Elle y eut cet avantage de rencontrer un état social qui leur donnait plus d’empire, et lit une loi de leur goût. […] Comme l’amour parfait des mystiques ne saurait être l’état du commun des fidèles, et les dégraderait plus qu’il ne les élèverait, s’ils essayaient d’y atteindre, ainsi le pur amour des Provençaux ne saurait être à la portée que d’une rare élite.
Nous connaissons plus de choses que les hommes des trois derniers siècles ; nous savons mieux qu’eux nous représenter des états d’esprit et de conscience différents du nôtre ; l’étude de l’histoire, la multiplicité des expériences faites avant nous, le cours du temps, même la vieillesse de la race, un certain affaiblissement des caractères et de la faculté de croire et d’agir, tout cela a développé chez nous la curiosité et l’imagination sympathique. […] Ou plutôt c’est comme si, sous le flot envahisseur des lettres antiques, un courant secret, une Aréthuse avait persisté, qui, longtemps refoulée et opprimée, a percé peu à peu les couches d’eau supérieures et s’y est mêlée… Remarquez, je vous prie, que jamais depuis le moyen âge la littérature n’a été aussi dégagée qu’aujourd’hui de toute règle ni dans un plus superbe état d’anarchie.
L’état actuel de la critique littéraire française Une opinion qu’on peut tenir pour générale, aujourd’hui, est que nous avons encore des critiques, et même en nombre considérable, — mais que nous n’avons plus une critique française. […] Ceux-là fuient la nécessité de leur état en se réfugiant dans l’idée générale aussitôt qu’ils peuvent la faire entrer dans trois lignes avarement économisées sur l’insipidité du roman ou du vaudeville dont il faut parler.
Remarquons enfin ceci : les rapports de « valeurs », de tons lumineux, sont fixes, au lieu que le coloris nous apparaît variable et que ses différents états impliquent jusqu’à un certain point l’idée d’une succession dans la durée. […] Mais, quoique ses vers ne développent pas toujours une action et qu’ils se complaisent parfois en des états d’âme prolongés, on y découvrirait malaisément, du moins dans les livres les plus récents qui sont aussi les plus personnels, quelques définitives et marmoréennes statures.
Cet état d’extatique clairvoyance advient accidentellement à quelques natures privilégiées. […] Cette faculté ne se peut acquérir que par l’état de sainteté.
La lecture des auteurs du XVIIe siècle est certes éminemment utile pour faire connaître l’état intellectuel de cette époque. […] On conçoit d’après cela un état où écrire ne formerait plus un droit à part, mais où des masses d’hommes ne songeraient qu’à faire entrer dans la circulation telles ou telles idées, sans songer à y mettre l’étiquette de leur personnalité.
Ses autres goûts et ses distractions de journaliste politique, puis de conseiller ministériel, de ministre, d’homme parlementaire, de libre écrivain littéraire et dramatique, l’avaient retenu à l’état de spectateur et de juge : ce n’est que dans ses dernières années qu’il a franchi le pas et qu’il a pris ses lettres de maîtrise46. […] Ils étaient ensemble (à l’Académie des sciences morales et politiques) d’une commission pour juger le prix à donner sur le meilleur exposé de l’état de la philosophie allemande.
Par ces faits menus ou longs à décrire, il montre les états d’âme permanents ou passagers de ses personnages, — par ces mains de Gianni travaillant machinalement à déranger les lois de la pesanteur, l’absorption momentanée du saltimbanque cherchant un tour inouï par ce réglisse : bu dans un verre de Murano, la nature populaire et raffinée de la Faustin. […] Il s’accoutume à forger des substantifs avec des adjectifs déformés, parce que l’accident, la qualité qu’exprime l’adjectif lui paraît plus importante que l’état, rendu par le substantif.
Ce mariage le mit en état d’acheter une charge d’auditeur des comptes. […] Dans cet état affreux, Cotin avoit au moins pour lui un patissier, en réputation de faire d’excellens biscuits, & que Despréaux traitoit d’empoisonneur.
