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1271. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

Eloignez-vous du feu ; du, lie feu avec éloignez-vous, & l’esprit observe-là un rapport d’éloignement. […] Pierre à feu, rapport de propriété productive, (id. ib.) […] Crier à l’aide, au feu, au secours. […] Le feu brûle, le bois est brûlé ; ainsi brûle est un terme actif, & brûlé est passif. […] Elément est donc le nom générique de quatre especes, qui sont le feu, l’air, l’eau, la terre : la terre se prend aussi pour le globe terrestre.

1272. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Il suffit à l’âme d’être superficiellement touchée, rapidement avertie, pour pénétrer les secrets d’une vie dont elle ne vit pas ; elle se laisse traverser par des sentiments qu’elle ne songe point à retenir ; lyre vivante, elle ne vit qu’autant qu’il faut pour retentir, et tout ce qu’elle a de vie se répand et se perd en harmonie ; le trépied inspirateur où monte le poète l’unit à la fois à la réalité et l’en sépare ; il comprend mieux et paraît mieux sentir que celui qui vit davantage, il dira mieux que vous ce qui se passe en vous ; il est plus et moins qu’un homme ; et peu s’en faut qu’il n’apparaisse comme une victime sans dévouement, nous éclairant des feux qui la réduisent en cendre. […] « Tout s’efface, disent-ils ; nos corps s’évanouissent ; nos royautés, dans nos mains, deviennent de la cendre ; nos majestés s’évaporent comme un brin de fumée au feu d’un berger ». […] Du palais de Dagobert nous passons dans le carrefour d’une ville du Rhin, où une vieille femme, nommée Mob, réchauffe son squelette aux cendres d’un feu éteint. […] mais il n’y a pas grande apparence que d’autres nous en procurent davantage ; et quand on réfléchit que, de l’aveu même de ces derniers147, la conscience du bien et du mal est la seule chose certaine, la seule qu’ils aient pu arracher au feu dévorant de leurs analyses, la seule autour de laquelle ils aient pu reconstruire l’univers qui s’en allait en fumée dans les fumées de l’idéalisme, on sait gré au christianisme de tout rattacher à cette idée, d’en être devenu la glorification, la consommation, de lui avoir lui seul donné une véritable réalité en lui donnant de véritables conséquences. […] La magnificence fabuleuse des Mille et une Nuits se réfléchit dans ce style opulent, d’où jaillissent mille feux.

1273. (1911) L’attitude du lyrisme contemporain pp. 5-466

Il s’éleva un vent furieux et puissant à renverser les montagnes, à briser les rochers devant lui, mais l’Éternel ne fut pas dans ce vent : après le vent ce fut un tremblement de terre, mais l’Éternel ne fut pas dans ce tremblement de terre ; alors ce fut le feu ; mais l’Éternel n’était pas dans ce feu. […] Dans les Ballades françaises, dans Lucienne, dans Paris sentimental, dans les Hymnes de Feu, nous passons sans heurt d’une ode de haut lyrisme à un lied câlin. […] Au fleuve alors, où l’onde agitait la semblance Des paysages et des univers en jeu, Je puisai l’eau frigide où frissonnait du feu : Toute l’immensité du ciel fut dans ma droite. […] Venu sous un ciel de feu pour savoir la fin de ses désirs errants, Loïc de Coëdigo n’y trouve qu’une déception âpre. […] Mécontent de ces réalisations incomplètes, Souza jeta au feu ces deux recueils de gammes prosodiques.

1274. (1893) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Première série

Érostrate, pour être fameux, mit le feu au temple de Diane, et, malgré la loi interdisant aux Éphésiens de prononcer son nom, il a obtenu ce qu’il désirait. […] Une vieille femme portait dans sa main droite une écuelle pleine de feu, et dans sa gauche une fiole pleine d’eau. — Que veux-tu faire de cela ? […] Elle répondit qu’elle voulait avec le feu brûler le paradis et avec l’eau éteindre l’enfer. — Et pourquoi donc ? […] On prétend que la destinée de tous les théâtres est de devenir, tôt ou tard, la proie des flammes ; la destruction par le feu pourrait bien être, de même, le terme fatal — ou providentiel — de toutes, les bibliothèques. […] C’est que, depuis longtemps, elle couvait sourdement dans la bûche en feu… Il faut toujours se tenir prêt à recevoir le coup de pincettes du hasard, qui tire du bloc embrasé et rouge le jet soudain de la renommée étincelante.

1275. (1910) Propos de théâtre. Cinquième série

La commère qui vient de voir l’incendie d’une maison et qui dit : « Tout le quartier est en feu ! […] Feu Madame, princesse fort touchée des choses de l’esprit, et qui eût pu les mettre à la mode dans un pays barbare, eut besoin de beaucoup d’adresse pour faire trouver les combattants sur le champ de bataille, sans qu’ils sussent où on les menait. […] D’autres républicains contre l’Espagne armés » Sous les feux du Midi chantent leur délivrance. […] Cependant, jugeant qu’il n’avait rien à faire en Italie, il se disposa à retourner en Allemagne pour tâcher d’y faire représenter ses pièces, qui attendaient toujours les feux de la rampe. […] On peut dire de tous en général ce qu’un poète moderne a dit de l’un d’eux : Artiste au front paisible avec les mains en feu.

1276. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Que de fois, j’eusse voulu me plonger dans l’abîme de ces mers dévorantes, et tirer de tous les éléments, de toutes les secousses une nouvelle énergie, quand je sentais des feux qui me consumaient !  […] Dimanche, j’ai été voir coucher le soleil sur la place de l’esplanade : il était menaçant comme les feux de l’enfer. […] Tourguéneff, se rencontraient à chaque pas, surtout en province, et en particulier dans l’armée et dans l’artillerie ; ils parlaient et correspondaient dans sa langue ; ils gardaient dans le monde un air sombre, renfermé, l’orage dans l’âme et le feu dans le sang, comme le lieutenant Belozor de la frégate Nadèdja. […] En 1833, il publie un volume de poésies avec ce titre : « Feu et flammes. […] Il me paraît également inutile de rouvrir la polémique regrettable qui s’est élevée sur sa tombe et dans laquelle on a vu l’ancienne amie, la Brigitte du roman, en réveillant imprudemment des feux encore mal éteints, s’attirer une réplique brûlante, dictée par une susceptibilité fraternelle vivement blessée.

1277. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

Des feux follets, qui çà et là courent avec des couleurs diverses, ont pris la place des étoiles. […] Pourtant sa couche de nuages est tissue d’écarlate et de drap d’or ; pourtant sa lumière ruisselle sur le miroir des eaux comme un pilier de feu qui vacille descendant vers l’abîme et se couchant sous mes pieds. […] Quand le cardinal de Loménie, si frivole, propose de convoquer une cour plénière, il le trouve semblable aux « serins dressés qui sont capables de voler gaiement avec une mèche allumée entre leurs pattes, et de mettre le feu à des canons, à des magasins de poudre1400. » Au besoin, il tourne aux images drolatiques. […] Leur moyen universel de subsistance est la racine nommée pomme de terre, qu’ils cuisent avec le feu.

1278. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Je craindrais de tomber dans le vice de feu Girardin, de sophistique mémoire, qui reprochait un jour à Théophile Gautier de faire payer son imagination beaucoup plus cher que les services d’un sous-préfet. […] Il y a des tableaux de Rubens qui non seulement font penser à un feu d’artifice coloré, mais même à plusieurs feux d’artifice tirés sur le même emplacement. […] Les vastes et magnifiques groupes qui ornent les jardins de Versailles ne sont pas une réfutation complète de mon opinion ; car, outre qu’ils ne sont pas toujours également réussis, et que quelques-uns, par leur caractère de débandade, surtout parmi ceux où presque toutes les figures sont verticales, ne serviraient au contraire qu’à confirmer ladite opinion, je ferai de plus remarquer que c’est là une sculpture toute spéciale où les défauts, quelquefois très-voulus, disparaissent sous un feu d’artifice liquide, sous une pluie lumineuse ; enfin c’est un art complété par l’hydraulique, un art inférieur en somme.

1279. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

Il a son revolver et fait feu sur Benoît, le manque. […] … On est chez soi, bien tranquille, au coin du feu. […] François Rémy devient un vagabond, sans feu ni lieu. […] Il fut soldat ; et il n’eut pas la chance d’aller au feu. […] Quelques jours plus tard, le ciel sera en feu.

1280. (1901) L’imagination de l’artiste pp. 1-286

Cet écran n’a que faire, pour nous protéger du feu, de ces monstres d’agrément. […] Mais essayez de transporter ces images colorées sur la toile, d’en faire un tableau : nous ne pourrons plus y voir qu’un feu d’artifice. […] À gauche, un enfer ; des feux de Bengale, bleus et rouges ; un torrent de lave roulant des membres épars ; une colonne de fumée tourbillonnante. […] La tentation est irrésistible, surtout dans ces arts du feu, où l’imprévu tient tant de place, qui continuellement stimulent l’imagination en la mettant aux prises avec le hasard. […] Une sorte de canonnier à corps d’écrevisse met par derrière le feu à un dragon cuirassé qui vomit des hallebardes.

1281. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Il le dévorait, lorsque le sacristain Claude Lancelot, qui le surprit dans cette lecture, lui arracha le livre et le jeta au feu. […] Pyrrhus est poli, d’élégance raffinée dans ses propos, et parle quelquefois la langue de la galanterie au xviie  siècle : Brûlé de plus de feux que je n’en allumai. […] Perrin-Dandin à sa lucarne rappelait un vieux juge bizarre du temps du feu roi Louis XIII, un monsieur Portail, conseiller au Parlement, dont Tallemant des Réaux nous dit : Il était fort homme de bien, mais fort visionnaire. […] Roxane, souveraine maîtresse au sérail, a reçu l’ordre de faire tuer Bajazet : mais Acomat lui montre ce brave jeune homme, et elle prend feu. […] À un moment, Suréna ayant dit qu’il veut mourir pour se tirer d’embarras, Eurydice répond mélodieusement : Vivez, seigneur, vivez afin que je languisse, Qu’à vos feux ma langueur rende longtemps justice.

1282. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 3665-7857

Il n’a manqué à Moliere que d’eviter le jargon, & d’écrire purement : quel feu ! […] L’imagination est le siége de l’amour : c’est-là que ses feux s’allument, s’entretiennent, & s’irritent ; & c’est-là que les poëtes élégiaques en ont puisé les couleurs. […] Devant une place assiégée un officier françois fit proposer aux grenadiers une somme considérable pour celui qui le premier planteroit une fascine dans un fossé exposé à tout le feu des ennemis. […] Ce feu, dit-on, n’a qu’à paroître dans les endroits où manque tout le reste, & fût-il environné d’absurdités, on ne le verra plus. […] La gravitation des corps, la végétation des plantes, l’instinct des animaux, les développemens du feu, l’action de l’air, &c.

1283. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Ses sentiments ont sombré comme sa grandeur, ses pensées ont pâli comme sa puissance, ses visions se sont éteintes comme le feu de ses autodafés et le zèle de son fanatisme. […] Les âmes sont de feu mais les cœurs semblent de bronze. […] Peut-être la chose même qu’il blâme et condamne, une folie, une chimère, mais plus certainement encore une parcelle d’héroïsme, une étincelle du feu divin, un reflet de l’épée de l’archange. […] Comme il va aux entrailles par exemple, le discours par lequel, sous la pluie de feu, il salue son vieux maître Brunetto Latini ! […] C’est bien toujours la même argile, mais ce n’est plus le même feu qui l’anime.

1284. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

De torte bûche fait-on feu droit ? […] Tandis que je marchais, le dos courbé, dans ces galeries souterraines qui furent creusées par des esclaves du temps d’Alcibiade, la lampe du mineur allumait, aux parois humides et sombres, des feux de pierreries et de joyaux. […] Il étudie avec une sérénité minutieuse nos feux, rougeurs et démangeaisons, sans que cette étude professionnelle l’expose même au péril de se gratter. […] Il montre les progrès qu’ont faits les Anglais et les Allemands, depuis le temps où « raidis et violacés par le froid, ils trouvaient pour tout régal, en se claquemurant dans leurs chaumières, une pièce de bœuf salé, sous une lampe fumeuse, près d’un feu de tourbe ». […] Une à une, les maisons éteignaient leurs feux, et… toutes blanches, presque fantomatiques, s’endormaient du vaste sommeil répandu sur ce paysage.

1285. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

Ajoutez que la nation était un peu de l’avis des docteurs. « Nous avons percé la nue des cris de Vive le Roi, dit Mme de Sévigné ; nous avons fait des feux de joie et chanté le Te Deum de ce que Sa Majesté a bien voulu accepter notre argent. » Ainsi tous conspirent à sacrifier leurs intérêts et à diviniser les siens. […] Ils se soucient médiocrement de leur femme malade ; mais, sitôt que leur vache enfle ou ne mange plus, ils sont hors d’eux-mêmes ; tout à l’heure, ils disaient au médecin de ne pas venir ; à présent, ils courent chez le vétérinaire comme au feu ; plaie de coeur ou de corps se ferme, plaie d’argent saigne jusqu’au bout. […] Dans la retraite de Russie, le bonheur suprême était d’avoir une botte de paille, une place au feu et un verre d’eau-de-vie.

1286. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

Un réseau de feu paraît lier entre elles ces constellations innombrables. […] Il est comme ce sauvage qui, voyant du feu pour la première fois, réjoui de sa chaleur et de sa lumière, s’en approcha pour le baiser ; mais en ayant été brûlé, il le maudissait, le priait, l’adorait, ne sachant si c’était un démon ou un dieu. […] Souvent son imagination lui représentait des campagnes de feu, des montagnes ardentes, où des spectres hideux erraient en l’appelant à grands cris.

1287. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

Ce fut Courbet qui ouvrit le feu. […] Il est un observateur subjectif, il crée ses observations au coin de son feu. […] Il prit l’initiative et essuya le feu.

1288. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

Le spectacle de Paris en feu vous ferait horreur ; au bout de quelque temps vous aimeriez à vous promener sur les cendres. […] C’est l’affaire du moment, de l’état du corps, de l’état de l’âme ; une petite querelle domestique, une caresse faite le matin à sa femme, avant que d’aller à l’attelier : deux gouttes de fluide perdues et qui renfermaient tout le feu, toute la chaleur, tout le génie ; un enfant qui a dit ou fait une sottise, un ami qui a manqué de délicatesse, une maîtresse qui aura accueilli trop familièrement un indifférent ; que sais-je ? […] Allez à l’académie, et proposez-y seulement ce sujet tout simple qu’il est : demandez qu’on vous montre l’amour volant au-dessus du globe pendant la nuit, tenant, secouant son flambeau, et fesant pleuvoir sur la terre, à travers le nuage qui le porte, une rosée de gouttes de feu entremêlées de flèches.

1289. (1900) La culture des idées

La lampe éternelle était alors le symbole du feu ou du soleil ; elle ne parle pas plus clairement aujourd’hui. […] Des quatre éléments, appert plus la clarté du feu ès yeux, l’air en la poitrine, l’eau au ventre et la terre ès jambes. […] On prouvait l’existence et la ténacité des Diables par l’inguérissable pourriture des trois éléments corruptibles, que le quatrième, le Feu, est impuissant à purifier. […] Grégoire cependant contredisait Dieu qui a dit : « Détruisez, démolissez, brisez, brûlez, ravagez ; pulvérisez les statues, rasez les temples ; le fer, le feu et le sang53 !  […] Mais que chacun soit libre même de jouer avec le feu ; la prudence se conseille et ne doit pas s’imposer.

1290. (1911) Visages d’hier et d’aujourd’hui

Mgr Duchesne a placé son ouvrage sous l’invocation d’Eusèbe de Césarée, lequel, au temps de Dioclétien, quand on brûlait à feu d’enfer les livres saints, quand on proscrivait les chrétiens ou bien quand on les contraignait d’apostasier, tout seul, lui, relégué dans une cachette, compilait la première histoire du christianisme. […] Cela remue au roulis du train ; cela répand sur le sol des flaques de métal et lance très haut des feux d’artifice d’étoiles jaunes, bleues, aveuglantes, — « comme si un morceau de soleil liquide était venu s’écraser près de nous » !… Et, quand on verse ces cuves de feu, — « imaginez qu’on ait fondu des plumages d’oiseau mouche, des queues de paon, des corsets de scarabées et de libellules, des écailles de poissons des Bermudes, des pellicules de nacre et des fleurs des champs, dans des torrents de soufre, d’améthystes, de turquoises, de rubis, de perles et de diamants » ! […] Tu désires de considérer les dosages divers de l’eau, de la terre, de l’air et du feu ! […] Chacun le sait et chacun le proclame ; qui n’en mettrait au feu sa main ?

1291. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Et puis, cette idée de la forme est une idée étroite, entretenue comme le feu sacré par le collège des poètes (ceux qui ont le malheur de lire des vers, savent bien pourquoi). […] L’autre jour un ami qui descend d’Érostrate me dit : Je viens du Louvre, si j’avais eu des allumettes, je mettais le feu sans remords à cette catacombe, avec l’intime conviction que je servais la cause de l’art à venir. […] Mais, si elle défilait, on y verrait je ne sais combien d’hommes chauves, au cœur de feu, de vieillards désabusés sortant de toutes les professions connues et venus se réfugier dans la poésie, comme dans un cloître où l’on se dit : Frère, il faut faire des vers pour tuer ses chagrins ; enfin, quelques femmes… mais je comprends que les femmes qui ont l’habitude de la tapisserie, de la broderie et autres travaux, fassent des vers ; c’est plus rationnel et elles ont la main plus légère. […] Il y a des gens qui de ce poêle auraient fait un petit temple grec, ou un autel du feu, etc., ceux-là n’auraient pas été sincères. […] vous avez beau la flatter, vous avez beau dire à la matière, tu es ma sœur, tu as une âme, « j’ai une affection sincère pour les choses, pour la pierre, pour le métal, pour le sable des grèves, pour le pavé des rues, pour les instruments de travail, pour les ustensiles de ménage ; lorsque je réfléchis à tous les services que les choses nous rendent, j’en veux aux maçons qui chargent trop un vieux mur et je ne ferais pas de mal à une allumette ; je plains les clous rouillés, je bénis les charrues, je remercie avec effusion les chenets qui se mettent dans le feu pour nous, j’admire les chaudrons… et il y a des moments où il me semble que c’est le couteau de la guillotine qui est le condamné », malgré toutes ces protestations, dis-je, la matière ne bougera pas, quoique ça en vaille bien la peine, et vous laissera vous mettre à son niveau pour que vous puissiez vous admirer, vous plaindre, vous bénir et vous remercier vous-même.

1292. (1902) Le critique mort jeune

Un feu de discussion et de controverse, excité encore par la discipline du « compte rendu », éclate à la fin. […] Comme lui, il regrette les voluptés qu’il eût prises à l’« Hermès » achevé de Chénier et discute avec feu si ce poème philosophique eût compris quatre chants ou six. […] Ces quatre idées aux mille facettes, ces danses dont nous mourons, en se mêlant, allument tous leurs feux, et ceux-ci, comment me lasser de les accueillir, de m’y brûler, de les réfléchir ? […] Tandis qu’à l’occident le ciel se liquéfiait dans une mer ardente, sur nos têtes, des nuages enivrants de magnificence renouvelaient perpétuellement leur forme, et la lumière crépusculaire les pénétrait, les saturait de ses feux innombrables. […] Pierre Lasserre, qui explique comment le feu sorti de l’œuvre de Rousseau alla, après lui, dévorer les mœurs, les arts, la politique elle-même : « Rousseau, comme s’il n’avait jamais vécu, rêve de jouissance et de souffrance, de félicité et d’infortune, de vertu et de vice, de justice et d’iniquité, comme d’essences pures et sans mélange, dont son sens intime, sans égards aux rapports extérieurs, serait l’infaillible pierre de touche.

1293. (1860) Cours familier de littérature. IX « Le entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier (2e partie) » pp. 81-159

« Faites tout ce qu’il y a de bon, d’aimable, ce qui ne brise pas le cœur, ce qui ne laisse jamais aucun regret ; mais, au nom de Dieu, au nom de l’amitié, renoncez à ce qui est indigne de vous, à ce qui, quoi que vous fassiez, ne vous rendrait pas heureuse. » XI Ce langage d’un directeur spirituel touchait la jeune femme du monde, parce qu’elle était assez clairvoyante pour lire entre les lignes ce que l’ami se cachait à lui-même ; mais elle jouait avec le feu de l’autel, elle ne s’en laissait pas consumer. […] La passion qu’il ressentit pour Juliette, et dont il l’obséda pendant plusieurs années, a laissé des traces dans une volumineuse correspondance ; nous en avons lu quelques lettres très curieuses ; elles brûlent d’un feu qui ressemble à l’amour comme la sensualité ressemble au sentiment.

1294. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

Tu rentres, et le matin suivant te trouve, avant la pleine aurore, au coin de ton feu flamboyant de sapin, devant ta table chargée de livres et de crayons, les yeux levés et rêveurs promenés sur l’horizon des montagnes, et cherchant lentement dans ta mémoire les images dont tu avais besoin pour peindre, dans ton poème, la félicité de l’homme. […] LXIX Vous qui ne pouvez pas aller admirer ce génie sur place, lisez et relisez ces pages, et que le jeune auteur de ce livre retourne en paix dans sa solitude paternelle de Saint-Lupicin, après avoir allumé en nous le feu de l’enthousiasme pour ce beau lapidaire, puis qu’il nous prépare en silence à ces leçons sur le beau du dessin et de la couleur étudiés dans ces grands poètes du pinceau, Michel-Ange, le Titien et Raphaël.

1295. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (2e partie). Littérature de l’Allemagne. » pp. 289-364

La matière, c’est ce vil composé de fange durcie ou liquéfiée, terre, argile, sable, feu, fer, soufre, dont les astres sont pétris, petit nombre d’éléments abjects qui se combinent ou se combattent dans leur juxtaposition pour produire ces phénomènes de la voûte céleste. […] Il examine ensuite l’écorce de notre planète et la géographie des plantes vivantes ou fossiles : ce n’est plus qu’un naturaliste ; puis la formation des montagnes par l’action du feu ou plutonium ; puis les mers, les vents, les climats, l’électricité ; puis la vie, puis les animaux, puis l’homme.

1296. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIe entretien. Molière et Shakespeare »

Lagrange décrit ainsi le théâtre où la troupe de Molière jouait par ordre du sieur de Rataban, surintendant des bâtiments du roi : « … trois poutres, des charpentes pourries et étayées, et la moitié de la salle découverte et en ruine. » Ailleurs, en date du dimanche 15 mars 1671, il dit : « La troupe a résolu de faire un grand plafond qui règne par toute la salle, qui, jusqu’au dit jour 15, n’avait été couverte que d’une grande toile bleue suspendue avec des cordages. » Quant à l’éclairage et au chauffage de cette salle, particulièrement à l’occasion des frais extraordinaires qu’entraîna la Psyché, qui était de Molière et de Corneille, on lit ceci : « chandelles, trente livres ; concierge, à cause du feu, trois livres. » C’étaient là les salles que « le grand règne mettait à la disposition de Molière. » IV Shakespeare obtint à la fin un rôle muet dans une pièce ; il fut chargé d’apporter son casque au géant Agrapardo. […] ces tressaillements, ces soubresauts, symptômes qui ne devraient accompagner qu’une crainte fondée, feraient à merveille dans le récit d’une histoire qu’une femme raconte au coin du feu, d’après l’autorité de sa grand’mère. — C’est une vraie honte !

1297. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre VI. Bossuet et Bourdaloue »

« Elle craint, dit-il, que l’on lui fasse voir qu’elle a commis le larcin de Prométhée, et qu’elle veut que le feu de sa passion soit le feu dérobé du ciel qui anime un enfant supposé, lui donne un nouvel être, et falsifie l’ouvrage de la nature. » Enfin Patru se présente pour le duc de Liéthune et autres parents : « Messieurs, dit-il, l’intérêt de mes parties est tout visible : on veut leur donner un inconnu pour parent. » Cette simplicité repose.

1298. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Providence de Jupiter, ouvrière divine, mère de toute industrie, protectrice du travail, ô Ergané, toi qui fais la noblesse du travailleur civilisé et le mets si fort au-dessus du Scythe paresseux, Sagesse, toi que Zeus enfanta après s’être replié sur lui-même, après avoir respiré profondément ; toi qui habites dans ton père, entièrement unie à son essence ; toi qui es sa compagne et sa conscience ; Énergie de Zeus, étincelle qui allumes et entretiens le feu chez les héros et les hommes de génie, fais de nous des spiritualistes accomplis. […] C’était un feu roulant de paradoxes pratiques, d’amusantes fantaisies.

1299. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mars 1886. »

J’ai moi-même été effrayé en voyant la rapidité avec laquelle le feu avait pris aux poudres. […] S’il faut, au lieu d’une soirée artistique d’un haut intérêt, rencontrer une bataille entre fanatiques opposés, je préfère de beaucoup rester chez moi et relire Lohengrin au coin de mon feu.

1300. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

« Enfin, le soleil écarte là-bas, du côté du Mont-Blanc, d’épais rideaux de brouillards ou de nuages ; l’astre s’en dégage peu à peu comme un navire en feu qui bondit sur les vagues en les colorant de son incendie ; ses premières lueurs, qui le devancent, teignent les hautes collines d’une traînée de lumière rose ; cette lueur ressemble aux reflets que la gueule du four, où pétillent le buis et le sarment enflammés, jette sur les visages des femmes qui font le pain. […] Ses yeux couvaient un feu amorti par les disgrâces ; ses lèvres avaient le pli du dédain philosophique contre la destinée, qu’on subit, mais qu’on méprise.

1301. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

Ce n’était pas le compte de Voltaire, qui prétendait, et avec raison, peindre, animer ses tableaux, tenir le lecteur en haleine et les yeux attachés sur les principaux personnages : « Je jetterais mon ouvrage au feu, si je croyais qu’il fût regardé comme l’ouvrage d’un homme d’esprit… J’ai voulu émouvoir, même dans l’histoire.

1302. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — II. (Fin.) » pp. 398-412

Un jeune prince grec, Alexis, fils d’Isaac l’Ange, d’un de ces empereurs dépossédés à qui leurs parents et frères usurpateurs faisaient crever les yeux, sollicite l’appui de l’armée ; il arrive lui-même dans le camp ; d’un visage animé et avec le feu de son âge, il implore les chefs.

1303. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

Il en tire, selon son habitude, l’occasion d’une petite moralité à l’usage des capitaines ses compagnons qui lui feront l’honneur de lire sa vie : l’important, c’est de chercher dès ses débuts à montrer ce qu’on vaut et ce qu’on peut faire ; ainsi les grands et chefs vous connaissent, les soldats vous désirent et veulent être avec vous, et par ce moyen on a toute chance d’être employé : « Car c’est le plus grand dépit qu’un homme de bon cœur puisse avoir, lorsque les autres prennent les charges d’exécuter les entreprises, et cependant il mange la poule du bonhomme auprès du feu. » M. de Lautrec, à la première occasion, donne à Montluc une compagnie ; celui-ci n’avait guère que vingt ans.

1304. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettres sur l’éducation des filles, par Mme de Maintenon » pp. 105-120

Mais ce qui est beau dans cette fatigue, c’est son zèle, son feu, son ardeur dernière d’utilité et de semence pour autrui.

1305. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — I — Vauvenargues et Fauris de Saint-Vincens » pp. 1-16

Ce Vauvenargues plus intime et plus essentiel que l’autre éclate dans une de ses dernières lettres à Saint-Vincens, lorsque, apprenant l’invasion de la Provence par les Autrichiens et les Piémontais dans l’automne de 1746, il s’écrie : J’ai besoin de votre amitié, mon cher Saint-Vincens : toute la Provence est armée, et je suis ici bien tranquillement au coin de mon feu ; le mauvais état de mes yeux et de ma santé ne me justifient point assez, et je devrais être où sont tous les gentilshommes de la province.

1306. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

Suit un portrait en pied, ou du moins en buste, où le rival est peint dans sa majesté virile et sa forte placidité, avec tous les avantages qui peuvent inquiéter et humilier un être susceptible et faible, et encore plus nerveux que tendre : Lorsque le dîner fut fini et que les convives eurent été s’asseoir dans le grand salon autour des tables de whist, lentement je me rapprochai de Fanny qui se chauffait les pieds devant le feu.

1307. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier » pp. 303-319

Mme Récamier, le voyant, depuis sa rentrée aux affaires et son triomphe de la guerre d’Espagne, plus ardent, plus exalté et enivré que jamais, moins maniable probablement dans l’intimité, prit le parti d’aller à Rome, sur la fin de 1823 : dans son système d’amitié constante, mais d’amitié pure et non orageuse, elle jugea prudent, à cette heure critique, de s’éloigner pendant un certain temps, et de lui laisser jeter, avec ses fumées de victoire, ses derniers feux, — Mme Cornuel aurait dit, sa dernière gourme de jeunesse62.

1308. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 64-81

Je voulais seulement, sur ce terrain littéraire qui est neutre, dans ce champ d’asile largement ouvert à tous, amener les uns et les autres à être plus justes qu’on ne l’est sous le feu de la polémique ; c’est le moyen, s’il y en a un, d’humaniser et de désenvenimer la polémique elle-même.

1309. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. » pp. 31-51

A peine introduit dans l’assemblée, et après avoir remercié ses libérateurs, il souffle autour de lui le feu et l’esprit de rixe, en remarquant qu’on n’a pas donné aux Mercenaires pour le festin les coupes réservées à la légion sacrée : c’était une légion de jeunes patriciens.

1310. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

Quoi qu’il en soit, Delille ouvrit la marche dans notre littérature et commença par Virgile ; chacun le suivit dans cette voie : Daru un peu lentement et pédestrement pour Horace ; Saint-Ange, avec une obstination parfois couronnée de talent, pour Ovide ; Aignan sans assez de feu et trop médiocrement pour Homère ; Saint-Victor, le père du nôtre, par une vive, légère et encore agréable traduction d’Anacréon.

