IV C’est le cercle, en effet, la tautologie, le paralogisme, la bêtise redondante, — car il faut bien dire les gros mots, puisqu’on a osé prononcer les grands, — ce sont enfin tous les sophismes badauds qui font le fond de ce petit livre, auquel une critique trop hospitalière veut faire les honneurs de chez nous.
Effrayante alternative pour Guizot, qui n’a même guères abordé que par la main des autres la vie publique de Calvin et son gouvernement spirituel, mais qui, pour le reste, pour cet abîme de la moralité d’un homme, qu’il faut pénétrer et sonder dans tout homme, quand on se charge de son histoire, a fait ce qu’on fit à la mort de Calvin, dont on s’empressa de clouer vite dans le cercueil le cadavre, qui aurait parlé, et de le jeter dans la tombe… Prudence terrible, qui dit même plus qu’on n’ose penser.
Par une contradiction que j’ose lui reprocher, par un de ces entrelacements étranges qui font de lui la plus inattendue des arabesques humaines, Ernest Hello a l’ambition extérieure de ses facultés et en voudrait, avec fureur, la gloire… Un penseur de sa force aurait de la grandeur à dédaigner la gloire, et un mystique comme lui devrait l’oublier ou ne pas même se douter qu’elle existe, et il raffole de cette misère !
L’affectation n’oserait pas toucher, dans Guérin, à sa sensation exquise ou profonde.
J’ose aller contre l’axiome de Boileau, ce janséniste en poésie, qui disait « qu’un sonnet sans défaut valait un long poème ».
Quoique le romancier voie les réalités, et, quand il s’agit de les nommer, ne barguigne pas, le cynisme de ce terrible Richepin, qui ne craignait pas autrefois d’être cynique, qui n’hésitait jamais devant l’expression et se jetait à corps perdu sur elle, n’a plus guères, dans tout ce livre, que quelques traits fort rares, et encore le romancier ne s’y arrête pas, ou, s’il les ose, le croiriez-vous jamais ?
— qui ressemble monstrueusement à l’inceste, puisque celle qui l’éprouve ne l’éprouve que pour devenir la maîtresse de celui qu’elle ose appeler son enfant !
… Je n’ose me répondre, avec cette Maison de Penarvan sous les yeux.
C’est toujours enfin cet amour maternel, — sans sacrement, bien entendu, — qui ressemble monstrueusement à l’inceste, puisque celle qui l’éprouve ne l’éprouve que pour devenir la maîtresse de celui qu’elle ose appeler son enfant !
Du moment, en effet, où, au lieu de mêler la lumière ou le phénomène physiologique aux faits humains pour en éclairer la profondeur — comme Shakespeare, par exemple, avant tout le monde, l’a osé d’une si admirable manière et avec tant de bonheur dans sa fameuse scène de lady Macbeth somnambule, — on va plus loin dans le sens de la physiologie, quand on se circonscrit et qu’on enferme son sujet tout entier dans le phénomène, il faut prendre garde, car le passage est dangereux !
aussi bien dans les peintures que sait oser une imagination si sauvagement amoureuse de l’énergie que dans la conception des autres personnages de ce roman, de si grande proportion humaine, et qui mêlent leur destinée à celle de Guy Livingstone.
Mais si ce livre n’était pas vrai, — pas vrai même dans le sentiment d’observateur de celui qui en a tracé les pages, — que mériterait, dans la mémoire de ses compatriotes, l’homme qui a osé l’écrire, pour avoir tenté, satirique impie, de déshonorer si abominablement son pays ?
Oserais-je dans celui-ci, où la franchise et la candeur sont le sujet de nos éloges, employer la fiction et le mensonge ?