« Les Français, disait-il, manquent de goût ; il n’y a que le goût ancien qui puisse former parmi nous des auteurs et des connaisseurs ; et de bonnes traductions donneraient ce goût précieux à ceux qui ne seraient pas en état de lire les originaux. » Si nous manquons de goût, j’ignore où il s’est réfugié ; ce n’est pas au moins faute de modèles dans notre propre langue, qui ne cèdent en rien aux anciens. […] On peut juger un ouvrage libre, en se bornant à exposer dans une critique raisonnée les défauts qu’on y aperçoit ; parce que l’auteur était le maître de son plan, de ce qu’il devait dire, et de la manière de le dire : mais le traducteur est dans un état forcé sur tous ces points, obligé de marcher sans cesse dans un chemin étroit et glissant qui n’est pas de son choix, et quelquefois de se jeter à côté pour éviter le précipice.
Le temps est nécessaire pour entrer dans la barbarie comme pour en sortir : ainsi on peut dire qu’il faut des traditions, même pour parvenir à l’état de décadence, et surtout pour s’y maintenir. […] L’art pittoresque s’applique davantage aux détails de la vie privée : il a moins d’idéal, puisqu’il n’a pas cette sorte d’immobilité qui indique un être élevé au-dessus des passions humaines ; il est donc plus approprié à toutes les conditions de l’état social.
Elle parle de sa mère et du château de sa mère comme le mulet de la Fable parlerait de sa mère, la jument, et de la splendeur de son écurie… La classe à laquelle elle tient par son père, puisque nous n’en sommes pas encore à l’application des idées de M. de Girardin, qui veut que la mère fasse la possession d’état des enfants, cette classe ennemie des Marquis, l’a timbrée de ses opinions, et ses opinions se sont naturellement exaltées des révoltes d’un amour-propre toujours sur le qui-vive, quand il n’était pas furibond. […] l’égotisme, pire que l’égoïsme et dont il sort, l’égotisme qui est l’égoïsme rapetissé et babillard, est suprêmement le caractère de l’Italie des Italiens, — de ce livre fait sur les autres par une femme qui ne s’oublie jamais et qui informe l’univers de l’état de son catarrhe, tout en lui parlant de son héros, Garibaldi !
Elle nous apparaît donc comme le symbole d’une époque et d’un monde ; symbole vivant durant des siècles, aujourd’hui symbole défunt, puisque cette époque révolue et ce monde transformé, elle ne subsiste plus qu’à l’état de vestige. […] Or, il advint qu’en dépit de sa force et des nombreuses séductions qu’il offrait, l’édifice catholique chancela sur sa base ; cette base dont la première pierre avait été posée par un Dieu, venu des régions célestes pour cela, ne fut plus en état de le soutenir.
Que l’anthropologie soit hors d’état de faire cette preuve, on s’en rend trop aisément compte. […] Pourquoi, demande un historien des théories morales48, chercher à toute force dans les idées des stoïciens un écho des idées chrétiennes, alors qu’on y peut voir un reflet de l’état social de l’Empire ?
Les forces qui gouvernent l’homme sont semblables à celles qui gouvernent la nature ; les nécessités qui règlent les états successifs de sa pensée sont égales à celles qui règlent les états successifs de la température ; la critique imite la physique, et n’a autre objet que les définir et de les mesurer.
Le premier devait embrasser tout ce qui se pouvait découvrir ou conjecturer de positif ou de probable sur les origines, l’histoire et l’état de la Gaule, principalement de la Gaule méridionale, avant et pendant la domination romaine. […] A travers cette longue et pénible époque intermédiaire, l’auteur s’attache plus particulièrement et avec une prédilection attentive à tout ce qui intéresse l’état du midi de la France, à tout ce qui peut y dénoter des restes de civilisation ou y faire présager des réveils de culture. […] Fauriel, après avoir représenté l’état florissant de l’administration et de la civilisation romaine dans le midi de la Gaule au moment de la ruine commençante, se propose d’étudier les vicissitudes diverses et les degrés successifs de cette décadence à travers les invasions réitérées et le déluge croissant des barbares. […] N’ayant pas d’avis propre et personnel à exprimer en telle matière, je dois me borner à signaler en ces termes généraux l’état de la question. […] Je vois ici une quantité d’êtres innocents, harmless creatures, qui souffrent des douleurs qui mettraient tels esprits tracassiers et violents que je connais, hors d’état de remuer et de tourmenter le monde.
P. de Grandmaison, venant à la rescousse, a classé au premier rang des états naturels profanes l’inspiration du poète « où l’on peut déchiffrer les grandes lignes, reconnaître l’image et déjà l’ébauche des états mystiques ». […] J’ai sur ma table les épreuves du Bal, dans l’état où Radiguet les a laissées ; je peux donc parler en connaissance de cause. […] Et de cette nouvelle conception de la vie, proposée sous la forme littéraire, doit-il naître un lyrisme absolument pur dont on doit faire état, et qui renouvellera l’art ? […] Prenons-le dans son sens le plus étendu ; il se manifeste par des états autant que par des mots. […] Espérons qu’il la retrouvera un jour, je pense, en excellent état, car M.
