compose de trois parties, qui forment comme, trois modes différents.
Dès l’âge de neuf ans, celui-ci était formé par son père aux exercices violents et ne passait pas un seul jour sans chasser.
Comme écrivain, il s’était beaucoup formé par l’usage, et il était arrivé à se faire un style : style singulier, fin, abstrait, qui se grave peu dans la mémoire et ne se peint jamais dans l’imagination, mais qui atteint pourtant à l’expression rare de quelques hautes vérités.
Frédéric, en cette période de sa vie, n’a qu’un désir, celui d’arriver à la sagesse, à la vérité, à la constance, et de se perfectionner, « de prendre pour modèle tout ce qu’il y eut jamais de grands hommes, et, tirant de leurs caractères tout ce qui peut entrer dans celui d’un seul, de travailler sincèrement à en former le sien ».
Il eut essentiellement une âme minutieuse particulariste, si l’on peut dire, qui percevait merveilleusement ce que chaque objet a d’individuel, de propre, d’unique, et qui pourtant, par une sorte de paresse native, n’allait pas à s’en former une image précise, mais la concevait diffuse, vague, toute brouillée d’ombre.
Nous ne pouvons connaître que des parcelles de vérité, nous ne pouvons former que des synthèses partielles ; lors même que nous nous élevons jusqu’au premier principe, nous ne saisissons pas le lien qui l’unit à tout le reste.
La 45e division, formée à Oran de réservistes et de territoriaux, est celle qui a traversé Paris dans les premiers jours de septembre et qui a tout de suite été expédiée par Galliéni dans les environs de Meaux, pour y porter le coup qui fut décisif. » 13.
Ils savent bien tous que pendant les années innombrables de l’enfance, innombrables dans la mémoire, et par conséquent en réalité, dans la réalité, si pleines, si neuves, si inépuisables, si inusables dans la mémoire et dans la réalité, qui forment un point d’appui, un volume d’appui en quelque sorte si inépuisable dans la mémoire et dans la réalité, ils savent bien que moi aussi, que moi comme eux, que moi parmi eux pendant des heures innombrables tous les matins à la même heure enfant j’ai infatigablement rituellement essuyé les mêmes meubles cirés avec un torchon de laine, jusqu’à s’y mirer parfaitement, jusqu’au parfait mirouër, jusqu’à épuisement parfait de la poussière et de la buée. […] Deuxièmement il n’en cite que deux strophes, les deux premières, au lieu de trois qui sont également connues, où la troisième est indispensable, qui forment corps ensemble, où la troisième tient comme un membre, ou plutôt dans le corps même comme partie intégrante, qui ne peuvent aller l’une sans l’autre, qui se rappellent, qui se maintiennent à la mémoire aussi impérieusement les unes que les autres. […] (Pendant que je copie ce Marty-Laveaux pour les imprimeurs, je m’applique tellement à bien former mon écriture, pour qu’il n’y ait aucune coquille, que si Bédier voyait ma copie, sûrement il m’embaucherait pour lui copier ses textes pour ses imprimeurs.) […] Seigneur, de vos bontés il faut que je l’obtienne ; Elle a trop de vertus pour n’être pas chrétienne : Avec trop de mérite il vous plut la former, Pour ne vous pas connoître et ne vous pas aimer, Pour vivre des enfers esclave infortunée, Et sous leur triste joug mourir comme elle est née. […] Ils sont, ils forment, vous le savez, une bande bien organisée.
Après avoir écrit à Raynouard pour lui envoyer son acte de naissance et prouver qu’il était bien l’auteur de la mention honorable que lui avait accordée l’Académie française, Victor Hugo adresse à son cousin une lettre dont le fond est d’un cœur exquis, mais où se rencontrent des phrases comme celle-ci : « C’est un étrange effet du malheur que nous ayons déjà rempli les fonctions les plus sacrées d’une amitié dont nous avons à peine formé les premiers nœuds, etc… Songe à ton respectable père, etc. » Mais ce n’est pas longtemps que Victor Hugo suit les chemins battus ; ses lettres à Alfred de Vigny, alors officier au 5e régiment de la garde royale ; à Lamennais, à David d’Angers, à Hérold, au baron Taylor, à tant d’autres, nous le montrent bientôt marchant résolument dans la voie qu’il ne quittera plus. […] Les chapitres qui composent le livre d’Édouard Drumont ont, pour la plupart, paru sous formé d’articles dans la Libre Parole, et plusieurs d’entre eux resteront, certainement, au nombre des meilleurs morceaux du grand polémiste. […] Les blessés russes ou français, pêle-mêle, les habitants mornes, hâves, mourant de faim, pleurant sur les débris de leurs demeures, formaient le spectacle le plus émotionnant qu’on puisse imaginer. […] Beaucoup d’officiers sans troupes eurent l’idée de se réunir pour former un corps d’élite, et prêt à combattre ; mais la force et la discipline manquaient autant à ces trois cents officiers qu’à nos soldats, et cette noble institution, enfantée dans le malheur, tomba en peu de jours, sans avoir pu rendre le moindre service. […] Moulieras les principaux éléments de son livre, formé aussi des révélations de Marocains eux-mêmes et de voyageurs mahométans.
Comment les sens se sont-ils formés ? […] Augustin, de qui on a repris cette croyance, s’était formé l’idée du paradis d’après celle du cirque. […] Les routes ne sont plus inconnues ; les chemins le sont encore : les chemins de France forment un réseau merveilleux. […] La réforme de l’orthographe intéresse très peu de personnes, quoique plusieurs sociétés se soient formées pour y travailler. […] Pour les départements français, il s’est formé un usage différent, mais qui n’est encore ni très clair, ni très sûr.
Le mot de « Français » désigne évidemment ici les camarades d’un clan formé dans la cour contre le petit Corse. […] Le soir, après les fatigues de la chasse ou les travaux du jardin, on se réunissait autour d’une table, on faisait la lecture, on déployait des cartes, on formait des plans de voyage à travers les Alpes ; on parlait arts, sciences et combats, mais le souvenir de la patrie dominait tous les autres et formait le principal objet de la conversation. » Cette solitude et ce mystère perdirent le duc d’Enghien. […] L’histoire formait le fonds de cette éducation princière. […] La division Friant, destinée à former l’avant-garde, s’était égarée pendant la nuit, en sorte qu’elle arriva sur le plateau après que l’armée fut rassemblée. […] Au sortir des proses qui forment l’habituel fonds de notre littérature « courante », on éprouve une sensation de salubrité lorsqu’on ouvre les pages serrées et copieuses du livre où M.
