Quelques noms semés çà et là, donnés d’ordinaire par la tradition et touchés par la poésie, suffisent. […] Dans les temps modernes, si la poésie proprement dite a fait défaut à ce genre de tradition, le roman n’a pas cessé ; sous une forme ou sous une autre, certaines douces figures ont gardé le privilège de servir d’entretien aux générations et aux jeunesses successives.
… Il détesta, ou, mieux, il ignora les poésies et les littératures, car il avait horreur de toutes les exagérations, étant un homme précis et régulier… Et si les spectacles de la misère humaine ne lui inspirèrent jamais que le dégoût, en revanche, les spectacles de la nature ne lui suggérèrent jamais rien… » Je cite pour ma démonstration, mais pour mon plaisir aussi, car toute cette oraison funèbre du bourgeois est, en soi, un bon morceau de rhétorique. […] quelle incompréhension de la poésie et de l’art !
Pendant la confession acerbe du romancier réaliste, Daudet se récite à lui-même des vers provençaux, et semble se gargariser avec la douce sonorité musicale de la poésie du ciel bleu. […] Mercredi 28 juillet Un jeune Japonais, auquel on demandait la traduction d’une poésie, s’arrêta, l’autre jour, au beau milieu de son travail, en s’écriant : « Non, c’est impossible de vous faire comprendre cela, avec les mots de votre langue, vous êtes si grossiers !
— Le don sacré de poésie m’auréole. […] Puis, au bout de ce temps, je le reprends à nouveau, j’enlève les dernières scories… et l’œuvre, — fruit de ma patience — apparaît, grâce au sortilège de l’art, spontanée, pareille à une Anadyomène souriante, jaillie des flots pour le ravissement des êtres presque divins qui savent encore aimer la poésie. […] Arrivez-vous de Chicago dans l’intention de réformer la poésie française ? […] Dans ma jeunesse, j’avais des dispositions pour la poésie.
L’événement littéraire de la semaine est l’apparition du nouveau livre de poésies de Victor Hugo : Religions et Religion. […] Ils sont tirés d’un livre de poésies de M. […] N’est-ce pas d’un sentiment exquis, et ces seize vers ne valent-ils pas bien des volumes de prétendues poésies incompréhensibles qui ne varient que de la platitude à la démence. […] C’était leur coutume, et c’était leur poésie ! […] Peinture ou poésie, mêmes choses, mêmes rebuffades.
Les arts et la poésie y seront nécessairement petits et mesquins, car il répugne que la forme de la pensée et du sentiment soit grande là où le sentiment et la pensée manquent de grandeur. […] La forme première, la langue naturelle de l’inspiration est la poésie. Nous ne débutons pas par la prose, mais par la poésie, parce que nous ne débutons pas par la réflexion, mais par l’intuition et l’affirmation absolue. […] L’histoire ainsi conçue est bien belle ; elle est une poésie admirable, le drame ou l’épopée du genre humain. […] C’est là que pour la première fois ont été bien expliquées les poésies primitives, surtout les poésies hébraïques et celles du moyen âge ; c’est là que pour la première fois il a été établi, avec une érudition ingénieuse, que les chants populaires sont des monuments aussi fidèles que touchants.
Voilà ce que fut Stendhal comme théoricien littéraire, un réaliste sans le bien savoir, un amoureux de psychologie et un adorateur de Shakespeare considéré comme peintre des passions ; d’autre part, un homme parfaitement fermé à toute poésie et même à toute haute éloquence, et ne voyant dans l’une et dans l’autre qu’insupportable déclamation ; d’autre part enfin, un homme de perspicacité très bornée quand il examinait la littérature de son temps, au point de faire, quand il en parle, les mélanges et les conflits les plus étranges de contresens et de non-sens. […] Convaincu, avec raison, que la poésie vraie est l’expression de nos sentiments en toute leur vérité, il se mettait lui-même dans ses vers avec une naïveté absolue. […] Ce qu’ils ont de plus remarquable, c’est le contraste qu’ils forment avec la poésie du même temps.
