/ 2164
665. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Bègue, de son côté, n’est pas une idéale figure, loyal, ayant la justice dans le cœur, prêt à vivre en paix, dès que lui-même ou un des siens est attaqué, le voilà fou de combats, forcené, téméraire, féroce, et je ne sais si, dans cette sanglante geste ni dans aucune autre, acte plus cruel se rencontre que celui de ce bon et brave baron : quand il a vaincu en duel Isoré, irrité qu’il est de je ne sais quelle outrageante raillerie d’un Bordelais, il arrache le cœur du vaincu et en fouette le visage de l’insulteur. […] Une figure légendaire aura plus de consistance, plus d’être, si en elle nous apparaît le fils ou le père d’un héros, qui nous est connu. […] Ou verrait la légendaire figure de ce comte Guillaume qui en 793 arrêta les Sarrasins sur les bords de l’Orbieu et mourut moine au monastère de Gellone qu’il avait fondé, on la verrait attirer à elle tous les vainqueurs régionaux des guerres musulmanes, et se constituer ainsi six frères avec un père ; on la verrait absorber tous les Guillaume du Nord, l’un comte de Montreuil-sur-Mer, un autre possesseur de ce surnom de Court-Nez qui nécessitera le coup d’épée du géant Corsolt, un troisième qui n’était pas un Guillaume, défenseur hautain du faible Louis ; pour s’assimiler ce dernier, elle est obligée d’émigrer, avec tout son cortège d’hommes et de faits, du règne de Charlemagne au règne de son successeur. […] L’élaboration de l’épopée s’était, faite en condensant dans la fixité d’un type héroïque diverses physionomies de personnages héroïques : dans la décomposition du genre, au contraire, chaque type se résout en plusieurs figures de fantaisie, graves ou ridicules, outrées de sublimité ou de bassesse, selon l’utilité particulière de chaque sujet.

666. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Figurines (Deuxième Série) » pp. 103-153

Une fois seulement, un petit homme noir, de figure sèche et mauvaise, a jeté quelques cris brutaux. […] Jamais on ne fit un tel usage de toutes les « figures de grammaires » abréviatives : anacoluthe, ellipse, ablatif absolu. […] Au nouvel Hôtel de Ville, pieusement reconstruit selon la figure de l’ancien, quarante générations de prévôts des marchands firent leur compliment au monarque absolu par la bouche d’un socialiste. […] Émile Pouvillon, cet amoureux de la terre, qui nous apporte quinze jours à peine, chaque année, ses yeux bleus de faune et d’enfant dans une bonne figure cuite d’officier et qui, le reste du temps, rêve là-bas dans son Quercy, était tout disposé à comprendre la petite pastoure visionnaire.

667. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Appendice. »

Cousin d’avoir remis en honneur, même au prix de quelque exagération, certaines figures trop oubliées du xviie  siècle, d’avoir produit quantité de pièces inédites, et d’avoir prêché hautement pour la révision et la collation des textes déjà altérés de nos grands auteurs. […] Elle disait toujours bien, parfaitement, en termes élégants et justes ; il n’y avait pas d’à peu près avec elle : je me figure que la maréchale de Luxembourg, tant vantée, devait s’exprimer ainsi.

668. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « M. Viguier »

Tel était cet aimable et savant homme dont la figure, peu connue dans le monde, est et restera présente et chère à tous ? ses amis, — une figure qui ne ressemblait à nulle autre.

669. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre I. L’esprit gaulois »

Ils écrivent sans images ni figures, aisément, tranquillement, avec la suite d’une eau claire et coulante. […] L’allégorie y enveloppe les idées pour leur ôter leur trop grand jour ; des figures idéales à demi transparentes flottent autour de l’amant, lumineuses quoique dans un nuage, et le mènent parmi toutes les douceurs des sentiment nuancés jusqu’à la rose dont « la suavité replenist toute la plaine.

670. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre III. Retour à l’art antique »

Ce sera ce goût antique qui ira se développant sous la Révolution, favorisé par les événements politiques et par le mouvement des idées : dégagé de plus en plus des éléments mondains, élégants, spirituels, auxquels il s’est allié d’abord, il créera des formes pures et froides ; il réalisera l’harmonie sans la vie, et la beauté par l’effacement du caractère ; il suscitera la correcte poésie des Fontanes, des Luce de Lancival et des Chênedollé ; il imposera même à l’imagination brûlante de Chateaubriand les idéales figures de Cymodocée et d’Atala, qui ressemblent à l’antique tout juste comme des marbres de Canova. […] On peut reconnaître à chaque moment dans son style, dans le choix d’une épithète, dans certaines métaphores et figures, un emploi systématique des procédés d’élocution qui sont familiers aux poètes grecs et latins.

671. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Premières tentatives sur Jérusalem. »

598 Son spiritualisme absolu et son opinion arrêtée que la figure du vieux monde allait passer ne lui laissaient de goût que pour les choses du cœur. […] Il signifie seulement qu’en Jésus toutes les figures de l’Ancien Testament sont accomplies.

672. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre IX. La pensée est-elle un mouvement ? »

Par la conscience, je ne puis saisir en moi ni forme, ni figure, ni mouvement, et par les sens, au contraire, qui me donnent la figure et le mouvement, je ne puis saisir la pensée.

673. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre IV. Suite du parallèle de la Bible et d’Homère. — Exemples. »

Homère a mille façons sublimes de peindre une mort violente ; mais l’Écriture les a toutes surpassées par ce seul mot : « Le premier-né de la mort dévorera sa beauté. » Le premier-né de la mort, pour dire la mort la plus affreuse, est une de ces figures qu’on ne trouve que dans la Bible. […] Ses racines se multiplient dans un tas de pierres, et s’y affermissent ; si on l’arrache de sa place, le lieu même où il était le renoncera, et lui dira : “Je ne t’ai point connu112.” » Combien cette comparaison, ou plutôt cette figure prolongée est admirable !

674. (1912) L’art de lire « Chapitre V. Les poètes »

Comme sonorités, le mot rocher, sec et dur, où l’on voit l’aigle comme cramponné ; le mot perçant rappelé par le mot yeux qui dessine si fortement, surtout pour les contemporains de Condé, le trait essentiel de la figure du prince ; le mot attaque, brusque et éclatant ; le mot inévitables qui donne l’impression d’un grand filet où le général enveloppe l’ennemi. […] Il en faut user avec lui comme avec un peintre, dont tantôt on étudie la composition, tantôt le dessin, tantôt la couleur, tantôt les figures et physionomies humaines, tantôt les eaux et tantôt le ciel.

675. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXII. La comtesse Guiccioli »

Elle a cru sérieusement qu’avec ses deux volumes d’échos, elle allait dissiper les dernières brumes qui sont peut-être un charme de plus pour nos rêves idolâtres sur l’adorable figure de lord Byron. […] — n’est le La Rochejacquelin de la, réalité ; — que la Charlotte Corday d’Adam Salomon, traduite en marbre de l’Ange de l’assassinat de Lamartine, n’est physiquement la vraie Charlotte Corday, qui fut, comme le savent ceux qui ont vu ses portraits originaux, une figure piquante de trumeau, le minois chiffonné d’une soubrette du xviiie  siècle !

676. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

Elle importe à la figure humaine. […] Quant à Pierre Ier les Mémoires du sieur de Villebois ne montreront pas une fibre ou un muscle inconnus dans cette figure allumée de chef de hordes qui a voyagé et de badaud qui rapporte chez lui les coutumes étrangères.

677. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Goethe »

Ce ne sont pas des femmes apocryphes, eu ce sens que c’est bien Goethe qui a tracé les premiers linéaments de ces figures, auxquelles Saint-Victor a donné le relief coloré de son talent. […] Mais Saint-Victor s’assied devant ces figures à peine indiquées, et remplit les blancs, prononce les lignes, dessine et ombre, et colorie, et fait tourner avec l’ongle, et arrive enfin par tous les moyens à ces saillies que Goethe, s’il revenait au monde, admirerait.

678. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

Ses yeux seuls vivaient dans sa figure blanche. […] Emmanuel de Broglie d’avoir restitué à l’histoire une figure bien touchante quoique fort ignorée aujourd’hui, celle du prince qui fut le père de Louis XVI. […] Il avait dix-neuf ans ; sa figure et sa taille étaient vraiment de lignée raphaëlesque, et offraient l’idéal du poète adolescent. […] Je me figure ces vastes génies au sein de la composition. […] Les Ménades, dépouillées de leur beauté païenne, découvrent de hideuses figures de sorcières.

679. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Mounet-Sully a rendu, avec une poésie qui ne peut guère être dépassée, la figure du héros adolescent, d’essence supérieure et quasi divine. […] La figure maigre et triste de M.  […] On s’attache avec un intérêt d’autant plus passionné à cette figure énigmatique, on s’évertue sur elle, on s’y acharne, on veut à toute force la comprendre, l’expliquer, la définir. […] L’idée, une fois conçue, travaille toute seule, si je puis dire, et façonne impérieusement la haute figure de Baudry. […] Baudry paraît d’une bonté plus qu’humaine, prend les proportions d’une figure symbolique conçue a priori.

680. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « V » pp. 19-21

Le rôle de Brutus très-grand (tellement, que c’est Brutus autant que Lucrèce qu’il faudrait intituler la pièce), conçu un peu en comique et même en bouffon, comme on se figure que l’aurait pris Shakspeare : d’ailleurs l’ensemble assez classique.

681. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XIII. Des Livres de Médecine, de Botanique, de Chymie, d’Anatomie, de Chirurgie, &c. » pp. 325-328

Le Précis de Chirurgie-pratique, contenant l’histoire des maladies chirurgicales, & la maniere le plus en usage de les traiter, in-8°. deux vol. avec figures.

682. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Avant-propos » pp. 1-5

Dans l’antiquité, l’art poetique étoit un des arts subordonnés à la musique ; et par consequent c’étoit la musique qui enseignoit la construction des vers de toute figure.