1311. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Il paraît y être entré avec tout le feu et l’enthousiasme de la jeunesse et il s’est plu à remarquer dans son tout dernier ouvrage, non sans un retour évident sur lui-même, « qu’il n’est pas de meilleurs soldats que ceux qui sont transportés de la culture des lettres sur les champs de bataille, et qu’aucun homme d’étude n’est devenu homme de guerre sans être un brave et un vaillant2. » Pendant quatre années (1571-1575), Cervantes fit un rude apprentissage de la vie militaire ; il eut sa part glorieuse dans la bataille navale de Lépante (7 octobre 1571) ; la galère sur laquelle il servait, Marquesa, fut engagée au plus épais de la mêlée ; chargée d’attaquer la Capitane d’Alexandrie, elle y tua des centaines de Turcs et prit l’étendard royal d’Égypte.

1312. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

On a besoin de se rappeler que cela est écrit en 1814, sous le feu des réactions politiques, et aussi avant les incartades bruyantes qui décelèrent bientôt tous les défauts, toutes, les inconsistances de l’abbé de Pradt.

1313. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Lettres d’Eugénie de Guérin, publiées par M. Trébutien. »

Que vous fussiez une sainte. » Elle choisit toujours de préférence pour confidente de ses chastes et ardents désirs cette Louise de Bayne qu’a aimée son frère, qui n’a plus seize ans, qui en a vingt déjà et plus, mais qui n’a pas changé et dont elle nous trace ce ravissant portrait en deux lignes : « C’est même air de jeunesse, même gaieté, même œil de feu.

1314. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

Bossuet est à l’aise pour la reconnaître dans le langage enthousiaste et vague des prophètes, dans ce verbe de feu, sous ces images figurées qui se transmettaient de bouche en bouche et se renouvelaient sans cesse.

1315. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine »

Puis il terminait en disant (car il avait eu depuis peu des soupçons sur la fidélité de la poste, et il avait craint que quelque curieux ou malveillant ne s’immisçât pour intercepter la correspondance) : « Après de telles réflexions que vous faites, monsieur, et que vous me mettez en voie de faire aussi, voyez si je n’ai pas grand sujet de désirer que vos lettres me viennent en leur entier et que Dieu continue de me faire par vous, jusqu’à la fin de votre vie ou de la mienne, le bien qu’il a daigné me faire durant près de trente ans par feu monsieur votre frère, mon très-honoré père en Jésus-Christ et mon très-libéral bienfaiteur104.… » J’abrège un peu, car il le faut, mais j’ai toujours quelque regret, je l’avoue, à ne pas laisser les phrases de ces dignes gens dans toute leur longueur, afin de mieux respecter aussi l’intégrité de leurs sentiments.

1316. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand »

Voltaire, — et j’entends le Voltaire du fond, de la pensée de derrière, tout ce qu’il y avait d’éclairé et de prophétique dans Voltaire, — eût été pour la Révolution, et je ne crois pas être loin du vrai en répondant : Talleyrand à l’Assemblée Constituante, c’est assez bien Voltaire en 89, un Voltaire moins irritable et sans les impatiences : mais aussi Voltaire avait de plus le feu sacré.

1317. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

À plus forte raison des livres dont le sujet et la manière conviennent très-peu au xixe siècle français ne peuvent-ils faire sensation dans le public… « S’il me survient assez tôt des circonstances qui me mettent en état de vivre, je me féliciterai fort d’être resté étranger au commérage du monde ; de n’avoir point eu de rapport en général avec ceux pour qui vivre, c’est être en place ; de n’avoir vu que de loin les meneurs :de n’avoir pas ajouté à mes misères leurs vaines passions et de n’avoir pas mis la main à leur petit feu d’artifice… (Ici une lacune.) 

1318. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

De ces blasphémateurs aux âmes attardées Écartez le glaive de feu !

1319. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

Cousin, dans l’esquisse pleine de feu qu’il a tracée dès femmes du xviie , leur a décerné hautement la préférence sur celles de l’âge suivant ; je le conçois : du moment qu’on fait intervenir la grandeur, le contraste des caractères, l’éclat des circonstances, il n’y a pas à hésiter.

1320. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Préface » pp. 1-22

Ce feu d’artifice, prodigieusement multiple et complexe, monte et se renouvelle incessamment par des myriades de fusées ; mais nous n’en apercevons que la cime.

1321. (1894) Propos de littérature « Chapitre III » pp. 50-68

La poursuite dénoue aux nuques les brûlures Des cheveux roux où vit le feu des astres clairs Et les talons légers foulent les herbes mûres ; Une torche s’embrase en un bouquet d’éclairs Ou secoue aux étangs mornes des pierreries Ou s’enfouit vivante en des antres ouverts.

1322. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Lorsque les comédiens italiens allaient représenter à Versailles, à Saint-Germain-en-Laye, à Chambord, à Fontainebleau, ils avaient des gratifications ou ce qu’en langage technique on nommerait des feux.

1323. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre III. Grands poètes : Verlaine et Mallarmé, Heredia et Leconte de Lisle » pp. 27-48

Déjà la plume de Baudelaire ne tremblait pas quand il lamentait les accords mourants du Portrait : La maladie et la mort font des cendres De tout le feu qui pour nous flamboya, De ces grands yeux si fervents et si tendres, De cette bouche où mon cœur se noya… Ainsi c’était trouvé avant Leconte de Lisle l’art d’être ému et d’émouvoir sans geste.

1324. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Le symbolisme ésotérique » pp. 91-110

Toi qui m’écoutes, sépare la terre du feu, l’esprit de la matière.

1325. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Chacun de ces ensembles, où un principe commun unit opinions, croyances, institutions, tendances, peut être considéré comme le produit d’une force unique qui agit sur les hommes durant une longue période, et l’on peut dire que cette force va d’abord croissant, s’assimilant ce qui l’entoure, conquérant et organisant à son profit le milieu où elle évolue, jusqu’au moment où elle atteint son maximum d’extension ; après quoi, épuisée par son effet même (car vivre, c’est se tuer à petit feu), elle décline, perd de sa vigueur et finit par laisser se désagréger les éléments de tout genre dont elle était l’âme et le Jien.

1326. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Ils se croient ranimés par de nouveaux feux.

1327. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

Âgé de trente-cinq ans, il se tourna à cette œuvre avec le feu et la précision qu’il mettait à toute chose : de nouveaux désordres plus graves, qui survinrent dans sa santé, l’empêchèrent de l’exécuter avec suite, mais il y revenait à chaque instant dans l’intervalle de ses douleurs ; il jetait sur le papier ses idées, ses aperçus, ses éclairs.

1328. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Walckenaer. » pp. 165-181

Un autre bibliophile plein de feu et original, M. 

1329. (1876) Du patriotisme littéraire pp. 1-25

À la noble clarté de la lune sereine Nous chanterons ensemble assis sous le jasmin Jusqu’à l’heure où la lune en glissant vers Misène, Se perd en pâlissant dans les feux du matin.

1330. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Essai, sur, les études en Russie » pp. 419-428

Je me garderai bien de dire à Sa Majesté Impériale s’il faut introduire en Russie l’étude du grec et du latin, ou destiner les écoles illustres, les gymnasia, à d’autres études : elle saura cela mieux que feu M. 

1331. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 13, qu’il est des sujets propres specialement pour la poësie, et d’autres specialement propres pour la peinture. Moïens de les reconnoître » pp. 81-107

Au contraire rien n’est plus facile au peintre intelligent que de nous faire connoître l’âge, le temperament, le sexe, la profession, et même la patrie de ses personnages, en se servant des habillemens, de la couleur des chairs, de celle de la barbe et des cheveux, de leur longueur et de leur épaisseur, comme de leur tournure naturelle, de l’habitude du corps, de la contenance, de la figure de la tête, de la physionomie, du feu, du mouvement et de la couleur des yeux, et de plusieurs autres choses qui rendent le caractere d’un personnage reconnoissable par sentiment.

1332. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 16, des pantomimes ou des acteurs qui joüoient sans parler » pp. 265-295

On remarquera que la même vivacité d’esprit, que le même feu d’imagination, qui fait faire par un mouvement naturel des gestes animez, variez, expressifs et caracterisez, en fait encore comprendre facilement la signification lorsqu’il est question d’entendre le sens des gestes des autres.

1333. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

Elle s’y pose en Artémise, buvant, dans l’encre, les cendres de son époux, quand il est de légende que feu Colet, qui était musicien, et qui n’était pas Socrate, cassait à cette Xantippe, ses meilleurs violons sur la tête… L’hypocrisie du mot n’a d’égale, en son livre, que son impertinence.

1334. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIV. »

Ils gisent brisés et dispersés ; les sanctuaires ont péri sous le feu ; il reste de hautes murailles brûlées, hideuses, avec des poutres noircies.

1335. (1929) Les livres du Temps. Deuxième série pp. 2-509

Ce prêtre le contraignit à jeter au feu une pièce de théâtre complètement achevée ! […] Ce moment climatérique excite traditionnellement l’allégresse populaire, qui le célèbre par les feux de la Saint-Jean. […] s’il tient à rester intact, il ne faut point étreindre le feu ! […] Une ligne de plus ou de moins dans le sourire : plus de feu dans le regard, ou plus de mélancolie… » Vous vous souvenez ? […] Peut-être, certains soirs d’hiver, remue-t-il au coin du feu ces vieux souvenirs et ces archives intimes, mais il se persuade avec une sorte de pudeur maladive qu’il doit dérober au public les traces de son passé.

1336. (1887) Essais sur l’école romantique

« Mes sœurs, l’onde est plus fraîche aux premiers feux du jour ! […] Le Feu du ciel est presque un poème pour l’étendue. […] cet instrument de communication si souple, si populaire, avec lequel il joue si souvent, comme un enfant avec une arme à feu, sans en connaître la puissance. […] vous pensez que pour si peu j’aurais jeté au feu mon Manifeste ! […] Peut-on lui demander de mettre le feu dans ces jeunes têtes courbées sur des romans et des contes ?

1337. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

que de mains, rivales de celles du curé et de la nièce de don Quichotte, auraient jeté au feu ces romans de chevalerie de la bourgeoisie imprévoyante, devenus les catéchismes de la démocratie déchaînée ! […] Tout ce qu’il y avait encore d’énergique, de viril, de passionné dans les cœurs, se réveillait, se réchauffait au feu de la lutte, et marchait au secours d’une société éperdue. […] che feux cine zôme ! […] Dans le feu de la lutte, quand il s’agit de renverser les hiérarchies et les pouvoirs, on l’invoque, on le met en avant, et il semble alors que ce soit être son ennemi que de résister à ce mouvement qui va, lui dit-on, l’enrichir et l’émanciper. […] Cousin a rencontré, en madame de Hautefort, un type supérieur aux autres femmes qu’il avait teintes avec tant de feu et de vie.

1338. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

Comme les rapides et infatigables généraux, ils allument des feux sur les hauteurs, et on les suppose campés derrière, quand ils sont déjà à bien des lieues de marche et qu’ils vous prennent par les flancs. […] C’est là que Benjamin Constant, que nous, plus jeunes, n’avons guère vu que blasé, sortant de sa raillerie trop invétérée par un enthousiasme un peu factice, causeur toujours prodigieusement spirituel, mais chez qui l’esprit, à la fin, avait hérité de toutes les autres facultés et passions plus puissantes66 ; c’est là qu’il se montrait avec feu et naturellement ce que Mme de Staël le proclamait sans prévention, le premier esprit du monde : il était certes le plus grand des hommes distingués. […] Mme de Staël est d’une taille moyenne, et son corps, sans avoir une élégance de nymphe, a la noblesse des proportions… Elle est forte, brunette, et son visage n’est pas à la lettre, très-beau ; mais on oublie tout dès que l’on voit ses yeux superbes, dans lesquels une grande âme divine, non-seulement étincelle, mais jette feu et flamme. […] Chaque parti, alors dans le feu de la nouveauté, s’empressa de demander au livre des Considérations des armes pour son système.

1339. (1923) Critique et conférences (Œuvres posthumes II)

(Jamais feu Ponsard, son digne partisan, entre autres, n’aura si bien dit sans le savoir). […] Je n’avais plus, en bonne conscience, qu’à jeter la ballade au feu. […] Barbey d’Aurevilly tire un feu d’artifice qui éclipse tous ceux de tous les Ruggieri : « Homme étonnant qui n’a besoin que d’une syllabe pour vous enchanter, si vous avez en vous un écho de poète, — qui serait Liszt encore sur une épinette, et Tulou dans un mirliton. » etc., etc. […] comme Olympio, prodigieux, prestigieux d’orgueil, comme l’Expiation (bien qu’inférieure écriturement parlant au Feu du Ciel (Orientales), prototype), comme l’incomparable Tempête sous un Crâne, honneur de toute une littérature, a dit Baudelaire ; mieux.

1340. (1883) Le roman naturaliste

C’est le mari de Marthe, qu’elle a fait enfermer comme fou, folle elle-même, qui, s’échappant de son cabanon d’aliéné, viendra, de ses mains, mettre le feu à sa propre maison, où demeure l’abbé Faujas, et tirer vengeance ainsi du prêtre qui lui a ravi sans scrupule sa femme, ses enfants, son bonheur domestique, sa raison. […] Il a faim, et Julien lui donne à manger ; il a soif, et Julien lui donne à boire ; il a froid, et Julien allume du feu ; il veut dormir, et Julien le met dans son lit, il se couche à côté de lui, le réchauffant de son corps, « s’étalant dessus complètement, bouche contre bouche, poitrine contre poitrine ». […] L’impression d’un feu flambant clair après une marche au grand froid, voilà, par exemple, une sensation que tout le monde aura quelque chance d’avoir éprouvée. […] C’est feu Wafflard, l’auteur du Voyage à Dieppe, qui n’aurait pas osé se permettre une semblable phrase ; ou, s’il l’avait commise, ç’aurait été qu’il voulait rire ; et M. de Goncourt, de quoi je le plains de tout mon cœur, est sérieux, et très sérieux. […] « L’idée habitait l’artiste que, s’il ne lui était pas accordé par le hasard d’avoir son être remué par une passion, un caprice fougueux, une passade tempétueuse, par une brusque révolution dans le train-train de son existence amoureuse, elle ne trouverait pas la tendresse, l’ardeur, la flamme, enfin les moyens dramatiques qu’exigeait le rôle de feu de Racine. » Las !

1341. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Nous étions en hiver ; je jetai au feu mes trois volumes, avec le sentiment de satisfaction profonde que l’on ressent à consommer un acte de justice. […] Avoir senti longtemps dans sa poitrine émue Un vivace foyer que chaque vent remue ; Feu divin d’où jaillit l’éclair des passions. […] Oromédon parle à Méganyre de ses appas, de ses feux, ce qui force celle-ci à lui parler de ses faibles attraits. […] … pouvait-on dire de ces spirituels mécontents qui jouaient avec l’opposition comme les enfants avec le feu. […] — Et cet artiste qui essaye de donner une forme à sa pensée, que lui dit-on si ses premières ébauches trahissent un germe de talent, une étincelle du feu sacré ?

1342. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

La dame du coin du feu n’en fut pas moins chassée sans retour. […] Comme le feu duc de Broglie, M. de Barante touchait au terme de sa vie quand il entreprit d’écrire ses mémoires, et la mort a interrompu ce dernier travail. […] Il renaîtra longtemps encore après que nous ne serons qu’un peu de cendre légère ; mais il ne renaîtra pas toujours, car il n’est (tout soleil qu’il est) qu’une goutte de feu perdue dans l’espace infini. […] Il n’est que juste d’ajouter qu’ils se conduisirent au feu comme de braves gens qu’ils étaient. […] Pascal, retiré du monde, recevait dans sa chambre sans tapisseries et sans feu toutes les personnes qui venaient l’entretenir sur la religion.

1343. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

quel feu s’allumait dans mes veines ! […] C’est au château de Doremont, (Haute-Saône), dans la bibliothèque du feu prince Volkine, que M.  […] M. de Girardin s’écria : — Je suis touché à la cuisse, et fit feu. — Et moi à l’aine, dit Carrel après avoir essuyé le feu de son adversaire. […] Thiers fut conçu dans le feu de cet enthousiasme.

1344. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Mais il y a des moments où je ne peux pas voir une femme bien mise sans avoir envie de mettre le feu partout. […] On conversait lentement, le soir, devant le grand feu que parfumaient des branches de genévrier. […] ajoutait-il en levant au ciel des yeux brouillés et larmoyants, cuits dans le vin au feu de ses casseroles. […] Eugène Spuller marche sans cesse sur des cendres chaudes et sur un feu à peine couvert. […] Mais voilà les journaux en feu et la littérature partagée en deux camps.

1345. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

Vous connaissez le morceau célèbre où se trouve ce vers, si souvent cité, comme portrait de Piron par lui-même : Il part de moi des feux, des éclairs et des foudres. […] Je la sens, j’entre en verve et le feu prend aux poudres ! Il part de moi des feux, des éclairs et des foudres ! […] Vois naître tour à tour de nos feux triomphants Des pièces de théâtre et de rares enfants ! […] Ainsi le fantastique a droit à notre hommage Et nos feux pour objet ne veulent qu’une image.

1346. (1896) Études et portraits littéraires

Il s’enivre, à soixante ans de distance, de cet « air mis à feu » par l’Empereur. […] Car il fait toujours feu des quatre pieds, comme il disait des chevaux de Géricault. […] Si le peuple incendie, c’est peut-être qu’il est resté trop longtemps sans feu !  […] Bientôt, dans le feu de l’action, tout sera imprévu. […] me demanda-t-il en jetant une bourrée dans le feu… ma tante, qui habitait cette maison ?

1347. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre premier. Les fonctions des centres nerveux » pp. 239-315

« Une irritation directe, dit Griesinger, peut bien, dans la rétine, déterminer des taches lumineuses, des globes de feu, des images colorées, etc., mais non des formes compliquées, un homme, une maison, un arbre ; elle peut bien, dans l’oreille, déterminer des bourdonnements, des sons élevés ou bas, mais non pas des mots formés ou des mélodies. » — La distinction se marque mieux encore dans les hallucinations qui suivent l’usage du microscope ; j’en donne le détail d’après une lettre que m’écrit un des plus illustres micrographes, M.  […] Au-delà de ces groupes, dans les coulisses et l’arrière-fond lointain, se trouve une multitude de formes obscures qu’un appel soudain amène parfois sur la scène ou même jusque sous les feux de la rampe, et des évolutions inconnues s’opèrent incessamment dans cette fourmilière d’acteurs de tout ordre pour fournir les coryphées qui tour à tour, comme en une lanterne magique, viennent défiler devant nos yeux. […] On peut comparer la cellule à un petit magasin de poudre qui à chaque excitation du nerf afférent, prend feu, fait explosion et transmet multipliée au nerf efférent l’impulsion qu’il a reçue du nerf afférent.

1348. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Ampère »

N’attendez pas pour éteindre un feu de cheminée que ce soit devenu un grand incendie. […] Il enchaînait de tout les semences fécondes, Les principes du feu, les eaux, la terre et l’air, Les fleuves descendus du sein de Jupiter… Et celui qui, tout à l’heure, était comme le plus petit, parlait incontinent comme les antiques aveugles, — comme ils auraient parlé, venus depuis Newton.

1349. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier »

Un jour que je le rencontrais ainsi dans une de ces cours de l’Institut que les profanes traversent irrévérencieusement pour raccourcir leur chemin, comme on traverse une église, — un jour que je le rencontrais donc, et qu’arrivé tout fraîchement moi-même de sa Franche-Comté et de son Jura, je lui en rappelais avec feu quelques grands sites, il m’écoutait en souriant ; mais j’avais cherché vainement le nom de Cerdon pour le rattacher à cette haute et austère entrée dans la montagne après Pont-d’Ain : ce nom de Cerdon, que je ne retrouvais pas et que je balbutiais inexactement, avait dérouté à lui-même sa mémoire, et nous avions tourné autour, sachant au juste de quel lieu il s’agissait, mais sans le bien dénommer. […] La venue d’Hoffmann et son heureuse naturalisation en France durent imprimer à l’imagination de Nodier un nouvel ébranlement, une toute récente émulation de fantaisie ; la lecture du Majorat le provoqua peut-être ou ne nuisit pas du moins à Inès ou à Lydie ; le Songe d’or, ou la Fée aux Miettes, purent également se ressentir de contes plus ou moins analogues ; mais n’avait-il pas, sans tant de provocations du dehors, cette autre lignée bien directe au coin du feu, cette facile descendance du bon Perrault et de M. 

1350. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Insensé qui avait cru qu’on rallumait deux fois le feu éteint d’une popularité morte ! […] Le cours de ma vie a été uniforme depuis que les années ont amorti ce feu de l’âme qui m’a tant consumé et tourmenté autrefois… Vous connaissez mes habitudes, vous savez que j’y ai résidé deux ans : semblable à un voyageur pressé par la fatigue d’arriver, je double le pas à mesure que je vois s’approcher le terme de ma course.

1351. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre (2e partie) » pp. 5-80

Il n’y aurait que désordre et iniquité parmi les hommes si la peine cessait d’être administrée ou si elle l’était injustement ; mais, lorsque la peine à l’œil de feu se montre pour anéantir le crime, le peuple est sauvé si le juge a l’œil juste… etc., etc. » On voit par ce terrible et sublime passage du livre indien qu’il y avait des de Maistre, des Platon, des Bossuet en ce temps-là aux bords du Gange. […] Elles n’ont inventé ni l’algèbre, ni les télescopes, ni les lunettes achromatiques, ni la pompe à feu, ni le métier à bas, etc. ; mais elles font quelque chose de plus grand que tout cela : c’est sur leurs genoux que se forme ce qu’il y a de plus excellent dans le monde : un honnête homme et une honnête femme.

1352. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

Discours, pamphlets, brochures, articles de polémique éclosent avec une formidable abondance ; et, après ces ouvrages inspirés par les circonstances, animés par les passions du jour, adressés aux contemporains et peu soucieux de la postérité, il en apparaît bientôt d’autres plus médités, plus apaisés, plus froids en apparence, mais où il n’est pas difficile de retrouver le feu couvant sous la cendre ; j’entends les mémoires et les histoires qui prétendent transmettre à l’avenir et déjà juger les événements de la veille. […] A ceux-là, nous devons des œuvres niaises et plates, ou criardes et enluminées comme des images d’Epinal, n’ayant souci ni de style ni de vraisemblance, relevant moins de l’art que de l’industrie : chansons dont la musique aigrelette est digne des paroles ineptes ou grossièrement bouffonnes  ; romans interminables déroulés durant des mois au rez-de-chaussée d’un journal, débités par tranches à des abonnés patients et promenant du bagne à la cour, du boudoir à l’hôpital, tout un monde de personnages comme on n’en voit qu’en rêve ; mélodrames naïfs et voyants, pauvres de psychologie, mais riches de coups de théâtre et de coups de fusil, rouges de sang et de feux de Bengale, fertiles en miracles de la Providence et du machiniste, étourdissant les yeux et les oreilles par l’éclat des costumes, des décors et des tirades ; littérature faite Sur commande pour un public friand de grosses émotions et de spectacles qui parlent aux sens, parce qu’il ne sait pas encore apprécier des mets plus délicats, parce qu’il n’est initié que d’hier aux jouissances esthétiques, parce qu’il n’a pas fait son apprentissage littéraire.

1353. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VI »

Sur les murs ensuiés, des lignes retraçant la plage familière et la mer sempiternelle fixées en leurs traits les plus décisifs, une vision de la plage et de la mer ; puis, aux soirs de feu dans la hutte, parmi la famille assemblée, une voix exprimant en paroles longues et parfois précipitées l’intelligence de la mer tant parcourue et de ces plages connues, et des mots disant les qualités par l’âme abstraites du spectacle invétéré, et des mots pour tout ce qu’elle est d’immense et de fatal, cette incessante mer sur les plages immobiles ; enfin, par les grèves, menant ses courses hallucinées, l’homme, soit que dans quelque coquillage ou quelque corne ou quelque métal grossièrement forgé il voulût exagérer son chant, soit que de sa simple voix il modulât, dans l’harmonie des bruits conjoints, les rythmes et les mélodies, il s’épandait en ululements, et dans ses cris il imitait, variait, et à l’infini transformait et subtilisait les répondantes clameurs des vents et des flots contre les roches, afin qu’en ses vaticinantes vociférations s’exhalassent les innommables et informes et multiples et exubérantes sensations de la mer sur les plages ; et c’eût été des terreurs, des pitiés, des menaces, des désespérances, des amours et des innombrables angoissements d’âme, des innombrables véhémences du cœur poigné, qu’eût alors vécu le chant de l’artiste préhistorique. […] Enfin, la traversée du feu, le réveil de Brünnhilde, les noces finales, une énorme et monstrueuse effloraison de musique, comme une tropicale végétation s’élançant après tant d’années de travail intérieur, d’une terre divinement fertile.

1354. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1884 » pp. 286-347

À vingt ans, s’efforçant d’allumer le feu de sa chambre, et n’y réussissant pas, il finissait par se rouler, en pleurant, sur le parquet. […] J’ai vu d’autres enfants de son âge, dessiner, et dessiner aussi bien que lui, mais je n’en ai pas vu faire des ciels, des colorations d’orage, des feux d’artifice de soleil couchant, enfin se livrer à des barbouillages, ressemblant mieux à la marbrure brouillée d’une palette de peintre de talent.

1355. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

Félicité, la simple bonne de Mme Aubain, porte au catéchisme où elle accompagne la fille de sa maîtresse, une sensibilité délicate et tactile, jusqu’à de pareilles élévations : « Elle avait peine à imaginer sa personne ; il n’était pas seulement oiseau mais encore un feu et d’autres fois un souffle, c’est peut-être sa lumière qui voltige la nuit, au bord des marécages, son haleine qui pousse les nuées, sa voix qui rend les cloches harmonieuses ; et elle demeurait dans une adoration, jouissant de la fraîcheur des murs et de la tranquillité de l’église. » En s’accoutumant à rendre le dialogue en style indirect, Flaubert se débarrasse encore, de la nécessité des modernistes, forcés de hacher leur phrase à la mesure de paroles lâchées. […] Son apparition dans le salon de la rue de Choiseul, avec son « air de bonté délicate » ; puis à la campagne où Frédéric échange avec elle les premiers mots intimes, plus tard la scène d’intérieur où il la trouva instruisant ses enfants : « ses petites mains semblaient faites pour répandre des umônes puis essuyer des pleurs, et sa voix un peu sourde naturellement avait des intonations caressantes et comme des légèretés de brise »   la visite qui lui est rendue dans une fabrique, et cette conversation où la beauté : s’élève au mystère et à l’auguste : « Le feu dans la cheminée ne brûlait plus, Mme Arnoux sans bouger restait les deux mains sur les bras de son fauteuil ; les pattes de son bonnet tombaient comme les bandelettes d’un sphinx ; son profil pur se découpait en pâleur au milieu de l’ombre.

1356. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Tous, parmi eux, n’ont pas, pour atteindre au faîte, comme Cromwell ou Napoléon, l’échelle de feu des grandes batailles. […] » Ainsi encore ces intéressantes mesdemoiselles Duplay, dont la vie se passait « à dérider le front soucieux de Robespierre », les Vestales de ce feu sacré !

1357. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Il a essayé de faire une douce aurore à son soleil, dont les feux auraient blessé la vulgarité délicate s’ils étaient tombés d’aplomb sur ses paupières. […] Taillé dans un marbre plus dur, Edgar Poe but son calice de feu avec une frénésie plus froide.

1358. (1868) Curiosités esthétiques « I. Salon de 1845 » pp. 1-76

. —  Ce tableau respire une volupté excessive, et montre dans l’auteur un homme capable de très-bien comprendre un sujet — car sainte Thérèse était brûlante d’un si grand amour de Dieu, que la violence de ce feu lui faisait jeter des cris… Et cette douleur n’était pas corporelle, mais spirituelle, quoique le corps ne laissât pas d’y avoir beaucoup de part. […] Isabey Un intérieur d’alchimiste Il y a toujours là-dedans des crocodiles, des oiseaux empaillés, de gros livres de maroquin, du feu dans des fourneaux, et un vieux en robe de chambre, — c’est-à-dire une grande quantité de tons divers.

1359. (1739) Vie de Molière

Le feu duc de Sully, le dernier prince de Vendôme, l’abbé de Chaulieu, qui avaient beaucoup vécu avec Chapelle, m’ont assuré que toutes ces historiettes ne méritaient aucune créance. […] Il crie qu’il est perdu, qu’il est abîmé, si la fumée de son feu va hors de sa maison.

1360. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le Roman de Renart. Histoire littéraire de la France, t. XXII. (Fin.) » pp. 308-324

Tout ce début de Renart parlant au Corbeau est celui de Patelin s’adressant au marchand dont il veut emporter le drap, et à qui il se met également à parler de feu son père.

1361. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

À la chute du jour cette illumination officielle eut lieu ; et en même temps toutes les fenêtres des maisons de la rue se couvrirent d’une ligne de feux que les habitants s’empressaient d’allumer.

1362. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

Son expression prend feu et reluit à chaque pas : J’ai fait un sermon ce matin tout de flammes… — Voyez-vous, je ris déjà dans le cœur sur l’attente de votre arrivée. — Ô Dieu !

1363. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

Dans ses promenades vagabondes il lui arriva plus d’une fois de rencontrer un homme « dont l’air pensif et le regard de feu le frappaient singulièrement » ; il apprit plus tard que c’était Jean-Jacques Rousseau, une de ses futures idoles.

1364. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir a l’histoire de mon temps. Par M. Guizot »

Molé devait tôt ou tard laisser voir sa faiblesse au sein des Chambres, pourquoi devancer l’heure, brusquer l’opinion et former contre lui cette entreprise générale où l’on apporta pour l’abattre le feu et la hache, comme s’il s’agissait d’un grand chêne, et comme si la nouvelle monarchie elle-même, tout à côté, était assez enracinée déjà pour n’en pas ressentir le contrecoup ?