. — M. de La Mennais n’a rien écrit en fait de pure imagination ou de poésie que de petits fragments, des espèces d’Hymnes ou de Proses, qui sommeillent dans ses papiers.
Pendant que les passions politiques et religieuses tournaient la poésie, l’éloquence, la science même et la philosophie en armes envenimées au service des partis, un homme anticipait la paix future, et offrait à ses concitoyens trop forcenés encore pour le suivre l’image de l’état moral où la force des choses devait finir par les amener eux-mêmes.
Marianne, ne vous comparez pas à moi, je ne suis qu’un malheureux pécheur fort en peine de son salut ; vous, vous êtes une sainte, et, je vous le dis en vérité, un jour vous verrez Dieu ») ; le voyage des Aires à Lignières, par la montagne, derrière la voiture de déménagement, un humble exode et qui a pourtant je ne sais quoi parmi sa simplicité, d’auguste et de biblique ; le déjeuner du bon ermite Adon Laborie au presbytère ; le pèlerinage de Saint-Fulcran ; la joie et l’orgueil du bon vieux prêtre quand son doyen lui permet de dire la messe dans la chapelle miraculeuse…, tout cela est délicieux, d’une franche poésie, familière et pénétrante.
Parce que, péremptoirement — je l’infère de cette célébration de la Poésie, dont nous avons parlé, sans l’invoquer presqu’une heure en les attributs de Musique et de Lettres : appelez-la Mystère ou n’est-ce pas ?
Il est vrai que l’Amour est le thème éternel de toute poésie et qu’à l’inverse de sa pratique, immuable dès l’origine, son expression littéraire diffère et varie au cours des âges, au point de marquer la valeur du groupe social.
Les comédies de Marivaux, le Vert-Vert de Gresset, les poésies musquées d’un Dorât ou d’un Bernis, portent la marque ineffaçable de cette condescendance au goût féminin.
Ce n’est pas absolument de la très grande poésie, mais La Fontaine y touche et y touche de très près.
La France, il est vrai, par sa situation centrale dans le monde civilisé, semble être appelée à recueillir toutes les notions et toutes les poésies environnantes, et à les rendre aux autres peuples merveilleusement ouvrées et façonnées.
Voltaire et les encyclopédistes étaient trop sceptiques, c’est-à-dire trop frivoles ; Rousseau l’a séduit, par ses ardeurs, par son spiritualisme, par sa poésie. […] Sans doute, Paul était personnel, emporté, passionné, combattif, étroitement orthodoxe, intolérant ; Mahomet avait le tort de permettre le brigandage, le mensonge, l’assassinat, la trahison, et d’abuser parfois de son rôle pour satisfaire à ses luxures ; Calvin manqua complètement de charme, de douceur, de souplesse, fut un esprit chagrin, vit le mal partout, enleva sa poésie au christianisme. […] Le livre, un des plus originaux et des mieux réussis de la série, dégage une impression bien inattendue d’attendrissement, d’admiration même : il est l’épopée de la bourgeoisie ; les bonnes qualités de la bourgeoisie française, l’amour du travail, la patience, la sagesse, la bonté prudente, ces qualités si souvent injustement raillées parce qu’elles sont plus solides que brillantes, plus honorables que séduisantes, s’y dégagent avec un relief charmant, avec une poésie affectueuse qu’aucun écrivain n’avait jamais songé à leur donner. […] Sully-Prudhomme, où les analyses d’un esprit trop conscient sont comme enveloppées d’une fine poésie, pareille à ces légers voiles de soie d’Orient. […] Nous ne lui demandons pas, cela va sans dire, la distinction, la poésie, puisqu’il professe le dédain de ces choses ; mais on ne rencontre pas davantage chez lui, ce qui cependant ne peut faire de mal à aucune prose, la vivacité, l’imagination, l’esprit, le mot heureux.
la poésie chinoise — celle du moins qu’on connaît — est classique. Des poésies de l’époque des Thang, la philosophie épicurienne au bord des eaux, l’éternelle invitation à la tasse, font vaguement rêver à un Horace de Rotterdam.