C’est de cette réformation, de cette idée d’un schisme possible, qu’est né le livre très développé, je n’ose pas dire le roman, de M. […] Mais tuer un soldat français, en uniforme, fut réputé un beau fait d’armes, et le nom de Barbès a été donné, malgré cela, je n’ose pas dire à cause de cela, à un boulevard de Paris, Blanqui, n’ayant jamais tué lui-même, attend encore le sien. […] » Le gouvernement de la République française, que je regrette sincèrement de ne pas voir représenté ici par son Président, se rallierait, j’ose l’espérer, à cette nouvelle destination grandiose de l’Alsace-Lorraine. […] Qui oserait affirmer, demande-t-il, que l’esprit de ces aliénés n’était pas déjà en partie envahi par la folie ? […] C’est là sans doute une des raisons majeures des succès obtenus pendant les guerres de la Révolution : les généraux étaient jeunes, ils avaient cette vertu suprême de n’avoir point l’expérience — c’est-à-dire l’âge — et d’oser.
Mais elle n’ose critiquer l’enthousiasme de son fils pour Marat et pour Robespierre ; elle reconnaît que c’est un bon fils, d’un naturel affectueux et doux. […] Mireille elle-même s’enfuit à travers la Camargue, jusqu’aux Saintes-Maries-de-la-Mer, mais n’ose pas affronter en face la colère paternelle. […] Saint François accueillait presque familièrement, si l’on ose ainsi s’exprimer, les visites dont l’honoraient les anges et le Sauveur lui-même. […] Léon Bloy, ainsi transcrite, il n’y a plus que Molière qui écope, si l’on ose dire ; mais il a une santé assez robuste pour supporter cela. […] Je n’ose l’affirmer sans réserve, à cause des difficultés redoutables que présente une bibliographie complète de M.
Le malheureux sentait tout le poids de sa chaîne et n’osait la briser, car il comprenait trop bien qu’à peine libre, à peine rendu à l’indépendance, il pleurerait amèrement son esclavage. […] C’est là sans doute un grave défaut, personne n’oserait le nier ; ce n’est pourtant pas le défaut unique de cette biographie. […] comment oser prêter à Quintilien un si étrange paradoxe ? […] Quand le Christ pardonne à Madeleine, à la femme adultère, et dit aux assistants : « Qui de vous osera lui jeter la première pierre ? […] Qui oserait le dire ?
Mais maintenait j’hésitais ; il avait par hasard l’air honnête… Je n’osais plus. […] Il vit cela et il osa, lui qui avait un grand fonds de timidité modeste. […] Lui, ne pouvait, n’osait rien dire, mais elle aurait dû montrer plus de tendresse, plus d’abandon. […] Aussitôt la Dauphine voulut voir cette lettre que Mme de Brancas n’osait décacheter. […] Ce qui déparait ce gracieux ensemble, oserai-je le dire ?
J’ose dire que, parmi nos poètes, il est, avec Victor Hugo, dans un goût très différent, le plus grand trouveur de symboles. […] On t’aimera ; mais, comme on aura toujours peur de passer à tes yeux pour un sot, on n’osera pas te le dire. […] Il arrive à cet écrivain si sûr, si muni contre la piperie des mots, de sacrifier plus que de raison à la symétrie de ses dissertations et de nous tromper, si j’ose dire, par l’appareil logique de ses développements80. […] Je n’oserais en répondre. » De même, il reconnaît la supériorité de Dickens, mais dans un genre « évidemment inférieur » (ce genre est le roman réaliste sentimental). […] En outre, il a, si j’ose dire, l’esprit trop philosophique, trop préoccupé de théories, pour se laisser prendre bonnement à d’autres livres que ceux sur lesquels il est d’avance pleinement renseigné et rassuré.