1365. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’Impératrice Catherine II. Écrits par elle-même. »

Malheureusement elle crut devoir le jeter au feu avec d’autres papiers qui pouvaient la compromettre.

1366. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poème des champs, par M. Calemard de Lafayette (suite et fin) »

Dans cette belle fable de Pandore, par où il commence, il avait déjà fait dire par Jupiter à Prométhée : « Tu es tout joyeux de m’avoir volé le feu et de m’avoir attrapé, long sujet de repentir pour toi et pour les hommes à venir !

1367. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « M. de Pontmartin. Les Jeudis de Madame Charbonneau » pp. 35-55

Vous n’aviez pas encore mis le feu à la mèche.

1368. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Et ses compagnons d’exil, l’entendant s’expliquer avec ce feu, cette netteté, cette éloquence, lui disaient : « Sire, écrivez comme César, soyez vous-même l’historien de votre histoire. » Il s’y refusait d’abord : le désespoir, sous cette forme tranquille, était en lui trop profond.

1369. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc »

Il ne s’agissait plus de s’enflammer à tout bout de champ pour le gothique, de le préconiser avec esprit et avec feu, mais de le bien connaître et de s’en rendre compte dès sa naissance, dans ses progrès, ses transformations et ses différents âges.

1370. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

J’ai connu, il y a quelque quinze ans, un pauvre homme de lettres plus maigre et plus râpé que feu Baculard d’Arnaud, Fayot, qui passait sa vie à recueillir, à éditer, à colporter les Classiques de la table.

1371. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite et fin.) »

Boulay-Paty était un vrai poëte, c’est-à-dire qu’il était cela et pas autre chose ; il avait le feu sacré, la religion des maîtres, le culte de la forme ; il a fait de charmants sonnets61, dont je comparais quelques-uns à des salières ciselées, d’un art précieux ; mais les salières n’étaient pas toujours remplies : il avait plus de sentiment que d’idées.

1372. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Gisors (1732-1758) : Étude historique, par M. Camille Rousset. »

Elle épuisa tout son feu contre M. de Belle-Isle, fort peu semblable en cela au bon Évandre.

1373. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres choisies de Charles Loyson, publiées par M. Émile Grimaud »

Loyson s’y dessine à la fois dans sa modération et dans la fermeté de sa ligne ; royaliste attaché à la Charte, mais faisant feu à droite et à gauche, — à droite contre Benjamin Constant et M. 

1374. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « APPENDICE. — CASIMIR DELAVIGNE, page 192. » pp. 470-486

La génération à laquelle il appartient avait besoin, elle a besoin encore d’un interprète qui exprime en traits de feu cette âme poétique qu’elle sent s’agiter confusément en elle, d’un prophète qui lui dévoile cet avenir de science et de liberté auquel elle aspire.

1375. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — II »

Eût-il été de force et d’humeur à mener toutes ces parties de front, à les maintenir en présence et en harmonie, à les unir, à les enchaîner sous une forme indissoluble et vivante ; à les fondre l’une dans l’autre au feu des passions ?

1376. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Jean-Baptiste Rousseau »

Le bon Brossette, ce personnage excellent mais banal, un des dévots empressés de feu Despréaux, espèce de courtier littéraire, qui caressait les illustres pour recevoir des exemplaires de leur part et faire collection de leurs lettres, s’était lourdement avisé, en écrivant à Rousseau, de lui signaler, comme une découverte, dans l’Ode à la Fortune, un passage qui semblait imité de Lucrèce.

1377. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VIII. De l’invasion des peuples du Nord, de l’établissement de la religion chrétienne, et de la renaissance des lettres » pp. 188-214

Il faut des secousses violentes pour porter l’esprit humain sur des objets entièrement nouveaux ; ce sont les tremblements de terre, les feux souterrains, qui montrent aux regards de l’homme des richesses dont le temps seul n’eût pas suffi pour creuser la route.

1378. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre premier. De l’amour de la gloire »

Celui qui n’aperçoit dans les mines où les métaux se préparent, que le feu dévorant qui semble tout consumer, ne connaît point la marche de la nature, et ne sait se peindre l’avenir qu’en multipliant le présent.

1379. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Conclusion. »

tout ce que vous pouvez pour l’homme infortuné, c’est d’essayer de le convaincre qu’il respirerait un air plus doux dans l’asile où vous l’invitez ; mais si ses pieds sont attachés à la terre de feu qu’il habite, vous paraitra-t-il moins digne d’être plaint ?

1380. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

Ils ne savaient pas même ouvrir ou fermer une porte ; ils n’avaient pas la force de soulever une bûche pour la mettre dans le feu : il leur fallait des domestiques pour leur avancer un fauteuil ; ils ne pouvaient pas entrer et sortir tout seuls.

1381. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Notes sur l’Ancien-Régime »

., à 5 sous par feu et par an, ce qui fut exécuté. « Ce n’est que depuis peu qu’on en a cessé la perception, quoique, par les reconnaissances modernes, tous les habitants se soient reconnus sujets auxdits guet et garde du château. » 10° Droit de péage pour toutes les marchandises et denrées qui passent par la ville de Blet, sauf les blés, grains, farines et légumes.

1382. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

Quand je passais quelques jours sans la voir, elle prenait la peine de venir elle-même chez moi pour s’informer de ce qui me retenait ; elle gardait mon argent de réserve avec le sien dans son tiroir ; elle me préparait, si j’étais malade, au coin de mon feu, les tisanes commandées par le médecin ; elle écrivait à ma mère des nouvelles de mon cœur et de mon âme ; elle aurait remplacé la Providence, si la Providence s’était éclipsée pour moi ; elle prenait à mes poésies, qui n’avaient pas encore paru, un intérêt partial, passionné, que je n’y prenais pas moi-même ; elle me comparait à Racine enfant ; elle était fière de préparer aux Bourbons un poëte encore inconnu, mais qu’elle rendrait royaliste et religieux comme elle.

1383. (1899) Le préjugé de la vie de bohème (article de la Revue des Revues) pp. 459-469

Se livrer aux chroniqueurs, laisser traîner sa vie sur des feuilles de papier maculé que les médiocres froisseront le soir au coin du feu en haussant les épaules ou en faisant des gorges chaudes !

1384. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Oscar Wilde à Paris » pp. 125-145

Les saillies brusques et les boutades du caustique Ernest La Jeunesse qui les défendait mal, semblaient n’intervenir qu’à la façon de l’huile sur le feu.

1385. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

C’est un feu que Dieu nous a confié ; nous devons le nourrir de ce que nous trouvons de plus précieux.

1386. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame, duchesse d’Orléans. (D’après les Mémoires de Cosnac.) » pp. 305-321

« Elle avait, dit Choisy, les yeux noirs, vifs, et pleins du feu contagieux que les hommes ne sauraient fixement observer sans en ressentir l’effet ; ses yeux paraissaient eux-mêmes atteints du désir de ceux qui les regardaient.

1387. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — II. (Suite.) » pp. 149-166

Après un discours que fit d’abord l’avocat de Franklin à l’appui de la pétition, discours qui s’entendit à peine parce que cet avocat était très enroué ce jour-là, l’avocat général Wedderburn (depuis lord Loughborough) prit la parole, et, déplaçant la question, se tourna contre Franklin qui n’était nullement en cause ; il l’insulta pendant près d’une heure sur le fait des lettres produites, le présentant comme l’incendiaire qui attisait le feu entre les deux pays.

1388. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

Nous cherchâmes un asile dans le vestibule du temple, et bientôt nous vîmes la foudre briser à coups redoublés cette barrière de ténèbres et de feux suspendue sur nos têtes ; des nuages épais rouler par masses dans les airs, etc… Tout grondait, le tonnerre, les vents, les flots, les antres, etc… L’aquilon ayant redoublé ses efforts, l’orage alla porter ses fureurs dans les climats brûlants de l’Afrique.

1389. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

Le duc lui répond :                 Ce jour, qui semble si funeste, Des feux de la discorde éteindra ce qui reste.

1390. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Paragraphe sur la composition ou j’espère que j’en parlerai » pp. 54-69

Celui qui aura jeté un morceau d’étoffe sur le bras tendu d’un homme, et qui faisant seulement tourner ce bras sur lui-même, aura vu des muscles qui saillaient, s’affaisser, des muscles affaissés devenir saillants, et l’étoffe dessiner ces mouvements, prendra son mannequin et le jettera dans le feu.

1391. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Du Rameau » pp. 288-298

Une bonne esquisse peut être la production d’un jeune homme plein de verve et de feu, que rien ne captive, qui s’abandonne à sa fougue.

1392. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre II. Marche progressive de l’esprit humain » pp. 41-66

Il ne nous a pas été donné des ailes de feu pour nous élever à une telle hauteur, et pour planer ainsi sur les générations et sur les siècles.

1393. (1887) La banqueroute du naturalisme

Feu Ponson du Terrail était plus scrupuleux : il tuait au moins de temps en temps Baccarat et Rocambole, et, pour les ressusciter, il attendait que les abonnés du Petit Journal ou de la Patrie les eussent instamment redemandés.

1394. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Comme eux il parle des nœuds qui unissent les amants, des feux dont ils brûlent, des beaux yeux dont ses héros sont charmés, et d’autres fadaises de la langue des ruelles. […] Oui, ce romancier si parfaitement habile à nous montrer les grâces, les vapeurs, le charme, les gloires de la vie-heureuse ; ce merveilleux indicateur des plus imperceptibles mouvements du cœur de l’homme… et de la femme ; cette bonne d’enfants à peine sevrés, ce rude instituteur des plus sauvages natures, cette marchande de modes, savante à marier l’une à l’autre la forme et la couleur ; ce pédant qui porte la flamme en sa férule ; cette vieille portière accroupie, au milieu de l’hiver, sur son gueux rempli de cendres froides, et cette duchesse en son ronron de Versailles, et cette fraîche grisette aux lilas de Romainville ou dans la ronde harmonieuse du bal de Sceaux ; oui, cet être multiple, ingénieux, odieux, brutal, charmant, la corruption même et l’innocence en personne, aujourd’hui la reine des courtisanes et le lendemain le roi des repris de justice — un si grand seigneur, un si bon bourgeois, un si fameux aventurier, le Christophe Colomb de la rue Soly et le Pizarre du faubourg Saint-Honoré, le sourire et le râle, le squelette et la fleur, l’âme et le corps, la dentelle et la bure, le haillon et la pourpre, la hotte et le trône, le crochet et le sceptre, le vin généreux des gais coteaux et l’eau-de-vie en feu dans l’écuelle des mendiants, le poète et le soldat, le médecin et le curé, le Napoléon, le Rétif de la Bretonne du conte bien fait, l’Homère en patois et la nature humaine, le La Bruyère et le Piron de ce siècle des infamies, des lâchetés et des élégances exquises, après avoir épuisé le bouquet et la mousse amoureuse du vin d’Aï, s’est enivré d’alcool, et déserteur de ces belles passions, traître à ces belles mœurs, tombé en méfiance de sa valeur personnelle : Non est certa meos quae forma invitet amores, il est devenu tout d’un coup (dans ses livres bien entendu) l’homme le plus passionné pour les biens de la fortune, dirait La Bruyère, qui se soit jamais rencontré dans aucune littérature ! […] Mais moi, mon âme en feu s’allumait à l’éclair ; Tout mon sein bouillonnait, et chaque coup dans l’air À mon front trop chargé déchirait un nuage. […] Soit que Juin ait verdi mon seuil, ou que Novembre Fasse autour d’un grand feu vacillant dans la chambre           Les chaises se toucher, Quand l’enfant vient, la joie arrive et nous éclaire. […] n’étais-tu pas prêt à quitter la terre Dans cette nuit d’angoisse où l’archange déchu, Sous son manteau de feu, comme une ombre légère, T’emporta dans l’espace à ses pieds suspendu ?

1395. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

— A : S’il y avait de pareilles lois en Angleterre, ou je ferais une belle conspiration pour les abolir, ou je fuirais de mon île après y avoir mis le feu. — C : Cependant il est bon que tout le monde ne dise pas ce qu’il pense. […] Mais, d’autre part, l’attentat contre le roi de Portugal, plus ou moins conseillé par quelques Pères Jésuites, fit chasser les Jésuites du Portugal et condamner au feu le Père Malagrida ; et tout cela eut en France, dans l’excitation générale des esprits, un retentissement très considérable. […] Consumés par le feu pour la révolte de Coré : 250. […] Traitez-les comme les Madianites, rendez-les comme une roue qui tourne toujours, comme la paille que le vent emporte, comme une forêt brûlée par le feu. […] Il se garde de faire intervenir au profit des chrétiens l’argument qu’il a fait contre eux, à savoir qu’il y a plus de politique que de religion dans toutes les guerres religieuses, s’il a soif, donnez-lui à boire ; car en agissant ainsi vous amasserez des charbons de feu sur sa tête » (Epître aux Romains, xii, 19, 20.)

1396. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

Renonçant à retrouver même une étincelle du feu sacré dans des cendres refroidies, il fuit prudemment de nouvelles épreuves et se marie. […] « Tant que l’astre projette ses feux puissants, il oublie le terme fatal et savoure l’éphémère allégresse, comme il boirait le Paradis éternel. […] Vous savez ce que c’est pour un honnête ouvrier qui a fini sa journée, que de rentrer chez lui, de retrouver sa femme, ses enfants, son feu, de se reposer au sein de cette existence à la fois personnelle et sympathique, où l’homme ne songe plus à rien, excepté à lui-même, à ses affections et à son bonheur. […] Son vol de feu follet, familier des hauteurs et des abîmes où se perdent les philosophes et les poètes, revient toujours sur la terre, dont, malgré d’apparents et passagers dédains, il sait aussi goûter les douceurs. […] « Dans une autre occasion, tourné par un corps très supérieur, il fit reployer à la hâte les troupes qu’il avait avec lui, et, lorsqu’il resta seul, il se retira au pas sous le feu le plus nourri.

1397. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

Cet Ucalegon du poëte, c’est vous, c’est moi : on ne pense guère à la maison d’autrui, quand le feu est à la nôtre. […] A quoi bon ces glaives, ces feux, ces bourreaux qui frémissent autour de moi ? […] Il démontrait qu’il n’y a de bon et d’avantageux que ce qui est honnête, lorsque, les feux ardents de la goutte interrompant son discours, il dit : Ô douleur ! […] Il n’est rien à quoy communément les hommes soyent plus tendus, qu’à donner voye à leurs opinions : où le moyen ordinaire nous fault, nous y adioustons le commandement, la force, le fer et le feu. […] Les livres de Crémutius furent condamnés au feu ; sa fille les conserva.

1398. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

la passion brûlante et la chasteté glacée y perdent l’une ses feux, l’autre sa froideur. […] Dieu l’avait faite ange, fée et princesse. — Un ange ouvrait sur nous son aile blanche… Un jour… sa joue en fleur toucha ma lèvre en feu… Jeunes amours, si vite épanouis, vous êtes l’aube et le matin du cœur. » — Aussi Lise est-elle plus longue que les deux précédentes. […] Taine, Edmond About, Henry de Kock, Amédée Achard, feu Nicolardot, fruits confits à l’École normale, excellente maison pour la préparation de ce genre de produits. […] ne faites donc jamais les Mécène, cela rappelle trop l’histoire de ces marrons qu’on tire du feu. […] Il y a des embuscades, des recoins d’où l’on sera étonné d’entendre partir des feux de peloton et des volées de mitraille de temps en temps.

1399. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

Les sensations esthétiques, en effet, par exemple la vue d’une belle couleur, d’un dessin, d’un feu d’artifice, semblent rester pour la plupart superficielles, sans influence visible sur le développement général de la vie. […] Fechner, Méphistophélès, cet habitant du feu éternel, vêtu d’azur, la couleur du ciel, ou un berger d’idylle drapé dans un manteau rouge ? […] Le plus grand danger autrefois pour l’artiste ou pour le penseur, c’était de voir son œuvre anéantie par le feu sur place de Grève, privée ainsi de l’avenir, damnée pour ainsi dire à jamais. […] Sully-Prudhomme fait cette remarque, que « nos armes à feu, beaucoup plus efficaces que celles de nos ancêtres, n’ont pas un aspect plus terrible ». […] Prends le rayon, prends l’aurore, usurpe le feu...

1400. (1774) Correspondance générale

C’est un homme qui a pris la torche de vos mains, qui est entré fièrement dans leur édifice de paille, et qui a mis le feu de tous côtés. […] J’ai donné mes trois fêtes au Baron ; comment diable voulez-vous à présent que je les retire, lorsqu’on en a fait presque des feux de joie ? […] Fallait-il jeter au feu tous ces matériaux ? […] C’est alors que je mets les fers au feu, et que je m’occupe de votre affaire, comme j’attendrais de votre amitié qu’elle s’occupât de la mienne. […] Collection de feu M. 

1401. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

Ceux même qui revenaient au passé y tendaient par des sentiers imprévus, s’y lançaient avec feu, avec éclairs, et comme on irait à la conquête de l’avenir. […] Ce qui a toujours manqué à Fauriel, comme écrivain, même dans sa jeunesse, ç’a été le quart d’heure final d’empressement et de verve, le fervet opus, un certain feu d’exécution, et, comme on dit vulgairement, battre le fer quand il est chaud. […] Ayant confié à Fauriel le manuscrit de son traité d’économie politique ou de la Volonté, M. de Tracy lui écrivait ces lignes bien honorables pour tous deux : « …..Avant de me remettre à travailler, j’ai besoin de savoir positivement si je dois tout jeter au feu et m’y reprendre d’une autre manière, moins méthodique peut-être, mais plus pratique. […] Cousin surtout, qui fit le voyage d’Italie et y rejoignit Manzoni un ou deux mois après, comme pour y continuer avec feu la conversation de la veille. […]  — Travaillez, travaillons tous, ajoutait-il avec ce noble feu qui alors s’animait aussi du sentiment de la chose publique, et faisons voir aux sots que nous ne sommes pas de leur bande, among them, but not of them 83. » — « Enfin, écrivait-on, de plus d’un côté à Fauriel, enfin nous vous lirons, nous aurons la consolation de voir une sagacité et une patience, une vue perçante et une défiance comme la vôtre, appliquées à un sujet si intéressant, si obscur, et, lors même que vous ne substitueriez qu’un doute raisonné à des assertions impatientantes d’assurance et de superficialité, on éprouvera le charme que font sentir les approches de la vérité. » Puis ceux qui le connaissaient le mieux et qui savaient le faible secret l’engageaient « à ne pas trop se chicaner lui-même, et à ne pas se régler dans sa recherche sans fin sur l’idéal d’une perfection inaccessible. » On l’avertissait d’une chose qu’il ne soupçonnait peut-être pas, « c’est que, parmi ceux qui le liraient et qui le jugeraient, il n’y aurait pas beaucoup d’hommes ayant les mêmes raisons que lui pour être si difficiles ; que, lorsque cela serait (ce qui changerait un peu l’état de la civilisation), ces personnes sauraient apprécier ce que seul il aurait pu faire, et ne lui imputeraient pas l’imperfection même des matériaux sur lesquels il avait dû travailler.

1402. (1803) Littérature et critique pp. 133-288

Les uns s’exposent aux feux des bûchers, parmi les hordes errantes du Canada ; leurs vertus subjuguent les barbares, et maintiennent après un siècle, dans ces contrées qui ont passé sous le joug de l’Angleterre, le respect et l’amour du nom français. […] Toujours ferme, toujours inébranlable, elle s’avance à pas lents, elle vomit des feux continuels ; elle porte partout la destruction. […] Il fait passer dans ses expressions tout le feu de la guerre, et toute l’âme de Condé. […] Restait cette redoutable infanterie de l’armée d’Espagne, dont les gros bataillons serrés, semblables à autant de tours, mais à des tours qui sauraient réparer leurs brèches, demeuraient inébranlables au milieu de tout le reste en déroute, et lançaient des feux de toutes parts. […] Le feu grégeois.

1403. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

Nous allons faire un feu de joie et danser autour des cendres de nos amours !  […] Yseulte, Et, fleur de feu comme elle, auprès de son orteil, Flambe et s’épanouit un jaune et clair soleil. […] Jaurès, par exemple, qui, lui non plus, ne mettra pas le feu aux poudres ; M.  […] Henri Mazel est arrivé à l’heure où l’effort se réalise, et si, en des drames donnés comme des essais, il a pu émouvoir le lecteur du coin du feu, c’est sans doute que le théâtre est son destin. […] ô gouffre et feu !

1404. (1940) Quatre études pp. -154

Leur chant est comme celui de l’alouette : Plus haut, et plus haut encore tu t’es envolée de la terre, comme un nuage de feu ; tu as pris ton essor jusqu’aux profondeurs bleues, et en chantant tu t’élevais encore, et en t’élevant encore tu chantais. […] Tels des serpents mouvants, vêtus d’arcs-en-ciel et de feu, les plantes parasites étoilées de milliers de fleurs, coulent autour des troncs gris ; comme un enfant joueur, qui, avec de tendres murmures et de très innocentes ruses, enveloppe les cœurs qu’il aime du rayonnement de ses yeux : ainsi ces plantes enlacent leurs vrilles aux branches mariées, unissant leur étroite union. […] l’impure envie S’acharne sur sa noble vie, Semblable au vautour éternel ; Et, de son triomphe irritée, Punit ce nouveau Prométhée D’avoir ravi le feu du ciel28… Il la redira souvent, cette plainte qu’il ne laisse pas échapper sans quelque fierté ; on l’entendra dans tous les temps, dans toutes les langues, venant de tous ceux qui portent la peine et la gloire d’être nés pour exprimer la beauté. […] Il s’est trouvé des censeurs pour dire qu’André Chénier était sans génie et sans feu ; qu’Alfred de Musset était incompréhensible ; que Byron n’avait écrit qu’un seul vers digne d’approbation, All my madness none can know ; que les Parnassiens étaient les Jocrisses, les Calinos, et les Guibollards de la poésie française ; que des vers de Verlaine, présentés par lui au troisième recueil du Parnasse, étaient les plus mauvais qu’on eût jamais vus ; et que sais-je encore29 ? […] D’où vient cette douce rosée qu’il répand sur sa route, tandis que des traits de feu l’entrouvrent de toutes parts ?

1405. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre premier. La perception extérieure et les idées dont se compose l’idée de corps » pp. 69-122

Que nous soyons endormis ou éveillés, le feu s’éteint et met fin à une possibilité particulière de chaleur et de lumière. […] Ce dessus de poêle était froid tout à l’heure ; maintenant qu’on a fait du feu, il est chaud.

1406. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre VI. La poésie. Tennyson. »

De la gaieté, puis des extases, puis des miévreries, puis de la satire, puis des effusions, tous les prompts mouvements, toutes les variations brusques, comme d’un feu qui pétille et flamboie, et renouvelle à chaque instant sa forme et sa teinte ; que l’âme est riche, et comme elle sait vivre cent ans en un jour ! […] Du fond de ma langueur jaillit un cri, —  l’Amour couronné s’élançant des bords de la mort, —  et tout le long des veines frémissantes l’âme monta, —  et se colla dans un baiser de feu sur la bouche d’Ida.

1407. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

Son éloquence à chaînons rompus et à brillantes fusées de génie était surtout, comme celle de madame de Staël, une éloquence confidentielle de coin du feu ; il n’avait pas assez de gravité et de solidité pour une tribune, il avait assez d’inspiration, de grâce et de décousu pour un tête-à-tête. […] « Dimanche dernier, 3 septembre, il y eut une fête superbe chez la favorite, à la campagne : bal, feu d’artifice magnifique sur la rivière et souper de deux cents couverts.

1408. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

Sur ces entrefaites, beaucoup de gens s’étaient amassés autour de nos deux voitures ; les uns criaient : Mettons le feu aux voitures ! […] Je ne pouvais me décider à jeter au feu mes quatre traductions du grec ; je ne pouvais non plus les regarder comme achevées, elles ne l’étaient pas.

1409. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

Mais le marbre n’a pu malheureusement conserver le feu de ces flambeaux de l’intelligence, de ces yeux aux prunelles brunes pailletées d’or comme celle du lynx. […]   « “Tu veux des nouvelles, il faut que je les fasse ; personne ne passe dans mon grenier, je ne peux donc te parler que de moi et t’envoyer autre chose que des fariboles ; exemple : « “Le feu a pris rue Lesdiguières, nº 9, à la tête d’un pauvre garçon, et les pompiers n’ont pu l’éteindre.

1410. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

comme il crierait : Au feu ! […] Des hommes accoutrés à la scandinave essayaient de mettre le feu à un sapin et chantaient d’un air inspiré en s’accompagnant d’une guitare.

1411. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IX »

Gounod parlait impartialement du maître de Bayreuth, il disait, assure-t-on, que Wagner a tracé un sillon de feu. […] Le sillon de feu brillera d’un éclat de plus en plus vif ; sa lumière se propagera et exercera partout une influence bienfaisante sur le drame musical ; grâce à elle, les maîtres presque oubliés, mal compris ou méconnus seront remis en honneur et appréciés comme ils méritent de l’être.

1412. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1869 » pp. 253-317

Il nous retraçait, comme dans une causerie, tisonnant devant un feu mort, ces jours succédant aux jours, et où il s’éveillait encore le matin avec un peu d’illusion, puis, dans le milieu du jour, encore un rien intéressé par le travail, par quelques restes de fidélités d’amis, et après, plus rien… « Ah ! […] 22 juin Le général Bataille nous entretient de l’émotion du feu.

1413. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

Les lueurs des vitraux, le feu pâle des cierges, le reflet du ruban jaune qui attache son chapeau de velours, lui donnent l’aspect d’une morte. […] C’est l’occasion pour Berthelot, de peindre pittoresquement la retraite dans les mines des derniers hommes, avec du blanc de champignons pour nourriture, avec le gaz des marais, avec le feu grisou comme bon dieu.

1414. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Le Comte Léon Tolstoï »

La foule des villes, l’élan silencieux et résolu des troupes à la veille d’une bataille, la psychologie des servants et des petits officiers d’une batterie vers le feu ou d’un régiment passé en revue se dessinent tout naturellement sous sa plume, comme l’atmosphère morale d’un comité administratif, d’un conciliabule de généraux, d’un salon diplomatique et mondain, les bavardages d’un cortège de prisonniers bu d’une chambrée d’enfants. […] Mais tous ceux qui aiment le feu de la vie malgré l’incessante mort de ses flammes, trouveront en ces livres la plus grande et la plus vraie des images fictives de ce monde, la plus complète représentation qui soit des derniers fleurissements de la force sur ce globe.

1415. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

— Je suis prêt continua-t-il, à dévouer ma vie pour « empêcher l’établissement de la république qui abattra le drapeau tricolore sous le drapeau rouge, fera des gros sous avec la colonne, jettera à bas la statue de Napoléon et dressera la statue de Marat, détruira l’Institut, l’École Polytechnique et la Légion d’honneur ; ajoutera à l’illustre devise : Liberté, Égalité, Fraternité, l’option sinistre : ou la mort ; fera banqueroute, ruinera les riches sans enrichir les pauvres, anéantira le crédit qui est la fortune de tous et le travail qui est le pain de chacun, abolira la propriété et la famille, promènera des têtes sur des piques, remplira les prisons par le soupçon et les videra par le massacre, mettra l’Europe en feu et la civilisation en cendres, fera de la France la patrie des ténèbres, égorgera la liberté, étouffera les arts, décapitera la pensée, niera Dieu ». […] Mais la critique historique qui n’admire ni ne blâme, mais essaye de tout expliquer, adopte l’axiome populaire, il n’y a pas de fumée sans feu ; elle pense que l’écrivain acclamé par ses contemporains, n’a conquis leurs applaudissements que parce qu’il a su flatter leurs goûts et leurs passions, et exprimer leurs pensées et leurs sentiments dans la langue qu’ils pouvaient comprendre.

1416. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — I. » pp. 195-212

On raconte que M. de Grancey, gouverneur d’Argentan, voulant faire démolir une vieille tour ou beffroi qui renfermait l’horloge de la ville, l’échevin d’Houay résista au nom des bourgeois ; et, comme le gouverneur, étonné du feu qu’il y mettait, lui demandait : Qui êtes-vous ?

1417. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — II. (Fin.) » pp. 254-272

Après Lacy, plus complet et qui unissait l’éclair et le sang-froid, il n’estimait rien tant que Laudon, grand homme de guerre dès qu’on était dans l’action : « J’étais tout en feu moi-même par cet être qui tient plus du dieu à la guerre que de l’homme. » Après la prise de Belgrade, le prince de Ligne, qui s’était vu quelque temps dans une demi-disgrâce, obtient une distinction due au seul mérite : il est nommé commandeur de l’ordre militaire de Marie-Thérèse.

1418. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — II. (Fin.) » pp. 20-37

Créatures fragiles, êtres d’un jour, malgré les hautains progrès dont ils se vantent, malgré les ressources croissantes dont ils disposent, la mort est là qui les déjoue aujourd’hui comme au lendemain d’Adam, et qui les saisit dans leurs plans d’ambition, d’accomplissement ou d’attente, dans leurs rivalités, dans leurs espoirs de revanche et de représailles sur la fortune : « Nous nous hâtons de profiter du débris les uns des autres : nous ressemblons à ces soldats insensés qui, au fort de la mêlée, et dans le temps que leurs compagnons tombent de toutes parts à leurs côtés sous le fer et le feu des ennemis, se chargent avidement de leurs habits… » Mais ceci ne vient qu’après un grand et inépuisable mouvement d’éloquence sur la fuite et le renouvellement perpétuel des choses, un des plus beaux exemples de la parole humaine.