Maxime Rude, dont les Gouttes de Sang, un recueil de poésies pleines de charme et de vigueur, eussent mérité un plus long examen. […] Voilà ce que nous donne aujourd’hui le bilan de la littérature rimée Aussi ne devons-nous pas laisser échapper l’occasion de signaler à nos lecteurs un beau livre de poésies quand il vient à surgir. […] Si j’avais fui Mme Gance dans cette soirée funeste où, jouant un nocturne avec tant de poésie, elle fit passer dans l’air je ne sais quels frissons ; si je l’avais fuie alors, elle ne m’aurait pas dit : « Aimez-vous la musique ? […] L’auteur aura beau dire qu’il a voulu persifler dans leur langage les naturalistes de la poésie, il ne sera pas cru par tout le monde, et ce sera son châtiment. […] C’est, je ne crains pas de l’avouer, un des livres de poésie les plus intéressants que j’aie lus depuis longtemps.
Dans toutes ces lettres, si gracieuses de ton et si fines de manière, il n’y a, après tout, ni flamme, ni jeunesse, ni amour, ni même le voile d’illusion et de poésie. […] Je vous abandonne leurs poëtes tragiques, comiques, lyriques, parce que je n’aime la poésie dans aucune langue ; mais, pour la philosophie et l’histoire, je les trouve infiniment supérieurs aux Français et aux Anglais. […] Vous sentez que je ne parle que des écrivains de la première classe. » Mais ce qui est plus vrai que tout, c’est qu’il n’aime la poésie en aucune langue.
C’est qu’aussi il s’est fait et vu en nos jours beaucoup de choses splendides, depuis le gaz et la lumière électrique jusqu’à la poésie, et il n’est pas d’autre mot que celui-là pour les qualifier.
Les moindres récits courent alors sous sa plume, rapides, entraînants, simples, loin d’aucun système, empreints, sans affectation, des circonstances les plus familières, et comme venant d’un homme qui a de bonne heure vécu de la vie de tous les jours, et qui a senti l’âme et la poésie dessous.
Rabelais, outre la poésie, où il passait pour exceller, s’occupait aussi de théologie, mais, à ce qu’on peut croire, sans vocation particulière, et seulement comme d’une des branches de la science universelle.
Richard Wagner et la poésie française contemporaine, par Edouard Dujardin, article paru dans la Revue de Genève, du 23 juillet 1886.
Outre leurs noms distinctifs, presque toutes les plantes sauvages ont ainsi un surnom qui souvent est commun à des espèces fort différentes ; la flore populaire se meut dans l’heureuse imprécision de la poésie et de la nonchalance.
Il ne parlait point ou voulait toujours parler de Platon, et dans ses réflexions sur la poésie, jamais auteur ne fut moins propre à inspirer du respect par sa présence.
Nous disons, nous, que la poésie est surtout dans le poète et que Childebrand est épique, si le poète est épique ; ou bien que serait l’invention ?
Goethe, Poésies : Dieu et le Monde.
Il envoie des poésies lamentables aux journaux du comté, commence un poëme épique, une tragédie où meurent seize personnes, une histoire foudroyante des jésuites, et défend en loyal tory l’Église et le roi. […] Sous cette pluie d’ironies et de mécomptes, l’héroïne s’est rapetissée, l’illusion s’est affaiblie, l’intérêt a diminué, l’art s’est amoindri, la poésie a disparu, et le personnage, plus utile, est devenu moins vrai et moins beau.