On voulut par un impôt modérer cette fureur ; ce fut en vain ; les juges n’osaient condamner, les dénonciateurs étaient assassinés. […] Il ose toujours, il ne se gêne jamais ; il est peuple. […] La chaire avait le sans-façon et la rudesse du théâtre, et, dans cette peinture des braves gens énergiques que le monde taxe de mauvais caractères, on retrouvait la familiarité âcre du Plain-Dealer. « Certainement il y a des gens qui ont une mauvaise roideur naturelle de langue, en sorte qu’ils ne peuvent point se mettre au pas et applaudir ce vaniteux ou ce hâbleur qui fait la roue, se loue lui-même et conte d’insipides histoires à son propre éloge pendant trois ou quatre heures d’horloge, pendant qu’en même temps il vilipende le reste du genre humain et lui jette de la boue. — Il y a aussi certains hommes singuliers et d’un mauvais caractère qu’on ne peut engager, par crainte ni espérance, par froncement de sourcils ni sourires, à se laisser mettre sur les bras quelque parente de rebut, quelque nièce délaissée, mendiante, d’un lord ou d’un grand spirituel ou temporel. — Enfin il y a des gens d’un si mauvais caractère, qu’ils jugent très-légitime et très-permis d’être sensibles quand on leur fait tort et qu’on les opprime, quand on diffame leur bonne renommée et quand on nuit à leurs justes intérêts, et qui par surcroît osent déclarer ce qu’ils pensent et sentent, et ne sont point des bêtes de somme pour porter humblement ce qu’on leur jette sur le dos, ni des épagneuls pour lécher le pied qui les frappe et pour remercier le bon seigneur qui leur confère toutes ces faveurs d’arrière-train835. » Dans ce style saugrenu, tous les coups portent : on dirait un assaut de boxe où les ricanements accueillent les meurtrissures. […] Les lois n’y étant pas faites pour un particulier plutôt que pour un autre, chacun se regarde comme monarque, et les hommes dans cette nation sont plutôt des confédérés que des concitoyens. » Cela va si loin, « qu’il n’y a guère de jour où quelqu’un ne perde le respect au roi d’Angleterre… Dernièrement milady Bell Molineux, maîtresse fille, envoya arracher les arbres d’une petite pièce de terre que la reine avait achetée pour Kensington, et lui fit procès sans avoir jamais voulu, sous quelque prétexte, s’accommoder avec elle, et fit attendre le secrétaire de la reine trois heures… » Quand ils viennent en France, ils sont tout étonnés de voir le régime du bon plaisir, la Bastille, les lettres de cachet, un gentilhomme qui n’ose résider sur sa terre, à la campagne, par crainte de l’intendant ; un écuyer de la maison du roi qui, pour une coupure de rasoir, tue impunément un pauvre barbier851. […] Mais, milords, quel est l’homme qui, pour combler ces hontes et ces méfaits de notre armée, a osé autoriser et associer à nos armes le tomahawk et le couteau à scalper du sauvage !
Comment peut-on accuser de sacrifier la science à la pratique l’homme qui a osé prononcer cette parole hardie, qu’un fanatisme absurde a si étrangement calomniée : « Le problème de l’âme, dans l’état actuel de la science, est un problème prématuré ! […] C’est ce que je n’oserais affirmer. […] Si vous faites cela, vous mutilez l’esprit humain ; si vous ne l’osez faire, reconnaissez qu’il y a des sciences de diverse nature et de divers degrés. […] Et oserez-vous soutenir que tout ce qui n’est pas scientifique (toujours dans le sens étroit que vous entendez) n’est pas la pensée ? […] Quel philosophe oserait dire qu’il y a eu un commencement absolu, avant lequel rien n’était, absolument rien ?
