Tout dévoués au réel, à l’effectif, au vrai, ils ne sont pas privés pour cela d’une manière de beauté et de bonheur ; beauté nue, rigide, sentencieuse, expressive sans mobilité, assez pareille au front vénérable qui réunit les traits sereins du calme et les traits profonds des souffrances ; bonheur rudement gagné, composé d’élévation et d’abstinence, inviolable à l’opinion, inaccessible aux penchants, porté longtemps comme un fardeau, pratiqué assidûment comme un devoir, et tenant presque en entier dans l’origine à cette âpre et douloureuse circoncision du cœur, dont on reste blessé pour la vie. […] Préoccupé du christianisme atrabilaire de Nicole, de Pascal et du xviiie siècle, qui range le très-petit nombre d’élus sur un pont étroit et dévoue le reste du monde à l’abîme du feu, il commet lui-même quelque chose d’analogue, sans y prendre garde ; il sépare le très-petit nombre de sages et de vérités, qu’il enferme dans l’arche de sa théosophie, délaissant l’humanité entière sur un océan d’erreurs, de rites bizarres et de vertiges : c’est moins cruel qu’une damnation, mais presque aussi contristant.
La dispersion est entière ; chacun s’introduit et chemine pour son propre compte, fort chatouilleux avant tout sur l’indépendance. […] Il est fâcheux toutefois que la conception morale ne soit pas embrassée en entier ni poussée à bout ; que le chœur qui débute si magnifiquement se taise bientôt, et nous laisse retomber dans l’incertitude inex tricable des apparences.
Mais le soir même, quand tout le monde est retiré, quand la maison entière repose, et que Mlle de Liron, après avoir fait son inspection habituelle, entre dans sa chambre, non sans songer à ce pauvre Ernest qu’elle craint d’avoir affligé par sa dernière brusquerie, que voit-elle ? […] Il croit qu’à force de libéralités il rachètera la vie de son unique amie, et il donne à toute la maison, jusqu’à la vache, à qui il a acheté du foin : « Il donne à l’un de quoi faire apprendre un métier à son enfant ; à l’autre, pour avoir des palatines et des rubans ; à tout ce qui se rencontre et se présente devant lui : cela vise quasi à la folie. » Sublime folie en effet, folie surtout, puisqu’elle dura, et que l’existence entière du chevalier fut consacrée au souvenir de la défunte et à l’établissement de l’enfant qu’il avait eu d’elle !
. — Mon cœur est tout à toi. » Si calme, si saine qu’on soit au fond par nature, il semble difficile qu’en ce jeune train d’émotions et de pensées, on reste longtemps à l’entière froideur, avec tant de sollicitations d’être touchée. […] Ce sentiment, du moins tel qu’elle le composa un moment, la perte qu’elle fit de sa mère, ses lectures diverses, ses relations avec quelques hommes distingués, tout concourait, vers l’âge de vingt-deux ans, à donner à son âme énergique une impulsion et un essor qui la font, jusque dans ce cercle étroit, se révéler tout entière.
Tâchez de vous figurer le paysan d’alors, clos et parqué de père en fils dans son hameau, sans chemins vicinaux, sans nouvelles, sans autre enseignement que le prône du dimanche, tout entier au souci du pain quotidien et de l’impôt, « avec son aspect misérable et desséché731 », n’osant réparer sa maison, toujours tourmenté, défiant, l’esprit rétréci et, pour ainsi dire, racorni par la misère. […] Autour de Rouen, pendant l’hiver de 1788, les forêts sont saccagées en plein jour, le bois de Bagnères est coupé tout entier, les arbres abattus sont vendus publiquement par les maraudeurs773.
Nous venons de le lire tout entier, et il nous paraît impossible que la jeunesse de l’écrivain ne promît pas une force étonnante quand la pensée l’aurait mûrie. […] Il le déroba à l’Essai sur les Révolutions, et l’inséra presque en entier dans le Génie du Christianisme ; c’était plutôt le génie du déisme.
» Mais que sont ces impressions fugitives, ces brèves effusions éparses, auprès de l’enthousiasme continu et de l’immense amour qui possède l’âme entière de quelques-uns de nos contemporains C’est, dit-on, le même sentiment ; ce n’est qu’une différence de degré. […] Et, depuis qu’on a mis ses piliers à l’épreuve, Il apparaît plus stable affranchi de soutien, Et l’univers entier vêt une beauté neuve.