Dimanche 21 juin Il me vient l’idée de publier un volume tiré de mes Mémoires, sous le titre : Poésies d’un prosateur. […] Là dedans, un petit homme au front socratique, aux oreilles rouges de sang, au nez sensuel où danse une verrue sur une narine, nous récite de sa poésie, dans la langue de musique du lieu.
Samedi 21 avril La poésie, il ne faut pas l’oublier, c’était autrefois toute l’invention, toute la création, toute l’imagination du temps passé… Aujourd’hui il y a encore des versificateurs, mais plus de poètes, car toute l’invention, toute la création, toute l’imagination du temps présent est dans la prose. […] Il peut faire de la peinture dix heures de suite, sans fatigue, tandis que lorsqu’il cherche des idées, des expressions, des mots, il est aussitôt pris de vertiges, de troubles de l’être, qui l’ont fait, depuis des années, renoncer à la poésie.
De même une passion qui ne suscite pas un chef-d’œuvre de poésie, ne reste pas sans action sur l’imagination créatrice. […] Moi, au contraire, au courant d’une scène, ou d’un morceau de poésie, il m’arrive tout à coup de changer de route, de culbuter mon propre plan, de me retourner contre mon personnage préféré et de le faire battre par son interlocuteur… J’étais parti pour Madrid et je vais à Constantinople59. » Les deux procédés, l’évolution et la transformation, sont, ici, très nettement indiqués et opposés. […] De là les regrets du poète se plaignant que le meilleur de sa poésie demeure en lui-même, l’opposition continuelle du rêve et de la réalité, de l’idéal et du réel. […] Voir Brunetière : L’Évolution de la poésie lyrique en France au xixe siècle, et M.
» Et la poésie du Rhône lui apparaît. […] Avec un Leconte de Lisle et un Sully-Prudhomme, la poésie se fait systématiquement érudite et psychologique. […] C’est une des poésies tragiques du destin que cette subite tombée dans la nuit de ces nobles ambitions intellectuelles dont on fut le confident. […] La poésie de Chantilly I Un des écrivains qui servent le mieux dans la presse la pensée française, M.
J’admire Voltaire comme un des hommes les plus étonnants qui aient encore paru, et c’est de très-bonne foi que je le publie ; mais je ne suis pas toujours de son avis, et ce ne sera pas dans une pièce de poésie fugitive que j’irai chercher le sentiment de Voltaire, et moins encore puiser le mien sur la philosophie et la morale d’un écrivain. […] Et quand on égalerait Fénelon dans la prose, Racine ou Voltaire dans la poésie, serait-on dispensé de garder un ton modéré, à moins qu’il ne fût question de défendre l’innocence calomniée ?’ […] Que Sénèque pousse son énumération aussi loin qu’il voudra, je persisterai dans la même réponse, et je lui dirai, d’après mon expérience, d’après l’expérience des bons et des méchants, que l’imitation d’une action vertueuse par la peinture, la sculpture, l’éloquence, la poésie et la musique, nous touche, nous enflamme, nous élève, nous porte au bien, nous indigne contre le vice aussi violemment que les leçons les plus insinuantes, les plus vigoureuses, les plus démonstratives de la philosophie. […] Quel est celui des Anciens et des modernes qu’on puisse te comparer dans la poésie légère ? […] Il n’y a presque pas un genre d’érudition auquel il ne se soit appliqué ; il a laissé des oraisons, des dialogues, des poésies.
Je lisais l’autre jour, dans un recueil inédit de pensées : « La faculté poétique n’est autre chose que le don et l’art de produire chaque sentiment vrai, en fleur, selon sa mesure, depuis le lys royal et le dahlia jusqu’à la pâquerette. » Ce qui est dit là de la poésie, à proprement parler, peut s’appliquer à toute œuvre créée et composée, où l’idée du beau se réfléchit.
Le possible n’est que là, le reste est de la poésie ; mais ce ne sera jamais plus de la politique sérieuse pour l’Italie.
LV Est-ce de la poésie ?