Tel est le double but philosophique de l’élaboration fondamentale, à la fois spéciale et générale, que j’ai osé entreprendre dans le grand ouvrage indiqué au début de ce Discours : les plus éminents penseurs contemporains la jugent ainsi assez accomplie pour avoir déjà posé les véritables bases directes de l’entière rénovation mentale projetée par Bacon et Descartes, mais dont l’exécution, décisive était réservée à notre siècle. […] Forte de tels antécédents, scientifiques et logiques, pure d’ailleurs des diverses aberrations contemporaines, elle se présente aujourd’hui comme venant enfin d’acquérir l’entière généralité philosophique qui lui manquait jusqu’ici : dès lors, elle ose entreprendre, à son tour, la solution, encore intacte, du grand problème, en transportant convenablement aux études finales la même régénération qu’elle a successivement opérée déjà envers les différentes études préliminaires. […] Malgré l’extrême difficulté de ce grand sujet, j’ose assurer que, convenablement traité, il comporte des conclusions tout aussi certaines que celles de la géométrie elle-même. […] Afin de mieux marquer cette tendance nécessaire, une intime conviction, d’abord instinctive, puis systématique, m’a déterminé, depuis longtemps, à représenter toujours l’enseignement exposé dans ce Traité comme s’adressant surtout à la classe la plus nombreuse, que notre situation laisse dépourvue de toute instruction régulière, par suite de la désuétude croissante de l’instruction purement théologique, qui, provisoirement remplacée, pour les seuls lettrés, par une certaine instruction métaphysique et littéraire, n’a pu recevoir, surtout en France, aucun pareil équivalent pour la masse populaire. l’importance et la nouveauté d’une telle disposition constante, mon vif désir qu’elle soit convenablement appréciée, et même, si j’ose le dire, imitée, m’obligent à indiquer ici les principaux motifs de ce contact spirituel que doit ainsi spécialement instituer aujourd’hui avec les prolétaires la nouvelle école philosophique, sans toutefois que son enseignement doive jamais exclure aucune classe quelconque. […] Les sept derniers chapitres du tome premier contiennent une admirable exposition dogmatique, aussi profonde que lumineuse, de la logique inductive, qui ne pourra jamais, j’ose l’assurer, être mieux conçue, ni mieux caractérisée en restant au point de vue où l’auteur s’est placé.
C’est ce qui arriva au jeune écrivain pour le salon de peinture de 1822, dont il rendit compte dans le Constitutionnel ; ces mêmes articles parurent durant l’année, réunis en brochure, Quoi qu’en puisse penser aujourd’hui l’auteur, très-sévère sur ces premiers essais et dès longtemps mûri en ces matières, j’ose lui assurer que cette brochure se relit encore avec plaisir, avec utilité. […] Il n’appartient qu’à Pascal sans doute d’oser dire crûment que, si le nez de Cléopâtre avait été plus long ou plus court, la face du monde aurait changé, et de se prévaloir nommément, comme il fait, du grain de sable de Cromwell ; mais il me semble, dans le cas présent, avec Rœderer29, que le renversement du trône au 10 août n’était pas une conséquence inévitable de la révolution de 89 ; qu’il n’était pas absolument nécessaire que l’infortuné Louis XVI se rencontrât aussi insuffisant comme roi ; une dose en lui de capacité ou de résolution de plus eût pu changer, modifier la direction des choses dès le début. […] Ce n’est pas là sans doute une besogne bien facile, mais enfin elle n’a rien de sanglant, elle est toute légale ; et bien aveugles, bien coupables seraient ceux qui lui donneraient les caractères sinistres qu’elle n’a pas aujourd’hui. » Le 19 février, il allait plus loin et se découvrait davantage : « La France, osait-il dire, doit être bien désenchantée des personnes : elle a aimé le génie, et elle a vu ce que lui a coûté cet amour.
Comme fait, et l’histoire en main, si l’on ose réfléchir, on a peine à ne pas tirer l’austère résultat. […] Si je l’osais, j’en donnerais le conseil même aujourd’hui encore à mes brillants amis. […] Voir, dans les lettres latines de Naudé, la 31e à Campanella, et la dédicace reconnaissante que celui-ci lit à Naudé de son petit traité de Libris propriis et recta Ratione studendi. — Osons dire toute la vérité.