Mais il s’en faut que ce soit lui tout entier. […] Bourget se pique de l’embrasser, de l’aimer tout entière, jusque dans ses manifestations les plus maladives et les plus éphémères.
La certitude et l’activité ; des croyances morales simples et fortes, héritées de l’antiquité grecque et latine, attendries par le christianisme, élargies par la Renaissance, enrichies de toute la générosité acquise par l’âme humaine à travers trente siècles ; des actes conformes à ces croyances ; des écrits conformes à ces croyances et à ces actes ; le plus ardent patriotisme et le plus humain ; les plus solides vertus privées et publiques ; une sincérité entière ; toutes communications ouvertes, si je puis dire, entre la vie publique, la vie privée et l’œuvre écrite ; des passages aisés et tranquilles de la médiocrité à la puissance, de la chaire du professeur à la tribune et au cabinet du ministre, et de là au foyer domestique et au recueillement de l’étude… bref, c’est une vie singulièrement harmonieuse que celle de M. […] Il fut de ceux dont on peut dire qu’ils sont meilleurs qu’une partie de leurs actes, parce que ses actes furent rarement siens ou que rarement il y fut tout entier.
Lui, entier dans sa foi, ne voulut aucune atténuation à ce qu’il tenait pour la vérité. […] La bibliothèque Sainte-Geneviève possède un catalogue de ses incunables, écrit tout entier de la main de M.
L’Europe, secouée tout entière par cette longue commotion sociale comme par un grand cataclysme naturel, y a ravivé le sentiment d’une étroite solidarité, preuve en soit « la sainte alliance » des souverains, protectrice officielle des trônes, ou bien la mystérieuse entente des aspirations populaires, visible en ces journées de 1830 et de 1848 où l’esprit de révolte, comme une traînée de poudre, court et fait explosion de capitale en capitale, visible encore aujourd’hui dans les revendications presque identiques de tous les partis socialistes. […] On dirait que la terre entière est diminuée, rétrécie.
S’occupant alors de ceux qui vont survivre, de sa mère, de ses sœurs, des amis qu’il n’ose nommer, il parle avec cet accent qui dénote l’intégrité morale conservée tout entière. […] Il aurait vu arriver ce moment qu’il prévoyait, où la nation, rassasiée de discours, se jeta tout entière du côté de la victoire.
Elle n’a pas adopté ni rejeté en entier ce plan, mais elle a tout à fait gardé l’esprit de la maxime. […] Elle n’était pas pressée de tout dérouler d’un coup : « Peut-être à ma mort, disait-elle, le rouleau ne sera-t-il pas déployé tout entier. » Cette sage lenteur est un trait distinctif de son esprit et de son influence.
Sa vie entière est courte à raconter. […] Théodore Leclercq était dès lors mieux occupé en se tournant tout entier du côté de la société et des observations amusantes qu’elle offre à celui qui sait les saisir.
Tous ces docteurs modernes, « accoutumés à gouverner avec des mots le globe entier, de la pointe du Spitzberg au cap de Bonne-Espérance », ne lui imposent en rien. […] Mais la société française à cette date, emportée tout entière par une fièvre de régénération universelle, était loin de cet esprit d’application et de médication modérée qu’elle ne connut guère jamais.
Et Retz, dans cette comparaison, a le désavantage d’avoir survécu, d’avoir assisté à l’entier avortement de ses espérances, de s’y être en partie démoralisé, rabaissé et dégradé, comme il peut arriver aux plus fortes natures à qui le but échappe. […] Lui-même il a pris soin de nous indiquer le moment précis, très voisin de cette conversation, dans lequel il se détermina à se livrer tout à fait à sa passion et à sa haine contre Mazarin (janvier 1649) : « Quand je vis, dit-il, que la Cour ne voulait même son bien qu’à sa mode, qui n’était jamais bonne, je ne songeai plus qu’à lui faire du mal, et ce ne fut que dans ce moment que je pris l’entière et pleine résolution d’attaquer personnellement le Mazarin… » À partir de ce jour, tous les moyens lui sont bons pour réussir, les armes, les pamphlets, les calomnies.