Je voulais essayer mon talent, encore douteux pour moi-même, dans une grande œuvre en prose ; l’histoire me paraissait et me paraît encore la première des tragédies, le plus difficile des drames, le chef-d’œuvre de l’intelligence humaine, la poésie du vrai.
Ce serait un beau moment de poésie, et je regrette de n’en avoir aucune en train.
Gautier dans la poésie.
Wagner a recueilli pieusement les traditions significatives du passé : Shakespeare et Goethe avaient agi de même, en Poésie dramatique, et bien d’autres comme eux !
Non, le romancier, qui a le désir de se survivre, continuera à s’efforcer de mettre dans sa prose de la poésie, continuera à vouloir un rythme et une cadence pour ses périodes, continuera à rechercher l’image peinte, continuera à courir après l’épithète rare, continuera, selon la rédaction d’un délicat styliste de ce siècle, à combiner dans une expression le trop et l’assez, continuera à ne pas se refuser un tour pouvant faire de la peine aux ombres de MM.
Pour recruter formé de recrue, il a l’autorité de Racine écrivant à son fils qui lui avait parlé de la Gazette de Hollande : « Vous y apprendrez certains termes qui ne valent rien, comme celui de recruter, dont vous vous servez ; au lieu de quoi il faut dire faire des recrues . » Mais Racine avait la même opinion sur à peu près tous les mots du dictionnaire de Furetière et aucune timidité linguistique ne peut surprendre de la part du poète dont l’indigence verbale, imposée par la mode, stérilisa pendant un siècle et demi la poésie française.
J’y retrouvais toutes les heures au soleil ou à l’ombre que j’y avais passées, toutes les poésies de mes livres et de mon cœur que j’y avais senties, écrites ou seulement rêvées, pendant les plus fécondes et les plus splendides années de mon été d’homme.
Seule d’ailleurs, et tandis que ni la peinture, ni la poésie ne réussissaient au plus qu’à égaler leurs modèles, la Science « avançait », d’un mouvement, irrégulier peut-être, mais toujours « progressif », les découvertes de Copernic ayant préparé celles de Kepler, auxquelles on avait vu s’ajouter celles de Galilée, suivies elles-mêmes de celles de Newton.
Un pareil cortège et un pareil spectacle sont, entre toutes les œuvres d’art, les plus grandes ; il n’y a point de tragédie peinte qui vaille la tragédie réelle, et l’on comprend pourquoi, par-delà les historiens de profession qui s’enferment dans l’exacte analyse, Heine, Goethe, Rückert, Victor Hugo, Tennyson et tant d’autres poètes en vers ou poètes en prose, ont employé leur génie ou leur talent en divinations historiques, et trouvé la poésie dans la vérité. […] Les vies illustres s’éteignent sur tous tes points du « monde, comme les mille flambeaux d’une fête qui finit. » Le plus haut accent de la poésie ne dépasse pas celle dernière phrase ; tout homme qui a tenu une plume tressaille en la lisant, et de pareilles phrases ne sont pas rares. […] Parmi ses œuvres, Volupté, les Poésies, les Premiers Portraits ne doivent être comptés, si on les compare aux autres, que comme des études et des promesses. […] Nous entendions par couleur locale ce qu’au xviie siècle on appelait les mœurs ; mais nous étions très fiers de notre mot, et nous pensions avoir imaginé le mot et la chose. » Depuis, ayant fabriqué des poésies illyriennes que les savants d’outre-Rhin traduisirent d’un grand sérieux, il put se vanter d’avoir fait de la couleur locale. […] A mon sens, sauf la distance de la prose à la poésie, ses Nouvelles rustiques sont presque égales à l’Hermann et Dorothée de Gœthe.