II Depuis sa mort, un petit groupe de romanciers et de conteurs s’est formé, — ils sont trois ou quatre à peine, — lequel s’est imaginé qu’en appliquant à la reproduction de certains côtés, et plus spécialement du côté matériel et des détails vulgaires de la vie humaine, la quantité d’observation dont tout homme intelligent se trouve pourvu, on arriverait à créer un art nouveau et à rajeunir le roman. […] Peintre, observateur et poète, il faut ces trois petites choses-là pour former un réaliste. […] Prenez, à toutes les grandes époques cette longue chaîne de la tradition comique ou tragique : chaque chaînon est un anneau d’or formé par les privilégiés de la société ou les élus de l’histoire, eux-mêmes transformés en personnages d’un ordre supérieur et extrahumain. […] Sa frêle et délicate personne semble avoir été formée de tendresse et de sympathie. — Seule peut-être entre toutes ses pareilles, elle réalise le type accompli de ces femmes qui, sans atteindre à la perfection de la forme, sans incarner l’idéal du beau plastique, vous semblent — on ne sait pourquoi — plus belles que la beauté.
Aucune langue n’a jamais été formée arbitrairement par l’industrie et avec la préméditation de ceux qui l’ont pensée et écrite. […] Dans ma raideur formée d’égoïsme épileptique, le Diable m’a saisi et jeté à la fosse. […] J’avais alors quatre-vingt mille livres de rente ; deux années de mon revenu formaient donc cent soixante mille francs. […] Son cerveau était avant tout une machine à découper dans la réalité qui se déroulait devant lui les choses, petites ou grandes, susceptibles d’être détachées et de former tableau. […] Hérédité, atavisme, innéité, combinaison chimique, molécules survivantes, lutte pour la vie entre les molécules, et liqueurs de Brown-Séquard brochant sur le tout, forment un amas d’obscurités et d’incertitudes au milieu duquel, se débattant comme un hanneton, le pauvre docteur nous fait l’effet d’un raté illuminé.
On n’obtiendra pas davantage un résultat satisfaisant si l’on essaie de tirer une politique et une morale des conceptions, plus ou moins justifiées, que nous nous formons aujourd’hui sur l’origine et le développement des espèces, ou sur les localisations cérébrales et les conditions de la personnalité. […] Réduite à son schéma idéal, sa politique se ramène à cette idée qu’une nation n’est pas formée seulement des individus vivants qui la composent. […] Dans les déclarations des distributeurs de cet enseignement comme dans celles des ouvriers qu’ils ont formés, — ou déformés, — une parole revient toujours, qui mérite d’être méditée : « Il s’agit de faire des conscients », disent les uns. « Nous entendons être des conscients », disent les autres. […] Où est la richesse de nature, où est la richesse d’esprit, entre un étudiant en lettre ou en droit qui sort du lycée, chétif apprenti en haute culture, mal frotté de livres et un bon ouvrier d’art, un menuisier, par exemple, dont le goût déjà exquis s’est formé à travailler d’après les chefs-d’œuvre d’un Riesener ou d’un Œben ? […] Pour des intelligences formées aux rigoureuses méthodes positives et qui estiment d’abord et surtout la justesse de la notation, des romans ainsi conçus sont d’autant plus inacceptables que l’exactitude du décor souligne, pour ainsi dire, l’inexactude de l’analyse morale.
Je tenais mes yeux collés dessus en menant ma charrette, chanson après chanson, vers après vers, notant soigneusement le vrai, le tendre, le sublime, pour les distinguer de l’affectation, et de l’enflure1145… » Il entretenait exprès une correspondance avec plusieurs de ses camarades de classe pour se former le style, tenait un journal, y jetait des réflexions sur l’homme, sur la religion, sur les sujets les plus grands, critiquait ses premières œuvres. « Jamais cœur n’a soupiré plus ardemment que le mien après le bonheur d’être distingué1146. » Il devinait ainsi ce qu’il ne savait pas, il s’élevait tout seul jusqu’au niveau des plus cultivés ; tout à l’heure, à Édimbourg, il va percer à jour les docteurs respectés, Blair lui-même ; il verra que Blair a de l’acquis, mais que le fond lui manque. […] Ils formaient une secte, « secte de dissidents en poésie1198 », qui parlaient haut, se tenaient serrés, et révoltaient les cervelles rassises par l’audace et la nouveauté de leurs théories. […] Ayant refusé à Éton d’être le domestique1229 des grands écoliers, « il fut traité par les élèves et par les maîtres avec une cruauté révoltante », se laissa martyriser, refusa d’obéir, et, refoulé en lui-même parmi des lectures défendues, commença à former les rêves les plus démesurés et les plus poétiques.
Ayant mis le pied sur le sol thibétain, et trouvant sur son passage le fort de Bekar qui faisait mine de l’arrêter, il ordonna à ses gens de se former en colonne serrée, et s’avança très résolument à leur tête. […] L’immense Delta formé au nord-est par la chaîne de l’Himalaya, au midi par le Sutledge, à l’ouest par le rapide courant de l’Indus, et dont la pointe est précisément le point de jonction de ces deux fleuves, c’est le Punjaub (Pend-Jab, Penta-Potamis) qui reçoit son nom des cinq grands cours d’eau qui le traversent et le fertilisent. […] Bientôt un abcès se forma dans l’intérieur de l’organe, et le peu d’espoir qui était resté s’évanouit.
Je reviendrai, en finissant, sur la manière dont je conçois une édition de Gui Patin ; commençons d’abord par nous former de lui une idée bien précise.