— Le succès de Lucrèce change l’état des choses dramatiques ou du moins est un symptôme qui prouve hautement, en contradiction avec les théories de Hugo et des autres, que la faute des non-succès et des succès contestés n’est pas au public, mais aux auteurs.
Toujours l’auteur se prépare à la composition par la solitude ; il s’y exalte longuement de ses souvenirs, de ses espérances, et de tout ce qui a prise sur son âme ; il se crée un monde selon son cœur, et le peuple d’êtres chéris ; le nombre en est petit ; il leur prête toutes les perfections qu’il admire, tous les défauts qu’il aime ; il les fait charmants pour lui : mais trop souvent, si son imagination insatiable ne s’arrête à temps, s’élevant à force de passion à des calculs subtils, et raisonnant sans nn sur les plus minces sentiments, il n’enfantera aux yeux des autres que des êtres fantastiques dans lesquels on ne reconnaîtra rien de réel que cet état de folle rêverie où il s’est jeté pour les produire.
Et d’ailleurs, si le poète avait rappelé au roi qu’en l’état actuel des esprits, une pièce de théâtre, composée avec conscience et venue d’un certain côté littéraire, ne devait produire, par sa chute ou son succès, qu’un résultat bien étranger assurément à toute passion politique, le roi aurait bien pu, sans doute, à demi-voix et avec un sourire, prononcer ce terrible mot de romantisme ; mais il eût été facile de démontrer à sa bienveillante attention, que ces débats sont au fond bien moins frivoles, même sous le rapport politique, qu’on ne pourrait le penser.
On fait que, pendant qu’il étoit occupé à défendre son honneur & son état contre les principaux Membres du Corps des Avocats, dont l’amour-propre jaloux se croyoit intéressé à l’éloigner du Barreau, plusieurs Champions de la Secte Encyclopédique & Economique ont choisi ce moment pour se déchaîner contre lui d’une maniere aussi injuste que peu loyale.
Or, l’esprit des siècles héroïques se forme du mélange d’un état civil encore grossier, et d’un état religieux porté à son plus haut point d’influence.
» Sous ce nom de liberté, les Romains se figuraient, avec les Grecs, un état où personne ne fût sujet que de la loi, et où la loi fût plus puissante que personne. » À nous entendre déclamer contre la religion, on croirait qu’un prêtre est nécessairement un esclave, et que nul, avant nous, n’a su raisonner dignement sur la liberté : qu’on lise donc Bossuet à l’article des Grecs et des Romains.
Il balbutiera ; il ne trouvera point d’expressions qui rendent l’état de son âme.
C’est que dans l’instant choisi par Doyen, il a fallu donner l’air de la douleur à la déesse du plaisir ; c’est que les chevaux d’Enée d’origine céleste étaient une proie importante, et qu’il ne fallait pas oublier que Diomede avait recommandé à son écuyer de s’en emparer, s’il sortait victorieux du combat ; c’est qu’après la blessure de Venus, Diomede est tranquille ; c’est que Venus est hors de la scène. etc… Avec tout cela ; excepté Deshays, je ne crois pas qu’il y ait un peintre à l’Académie en état de faire ce tableau.
Le but de la tragedie étant d’exciter principalement en nous la terreur et la compassion, il faut que le poëte tragique nous fasse voir en premier lieu des personnages aimables et estimables, et qu’il nous les répresente ensuite en un état veritablement malheureux.
Les hommes avoient alors un si grand besoin d’être excitez à l’étude, qu’en quelques états on étendit une partie des privileges des clercs à ceux qui sçauroient lire.
La vérité est que la race ne se conserve réellement pure que dans l’état de barbarie ; bien plus, elle n’a son génie tout à fait distinct que dans l’état de barbarie. […] Cependant, ne serait-il pas plus juste de dire que, comme Froissart, il représente non une race ou un peuple, mais un certain état de société qui est propre à une caste plutôt qu’à une nation. […] J’ai en effet la confiance qu’avec la grâce de Dieu j’arriverai à un état plus heureux, sans plus savoir comment je sortirai de ce monde que comment j’y suis entré. […] Comme le seul témoignage de l’état de son esprit à cette époque est précisément cette pièce de la Tempête, c’est à cette œuvre qu’il faut s’adresser pour obtenir une réponse. […] Tout chez lui est à l’état microscopique, petits personnages, petits caractères, petite philosophie, petites méthodes.