Quant à l’horloger Cherubino, qui était vêtu en prêtre, parce qu’il avait de bons bénéfices que le pape lui avait donnés, on n’osa l’attaquer. […] Vous avez raison, Sire, osai-je lui dire, les princes qui, comme Votre Majesté, savent encourager ceux qui les servent, ne trouvent jamais en eux rien d’impossible ; et, puisque Dieu m’a donné un si bon maître que vous, j’espère achever tout ce que vous m’avez commandé. […] Je crois que les coups de pied et de poing qu’il nous a donnés cette nuit ont fait tant de peur à la fièvre, qu’elle n’a plus osé reparaître.
Pour y parvenir, on suit docilement, aujourd’hui comme hier, les règles classiques (si l’on ose dire) de cette lucrative manipulation. […] Et la presse quotidienne étant presque toujours aux mains de brasseurs d’affaires, il en est résulté qu’aucun directeur de journal n’a osé, ni même désiré, lutter contre le roman-feuilleton, pas plus qu’aucun politicien n’a osé, ni même désiré lutter contre l’assommoir.
On y voit apparaître le rhythme extraordinaire qui, dans le morceau d’ensemble suivant, alors que les assistants, frappés de cette sublime intervention, n’osent résister à une aussi céleste manifestation de l’amour, semble être formé par le contre coup du battement irrégulier de ces cœurs saisis, exaltés, et accablés à la fois. […] Laforgue, maintenant la forme des vers, a osé déjà varier les rythmes suivant des raisons précises, et violer les sottes règles dites « pour les yeux » : comprenant que les sonorités seules importaient dans la poésie, et qu’un mot singulier y pouvait bien rimer avec un terme pluriel, s’ils avaient même façon d’être prononcés. […] Il cite alors Mallarmé bien sûr, le premier à oser une révolution de la « musique verbale » après la révolution wagnérienne de la « musique instrumentale ».
La nature et le cœur humain s’y révèlent, avant l’âge des déclamations et des affectations littéraires, dans toute la simplicité et dans toute la naïveté du premier âge, de cet âge d’innocence des livres, si l’on ose se servir de cette expression. […] Télémaque, encouragé par la bonne réception de Ménélas et d’Hélène son épouse, la plus belle des femmes, ose enfin dire ce qui l’amène. […] s’écrie Ménélas en soupirant avec force, ils osent aspirer, ces lâches insensés, à reposer dans la couche du héros !
Je n’oserais affirmer que la vertu et la gaieté se tiennent si étroitement ; la gaieté naît avant tout d’un tempérament heureusement mélangé par la nature, mais il faut aussi que ce tempérament ne soit pas altéré de bonne heure par des habitudes sociales et des influences factices trop contraires. […] Désaugiers, en ce genre, a la veine plus grasse qu’aucun de ses devanciers et de ses contemporains ; mais on ose mieux louer en lui les vifs et légers accès de son humeur jaillissante, au nombre desquels je rappellerai encore la Manière de vivre cent ans (1810).
Mais chez toi la pudeur de l’adolescence, qui avait trop aisément cédé par le côté sensuel, s’était comme infiltrée et développée outre mesure dans l’esprit, et, au lieu de la mâle assurance virile qui charme et qui subjugue, au lieu de ces rapides étincelles du regard, Qui d’un désir craintif font rougir la beauté77, elle s’était changée avec l’âge en défiance de toi-même, en répugnance à oser, en promptitude à se décourager et à se troubler devant la beauté superbe. […] Ce jugement est assez favorable pour que je m’en honore, et il est à la fois assez sévère pour que j’ose le reproduire ici : « Dans le premier ouvrage (dans Joseph Delorme), dit-il, c’était une âme flétrie par des études trop positives et par les habitudes des sens qui emportent un jeune homme timide, pauvre, et en même temps délicat et instruit ; car ces hommes ne pouvant se plaire à une liaison continuée où on ne leur rapporte en échange qu’un esprit vulgaire et une âme façonnée à l’image de cet esprit, ennuyés et ennuyeux auprès de telles femmes, et d’ailleurs ne pouvant plaire plus haut ni par leur audace ni par des talents encore cachés, cherchent le plaisir d’une heure qui amène le dégoût de soi-même.