Ce directeur imprévu de l’enseignement, qui s’était formé lui-même, qui n’avait point hérité des anciennes traditions classiques, et qui n’était pas non plus du groupe polytechnicien proprement dit, mais homme d’esprit, rempli d’observations et d’idées fines, un peu particulières, se mit aussitôt en devoir de les appliquer : J’avais depuis longtemps remarqué, dit-il, les caractères qui distinguent l’esprit des géomètres et des physiciens, de celui des hommes appliqués aux affaires, et de celui des personnes vouées aux arts d’imagination ; dans les premiers (je ne parle que généralement), exactitude et sécheresse ; dans les seconds, souplesse allant quelquefois jusqu’à la subtilité, finesse allant quelquefois jusqu’à l’artifice ; dans les troisièmes, élégance, verve, exaltation portée jusqu’à un certain dérèglement… Ce que je projetais d’après ces observations, ajoute-t-il, était : 1º de faire marcher de front, dès les plus basses classes des collèges, les trois genres de connaissances, littéraires, physiques et mathématiques, morales et politiques, en mesurant à l’intelligence des enfants dans chaque classe les notions de chaque science ; 2º de faire enseigner dans chaque classe, même les plus basses, les trois sciences par trois professeurs différents, dont chacun serait spécialement consacré à l’une des trois… Le but était défaire cesser le divorce entre les diverses facultés de l’esprit, de les rétablir dans leur alliance et leur équilibre, et d’arriver à une moyenne habituelle plutôt que de favoriser telle ou telle vocation dominante.
L’abbé Le Grand, oratorien dans sa jeunesse, homme des plus laborieux, mort en 1733, avait passé trente ans de sa vie à former un recueil de toutes les pièces qui se rapportent à ce règne, et il avait composé sur ces matériaux des annales plutôt encore qu’une histoire.
Il peut servir à représenter à nos yeux toute une classe et une race de gens du monde, de gens d’esprit et d’administrateurs distingués, qui existaient tout formés à la fin de l’Ancien Régime, qui succombèrent avec l’ordre de choses, et qui ont péri dans l’intervalle, avant que la société reconstituée pût leur rendre une situation ou même leur donner un asile.
Il était en 89 à Strasbourg, dans un petit monde mystique comme cette ville en a eu à diverses époques ; il voyait tous les jours celle qu’il appelle sa meilleure amie, Mme Boechlin ; il formait le projet de se réunir encore plus entièrement à elle en logeant dans la même maison ; il venait même de réaliser ce projet depuis deux mois, en 1791 ; il allait entamer la lecture de Jacob Boehm et suivait tout un roman idéal, tout un rêve de vie intérieure accomplie, lorsqu’une maladie de son père l’appela à Amboise et le rejeta dans la réalité : Au bout de deux mois (de cette réunion dans un même logement), il fallut, dit-il, quitter mon paradis pour aller soigner mon père.
Laboulaye avait commencé dans la Revue nationale une série d’articles sur la Vie de Benjamin Constant, devant former un ouvrage à part.
Il lui donne quelques conseils sur les projets de voyage qu’Eckermann formait à ce moment, et lui recommande ce qui lui reste à voir de curiosités à Weimar : « Je ne pouvais me rassasier de regarder les traits puissants de ce visage bruni, riche en replis dont chacun avait son expression, et dans tous se lisait la loyauté, la solidité, avec tant de calme et de grandeur !
L’aisance a été établie entre elles du premier jour ; je ne serais pas étonnée qu’il se formât une liaison solide ; mais moi, je suis restée aussi gênée, aussi bête, aussi maussade.
Jeune, il avait passé ensuite plusieurs années en province, dans la solitude, à étudier, à bien lire un petit nombre de livres, à méditer surtout les écrits des géomètres, Clairaut, d’Alembert, Euler : il s’adressa une ou deux fois par lettres à l’abbé Bossut pour lui demander des conseils généraux ; mais il étudiait seul, et c’est ainsi qu’il se forma l’esprit : la géométrie, ce fut sa logique.
Ses années de direction à Rome (1828-1835) forment une époque unique dans sa vie : une fille belle et adorée qui était sa gloire, et dont il a consacré l’image en maint endroit, faisait avec sa mère les honneurs de la Villa Médicis ; devenue Mme Paul Delaroche et morte à la fleur de l’âge, elle devait lui apprendre ce que c’est que la première grande douleur.
Son grand-père fut obligé de lui dire : « Tu l’auras quand je serai mort. » On rapporte cet autre mot très-probable du vieil empereur à la reine Éléonore : « Il me semble qu’il est très-turbulent ; ses manières et son humeur ne me plaisent guère ; je ne sais ce qu’il pourra devenir un jour. » Son gouverneur, don Garcia de Tolède, dans une lettre à l’empereur où il rend compte du régime et de l’éducation du prince, le montre en bonne santé à cet âge, « quoique n’ayant pas bonne couleur », peu avancé dans ses études, s’y livrant de mauvaise grâce ainsi qu’aux exercices du corps qui forment le cavalier et le gentilhomme, ne faisant rien en aucun genre que par l’appât d’une récompense, et en tout « très évaporé. » On insista beaucoup auprès de Charles-Quint, retiré à Yuste, pour qu’il y laissât venir quelque temps le jeune prince ; on espérait que l’autorité de l’aïeul aurait quelque influence sur lui pour le réformer et l’exciter.
C’est de cette combinaison et de cette complication même qu’est sorti tout son talent, formé et croisé de plusieurs inspirations contraires.
. — Veut-il exprimer la quantité de fantaisies qui viennent chaque soir, à l’heure où le rêve commence, se former et s’assembler dans son imagination oisive, et qui ne demandent qu’à prendre forme et couleur chaque matin, il dira : LES COLOMBES.
Toutes corrections faites, voici l’ordre suivi dans cette exacte dévotion : il y a d’abord les statues en bois des Nymphes, puis les réservoirs qui forment bain pour y boire ; enfin le poète parle des statuettes plus petites (et comme des poupées), des Nymphes placées dans l’eau. » (Note de M.
C’était, du reste, si l’on excepte cette gendarmerie d’élite arrivée de l’avant-veille, une armée toute formée par lui, toute dans sa main ; elle avait pleine et entière confiance dans son guide, le père La Pensée, comme on l’appelait familièrement.
De même que La Bruyère a peint des caractères moraux qui font type, on arriverait ainsi à tracer quantité de portraits-caractères des grands écrivains, à reconnaître leur diversité, leur parenté, leurs signes éminemment distinctifs, à former des groupes, à répandre enfin dans cette infinie variété de la biographie littéraire quelque chose de la vue lumineuse et de l’ordre qui préside à la distribution des familles naturelles en botanique et en zoographie.