Et quant au moral de l’homme, il a dit : « On l’avait surnommé l’incorruptible ; il l’était en effet comme ceux qui veulent tout prendre à la fois. » Il a rendu avec une entière vérité, comme témoin et comme acteur, le mouvement impétueux et confus, le sentiment d’explosion de cette jeunesse thermidorienne qui savait ce dont elle ne voulait plus, mais pas encore ce qu’elle voulait, qui avait appuyé la Convention contre Robespierre, et qui prétendait chasser la Convention devant une opinion qui n’était pas mûre encore : « Jamais peut-être, nous dit Fiévée, l’ancienne royauté ne fut plus complètement oubliée qu’à cette époque ; nous n’étions pas encore assez difficiles pour y penser. » Pour lui, paresseux, une fois sorti de ses habitudes, il est précis, prudent, prévoyant, très hardi les jours d’action. […] Fiévée par ses adversaires politiques et constitutionnels d’alors, il faisait remarquer qu’il n’avait jamais vanté le gouvernement militaire, mais l’esprit militaire, ce qui était bien différent, et il se couvrait du mot de M. de Bonald : « Les nations finissent dans les boudoirs, elles recommencent dans les camps40. » Bien qu’il ne fût qu’une seule fois nommé dans cette brochure, Bonaparte sentit bien qu’elle lui était tout entière dédiée ; il fit venir aux Tuileries M.
Thiers, l’ayant lu tout entier en quatre jours avec la plus grande attention, il écrivait de Hambourg, sous l’impression vive qu’il en avait reçue : Toutes les fibres de ma mémoire et de mes anciennes sensations se sont réveillées. […] En prenant ce commandement des mains de Masséna, il ne se fait aucune illusion sur les difficultés de la tâche et sur la nature des moyens ; après quelques considérations sur le pays, théâtre de la guerre, il en vient au moral et au matériel des troupes : De la misère, dit-il, de l’indiscipline, du mépris de l’autorité, un mécontentement universel, et un désir immodéré de rentrer en France de la part des généraux ; une artillerie détruite en entier, et point de munitions ; une cavalerie réduite à peu de chose, et ce peu dans le plus mauvais état ; l’infanterie diminuée de près de la moitié : tel était tout à la fois le pays dans lequel je devais agir, et l’instrument dont il m’était donné de me servir.
C’est dans ce dernier âge seulement que se déclara tout entier l’esprit de M. […] Il lui était pénible d’écrire ; le souffle et les muscles lui manquaient, et son peu de force physique, il le mettait en entier dans son histoire.
Le xviiie siècle, qui allait marcher bientôt avec ensemble et prosélytisme comme un seul homme, et qui se donnera tout entier son rendez-vous final aux funérailles solennelles de Buffon (avril 1788), n’était pas encore enrôlé ni même debout à la date où mourut Montesquieu. […] On a ajouté que Montesquieu, dès qu’il en eut connaissance, fut au désespoir, qu’il alla trouver Mme de Pompadour et qu’il obtint qu’on arrêtât l’édition : « Elle fût hachée tout entière, dit Chamfort, et on n’en sauva que cinq exemplaires. » Cette anecdote, qui ferait tort au caractère de Montesquieu, et dont Fréron avait déjà touché quelque chose dans L’Année littéraire, me paraît suspecte.
L’Assommoir est tout entier en magnifiques ensembles, de la bataille du lavoir à la noce, du large repas de la fête de Gervaise, à cette magistrale ribote où Lantier conduisant Coupeau au travail, l’égare en une interminable suite de bibines, de la forge Goujet à la cellule capitonnée de l’asile Saint-Anne. […] Zola sur presque toute ses assertions par les autorités qu’il invoque et de lui montrer une bonne fois qu’il n’est plus permis aujourd’hui de lancer au hasard les affirmations que lui dicte son tempérament, qu’il y a des raisons aux choses et qu’en plusieurs points l’esthétique de ses adversaires, malheureusement médiocres et ineptes, des Feuillet, des Sand, est plus rationnelle que la sienne, qu’enfin Balzac, Tolstoï et même Flaubert, ont montré une bonne fois comment on peut embrasser la nature entière sans en omettre le couronnement et rester réalistes tout en analysant le génie et la noblesse morale.
C’est le contraire de ce mot qui est écrit dans toute notre œuvre, et, insistons-y, dans notre vie entière. […] III L’histoire entière constate la collaboration de l’art au progrès.
Tel fut cependant le spectacle que donna la France il y a une trentaine d’années : elle jouait, sur des promesses incertaines et sur l’espérance de chefs-d’œuvre futurs non encore éclos, tout son passé littéraire et cette gloire même que l’Europe entière avait consacrée. […] Il n’y avait là qu’un très-misérable cabaret ; il y bâtit une ville entière. » C’est là, nous dit M.