Je n’osai pas l’interroger sur sa maternité précoce ; mais on voyait qu’elle n’avait pas à rougir. […] moi, je n’oserais pas, je suis trop jeune pour tout savoir et trop innocente pour savoir bien raconter, dit la sposa.
Les deux fiancés m’avaient adossée sur mon séant contre le parapet du pont, à l’ombre, et ils me regardaient doucement avec de belle eau dans les yeux ; on voyait qu’ils attendaient, pour questionner, que je leur parlasse moi-même la première ; mais je n’osais pas seulement lever un regard sur tout ce beau monde pour lui dire le remercîment que je me sentais dans le cœur. […] je n’osais pas leur dire : Ce n’est ni la faim de la bouche, ni la soif des lèvres, ni la chaleur du front, c’est le chagrin.
LIII Cependant, la coalition de M. de Chateaubriand avait produit ses fruits ; la garde nationale, pervertie par la presse liguée contre Charles X, avait poussé ce prince téméraire, mais faible, à tout oser contre elle. […] Il avait tenté, en 1822, de mettre en loterie sa retraite de la Vallée-aux-Loups ; les ministres d’alors, quoique ses ennemis, n’avaient pas osé lui en refuser l’autorisation nécessaire ; mais on ne connaissait pas, en ce temps-là, la puissance des capitaux divisés pour former de grosses sommes : c’est la pluie dont les gouttes forment les rivières.
C’est à peine si j’ose sourire de l’idée un peu excessive qu’Émile Boissier se fait de la fonction du poète. […] Je n’ose détacher de l’éclatante rivière un de ces diamants qui se font valoir les uns les autres.
Je n’ose devant vous regarder la lumière Mais toi, de qui ce fer allait percer le coeur, Oublieras-tu jamais mon crime et ma fureur ? […] Je ne saurais non plus comprendre que Navarette et lui espèrent obtenir un succès quelconque avec cette comédie pitoyable, il faut qu’ils aient perdu toute notion sociale pour croire que le monde va reconnaître leur mariage et leur ouvrir ses salons, sur l’exhibition du contrat. — « A notre retour, — dit Navarette, — vertueuse Galeotti, j’entrerai dans le monde à votre bras… que vous n’oserez pas me refuser. » L’infatuation est par trop violente.
Leur prononciation le supprime, encore qu’ils osent parler de musique du Vers ! […] Puisqu’ainsi ma pensée osa couver l’unité en sourdeurs de cosmos, d’un Poème ému ainsi que de l’amour des mondes gravitants et des semences d’atomes, — et tel que se créèrent les Poèmes, pareils aux pans de roches sculptés et peints, des très anciens empires : qui, d’abscons et de subtils morphismes monstrueux de Vie, et de Signes lourds et sacrés, surent en eux enclore le Dogme et l’Éthique, et l’Émotion et la Conscience…
Je passai devant la porte de ma cour sans y entrer ; je suivis, sans lever la tête, le pied du mur noir et bossué de pierres sèches qui borde le chemin et qui enclot le jardin ; je n’osai pas m’arrêter même à l’ombre de sept à huit platanes et de la tonnelle de charmille qui penchent leurs feuilles jaunes sur le chemin. […] Je marchai vers la fosse avec eux, et je jetai à mon tour les gouttes d’eau, image des gouttes de larmes, sur le cercueil de la jeune fille, et je rentrai sans avoir osé regarder le pauvre père !
je n’oserai pas aller jusque-là, mais presque un peu empesés. […] Lorsque l’amour s’empare de deux cœurs, Pour rompre leur commerce et vaincre leurs ardeurs, Employez les secrets de l’art et la nature, Faites faire une tour d’une épaisse structure, Rendez les fondements voisins des sombres lieux, Elevez son sommet jusqu’aux voûtes des cieux, Enfermez l’un des deux dans le plus haut étage, Qu’à l’autre le plus bas devienne le partage, Dans l’espace entre deux, par différents détours, Disposez plus d’Argus qu’un siècle n’a de jours, Empruntez des ressorts les plus cachés obstacles ; Plus grands sont les revers, plus grands sont les miracles : L’un, pour descendre en bas osera tout tenter, L’autre aiguillonnera ses esprits pour monter.