1419. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Au moment de la première charge, voyant qu’on ne s’ébranlait pas, ils s’arrêtèrent à vingt ou trente pas des escadrons et bataillons allemands, sauf un petit nombre qui poussèrent à fond : Dans ce moment, dit Lassay, nos petites pièces de canon ayant commencé à tirer, et les bataillons à faire un feu prodigieux, on leur vit faire un mouvement quasi pareil à celui que fait le blé qui est agité par le vent ; et ensuite ils tournèrent, mais assez lentement ; toute notre ligne s’ébranla pour les suivre, mais fort lentement aussi, craignant de se rompre… En un mot, toutes les particularités et les circonstances de cette victoire de Gran se comprennent à merveille par le récit de Lassay.

1420. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

Ces courtes entrevues si observées, et que chacun dévorait du regard, ont été peintes par Saint-Simon avec ce feu de curiosité et de mystère qu’il met à tout ce qu’il touche : il en a même un peu exagéré le dramatique, car, dans l’un des cas, il fait de Saumery, qui était à côté du prince, une sorte d’espion et d’Argus farouche, tandis que ce n’était qu’un ami et un homme très sûr.

1421. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — I. » pp. 312-329

La pensée de d’Aubigné, c’est que dans le beau temps du calvinisme militaire en France, tout le monde combattait avec le même feu, avec un égal intérêt ; quand le chef manquait de vivres ou d’argent, il n’avait, pour retenir son monde, qu’à leur promettre un prochain combat de plus.

1422. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — II. (Fin.) » pp. 361-379

cette alliance qu’avaient scellée l’Histoire de l’astronomie ancienne, l’adoption du feu central, la communauté d’hypothèse d’un peuple primitif antédiluvien et l’âge d’or des Atlantes, cette alliance solennelle contractée devant de si grands dieux et pour de si graves sujets, se rompit par le trop d’attache de Bailly pour Sedaine, et qu’on dise après cela qu’il n’était pas littérateur jusqu’au point de tenir envers et contre tous pour la littérature même légère !

1423. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — III. (Fin.) » pp. 479-496

Elle nous le montre aussi au naturel dans sa conversation et dans sa personne : « On aurait dit que l’âge accroissait encore le feu de ses discours et de ses regards ; et jusqu’à ses derniers moments, ses proportions légères, son tempérament sec, la vivacité de ses mouvements, ont rappelé le peintre des montagnes. » En ce qui était des hommes, des personnages en scène, il les jugeait bien et les marquait en les jugeant ; sa conversation était gaie, piquante ; il avait de ces mots qui restent, du caustique, le trait prompt et continuel4.

1424. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — II » pp. 18-35

Monseigneur semble avoir épuisé tout son feu l’année précédente, et il n’en veut plus qu’au sanglier et au loup.

1425. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — II » pp. 254-269

On citerait de Charron quantité de beaux et judicieux passages pour la tolérance et contre les dogmatistes opiniâtres, qui veulent donner la loi au monde : « Où le moyen ordinaire fait défaut, l’on y ajoute le commandement, la force, le fer, le feu. » Il parle avec bien de l’humanité et du bon sens contre la question et la torture : avec bien du sens aussi contre l’autorité en matière de science.

1426. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

L’Ajax de L’Iliade, portant, pendant l’absence d’Achille, le poids de l’armée troyenne, ou Ney dans le feu de la mêlée à Friedland, laissez-les faire !

1427. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « La princesse des Ursins. Ses Lettres inédites, recueillies et publiées par M. A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. François Combes » pp. 260-278

. — Mais quand Louis XIV, effrayé et découragé par les premiers désastres de cette funeste guerre de la succession, paraît disposé à abandonner l’Espagne et à lâcher son petit-fils, Mme des Ursins, dévouée avant tout aux intérêts de Philippe V et du royaume qu’elle a épousé, devient tout Espagnole pour le salut et l’intégrité de la couronne, rompt au-dedans avec le parti français, conjure au dehors la défection de Versailles, écrit à Mme de Maintenon des lettres à feu et à sang, s’appuie en attendant sur la nation, et, s’aidant d’une noble reine, jette résolument le roi dans les bras de ses sujets.

1428. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres publiées par M. de Falloux. »

La plupart des Pensées de Mme Swetchine semblent avoir ainsi mûri au feu du soleil intérieur, et, au lieu d’être, comme des plantes naturelles d’Italie, écloses au grand air et aux rayons du matin, et qui ont bu la rosée avec l’aurore, elles ont l’air d’avoir poussé en serre et en chambre bien nattée.

1429. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Œuvres complètes d’Hyppolyte Rigault avec notice de M. Saint-Marc Girardin. »

Pendant des heures, Rigault, bien plutôt excité que contredit par les maîtres du camp, développa brillamment ses ressources et fit feu de toutes les pièces de son esprit.

1430. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

Belmontet vient d’annoncer, de poser, comme on dit, sa candidature par une lettre pleine d’un beau feu, où il parle en vétéran de la poésie, en homme qui est entré dans la carrière par une Fête sous Néron, en compagnie de Soumet, et qui n’a cessé de produire et de mériter depuis : Grand Art, j’ai combattu quarante ans pour ta gloire ! 

1431. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Une monarchie en décadence, déboires de la cour d’Espagne sous le règne de Charles II, Par le marquis de Villars »

La joie qu’on en eut à Madrid, et qui se manifesta par des illuminations et des feux d’artifice « médiocrement beaux, mais d’un bruit épouvantable », éclata jusque sous les fenêtres de don Juan, déjà presque à l’agonie.

1432. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier »

Ces preuves, ce sont sans doute les écrits durables et permanents ; mais le plus sûr est de ne pas s’en tenir uniquement aux écrits déjà anciens et qui ont jeté leur feu ; le meilleur coup de fortune pour une mémoire immortelle est d’avoir, du sein du tombeau, deux ou trois de ces retours et de ces réveils magnifiques qui étonnent les générations nouvelles, qui les convainquent qu’un mort puissant est là, redoutable encore jusque dans son ombre et son silence.

1433. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Connaissait-on mieux la nature humaine au XVIIe siècle après la Fronde qu’au XVIIIe avant et après 89 ? »

Les meilleurs moralistes sortis de ces temps révolutionnaires ont été des serviteurs de la France, profitant de leur expérience pour l’appliquer avec une modération constante et un bon sens varié aux diverses situations, tels que nous avons vu par exemple feu le chancelier Pasquier ; la connaissance des hommes les a menés au maniement des hommes avec mesure et indulgence.

1434. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

— Cette traduction unit la verve à la fidélité ; les monologues de Faust surtout sont emportés à merveille ; ils débordent de ses lèvres avec feu et torrent. « Il faut avoir vingt ans pour traduire ainsi Faust », disait un connaisseur.

1435. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

Michel Chevalier a faite en sa qualité de président pour le Rapport du jury français sur l’Exposition de Londres en 1862, je suis frappé de la ressemblance et presque de l’identité des idées et du programme avec ces anciens articles du Globe qui pouvaient sembler comme un feu d’artifice continu : c’est la même pensée, c’est la même devise ; mais les moyens d’exécution sont autres et plus étudiés.

1436. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens. par M. Le Play, conseiller d’État. (Suite et fin.) »

Franck, le savant Israélite, professeur au Collège de France, parlait un jour de la tolérance et il en parlait avec feu ; un de ses auditeurs, qui était d’un avis différent, marqua sa désapprobation ; un autre auditeur, voisin du premier, et qui tenait pour la tolérance, indigné de la contradiction, donna un soufflet à l’interrupteur, et celui-ci se vit à l’instant honni et expulsé de la salle par un auditoire enthousiaste de la tolérance.

1437. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. (Suite et fin.) »

Zeller en résume ainsi les préceptes, qui tiennent à la fois de la culture ou de l’hygiène locale et de la morale universelle : « Entretenir avec un soin religieux le feu, chose sacrée, dans le temple et au foyer domestique ; respecter l’eau qui coule et qu’on ne doit jamais souiller par un contact impur, surtout celui d’un cadavre ; couvrir, purifier, embellir la terre en multipliant, par le travail et les arrosages, la moisson jaunissante, la forêt qui tamise les rayons du soleil, et les arbres qui portent les doux fruits ; élever, nourrir les animaux nobles et faire une guerre sans relâche aux impurs, voilà comme le sectateur de Zoroastre combat le mal physique dans la nature.

1438. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

Cet état de guerre, « qui contient et arrête les autres peuples, ouvrait au contraire au peuple anglais une sphère d’ambition sans limite et ne l’exposait presque à aucun péril. » Aussi il s’y était engagé avec tout le feu de la cupidité et de la passion.

1439. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. (Suite) »

Cela se fit en janvier 1747 ; le roi lui dit en le lui annonçant à Choisy : « Vous m’avez aussi bien servi que M. de Turenne avait servi le feu roi ; il était juste que je vous donnasse le même grade : je souhaite que vous l’imitiez en tout. » Louis XV faisait allusion à l’abjuration de M. de Turenne.

1440. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Observations sur l’orthographe française, par M. Ambroise »

Il y a un fort bon écrit d’un grammairien estimable, feu M. 

1441. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet »

. — Puis les Montagnards : ceux-ci violents, exaspérés, partant d’un principe extrême, s’inspirant d’une passion outrée, mais bon nombre également sincères, patriotes, d’une intégrité exemplaire, ne songeant dans l’établissement de leur terrible dictature temporaire qu’à la défense du territoire et au salut de la Révolution : Carnot, Cambon, Robert Lindet, Jean-Bon Saint-André, d’autres moins en vue comme Levasseur, Baudot… Pour les juger avec équité, il faut faire la part du feu, la part de la fièvre, et sacrifier sans doute beaucoup des idées applicables aux temps ordinaires ; mais, historiquement, à leur égard, ce n’est que justice. — Puis, la Terreur passée, il y a eu les hommes fermes, modérés, honorables, qui ont essayé de fonder l’ordre et le régime républicain en dépit des réactions, les hommes de l’an iii, Thibaudeau, Daunou, La Revellière-Lépeaux… — Je compterai ensuite une autre génération d’hommes politiques, ceux de 1797, de la veille de Fructidor, très honnêtes gens d’intention, un peu prématurés d’action et d’initiative, qui voulaient bien peut-être du régime légalement institué, mais qui le voulaient avec une justice de plus en plus étendue et sans les lois d’exception : les Barbé-Marbois, les Portalis, les Camille Jordan. — Enfin il y eut, à la dernière heure du Directoire, les hommes qui en étaient las avec toute la France, qui avaient soif d’en sortir et qui entrèrent avec patriotisme dans la pensée et l’accomplissement du 18 brumaire : Rœderer, Volney, Cabanis… Je crois que je n’ai rien omis, que tous les moments essentiels de la Révolution sont représentés, et que chacun de ces principaux courants d’opinion vient, en effet, livrer à son tour au jugement de l’histoire des chefs de file en renom, des hommes sui generis qui ont le droit d’être jugés selon leurs convictions, selon leur formule, et eu égard aux graves et périlleuses circonstances où ils intervinrent.

1442. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. le Cte Alfred de Vigny à l’Académie française. M. Étienne. »

Ses Lettres sur Paris eurent un grand, un rapide succès ; ce fut son dernier feu de talent et de jeunesse ; depuis ce temps, M. 

1443. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre II. L’éloquence politique »

« Il était laid, nous dit un contemporain628 : sa taille ne présentait qu’un ensemble de contours massifs ; quand la vue s’attachait sur son visage, elle ne supportait qu’avec répugnance le teint gravé, olivâtre, les joues sillonnées de coutures ; l’œil s’enfonçant sous un haut sourcil, … la bouche irrégulièrement fendue ; enfin toute cette tête disproportionnée que portait une large poitrine… Sa voix n’était pas moins âpre que ses traits, et le reste d’une accentuation méridionale l’affectait encore ; mais il élevait cette voix, d’abord traînante et entrecoupée, peu à peu soutenue par les inflexions de l’esprit et du savoir, et tout à coup montait avec une souple mobilité au ton plein, varié, majestueux des pensées que développait son zèle. » Et Lemercier nous montre « les gestes prononcés et rares, le port altier » de Mirabeau, « le feu de ses regards, le tressaillement des muscles de son front, de sa face émue et pantelante ».

1444. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

Ximenès Doudan (1800-1872), précepteur du feu duc de Broglie : Mélanges et lettres, 4 vol. in-8, Calmann Lévy, 1876-77, Pensées, in-8, 1880.

1445. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Pierre Loti »

C’est le visage grimaçant de Fatou-gaye qui ressemble à un singe et à une petite fille… C’est tour à tour l’ennui morne et la volupté furieuse sous le poids du ciel en feu.

1446. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre dixième »

La terre n’est pas seulement un fond de mer ; il y voit la double action de l’eau et du feu ; il y voit, c’est le mot ; à la façon dont Buffon peint ce que d’autres ont découvert, il a l’air de le découvrir.

1447. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « La génération symboliste » pp. 34-56

Les revues, les parades militaires, les visites de souverains, les inaugurations Haussmann, sont prétextes quotidiens à réjouissances et à feux d’artifices.

1448. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Stéphane Mallarmé » pp. 146-168

Autre chose est de se murmurer des paroles à soi-même dans la solitude, au coin du feu, ou de les proférer en plein air, quand on se sent écouté et qu’on prend charge d’âmes.

1449. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre V. La littérature et le milieu terrestre et cosmique » pp. 139-154

. — Il est évident que l’hiver, par exemple, aujourd’hui que les hommes savent se bâtir des maisons munies d’épaisses murailles, de doubles fenêtres, de tapis mœlleux, de tableaux ou d’étoffes qui égaient les regards, de lampes et de grands feux qui suppléent le soleil absent, de fleurs et de verdures qui donnent l’illusion du printemps, n’a plus d’effets aussi redoutables sur l’organisme humain qu’au temps où nos ancêtres, à demi nus, vivaient dans des cavernes froides, humides et obscures.

1450. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

Ce fond général une fois posé, il serait possible d’y rattacher les morceaux qui sont d’une manière plus sobre, modérée et légère, et l’on ne serait pas forcé de se tenir, dans les citations d’histoire, aux auteurs plus tranchés qui ont le relief un peu gros, et qui, avec du feu et de la sève, ne sont pas exempts de déclamation.

1451. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres inédites de l’abbé de Chaulieu, précédées d’une notice par M. le marquis de Bérenger. (1850.) » pp. 453-472

Disciple de Chaulieu, on lui accordait dans le temps moins de feu et plus de mollesse, nous dirions aujourd’hui plus de faiblesse.

1452. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Pline le Naturaliste. Histoire naturelle, traduite par M. E. Littré. » pp. 44-62

Je ne parle pas ici de son courage, de sa fermeté, de cette hauteur de pensée capable d’embrasser tout ce qui est sous le ciel ; mais je parle d’une vigueur qui lui était propre, et d’une rapidité qui semblait de feu.

1453. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — II. » pp. 494-514

Croirait-on qu’entraîné par sa conviction, par son courage, Mallet du Pan, au lendemain de la Terreur, au printemps de 1795, sans y être obligé en rien que par son ardeur de plume et son besoin d’aller au feu, ait été près de retourner à Paris ?

1454. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le surintendant Fouquet. (Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M. P. Clément.) 1846. » pp. 294-312

Le lendemain, de bon matin, au Conseil auquel assistait Fouquet avec les autres ministres et secrétaires d’État, Louis XIV dit : « Messieurs, je vous ai fait assembler pour vous dire que jusqu’à présent j’ai bien voulu laisser gouverner mes affaires par feu M. le cardinal, mais que dorénavant j’entends les gouverner moi-même ; vous m’aiderez de vos conseils quand je vous les demanderai. » Fouquet entendit ces paroles sans y croire.

1455. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

Son frère d’Anjou, qui fut depuis Henri III, avait beau lui jeter au feu ses Heures pour lui donner en place des Psaumes et prières huguenotes, toujours elle tint bon et se préserva de cette manie de huguenoterie, qui, en effet, à cette date de 1561, était à la Cour une vanité, une mode française et mondaine, attrayante un moment pour ceux même qui peu après devaient tourner contre et la réprimer.

1456. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

Mon seul vœu, c’est qu’en avançant, et sûr désormais de lui et de tous, comme il l’est et le doit être, il se méfie moins, qu’il s’abandonne parfois à l’essor, et qu’il ose tout ce qu’il sent ; voyageur, qu’il laisse étinceler cette larme amoureuse du beau, qui lui échappe en présence du Parthénon ou des marbres ioniens de l’Asie Mineure ; romancier, qu’il continue d’appliquer ses burins sévères et qu’il craigne moins, jusque dans la passion ou dans l’ironie, de laisser percer quelque attendrissement ; historien, qu’il laisse arriver quelque chose aussi de l’éloquence jusque dans la fermeté de ses récits ; que, dans la grande et maîtresse histoire qu’il prépare, il réunisse tous ces dons, et comme toutes ces parties séparées de lui-même, qu’il a perfectionnées avec tant de soin une à une ; qu’il les fonde et les rassemble désormais, et qu’il accomplisse avec toutes les forces qu’il possède, et avec ce feu qui unit le cœur à la volonté, cette belle histoire de Jules César, du plus ami de l’esprit entre les conquérants, du plus aimable entre les grands mortels.

1457. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Le faubourg Saint-Germain est partout et nulle part, comme l’Ulnare de feu d’Arlincourt.

1458. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Et pour ne parler que de notre pays, Lamartine, Victor Hugo, Alfred de Musset, Sainte-Beuve, Théophile Gautier, sont des prosateurs presque identiques en valeur à ce qu’ils sont comme poètes ; et Alfred de Vigny, qui est de cette constellation poétique éclose dans le ciel de feu de 1830, doit être nommé, non après eux, mais avec eux… Seulement, comme quelques-uns d’entre eux, Vigny n’a pas eu tout à coup le double génie et n’a pas trouvé dans son âme les deux aptitudes entrelacées comme deux sœurs dans le même berceau.

1459. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIII : De la méthode »

On en rencontre jusqu’à cinq ou six, et, après quelques années de soins, si l’on aime véritablement la discussion abstraite, on acquiert le droit d’aller se chauffer, le soir au coin de leur feu.

1460. (1788) Les entretiens du Jardin des Thuileries de Paris pp. 2-212

Il n’y a pas de maître de poste qui n’ait un repas en regle & des fourneaux bien allumés, au lieu que chez la plupart des François, on ne trouve qu’un petit feu de veuve à l’heure même de midi. […] Je ne saurois lui pardonner la maniere dont il traita la feue reine de Pologne qu’il tint captive à Dresde, & toute cette fausse monnoie dont il remplit la Pologne, qu’il fit frapper au coin du pays, après en avoir retiré la bonne. […] Je convins pour la plus grande partie de ces faits, & je lui dis que les sujets du feu roi de Prusse, n’eurent pas les mêmes raisons que les Parisiens, pour se livrer à la joie. […] Il est assez plaisant qu’on craigne le ridicule comme le feu, & qu’on aille au-devant de tout ce qui le constitue. […] Demandes, sollicitations, projets : au feu, disoit le cardinal Dubois ; ils croient donc, ces insensés, ajoutoit-il, que j’ai le temps de lire leurs rêveries.

1461. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

— Si je prenais une autre femme Que celle que j’ai dans la pensée, Au feu de l’enfer Il me faudrait brûler éternellement60. — Vous parlez tant du feu de l’enfer, Et pourtant vous ne l’avez pas senti ; Pensez à mes lèvres rouges Qui rient à toute heure. […] Il arriva [à Scaricalasino] à l’auberge d’un hôte qui a nom Capecchio, et il posa les enfants devant le feu, et il se mit à l’aise, lui et les enfants, et il fit tuer une couple de bons chapons, et ils étaient déjà mis au feu et le pot bouillait, quand arriva Giano, qui croyait sûrement avoir perdu ses fils, et qui fit grande fête, et un bon bout de temps après arriva Andrea. Et le temps venu, s’étant mis à table et ayant soupé, revenus près du feu, cuisant des châtaignes et discourant avec grand plaisir, Giano se tourna vers ledit hôte, et lui dit : « Comment vont les affaires ?  […] Pour lui, il ne croit pas à la réalité de ces histoires, car les anciens ne mentionnent aucune Sibylle à cet endroit ; aussi désigne-t-il ainsi en manchette le récit qu’il donne dans le texte : « Voyez une belle fable à conter au coin du feu. » 55.

1462. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre V. Swift. » pp. 2-82

Si j’étais avec lui, et qu’il se moquât de moi, je ne me fâcherais pas ; je prendrais le ton, je rirais de moi-même, je sentirais qu’il n’a d’autre envie que de passer une heure agréable, qu’il ne m’en veut pas, qu’il me traite en égal et en convive, qu’il éclate en plaisanteries comme un feu d’hiver en étincelles, et qu’il n’en est ni moins joli, ni moins salutaire, ni moins réjouissant. […] Enfin un successeur est venu s’établir aux environs, « disant dans ses prospectus qu’il habite dans la maison de feu M.  […] Que les sages et dignes commissaires inspecteurs lui donnent un régiment de dragons et l’envoient en Flandre avec les autres. —  En voici un second qui prend gravement les dimensions de son chenil, homme à visions prophétiques et à vue intérieure, qui marche solennellement toujours du même pas, parle beaucoup de la dureté des temps, des taxes et de la prostituée de Babylone, barre le volet de sa cellule exactement à huit heures, et rêve du feu.

1463. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre V. La philosophie. Stuart Mill. »

Quand je dis que le feu est chaud, je veux dire par là que, lorsque le feu est à portée de mon corps, j’ai la sensation de chaleur. « Quand nous disons d’un esprit qu’il est dévot ou superstitieux, ou méditatif, ou gai, nous voulons dire simplement que les idées, les émotions, les volontés désignées par ces mots reviennent fréquemment dans la série de ses manières d’être1475. » Quand nous disons que les corps sont pesants, divisibles, mobiles, nous voulons dire simplement qu’abandonnés à eux-mêmes, ils tomberont ; que tranchés, ils se sépareront ; que, poussés, ils se mettront en mouvement ; c’est-à-dire qu’en telle et telle circonstance ils produiront telle ou telle sensation sur nos muscles ou sur notre vue. […] Les enfants, les ignorants, les animaux savent que le soleil se lèvera, que l’eau les noiera, que le feu les brûlera, sans employer l’intermédiaire de cette proposition.

1464. (1890) Dramaturges et romanciers

Ordinairement le talent consiste dans un mélange de qualités et de défauts fondus comme une sorte de métal de Corinthe au feu de l’âme et de l’intelligence. […] L’expiation incessante dont parle la Bible, le feu qui ne s’éteint pas, le ver qui ne meurt pas, est le seul châtiment digne des criminels d’élite que la nature n’avait pas voués au mal. […] L’imagination docilement ardente, passivement curieuse du jeune homme se laisse pénétrer sans résistance par toutes les influences qui l’assiègent ; sa mémoire facile et molle, doucement échauffée par le feu brillant des passions qui s’allument, reçoit les empreintes de toutes les formes qui l’entourent. […] Si Raoul était de substance chrétienne, Sibylle pourrait lui pardonner aisément toutes ses hérésies, car ces hérésies ne seraient plus qu’un stimulant pour leur intelligence et un aliment pour le feu dont ils brûlent également ; leurs âmes auraient des ailes de couleurs différentes, mais elles auraient le même vol et seraient soulevées des mêmes souffles. […] Tous ces détails, une fois reçus par la mémoire, sont fondus au feu de l’imagination à l’insu même de l’artiste, et de cette fusion d’éléments contraires naissent des images combinées et des visions complexes, assez semblables au fameux métal de Corinthe.

1465. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Il y va plus profond qu’aucune Philosophie, il y prolonge et répercute la révélation d’un Évangile, il est une lumière qui appelle la lumière, comme un flambeau éveille mille feux aux voûtes naguère endormies d’une grotte de cristal ; — il sait ce que l’artiste ne sait pas. […] rouge de feu, rouge de sang durant l’Inquisition. […] La bonne foi de Lamennais est incontestable et quand il écrivit, sur le premier volume de son grand ouvrage : De l’indifférence en matière de religion, il souligna d’un trait de feu le grand mal et la grande faute, en effet, de son temps. […] C’est là seulement que cesse et s’évapore le génie de Shakespeare, comme se perd l’éclat d’une étincelle dans le feu d’un brasier. […] M. de Goncourt est l’Esprit Moderne en qui le souffle scientifique a éteint déjà les lumières mystiques des Révélations et n’a pas encore attisé le feu, mystique lui aussi, des croyances conquises par la science.

1466. (1898) La poésie lyrique en France au XIXe siècle

Au coin de mon feu vint s’asseoir Un étranger vêtu de noir, Qui me ressemblait comme un frère. […] De sorte que la poésie et la philosophie, la poésie philosophique, il semble bien que ce soit l’alliance du concret et de l’abstrait, c’est-à-dire, si vous le voulez, de l’eau et du feu. […] C’est ce qu’il indique dans un très beau sonnet, intitulé justement Les Montreurs, c’est-à-dire dirigé contre ceux qui se montrent à tout le monde, qui font à n’importe qui les honneurs de leur sensibilité : Tel qu’un morne animal, meurtri, plein de poussière, La chaîne au cou, hurlant au chaud soleil d’été, Promène qui voudra son cœur ensanglanté Sur ton pavé cynique, ô plèbe carnassière : Pour mettre un feu stérile en ton œil hébété, Pour mendier ton rire ou ta pitié grossière, Déchire qui voudra la robe de lumière De la pudeur divine et de la volupté. […] L’air flamboie et brûle sans haleine ; La terre est assoupie en sa robe de feu.

1467. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Son attitude pendant les deux sièges est au-dessus de toute louange et la collection des articles qu’il écrivait alors, sous le feu, du bombardement et sous la perpétuelle menace de l’assassinat, est peut-être le souvenir le plus honorable de ces abominables jours. […] Nous nous serions remplis de la douceur de nous faire universellement détester et nous aurions formé ensemble quelques élèves dans l’art de déplaire souverainement aux romanciers et aux poètes que nous aurions fait griller à petit feu après leur avoir arraché la peau de la tête. […] Depuis le phoque du début jusqu’aux nègres de la fin, on ne peut pas dire que cela roule dans un char de feu. […] Abraham Catulle s’est retourné vers le doux sacristain du temple Hugo, Théodore de Banville, et lui a dit ; « Mon fils, mon cher fils, voici le feu et le bois, je vais te sacrifier pour être agréable au Seigneur Dieu », et ils ont laissé le vieil âne au pied de la montagne. […] Et puisqu’il faut absolument parler littérature pour être écouté, la brûlante soif du Beau absolu qui le dévore, comme l’inextinguible feu du livre des Proverbes, qui ne dit jamais : « c’est assez ! 

1468. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

Au second acte, Cœur de Rubis met le feu à la maison de son nouveau mari, dont elle emporte la cassette, et noie le malheureux avec la complicité de son amant Simabara. […] Entre autres choses, on lui persuada un jour qu’il y avait une place d’écran du roi, et, pour l’y exercer, on le fit tenir debout devant un feu énorme qui lui grillait les mollets. […] Léon prend feu là-dessus. […] Des feux de bengale empourprent la scène : Masséna paraît à cheval, fier, une main passée dans son habit de général, comme Napoléon, et salue le public avec bienveillance. […] Gerbert est un ancien moine, qui veut tout mettre à feu et à sang, parce qu’on ne l’a pas nommé prieur de son abbaye.

1469. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — II. (Fin.) » pp. 213-233

Henri III, qui n’était pas toujours cruel, résista, dès le commencement de l’émeute, aux conseils de plusieurs capitaines (et notamment de Crillon) qui voulaient en avoir raison et qu’on la réprimât avec vigueur : Le roi, dit Mézeray, n’avait envie que de se saisir des principaux de la Ligue et voulait, par un procédé sans violence, désabuser le peuple des bruits qu’on avait semés… Il était d’ailleurs persuadé de cette opinion que la moindre goutte de sang qui se répandrait serait capable d’irriter la populace et de mettre le feu dans cette grande ville.

1470. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

Au resteh, à cette date, Duclos ne songeait qu’à vivre, à se livrer à l’ardeur et à la fougue de ses sens, à cette vivacité courante de son esprit qui se dépensait chaque jour, qui faisait feu à bout portant ; et l’idée de composer des livres ne lui vint qu’ensuite et par degrés : encore ne s’y appliqua-t-il jamais dans le silence du cabinet, avec cette passion concentrée et dominante qui est le signe et la condition de toute œuvre littéraire mémorable.

1471. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

Mais Bourdaloue et Despréaux étaient tous deux sincères ; pleins de feu, ils pouvaient quelquefois se contredire, froncer le sourcil et croiser le fer en causant : ils s’estimaient, ils étaient liés au fond par cet amour du vrai, par cette ardeur de bon jugement et cette raison passionnée qui vit dans leurs écrits à l’un et à l’autre.

1472. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

Les souvenirs de 1815 et du retour de l’île d’Elbe y sont racontés avec détail et avec le feu d’un contemporain et presque d’un témoin : le passé chevaleresque y est senti avec noblesse.

1473. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

Une femme qui venait d’accoucher avait vu un globe de feu au pied de son lit.

1474. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — II » pp. 159-177

Ce n’est plus au coin du feu l’hiver, c’est l’été, dans son cabinet de verdure, dans son cadre de jasmin et de chèvrefeuille tant de fois décrit, dans sa serre où on le voit assis avec des myrtes pour persienne, qu’il va désormais composer des vers, sérieux toujours, mais frais, animés et éclairés d’une lumière imprévue.

1475. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Instruction générale sur l’exécution du plan d’études des lycées, adressée à MM. les recteurs, par M. Fortoul, ministre de l’Instruction publique » pp. 271-288

C’est l’heure aussi où j’ai à me recueillir pour me rendre digne, à mon tour, d’entretenir le feu sacré sur ces hauteurs religieuses de l’Antiquité.

1476. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

On sent qu’elles luttent éternellement contre un sol stérile, contre un vent sec, contre une pluie de rayons de feu, ramassées sur elles-mêmes, endurcies aux intempéries, obstinées à vivre.

1477. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

Remarquez que nous sommes entre deux feux, — entre deux types contraires.