Lors même qu’il en serait ainsi, l’éclectisme serait encore justifié ; il le serait même davantage, car aucun système dans cette hypothèse n’aurait plus le droit de se substituer aux autres, et la philosophie, n’étant plus l’expression de la vérité objective, serait engagée plus que jamais à épuiser tous les systèmes, c’est-à-dire toutes les idées fondamentales de l’esprit humain, pour reproduire dans un tableau complet l’image fidèle de la raison tout entière. […] Cet aspect des choses, saisi par un esprit supérieur, est devenu pour lui l’univers tout entier.
Elle présente au spectateur hors du tableau la face latérale d’une coupe verticale qui passe par le pied droit de la porte de cet édifice, laisse la porte entière, divise le parvis qui est au devant et l’escalier qui descend dans la rue ; en sorte que ce parvis et cet escalier divisés forment un grand massif à pic au-dessus d’une terrasse qui règne sur toute la largeur du tableau. […] Allez voir le tableau de Doyen, le soir en été, et voyez-le de loin ; allez voir celui de Vien, le même dans la même saison, et voyez-le de près ou de loin, comme il vous plaira ; restez-y jusqu’à la nuit close, et vous verrez la dégradation de toutes les parties suivre exactement la dégradation de la lumière naturelle, et la scène entière s’affaiblir comme la scène de l’univers, lorsque l’astre qui l’éclairait a disparu.
Elle est consacrée à Saint-Simon tout seul, au Lazare délivré, qui sortira prochainement tout entier de son sépulcre, mais qui n’en sort qu’une partie de lui-même aujourd’hui… Nous n’avons en ce présent volume que Saint-Simon dans une des spécialités de sa vie… Ce n’est plus le Saint-Simon des Mémoires. […] Il y avait le hardi faquin, le coquin héroïque, qui, avant d’être prêtre, n’eut que la seule qualité d’être brave au feu du canon comme il l’était au feu des filles ; mais prêtre et cardinal, et cardinal pour son argent, pour que cela fût plus miraculeux, le faquin et le coquin disparurent, et le ministre qui se mit alors à pousser sous cette majestueuse barrette que Richelieu avait portée, le ministre aurait été grand, s’il avait vécu, — si la mort n’avait coupé l’herbe sous le pied à sa gloire naissante, avec une faulx longtemps aiguisée par ses vices… Seulement, cet homme-là, dans Dubois, le passionné, le haineux, l’ambitieux, le jaloux Saint-Simon, ne pouvait pas le voir, et ni Drumont non plus, puisqu’il émet le doute qui ferait de Dubois le satanique que tiennent à voir en lui tous les superficiels de l’Histoire, c’est-à-dire que, par une haine d’une machiavélique profondeur contre Saint-Simon, Dubois aurait subi, sans protester, l’ambassade donnée à Saint-Simon par le Régent, parce que Saint-Simon, son ennemi, devait immanquablement s’y ruiner… Ni Saint-Simon ni son publicateur ne révèlent donc la vérité sur les étonnantes, les renversantes dépêches à Dubois ; et le mot de l’énigme sur l’homme le plus entier qui fut jamais et qui semble se rompre tout à coup en deux dans une contradiction mortelle, est un mot qui reste encore à deviner.
Sardanapale d’un nouveau genre, couronné des roses des succès d’un jour, le malheureux brûla son génie tout entier sur le bûcher du monde, fait, comme l’autre, de bûches entassées, ces sots que son esprit savait animer tous les soirs ! […] cette gloire qui, dans un autre temps que le sien, aurait pu être fièrement et grandement littéraire, avait presque disparu tout entière dans une autre gloire qui semble l’avoir consumée, et c’était la gloire brûlante et sur place du causeur, et du causeur le plus spontané, le plus éclatant, le plus étonnant d’un siècle fameux surtout par la causerie.
Les bêtes non plus, parce qu’elles ne font aussi attention qu’à une seule chose, et quand une autre les en détourne, elles s’y tournent tout entières… Mais les rieurs ne considérant les choses qu’avec légèreté et s’en laissant détourner facilement, pour nous montrer que ces gens-là sont intermédiaires entre l’homme et la bête, on a imaginé les satyres rieurs… » Classification profonde ! […] II17 Pendant que nous parlions de Henri Heine18 avec le détail que mérite ce charmant génie, — cette rose à mille feuilles de facultés différentes, — qui fut poète, philosophe, historien et critique, encyclopédique comme Voltaire, triste et gai comme Sterne, et sceptique comme le xixe siècle tout entier, l’éditeur Lévy publiait sous le titre : De tout un peu, un volume de plus qu’il ajoutait aux livres déjà publiés des Œuvres complètes.