Il mêle à ses drames les plus sombres une raillerie subtile et, d’autres fois, une poésie charmante, un peu sensuelle, et qui s’attarde. […] C’est quelque chose comme une tragi-comédie fantastique, où le poète tantôt s’amuse et s’égaye, tantôt disserte ou s’enchante lui-même de gracieuses images, et tantôt s’attendrit ; une féerie philosophique où la gaieté la plus âcre et la poésie la plus suave s’allient à l’observation la plus brutale et la moins arrangée de l’égoïsme humain. […] Elle n’est pas seulement belle parce qu’elle est stupide avec méthode et sérénité, ni par la surprise de la rime absente, ni par le contraste que fait l’emportement glorieux du rythme avec le simplisme didactique des paroles : mais c’est qu’elle est réellement « adéquate » à l’âme du bon gendarme, qu’elle en délimite avec exactitude la puissance intellectuelle et spéculative, et qu’elle exprime rigoureusement sa conception de la guerre, son opinion sur les civils, sa complexion amoureuse, son orgueil professionnel et le genre et le degré de poésie dont il est capable… Oui, Géromé est tout entier dans ces strophes précises et martiales : Pour les braves militaires, Y a deux genres de flanc, Le flanc gauche et le flanc droite, Arche en arrière, en avant ! […] Il a placé, dans ce milieu de convention romantique, des personnages d’une vérité franche et même hardie ; il leur a prêté des discours d’une poésie subtile et insolente.
Outre ce frère du grand Condé, il comptait également pour émules Bernier, célèbre depuis par ses voyages, dont le récit se lit encore avec intérêt, et par ses livres de philosophie, aujourd’hui tombés dans l’oubli ; ce même Bernier qui, ayant presque tout appris dans ses excursions lointaines, hors le métier de courtisan, revint en France se faire tourner le dos par Louis XIV ; Chapelle, auquel un grand amour du plaisir et quelques petits vers ont assuré une immortalité facile ; enfin Hesnaut, fils d’un boulanger de Paris, connu par des poésies anacréontiques, le sonnet de L’Avorton et l’éducation poétique du chantre des moutons, madame Deshoulières ; Hesnaut qui prit, par reconnaissance, la défense de Fouquet contre Colbert dans des vers satiriques, et qui faillit se repentir de son plaidoyer. […] Retrouvant dans le sonnet d’Oronte ce qu’ils admiraient dans les poésies de leurs auteurs les plus à la mode, les antithèses et les traits brillantés, et prenant encore en cette circonstance Philinte pour l’organe de l’auteur, les spectateurs s’empressèrent d’applaudir comme lui au chantre de Philis, et témoignèrent par leurs bravos qu’ils trouvaient que La chute en est jolie, amoureuse, admirable. […] Il parle passablement français ; il traduit assez bien l’italien et ne copie pas mal les auteurs ; car il ne se pique pas d’avoir le don de l’invention, ni le génie de la poésie, et ses amis avouent librement que ses pièces sont des jeux de théâtre où le comédien a plus de part que le poète, et dont la beauté consiste presque toute dans l’action ; ce qui fait rire en sa bouche fait souvent pitié sur le papier ; et l’on peut dire que ses comédies ressemblent à ces femmes qui font peur en déshabillé et qui ne laissent pas de plaire quand elles sont ajustées, ou à ces petites tailles qui, ayant quitté leurs patins, ne sont plus qu’une partie d’elles-mêmes… Toutefois, on ne peut dénier que Molière n’ait bien de l’adresse ou du bonheur de débiter avec tant de succès sa fausse monnaie, et de duper tout Paris avec de mauvaises pièces. […] Et, afin d’arrêter avec succès la vue et le débit de sa production impie et irréligieuse, et de sa poésie licencieuse et libertine, Elle lui a ordonné sur peine de la vie d’en supprimer et déchirer, étouffer et brûler tout ce qui en était fait, et de ne plus rien faire à l’avenir de si indigne et si infâmant, ni rien produire au jour de si injurieux à Dieu et outrageant l’Église, la religion, les sacrements et les officiers les plus nécessaires au salut, lui déclarant publiquement, et à toute la terre, qu’on ne saurait rien faire ni dire qui lui soit plus désagréable et odieux, et qui le touche plus au cœur, que ce qui fait atteinte à l’honneur de Dieu, au respect de l’Église, au bien de la religion, à la révérence due aux sacrements, qui sont les canaux de la grâce que Jésus-Christ a méritée aux hommes par sa mort en la croix, à la faveur desquelles elle est transfuse et répandue dans les âmes des fidèles qui sont saintement dirigés et conduits.