1478. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Que ces petites montres de sa ruine qui paraissent encore au-dessus de la bière, c’était la Fortune qui les avait conservées pour le témoignage de cette grandeur infinie que tant de siècles, tant de feux, la conjuration du monde réitérée à tant de fois à sa ruine, n’avaient pu universellement éteindre.

1479. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

L’esprit humain, dans son tour en rond ou en spirale, est si sujet à rencontrer les mêmes courants d’influences malignes, que cette Vie du plus grand faiseur de miracles qu’ait produit le monde païen peut presque paraître encore aujourd’hui un livre de circonstance : L’homme est de glace aux vérités, Il est de feu pour les mensonges.

1480. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

Ces mots, ajouta-t-il en devenant presque furibond ; marchant à grands pas, ces mots le rendent digne du feu, et les cinquante mille bûches de l’Inquisition ne suffiraient pas pour le rôtir ! 

1481. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni (suite et fin.) »

Tel est le triste spectateur final que Gavarni va donner à la farce humaine après que le bal est fini, quand le feu d’artifice est tiré, et qu’il ne reste plus que les lampions fumants et des décors vus à l’envers.

1482. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

L’attaque se fit de concert « avec beaucoup d’ordre et une magnifique disposition. » Les bataillons s’avancèrent sous le feu de l’ennemi, l’arme au bras, sans plier, sans tirer un coup de fusil.

1483. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

Jamais le feu de l’enthousiasme pour la chose publique, jamais la grandeur et la terreur qu’inspirent ces grands sauveurs révolutionnaires, hommes de glaive et d’épée, ne trouvèrent de plus vibrants et de plus vrais accents s’échappant à flots pressés d’une poitrine sincère : « C’est folie, s’écrie le poète, de braver ou d’accuser l’éclair et la foudre du Ciel irrité : et, à parler franc, beaucoup est dû à cet homme qui, de l’enclos de ses vergers domestiques, où il vivait retiré et austère comme si son plus profond dessein eût été de planter ses poiriers et de greffer sa bergamote, a su par son industrieuse valeur gravir et s’élever jusqu’à ruiner l’œuvre antique des temps et à jeter ces vieux royaumes dans un nouveau moule. » On sent ici comme la réalité anglaise et la franchise du ton se contiennent mal sous l’imitation classique, comme elles percent et crèvent en quelque sorte l’enveloppe d’Horace.

1484. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

Le poète critique attribue même un peu trop à Homère quand, se souvenant à son sujet d’un mot d’Horace pour le réfuter, il dit que là où nous voyons une faute et une négligence, il n’y a peut-être qu’une ruse et un stratagème de l’art : « Ce n’est point Homère qui s’endort, comme on le croit, c’est nous qui rêvons. » Le beau rôle du vrai critique, Pope l’a défini et retracé en divers endroits pleins de noblesse et de feu, et que je rougis de n’offrir ici que dépolis et dévernis en quelque sorte, dépouillés de leur nette et juste élégance : « Un juge parfait lira chaque œuvre de talent avec le même esprit dans lequel l’auteur l’a composée : il embrassera le tout et ne cherchera pas à trouver de légères fautes là où la nature s’émeut, où le cœur est ravi et transporté : il ne perdra point, pour la sotte jouissance de dénigrer, le généreux plaisir d’être charmé par l’esprit. » Et ce beau portrait, l’idéal du genre, et que chaque critique de profession devrait avoir encadré dans son cabinet : « Mais où est-il Celui qui peut donner un conseil, toujours heureux d’instruire et jamais enorgueilli de son savoir ; que n’influencent ni la faveur ni la rancune ; qui ne se laisse point sottement prévenir, et ne va point tout droit en aveugle ; savant à la fois et bien élevé, et quoique bien, élevé, sincère ; modeste jusque dans sa hardiesse, et humainement sévère ; qui est capable de montrer librement à un ami ses fautes, et de louer avec plaisir le mérite d’un ennemi ; doué d’un goût exact et large à la fois, de la double connaissance des livres et des hommes ; d’un généreux commerce ; une âme exempte d’orgueil, et qui se plaît à louer, avec la raison de son côté ? 

1485. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

le pauvre amoureux, le patito qui s’était donné aux époux Roland et qui, depuis des années, brûlait à petit feu sans le dire, il n’avait pas tort non plus de se fâcher et de se révolter comme il fit.

1486. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite.) »

Une lettre écrite dans les premiers moments à sa sœur Marie-Christine nous la livre dans tout le feu de sa douleur et dans le cri de sa conscience révoltée (1er septembre 1786) : « Je n’ai pas besoin de vous dire, ma chère sœur, quelle est toute mon indignation du jugement que vient de prononcer le Parlement, pour qui la loi du respect est trop lourde ; c’est une insulte affreuse, et je suis noyée dans des larmes de désespoir.

1487. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Exploration du Sahara. Les Touareg du Nord, par M. Henri Duveyrier. »

Le palmier dattier, disent les Sahariens, doit, pour produire de bons fruits, « avoir la tête dans le feu et les pieds dans l’eau. » L’industrie des indigènes à trouver et à découvrir les eaux cachées a été grande de tout temps : le besoin, comme toujours, a aidé à l’invention.

1488. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire de la Grèce, par M. Grote »

On aura beau dire qu’il est difficile que des faits réels et positifs ne soient pas cachés sous ces fables, qu’il n’y a jamais tant de fumée sans feu ; qu’il est presque impossible qu’il n’y ait pas eu quelque expédition nautique qui ait donné prétexte à la fable des Argonautes ; que certainement quelque grande expédition de la Grèce aux côtes d’Asie a donné naissance à la légende de Troie : quand on aura accordé le fait général et vague, en sera-t-on plus avancé pour l’histoire proprement dite ?

1489. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les fondateurs de l’astronomie moderne, par M. Joseph Bertrand de l’académie des sciences. »

Le poëte, le prédicateur, l’hiérophante prend feu et l’astronome n’est plus qu’à la suite.

1490. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

Faites la part au feu et retranchez-vous dans l’inattaquable.

1491. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « THÉOPHILE GAUTIER (Les Grotesques.) » pp. 119-143

Irait-on de résurrection en résurrection jusqu’au sein de l’époque Louis XIII, descendrait-on jusque dans cet intervalle qui s’étend de Malherbe à Boileau, et au milieu duquel une foule de poëtes libertins et débauchés ont été pris par ces deux grands tacticiens comme entre deux feux ?

1492. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN FACTUM contre ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 301-324

……………… Je m’abreuve surtout des flots que le Permesse, Plus féconds et plus purs, fit couler dans la Grèce ; Là, Prométhée ardent, je dérobe les feux Dont j’anime l’argile et dont je fais des dieux.

1493. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE DURAS » pp. 62-80

Je n’entends parler ici que de ce qui, dans l’ordre de l’esprit, n’était pas hostile au principe de la Restauration, de ce qui ne se plaçait pas en dehors, l’attaquant avec audace ou la minant avec ruse, mais de ce qui se développait en elle tout en essayant de la modifier, de ce qui pouvait lui devenir un ornement et un appui, si elle-même la première n’avait pas, un matin, mis le feu aux poudres.

1494. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « CHRISTEL » pp. 515-533

Ces lettres perpétuelles faisaient comme un feu qui circulait par ses mains et qui rejaillissait dans son cœur.

1495. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre II. Les privilèges. »

Tels sont, en Auvergne, en Flandre, en Hainaut, dans l’Artois, dans la Picardie, l’Alsace et la Lorraine, les droits de poursoin ou de sauvement qu’on lui paye pour sa protection générale ; ceux de guet et de garde qu’il réclame pour sa protection militaire ; l’afforage qu’il exige de ceux qui vendent de la bière, du vin et autres boissons en gros ou en détail ; le fouage, en argent ou en grains, que, dans plusieurs coutumes, il perçoit sur chaque feu, maison ou famille ; le pulvérage, fort commun en Dauphiné et en Provence, sur les troupeaux de moutons qui passent ; les lods et ventes, droit presque universel, qui est le prélèvement d’un sixième, parfois d’un cinquième ou même d’un quart sur le prix de toute terre vendue et de tout bail qui excède neuf ans ; le droit de rachat ou relief, équivalent à une année de revenu et qu’il reçoit des héritiers collatéraux, parfois des héritiers directs ; enfin un droit plus rare, mais le plus lourd de tous, celui d’acapte ou de plaît-à-merci, qui est un cens double ou une année des fruits, payable aussi bien au décès du seigneur qu’à celui du censitaire.

1496. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVe entretien. Littérature grecque. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère » pp. 31-64

Denys de Thrace raconte ainsi comment elles furent recueillies : « À une certaine époque, dit-il, les poèmes d’Homère furent entièrement anéantis, soit par le feu, soit par un tremblement de terre, soit par une inondation ; et, tous ces livres ayant été perdus et dispersés de toutes parts, on n’en conservait que des fragments décousus ; l’ensemble des poèmes allait tomber entièrement dans l’oubli.

1497. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 193-236

monsieur, dans ce silence de tout un peuple qui retient son haleine en attendant la voix qui doit commander la mort d’un homme, vous me croirez si vous voulez, mais je ne crois pas avoir pâli ; la joie de l’idée qu’en mourant je mourais pour lui me possédait seule, et j’attendais le commandement de feu avec plus d’impatience que de peur !

1498. (1892) Boileau « Chapitre VI. La critique de Boileau (Fin). La querelle des anciens et des modernes » pp. 156-181

D’abord, pour défendre l’antiquité, il n’était pas un érudit : à un tel point que les érudits lui déniaient même le droit de se faire l’avocat des anciens, et qu’il se trouva pris à un moment entre deux feux, et obligé d’écrire sa Dixième Réflexion contre le docte Huet.

1499. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Émile Zola, l’Œuvre. »

Ou bien (page 261): « Elle triomphait, dans une flambée de tous tes feux héréditaires que l’on croyait morts. » Eh oui, c’est un ange, mais un ange de beaucoup de tempérament !

1500. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IV. Ordre d’idées au sein duquel se développa Jésus. »

Comme la terre refroidie ne permet plus de comprendre les phénomènes de la création primitive, parce que le feu qui la pénétrait s’est éteint ; ainsi les explications réfléchies ont toujours quelque chose d’insuffisant, quand il s’agit d’appliquer nos timides procédés d’induction aux révolutions des époques créatrices qui ont décidé du sort de l’humanité.

1501. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre X. Les sociales »

Car votre esprit, Mélusine, est une clarté adorable et le feu auquel il s’allume est la plus noble des âmes.

1502. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

On voyait comme en plein jour le sol blanchâtre de l’aride Afrique. » Ainsi, à Gizeh, au moment de l’incendie de la flottille égyptienne : « Pendant toute la nuit, au travers des tourbillons de flammes des trois cents bâtiments égyptiens en feu, se dessinaient les minarets du Caire.

1503. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres de la marquise Du Deffand. » pp. 412-431

À soixante-treize ans, dit-il (7 septembre 1769), elle a le même feu qu’à vingt-trois.

1504. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Balzac. » pp. 443-463

M. de Balzac avait le corps d’un athlète et le feu d’un artiste épris de la gloire ; il ne lui fallut pas moins pour suffire à sa tâche immense.

1505. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

Les images chez lui sont rares et sobres ; on a souvent cité ces mots charmants : Les feux de l’aurore ne sont pas si doux que les premiers regards de la gloire.

1506. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

Dans sa fable d’Hercule au ciel, Florian commence par ces lignes prosaïques : Lorsque le fils d’Alcmène, après ses longs travaux, Fut reçu dans le ciel, tous les dieux s’empressèrent De venir au-devant de ce fameux héros… Certes, La Fontaine, ayant à peindre Hercule enlevé de son bûcher dans l’Olympe, et s’asseyant tout en feu entre les dieux, s’y serait pris autrement.

1507. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

Une lettre admirable de lui, et qui le peint dans la sérénité de son rajeunissement final, est celle qu’il adresse à Achille de Harlay, retiré également des charges publiques, sur les douceurs de la retraite, sur les charmes d’une étude paisible et variée, désormais toute confinée à l’intérieur du cabinet, et dont on se dit qu’on ne sortira plus : « J’ai d’un côté mes livres, ma plume et mes pensées ; d’un autre, un bon feu tel que pouvoit souhaiter Martial quand, entre les félicités humaines, il y mettoit ces deux mots : focus perennis.

1508. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

L’admiration, quand elle s’applique à des sujets si nobles, si parfaitement innocents et si désintéressés, est vraiment une étincelle du feu sacré : elle fait entreprendre des recherches qu’un zèle plus froid aurait vite laissées et qui aboutissent quelquefois à des résultats réels.

1509. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Maintenon. » pp. 369-388

Je laisse à de plus osés de mettre la main au feu pour des questions de ce genre : il me suffit, et il doit suffire à ceux qui cherchent avant tout le caractère du personnage, que Mme de Maintenon ait eu dans l’ensemble une ligne de conduite pleine de réserve et de convenance.

1510. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

C’était en bon mari et en père de famille, bien plutôt qu’en poète, que Perrault avait répondu à Boileau, au satirique célibataire et valétudinaire, orphelin en naissant, et à qui jamais sa mère n’avait conté les contes du coin du feu.

1511. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — II. (Suite et fin.) » pp. 421-440

D’autres racontent (et ces divers récits se complètent sans se contredire) que Mme des Ursins ayant protesté de son dévouement à la nouvelle reine, et assuré Sa Majesté « qu’Elle pouvait compter de la trouver toujours entre le roi et Elle, pour maintenir les choses dans l’état où elles devaient être à son égard, et lui procurer tous les agréments dont Elle avait lieu de se flatter, la reine, qui avait écouté assez tranquillement jusque-là, prit feu à ces dernières paroles, et répondit qu’elle n’avait besoin de personne auprès du roi ; qu’il était impertinent de lui faire de pareilles offres, et que c’en était trop que d’oser lui parler de la sorte ».

1512. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

À l’une des cérémonies qui accompagnèrent sa première communion, comme elle était en toilette avec une robe longue et traînante qui l’embarrassait, et qu’elle se retournait souvent pour la rejeter en arrière, une de ses compagnes lui dit : « Cette Sophie est ennuyeuse avec sa tête et sa queue. » — « Toi, ça ne te gênera pas, répondit-elle, car tu n’as ni queue ni tête. » Toute la personne même de Mlle de Lavalette était celle d’une jolie brune piquante, avec des regards pleins de feu, plus faits encore pour exprimer l’ardeur ou la malice que la tendresse ; d’une charmante taille, qu’elle garda jusqu’à la fin, d’une taille et d’une tournure bien françaises.

1513. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Arrivé à Paris et accueilli, comme je l’ai dit, par M. de Boze, qui se l’associa pour le Cabinet des médailles et le fit entrer à l’Académie des inscriptions, il dut s’assujettir, sous ce maître minutieux, à bien des soins exacts et pleins d’ennui ; mais rien ne rebute de ce qui est dans le sens d’une passion, et Barthélemy avait pour les médailles une passion véritable, quelque chose de ce feu sacré qui s’applique à tant d’objets différents, et qui est bien connu de tous ceux que possède une fois le goût des collections.

1514. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Là-dessus un académicien récemment nommé, de dire : « Moi, je ne sais qu’une chose, c’est lorsque j’ai été lui faire ma visite d’académicien, nous avons été reçus dans un salon si froid, si gelant, que Camille Doucet a pris une allumette se trouvant dans un coin, et a mis lui-même le feu au bois dans la cheminée. » Vendredi 9 janvier « Je vous présente mon élève », dit un jour à Bracquemond un vieux collectionneur d’une originalité toute particulière.

1515. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

— J’ai commencé trois fois le portrait de Molière, et trois fois je l’ai jeté au feu, répondit-il au rédacteur en chef du journal.

1516. (1892) L’anarchie littéraire pp. 5-32

Je serais bien étonné s’il avait plus de succès que feu le Symbolisme.

1517. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

… Et ce n’est pas seulement leur sensibilité, leur imagination et leurs nerfs qui rendent les femmes parfaitement incapables de se mesurer avec les difficultés de l’histoire ; car Mme Daniel Stern n’a ni feu d’imagination, ni sensibilité, ni nerfs, et elle n’a pas plus réussi dans son Histoire des commencements de la République aux Pays-Bas (quel titre !)

1518. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Xavier Aubryet » pp. 117-145

… Il y eut, au commencement de ce siècle, une jeune fille, peut-être moins phénoménale, qui avait sur l’azur de deux beaux yeux bleus le nom de Napoléon Empereur, écrit en lettres d’or, le jour, et, le soir, en lettres de feu.

1519. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

C’est un déroulement semé d’antithèses, comme celui d’une pièce de velours semée de paillettes qui auraient chacune un feu différent.

1520. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

La réflexion a fixé l’éclair de la spontanéité et l’a élargi, et en a fait la nappe de lumière qui s’étend dans ce livre de la Douleur et qui finit par allumer et rouler dans ses plis le feu de la mysticité.

1521. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

« Mais ce feu sacré qui anime les nations, — dit-il, à la fin d’un des plus beaux chapitres de son Étude sur la Souveraineté, que nous avons là sous les yeux, —  est-ce toi qui peux l’allumer, homme imperceptible ?

1522. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Ernest Renan »

Renan n’est point de la famille de ces Esprits de feu.

1523. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

… Parmi les gens de Notre-Dame, il y en a un, seulement un, qu’il épargne : c’est le bon feu maître Jehan Cotart. […] En conséquence, le bon feu maître Jehan Cotart est bien traité. […] Bref, de tout cœur, il recommande à Dieu l’âme du bon feu maître Jehan Cotart. […] Et lui : « Sur la bouche de la prophétesse, j’ai bu le feu sacré de Bélen ; le sang des dieux a passé dans mes veines ; maintenant je puis donner à la Gaule une âme nouvelle et vaincre en mourant !  […] Les Gaulois mettent le feu à la forêt ; de chêne en chêne, le feu se propage.

1524. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

Par la vengeance de ma fille, par Até, par Erinnys, à qui j’ai sacrifié cet homme, non, je l’espère, jamais on ne me verra mettre les pieds dans le temple de la Crainte, tant que sur mon autel domestique le feu brûlera entretenu par Égisthe, toujours, comme par le passé, plein d’amour pour moi. […] « 2e La mésalliance des tempéraments… Les inconvénients, je ne sais comment vous les faire pressentir… Je serai très superficiel et me servirai de deux titres de romans… Imaginez que l’Homme de neige soit marié à la Femme de feu. […] Si vous refusez, elle met tout à feu et à sang… Au reste, qui sait ? […] Justement le feu roi a eu l’idée de prendre deux couples, composés chacun d’un garçon et d’une fiile, et de faire élever chaque couple à part, dans la plus entière solitude. […] Notez que Madame Marneffe est assurément une pièce « bien faite », qu’elle fut donnée sur le théâtre de feu Montigny, ce parangon des directeurs, et que Mme Rose Chéri y jouait le principal rôle… Je prends ma tête dans mes mains et je me dis (j’en ai des sueurs froides) : « Je sais bien qu’on ne se connaît jamais soi-même, mais voyons !

1525. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

» le feu flamboie ; L’horloge dit : « Ko-tang, ko-tang !  […] Elle cause paisiblement, au coin du feu, avec un ami, un homme jeune encore, mais sévère, un avocat général que nous avons vu, au premier acte, prendre hypocritement parti pour la jeune femme contre son mari. […] Il y a une cheminée où brûle un bon feu de charbon de terre. Ce feu, qui a je ne sais quoi de ministériel, éclaire une haute croix dorée, fixée par un anneau entre deux grandes armoires où reposent les calices de vermeil et les chasubles lourdes de broderies. […] Quand Paul reparaît, tout feu, tout flamme, Béatrice lui annonce que leur mariage est devenu impossible.

1526. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

L’idéalisme qui coule bas faisant feu de tous ses sabords, la galère naturaliste soutenant le choc, renvoyant triple décharge, courant sus et maîtresse enfin de la voie, avec Zola pour capitaine, Huysmans, Maupassant, Céard, Hennique et Alexis pour équipage ! […] « Invinciblement elle avançait, comme sans arrêt concevable, et le mouvement et la pose impassible du pied cambré, et la minime flexion de la taille droite, et le feu fixe des grands yeux d’où, par intervalles, coule une lueur fauve, sans jamais un battement ce de paupières, disent qu’elle ne supporte tout au plus que des tangences. […] Jules Vabre écrit son Essai sur l’incommodité des commodes ; Céleslin Xanteuil propose qu’on scalpe les quarante ; Gautier les compare à des genoux ; Jehan du Seigneur se bat en duel parce qu’on l’a traité de « bourgeois »139 ; Philothée O’Neddy s’écrie dans Feu et flamme : Les préjugés ont une telle puissance que si j’assassine par hasard l’homme qui a insulté ma maîtresse, Les sots, les vertueux, les niais m’appelleront Chacal… Et la bonne et douce George Sand elle-même se résigne à « faire des monstres », puisque la mode du temps est aux monstres140. […] Voilà quatre-vingt et un ans qu’il se meurt à petit feu d’être né dans ce méchant siècle de bourgeoisie, et les protestations dont il emplit ses volumes sont encore le seul prétexte qu’il ait trouvé à vivre. […] L’Homme des déserts, Les Mangeurs de feu, etc.

1527. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

Le feu brûle. […] L’enfant a d’abord prononcé que toutes les eaux sont froides ; s’il met les doigts dans une bouilloire retirée du feu, il se déjuge et n’attribue plus la froideur qu’à l’eau prise à certaine température. […] chez les divers corps, la tendance vers le bas pour la pierre qui tombe, la tendance vers le haut pour l’air et le feu qui montent, la tendance au mouvement parfait ou circulaire pour les astres qui tournent, l’horreur du vide, etc.

1528. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

Puis il m’introduit, au crépuscule, dans une chaumière, où au moment de prendre une pomme de terre dans un pot de fonte sur le feu, il est soudain arrêté par la vue d’une femme couchée à terre sur la figure, et les cheveux répandus ainsi qu’une queue de cheval dans une mare de sang, et comme il sort dans la cour, il se trouve en face d’un homme appuyé debout sur une herse, en train de mourir, avec un restant de vie dans les yeux, épouvantant. […] Puis les provisions déballées dans la cabane, le feu allumé et les pommes de terre dans un pot de fonte, on allait faire la première tournée, et la tournée était longue, car il y avait 1 500 rejets, et les jours de passage, les allées étaient pleines, d’un bout à l’autre, de pauvres rouges-gorges, de pauvres rouges-queues, pris par les pattes, et battant désespérément des ailes. […] Le hasard nous a servis au mieux, le petit mur d’un champ auquel nous nous sommes adossés pour déjeuner, est occupé par une compagnie de lignards qui se mettent à faire feu, agenouillés derrière le mur, et nous nous trouvons, pour ainsi dire, dans les rangs de la troupe, et bientôt dans un nuage de poudre… Ah !

1529. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Ne vois-tu pas ici le feu, l’air, l’eau, la terre, Leur éternelle amour, leur éternelle guerre ? […] Les sens n’ont point de part à toutes leurs ardeurs, Et ce beau feu ne veut marier que les cœurs. […] Solness n’y a pas précisément mis le feu ; mais, ayant remarqué à la cheminée une fissure dangereuse, il a négligé de la boucher, espérant vaguement l’incendie. […] Le père est assis au coin du feu. […] C’est aussi ce jour-là que l’on inaugure la statue de feu Laversée et que le substitut Brascommié fait ses débuts en Cour d’assises. « Je viens d’obtenir ma première tête ! 

1530. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

Alors ce fut un beau feu clair, subitement une belle flambée joyeuse illuminant, tout, et un grand rond lumineux se dessina au milieu de l’appartement, par terre, sur le tapis, sur les pieds des chaises, dans ces régions basses qui étaient précisément les miennes. […] — Il ne faut pas vous désoler comme cela : j’ai là une porte de derrière ; si vous savez le prévenir il pourra s’échapper ; les autres sont un peu gris, ils n’y verront que du feu et moi et mes garçons nous les empêcherons bien de vous poursuivre ! […] Et plus loin : Il voulut recevoir le baptême du feu, partager tous les dangers de l’armée, acquérir l’expérience et l’autorité que donnent les campagnes : la Belgique et le siège d’Anvers furent ses premières armes. […] Abd el-Kader se promenait bravement au pas, sous le feu de la batterie, et il ne hâta pas l’allure de son cheval, lorsque son porte-étendard et son secrétaire tombèrent auprès de lui. […] Mon grand-père, tout à fait revenu de sa stupeur, conta la chose au prince Eugène, qu’elle amusa : — « C’est parfait », répondit son Altesse Impériale ; « je vois avec plaisir que mon filleul ne s’embrouillera pas dans les feux de file ! 

1531. (1924) Souvenirs de la vie littéraire. Nouvelle édition augmentée d’une préface-réponse

Il ne sait même pas très bien ce que c’est que le pain, ce que c’est que le feu, ce que c’est que la résignation. […] Le coin du feu, une ville qu’on parcourt en dix minutes, ce sont d’invincibles attraits pour la nonchalance. […] Etincelle d’un feu permanent, l’esprit lui venait au hasard et à brûle-pourpoint. […] Reposées par ce sommeil digestif, ses idées recommencèrent à faire feu. […] Illuminations et feu d’artifice terminèrent la fête et, vers le matin, malgré la fatigue, nous montâmes au vieux château pour aller voir se lever le jour sur les montagnes des Maures.

1532. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

Ainsi quand il attribue à Gaster, c’est-à-dire à la faim, l’invention des arts : « Si croyez que le feu soit le grand maistre des arts, comme escript Ciceron, vous errez, et vous faictes tort. […] À quoi bon nous apprendre qu’il préfère le dîner au souper, qu’il fuit la chaleur du feu, qu’il a la vue longue, qu’il ne garde pas longtemps la même attitude, que le parler lui nuit dans ses maladies ? […] L’ambition n’a point de borne ; c’est un gouffre qui n’a ny fond ny rive ; c’est le vuide que les philosophes n’ont encores peu trouver en la nature, un feu qui s’augmente avec la nourrice que l’on luy donne. […] Avez-vous vu des lignes tracées à l’encre sympathique raviver, à l’approche du feu, des traits dont la pâleur se confondait avec la blancheur du papier sur lequel elles furent tracées ? […] C’est là le feu dont la chaleur fait revivre sur le papier des syllabes, des mots, des lignes effacées.

1533. (1864) Le roman contemporain

L’Allemagne et l’Italie étaient en feu. […] Il était né soldat, il s’enrôla dans les gardes mobiles, devint un de leurs officiers, et, comme il l’a dit dans une de ses préfaces, il mena au feu « ces soldats presque enfantins d’une époque orageuse qui surent mourir si noblement pour défendre ce que leurs aînés avaient mis en péril. » À la différence de la plupart de ces soldats improvisés de nos luttes civiles, Paul de Molènes demeura sous le drapeau quand le bruit des passions politiques vint à tomber. […] D’ailleurs, si l’on dit par métaphore : « Il se jetterait pour cette personne dans le feu », on n’a jamais dit, que je sache, « se jeter pour quelqu’un par la croisée », la métaphore elle-même, cette audacieuse, ne va pas jusque-là. […] Il jette donc le papier au feu. […] Elle s’attribua le droit d’arriver au but qu’elle s’était marqué, et d’y arriver par le fer, le feu, le sang, la spoliation, l’extermination.

1534. (1930) Le roman français pp. 1-197

Il sait voir le futur dans La Xipéhuz et La Mort de la Terre, d’une invention exceptionnelle, comme l’extrême passé préhistorique dans l’étonnant Vamireh et La Guerre du feu. […] Allez au fond… Et avant… avant, il y avait eu, en pleine guerre aussi, presque au début de cette guerre, Le Feu de Barbusse. […] Telle est la technique naturaliste du Feu. […] Cela est si vrai, qu’un roman allemand, À l’Ouest, rien de nouveau, qui dit toutes les mêmes choses que Le Feu, avec beaucoup plus de modération dans les termes, beaucoup moins de lyrisme naturaliste, et aussi, on est bien obligé de l’écrire, beaucoup moins de talent, n’a pu paraître que douze ans après le traité de Versailles. […] Mais pour Le Fleuve du feu… Et quant à Thérèse Desqueyroux, à ses autres ouvrages !

1535. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « LEOPARDI. » pp. 363-422

On a souvent remarqué cette alliance, au premier abord singulière, du génie poétique et du génie philologique ; mais ici elle a cela de plus particulier encore que le poëte énergique et brûlant qui va nous apparaître ne finit point par la philologie, ne s’y retira point après son premier feu jeté, mais qu’il débuta par là, et que, si ses souffrances précoces ne l’avaient impérieusement détourné des études suivies, c’est de ce côté sans doute qu’il aurait, avant tout, frayé sa voie et poussé sa veine patiente. […] Leopardi, sous plus d’un aspect, semblait primitivement destiné par la nature à la force, à l’action, à la beauté virile : le feu de son regard, son accent vibrant, le timbre pénétrant de sa parole, une sorte de fascination involontaire qui s’exerçait d’elle-même sur ceux qui l’approchaient, et dont la nature a fait l’une des prérogatives du génie, tout semblait le convier à l’expansion de la vie, au charme des relations partagées141.

1536. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

Quelquefois aussi nous dansons avec les jeunes filles de Bizaccio, un des divertissements qui lui fait le plus de plaisir ; mais plus souvent nous restons assis au coin du feu, et nous y revenons souvent sur l’esprit qu’il prétend lui être apparu à Ferrare ; et véritablement il m’en parle de telle sorte que je ne sais trop qu’en dire et qu’en penser. » Pendant cette douce détente de l’âme et de l’adversité du poète, son poème, revu et perfectionné, se multipliait en Italie et en France avec la rapidité surnaturelle d’une œuvre qui correspondait précisément au siècle, aux mœurs, à la religion, aux contrées de l’Europe, dans lesquelles il devenait, en naissant, national. […] L’octave du Tasse n’est presque jamais pleine ; et son vers, trop vite fait, ne peut être comparé au vers de Virgile, cent fois retrempé au feu des Muses.