683. (1858) Cours familier de littérature. V « XXXe entretien. La musique de Mozart (2e partie) » pp. 361-440

La figure de madame Carvalho, trop pure pour le rôle du page, chante dans les yeux comme sa voix chante dans l’oreille. […] “Va voir ce que c’est”, dit don Juan sans s’émouvoir davantage ; et Leporello, revenant tout effaré, raconte qu’il a vu la figure du commandeur, dont il imite la marche pesante et cadencée. […] Nous montâmes les degrés, ma jeune femme et moi ; comme elle portait un voile qui lui couvrait entièrement la figure, mon frère, qui se souvenait du voile noir de Trieste que j’avais soulevé par badinage la première fois que je la vis, fit le même geste que moi ; il avait aimé tout enfant, à Trieste, celle qui était devenue ma femme, d’une tendresse passionnée. […] Que penseriez-vous de la sculpture qui emprunterait les couleurs de la peinture pour rendre les divines formes de Phidias plus semblables aux figures de cire coloriées devant lesquelles s’extasie l’ignorante multitude de nos places publiques ? […] La joyeuse fanfare, placée à la septième mesure de l’allégro, résonna comme les cris de plaisir d’un criminel ; je crus voir des démons menaçants sortir de la nuit profonde ; puis des figures animées par la gaieté danser avec ivresse sur la mince surface d’un abîme sans fond.

684. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

Prenons la figure de Goethe à cette époque fugitive où la fleur de la jeunesse éclate encore sur les traits, mais où le fruit de la pensée ou du sentiment commence à se former et à s’entrevoir sous cette jeunesse qui s’effeuille. […] La terre est déjà un ciel pour ces figures de prédestinés de l’amour, du bonheur et du génie sans obstacles. […] Cette jeune fille se nommait Gretchen, abréviation familière du nom de Marguerite ; elle fut évidemment pour Goethe le type de ces deux figures de Marguerite et de Mignon, figures de femmes dégradées par la condition, divinisées par la nature, qui devinrent les plus touchantes créations de son génie. […] Méphistophélès revêt la robe et la figure du docteur ; il reçoit l’étudiant ; il répond à ses questions sur la logique, la métaphysique, la jurisprudence, la médecine, en embrouillant tellement la tête du jeune homme de définitions scolastiques et absurdes que Pascal lui-même ne démontrerait pas mieux le néant emphatique de l’esprit humain et la vanité sonore de ce que nous appelons savoir.

685. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

Je vous ferai son portrait physique comme s’il était là sous ma plume, mais laissez-moi vous transcrire avant le cadre de ce portrait, aussi original et aussi pittoresque que la figure. […] Sa personne répondait à son caractère : il était d’un âge déjà mûr, de taille moyenne, d’épaisse corpulence, à figure fine d’expression, quoique un peu lourde de joues. […] IX Voilà le charmant cadre de famille dans lequel éclatait alors la figure du comte Joseph de Maistre. […] De grands beaux yeux bleus pleins de lumière, encadrés dans des sourcils encore noirs, un nez carré, des joues fermes, une bouche large et façonnée à plaisir par la nature pour l’éloquence, un menton solide, relevé, presque provoquant, une expression hardie, un demi-sourire moitié de bienveillance, moitié de sarcasme, complétaient cette figure. […] Je vois ma mère qui se promène dans ma chambre avec sa figure sainte, et en t’écrivant ceci je pleure comme un enfant. » Délicieux !

686. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

Cette parlante figure, dont on ne pouvait détacher ses regards, vous charmait et vous fascinait tout entier. […] Un enfantillage réjoui, c’était le caractère de cette figure ; une âme en vacances, quand il laissait la plume pour s’oublier avec ses amis ; il était impossible de n’être pas gai avec lui. […] Chaque ride de la figure était un abîme creusé par la pensée. […] Heureusement il ne l’avait pas encore inventé quand il ébaucha, en 1821, ma figure. […] » Sa figure s’illuminait alors d’un éclat divin.

687. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxve entretien. Histoire d’un conscrit de 1813. Par Erckmann Chatrian »

» Mais lorsqu’il les voyait prendre le chemin de la rue, en donnant des poignées de main à droite et à gauche aux gens qui les reconnaissaient, sa figure changeait ; il s’essuyait les yeux avec son gros mouchoir à carreaux en murmurant : « C’est la pauvre vieille Annette qui va avoir du plaisir ! […] » Il poussait ma porte, et je le voyais tout gris, tout chauve, en manches de chemise, le cou nu, qui se lavait la figure dans la cuvette. […] Tout était prêt ; mes bas et mes souliers bien cirés se trouvaient au pied du lit ; je n’avais qu’à m’habiller, et, malgré cela, le froid que je sentais à la figure, la vue de ces vitres et le grand silence du dehors me donnaient le frisson d’avance. […] Comme j’entrais grelottant et que la tante Grédel, assise devant l’âtre, tournait sa tête grise, tout étonnée à cause de mon grand collet de renard, Catherine, habillée en dimanche, avec une belle jupe de rayage, le mouchoir à longues franges en croix autour du sein, le cordon du tablier rouge serré à sa taille très-mince, un joli bonnet de soie bleue à bandes de velours noir renfermant sa figure rose et blonde, les yeux doux et le nez un peu relevé, Catherine s’écria : « C’est Joseph !  […] Catherine, assise, la figure dans son tablier, sanglotait.

688. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

Qu’avec cette abondance sans superflu, cet éclat sans faux brillants, tant de traits hardis, de figures vives et naturelles, tant d’art pour attirer l’imagination aux subtilités de la théologie ; qu’avec d’éminentes qualités extérieures, une physionomie noble, un regard doux et perçant, un accent passionné, un geste imposant, Bossuet, à l’apparition de Bourdaloue, ait cessé de passer pour le premier prédicateur, comment l’expliquer, sinon parce que le génie de Bourdaloue le tenait plus près de l’auditoire et que Bossuet lui parlait de trop haut ? […] Bossuet raisonne comme le peuple fait des figures. […] Ces excès de la morale de Massillon parurent à beaucoup de gens des éclats de zèle indiscret, ou, ce qui est plus fâcheux, des figures d’éloquence. […] Le style de Massillon a tous les défauts de l’amplification ; les figures de mots y abondent, et en particulier celles qui simulent la véhémence. […] On rencontre souvent dans Massillon «  les noirs soucis, les noirs chagrins », et beaucoup d’autres figures de ce genre, prises à Fénelon, qui les avait prises lui-même à l’antiquité.

689. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

Puis sa figure se repenche sur son livre de messe. […] La femme, sortie de la chambre, il a couru dans la cour, chercher de l’air, et mettre sur sa figure le souffle frais du vent. […] En sortant, nous tombons sur Aubryet, qui nous apprend que Saint-Victor est de l’inauguration. « Eh bien, je n’irai pas à Vendôme, me dit Flaubert, non vraiment, la sensibilité est arrivée chez moi à un état maladif tel… je suis entamé au point que l’idée d’avoir la figure d’un monsieur désagréable, en chemin de fer, devant moi… ça m’est odieux, insupportable. […] À rencontrer, dans les chemins verts, ces mineuses, ces débardeurs marmiteux, à la figure charbonnée, au chapeau paré de plumes de coq, on a l’impression d’être tombé, en plein mardi gras, dans un carnaval loqueteux, dans une descente de la Courtille, barbouillée de boue et de suie. […] Des ressouvenirs des figures de pierre de la cathédrale de Chartres, mêlés à des réminiscences des récits des temps mérovingiens, me revenaient, je ne sais pourquoi.

690. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Telle est, dans ses lignes les plus saillantes, la figure de René. […] Il a tout changé pour elle, patrie, condition, figure, esprit. […] Non, derrière les figures plus ou moins illustres déjà citées, on découvre toute une foule innomée, marquée du même sceau qu’elles. […] Jamais la mélancolie maladive n’incarna son image plus complète sur des traits humains que dans cette figure. […] C’est une figure importante au point de vue où nous nous plaçons que celle de Leopardi.

691. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Rêveur subtil et passionné, inégal et vain, si je n’apercevais pas sa figure en tête d’un in-folio du moyen âge, je la chercherais au frontispice d’un poëme de l’école de Gœthe ou de Byron. […] Villemain, et jamais on ne groupa avec plus d’art, autour d’une seule figure, les événements qui lui servent de cadre et de commentaire historique. […] Heureusement, à côté de ces figures ridées et froides, ensevelies dans le linceul révolutionnaire par ces trois mains de glace, le néant, le doute et la mort, M.  […] Toutes ces figures élégantes ou joyeuses, tragiques ou mignardes, sérieuses ou bouffonnes, aboutissent à la plus parfaite, à la moins oubliée de celles qui n’existent plus, à mademoiselle Mars. […] En retraçant avec complaisance cette charmante figure d’enfant, M. de Beauchesne ne s’est pas proposé seulement de faire un gracieux portrait.

692. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

A quelles chances une figure dite historique n’est-elle pas soumise, sitôt qu’échappant aux premiers témoins, elle passe aux mains des commentateurs subtils, des érudits sans jugement, ou, qui pis est, des tribuns et des charlatans de place, des rhéteurs et sophistes de toutes sortes qui trafiquent indifféremment de la parole ? […] Ce serait une occasion heureuse de résumer et de concentrer autour d’une figure brillante tant de souvenirs personnels devenus sitôt de l’histoire215. […] » Seulement, pour traduire en action cette lutte et lui donner tout son relief, il s’agissait de la rejeter dans le passé et de la personnifier dans quelque figure historique connue, dans un homme célèbre en qui l’esprit, supérieur au caractère, aurait eu à lutter et contre lui-même et contre le monde d’alentour. […] Dans une circonstance autre qu’une solennité académique, il y aurait eu sans doute manière de prendre autrement le sujet, une manière plus expressive et plus réelle ; c’eût été de ne pas donner tant de place et de saillie aux considérations historiques, aux diverses époques de la Révolution, et de s’attacher plus uniquement d’abord à la figure de M.  […] C’est de même qu’à la page 202, sous figure collective, il a peint expressément M. 

693. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre III. Variétés vives de la parole intérieure »