Il passa là, avec ses sœurs, une longue et innocente enfance, libre, rustique, errant à la manière du ménestrel de Beattie, formé pourtant à l’excellence morale et à cette perfection de cœur qui le caractérise, par les soins d’une admirable mère, dont il est, assure-t-on, toute l’image.
Autour de Hugo, et dans l’abandon d’une intimité charmante, il s’en était formé un très-petit nombre de nouveaux ; deux ou trois des anciens s’étaient rapprochés ; on devisait les soirs ensemble, on se laissait aller à l’illusion flatteuse qui n’était, après tout, qu’un vœu ; on comptait sur un âge meilleur qu’on se figurait facile et prochain.
Et d’abord ses trois volumes d’Introduction ne forment pas le moins du monde un extrait abrégé, résumé et coordonné des huit tomes in-4° de l’histoire littéraire bénédictine antérieure au xiie siècle.
Sous les Mérovingiens, quand le Mérovée ou le Dagobert régnant était puissant et respecté, il se formait, comme naturellement, un essai de grand empire dont lès liens assez vagues, des Pyrénées au Weser, trouvaient pourtant leur force et leur entretien dans une sorte de fidélité traditionnelle, de religion pour la race, et de vieil honneur barbare.
Son âme, qui se formait à ce moment, y contracta pour jamais ce quelque chose de libéral, mais de sage, qui ne cessa pas d’être sa mesure au milieu des orages qu’il eut à traverser.
Ce que ne gardèrent pas moins, en général, les personnages de cette époque et de ce rang qui survécurent et dont la vieillesse honorée s’est prolongée jusqu’à nous, c’est une fidélité remarquable, sinon à tous les principes, du moins à l’esprit des doctrines et des mœurs dont s’était imbue leur jeunesse ; c’est le don de sociabilité, la pratique affable, tolérante, presque affectueuse, vraiment libérale, sans ombre de misanthropie et d’amertume, une sorte de confiance souriante et deux fois aimable après tant de déceptions, et ce trait qui, dans l’homme excellent dont nous parlons, formait plus qu’une qualité vague et était devenu le fond même du caractère et une vertu, la bienveillance.
On sent des souffles d’Italie, dans l’Heptaméron issu du culte de Boccace, et les anciens sont de moitié avec l’Italie dans le platonisme, qui concourt, avec la théorie courtoise et la tendresse mystique, à former l’idéal amoureux de la reine, dans la mythologie qui ne séduit plus par l’absurdité merveilleuse des faits, mais par son beau naturalisme et par sa vérité pathétique, dans une aisance enfin de la pensée, du sentiment, de tout l’être, qui soulève, anime, illumine la raideur rebelle des formes surannées.
IV Le contraste que forment ces amours fatales et effrénées avec des restes de romanesque innocent et avec un spiritualisme chrétien de plus en plus décidé, ou, si vous voulez, le contraste de certaines peintures de M.
« On voit maintenant se former, remarque ce philosophe, la culture d’une société dont le commerce est l’âme… Celui qui s’adonne au commerce s’entend à tout taxer d’après le besoin du consommateur et non d’après son besoin personnel ; chez lui, la question des questions, c’est de savoir “combien de personnes consomment cela”.
J’ai dit que le fait scientifique est la traduction d’un fait brut dans un certain langage ; j’aurais dû ajouter que tout fait scientifique est formé de plusieurs faits bruts.
, promener sur les boulevards des placards, avec ces mots : « Morin ne lira plus les Taches d’encre. » Tout le monde n’a pas le moyen d’offrir, en prime, une maison de campagne et de convertir les exemplaires de son journal en billets de loterie, comme le font certains grands quotidiens, pour se former une clientèle.
Et cela dit combien c’est se leurrer que de vouloir faire de la critique objective dans un ordre de contingences tout subjectif ; et cela dit aussi que tout ce qu’un écrivain adopte, — pour ne pas parler de ce qu’il pourrait lui arriver de créer, — est extrêmement représentatif de sa manière d’être, de son essence, et qu’il peut enfin y avoir autant de manières d’être ému, analogiquement estimables, pourvu qu’elles apparaissent également sincères, qu’il y a de modes de sentir et de goûts formés et distingués.
Cette biographie doit former un livre en deux volumes et offrir, dans une langue appropriée, peut-être fantaisiste, eu égard au sujet, la représentation exacte et détaillée et la vie artistique comme de la vie intime du grand maître.
M. de Sainte-Agathe opère, non pas pour son propre compte, mais pour celui du baron Adhémar de Valtravers, cousin de Catherine, un bon jeune homme formé, discipliné, éduqué — il le croit du moins — ad majorem gloriam de sa compagnie.
On ne sait de quelle substance est formé ce mari baroque, visionnaire et débonnaire, patient jusqu’à la sottise, féroce jusqu’au meurtre, moitié papier mâché, moitié bronze.
Lesage est né, s’est formé et a commencé à se produire sous Louis XIV.
Il avait l’esprit trop fin, trop sensé, pour ne pas être choqué des théories absolues de d’Holbach : « Au fond, nous ne connaissons pas assez la nature, pensait-il, pour en former un système. » Il reprochait à ces prétendus systèmes de la nature de ruiner toutes les illusions naturelles et chères à l’homme ; et, comme le livre de d’Holbach parut vers le temps où l’abbé Terray décrétait la banqueroute, il disait : « Ce M.
Quand on voit dans les ouvrages de Cicéron et ailleurs, particulièrement dans Quintilien, a remarqué un grand esprit (Bolingbroke), les soins, les peines, l’application continuelle, qui allaient à former les grands hommes de l’Antiquité, on s’étonne qu’il n’y en ait pas eu plus ; et quand on réfléchit sur l’éducation de la jeunesse de nos jours, on s’étonne qu’il s’élève un seul homme capable d’être utile à la patrie.
Puis, affichant nettement sa théorie subversive de tout pouvoir constitué, il ajoute : « On connaît mon profond respect pour les saints décrets de l’Assemblée nationale ; je ne parle si librement de celui-ci que parce que je ne le regarde pas comme un décret. » Ainsi, dans les décrets de l’Assemblée il se réserve de choisir ceux qui ‘lui conviennent, et de considérer les autres comme non avenus, sous prétexte qu’ils ont été votés par une majorité formée de membres du clergé et de la noblesse, plus nombreux dans l’Assemblée qu’ils ne devraient, l’être.