1537. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

Il réfute les philosophes qui ont attribué au seul élément du feu ce grand acte de la nutrition. […] C’est elle qui, tout en le développant, lui conserve néanmoins sa figure, tandis que le feu, s’il était seul chargé de cette fonction, accroîtrait cette figure sans règle et sans limites.

1538. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Avec la tempête du Vaisseau Fantôme, qui dure tout un acte, tour de force inouï réussi avec un bonheur insolent, avec le pélerinage de Tannhaeuser, avec les torrents d’eau du Rheingold, les torrents de feu de la Walkyrie, les bruits de la forge et les murmures de la forêt dans Siegfried, c’est, dans toute son œuvre un véritable envahissement de musique descriptive ; ce qui n’empêche pas les wagnériens de combattre au premier rang des ennemis du genre pittoresque. […] Oui, il y a des torrents d’eau dans le Rheingold, et des torrents de feu dans la la Walkure, et des bruits de forge, et des murmures de forêt dans Siegfried, et, dans tous les drames, des peintures prodigieuses, donnant, comme le veut M. 

1539. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

Va son souffle,      l’amour convie le printemps : large ouvert      dans notre sein son œil sourit ;       sa flamme couvait : de gais oiseaux gazouillent  vois, elle sourit aux feux du jour. […] L’image des lascives jouissances qui font arder de feux inextinguibles, venant surajouter leurs anhéleuses crispations aux convulsifs regrets de l’infortuné, porte à son apogée, le lugubre aspect de cet instant, et y appose ce cachet de monstrueuse souffrance, que l’esprit humain a concrètement réunis dans la conception de l’Enfer.

1540. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

Puis il tire d’une commode, des cahiers, où il nous montre de nombreuses pages contenant l’historique de ces évocations, et nous montre enfin un tableau, représentant une femme aux mains lumineuses, qu’il dit être venue l’embrasser, et dont il a senti sur sa joue, ses lèvres, des lèvres pareilles à des lèvres de feu. […] Il parle de bouillabaisses mangées sur des côtes sauvages, où le feu fait avec des lentisques et des branches de genévrier donnait un goût inoubliable au poisson.

1541. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIVe entretien. Épopée. Homère. — L’Odyssée » pp. 445-524

II Cependant, avant de vous dérouler ces vers admirables qui semblent avoir conservé dans leur harmonie et dans leur couleur les ondulations sonores de la vague contre les flancs du vaisseau, le rythme des rames d’où dégoutte l’onde amère, les frémissements des brises du ciel dans les cyprès, les mugissements des troupeaux sur les montagnes de l’Ionie ou de l’Albanie, et les reflets des feux de bergers dans les anses du rivage, permettez-moi de vous faire une remarque qui appartient moins à la rhétorique qu’à l’observation du cœur humain : c’est que, pour bien comprendre et bien sentir Homère dans l’Odyssée, il faut être né et avoir vécu dans des conditions de vie rurale, patriarcale ou maritime, analogues à celles dans lesquelles le poète de la nature a puisé ses paysages, ses mœurs, ses aventures et ses sentiments. […] Pour qui sait voir et sentir, la nature a mis la poésie partout, comme le feu caché dans les éléments ; il ne s’agit que de frapper le caillou pour que la flamme jaillisse ; il ne s’agit que de toucher juste le cœur pour que la poésie en découle à grandes ondes comme le sentiment.

1542. (1753) Essai sur la société des gens de lettres et des grands

Feu M. l’abbé de Saint-Pierre se privant autrefois en faveur de M.  […] Je vous présente donc ces Recherches comme à un géomètre profond, qui a su » joindre aux agréments de l’esprit les plus sublimes connaissances, et dont je distingue le suffrage parmi le petit nombre de ceux qui peuvent véritablement me flatter. » S’il est permis de joindre à l’éloge des étrangers celui des morts, qui ne saurait blesser les vivants, l’auteur oserait encore rappeler ici, comme un témoignage des sentiments de son cœur, ce qu’il écrivait en 1752 à un homme dont la mémoire doit être précieuse à tous les gens de lettres qui l’ont connu, à feu M. le marquis d’Argenson, en lui dédiant (après sa retraite du ministère) l’Essai d’une nouvelle théorie de la résistance des fluides.

1543. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Ce n’est qu’un élève de Chaulieu, et qui redit avec douceur à vingt ans ce que l’autre trouvait avec feu à quatre-vingts.

1544. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Un feu d’enthousiasme qu’ont trop peu ressenti les poètes de nos jours, et que nous avons trop confondu dans nos propres inspirations avec les saillies de la fantaisie, animait alors ces âmes patriotiques et fermes, ces hommes de devoir.

1545. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — I » pp. 139-158

D’abord il ne faisait des vers que par manière d’amusement, comme il faisait des cages, comme il soignait des fleurs, comme il dessinait le paysage, cependant avec feu toujours ; il avait des veines pour chacun de ses goûts, et quand l’un le tenait, les autres devaient céder le pas pour quelque temps.

1546. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Une petite guerre sur la tombe de Voitture, (pour faire suite à l’article précédent) » pp. 210-230

J’y vis même je ne sais quel air de l’heureux génie de feu M. de Voiture.

1547. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — IV » pp. 103-122

Écrivant à M. de Torcy et lui exprimant la situation dans toute sa nudité : « Je parle à un ministre, ajoutait-il, car aux autres je me fais tout blanc de mon épée et de mes farines. » Il était bien obligé de répandre des bruits faux et d’imaginer, ne fut-ce qu’à l’usage de l’ennemi, des arrivées de fonds ou de subsistances qui n’existaient pas : Je me vis donc réduit à payer de hardiesse, je dirais presque d’effronterie, avec cinquante mille hommes de moins que les ennemis, une petite artillerie de campagne mal traînée, mal approvisionnée, contre deux cents bouches à feu bien servies, et la frayeur perpétuelle de manquer de pain chaque jour.

1548. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Aucuns des grands sujets n’y sont interdits, mais la liberté sur tous est entière, car si une fois la conclusion était commandée, s’il y avait d’avance une orthodoxie politique ou religieuse, un Credo ou un veto, un nec plus ultra, c’en serait fait de la libre et charmante variété de la parole, qui va comme elle peut et qui trouve dans le feu de la contradiction ses plus vives saillies, son ivresse involontaire.

1549. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Au surlendemain de la Révolution de Février, quand « tout ce qu’il y avait encore d’énergique, de viril, de passionné dans les cœurs, se réveillait, se réchauffait au feu de la lutte, et marchait au secours d’une société éperdue » ; quand « tout s’agitait, se heurtait, s’escrimait dans cette mêlée formidable d’où partait, de temps à autre, un cri de rage ou d’épouvante, où chaque vérité pouvait être le salut, chaque sophisme la perte, chaque blessure l’agonie », il y a eu des esprits modérés et de sang-froid qui se sont fait scrupule de déclamer à satiété contre M. 

1550. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Elle est très-bien écrite et très-touchante : je m’en laissais attendrir, mais je me suis rappelé sa conduite avec feu la Demoiselle (Mlle de Lespinasse), et mon cœur s’est fermé. » Nous tenons, par cet aveu, la cause et l’origine de la prévention.

1551. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Quoi qu’on en pense, il restera du moins évident pour tous qu’après cet effort et ce déploiement de vigueur et de zèle pendant les six premiers mois de l’année, Montaigne avait jeté son feu ; il avait donné son coup de collier, et il se crut quitte : il retomba aisément dans cette modération naturelle, éloignée de tout héroïsme.

1552. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette »

Mais je ne puis, malgré tout, m’empêcher tristement de sourire quand je vois de jeunes écrivains venir aujourd’hui se faire forts de la vertu entière de la femme en Marie-Antoinette et y mettre comme la main au feu avec une confiance intrépide ; car tous ces chevaliers, dont Burke a parlé dans un éloquent passage, ces jaloux défenseurs qu’avait à son service la reine de France en ses beaux jours et qui lui ont manqué à l’heure du danger, elle les retrouve aujourd’hui un peu tard et après coup.

1553. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

. — « Il faut chercher un médecin », reprit-il, et il continua ses patenôtres. » Et, se rabattant sur Benjamin Constant, il continuait lui-même sur le ton de médisance : « Constant est tellement usé, il a tellement besoin que quelqu’un l’anime et le travaille, que je lui disais que vieux et ne pouvant plus quitter le coin de son feu, il donnerait de la tête contre le marbre de la cheminée pour se secouer.

1554. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de La Mennais »

d’abord, puis indigente à Paris, et sa retraite obscure dans le quartier de la Sorbonne, où, pendant un hiver sans feu, grelottant dans son manteau, il écrivit le premier volume de l’Essai, qui le rendit bientôt si célèbre107. » Il y a toujours, dans ces souvenirs personnels, à faire la part de l’âme qui les reçoit et qui, sans les transformer, les colore et les grossit un peu en es réfléchissant.

1555. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

) Louis-Philippe une fois bien établi sur son trône, la cocarde tricolore fut arrachée du chapeau rond et jetée au feu, et les jeunes échantillons de républicains furent renvoyés à Paris.

1556. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

Dans ces Idylles en vers libres, pleines de moutons à la Des Houlières, d’agneaux volages ou gémissants qu’enchaînent des rubans fleuris ; dans ces premières élégies où voltige l’Amour en bandeau et où il est tant question de tendres feux, de doux messages et de fers imposteurs, on est, en souriant, reporté à cette génération sentimentale nourrie de Mme Cottin, de Mme Montolieu, que Misanthropie et Repentir attendrissait sans réserve, que Vingt-quatre Heures d’une Femme sensible n’exagérait pas, et qui lors du grand divorce de 1810, s’apitoya avec une exaltation romanesque sur la pauvre châtelaine de la Malmaison.

1557. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « GRESSET (Essai biographique sur sa Vie et ses Ouvrages, par M. de Cayrol.) » pp. 79-103

Gresset, dans son séjour d’Amiens, s’était extrêmement préoccupé, comme font volontiers les écrivains retirés en province, du néologisme qui s’introduisait en quelques branches du langage : « Il avait été frappé justement, mais beaucoup trop, dit Garat dans sa Vie de Suard, du ridicule d’une vingtaine de mots qui avaient pris leurs origines et leurs étymologies dans les boutiques des marchandes de modes, même dans les boutiques des selliers. » Il en forma comme le tissu de son discours ; toutes ces locutions exagérées dont il s’était gaiement raillé vingt-cinq ans auparavant dans le rôle du jeune Valère : Je suis comblé, ravi, je suis au désespoir, Paris est ravissant, délicieux, il les remit là en cause, il fit d’une façon maussade comme la petite pièce en prose à la suite du Méchant ; et tandis que Suard plaidait avec tact pour la raison, alors dans sa fleur, et pour la philosophie, Gresset souligna pesamment des syllabes, anticipant l’office que nous avons vu depuis tant de fois remplir à feu M.

1558. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre III »

Au feu les registres d’impôt, les livres de comptes, les archives des municipalités, les chartriers des seigneurs, les parchemins des couvents, toutes ces écritures maudites qui font partout des débiteurs et des opprimés !

1559. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

Mais un poète ou un sculpteur traduisant le mythe de Prométhée, en ferait aisément une œuvre symbolique ; car Prométhée dérobant le feu, Prométhée enchaîné, peut s’exprimer tout entier par sa seule attitude.

1560. (1890) L’avenir de la science « XIII »

Alors le travail ne s’enfouirait pas et ne s’étoufferait pas lui-même, comme un feu où l’aliment est trop pressé.

1561. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

A la même époque, sur les planches, seigneurs et « escholiers  » jurent par leur bonne lame de Tolède, et pourpoints, brassards, pertuisanes reluisent aux feux de la rampe ; la poésie fait sortir des tombeaux gnomes et farfadets, fées et lutins, châtelaines, troubadours et nobles chevaliers ; le roman évoque des truands, des gitanes et le moine bourru.

1562. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XI, les Suppliantes. »

On n’arrachait pas l’homme du temple où il s’était réfugié, mais on allumait autour de lui un cercle de feux qui le forçaient à lâcher l’autel.

1563. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XII »

Le premier acte met en scène ces cinq personnages, sous un feu croisé de mots justes et de vives saillies, de tirades ardentes et de réparties ironiques qui les éclaire sous tous leurs aspects.

1564. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

Thiers causer avec feu de cette affaire du général Dupont : qu’il me pardonne de me souvenir de sa conversation, mais ceux qui l’entendent ne l’oublient pas aisément, et, le dirai-je ?

1565. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

Le Mercure nous la montre plus au naturel, « parfaitement bien faite dans sa taille médiocre, avec un maintien noble et assuré, la tête et les épaules bien placées, les yeux pleins de feu, la bouche belle, le nez un peu aquilin, et beaucoup d’agrément dans l’air et les manières ; sans embonpoint, mais les joues assez pleines, avec des traits bien marqués pour exprimer la tristesse, la joie, la tendresse, la terreur et la pitié ».

1566. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de La Tour-Franqueville et Jean-Jacques Rousseau. » pp. 63-84

Son amour était celui de l’idéale beauté, du fantôme auquel lui-même prêtait, vie et flamme : c’était ce fantôme seul, tiré de son sein, et formé d’un ardent nuage, qu’il aimait, qu’il embrassait sans cesse, à qui il donnait chaque matin ses baisers de feu, sur qui il plaçait, en les rassemblant, ses rares souvenirs de bonheur ; et quand il se présenta une femme réelle qui eut l’orgueil de lui montrer l’objet terrestre de son idéal et de lui dire : Je suis Julie, il ne daigna point la reconnaître ; il lui en voulut presque d’avoir espéré se substituer à l’objet du divin songe.

1567. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) «  Mémoires et correspondance de Mme d’Épinay .  » pp. 187-207

Il y eut je ne sais quel fou qui, sous prétexte qu’il était à demi parent par alliance, se mit à faire feu en tous sens et adressa placet sur placet aux ministres du roi.

1568. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

c’est un sot frotté d’esprit. » Elle disait du duc de Nivernais : « Il est manqué de partout, guerrier manqué, ambassadeur manqué, auteur manqué, etc. » Rulhière lisait dans les salons ses Anecdotes manuscrites sur la Russie ; elle aurait voulu qu’il les jetât au feu, et elle lui offrait de l’en dédommager par une somme d’argent.

1569. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Elle a les cheveux du plus beau châtain qu’on ait jamais vu, le visage rond, le teint vif, la bouche agréable, les lèvres fort incarnates, une petite fosse au menton, qui lui sied fort bien, les yeux noirs brillants, pleins de feu, souriants, et la physionomie fine, enjouée et fort spirituelle… Pour de l’esprit, Clarice en a sans doute beaucoup, et elle en a même d’une certaine manière dont il y a peu de personnes qui soient capables, car elle l’a enjoué, divertissant, et commode pour toutes sortes de gens, principalement pour des gens du monde.

1570. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Le duc de Lauzun. » pp. 287-308

« L’embarras de me trouver un bon gouverneur engagea mon père, dit-il, à confier cc soin à un laquais de feu ma mère, qui savait lire et passablement écrire, et que l’on décora du titre de valet de chambre, pour lui donner de la considération. » Notez déjà ce tour d’esprit et d’ironie plaisante : ce sera celui de Lauzun.

1571. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

Jasmin, né à Agen vers la fin du dernier siècle, est un homme qui doit avoir environ cinquante et un ans, mais plein de feu, de sève et de jeunesse ; à l’œil noir, aux cheveux qui, il y a peu de temps, l’étaient encore, au teint bruni, à la lèvre ardente, à la physionomie franche, ouverte, expressive.

1572. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire des travaux et des idées de Buffon, par M. Flourens. (Hachette. — 1850.) » pp. 347-368

En tête du tome XIIme de son Histoire naturelle, il confesse avec une sorte d’ingénuité cet impérieux besoin de sa nature, qui le sollicite à introduire dans son Histoire quelques discours généraux où il puisse se développer, traiter de la nature en grand et se consoler de l’ennui des détails : « Nous retournerons ensuite à nos détails avec plus de courage, dit-il, car j’avoue qu’il en faut pour s’occuper continuellement de petits objets dont l’examen exige la plus froide patience et ne permet rien au génie. » Quand il a dit que le génie n’était qu’une plus grande aptitude à l’application et une plus grande patience, on voit que Buffon n’entendait point cette patience froide qui n’a rien de commun avec le feu sacré.

1573. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — I. » pp. 471-493

D’une âme ardente et dont le feu se dirigeait sur des sujets graves, à peine hors des bancs, il prit part aux discussions et aux dissensions qui agitaient alors cette petite république, et il eut ses premiers écarts, même ses excès ; car il est écrit pour chacun qu’il faut que jeunesse se passe.

1574. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Mémoires du cardinal de Retz. (Collection Michaud et Poujoulat, édition Champollion.) 1837 » pp. 40-61

Le style de Retz est de la plus belle langue ; il est plein de feu, et l’esprit des choses y circule.

1575. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame de Motteville. » pp. 168-188

Après la mort du feu roi, elle cessa de mettre du rouge, ce qui augmenta la blancheur et la netteté de son teint… Le grand deuil seyait à la reine, et elle perdit à le quitter.

1576. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) «  Mémoires de Gourville .  » pp. 359-379

Il voit souvent le feu de près, mais il ne s’y jette pas.

1577. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — II. (Suite et fin.) » pp. 341-361

Et s’emparant des bruits de guerre qui circulaient alors (1822), il finit par une image belliqueuse, et se demande « s’il est temps d’obéir aux moines et d’apprendre des oraisons, lorsqu’on nous couche en joue de près, à bout touchant, lorsqu’autour de nous toute l’Europe en armes fait l’exercice à feu, ses canons en batterie et la mèche allumée ».

1578. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Il semble aussi, dans ce feu roulant d’images, qu’on lise du Montaigne.

1579. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

Prenant les discours généraux que Buffon a mis en tête de quelques volumes de son Histoire naturelle, il les apprécie littérairement comme ferait un homme né sous l’étoile française de Malherbe, de Pascal et de Despréaux : « On est justement étonné, dit-il, de lire des discours de cent pages, écrits, depuis la première jusqu’à la dernière, toujours avec la même noblesse, avec le même feu, ornés du coloris le plus brillant et le plus vrai. » Ce n’était certes plus un étranger celui qui appréciait à ce point la convenance et la beauté continue du style.

1580. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Necker se trouve être tour à tour un tableau vivant, un ange, une substance chimique, un lion, un chasseur, une vestale, un Apollon, un pont majestueux, un chien d’Albanie, une montagne volcanique, une colonne de feu, un nuage, une glace, un foyer, une mine, l’animal qui donne le corail, un des génies des Arabes, etc.

1581. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — II. (Fin.) » pp. 350-370

Il était entre deux feux.

1582. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

Il rappelle plus d’une fois son généreux et plus confiant ami, M. de Suhm, à la réalité et à l’expérience : les Descartes, les Newton, les Leibniz peuvent venir et se succéder, sans qu’il y ait danger pour les passions humaines de perdre du terrain et de disparaître : « Selon toutes les apparences, on raisonnera toujours mieux dans le monde, mais la pratique n’en vaudra pas mieux pour cela. » Dans sa douce et studieuse retraite de Remusberg, regrettant l’ami absent : Il me semble, lui écrit-il (16 novembre 1736), il me semble que je vous revois au coin de mon feu, que je vous entends m’entretenir agréablement sur des sujets que nous ne comprenons pas trop tous deux, et qui cependant prennent un air de vraisemblance dans votre bouche.

1583. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Arnault, rendu à une entière indépendance par le départ et l’émigration de Monsieur, s’abandonna avec feu à sa verve tragique et littéraire, durant ces années orageuses dont sa jeunesse trompait de son mieux le péril et les atrocités ; il nous a tracé de cette époque, en ses Souvenirs, un tableau vrai, presque amusant, sans passion et sans colère ; il en a peint à merveille quelques-uns des acteurs principaux qu’il eut occasion de rencontrer.

1584. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

Que l’on relise la merveilleuse scène des Mémoires d’un seigneur russe, où le chasseur parvenu le soir à un taboun de bêtes, couché à quelque distance du feu, voit les flammes illuminer, au hasard de leur danse, le groupe de pâtres, les chevaux qui s’ébrouent, les chiens, les hautes herbes, tandis que le ciel déploie au-dessus sa voussure piquée d’étoiles, et que le murmure des légendes chuchotées vaguement lui parvient par lambeaux ; l’on aura là une représentation achevée de l’art de M. 

1585. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre II : Rapports de l’histoire de la philosophie avec la philosophie même »

Au lieu de deux classes d’hommes, les réprouvés et les élus, les uns dignes du salut éternel, les autres condamnés au feu dans ce monde et à l’enfer dans l’autre, nous ne voyons dans tous les philosophes de bonne foi, quels que soient leurs principes, que des frères en esprit.

1586. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre VI. Des Livres qui traitent de la Rhétorique. » pp. 294-329

Ses versions ressemblent aux belles copies de l’antiquité, qui font revivre dans un travail moderne le feu & l’esprit de l’original ancien.

1587. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Il faut avoir été sans feu ni lieu, Avoir eu des passants les réponses bourrues, Avoir dormi la nuit sur le pavé des rues, Et s’être demandé, quand on n’a plus le sou, Si l’on ne fera pas, le soir, un mauvais coup ! […] Peut-être de celle qui scintille au bas du ciel, et dont les feux changeants palpitent comme une prunelle de diamant. […] Mirelet la supplie, lui offre une voiture, de l’augmentation et même les diamants de feu Mme Mirelet : « Je ne complais te les donner qu’au bout de l’année, à cause de mon deuil… Mais tu les auras tout de suite si tu veux ». […] Aimer Dieu jusqu’à l’assassinat, et aimer une femme jusqu’à risquer la damnation, ce sont là, pour parler comme Molière, des « emplois de feu ». Et les emplois de feu demandent tout un homme.

1588. (1939) Réflexions sur la critique (2e éd.) pp. 7-263

Une Pentecôte, des langues de feu discontinues, foyer d’une parole et d’une musique qui sont plutôt qu’elles ne s’épanchent, n’est-ce pas ainsi que, d’après les dernières pages des Amitiés Françaises, d’après le Cheval ailé sur l’Acrocorinthe, vous imaginez son dernier livre, son testament ? […] » Croyons que le jour où cette élite intellectuelle que sont « les habitués du Théâtre Français » sera « éclairée », le reste du pays ne saura manquer d’emboîter le pas et d’allumer à ce noble feu sa chandelle qui est morte. […] Les grandes œuvres de Flaubert laissent apercevoir souvent dans la trame de leur style une nature verbale un peu courte et indigente, mise en culture et en valeur grâce à cette alliance d’un tempérament de feu et d’une volonté obstinée qu’on retrouve si souvent dans le caractère normand. […] On en a noté de brillantes, comme l’éblouissant feu d’artifice critique tiré par Rivarol devant Chênedollé. […] Lanson figure un homme dans le genre de feu Bertillon.

1589. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

Cet état d’esprit dans lequel on s’efforce de voir et où l’on croit voir, mais où l’on ne voit pas ; dans lequel on doit former des idées à l’aide d’aperceptions qui dupent et agacent la conscience à la façon des feux follets ou des vapeurs sur les marécages ; dans lequel on s’imagine percevoir entre des phénomènes nets et des ombres ambiguës et informes des rapports impossibles à suivre, — cet état d’esprit est ce que l’on nomme le mysticisme. […] Il parle alors, comme les mystiques allemands des xviie et xviiie  siècles, du « feu froid » de l’enfer et de la « lumière obscure » de Satan, ou il dit, comme le dégénéré de la 28e observation de Legrain, que « Dieu lui apparaît sous la forme d’ombres lumineuses77 », ou il remarque, comme un autre malade du même : « Vous m’avez procuré une soirée immuable78 ». […] Troie est à terre, la sublime Troie est en feu ! 

1590. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Mais la conversation d’un étourdi lui apprend que la marquise doit épouser le frère de feu son mari. […] Et je ne parle pas des objections du coin du feu, ni même de celles du couloir ou de l’escalier pendant l’entr’acte. […] Car l’honnête Sévérac en a eu bientôt assez de ses tempétueuses amours avec la comtesse de feu. […] Elle est plus forte que le fer, plus forte que le feu, celle qui est belle. » — « Couché sur une feuillée de myrtes, je veux boire… Comme la roue d’un char, la vie roule et fuit. […] Francisque Sarcey qui a ouvert le feu.

1591. (1889) Ægri somnia : pensées et caractères

L’avocat Faber est un grand orateur, soit : allez lui dire qu’il y a quelqu’un dans Paris qui n’en convient pas, un esprit chagrin, un jaloux, un pédant, qui ne goûte point le fiel distillé, ni la haine cadencée ; dites-lui que, pouvant un jour de grande séance l’entendre commodément d’une tribune réservée, sur le velours d’une banquette, ce délicat aima mieux rester chez lui, et lire au coin de son feu les pages où Quintilien commente la belle maxime de Caton : « L’orateur est un homme de bien, habile en l’art de parler7 » ; ou je connais bien mal le cœur humain, ou ce seul récalcitrant lui gâtera sa gloire. […] * Dans les Notes biographiques du feu duc de Broglie, je savoure le passage où, parlant des embarras du roi Louis-Philippe à son avènement, « il vivait, dit-il… tout à la disposition de la gent tapageuse et criarde des avocats et des légistes, dont chaque clique voulait mettre à son tour la main sur lui ». […] Je n’oublierai jamais une certaine séance où Berryer, arrivé au point le plus vif de son discours, l’œil en feu, la sueur au front, les lèvres gonflées et bleuâtres, dont une légère écume blanchissait les coins, sa parole roulant comme un flot qui ne connaît pas de rivage, on lui cria de tous les bancs, comme si l’on eût craint que son cœur ne se rompît : — Reposez-vous ! […] Est-il vrai que cette jeunesse et cette beauté, tu vas les exposer au feu d’un ennemi, qui a tant de canons que ses patrouilles même ne se hasardent pas sans artillerie ? […] En ce moment arrivait sur nous, en courant, les cheveux au vent, le visage en feu, le jeune frère de M. 

1592. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

En perdant trop long-tems notre ouvrage de vûë, nous perdrions aussi le goût et le feu qui nous le faisoit entreprendre ; et ce seroit à recommencer pour faire renaître en nous l’interêt que nous y prenions en le travaillant : le mal est que cette vivacité, cette chaleur ne sont pas à notre ordre : nous pouvons bien appeller de froides réflexions, mais non pas ce sentiment nécessaire pour échaufer notre imagination, sans laquelle le jugement n’a rien à faire en matiere de bel esprit. […] Et si proche du terme votre illustre inconstance est-elle encore si ferme, que ce reste de feu que j’avois crû si fort puisse dans quatre jours se promettre ma mort ? […] et ce reste de feu que j’avois crû si fort ? […] Je n’ai pas prétendu le faire raisonnable, je n’ai prétendu que le rendre imposant par cette sorte de présomption dont je me moquerai volontiers en philosophe, mais que je crois d’une grande ressource comme poëte : ajoûtez que cette présomption n’est pas sans prétexte : les espérances de Romulus sont appuyés sur des oracles : il se croit lui-même fils de Mars ; et le feu de la jeunesse, aussi-bien que le sentiment de sa propre valeur, augmente encore sa crédulité. […] Mais vous me faites un nouveau reproche ; et c’est ici que votre feu redouble ; je dirois presque votre colere, tant vous paroissez scandalisé de mon audace : mais la passion vous a un peu déguisé les choses.

1593. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Nous ne demandons pas, ô Seigneur, le secret Des forces inconnues menant les pluies étranges Et quel est le passant rêveur qui vient semer Le soir, des astres d’or dans les pailles des granges ; Qu’importe le retour alterné des saisons Et le passage des oiseaux dans les contrées Pourvu qu’un peu de feu brille dans les maisons Et que le grillon rie dans les herbes coupées, Qu’importe la naissance obscure des ruisseaux Et comment sourd la vie dans les forêts sacrées, Les chèvres danseront aux chansons des pipeaux Quand les pâtres enfants iront vers les vallées. […] La vue d’un homme qui s’apprête à boire, d’une femme qui sourit, d’une maisonnette qui s’égaye aux roses feux du jour, tout cela les enchante. […] C’est donc dans ce sens qu’il manqua de génie initial et de ce feu généreux, indispensable à tout poète.

1594. (1896) Le livre des masques

Occupé depuis vingt ans à forger un outil étrange et magique, il demeure dans une caverne de la montagne, martelant les fers rougis, radieux des reflets du feu, auréolé d’étincelles. […] Une belle dame passa… et il dit : Dame des lys amoureux et pâmés, Dame des lys languissants et fanés, Triste aux yeux de belladone — Dame d’un rêve de roses royales, Dame des sombres roses nuptiales, Frêle comme une madone — Dame de ciel et de ravissement, Dame d’extase et de renoncement, Chaste étoile très lointaine — Dame d’enfer, ton sourire farouche, Dame du diable, un baiser de ta bouche, C’est le feu des mauvaises fontaines Et je brûle si je te touche. […] Dans la grotte au vain bruit dont l’entrée est tout lierre, Sur la roche pointue aux chèvres familière, Sur le lac, sur l’étang, sur leurs tranquilles eaux, Sur les bords émaillés où plaignent les roseaux, Dans le cristal rompu des ruisselets obliques, Il aime à voir trembler tes feux mélancoliques.

1595. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Conduite de l’action dramatique. » pp. 110-232

Un héros, dans une tragédie, dit qu’il a essuyé une tempête, qu’il a vu périr son ami dans cet orage ; il touche, il intéresse, s’il parle avec douleur de sa perte, s’il est plus occupé de son ami que de tout le reste ; il ne touche point, il devient froid, s’il fait une description de la tempête, s’il parle de source de feux bouillonnants sur les eaux, et de la foudre qui gronde et qui frappe à sillons redoublés la terre et l’onde. […] On a proscrit également ces scènes, dans lesquelles un confident parle à une femme en faveur de l’amour d’un autre : c’est ce qu’on a reproché à Racine dans son Alexandre, où Ephestion paraît en Fidèle confident du beau feu de son maître. […] Un philosophe disserte contre le vice, un satirique le reprend aigrement, un orateur le combat avec feu ; la comédie l’attaque par des railleries, et elle réussit quelquefois mieux que les plus forts arguments.