Derôme a l’air d’en faire si peu d’état que nous sommes impatients de voir ce qu’il composera sur la même matière. […] Et la question ainsi posée, dans l’état d’inachèvement où nous sont parvenues les Pensées, demeure en effet insoluble. […] Mais la peur lui avait tellement troublé l’esprit qu’elle n’en crut rien, et elle voulut que je me misse en état de la sauver du péril à la nage. […] Tout en continuant la publication de son journal, il achève son Cléveland, il prépare son Doyen de Killerine, dont les premiers volumes paraissent en 1736 ; il entreprend une histoire généalogique de la maison de Rohan ; il se met en état de composer jusqu’à cinq, six, sept, huit volumes en deux ans de temps, et, malgré tout cela, le peu que nous savons de lui n’est que pour nous montrer qu’en vain se remue-t-il, il ne peut pas sortir du labyrinthe, selon son expression, où le triste état de sa fortune le retient enfermé. […] Peu de personnes alors étaient capables de lire Clarisse dans l’original, et peu de traducteurs se trouvaient en état de l’imposer aux lecteurs français, comme l’auteur de Cléveland et du Doyen de Killerine.
Le capitalisme se réjouit de cet état de concurrence. […] Selon l’état du foie, ce sera donc le je-m’en-foutisme épanoui ou le fanatisme qui offre, d’ailleurs, l’alternance de ses contraires, à tous les Clovis que le premier évêque venu sait persuader de brûler ce qu’ils ont adoré, d’adorer ce qu’ils ont brûlé. […] C’est une subjective impuissance de la raison qui laisse cette détermination en cet état. […] Les tribus que leurs prédécesseurs ensoutanés frustrèrent du bienheureux état d’innocence, ils les examineront pour le plaisir de constater qu’elles n’ont pas eu le temps de fignoler des complexes, dignes des métropolitains. […] Il est le kilo d’un système de mesures dont l’unité fondamentale est une verge, sa propre verge en état d’érection.
On raconte qu’interpellé un Jour à la table du quartier général, et par le maréchal Saint-Arnaud, sur l’état de défense de Sébastopol que son voyage en Russie l’avait mis à même de connaître, il avait dit que cet état était formidable. […] Sire, je m’étais trompé ; j’avais cru que ce brave militaire, qui a les plus beaux états de service, avait la croix : je viens d’apprendre qu’il ne l’a pas, et je l’efface. » — « Eh bien !
M. de Tocqueville me faisait un jour remarquer que ce qui se passe dans une élection académique est plus raffiné que ce qu’on voit d’ordinaire dans les élections politiques : « Cela tient, disait-il, à l’état très avancé de ceux qui y prennent part. […] Ce n’est pas faire le prophète que d’avancer que l’Académie française est à la veille d’un renouvellement décisif et qu’elle va se trouver en présence d’un état intellectuel et littéraire de la société qui ne s’était pas vu encore. […] Ce n’est pas à dire qu’elle ne puisse de plus en plus, à l’avenir, avoir l’œil à l’état présent des Lettres, aux variations incessantes du goût, au déclin, à la naissance et au développement des genres, à tout ce qu’il lui importe de discerner en pleine connaissance de cause, sans engouement comme sans dédain, dans le champ de plus en plus remué et sillonné de l’activité moderne.
Au fond, le petit frère a vingt ans de moins que son aîné, et cela fait que, n’en ayant pas le génie, il n’est même pas en état de le comprendre tout à fait. […] Racine produit toujours ses caractères en travail, jamais dans un état purement sentimental : il semble que ce soit une nécessité dans le théâtre français, de ne rien montrer qui ne soit action. Racine conçoit toutes les émotions, tous les états passifs comme mobiles, et principes d’activité ; il les exprime justement sous l’aspect où leur force d’impulsion ou d’inhibition se découvre le plus fortement : l’objet est toujours une résolution à prendre, qui est prise, rejetée, reprise, autant de fois que s’exercent l’impulsion ou l’inhibition, jusqu’à ce qu’une secousse plus forte amène l’action définitive.