À la fin de Louis XIII et au commencement de Louis XIV, ce type et ce modèle s’était principalement formé d’après les héros et les héroïnes de Corneille et aussi d’après ceux de Mlle de Scudéry.
Il est à croire que Napoléon connaissait M. de Maistre et s’était formé quelque idée de lui.
Pourtant plusieurs des qualités essentielles à former un caractère d’homme, la modération, l’équilibre, un juste temps d’arrêt, un retour sage, la mémoire du passé, lui firent faute, et ses onze ou douze dernières années accusèrent cette impossibilité de mûrir qui est l’infirmité de quelques organisations vives.
Songez pourtant que j’ai besoin d’être soutenue par vous dans la situation où me met le péril où vous êtes, que je me retrace sans cesse ; car je vous aime, mon cher cousin, avec de ces sentiments que l’inclination a formés, qu’elle entretient, et dans lesquels elle insinue tout ce qui a jamais produit l’union la plus tendre et la plus solide.
Son corps d’armée en conséquence serait allé se joindre en Normandie au corps de Jourdan, et y aurait formé une sorte de petite armée nationale ou croyant l’être.
« Quand la puissance secrète qui anime l’univers forma le globe que l’homme habite, elle imprima aux êtres qui le composent des propriétés essentielles qui devinrent la règle de leurs mouvements individuels, le lien de leurs rapports réciproques… » C’est ainsi que s’exprime ce Génie, qui n’est pas un de ceux des Mille et Une Nuits.
Mais la conception populaire de la volonté comme d’une faculté en opposition avec l’intelligence vient elle-même de ce sentiment obscur d’un tout continu de réactions, qui forment à chaque instant une seule réaction d’ensemble en un sens déterminé.
Au fond, l’œuvre de l’artiste sera la même que celle du savant ou encore de l’historien : « découvrir les faits significatifs, expressifs d’une loi ; ceux qui, dans la masse confuse des phénomènes, constituent des points de repère et peuvent être reliés par une ligne, former un dessin, une figure, un système. » Le grand artiste est évocateur de la vie sous toutes ses formes, évocateur « des objets d’affection, des sujets vivants avec lesquels nous pouvons entrer en société6. » Le génie et son milieu social, dont les rapports ont tant préoccupé les esthéticiens contemporains et surtout M.
Un deuxième comité, formé à Stratford-sur-Avon, seconde le comité de Londres.
Ronsard et Balzac ont eu, chacun dans leur genre, assez de bon et de mauvais pour former après eux de très grands hommes en vers et en prose.
Des hommes qui penseraient comme lui ne formeraient qu’une anarchie.
Voici donc le chemin de cette composition, la religion, l’ange, le saint, les femmes qui sont à ses piés, les auditeurs qui sont sur le fond, ceux qui sont à gauche aussi sur le fond, les deux grandes figures de femmes qui sont debout, le vieillard incliné à leurs piés, et les deux figures, l’une d’homme et l’autre de femme vues par le dos et placées tout à fait sur le devant, ce chemin descendant mollement et serpentant largement depuis la religion jusqu’au fond de la composition à gauche où il se replie pour former circulairement et à distance, autour du saint une espèce d’enceinte qui s’interrompt à la femme placée sur le devant, les bras dirigés vers le saint, et découvre toute l’étendue intérieure de la scène, ligne de liaison allant clairement, nettement, facilement chercher les objets principaux de la composition dont elle ne néglige que les fabriques de la droite et du fond, et les vieillards indiscrets interrompant le saint, conversant entre eux et disputant à l’écart.
Voici la corporation des maris, doublés de leurs femmes aux mantelets éclatants ; voici la corporation des célibataires provocateurs aux lorgnons adultères ; — voici la bande des bonnes d’enfants cherchant d’un œil langoureux — dans le cercle formé par les musiciens — le timbalier dont parle le poète ; — voici le clan des voyous en quête des bouts de cigares… Toute la ville enfin : tiers-état, menu peuple, noblesse.
Sieyès disait encore, avec une tristesse significative : « Ce qu’il y a de véritablement malheureux, c’est que les trois articles qui forment la réclamation du tiers (c’est-à-dire du peuple), sont insuffisants pour lui donner cette égalité d’influence dont il ne saurait se passer… » Il s’en passait très bien !
D’où qu’on prenne son point de vue dans cette époque qui eut l’activité d’une belle matinée historique, mais qui devait rencontrer l’orage à midi et l’orage qu’elle avait formé, on ne trouve que débris d’édifices à moitié bâtis, affaissés dans un ciment humide encore, et que les architectes ne reprendront pas : car on ne reprend rien en histoire.
On sait que les étapes spirituelles douloureusement franchies par l’abbé Pierre Froment, forment la trame des Trois Villes.
Chez l’homme, la mémoire est moins prisonnière de l’action, je le reconnais, mais elle y adhère encore : nos souvenirs, à un moment donné, forment un tout solidaire, une pyramide, si vous voulez, dont le sommet sans cesse mouvant coïncide avec notre présent et s’enfonce avec lui dans l’avenir.
Formé par huit siècles de pouvoir absolu, c’est d’après les principes du droit divin qu’il foudroyait les ennemis de la liberté. […] Il n’était point d’ailleurs aussi chimérique qu’on serait peut-être tenté de le supposer : il n’a jamais prétendu former qu’un petit troupeau, et non point légiférer pour l’ensemble de l’humanité, ni même de l’Église. […] Si l’antiquité classique est propre à former des esprits clairs, vigoureux, alertes, elle prépare à la vie pratique. […] Particulièrement, en ce qui concerne l’Algérie, il préconise l’union des colons de race latine qui formeront un peuple nouveau sous l’autorité de la France et il tient en très médiocre estime la population indigène. […] Le pape, l’empereur, le roi de France, la République de Venise et les nombreux petits États italiens se battent et se réconcilient, forment des ligues en sens divers, renversent continuellement leurs alliances, s’agitent comme dans une fourmilière et déconcertent l’attention de l’observateur.