L’inspiration divine correspondait chez Homère à fait psychique réel ; chez les imitateurs, elle n’est plus qu’une figure poétique ; Virgile, assurément, n’a pas connu par lui-même ces élans sauvages de l’âme vers une action irréfléchie. […] La prosopopée des Lois dans le Criton 28 est un des plus célèbres exemples de cette figure aujourd’hui passée de mode ; elle est d’ailleurs entièrement fictive ; Socrate ne fait pas intervenir le signe divin ; par une feinte hautement avouée, il introduit les Lois dans son dialogue, à la façon des poètes tragiques qui font descendre du ciel les divinités pour les besoins de leurs dénouements ; les Lois, dont l’éloquence triomphera de la morale trop facile de Criton, ne sont, il le fait clairement entendre, que la voix de sa conscience individuelle ; mais il se plaît, en orateur habile, à l’incarner dans les institutions d’Athènes, et il prête à celles-ci tout un discours. […] Mais le génie d’une langue a ses mystères ; il est souvent difficile de justifier d’une façon satisfaisante pour l’entendement telle image, que, pourtant, nous comprenons sans peine, et qui, si notre réflexion se tait, nous paraît juste, et non pas seulement gracieuse ou brillante ; il me semble que, parfois, les figures du style plaisent à l’esprit pour plus d’une raison et ne peuvent être rangées exclusivement dans aucune des catégories que distinguent les dictionnaires. […] Un jour de crise politique, un homme d’un certain âge, à la figure placide, se promène sur un boulevard de Paris, donnant le bras à une jeune dame, qui sans doute est sa fille ; la foule est compacte, agitée, murmurante ; mais personne n’élève la voix ; tout à coup, sans occasion qui le provoque, sans regarder personne, notre homme dit assez haut d’une voix concentrée : « Ce X… est un misérable !  […] rappel : la prosopopée est une figure de rhétorique consistant à mettre en scène les absents, les morts, les êtres surnaturels ou même les êtres inanimés, et les faire agir, parler, répondre.

694. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Et, de fait, ce qu’il y a de foi naïve et de terreur religieuse dans Marguerite fait d’elle cette figure qui se grave en vous pour jamais quand on l’a vue passer. Figure de missel, qui entre en scène un missel à la main, et qui meurt dans l’église des remords de son péché… Pauvre sainte qui n’a pas abouti, coupée, souillée et ensanglantée dans sa fleur… En elle-même, Marguerite est pourtant peu de chose. […] Elle le suit, elle le poursuit, elle s’impose à lui, cette même figure, et il la met partout où il met l’amour, ce monogame indigent ! […] l’érudition fit croire à Gœthe, s’il le crut, et au public, qui le croit encore, qu’il y avait vie de poète dans ce plâtre humain, quand il n’y avait qu’une figure et qu’une apparence. […] Toutes les métaphores surannées qui ont passé sur la figure de Gœthe et la lui ont allongée depuis madame de Staël y repassent, dans le livre de M. 

695. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Glatigny, Albert (1839-1873) »

Ferdinand Brunetière Albert Glatigny, la plus étrange figure littéraire qu’ait peut-être vue notre âge ; un comédien errant et ronsardisant qui a aimé les vers comme on aime l’amour, et qui en est mort.

696. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre premier. Les fonctions des centres nerveux » pp. 239-315

« J’ai remarqué dit-il, qu’après avoir longtemps regardé au microscope, surtout à l’aide d’une lumière vive, les figures des objets observés persistaient lorsque je fermais les yeux. — Elles persistaient encore lorsque je dirigeais mes yeux sur la table d’acajou qui porte mes instruments, sur mon carton à dessins, qui est de teinte bleu-grisâtre, ou sur mon papier à dessins. — Elles persistaient pendant deux ou trois minutes environ, en oscillant dans un cercle assez étroit ; après avoir diminué de grandeur, puis disparu, elles reparaissaient plus pâles ; après deux ou trois apparitions de plus en plus faibles, elles ne reparaissaient plus. — Elles disparaissaient plus vite lorsque je portais les yeux sur un papier blanc que lorsque je les tournais ou les portais sur ma table d’acajou foncé. — Je les voyais grisâtres comme sont les images des objets vus au microscope. […] Si le lecteur veut regarder un encéphale préparé ou tout au moins les figures de quelque grand atlas anatomique, il trouvera qu’à sa partie supérieure la moelle épinière se renfle en un bulbe nommé moelle allongée ou bulbe rachidien, par lequel commence l’encéphale. […] À ce point de vue historique et graphique, l’ébranlement de la cellule est certainement un mouvement intérieur de ses molécules, et ce mouvement peut être comparé très exactement à une figure de danse, où les molécules très diverses et très nombreuses, après avoir décrit chacune, avec une certaine vitesse, une ligne d’une certaine longueur et d’une certaine forme, reviennent chacune à leur place primitive, sauf quelques danseurs fatigués qui défaillent, sont incapables de recommencer et cèdent leur place à d’autres recrues toutes fraîches pour que la figure puisse être exécutée de nouveau. […] Grâce à cette correspondance, nous sommes en état de nous représenter plusieurs détails de la figure de danse. […] Les innombrables caractères qui sont remués dans l’atelier ou qui reposent dans les magasins ne sont jamais que les vingt-quatre lettres de l’alphabet ; il n’y en a peut-être pas davantage dans notre alphabet cérébral, à savoir vingt-quatre figures de danse avec les cinq ou six types de cellules nécessaires pour les exécuter.

697. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Ce soir, je causais avec Carrière, et comme il me parlait de l’importance de l’enveloppe des contours d’une figure, à ce propos je lui disais la place donnée à la beauté des joues dans les descriptions de l’antiquité, et dans le modelage de caresse de la sculpture grecque, puis du rien, pour lequel elle est comptée aujourd’hui dans nos deux arts. Trouverait-on, à l’heure qu’il est, dans une description de figure de femme de n’importe quel roman, la mention de la délicatesse, de l’élégance d’une joue ? […] Puis les yeux s’habituent à la nuit de ces figures de crypte, de cave, sur lesquelles, au bout de quelque temps, un peu du rose des roses-thé, semble monter sous la grisaille de la peau. […] Pourquoi une figure aimée, souvent regardée, ne revient pas, précisée, arrêtée, lignée, dans votre œil, comme ce bouchon de liège. […] On se figure l’enragement chez le merveilleux pamphlétaire, de ne pouvoir plus continuer à être un journaliste.

698. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Le rêve, qui est tout spontané, prend et garde, même dans le gigantesque et l’idéal, la figure de notre esprit… Nos chimères sont ce qui nous ressemble le mieux. […] figure en deuil ! […] Les animaux ne sont autre chose que les figures de nos vertus et de nos vices, errantes devant nos yeux, les fantômes visibles de nos âmes. » Ce sont donc des « ombres » plutôt que de pleines réalités. […] L’éclair est son regard, autant que le rayon ; Et tout, même le mal, est la création, Car le dedans du masque est encor la figure. […] Les esprits irréfléchis et rapides disent : — A quoi bon ces figures immobiles du côté du mystère ?

699. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Parfois, comme Han Ryner, ils ne réalisent qu’une figure peu connue, d’aspect vaguement satanique et estimée surtout des jeunes gens tant qu’ils n’ont pas « consenti » à la maturité. Figure compromettante bientôt, toujours redoutable, parce que maniant des mots explosifs de sagesse, des formules panclastiquen d’amour et cette chose horrible que les humains n’aiment guère qu’aux heures où elle fait draperie : la Simplicité. […] Pourquoi cette rêverie géniale ne figure-t-elle pas dans les éditions philosophiques des libraires spécialistes ? […] Mais il appert ce fait délicieux : c’est que Han Ryner est trop poète pour tenir figure dans le chœur des philosophes qu’une syntaxe tortueuse aide si bien à singer la profondeur, et pour les romanciers, le Psychodore est réellement trop « porté sur l’esprit ». […] Celle-ci ne figure pas, en tout cas, dans la revue Dada, comme l’italique peut inviter à le penser, ni dans Proverbe où Z.

700. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

. — À présent, faisons intervenir le géomètre ; il ne trace qu’un triangle ; encore n’est-ce point de celui-ci qu’il s’occupe ni d’aucun autre triangle tracé ; son objet est un triangle quelconque ; il nous en avertit expressément ; la figure sensible n’est pour lui qu’un moyen de faire plus aisément une construction mentale ; ses yeux suivent sur le papier ou sur le tableau des lignes idéales auxquelles le tracé physique ne correspond qu’à peu près. Il complète sa construction mentale et sa figure sensible, en conduisant, par le sommet du triangle et parallèlement à la base, d’une part une ligne idéale, d’autre part un tracé physique entre lesquels il y ait aussi une correspondance grossière. […] Or, deux lignes égales sont celles qui peuvent coïncider, et, par conséquent, l’égalité ne peut être conçue entre deux lignes dont la figure ne se prête pas à la superposition », ce qui est le cas pour la ligne droite rapportée aux autres lignes, brisées ou courbes, en nombre indéfini, auxquelles il faudrait la comparer pour vérifier qu’elle est plus courte qu’aucune d’elles. […] Par rapport à un point donné, l’espace est infini, selon trois aspects : d’abord en longueur, ce que l’on figure en supposant un point qui, se déplaçant en ligne droite, engendre des deux côtés une droite infinie ; ensuite en largeur, ce que l’on figure en supposant que cette droite infinie, se déplaçant perpendiculairement à elle-même, engendre des deux côtés une surface infinie ; enfin en profondeur, ce que l’on figure en supposant que cette surface infinie, se déplaçant perpendiculairement à elle-même, engendre des deux côtés un solide géométrique infini. — Voilà des propositions que nous ne pouvons nous empêcher de tenir pour vraies, et là-dessus notre imagination se donne carrière ; nous nous représentons la durée et l’espace comme deux réceptacles infinis, uniformes, indestructibles. […] Les deux triangles sont égaux, puisque, comme dans la figure précédente, ils ont les trois côtés égaux chacun à chacun.

701. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff (suite) » pp. 317-378

Ce fut avec un vrai bonheur que je revis devant moi la calme et loyale figure de mon guide. […] De longtemps je n’avais vu une figure aussi étrange que celle de cet Ephrem. […] Maria Dmitriévna l’avait épousé par amour ; il était assez bien de figure, avait de l’esprit et pouvait, quand il le voulait, se montrer fort aimable. […] Lemm renversa son chapeau sur sa nuque, et, dans la demi-teinte de la nuit, sa figure semblait plus pâle et plus jeune. […] Elle le suivit sans résistance : sa figure pâle, ses yeux fixes, tous ses mouvements, exprimaient un indicible étonnement.