Il sort avec éclat du juste milieu des théories, de la vieille danse des équilibres, de la prudence des ménagements, de l’hypocrisie des respects, et voilà pourquoi nous signalons très haut le livre qu’il ose publier. […] Elle n’a plus que des faits en masse, et, nous osons le dire, des faits massivement ennuyeux.
Il est arrivé au point juste où l’instrumentiste et l’instrument se confondent, et la supériorité qu’il atteste est si grande que la Critique ne saurait croire qu’il put faire un progrès de plus, et que, pourtant, elle n’oserait l’affirmer ! […] Un Pape s’arrachant au Vatican, foulant aux pieds ses deux couronnes, pauvre de plus avec les pauvres, comme si, Pape, il ne pouvait pas plus pour eux que s’il était l’un d’eux, aucune politique n’avait osé encore une conclusion de ce radicalisme absolu.
[NdA] Quelqu’un, à moi de bien connu, qui fut un moment compagnon de Musset dans cette vie d’imagination et d’effréné désir, a osé encore écrire une pensée que je surprends et que je dérobe, une pensée qui exprime à souhait, et plus qu’à souhait, cette forme de déréglement et de fureur passionnée si chère à la génération dite des enfants du siècle : « Je me fais quelquefois un rêve d’Élysée ; chacun de nous va rejoindre son groupe chéri auquel il se rattache et retrouver ceux à qui il ressemble : mon groupe, à moi, je l’ai dit ailleurs, mon groupe secret est celui des adultères (moechi), de ceux qui sont tristes comme Abbadona, mystérieux et rêveurs jusqu’au sein du plaisir et pâles à jamais sous une volupté attendrie. — Musset, au contraire, a eu de bonne heure pour idéal l’orgie, la bacchanale éclatante et sacrée ; son groupe est celui de la duchesse de Berry (fille du Régent), et de cette petite Aristion de l’Anthologie qui dansait si bien et qui vidait trois coupes de suite, le front tout chargé de couronnes : “κώμοι και μανίαι, μέγα χαίρετε…” (Anthol. palat.
J’aime mieux essayer de les faire sentir que de repasser sèchement toutes les grandes batailles où il fut un des vigoureux artisans, Austerlitz, Auerstaedt, Eylau, Eckmuhl, Wagram, Smolensk, la Moskowa : — une intrépidité de premier ordre, cela va sans dire ; — l’affection de ses troupes qui lui permettait de tirer d’elles de merveilleux surcroîts de fatigue et des combats acharnés au sortir des marches les plus rudes : — « Cet homme me fera toujours des siennes », disait l’empereur, en apprenant une de ces marches sans exemple à la veille d’Austerlitz ; — l’habileté des manœuvres et le coup d’œil sur le terrain, le tact qui lui faisait sentir l’instant décisif, ce talent pratique qui est du tacticien et du capitaine, et qui montre l’homme né pour son art (cela se voit surtout dans sa conduite à Auerstaedt, à Eckmuhl) ; — oser prendre, au besoin, la responsabilité de ses mouvements dans les circonstances critiques, sans se tenir à la stricte exécution des ordres ; et, quand il se bornait à les exécuter, une activité sans trêve.
Et ceci me rappelle un contraste ; car, pour être juste envers Rousseau, il ne faut jamais le séparer de son siècle ni de ceux qu’il est venu contredire et en face desquels il a osé relever son noble drapeau.