« Les légendes des pays à demi ouverts à la culture rationnelle, dit-il page 63 du volume, ont été formées bien plus souvent par la perception indécise, par le vague de la tradition, par les ouï-dire grossissants, par l’éloignement entre le fait et le récit, par le désir de glorifier les héros, que par création pure comme cela a pu avoir lieu pour l’édifice presque entier des mythologies indo-européennes », et, suspendu entre le je ne sais qui et le je ne sais quoi, il ajoute alors cette incroyable phrase qu’il importe de recueillir : « Tous les procédés ont contribué dans des proportions indiscernables au tissu de ces broderies merveilleuses, qui mettent en défaut toutes les catégories scientifiques et à l’affirmation desquelles a présidé la plus insaisissable fantaisie. » Proportions indiscernables ! […] Renan tient tout entier tel que nous le connaissons, tel que nous venons de le voir dans ses Études religieuses.
La cité antique — à son origine du moins — se suffisait à elle-même et ses relations commerciales avec l’étranger se bornaient à un minimum d’objets de nécessité secondaire ; la cité moderne, dont les besoins se sont immensément accrus, dépend du monde entier. Le commerce et l’industrie ne connaissent pas de frontières, pas plus que le télégraphe, le chemin de fer ou la banque, et ce perpétuel entrecroisement d’affaires, sillonnant la surface entière du globe est une affirmation quotidienne d’inter-dépendance.
J’ai lu quelque part l’histoire d’un sous-lieutenant que les hasards de la bataille, la disparition de ses chefs tués ou blessés, avaient appelé à l’honneur de commander le régiment : toute sa vie il y pensa, toute sa vie il en parla, et du souvenir de ces quelques heures son existence entière restait imprégnée. […] C’est que notre passé tout entier est là, continuellement, et que nous n’aurions qu’à nous retourner pour l’apercevoir ; seulement, nous ne pouvons ni ne devons nous retourner.
Cela même portait le jeune poëte de Thèbes à prendre pour unique objet de ses chants ce qui pouvait surtout animer et servir la Grèce entière, le culte de ses Dieux protecteurs et l’émulation fortifiante de ses jeux guerriers. […] Notre jeunesse a péri toute entière.
Puisque, dans les représentations scéniques qui sont plus particulièrement à l’usage du peuple, dans cette suite de tableaux compliqués et vastes où il se dépense souvent tant d’artifice et de talent, les auteurs ne visent point à cette reproduction entière et profonde de la nature, qui est le suprême de l’art, puisqu’ils font des sacrifices à l’appareil, à l’émotion, et, pour tout dire, à l’effet, il est tout simple qu’on leur demande plus ouvertement de pousser au bien plutôt qu’au mal, et à la vertu plutôt qu’au vice.
Ce qui fait à nos yeux l’intérêt de ces lettres, c’est leur entière vérité, c’est-à-dire la faiblesse, la misère de la nature humaine et de toutes choses, prises en quelque sorte sur le fait dans une de ces âmes qu’on appelle grandes, comme parle Bossuet. » — A merveille ; mais pourquoi avoir tant triomphé de ces mêmes misères dans Pascal, au nom d’un cartésianisme impuissant et tout satisfait de lui-même ?
On va d’ordinaire étudier la peinture et l’architecture en Italie, c’est bien : la peinture y vit tout entière dans ses chefs-d’œuvre les plus éclatants et les plus accomplis ; l’architecture y règne dans ses plus majestueux développements.
1 qui prend la carrière littéraire de l’illustre critique à ses débuts, et l’embrasse tout entière.
Sa vie entière s’était consumée dans cette lutte subtile ; ses facultés s’y étaient resserrées ; et, grâce à tant de travail sur elle-même, nulle femme ne possédait à son égal l’entente profonde et déliée des tracas de salon ; c’était une gloire dans la société, mais, en même temps, un obstacle à l’intelligence des grandes affaires.
Nous prenons la liberté de reproduire cette page en entier.
Cet avenir encourageant de notre patrie et de la société européenne tout entière, il est devant nous ; bien des pièges et des tracasseries encore, bien des platitudes bourgeoises nous en séparent ; mais il n’est plus donné à aucune puissance de nous le voiler.