Réunis, ils forment un chaînon important dans la grande chaîne continue de la Renaissance. […] Il faudrait que tu te demandasses : comment s’est-il formé là et puis encore, après : « Qu’est-ce qui me pousse en définitive à l’écouter ? […] En un mot, si tu avais pensé d’une façon plus déliée, mieux observé et appris davantage, à aucune condition tu n’appellerais plus devoir et conscience ce devoir et cette conscience que tu crois qui te sont personnels ; ta religion serait éclairée sur la façon dont se sont toujours formés les jugements moraux ». — Ils se forment de mille façons différentes. […] Ainsi pourra se former une race d’hommes supérieurs dont on ne sait pas, l’hérédité aidant, ce qu’ils pourront devenir. […] Je suis plus moraliste depuis que j’ai lu l’immoraliste Nietzsche et depuis que j’ai constaté que Nietzsche, après avoir repoussé furieusement toute morale, est amené insensiblement à en établir une, et même deux, ce qui conduit à croire qu’il y en a cent, lesquelles, en se superposant, en se rattachant les unes aux autres et en se hiérarchisant, en forment une.
Au mois d’août, jusqu’au 27, n’étant que le sixième lieutenant par ordre d’ancienneté, il a dû rester au dépôt, recevoir, équiper, former les escadrons de réserve que son régiment constitue. […] Ses paysages, ses anecdotes, ses méditations, qu’il n’improvise pas, mais qu’il a, pour ainsi dire, accoutumés à vivre ensemble, forment une harmonie, et qui est l’harmonie de sa pensée. […] L’Europe sera plus asservie que jamais, les guerres plus terribles, tout sentiment de liberté plus comprimé. » C’était, ce Barthélemy, un diplomate véritable, formé à l’école de Vergennes : il fut déporté à la Guyane. […] Glesener, lui, nous dessine de véritables enfants qui ont leur âme en train de se former, qui ont leur univers limité à leurs regards, et qui ont leur pensée de cet univers peu étendu, complet cependant. […] Et c’est dans la longueur du temps, comme dans une quiétude un peu morne, que se forment les âmes, qu’elles prennent leurs plis.
» L’École normale, ce savant séminaire intellectuel, a été la pépinière de nombreux élèves qui, une fois formés et maîtres d’eux-mêmes, n’ont eu rien de plus pressé que de rompre leurs liens, de prendre leur essor à travers le monde et qui y ont brillé en se dissipant. […] Notre jeune professeur de rhétorique ne crut point sortir de sa sphère ni abuser de l’art de persuader en conviant ces jeunes talents chers au pays à se former en une société dite de l’Union des Arts.
Les Français apparemment considèrent une pièce de théâtre comme une sorte de morale en action ; ils veulent se former l’esprit et le cœur au spectacle ; et, en effet, une comédie de caractère est une chose éminemment instructive. […] Dans la manière dont Schlegel traite le théâtre français, je trouve la recette pour former un pitoyable critique, dénué de toute faculté pour apprécier ce qui est excellent. » (Entretiens de Goethe et d’Eckermann.)
L’intelligence et la sensibilité des coursiers d’Achille, animaux belliqueux, assimilés avec raison aux guerriers eux-mêmes par le poète, forment le seul épisode touchant et mélancolique de ces deux chants. […] Et maintenant voulez-vous le ciel tel que la brillante et voluptueuse imagination des Grecs l’avait peuplé d’allégories personnifiées en divinités élémentaires : suivez le poète sur l’Olympe, sur l’Ida aux riches fontaines ; dans le nuage dont Jupiter s’enveloppe avec Junon ; dans les forges de Vulcain, où tous les arts se résument en un chef-d’œuvre pour former le bouclier d’Achille !
C’était vraiment d’une opposition charmante, sur l’antiquaille des murs, et pour ainsi dire, sur la pourriture des tapisseries, ces deux frais enfants, assis sur deux petites chaises, l’un en face de l’autre, le petit garçon avec son visage et son teint à la Murillo, la petite fille sous son petit bonnet blanc : tous deux entourés des jeux de petits chiens, qui semblaient former avec eux une famille du même âge. […] Il nous peint Audiffret-Pasquier, comme un hurluberlu, répétant à tout propos : « Qui osera nous arrêter, quand nous formerons un bataillon carré, avec le drapeau tricolore planté au milieu de nous !
Le soin de dire sa messe permit à Gassendi de former quelques-uns des plus fameux « libertins » du temps. […] Nous cherchions cela l’autre jour et nous ne trouvions rien en dehors du chocolat et des différentes sucreries qui ne peuvent former un menu appétissant que pour les enfants gourmands.
De cette disposition d’esprit il passe aisément en pleine métaphysique : il regarde autour de lui, est frappé de « la force destructive cachée dans le grand tout de la nature, qui n’a rien formé qui ne se détruise soi-même et ce qui l’avoisine ». — « Ciel, terre, forces diverses qui se meuvent autour de moi, je n’y vois rien qu’un monstre effroyable, toujours dévorant et toujours affamé ! […] Hugo disait sur sa tombe : « Tous ses livres ne forment qu’un livre, livre vivant, lumineux, profond, où l’on voit aller et avec venir, et marcher et se mouvoir je ne sais quoi d’effaré et de terrible mêlé au réel, toute notre civilisation contemporaine ; livre merveilleux que le poète a intitulé « comédie » et qu’il aurait pu intituler « histoire », qui prend toutes les formes et tous les styles, qui dépasse Tacite et qui va jusqu’à Suetone, qui traverse Beaumarchais et qui va jusqu’à l’intime, le bourgeois, le trivial, le matériel et qui par moment, à travers toutes l’imagination : qui prodigue le vrai les réalités brusquement et largement déchirées, laisse tout à coup entrevoir le plus sombre et le plus tragique idéal.
Dans les révélations qu’elle reçoit, les préceptes moraux dominent ; aussi disait-elle souvent : « mon conseil », pour « mes voix » ; ce terme indique à la fois que les paroles étaient l’élément essentiel de ses visions, et que les préceptes pratiques formaient, soit à ses yeux, soit en réalité, la partie la plus importante des paroles qu’elle entendait. […] Chaignet (Vie de Socrate, p. 118, 124-125, 147-148), la voix du demonium n’aurait aucun rapport avec ce que nous appelons la parole intérieure morale, car le demonium et, en général, les dieux auraient révélé seulement l’avenir, y compris les conséquences de nos actes, laissant à la raison humaine la tâche et l’honneur de découvrir le devoir ; « la théorie de Socrate exclut l’intervention du surnaturel dans les questions d’ordre moral ». — Nous ne voyons pas comment l’avenir et la moralité pouvaient former, selon Socrate, deux domaines distincts.