Il reçut une instruction assez décousue, aux collèges de Dol, de Rennes, de Dinan : on le destinait à l’état de marin, puis il déclara vouloir être prêtre. […] Au lieu de décrire des états métaux (sauf le sien), il dessine des attitudes aimables, touchantes, tragiques ; il fait des groupes et des tableaux. […] Le héros romantique, victime de la destinée sombre par état et désespéré, est sa création.
Si la nature aveugle s’obstine à faire circuler dans ses veines un sang banalement vigoureux, il a recours à la seringue de Pravaz pour obtenir l’état morbide qui lui convient. […] Si la nature aveugle s’obstine à faire circuler dans ses veines un sang banalement vigoureux, il a recours à la seringue Pravaz pour obtenir l’état morbide qui lui convient. » Et plus loin : « Il est catholique. […] C’est ainsi que, façonnés pour le joug, nous retombons d’un esclavage dans un autre, et qu’après les poncifs classiques, il y a eu des poncifs romantiques, poncifs de coupes, poncifs de phrases, poncifs de rimes ; et le poncif, c’est-à-dire le lieu commun passé à l’état chronique, en poésie comme en toute autre chose, c’est la Mort.
Il faut distinguer son état de santé de ses maladies ; ses époques de vigueur, de ses époques de faiblesse. L’esprit d’une nation comme celui d’un homme en particulier, peut éprouver certains affaiblissements passagers, recevoir certaines atteintes, avoir des caprices, après quoi il rentre dans son habitude et son état sain. […] Je sais que ce désordre, chez les écrivains habiles, n’est qu’une interversion calculée et savante de l’ordre naturel ; mais encore, pour s’y reconnaître, faut-il que l’esprit passe par deux états.
Je sais bien que la sagesse et l’équilibre, comme la perfection dont ils sont une image appropriée à notre état sont peu estimés. […] Elle peut devenir vraiment morale quand la conscience de la discordance fondamentale et le petit plaisir qui provient de la réaction du moi se joignent au plaisir de la sympathie et au maximum de bienveillance compatible avec la circonstance et l’état social donné. […] Les états opposés vers lesquels tendent ces doctrines sont également incompatibles avec l’existence et nous en sommes trop loin.
La transition de l’habit ecclésiastique à l’habit laïque est comme le changement d’état d’une chrysalide ; il y faut un peu d’ombre. […] Les gens du monde, dans leur ignorance des choses de l’âme, croient, en général, qu’on ne quitte l’état ecclésiastique que pour échapper à des devoirs trop pesants. […] Le prêtre, ayant pour état d’être chaste, comme le soldat d’être brave, est, d’après ces idées, presque le seul qui puisse sans ridicule tenir à des principes sur lesquels la morale et la mode se livrent les plus étranges combats.
Qu’y avait-il donc de fascinateur et d’entraînant pour lui dans une époque où le Catholicisme s’appelait l’infâme, et où l’état social était, tous les matins, théoriquement renversé ? […] Ce n’est pas tout qu’elle fût jolie, qu’elle eût les yeux de son état et les épaules de sa situation, ce n’est pas même tout qu’elle fût indignement calomniée comme si elle eût été une vertu et qu’elle valût mieux que sa fonction officielle : il fallait qu’elle fût encore quelque chose de plus pour M. […] En effet, quand on a été la maîtresse publique d’un roi de France et qu’on a vécu plusieurs années de son état, nul historien n’est capable de vous refaire une innocence avec des calomnies de journalistes ou des insultes de bourreaux.
nous le croyons, il serait d’une utilité supérieure de justifier par des faits nombreux, par une étude patiente et scrutatrice de la société moderne et de l’état actuel des hérésies en Europe, la confiance qu’il est impossible de ne pas avoir en une phase nouvelle et triomphante du catholicisme. […] Les paroles de Pusey, empreintes d’une touchante tristesse, révèlent bien l’état de son âme, se débattant, comme épuisée, dans ces lassitudes que la Providence envoie souvent à un homme pour achever son cœur : « Je conçus, il y a plusieurs années, — dit le Dr Pusey, — les premières appréhensions de ce qui vient d’arriver, en apprenant que l’on priait pour lui (Newman) dans un grand nombre d’églises catholiques et de monastères religieux du continent. » Cet aveu de la force et de l’efficacité de la prière des catholiques, apostoliques et romains, a, selon nous, une signification bien profonde sous la plume schismatique encore du Dr Pusey. […] Du reste, ce n’est pas seulement l’Angleterre qui attire et captive l’attention des hommes vigilants aux yeux desquels l’état du catholicisme, en Europe, est la question de l’avenir comme il fut la question du passé.