Je vous remercie de m’encourager ainsi et de m’enhardir, et bien réellement j’avais si fort besoin d’être rassuré que je ne vous écris ceci que pour vous dire comme quoi je n’ose, même après votre mot aimable, venir parler de Catherine.
On voit l’ensemble descontretemps, et, si l’on osait parler ainsi en telle matière, des guignons, des méprises, auxquels on avait déjà affaire.
En sa spirituelle préface, le chansonnier semble regretter qu’aucun de nos jeunes talents ne se soit essayé dans une voie qu’il croit fertile encore ; ce conseil et ce regret, j’ose le dire, tombent à faux.
Celle-ci est toujours correcte, propre, énergique, quelquefois un peu crue ; il y manque un certain éclat nouveau, et, si j’ose ainsi parler, une sorte de flagrance.
Je n’ose en répondre : « Vous louez douze vers pour en tuer douze mille », ne put-il s’empêcher de dire un jour à quelqu’un qui revenait devant lui avec complaisance sur cette idylle première ; il disait cela avec sourire et grâce, comme il faisait toujours, mais il devait le penser un peu.
Cousin de cette philosophie première, mais on sent qu’elle a des ailes. » Elle en eut en effet dès sa naissance ; dans ce premier Discours d’ouverture du 7 décembre 1815, où Reid très-amplifié apparaît comme un grand régénérateur et comme celui qui est venu mettre fin au règne de Descartes, dans ce Discours où éclatent à tout instant une parole et un souffle plus larges que la méthode même qui y est proclamée, on croit entendre encore les applaudissements qui durent saluer cette péroraison pathétique par laquelle, au lendemain des Cent-Jours et avant l’expiration de cette brûlante année, le métaphysicien ému se laissait aller à adjurer la jeunesse d’alors : « C’est à ceux de vous dont l’âge se rapproche du mien que j’ose m’adresser en ce moment ; à vous qui formerez la génération qui s’avance ; à vous l’unique soutien, la dernière espérance de notre cher et malheureux pays.
Ce fut là, si j’ose dire, le trait principal, l’acte essentiel et souverainement méritoire de la vie publique de Jefferson.
Ce n’est pas un rêve que de croire qu’il serait utile de voir se produire quelquefois de beaux essais de ce que j’appelle une littérature d’État, c’est-à-dire d’une littérature affectionnée, qui ne soit pas servile, mais qui ose relever les vrais principes, honorer les hommes par leur côté principal et solide, rappeler derrière les jeux brillants et souvent trompeurs de la scène les mérites de ceux qui, à toutes les époques, ont servi le monde en le rendant habitable d’abord, en le conservant ensuite, en le replaçant, quand il veut se dissoudre, en des cadres fixes, et en luttant contre les immenses difficultés cachées.
Ce sont eux qui ont osé croire les premiers, qu’il suffisait du tableau des affections privées, pour intéresser l’esprit et le cœur de l’homme ; que ni l’illustration des personnages, ni l’importance des intérêts, ni le merveilleux des événements n’étaient nécessaires pour captiver l’imagination, et qu’il y avait dans la puissance d’aimer de quoi renouveler sans cesse et les tableaux et les situations, sans jamais lasser la curiosité.
Nous rencontrons d’abord la pastourelle, qui fait contraste avec la chanson : elle ragaillardissait nos aïeux de sa naturelle et saine grossièreté ; la simple franchise des amours champêtres les délassait de tant de pâles et respectueux amants qui n’osaient pas dire leur désir, ni même désirer.
Une mère dont l’enfant est malade lui offre de l’argent : « Garde tes offrandes… Oses-tu croire que la divinité dérange l’ordre de la nature pour des cadeaux comme ceux que tu peux lui faire ?
Voilà, Monsieur, les conseils que j’oserais donner à nos jeunes gens.
Il manque un peu de jansénisme, si j’ose déjà m’exprimer ainsi.