Des moindres bibelots dont notre rêve d’artiste aime s’entourer et qui forment autant de souvenirs vivants, fusera une note, et des motifs de symphonie spirituelle s’ajouteront les uns aux autres, transposant à leur manière, et musicalement nos émotions intérieures, pour finir en un vaste concert psychique où nos propres motifs seront joués. […] À la division classique de l’âme en trois facultés, s’est substituée l’étude d’une conscience formée d’éléments enchaînés et groupés.
», ma raison procède de la même manière : elle saisit — apprehendit — le sens de ces mots : Nicole, pantoufles, neiges, les notions qui leur répondent ; après quoi, elle saisit, elle noue le lien logique par où ces mots se trouveront former un jugement, une phrase ; s’il le faut, elle raisonnera plus avant là-dessus. […] Ces deux idées, non seulement ne se combattent pas, mais encore elles s’appellent, elles s’exigent l’une l’autre, elles se fondent l’une dans l’autre, pour ne former qu’une seule notion, la notion de « poésie faite ». […] le silence est l’élément dans lequel toutes les grandes choses se forment et s’assemblent…, écrit-il.
En arrière des lorgnettes et des télescopes, éclate la bruyance de garçonnets de quatorze ans, formés en compagnies, et portant, comme drapeaux, des planchettes fixées sur de longues lattes, où se trouve écrit : « Aides d’ambulance, Aides de génie, Aides pompiers » : bataillons de gavroches, qui, la cigarette au coin de la bouche, s’improvisent acteurs de la révolution dans du tapage, et quelque chose qui ressemble à une émeute de momaques. […] Il y a la barricade classique en pavés, la barricade en sacs de terre ; il en est de pittoresques formées de troncs d’arbres — de vraies lisières de forêts poussées dans un mur ruiné. […] L’avenue est fermée, en arrière du rempart, par une formidable barricade, bâtie de dalles de pierres cyclopéennes, et, en avant du rempart, se dresse une enceinte palissadée formée d’arbres tout entiers, avec l’artichaut menaçant de leurs branches épointées. […] Peut-être à la rareté des garçons, à cette lecture éternelle du même journal, à ces groupes qui se forment au milieu du café, et causent de ce qu’ils savent, comme on cause des choses de la ville dans une petite ville, enfin à cet enracinement hébété, en ce lieu, où autrefois posaient, avec la légèreté d’oiseaux de passage, des gens distraits par de légères pensées, et qu’attendaient, dehors, le plaisir et les mille distractions de Paris.
J’imagine que les livres soigneusement cachés forment le cycle de l’amour et du rêve féminins, et Cœur d’enfant en dit le premier chapitre. […] D’ailleurs je ne suis pas toujours certain d’attraper la pensée de ces dames ; elles font facilement de la prose difficile : « Et pendant que s’élucubrent ces controverses oiseuses et puériles, gigantesques « moi » de faux brillants, enchâssé de faux ors, dressés pour hypnotiser les snobs, l’esprit public s’égare, le mal persiste, augmente et s’amoncelle, jusqu’à former entre les individus mêmes une barrière énigmatique, presque aussi compliquée et inconnue qu’invincible et redoutable, une barrière contre laquelle se heurteront peut-être trop tard les efforts chimériques des lois et de la morale, et qui n’est autre que l’homme nouveau, celui dont la volonté de se rendre maître de son champ d’évolution n’a d’égale que la prétention de faire son ciel tout seul et d’édifier à sa guise son temple et son autel. » Si on croyait que l’élégant René Maizeroy, ayant dessiné cette période, en a confié le peinturlurage au fougueux Jean Grave, on se tromperait. […] Sans doute, elle paraît uniquement une intelligence, une calme faculté de comprendre, et, par conséquent, elle n’est pas une grande intelligence, ni une intelligence profonde : pour pénétrer une âme, il faut aimer ; et des idées générales personnelles ne se forment point en nous sans une fermentation lyrique. […] Enfin de nombreuses et larges citations forment une anthologie utile à qui connaît l’italien. […] Deux éléments principaux contribuent à le former : une prétention puérile d’abord, le désir de nous montrer qu’on peut faire ce que nous faisons ; et aussi la timidité, l’effroi de s’engager seule dans une voie inconnue.
C’est que des Phéniciennes y forment le chœur. […] Appliqué sans relâche au soin de me punir, Au comble des douleurs tu m’as fait parvenir Ta haine a pris plaisir à former ma misère. […] Il est formé de contrastes. […] Un des plus atroces de tous, et qui a pour protagonistes deux des âmes les plus souillées et les plus scélérates qu’ait jamais formées — avec les trois concupiscences (des yeux, de la chair et de l’esprit) — la folie de la toute-puissance : Agrippine et Néron. […] Voilà les traits dont Racine a formé son Agrippine.
Waldeck-Rousseau est le type du juriste spoliateur, au fanatisme froid, formé à l’école du XIXe siècle. […] Flaubert a littéralement abruti Maupassant, sous couleur de le former et de le perfectionner. […] La vérité est que trois séries d’œuvres et de chefs-d’œuvre forment notre patrimoine national, au cours des âges et jusqu’au XVIe siècle inclus : la littérature française de langue d’oïl ; la littérature française, de langue d’oc ; la littérature française en latin, sur laquelle le poète érudit Pierre de Nolhac a fait de si beaux et décisifs travaux. […] En réaction de ces « idola Fori » se sont formés, ici et là, des îlots récalcitrants, des cénacles littéraires (Parnassiens, symbolistes, etc.) dont le sort a été divers, selon les personnalités qui les dominaient, mais confondant le bizarre, l’abscons et quelquefois l’incohérent, avec le rare, le profond et l’exquis. […] Gambetta formait le type complet du bohème intelligent, roublard et hâbleur, pilier de café, au quart instruit, demi-improvisant, apte à pomper l’interlocuteur et à lui resservir ses propres arguments, tel que l’avaient formé les dernières années du désarroi impérial et les échevelés du Parnasse.