Non que dans cette situation, la vie ait encore quelques charmes, mais parce qu’il faut rassembler dans un même moment tous les motifs de sa douleur pour lutter contre l’indivisible pensée de la mort ; parce que le malheur se répand sur l’étendue des jours, tandis que la terreur qu’inspire le suicide, se concentre en entier dans un instant, et que pour se tuer, il faudrait embrasser le tableau de ses infortunes comme le spectacle de sa fin, à l’aide de l’intensité d’un seul sentiment et d’une seule idée.
Dégagée de tout parti pris, la curiosité devient scientifique et se porte tout entière vers les forces intimes qui conduisent l’étonnante opération.
Tous les travaux des champs y seront décrits, et le Manuel du parfait laboureur y passera tout entier.
Ils se donnent si bien à nous tout entiers qu’après leur mort il ne reste rien d’eux, absolument rien, et qu’il n’en peut rien rester, et que leurs portraits même ne peuvent pas être leurs portraits !
Quand on pense que le travail intellectuel de siècles et de pays entiers, de l’Espagne, par exemple, s’est consumé lui-même, faute d’un objet substantiel, que des millions de volumes sont allés s’enfouir dans la poussière sans aucun résultat, on regrette vivement cette immense déperdition des forces humaines, qui a lieu par l’absence de direction et faute d’une conscience claire du but à atteindre.
Il le doit même à un titre plus élevé ; car la religion, bien qu’éternelle dans sa base psychologique, a dans sa forme quelque chose de transitoire ; elle n’est pas comme la science tout entière de la nature humaine.
Le monde nous écoute volontiers, quand nous lui parlons de ses intérêts généraux ; car nous avons le don de la sympathie, cette intuition, cette illusion si l’on veut, qui, dans tout homme, je dirai presque dans tout être conscient, nous fait toucher une vie sœur de la nôtre, dans toute fleur nous montre un sourire, dans l’univers entier nous fait voir un grand acte d’amour.
Des vocabulaires entiers sont gâtés par l’anglais.
Pourquoi pas tout entier ?
Ce champ est assez vaste pour occuper un homme tout entier : ceux même qui l’ont cultivé toute leur vie ont peine à s’y reconnoître.
Nous repousserons les philtres de la sirène étrangère, et nous n’imiterons pas l’imprudent Ulysse, qui but dans la coupe de l’enchanteresse l’oubli de la patrie et du foyer domestique… Nous prendrons pour modèle l’humble effort de l’arbre qui, tout entier concentré dans l’élaboration des sèves, envoie ses racines les plus profondes comme ses branches les plus hautes à la poursuite de toutes les nourritures qui fructifieront sous son écorce.
Une noce a des flambeaux, des épithalames, des couronnes suspendues aux portes : une armée, un peuple entier, assistent aux funérailles d’un roi : un serment se fait au nom des Furies, avec des imprécations terribles, etc.
Il y avait un homme qui, à douze ans, avec des barres et des ronds, avait créé les mathématiques ; qui, à seize, avait fait le plus savant traité des coniques qu’on eût vu depuis l’antiquité ; qui, à dix-neuf, réduisit en machine une science qui existe tout entière dans l’entendement ; qui, à vingt-trois, démontra les phénomènes de la pesanteur de l’air, et détruisit une des grandes erreurs de l’ancienne physique ; qui, à cet âge où les autres hommes commencent à peine de naître, ayant achevé de parcourir le cercle des sciences humaines, s’aperçut de leur néant, et tourna ses pensées vers la religion ; qui, depuis ce moment jusqu’à sa mort, arrivée dans sa trente-neuvième année, toujours infirme et souffrant, fixa la langue que parlèrent Bossuet et Racine, donna le modèle de la plus parfaite plaisanterie, comme du raisonnement le plus fort ; enfin qui, dans les courts intervalles de ses maux, résolut, par abstraction, un des plus hauts problèmes de géométrie, et jeta sur le papier des pensées qui tiennent autant du Dieu que de l’homme : cet effrayant génie se nommait Blaise Pascal.
Nous regrettons de ne pouvoir citer tout entière l’Épître aux Martyrs, devenue plus intéressante pour nous depuis la persécution de Robespierre : « Illustres confesseurs de Jésus-Christ, s’écrie Tertullien, un chrétien trouve dans la prison les mêmes délices que les prophètes trouvaient au désert… Ne l’appelez plus un cachot, mais une solitude.
Il est rare qu’un être qui n’est pas tout entier à son action ne soit pas maniéré.
Ce passage dont j’ai seulement ramassé quelques traits, mérite d’être lû en entier.