Mais ce n’est pas à cause de cela que j’insiste pour que vous commenciez par une chose de vous et une chose qui est décidément plus intéressante pour les Français que les odes de Klopstock et plus belle même, car la poésie fait tant aux odes qu’aucune traduction ne peut en rendre l’effet. — De plus, il y aura un parti contre ce qui vient de l’allemand au moment où mon ouvrage paraîtra, et la disposition est à vous admirer sur le sujet que vous avez traité. — Travaillez-y, venez me le lire dans deux mois et donnez-le à l’impression à Paris. […] Il s’agit de l’Autobiographie (Poésie et Vérité), la première partie, qui parut en octobre 1811, mais qui ne vint qu’assez tard aux mains de Mme de Staël. « En ce temps-ci, disait-elle à ce propos, les voyages des livres ne sont guère plus libres que ceux des personnes. » 134.
Daunou n’avait point reçu de la nature ce qu’il faut pour dégager l’élément poétique proprement dit, pour saisir la poésie en tant qu’elle se sépare nettement de la prose, et qu’elle en est quelquefois le contraire ; la poésie, comme il l’entendait, et comme l’entendaient presque tous ses contemporains, n’était que de la prose plus noble, plus harmonieuse, de la prose dans ses plus riches conditions.
en philosophie Locke en est, Descartes lui-même n’en sort pas : j’y mets André Chénier en poésie. […] Ces derniers (et je ne parle point du tout de la politique, mais de la littérature, de la poésie, de la critique) se trouvent nombreux de nos jours ; on pourrait croire que c’est une espèce nouvelle qui a pullulé.
La poésie est vraie comme la prose, et s’il y a des mangeurs et des boxeurs, il y a aussi des artistes et des chevaliers. […] La prose classique atteint la perfection chez lui comme la poésie classique chez Pope.
Puisse le destin, que notre affection implore en tremblant pour toi, t’accorder toujours la même faveur, toutes les fois que l’autre hémisphère attirera tes pas ; puisse-t-il te ramener toujours heureusement aux rivages de ta patrie, le front ceint d’une nouvelle couronne… Pour moi, dans le sein de l’amitié, je ne demande qu’une maison tranquille, où ton nom réveille dans mon fils le désir d’atteindre ta renommée, une tombe qui me recouvre, un jour, avec ses frères… Allez maintenant, mes vers, allez dire à celui que j’aime que ces chants vont timidement à lui, des collines d’Albano ; d’autres porteront plus haut sa gloire, sur les ailes de la poésie… » Pendant qu’Alexandre de Humboldt, faisant collaborer à son œuvre tous les savants français, par un concours de travaux spéciaux dont il leur donnait les sujets, et dont il payait les frais de sa fortune, formait une œuvre sur les régions équinoxiales, dont le prix dépassait déjà 5 ou 6 mille francs l’exemplaire, monument plus digne d’une nation que d’un particulier, Guillaume, chassé de Rome par Bonaparte, rentrait attristé dans sa patrie.
» XXX C’est ainsi que, de descriptions en descriptions magnifiques, l’auteur arrive à la fin de son livre où la poésie occupe plus d’espace que la religion, et dont le vrai titre serait le Christianisme poétique.
On examine à qui, des sciences ou de la poésie, est due la prééminence.
Comme dans la double écriture d’un palimpseste, un rituel de mages transparaît sous la poésie grecque qui l’a recouvert.