Cet article lui a paru former une introduction toute naturelle à ces Nouvelles Pages. […] Les parents d’Inès, qui sont parmi les nobles du terroir, ont formé, avec leurs proches et leurs amis, un complot pour livrer la place aux Espagnols. […] Il se raccorde vigoureusement à la puissante enquête menée par son auteur sur la Latinité, autour de la Méditerranée, de ce lac sacré aux bords duquel s’est formée la seule civilisation dont nous puissions être. […] Dégager et classer des signes cliniques qui se juxtaposeront de manière à former un type morbide, le travail des psychiatres paraît actuellement devoir se borner à cette tâche. […] J’essaierai ensuite de dégager la part du mythe dans l’image que les générations nouvelles se sont peu à peu formée de cette étonnante figure.
Tantôt enfin, ce sont comme deux devoirs inégaux qui forment un conflit moral dans le cœur de l’homme. […] Dans le drame il est saisi comme cause ; dans les autres poèmes il est plutôt saisi et considéré comme effet des causes diverses qui ont contribué ou à le former ou à le diriger dans tel ou tel sens. […] Il y a deux situations, qui, influant l’une sur l’autre, forment une seule action marchant droit à son but unique. […] Et c’est là qu’est le lien entre les deux drames, le moment, qui semble unique, où ils n’en forment qu’un, parce que leur conflit crée une seule lutte. […] Il est dominateur par essence, formé pour régner en maître sur les consciences, sur les cœurs, sur les esprits, par suite sur les événements.
J’essayerais vainement de leur former un lien factice que briserait à chaque instant la diversité des sujets : ils n’ont entre eux d’autre analogie que celle de reproduire des scènes et des figures du passé. […] Méléagre, du moins, nous est resté tout entier, et ses cent vingt-huit épigrammes forment ce qu’on pourrait appeler le fond du trésor. […] Puis il passe à des velléités belliqueuses et ses préparatifs de guerre consistent à faire couper les cheveux de ses concubines, à leur distribuer des haches, et à les former en escadron d’amazones. […] Pendant que je considérais ce phénomène, le centre de l’astre se gonfla et il en sortit un Christ sur la croix, formé de la même matière lumineuse. […] On voyait les danseurs se prendre par la main dans les rues, former de grandes rondes et tourner jusqu’à ce qu’ils tombassent raidis de fatigue.
De même que, dans ce passage qu’on n’a pas oublié, il a énergiquement rendu cette puissance d’organisation fatale qui semblait faite pour engendrer les tyrannies multiples, pour perpétuer l’hydre aux mille têtes et éterniser le chaos, de même ici il rend avec une précision inaccoutumée un idéal d’ordre, d’unité, de lumière, dont il avait sous les yeux l’exemplaire vivant ; en un mot, c’est le tableau de 1802, le contraire de 1792 ; c’est le monde jeune, renaissant merveilleusement après la ruine : Une commission est formée, dit-il, pour la composition d’un Code criminel, une autre pour un Code de commerce.
On a vu l’ordre des combattants ; mais Froissart, qui veut être exact et qui est au niveau de la stratégie de son époque, Froissart, qui, en son genre, est aussi clair dans son récit de la bataille de Poitiers que tel moderne peut l’être dans celui de la bataille d’Austerlitz, nous expose que l’ordonnance du prince de Galles a de plus cela de particulier, qu’il a formé, d’une part, un corps d’élite de chevaliers pour faire tête à la bataille des maréchaux de France, et que, d’autre part, à main droite, sur une montagne qui n’est pas trop roide à monter, il a disposé trois cents hommes à cheval et autant d’archers à cheval également, pour longer à la couverte cette montagne et tomber à l’improviste, à un moment donné, sur le corps du duc de Normandie, qui est rangé au pied.
J’entends, il est vrai, venir, j’entends se grossir et se former les nations du Nord avec leurs chants de guerre ou de festin, leur mythologie, leurs légendes.
L’abbé Brandelet en avait été frappé dès l’enfance, car il est né dans ce village ; il avait formé le vœu de le doter un jour d’une église pour les catholiques seuls ; et cette pensée, il l’avait eue moins dans un esprit de division que dans un esprit de charité, moins pour sauver le contact que pour prévenir tout conflit.
Ce n’est qu’après avoir épuisé un sujet qu’on sait nous être agréable et sur lequel on présume que nous aurons quelque chose à dire, qu’on essaye de diriger la conversation vers des objets plus vulgaires. » Sur l’aspect du Canada et des grands lacs, sur les pionniers, ces avant-coureurs sauvages d’une civilisation en marche, sur les Virginiens et leur caractère de gentilshommes qui tranche avec celui des Américains du Nord, sur le départ et l’expropriation des restes de l’antique et puissante tribu des Chactas, M. de Tocqueville a des pages d’une peinture modérée, dans laquelle l’observation et le sentiment moral se combinent de manière à former dans l’esprit une image durable.
Car ce qu’on ne sait pas assez, ce que les aisés et les heureux oublient trop vite, c’est que lorsqu’une fois une maison, un humble ménage est tombé au-dessous de son courant, lorsqu’il y a eu chômage dans le travail, lorsqu’un arriéré s’est une fois formé et grossi jusqu’à la dette, on ne se rattrape jamais : on en a de ce poids sur la tête pour toute la vie.
Il vit les spirituels Français qui voyageaient alors en Angleterre et acheva de former le chevalier de Grammont ; du moins il essayait, par ses leçons et ses conseils, de faire entrer un grain de raison dans cette étourderie séduisante.
Il s’est formé une solitude dans les lettres de Rancé comme celle dans laquelle il enferma son cœur.
La Savoie, Genève et le pays de Vaud forment, littérairement parlant, une petite chaîne dépendante de la littérature française, qu’on ne connaît guère au centre, et qu’on ne nommerait au plus que par les noms de de Maistre, de Jean-Jacques et de Benjamin Constant, qui s’en détachent.
En avançant pourtant et à force d’écrire, sa phrase, si riche d’ailleurs de gallicismes, ne laissa pas de se former ; elle s’épura, s’allégea beaucoup, et souvent même se troussa fort lestement.