1596. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Vous possédez le feu sacré, mais avec quels aromates le nourrirez-vous ?

1597. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — I. » pp. 88-109

Montaigne, en ses Essais, au chapitre xxxive , qui a pour titre : « D’un défaut de nos polices », avait dit : Feu mon père, homme, pour n’être aidé que de l’expérience et du naturel, d’un jugement bien net, m’a dit autrefois qu’il avait désiré mettre en train qu’il veut ès villes certain lieu désigné auquel ceux qui auraient besoin de quelque chose se pussent rendre et faire enregistrer leur affaire à un officier établi pour cet effet : comme « Je cherche à vendre des perles ; Je cherche des perles à vendre ; Tel veut compagnie pour aller à Paris ; Tel s’enquiert d’un serviteur de telle qualité ; Tel, d’un maître ; Tel demande un ouvrier ; Qui ceci, qui cela, chacun selon son besoin ».

1598. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Comme toute la jeunesse de son temps, et l’un des premiers, il prit feu au signal poétique donné par Du Bellay et par Ronsard, et il fit des sonnets dans leur genre.

1599. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — I. » pp. 235-256

  Quand je n’ai eu à combattre que des erreurs, je me suis senti tout de feu ; quand j’ai eu à combattre des passions, je me suis trouvé tout de glace.

1600. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

Ce beau feu céleste fait d’un savetier un poêle, et un général d’un laboureur comme Sforce ; et, en politique, d’un moine un Ximénès.

1601. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — II » pp. 454-475

Cet ouvrage n’a jamais été fait qu’en conversation et causée comme tant d’autres brillants projets de M. de Meilhan : il dépensait volontiers sa poudre en feux d’artifice.

1602. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

Souffle, véhémence, torrent, abondance, grandeur, feu et richesse, voilà les caractères continus de L’Iliade, que Pons ni La Motte ne soupçonnaient pas : On ne saurait dire, prétendait l’abbé de Pons, qu’une langue soit moins propre qu’une autre à la vraie peinture des pensées et des sentiments.

1603. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « François Villon, sa vie et ses œuvres, par M. Antoine Campaux » pp. 279-302

Campaux, surtout en un siècle où le sentiment de patrie était encore si peu commun ; il y avait un Français dans ce vagabond qui n’avait ni feu ni lieu. » Admirons moins : il faut bien que Villon, puisqu’il nous occupe, ait eu quelque chose en lui et qu’il soit quelquefois sorti de sa vie de taverne et de crapule ; sans quoi nous l’y laisserions tout entier.

1604. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La femme au XVIIIe siècle, par MM. Edmond et Jules de Goncourt. » pp. 2-30

Jean-Jacques, au milieu du siècle, fut comme un météore qui mit en feu la tête et le cœur des femmes et qui alluma leur imagination ; il y eut, non pas une, mais plusieurs générations de ces admiratrices enthousiastes de Jean-Jacques.

1605. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc (suite et fin.) »

Monteil avait ouvert la voie, dans son Histoire des Français des divers états aux cinq derniers siècles ; on avait alors pour source presque unique d’informations le musée des Petits-Augustins formé à si grand’peine par Alexandre Lenoir et trop brusquement dissipé, le musée de Cluny fondé par feu Dusommerard, et si augmenté depuis, si bien dirigé par son fils.

1606. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

» Pour elle, elle était animée, riante ; le feu sacré brillait dans ses yeux.

1607. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Joséphine de Saxe dauphine de France. (Suite et fin.) »

La demande solennelle de mariage, faite à Dresde le 7 janvier 1747 par les deux ambassadeurs extraordinaire et ordinaire, le duc de Richelieu et le marquis des Issarts, fut suivie du mariage par procuration le 10, et de fêtes, feux d’artifice, concerts et galas, dont le détail nous est donné dans ce volume.

1608. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. » p. 232

Pour nos cœurs de feu, c’est froid.

1609. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [II] »

Il faisait un temps affreux ; la neige tombait abondamment jusqu’à voiler le champ de bataille et à faire ressortir les feux des troupes comme des éclairs dans une nuit d’orage.

1610. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

Cette Réplique au général Stuart, si l’on y joint un deuxième Appendice publié plus tard en réponse à des attaques allemandes, faites au nom du général Toll (car Jomini passa sa vie au moral entre deux feux), définit parfaitement son rôle à l’armée des Alliés en 1813.

1611. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

La poétique de Du Bellay peut être considérée, en ce sens, comme une machine un peu mécanique et artificielle, animée pourtant d’un beau feu et panachée d’une belle flamme : elle aida puissamment à déblayer le terrain, à faire le champ net et à remettre la langue et la littérature dans une large voie classique, régulière, dans une direction qui, en définitive, n’a pas si mal abouti.

1612. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [II] »

Du Bellay nous offre là en quelque sorte l’idée d’un Racine anticipé, l’idée véritablement d’un Virgile français né et nourri exprès pour rivaliser de son mieux avec cet admirable prince des poètes ; et il arrive au juste conseil, au conseil fécond et opportun, s’il avait pu se suivre et s’appliquer avec feu, avec tact et maturité : « Choisis-moi (dans notre histoire) quelqu’un de ces beaux vieux romans françois comme un Lancelot, un Tristan ou autres, et fais-en renaître au monde une admirable Iliade ou une laborieuse Énéide. » On voit (et je reviens ici au reproche de M. 

1613. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Tout s’embrasa, se tordit, se fondit intimement dans son être au feu vulcanien des passions, sous le soleil de canicule de la plus âpre jeunesse, et il en sortit cette nature d’un alliage mystérieux, où la lave bouillonne sous le granit, cette armure brûlante et solide, à la poignée éblouissante de perles, à la lame brune et sombre, vraie armure de géant trempée aux lacs volcaniques.

1614. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

Mais que pour cette fois ce soit une belle âme, Tendre et douce à l’amour, et légère à guider, Qui de jeunes baisers rafraîchisse ma flamme, Me couvre de son aile et me sache garder ; Qui des rayons de feu que lance ma paupière Réfléchisse en ses pleurs la tremblante clarté, Et, sans orage au ciel, sans trop vive lumière, Se lève sur le soir de mon rapide été !

1615. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

Guizot, épuisé, l’œil en feu, descendait de la tribune, tout prêt, s’il le fallait, à y remonter encore.

1616. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DE BARANTE. » pp. 31-61

Que le Charles XII d’alors se précipite fatalement par ses fautes, que Louis XI s’éteigne à petit feu dans ses hypocrites intrigues, l’historien saura faire entendre le jugement des peuples sur leur tombe.

1617. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Pierre Corneille »

Quoi que je m’en promette, ils n’en ont rien à craindre : C’est le dernier éclat d’un feu prêt à s’éteindre ; Sur le point d’expirer, il tâche d’éblouir, Et ne frappe les yeux que pour s’évanouir.

1618. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) » pp. 129-176

Des mots entrecoupés de ses dernières pages le révèlent : à son enfant, à son mari, vieillard accoutumé à cet appui et incapable de faire un pas de plus dans la vie sans elle ; à sa jeunesse vainement altérée d’amour, consumée dans le feu des ambitions politiques ; à ces amis dont l’image la poursuivait et lui faisait seule regretter la vie s’ils vivaient encore, aspirer à la mort s’ils l’avaient devancée dans l’éternité.

1619. (1892) Boileau « Chapitre II. La poésie de Boileau » pp. 44-72

Le feu du poète s’éteint et se rallume.

1620. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Il n’a même pas beaucoup de couleur, sinon dans les sujets où l’imagination espagnole jette encore ses feux à travers le langage raisonnable de l’auteur français.

1621. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7761-7767

Il faut donc mettre des contrastes dans les attitudes, sur-tout dans les ouvrages de Sculpture, qui naturellement froide, ne peut mettre de feu que par la force du contraste & de la situation.

1622. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Goethe et de Bettina, traduites de l’allemand par Sébastien Albin. (2 vol. in-8º — 1843.) » pp. 330-352

La digne Mme de Goethe, qui a en elle le sentiment du réel et le bon sens, a compris tout d’abord que cet amour de la jeune fille pour son fils ne tirait pas à conséquence, que cette flamme, ce feu de fusée, ne brûlerait personne.

1623. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Mme de Caylus n’était qu’un peintre vrai, et qui ne pouvait s’empêcher, même en courant, de saisir les objets au vif, que l’objet fût Mlle de Jarnac avec sa laideur dans un si beau jour, ou que ce fût cette ravissante Mme de Lowœnstein, avec sa « taille de nymphe qu’un ruban couleur de feu relevait encore ».

1624. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

Ouvrez les prisons à ces feux cent mille citoyens que vous appelez suspects… De tels cris rachètent beaucoup, surtout quand on les profère tout haut et tout seul, au milieu de cette insensibilité stupide de la foule et de cette sécurité dénaturée qu’il flétrit énergiquement et par un mot, cette fois, vraiment digne de Tacite.

1625. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame Émile de Girardin. (Poésies. — Élégies. — Napoline. — Cléopâtre. — Lettres parisiennes, etc., etc.) » pp. 384-406

Le grand moment est celui du troisième acte, lorsque Cléopâtre, saisie d’un sentiment de jalousie et de remords à la vue de ce qu’elle croit le bonheur de la chaste Octavie, s’en prend à cette nature de feu qui l’a égarée, et lance son apostrophe au soleil d’Afrique, sa longue invective en l’honneur de la vertu.

1626. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame de La Vallière. » pp. 451-473

Deux ou trois passages dénotent seulement une expression assez figurée et assez vive : Il est vrai, Seigneur, que si l’oraison d’une carmélite qui est retirée dans la solitude, et qui n’a plus qu’à se remplir de vous, est comme une douce cassolette qu’il ne faut qu’approcher du feu pour rendre une odeur très suave, celle d’une pauvre créature qui est encore attachée à la terre, et qui ne fait proprement que ramper dans le chemin de la vertu, est comme ces eaux bourbeuses qu’il faut distiller peu à peu pour en tirer une utile liqueur.

1627. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

Depuis cette courte entrevue, où l’on dirait que leur passion épuisa son dernier feu, il ne paraît plus que ni l’un ni l’autre se soient crus obligés à une constance plus prolongée et plus opiniâtre.

1628. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Or, ce fabliau, le voici : Un jour, Dieu permit, dans ses desseins, que l’élément de vie, le feu, se retirât tout à coup de l’air, et vînt à manquer à la nature.

1629. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

C’est sur cette question de guerre qu’il tournera bientôt et qu’il ouvrira son feu contre le ministère Périer, du 13 mars (1831), qu’il qualifiera le « ministère de la paix à tout prix ».

1630. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

Mais bientôt, si l’on remontait à la source, on s’apercevait que la lettre n’était point adressée à un duc et pair, et Beaumarchais en convenait lui-même, ce qui rabattait fort de la hardiesse et de l’insolence ; elle était tout simplement adressée au président Dupaty, ami de l’auteur, et écrite « dans le premier feu d’un léger mécontentement ».

1631. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Mémoires de Daniel de Cosnac, archevêque d’Aix. (2 vol. in 8º. — 1852.) » pp. 283-304

Si Monsieur a paru un jour plus enhardi et disposé à en parler au roi, le lendemain il se trouve tout dégoûté sur ce qu’on lui a dit qu’il y a près de Naples une montagne de feu qui rend cette ville sujette aux tremblements de terre.

1632. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — I. » pp. 389-410

Les terreurs que les deux femmes qui l’élevaient contradictoirement mêlaient à l’envi aux contes du coin du feu paraissent lui en a oir ôté tout le charme, et on ne voit jamais trace chez lui d’un tendre regard en arrière vers les années de son enfance.

1633. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Histoire » pp. 179-240

le feu, la révolution, les épiciers ont fait nos documents bien rares.

1634. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1881 » pp. 132-169

Et ma pensée de ce jour va à notre passé, et aussi à sa fille, que je revois, au moment où elle venait de naître, en sa nudité embryonnaire, devant le feu de cheminée de sa mère.

1635. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre I. Shakespeare — Son génie »

C’était Voltaire qui en France avait commencé le feu contre ce barbare.

1636. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre II. Shakespeare — Son œuvre. Les points culminants »

Hésiode vient de mourir, Homère, s’il vit encore, a cent ans, Lycurgue, voyageur pensif, rentre à Sparte, et l’on aperçoit au fond de la sombre nuée de l’Orient le char de feu qui emporte Élie ; c’est dans ce moment-là que Léir — Lear — vit et règne sur les îles ténébreuses.

1637. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

Un jeune homme de vingt ans fait cette action héroïque d’épouser une belle jeune fille ; on lui dresse des arcs de triomphe, on vient le voir par curiosité, on lui envoie le grand-cordon comme le lendemain d’une bataille, on couvre les places publiques de feux d’artifice, des gens qui pourraient avoir des barbes blanches mettent des perruques pour venir le haranguer presque à genoux, on jette en l’air des millions sterling en fusées et en pétards aux applaudissements d’une multitude en haillons, qui ne mangera pas demain ; le Lancashire affamé fait pendant à la noce ; on s’extasie, on tire le canon, on sonne les cloches, Rule, Britannia !

1638. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Introduction »

Elle n’a passé à l’état définitif de vérité que lorsqu’elle a traversé saine et sauve le feu de la discussion.

1639. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vien » pp. 74-89

Si au milieu d’une représentation par exemple, le feu prend à la salle ; alors chacun songeant à son salut, le préférant ou le sacrifiant au salut d’un autre, toutes ces figures, le moment précédant attentives, isolées et tranquilles s’agiteront, se précipiteront les unes sur les autres, les femmes s’évanouiront entre les bras de leurs amants ou de leurs époux ; des filles secoureront leurs mères, ou seront secourues par leurs pères, d’autres se précipiteront des loges dans le parterre où je vois des bras tendus pour les recevoir, il y aura des hommes tués, étouffés, foulés aux pieds, une infinité d’incidents et de grouppes divers.

1640. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Le Prince » pp. 206-220

Sa touche est lourde, sa manière de faire est pénible et heurtée ; dans ses paysages, les feuilles des arbres sont pesantes, matérielles, et faites sans ragoût, sans verve ; il n’y a pas dans tout ce qu’il a exposé une étincelle de feu, bien moins un trait de verve.

1641. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « X. M. Nettement » pp. 239-265

Le dard de sa flèche ressemble un peu trop aux plumes dont elle est empennée… Polémiste par habitude et par situation plus que par la nature de son intelligence, c’est en vain qu’il a été rompu à ces luttes incessantes du journalisme qui donnent à l’esprit tant de fil et tant de trempe, et l’assouplissent et l’affermissent comme une épée dont on passerait la lame au feu.

1642. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Sainte-Beuve. Les Poésies de Joseph Delorme, Les Consolations, les Pensées d’août. »

On pourrait s’étourdir, — mais aux pires instants L’immortelle pensée, aux sillons éclatants, Comme un feu des marais jaillit de cette fange, Et remplissant nos yeux nous éclaire… et se venge !

1643. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’art et la sexualité »

Cette conception malheureuse, qui prétend abstraire la poésie de l’homme et du monde en général, me semble jeter ses derniers feux ; mais néanmoins, une part importante — je veux dire relativement étendue — de la production artistique récente dénote une ardente propension aux voluptés solitaires, aux jouissances exclusivement individuelles.

1644. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Elle a préparé la société parisienne de la Restauration, les premiers feux du romantisme, les formes les plus délicates du libéralisme intellectuel et de l’intelligence esthétique, l’Europe paisible, concordante, tolérante et cultivée des années 1815-1848. […] S’il reste des discours de Robespierre, il ne reste de Danton que des mouvements, des phrases, des cris, du feu, les plus beaux de la Révolution. […] L’homme est là, gourmande, invective ou loue, dit sur tout son mot, qui est souvent un trait de feu. […] Schiller disait qu’il y trouvait plus de lueurs que de clartés, et nous ajouterons que ce feu comporte plus encore de force motrice que de lueurs. […] Déduire, inventer, tirer ses feux d’artifices, tout ce métier d’écrire qu’il a découvert à quarante ans, l’amuse.

1645. (1888) Portraits de maîtres

À la molle clarté de la voûte sereine Nous chanterons ensemble assis sous le jasmin Jusqu’à l’heure où la lune en glissant sur Misène Se perd en pâlissant dans les feux du matin. […] Comment se fait-il que tant de manuscrits achevés aient été jetés au feu ? […] Sans quoi l’Enseignement Supérieur risquerait d’anéantir le feu de Vesta que les grands professeurs de 1820 et de 1847 ont si religieusement entretenu. […] L’eau est rare, le feu presque inconnu. » Alors la fibre plaintive s’éveille chez l’historien-poète, et la pitié, cette inspiratrice de ses plus belles pages, suscite ces élans, ces attendrissements, ces effusions soudaines qui nous ravissent dans l’œuvre de Michelet. […] à aucun moment, pas même au lendemain de Sadowa ; La France aveuglée n’a lu ni compris ces pages sibyllines, révélatrices d’un sombre avenir, qu’aux lueurs des incendies de Bazeilles, aux feux des bivouacs allemands campés sur le sol natal.

1646. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Ce cardinal avait alors cinquante ans ; il était petit de taille ; ses yeux brillaient, animés d’un feu ardent et sombre qui faisait trembler les pécheurs ; ses cheveux encore tout noirs donnaient aux traits de son visage, déjà vieilli, quelque chose de plus viril et de plus dur. […] « Le saint homme qui regardait ces choses, demandant la cause de cette horrible damnation, et surtout pourquoi était puni ce comte, son contemporain, qui avait vécu avec tant de justice, de décence et de probité, une voix répondit : À cause d’un domaine de l’église de Metz, qu’un de leurs ancêtres, dont celui-ci est l’héritier au dixième degré, avait enlevé au bienheureux Étienne, tous ceux-ci ont été dévoués au même supplice ; et, comme le même péché d’avarice les avait réunis dans la même faute, ainsi le même supplice les a rassemblés pour les feux de l’enfer. » Eh bien ! […] Tant que le guerrier troubadour a été sous le feu de sa passion, il a été poëte ; mais ce génie habile, cet art profond, cette science surtout d’avoir longtemps du talent, il ne semble pas qu’elle leur ait été donnée. […] Comme il me serait facile, aidé du Journal des Savants, de remonter jusqu’à l’époque antérieure à Mahomet, jusqu’aux sept poëmes suspendus dans le temple de la Mecque ; puis de retracer cet instinct poétique des Arabes, cette vie pastorale toujours la même dans l’immense étendue du désert, cette imagination colorée des feux du soleil, et qui reproduit, sans se lasser jamais, les trésors d’une nature si riche, et trouve d’inépuisables expressions pour peindre une gazelle ou un orage ! […] Dans le feu de l’abîme, Rome, vous avez votre place.

1647. (1910) Propos littéraires. Cinquième série

Le malheur, peut-être, c’est que les Discours sur l’homme manquent un peu de feu et manquent un peu d’éclat. […] C’était comme un tourbillon de fer, et surtout de feu. […] Comme il y en a qui sont nées pour jeter de l’huile sur le feu, elle était née pour en mettre dans les rouages et c’était une huile parfumée et d’essence fine. […] Ce qui est incontestable, c’est que ce fut Quinet qui mit le feu aux poudres. […] Elle arrive souvent, profondément émue et voyant les cieux ouverts, devant un quinquagénaire dépouillé et rhumatisant au coin de son feu.

1648. (1923) Au service de la déesse

Charpentier, plus un ami du neveu, étaient assis l’un et l’autre devant un grand feu. […] Ce qui leur restait de force, ils l’employaient à plonger la main dans les sacs et à en tirer des papiers qu’ils jetaient au feu par poignées. […] Charpentier qui n’avaient pas été jetés au feu. […] C’était, dit Chapelain, « un esprit tout de feu qui se jetait à tout ». […] … Ce qui m’étonne encore dans la vie des héros de l’Iliade, c’est de voir Achille faire la cuisine et Patrocle lui servir de premier garçon : ils mettent la broche au feu, ils fricassent, ils font les sauces !

1649. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

Hugo est plein de feu, de sang et de larmes. […] Dans ces heures-là, heures d’humaine détente ou d’humaine détresse, est-ce que, ayant à me juger, vous m’eussiez envoyé, vous, au feu éternel ?

1650. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

Dans cet homme, à qui Bossuet trouve de l’esprit à faire peur, vous n’en surprenez jamais l’affectation : c’est ce feu qui, au dire de Saint-Simon, sortait de ses yeux comme un torrent. […] Son Neptune et son Eole « aux sourcils épais et pendants, aux yeux pleins d’un feu sombre et austère », ne sont que des figures rébarbatives.

1651. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1875 » pp. 172-248

C’est sur la toile le feu d’artifice du bibelot. […] La chambrière maîtrisée fait obtenir un rendez-vous à d’Artagnan, mais au moment de ce rendez-vous, le ressentiment de la victime, soudainement enragée de vengeance, le laisse, en hiver, vingt-quatre heures sans feu et sans nourriture dans le froid glacial d’un cabinet, au sortir duquel la duchesse lui ouvrant les bras, le rejette bientôt hors du lit, d’un coup de pied.

1652. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Et de cet incendie, il saute à un incendie aux environs de Londres, où sa femme ne se sauva qu’en sautant par la fenêtre, où une femme de chambre fut brûlée, où tout fut anéanti, sauf un coffret de fer à bijoux, qu’on retira du feu tout rouge. […] Dimanche 10 décembre Ce soir, on affirmait sérieusement chez Daudet, qu’un populo assistant par hasard à la Chambre, et qui était blessé, avait cru, dans le premier moment, à un feu d’artifice, qu’on avait l’habitude de tirer, dans l’intérieur du Palais-Bourbon, après un discours remarquable.

1653. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

Toute cette première partie est dominée par une scène très simple, impossible à rendre au théâtre : nous voulons parler de cette soirée où les contrebandiers poursuivis, après avoir achevé eux-mêmes un des leurs, s’arrêtent dans un hallier épuisés de faim et de fatigue ; quelques-uns d’entre eux, tirant un paquet de cartes, jouent à la lueur d’un feu qu’ils allument. « Pendant ce temps-là, moi, j’étais couché, regardant les étoiles, pensant au Remendado (l’homme massacré) et me disant que j’aimerais autant être à sa place. […] Rappelons la dernière allumette, l’unique grain de blé, le diamant se réduisant en poudre, la glace produisant le feu après être devenue une lentille reflétant les rayons du soleil.

1654. (1902) Les poètes et leur poète. L’Ermitage pp. 81-146

— Hugo, c’est la terre orgueilleuse de la force du tigre et du rhinocéros ; c’est la terre enivrée qui jette au pied des montagnes les grappes violettes de raisins et les roses de pourpre et de feu ; c’est la terre qui montre triomphante au soleil ses bosquets d’orangers, ses champs d’épis, et le splendide désordre de ses forêts où s’entrecroisent des lianes, où des arbres puissants abritent la grâce du colibri et le prudent sommeil du serpent : Hugo c’est la beauté de la Terre, mais Lamartine chante comme un ange exilé : je donne ma voix à Lamartine. […] Moi qui l’enfouissais en moi comme un trésor, J’irai cueillir l’écume en fleur des Pacifiques, Et le givre nouveau sur des sommets magiques, Et la poussière en feu sur le brasier des bois, Et les rubis de lave aux antres de l’effroi, Puis quand le jour doré fond dans la nuit d’opale, Mêlant tous ces joyaux aux premières étoilés Sur le fronton d’argent du ciel immaculé.

1655. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

Il lui suffirait de sentir qu’elle se laisse pénétrer, sans que sa personnalité s’y absorbe, par un être qui peut immensément plus qu’elle, comme le fer par le feu qui le rougit. […] On pourrait même se demander si ces enseignements abstraits ne sont pas à l’origine du mysticisme, et si celui-ci a jamais fait autre chose que repasser sur la lettre du dogme pour le tracer cette fois en caractères de feu.

1656. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

Je fume aussi. » À ces mots elle se leva, prit sur la table une boîte en argent, en tira des cigarettes qu’elle offrit à ses visiteurs, sonna, demanda du feu, et un domestique qui avait la poitrine couverte d’un large gilet rouge apporta une bougie. […] « Pardonnez-moi, Viéra, dit Boris, en faisant un effort sur lui-même pour ramener l’entretien… J’ai eu tort… Je n’aurais pas dû si subitement… Mais je cherchais une occasion, et puisque je l’ai trouvée, je voudrais savoir ce que je puis…. » Viéra l’écoutait les yeux baissés et le visage en feu. […] Cinq minutes après, Guérassime apparut portant une énorme charge de bois ; car, en été comme en hiver, la veuve voulait qu’il y eût du feu dans sa chambre à coucher et dans son cabinet.

1657. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

Privé de ses adjuvants naturels, l’acteur et le public, le théâtre fera long feu : il est rentré dans la littérature et ne l’enrichit pas beaucoup. […] En lui collaborent secrètement avant de collaborer en plein feu, l’auteur, l’acteur et le public. […] Or, la première de ses pièces qui verra le feu de la rampe ne le verra qu’en 1847.

1658. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « L’obligation morale »

Quiconque s’exerce à la composition littéraire a pu constater la différence entre l’intelligence laissée à elle-même et celle que consume de son feu l’émotion originale et unique, née d’une coïncidence entre l’auteur et son sujet, c’est-à-dire d’une intuition. […] Justement parce que nous nous trouvons devant la cendre d’une émotion éteinte, et que la puissance propulsive de cette émotion venait du feu qu’elle portait en elle, les formules qui sont restées seraient généralement incapables d’ébranler notre volonté si les formules plus anciennes, exprimant des exigences fondamentales de la vie sociale, ne leur communiquaient par contagion quelque chose de leur caractère obligatoire. […] Mais remuons la cendre ; nous trouverons des parties encore chaudes, et finalement jaillira l’étincelle ; le feu pourra se rallumer, et, s’il se rallume, il gagnera de proche en proche.

1659. (1926) La poésie pure. Éclaircissements pp. 9-166

Le vers, convenable, mais tout narratif de Stace, … solatur lacrymas : qualis berecynthia mater… s’empourpre, dès que notre Joachim s’en empare, de tous les feux du soleil couchant : telle que sur son char la bérécynthienne… attendons enfin que les philosophes de la poésie-raison nous expliquent, d’abord, pourquoi le vers de Malherbe, et les fruits passeront la promesse des fleurs est un des quatre ou cinq miracles de la poésie française, ensuite, comme il se fait qu’on ne puisse toucher à la moindre lettre de ce vers sans le dégrader tout entier. […] Comme j’aurais aimé recevoir des confidences sur l’obscur état lyrique de nos prodigieux artistes du feu dans le plein de leur enfantement ! […] -" roi, dans les nuits d’hiver, alors qu’autour d’un grand feu, toi et tes compagnons vous êtes attablés, il arrive parfois qu’un passereau égaré, entre par une ouverture, traverse la table et ressort à l’autre bout.

1660. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7172-17709

Virgile a dit qu’Enée ralluma des feux presque éteints, sopitos suscitat ignes (Æn. […] Mais quand, pour dire qu’Enée ralluma sur l’autel d’Hercule le feu presque éteint, Virgile s’exprime en ces termes, Æn.

1661. (1886) Le naturalisme

Du feu sacré si le ciel est avare, Va les ravir d’un vol audacieux ; Vole, jeune homme… Oui, souviens-toi d’Icare : Il est tombé; mais il a vu les cieux ! […] Devant les vitrines de minéralogie, essayant de voler la Nature, de ravir et d’emporter les feux multicolores de ces pétrifications et de ces cristallisations d’éclairs, il s’arrêtait à ces bleus d’azurite, d’un bleu d’émail chinois, à ces bleus défaillants des cuivres oxydés, au bleu céleste de la lazulite allant du bleu de roi au bleu de l’eau. […] Ensuite il va au théâtre ou passe la soirée au coin du feu. […] Son style inégal ressemblait à ces visages aux traits irréguliers, qui compensent le défaut de correction par la lueur soudaine du sourire ou par le feu du regard.

1662. (1925) Portraits et souvenirs

Le feu. et la lampe brillaient doucement ; on causait, avec des pauses. […] Pourquoi ces feux follets de vanité gâtaient-ils donc ainsi le soir de cette noble vie d’écrivain ? […] Je revois José-Maria de Heredia au coin d’un de ces premiers feux d’automne qui égaient les soirées déjà longues et déjà refroidies. […] En bas du tableau, vingt seigneurs tolédans, la golile au cou, assistent avec de hautes mines revêches et graves à la mise au linceul du feu Comte, tandis qu’au-dessus d’eux le cadavre nu du défunt reçoit audience de la Cour céleste.

1663. (1925) Proses datées

C’était bien le Whistler légendaire, l’artiste au pinceau subtil, aux réparties cruelles, le Whistler du Gentil Art de se faire des ennemis, le Whistler des portraits, des « harmonies », des « nocturnes », des feux d’artifice, des eaux-fortes de Londres et de Venise, le Whistler de la Tamise et de la Lagune, le grand et mystérieux Whistler, le mondain impertinent qui mettait au service de son art admirable du dessin et de la couleur un savoir-faire tout américain, dont l’orgueil se voilait d’humour anglais, d’ironie française et de blague parisienne. […] Bientôt, l’ardeur du feu commença à incommoder Mallarmé ; mais, chaque fois qu’il faisait mine de bouger, Whistler, d’un geste impérieux, le retenait à sa place, si bien que, le croquis terminé, quand Mallarmé put enfin s’éloigner du foyer, il avait les mollets littéralement « grillés », mais cette « grillade » lui valut un petit chef-d’œuvre d’expression et de facture. […]   Porteuse du feu sacré, Judith Gautier était comme la prêtresse du Dieu et en rendait témoignage devant nous. […] Les bêtes féroces rôdaient autour des feux qu’ils allumant pour s’en préserver. […] Votre pétillante sensibilité savait prendre feu à l’occasion.