Empreints par leur date et l’état du monde gréco-barbare d’un caractère de curiosité savante et de subtilité, ils gagnaient surtout à se rapprocher et à s’étayer de quelques découvertes de la science. […] Auteur de plus de quatre-vingts ouvrages, imitateur ingénieux de toutes les formes de l’antiquité, érudit, mythologue, dramatiste, satirique, lyrique, il ne nous est connu que par de courts fragments et par des hymnes d’autant plus précieux, qu’à part même le talent poétique, ils offrent un intérêt historique, en donnant, par la pompe et par la froideur du langage, une idée de l’état où était tombé le culte païen. […] Donne donc et la vertu et la richesse. » De ce langage plus solennel que grand, de cette gravité calme et non sans grâce, quelques traits de lumière ne semblent-ils pas se réfléchir sur l’état de langueur et la réforme abstraite du polythéisme d’alors ?
On trouve chez Cicéron l’amplification, le talent, la verve, l’esprit, l’entraînement, les ressources de l’écrivain, à l’état de procédés visibles. […] L’œuvre et le talent de Chénier s’expliquent par l’imitation, arrivée à l’état d’assimilation parfaite. […] L’antithèse y est à l’état naturel. […] C’est cette tournure d’esprit qu’il faut acquérir à l’état d’habitude. […] Elle y est toujours à l’état latent ; très souvent à l’état brut, généralement en idées parallèles.
Dans un état social, où il y a côte à côte des millionnaires et des gueux, l’individu n’est pas libre et ne peut pas l’être, s’il est pauvre. […] Il hésite entre deux états d’esprit qui semblent répondre à ses deux passés politiques. […] Il s’occupera seulement des professionnels, de ceux pour qui l’état militaire est une carrière ; autant dire que ses remarques ne porteront guère que sur le corps des officiers. […] Il s’annonce par là comme devant être une étude complète et impartiale des influences bonnes et mauvaises que l’état militaire exerce sur le moral tout entier. […] Vérités qui ne sont peut-être pas très neuves, mais qu’il n’est pas superflu de redire, puisqu’elles demeurent à l’état de vérités inertes.
Le courage est de tous les états. […] Une série de personnages en représentent les différents états d’esprit. […] On trouve aussi des états d’âme poignants, exposés selon la plus grande simplicité et qui, par cela même, nous touchent au cœur. […] Avant de nous instruire de la théodicée, des lois d’eurythmie et de la pesanteur, apprenons celles de notre état. […] Il n’est point propre à un état mais toutes les fortunes lui conviennent.
Je ne puis supporter plus longtemps un état qui se prolongerait indéfiniment avec votre séjour à Paris. […] » De là, je suis venu à lui parler de l’état d’anxiété de la France, de l’insécurité de la vie, de la comparaison qu’on ne pouvait manquer de faire entre ce misérable état de guerre sociale, toujours menaçante d’inquiétudes et d’angoisses permanentes, avec les vingt années de calme et de prospérité de l’Empire. […] Le prêtre fait son office, le mourant lui recommande de ne pas dire à la famille qu’il se rend compte de sa situation, et celle-ci, quand il est mort, se réjouit à penser qu’il n’a pas eu conscience de son état. […] Boulanger aimait à s’illusionner et semblait ne pas s’apercevoir de cet état maladif. […] Leur aspect nous eût déchiré le cœur, si nous n’eussions d’avance été réduits à l’état de brutes, sans compassion.
Pour l’écrivain, le dessin et le plan de l’œuvre ne valent que si l’on passe à l’exécution, et ne se complètent à vrai dire que dans l’exécution : tant qu’il ne l’a pas toute écrite, elle reste flottante et vague, à l’état de pure possibilité : il ne peut donner à chaque chose sa place propre et sa juste grandeur que par le style : la seule mesure de l’idée, c’est le mot.
Pluche, qui, selon lui, n’étoit pas en état de comprendre une page de Locke ; M. l’Abbé Bergier, qu’il appelle un calomniateur, &c. le tout, parce que ceux-ci ont respecté ou défendu la Religion.
Quelque heureusement qu’on soit né, l’étude de soi-même, celle des hommes, l’attention à se former sur de bons modeles, sont absolument nécessaires pour se mettre en état de devenir un modele à son tour.