702. (1926) La poésie pure. Éclaircissements pp. 9-166

La poétique de Jean de Salisbury ne figure pas dans les testaments de Villon. […] Nous faisons ici figure, non de critique, mais de philosophe. à travers le particulier qui nous est soumis-un poème quelconque-nous voulons atteindre l’universel ; de l’impression produite par ce poème nous voulons tirer une loi qui s’applique à tous les poèmes. […] (cité par Delbos, " figures et doctrines des philosophes, p. 285.) […] Il part donc d’un monde qui occupe expérimentalement un espace à 3 dimensions, d’où trois qualités de figures : les lignes, figures à 1 dimension : longueur, les surfaces, figures à 2 dimensions : longueur, largeur, les volumes, figures à 3 dimensions : longueur, largeur, hauteur (ou profondeur) ; d’où trois qualités de mouvements : les translations, (ou vibrations) mouvement, à 1 dimension, à caractère d’ impulsion, les rotations, (ou oscillations) mouvements à 2 dimensions, à caractère d’ induction, les déformations élastiques, (dilatations, pulsations radiales, flexions ou torsions) mouvements à 3 dimensions, à caractère d’ expansion, et conséquemment trois qualités dans toutes les catégories de phénomènes, ceux-ci devant être considérés, avec Descartes et Pascal, comme des combinaisons de figure et de mouvement. […] Vraies du physique en général, ces conceptions ne le seraient pas moins du physique et du psychique humains étroitement liés aux résonances des nerfs sensitifs et moteurs. l’auteur y parvient en aboutissant à la psychophysiologie, cette suprême catégorie des sciences biologiques, par toutes les séries ininterrompues des sciences géométriques, des cinématiques et des physiques, et en retrouvant dans chaque catégorie les figures à trois dimensions du mouvement spatial.

703. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Soulary, Joséphin (1815-1891) »

Voulez-vous des médaillons de jeunes filles, tout un musée de figures, de figurines, de silhouettes ?

704. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « La doctrine symboliste » pp. 115-119

Le symbole étant défini : une figure, une image, qui exprime une chose purement morale.

705. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre premier, premières origines du théâtre grec »

Chapitre premier,premières origines du théâtre grec Danses pastorales et figures. — Chants bucoliques. — Bacchus inspirateur du théâtre.

706. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Préface » pp. -

Nous les avons portraiturés, ces hommes, ces femmes, dans leurs ressemblances du jour et de l’heure, les reprenant au cours de notre journal, les remontrant plus tard sous des aspects différents, et, selon qu’ils changeaient et se modifiaient, désirant ne point imiter les faiseurs de mémoires qui présentent leurs figures historiques, peintes en bloc et d’une seule pièce, ou peintes avec des couleurs refroidies par l’éloignement et l’enfoncement de la rencontre, — ambitieux, en un mot, de représenter l’ondoyante humanité dans sa vérité momentanée.

707. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Autobiographie » pp. 169-176

Nous les avons portraiturés, ces hommes, ces femmes, dans leurs ressemblances du jour et de l’heure, les reprenant au cours de notre journal, les remontrant plus tard sous des aspects différents, et, selon qu’ils changeaient et se modifiaient, désirant ne point imiter les faiseurs de mémoires qui présentent leurs figures historiques, peintes en bloc et d’une seule pièce, ou peintes avec des couleurs refroidies par l’éloignement et l’enfoncement de la rencontre, — ambitieux, en un mot, de représenter l’ondoyante humanité dans sa vérité momentanée.

708. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

vous barbouiller la figure d’une moustache de Sganarelle et venir sur un théâtre recevoir des coups de bâton ? […] J’aime beaucoup les commentateurs s’acharnant à soutenir que Molière s’inspira, pour cette grande figure d’Alceste, des rudes vertus de M. de Montausier ! […] Les médecins vous font l’effet d’inquisiteurs, le matassin prend la figure d’un tortionnaire. […] Mais c’est surtout au volume (avec figures) de M.  […] Les Œuvres de M. de Molière, augmentées d’une nouvelle Vie de l’auteur, avec figures en taille-douce (Amsterdam, chez Herman Uytwerf, 1735).

709. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Il changea néanmoins le cours des événements, et il introduisit dans l’action de nouvelles figures. […] Un ouvrier, bonne figure de pochard, s’était attablé à côté de moi. […] Pourtant Rabelais ne montre pas tellement figure de sectaire. […] Puis c’était quelque paysan qui galopait, la figure entre les oreilles dressées de son âne. […] Et il reproche à sa mère de lui avoir persuadé qu’il était incapable de faire figure dans le monde.

710. (1900) La culture des idées

Mais cela serait une duperie ; les mots les plus ordinaires et les locutions courantes peuvent faire figure de surprise. […] Toute sa personne est pleine de charme, mais la vue de sa figure donne la mort. […] Les os du corps humain sont représentation et figure des créatures qui ont être et non vie ni sens, comme pierres et métaux. […] Le corps humain est figure et représentation du grand monde, et il est image et expresse semblance de Dieu créateur et de toute créature. […] Voyez la figure 1295 du Dictionnaire de Saglio.

711. (1896) Écrivains étrangers. Première série

De figure, de tempérament, de caractère, il est tout slave. […] Il y a cependant peu de figures aussi étranges et aussi attirantes que la mystérieuse figure de cet écrivain. […] Étrange, mystérieuse, déconcertante figure ! […] Je n’ai pas souvenir d’avoir jamais vu une figure plus noble et plus douce, avec une plus admirable expression d’humanité, que la figure de Walt Whitman dans ses derniers portraits. […] Car ce n’est pas les figures de second plan, si gracieuses et si délicates, qui ont attiré sur M. 

712. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

Cet archéologue malade, qui mesure les « monuments » avec son parapluie, est certainement une risible figure, mais inutile et embarrassante. […] Les figures d’Ursule Creton, Lucien de Vorges et Louise triomphent, en somme, de ce parapluie qui voudrait accaparer l’attention. […] Pour la plus grande facilité des rapports, une ligne à la craie y figure la cloison… Et voilà la littérature en commun organisée ! […] Quoi, vous déplacez le nez de Corneille, vous le collez sur le menton, et puis vous dites avec gravité : Voici la figure de Corneille ! […] Je n’ai parlé que de Vellini, Hermangarde et Marigny, négligeant volontairement les figures secondaires, pour mieux faire la synthèse du livre.

713. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXVIII » pp. 113-116

Les résultats pour moi sont frappants et se peuvent personnifier par quelques figures.

714. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — I. Sur M. Viennet »

Il se lève, toutes ces graves figures se dérident ; il commence, on a souri.

715. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Guérin, Charles (1873-1907) »

Georges Rodenbach Ils sont exquis de sentiment, de vocabulaire, d’image, ces vers choisis au hasard dans un livre soigné, et d’un métier sur de lui-même, qui, sans rompre avec toute la tradition d’une prosodie fondée en raison, profite des acquêts nouveaux, aère l’alexandrin, ductilise le sonnet, embrume la rime jusqu’à l’assonance ; et ce n’est pas un des moindres charmes de ce poème que la netteté des impressions et des pensées en une forme fluide et flottante, comme qui dirait des figures de géométrie faites avec de la fumée.

716. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Van Lerberghe, Charles (1861-1907) »

Gustave Kahn Ce poète est une des originales figures de la littérature de ce temps.

717. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Bernardin de Saint-Pierre »

Qu’on se figure en effet dans ses rapports avec le monde une sensibilité très-fine, très-exquise, qui pénètre vite les motifs cachés, les racines mauvaises des actions, qui saisit la pensée sous l’accent, la fausseté à travers le sourire, qui subodore en quelque sorte les défauts des autres mieux qu’eux-mêmes, et s’en incommode promptement57. Qu’on se figure ce que c’est qu’un talent, une supériorité comme celle de Bernardin de Saint-Pierre, qu’on porte pendant plus de quarante ans sans pouvoir se la prouver ou à soi-même ou aux autres. […] Cette passion, dont on peut lire le récit complaisamment tracé par le biographe de Bernardin de Saint-Pierre, m’offre bien l’idéal des amours romanesques, comme je me les figure : être un grand poète, et être aimé avant la gloire ! […] Chaque petit ensemble aboutit, non pas à un trait aiguisé, mais à quelque image, soit naturelle et végétale, soit prise aux souvenirs grecs (la coquille des fils de Léda ou une exhalaison de violettes)  ; on se figure une suite de jolies collines dont chacune est terminée au regard par un arbre gracieux ou par un tombeau.

718. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVIe Entretien. Marie Stuart (reine d’Écosse) »

Dargaud, mais dans un esprit souvent contraire, que nous allons recomposer nous-même cette figure, rapide ébauche d’un grand tableau. […] V Les poëtes de la cour commençaient de célébrer dans leurs vers les merveilles de sa figure et les trésors de son esprit : En votre esprit le ciel s’est surmonté ; Nature et art ont en votre beauté Mis tout le beau dont la beauté s’assemble, écrit du Bellay, le Pétrarque du temps ; Ronsard, qui en était le Virgile, trouve, toutes les fois qu’il en parle, des images, des suavités et des finesses d’accent qui prouvent que la louange venait de l’amour et que son cœur séduisait son génie. […] VIII Rizzio était un jeune Italien d’une naissance infime et de condition presque domestique, doué d’une figure heureuse, d’une voix touchante, d’un esprit souple tant que son sort fut de plier devant les grands ; devenu habile à jouer du luth, à composer et à chanter cette musique langoureuse qui est une des mollesses de l’Italie, Rizzio avait été attaché à Turin, comme musicien serviteur de la maison de l’ambassadeur de France en Piémont. […] Ce conseil, de plus, ne pouvait qu’être bien accueilli par une jeune reine dont le cœur devait précéder la main, car le jeune Darnley, à la fleur de son adolescence, était un des plus beaux gentilshommes qui pussent captiver par les grâces de leur figure et de leur personne les yeux et le cour d’une jeune reine.

719. (1834) Des destinées de la poésie pp. 4-75

Les hymnes et les psaumes de David s’élevaient après trois mille ans, rapportés par des voix étrangères et dans une langue nouvelle sur ces mêmes collines qui les avaient inspirés ; et je voyais sur les terrasses du couvent quelques figures de vieux moines de Terre Sainte aller et venir leur bréviaire à la main, et murmurant ces prières murmurées déjà par tant de siècles dans des langues et dans des rhythmes divers ! […] C’était un beau vieillard aux cheveux et à la barbe d’argent, à la physionomie grave et douce, à la parole noble, suave et cadencée, tout-à-fait semblable à l’idée du prêtre dans le poème ou dans le roman, et digne en tout de montrer sa figure de paix, de résignation et de charité dans cette scène solennelle de ruines et de méditation. […] Sur certains rebords des précipices l’œil ne pouvait apercevoir aucun accès, mais, là même, un couvent, une croix, une solitude, un oratoire, un ermitage et quelques figures de solitaires circulant parmi les roches ou les arbustes, travaillant, lisant ou priant. […] Mais bientôt le soleil tomba, les travaux du jour cessèrent, et toutes les figures noires répandues dans la vallée rentrèrent dans les grottes ou dans les monastères.

/ 2164