Un autre ouvrage qui peut servir de guide à quiconque voudra connoître l’état présent des sciences & de la littérature, est la France littéraire.
Aujourd’hui même, quoique l’état politique de ces contrées n’y laisse point les habitans de la campagne dans la même aisance où ils étoient autrefois ; quoiqu’ils n’y reçoivent plus la même éducation, on les voit encore néanmoins sensibles à des plaisirs fort au-dessus de la portée de nos païsans.
Quant aux tableaux dont l’état n’est pas certain en vertu d’une tradition constante et non interrompuë, il n’y a que les leurs et ceux de leurs amis qui doivent porter le nom sous lequel ils paroissent dans le monde.
À tout le moins ne voyons-nous pas de motif pour qu’elles n’eussent pas aussi bien agi dans le système du décor successif liées quelles étaient à l’état du théâtre, à l’esprit du temps, et surtout à cette loi qui ne veut pas que, dans aucun art, aucun genre ait jamais débuté par ses chefs-d’œuvre. […] On y verrait comme on se trompe, quand on va répétant que Pascal, à partir de la Cinquième Provinciale, changeant adroitement l’état de la question, et laissant aux théologiens l’objet essentiel de la dispute, se serait en quelque sorte échappé sur la morale et sur les Jésuites. […] Troublés dans l’état d’innocence, tranquilles dans le forfait, ils auront perdu l’étoile polaire dans leur chemin. […] Pour la même raison, parce qu’il en est et qu’il est sensible à la gloriole d’en être, il exagère volontiers le rôle de la noblesse dans l’état monarchique. […] Bien né, bien élevé, de bonne compagnie et de bon ton — sinon toujours de bon goût, — jusque dans la licence et le libertinage, Montesquieu est un homme du monde, qui a un état et une condition.
Tel est son état préféré ; les autres lui paraissent plats. […] A leurs yeux, quiconque nie le dogme est un traître, et la guerre est l’état naturel du chrétien contre l’hérétique ou l’infidèle. […] Huit ou dix membres du Gouvernement provisoire, captifs à Paris, auront-ils qualité pour conclure, et leur état de prisonniers leur donnera-t-il une autorité que libres ils n’ont pas et ne peuvent avoir ? […] Désormais son état est la contemplation persistante sans images et sans paroles, dont parlent les docteurs. Rien de violent dans cet état, point de transports, nulle illumination vive ; c’est la placidité de la croyance absolue, la paix de l’âme conservée dans le cloître comme dans un Bois-Dormant.
Mais Shakespeare a fait bien davantage : sous sa main la folie de Hamlet devient tout autre chose que la préméditation obstinée ou l’exaltation mélancolique d’un jeune prince du moyen âge, placé dans une situation périlleuse et plongé dans un sombre dessein : c’est un grave état moral, une grande maladie de l’âme qui, à certaines époques et dans certaines conditions de l’état social et des mœurs, se répand parmi les hommes, atteint souvent les mieux doués et les plus nobles, et les frappe d’un trouble quelquefois bien voisin de la folie. […] et ne semble-t-il pas qu’en mettant le pied hors de l’île désenchantée où il va être laissé à lui-même, nous allons le voir retomber dans son état naturel de masse inerte, s’assimilant par degrés à la terre dont il est à peine distinct ? […] Il fallait montrer dans César la force qui soumet les Romains et l’orgueil qui les écrase ; Shakespeare n’avait qu’un coin pour laisser entrevoir cet état de l’âme du héros ; il a forcé les couleurs. […] Lady Macbeth est bien précisément la femme d’un tel homme, le produit d’un même état de civilisation, d’une même habitude de passions. […] Bottom, qui exerce un état sédentaire, est représenté comme suffisant, sérieux et fantasque.
Mais notre atavisme ne se borne pas à ces deux états d’âme. […] Barrès résume à souhait le dilettantisme cérébral, que M. de Gourmont constitue un cas précieux de mysticisme archéologique et que plusieurs autres personnages moins importants peuvent figurer de moindres états d’esprit. […] Pour eux, l’apathie, qui est l’absence complète d’émotions, était un état supérieur, une position aussi enviable que le bonheur des dieux. […] Ce sont des tableautins où ils représentent leurs états mentaux. […] Et voici les Fêtes galantes, le seul livre où il ait objectivé ses états d’âme en des décors coquets et chamarrés, à la Watteau.