1664. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

Je regardais la cheminée, où brillaient des cuivres, et je me souvins d’une visite d’hiver avec « la Chérie » pendant laquelle trépignant et criant, j’avais voulu à toute force m’asseoir dans le feu. […] Aux premières lignes, je tâchais bien de m’appliquer, d’écrire un peu moins gros et plus droit, mais le feu de l’inspiration m’entraînait vite, et c’était très vilain à l’œil, ces lettres, qui ne finissaient pas de sécher, et que je fermais, en poussant un gros soupir, à la fois résigné et navré… XLI Quand les sorties n’étaient que de quelques jours, je passais chez mon père, chez ma grand-mère ou même chez Carlotta Grisi, ces courtes vacances. […] Aussitôt arrivée passage Saulnier, ma grand-mère me faisait asseoir sur une petite chaise auprès du feu (c’était le plus souvent en hiver) et me donnait à lire un livre très ennuyeux, pour me faire tenir tranquille, disait-elle. […] Était-ce le feu ? […] tombe à flots, pluie Dans mon palais tout noir de suie Je ris de la pluie et du vent : En attendant que l’hiver fuie, Je reste au coin du feu, rêvant.

1665. (1900) Molière pp. -283

Nous n’accepterons pas ces mauvais discours sur Elmire ; mais je la prendrai dans la scène capitale où les commentateurs la vantent, celle où elle met Orgon sous la table pour écouter la déclaration de Tartuffe ; elle le fait avec un sang-froid que les soldats n’ont sous le feu que quand ils ont déjà assisté à plus d’une bataille. […] Au milieu des fêtes splendides de Versailles données en l’honneur de mademoiselle de la Vallière, qui en était secrètement l’héroïne ; il y eut trois journées de réjouissances, de feux d’artifices, de pièces mythologiques, de ballets où tout ce qu’il y avait de brillant à la cour et le roi lui-même parurent travestis ; et c’est après ces longs enchantements que la toile se leva sur le théâtre de Molière, et qu’on vit paraître le bonhomme Orgon avec ses maximes tristes, et son engouement trivial pour Tartuffe, sa femme bâillant et ennuyée et sa maison sens dessus dessous. […] Ce spectre qui est le moteur principal, cette statue du commandeur qui vient souper chez Dom Juan, qui l’emmène souper avec lui et l’entraîne au feu de l’Enfer, tout cela ne se combinait pas d’une manière aisément acceptable avec l’élément comique. […] C’est de cet usage que sont nés ces singuliers chevaliers dont le théâtre de Dancourt est rempli ; c’est de cet usage que sont nés aussi tous ces petits abbés du xviiie  siècle, qui, après que les roués de la Régence eurent mis l’athéisme et le libertinage à la mode, ne pouvaient pas faire un souper sans blasphémer, et dont Gilbert s’est si violemment moqué dans sa Satire du xviiie  siècle, où, en parlant d’un de ces derniers, il a dit : Dans un cercle brillant de nymphes fortunées, Entends ce jeune abbé, sophiste bel esprit ; Monsieur fait le procès au Dieu qui le nourrit, Monsieur trouve plaisants les feux du purgatoire ; Et, pour mieux amuser son galant auditoire, Mêle aux tendres propos des blasphèmes charmants, Lui prêche de l’amour les doux égarements, Traite la piété d’aveugle fanatisme, Et donne, en se jouant, des leçons d’athéisme. […] Au-dessus de nos têtes, entre eux et moi, une muse flottait, invisible et transparente sous son éther, semant le feu poétique qui allume les âmes et qui les transporte ou les tient au niveau des hauts et profonds poètes ou des poètes dégagés, qui nous met à l’unisson de leurs grandes paroles, de leurs jeux et de leurs ris, qui nous fait créer à nouveau les belles œuvres dans les moments que nous les lisons, les sentons et les expliquons. » ……………………………………………………………………… G. 

1666. (1889) Les artistes littéraires : études sur le XIXe siècle

Ce n’était pas le contact du monde, puisque je ne l’avais pas vu ; ni le feu des passions, puisque je transissais sous la sueur glacée qui suintait de ces murailles33. » Et ce n’était en effet aucune de ces causes particulières quelconques par lesquelles il est toujours trop facile d’expliquer certains états mentaux, presque universels à certains moments historiques. […] Nous voulons, tant ce feu nous brûle le cerveau, Plonger au fond du gouffre, Enfer ou Ciel, qu’importe ? […] En tout cas, l’indication de ce lugubre penchant reparaît à peu près identique chez les romanciers slaves, et une page des confidences de Tolstoï l’étale avec une effrayante précision de termes : « Je comprends très bien les crimes les plus atroces, commis sans but, sans désir de nuire, comme cela, par curiosité, par besoin inconscient d’action… Je comprends l’enfant inexpérimenté qui, sans hésitation, sans peur, avec un sourire, allume et souffle le feu sous sa propre maison où dorment ses frères, son père, sa mère, tous ceux qu’il aime tendrement. […] Un de mes amis, — raconte Baudelaire, — le plus inoffensif rêveur qui ait existé, a mis une fois le feu à une forêt, pour voir, disait-il, si le feu prenait avec autant de facilité qu’on l’affirme généralement. […] Autrefois peut-être, diront-ils, il y a eu des gens assez forts pour tirer d’eux-mêmes la fièvre de leur œuvre ; de ces hommes, véritables microcosmes, portant tout en eux, et dont le feu était un feu divin, brûlant de soi, sans que rien du dehors ne le nourrît et ne l’avivât.

1667. (1924) Critiques et romanciers

« Exemples dramatiques, bonheurs exaltés, châtiments horribles venaient à l’appui des explications du catéchisme… » Pendant les jours de la retraite, on cite à Sébastien l’histoire d’un enfant impie que les chiens ont dévoré, d’un autre que la vengeance divine a précipité d’une falaise dans la mer, et de bien d’autres qui désormais brûlent aux feux de Satan. […] Ce n’est que l’histoire, une histoire à peine, d’un gamin sans feu ni lieu, qui s’approche d’un troupeau, d’une maison, pour être moins seul, et qui s’approche de vous, sur la route, chemine avec vous, non comme un petit mendiant, mais comme un petit compagnon. […] Les vitres qui éclatent, la fumée qui monte, les craquements, les effondrements ; et Tito de crier : « Le palais Vallarciero est en feu !  […] Ensuite, aux premiers feux de l’été, se répand une contagion sur les bords limoneux du Motterone ; chaque jour, les cloches sonnent des trépas : et Giulietta meurt. […] Cela flamboie aux feux du gaz, des lanternes vénitiennes, s’éclaire de lueurs multicolores. » Mais oui !

1668. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — II. (Suite.) » pp. 346-370

J’ajouterai qu’ils ne s’amusent pas à traiter tant de sujets littéraires purement agréables et désintéressés, et à les traiter avec feu, avec nouveauté, au risque de déplaire à plusieurs.

1669. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure »

Ses amis disaient que c’était une calomnie ; mais feu Madame la Dauphine (la duchesse de Bourgogne), qui en était bien informée et qui avait une lettre de ce commerce, assura la Cour de la vérité de l’histoire, et on en fit des chansons qui ont passé avec le temps.

1670. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

Les Lettres d’un Drapier, — un chef-d’œuvre, soit dit en passant, — mirent l’Irlande en feu, et le Gouvernement fut forcé de retirer le privilège donné à Wood.

1671. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres mêlées de Saint-Évremond »

Le couplet n’a rien que d’ordinaire : Ninon, passe tes jours en jeu ; Cours toujours où l’amour te porte ; Le prédicateur qui t’exhorte, S’il était auprès de ton feu.

1672. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

Pas plus que je ne décernerais l’éloge d’admirables à quelques spirituels apologues de feu M.

1673. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Mais il y revint bien autre qu’il n’y était d’abord : « Un savant homme, a-t-il dit quelque part, qui essuie la censure d’un ennemi redoutable, ne tire jamais si bien son épingle du jeu qu’il n’y laisse quelque chose. » Bayle laissa dans cette première école qu’il fit tout son feu de croyance, tout son aiguillon de prosélytisme ; à partir de ce moment, il ne lui en resta plus.

1674. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

Mais le Rapport n’a point fait cela : le Rapport a pris fait et cause pour une pétition ; il a pris feu ; il a accepté une liste dénoncée, telle quelle, il l’a produite, il l'a mise à son compte, — au compte du Sénat ; il l’a jugée et condamnée en masse ; il n’a apporté aucune réserve, aucun adoucissement, que dis-je ?

1675. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Il faut exister seul, pour conserver dans sa pensée le modèle de tout ce qui est grand et beau, pour garder dans son sein le feu sacré d’un enthousiasme véritable, et l’image de la vertu, telle que la méditation libre nous la représentera toujours, et telle que nous l’ont peinte les hommes distingués de tous les temps.

1676. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Quand on lit l’histoire authentique de ces temps, on s’étonne de voir de nos jours traiter de prophète ce moine furieux : il périt enfin, couvert de honte, dans le feu qu’il avait allumé.

1677. (1892) Boileau « Chapitre IV. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » » pp. 89-120

Les feux d’artifice de leur imagination aveuglaient si bien le lecteur, qu’il ne voyait plus le paysage au-dessus duquel ils se déployaient.

1678. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Francisque Sarcey »

Il dit ce qu’il pensait et il le dit simplement, sans fioritures, sans paradoxes, sans feux d’artifice.

1679. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Victor Hugo, Toute la Lyre. »

Voici la fin d’une de ces joyeuses énumérations : Zeb plante une forêt de gibets à Nicée ; Christiern fait tous les jours arroser d’eau glacée Des captifs enchaînés nus dans les souterrains ; Galéas Visconti, les bras liés aux reins, Râle, étreint par les nœuds de la corde que Sforce Passe dans les œillets de sa veste de force ; Cosme, à l’heure où midi change en brasier le ciel, Fait lécher par un bouc son père enduit de miel ; Soliman met Tauris en feu pour se distraire ; Alonze, furieux qu’on allaite son frère, Coupe le bout des seins d’Urraque avec ses dents ; Vlad regarde mourir ses neveux prétendants, Et rit de voir le pal leur sortir par la bouche ; Borgia communie ; Abbas, maçon farouche, Fait, avec de la brique et des hommes vivants, D’épouvantables tours qui hurlent dans les vents… etc… car ça continue.

1680. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Parlant du voyage de guerre que fit ce prince, en 1670, en Flandre pour y préparer la ruine de la Hollande, le carrosse à glaces, d’invention récente, où est assise à côté du roi et de la reine Mme de Montespan, les plus beaux meubles de la couronne, portés dans les villes où le roi devait coucher, les tables envoyées en avant et servies, à chaque étape, comme à Saint-Germain, les présents aux dames, les bals parés ou masqués, les feux d’artifice, tout cela dérobe à Voltaire l’indignité de la maîtresse en titre, étalée, à l’armée et à l’Europe, « et pour qui sont tous les honneurs, dit-il, excepté ce que le devoir donnait à la reine », comme si le moins que dût Louis XIV à sa femme n’était pas tout d’abord le renvoi de sa maîtresse.

1681. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre douzième »

On les exerce, en septembre, au maniement des armes à feu et aux manœuvres de la tactique des Grecs ; on les fait dormir sur l’herbe, « à l’ombre des forêts. » Les maîtres des Écoles de la patrie ne prennent pas la qualification de maîtres ni de docteurs, comme dure et orgueilleuse ; leurs noms, tirés du grec, signifient les amis de l’enfance, les pères de la patrie.

1682. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

C’est une tempête qui entraîne à reculons ceux qui essaient de lui faire face 168, un fleuve qui emporte ceux qui le refluent, un nœud qu’on serre en voulant le délier, un feu qu’on allume en soufflant dessus pour l’éteindre.

1683. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre VIII »

Tout à l’heure, il déclarait à la baronne un amour en flammes ; d’un jour à l’autre, cette grande passion s’éteint comme un feu de paille, et se rallume à la tignasse flamboyante d’une femme qu’il voit passer dans la rue.

1684. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Malesherbes. » pp. 512-538

On juge de la fureur de l’ambitieux dévot ; il jeta feu et flamme et menaça.

1685. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — I. (Dialogues inédits.) » pp. 1-28

Une des grosses injures qu’il lui disait dans sa jeunesse, c’est « qu’il ne serait jamais qu’un cardinal de Retz » ; et il disait encore que, « depuis feu César, l’audace et la témérité ne furent nulle part comme chez lui ».

1686. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « André Chénier, homme politique. » pp. 144-169

Tout à l’heure, c’était l’écrivain et l’homme de goût, dans Chénier, qui se révoltait contre Manuel ; ici, c’est le militaire qui prend feu contre Collot d’Herbois, c’est le gentilhomme qui a porté l’épée et qui sait ce que c’est que la religion du drapeau.

1687. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Études sur Saint-Just, par M. Édouard Fleury. (2 vol. — Didier, 1851.) » pp. 334-358

Dans une autre circonstance, comme la municipalité de Blérancourt faisait brûler en grande pompe, sur la place publique, la protestation que quelques membres de la minorité de l’Assemblée constituante s’étaient permise contre le décret favorable aux droits des non-catholiques : « M. de Saint-Just, dit le procès-verbal, a prêté le serment civique, et il a promis de mourir par le même feu qui a dévoré la protestation, plutôt que de refuser sa soumission entière à la Nation, à la Loi et au Roi. » On a prétendu même qu’il étendit la main sur le brasier, comme Scévola.

1688. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre VI. Le Bovarysme essentiel de l’humanité »

La horde primitive retrouve et vénère son chef mort dans le lion qui le dévora et qui, franchissant la nuit le cercle de feu où elle s’endort, prélève sa dîme sur les anciens serviteurs.

1689. (1856) Les lettres et l’homme de lettres au XIXe siècle pp. -30

Il est homme de lettres aussi, celui que le feu de son imagination porte sans cesse vers des sujets nouveaux ; qui, doué de verve et de fécondité naturelle, n’a pas plutôt fini d’une œuvre qu’il en recommence une autre ; qui se sent jeune encore pour la production à soixante ans comme à trente ; qui veut jouir tant qu’il le peut de cette noble sensation créatrice et mener la vie active de l’intelligence dans toutes les saisons.

1690. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre II. Le fond et la forme dans la littérature indigène. »

Cf. avec le conte d’Andersen qui met en scène une théière un sucrier, des pinces à feu, etc.

1691. (1913) La Fontaine « III. Éducation de son esprit. Sa philosophie  Sa morale. »

Ceci : Je chercherai une matière très subtile ; je subtiliserai un morceau de matière que l’on ne pourrait plus concevoir sans effort, Quintessence d’atome, extrait de la lumière, Je ne sais quoi plus vif et plus mobile encor Que le feu… Car enfin… Voyez, La Fontaine s’anime, il discute, évidemment, comme chez ses amis.

1692. (1913) La Fontaine « IV. Les contes »

Polymnie, sur le conseil d’Apollon, improvise quelques stances dont la conclusion est tout à fait analogue au fameux sonnet de Ronsard que vous connaissez tous : Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle, Assise auprès du feu ; dévidant et filant, Direz, chantant mes vers et vous émerveillant : Ronsard me célébrait du temps que j’étais belle.

1693. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vi »

Allez donc, à vingt ans, avoir du feu et nul excès !

1694. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

Je laisse de côté la question de savoir si, délicatisant l’humanité en proportion des jouissances nouvelles qu’il lui apporte, le progrès indéfini ne serait pas sa plus ingénieuse et sa plus cruelle torture ; si, procédant par une opiniâtre négation de lui-même, il ne serait pas un mode de suicide incessamment renouvelé, et si, enfermé dans le cercle de feu de la logique divine, il ne ressemblerait pas au scorpion qui se perce lui-même avec sa terrible queue, cet éternel desideratum qui fait son éternel désespoir ?

1695. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — La solidarité des élites »

Écoutons d’abord le premier, Shelley Tout ce qu’une forme humaine peut contenir de tendresse, de sagesse et de cordialité était dans cet homme, dans cette âme de feu qui pénétrait, enlaçait, enflammait les êtres et les choses autour d’elle.

1696. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Il disait donc, parlant de la Belgique : « Nul mieux que nous ne comprend le charme de la maison fermée et sommeillante, du feu qui flambe clairement, et de la lampe discrète.

1697. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre I. La conscience et la vie »

Le feu qui est au centre de la terre n’apparaît qu’au sommet des volcans.

1698. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre premier. »

La splendeur du soleil, la magnificence des rois, les merveilles des arts, les palais, les fêtes, la solennité des sacrifices, la guerre avec ses terribles images et sa sanglante parure, les casques d’airain, les aigrettes flottantes plaisent également aux deux poëtes et leur reviennent d’un attrait si vif que ce qui semblerait parfois image vulgaire brille toujours nouveau sous leurs paroles de feu.

1699. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Resté seul, il met le feu à du bois goudronné, et se couche heureux sur le pont. […] Il n’y a plus de Mercutio si l’on ne sait pas que sa verve ne débride jamais et qu’il est un feu d’artifice perpétuel. […] La femme peut débuter dans la vie de la passion par ce sentiment orageux, mais le jeune homme qui n’a pas encore essuyé le feu de l’amour est à l’abri de tels coups de foudre. […] Ainsi ils étaient attablés, chacun armé de son pistolet d’argile et dirigeant sur son voisin le feu, la fumée et les paroles de mensonge. […] N’y avait-il pas des flots inépuisables de feu dans les bouches des ivrognes et dans les yeux des querelleurs ?

1700. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Mais encore est-il qu’il parlait de volonté et d’énergie avec assiduité, avec feu, avec adoration. […] Des conversations lui revenaient à la mémoire, plus mélodieuses et pénétrantes que le chant des flûtes et que l’accord des cuivres ; des regards qu’elle avait surpris lançant des feux, comme les girandoles de cristal, et l’odeur de sa chevelure et la douceur de son haleine lui faisaient se gonfler la poitrine mieux qu’à la bouffée desserres chaudes et qu’au parfum des magnolias. […] Et brusquement, d’un coup de sa nageoire en feu, Il fait, par le cristal morne, immobile et bleu, Courir un frisson d’or, de nacre et d’émeraude. […] Et dès lors, du nuage effarouché qu’il crible, Avec des cris stridents plut une pluie horrible, Que l’éclair meurtrier rayait de traits de feu. […] L’extinction des feux du roman réaliste aura pour conséquence d’affranchir le roman romanesque de préoccupations scientifiques peut-être exagérées.

1701. (1892) Essais sur la littérature contemporaine

C’est un feu roulant de choses ingénieuses. […] Richebourg ou ceux de M. du Boisgobey : la Main coupée, le Crime de l’Opéra, Cornaline la dompteuse ; et pourquoi pas aussi ceux de M. de Montépin ou de feu Ponson du Terrail ? […] Je ne voudrais détourner personne d’aller voir Paris fin de siècle au Gymnase, ou Feu Toupinel au Vaudeville. […] Feu Toupinel, surtout, vous amusera presque autant que les Surprises du divorce. […] Paul Alexis, quoique ses débuts remontent à plus de dix ans, est encore et toujours « un jeune ». — Si vous la prenez comme un vaudeville, je veux dire comme une fantaisie dans le genre de Feu Toupinel ou de Paris fin de siècle, la pièce, quoique d’ailleurs assez mal faite, sans art et sans adresse, est assez amusante.

1702. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Trois têtes d’enfants qui reposent les yeux et jettent quelque fraîcheur dans cette atmosphère de feu et de sang. […] Alphonse Daudet qui parle ; un long feu d’artifice où les fusées et les chandelles romaines partent bruyamment sans interruption ; à peine quelques-unes sont-elles obscurcies par la fumée. […] Il s’enflamme alors d’un feu ardent qui s’éteint ensuite pour faire place à un autre incendie. […] Elle s’est brûlée à ce feu avec lequel elle jouait sans le craindre ; elle aime, et tout d’un coup la pudeur s’est éveillée en elle. […] la vie paisible du foyer, le coin du feu le soir, entre le mari qui lit et la fille qui brode.

1703. (1892) Sur Goethe : études critiques de littérature allemande

Il n’y a rien en effet de plus misérable que le talent qui s’épuise à combiner des mots, qui crée des formes accomplies, qui les adore et qui oublie de dérober le feu du ciel pour les animer. […] Ainsi s’inscrivait d’avance en caractères de feu sur les murs du Phalanstère le foudroyant Mané, Thécel, Pharès, qui devait s’appeler un jour : Lettre à Victor Considérant. […] On écoute des voix vibrantes qui pénètrent et font tressaillir sans que l’on sache d’où elles partent ; on regarde la main sans corps tracer des caractères de feu sur les murs de Balthazar ; on reste désarmé et incertain devant un ennemi vague, dont l’imagination exagère la force ; le livre devient légion. […] Goethe, lorsqu’il donnait ce périlleux conseil, savait très bien que l’Allemand, replié en lui-même et vivant là, au plus profond de son moi, d’une existence féerique, illuminée de feux d’artifice indescriptibles, est capable de se découvrir du génie et de ne confier sa découverte à personne, d’éprouver toutes les joies et tous les ravissements du ciel à se réciter les Lieder qu’enfante son cerveau et de n’y pas chercher un lecteur, d’être enfin lui seul à lui-même son public, son auditoire et sa postérité ; à peu près comme dans un ordre d’idées différent, lorsqu’il discute en philosophe les fondements de la société politique, il détruit et fauche sans pitié, fait un carnage inouï d’institutions et de croyances, et ne voudrait pas seulement, si on le poussait à la pratique, retrancher du monde un caporal autrichien. […] Il arrive justement pour être témoin de scènes terribles au milieu desquelles il se joue ; la province polonaise est en feu, et les paysans soulevés viennent assiéger le château de X***.

1704. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxvie entretien. L’ami Fritz »

Bientôt après, la mère Orchel descendait dans la cuisine ; Fritz, tout en écoutant la bonne femme allumer du feu et remuer les casseroles, écartait ses rideaux et voyait les petites fenêtres grises se découper en noir sur l’horizon pâle. […] Dans la cuisine, les casseroles tintaient, le feu pétillait, les portes s’ouvraient et se refermaient.

1705. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

Beaucoup d’esprit sur des incidents imités du théâtre italien, qui les avait imités du théâtre antique ; des amants dans la dépendance de valets de fantaisie ; un dialogue dont la gaieté vient d’un certain feu d’esprit, et non de ridicules vivement présentés, voilà la comédie qui a précédé l’École des femmes, voilà Molière avant l’avènement de Louis XIV, et quoiqu’il eût passé l’âge où Corneille avait fait le Cid et les Horaces. […] Louis XIV eut à entendre de sévères paroles sur « ces victoires et ces conquêtes qui remplissent ici-bas la vanité des histoires, auxquelles on élève des monuments pompeux pour en éterniser le souvenir, et qui ne seront regardées, au jour du jugement, que comme des agitations stériles ou le fruit de l’orgueil et des passions humaines255. » Il se vit représenter les malheurs que ses fautes, avaient en grande partie suscités ; des batailles perdues lors même que la victoire paraissait assurée ; des villes imprenables tombées à la présence seule des ennemis ; un royaume, le plus florissant de l’Europe, frappé de tous les fléaux que Dieu peut verser sur les peuples dans sa colère ; « la cour remplie de deuil, et toute la race royale presque éteinte : malheurs singuliers que Dieu préparait à Louis XIV pour purifier les prospérités de son règne256. » Il eut à se reconnaître dans la peinture de ces guerres « où l’on voit les disciples de celui qui vient apporter la paix aux hommes, armés du fer et du feu les uns contre les autres ; les rois s’élever contre les rois, les peuples contre les peuples ; les mers, qui les séparent, les rejoindre pour s’entre-détruire ; chacun voulant usurper sur son voisin, et un misérable champ de bataille, qui suffit à peine pour la sépulture de ceux qui l’ont disputé, devenir le prix des ruisseaux de sang dont il demeure à jamais souillé257. » Massillon, devant ce roi plus que sexagénaire, parlait déjà le langage sévère de l’histoire.

1706. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1867 » pp. 99-182

5 avril L’homme du gouvernail, accoudé à cette roue déroulant l’immensité des mers, et tournant autour du monde, — une main morte sur le cuivre de la roue, l’autre tenant un de ses montants ; — cet homme à la figure tannée, boucanée par le vent salin, sa toque de marin sur la tête, et sa robuste silhouette se détachant sur un ciel qui se perd dans une clarté mourante de feu de Bengale, ponctué du vol noir de quatre ou cinq mouettes, cet homme ayant derrière lui la barque de sauvetage. […] Une petite laveuse, les bras nus, le casaquin clair, un ruban couleur feu dans les cheveux pour toute élégance, de petits tétons ronds qu’on sent baller comme une paire de pommes, le corps libre, souple, m’a fait repasser devant les yeux la toilette matinale de peuple d’une ancienne maîtresse.

1707. (1895) La science et la religion. Réponse à quelques objections

Le sang qui coule dans nos veines n’est-il pas en effet pour eux celui qui coulait, aux temps préhistoriques, dans les veines de nos premiers ancêtres, et n’y charrie-t-il pas toujours en quelque sorte le feu de leurs instincts lubriques ou féroces ? […] Lorsque la maison brûle, il n’est question pour tous ceux qui l’habitent que d’éteindre le feu.

1708. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

il arrivait encore parfois qu’elle lui écrivit d’un restaurant ou d’un hôtel sur du papier qui en portait le nom imprimé ; mais c’étaient comme des lettres de feu qui le brûlaient. « C’est écrit de l’hôtel Vouillemont ? […] L’air y était saturé de la fine fleur d’un silence si nourricier, si succulent, que je m’y avançais qu’avec une sorte de gourmandise, surtout par ces premiers matins encore froids de la semaine de Pâques où je le goûtais mieux parce que je venais seulement d’arriver à Combray : avant que j’entrasse souhaiter le bonjour à ma tante on me faisait attendre un instant dans la première pièce, où le soleil, d’hiver encore, était venu se mettre au chaud devant le feu, déjà allumé entre les deux briques et qui badigeonnait toute la chambre d’une odeur de suie, en faisant comme un de ces grands « devants de four » de campagne, ou de ces manteaux de cheminée de châteaux, sous lesquels on souhaite que se déclarent dehors la pluie, la neige, même quelque catastrophe diluvienne, pour ajouter au confort de la réclusion la poésie de l’hivernage ; je faisais quelques pas du prie-Dieu aux fauteuils en velours frappé, toujours revêtus d’un appui-tête au crochet ; et le feu cuisant comme une pâte les appétissantes odeurs dont l’air de la chambre était tout grumeleux et qu’avait déjà fait travailler et « lever » la fraîcheur humide et ensoleillée du matin, il les feuilletait, les dorait, les godait, les boursouflait, en faisant un invisible et palpable gâteau provincial, un immense « chausson » où, à peine goûtés les arômes plus croustillants, plus fins, plus réputés, mais plus secs aussi du placard, de la commode, du papier à ramages, je revenais toujours avec une convoitise inavouée m’engluer dans l’odeur médiane, poisseuse, fade, indigeste et fruitée du couvre-lit à fleurs 77. […] il arrivait encore parfois qu’elle lui écrivît d’un restaurant ou d’un hôtel sur du papier qui en portait le nom imprimé ; mais c’était comme des lettres de feu qui le brûlaient. « C’est écrit de l’hôtel Vouillemont ?

1709. (1932) Les idées politiques de la France

Et, s’ils étaient au pouvoir, leur libéralisme ne ferait pas long feu. » Le très peu qui est près, ce sont quelques républicains, qu’ils disent, dont Faguet, membre de la Ligue de la Patrie française, qui écrit les trois cents pages de son livre sans rappeler un instant qu’en ce temps de l’Affaire, le libéralisme des bonapartistes, des royalistes et des cléricaux était inscrit en ecchymoses à la gorge de la Gueuse, qui se défendit, était réduite à se défendre. […] La condamnation du maurrassisme a été le coup de cloche à la césure, le trait de feu qui marque le temps d’un vers aux oreilles les plus prévenues. […] Patriote terrien et territorial de 1871, il n’a pas perdu un degré du feu avec lequel, dans l’Assemblée de Bordeaux, il a dit Non aux préliminaires de paix. […] Tandis que le radical descend de Voltaire, le socialiste descend de Rousseau, et le chien et le chat peuvent bien appartenir au même foyer, se faire pendant comme les chenets du feu de gauche, comme les petits bronzes de Voltaire et de Rousseau sur la cheminée, leur hostilité congénitale apparaît à de multiples occasions.

1710. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Non les imposantes et comme hiératiques compagnes de feu Apollon. […] On est venu : ce fut un jour de folle fête, Les mains ivres, la bouche en feu, les yeux de braise ; Allez, la Belle, en d’autres bois cueillir la fraise. […] Et le dernier amour après l’amour de Dieu, C’est un feu qui s’allume alors que luit le jour. Où notre regard luit comme un céleste feu ………………………………………………… (Bonheur.)

1711. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

Mauriac cite le ridicule ouvrage de feu Masson-Forestier, descendant d’une nièce de Racine, et de son métier agréé au tribunal de commerce de Rouen, lequel peignit ce poète comme un fort méchant homme et une espèce de forban. […] Ce feu toujours ardent réconforta M.  […] Peut-être portaient-ils des pantoufles au coin du feu. […] Quel scandale qu’un descendant dévot de Renan, ou un petit-neveu anticlérical de Veuillot, puisse sans contrôle jeter leurs manuscrits au feu ! […] Les grandes œuvres littéraires sont celles de Théophile Gautier, de Taine, de Ruskin, de Barrès, de Gabriel d’Annunzio (le Feu), à la suite desquelles il faudra désormais inscrire l’Altana ou la Vie vénitienne de M. 

1712. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

Les impériaux mettent la ville à feu et à sang. […] Le connétable Anne de Montmorency, instruit que les troupes impériales sont mal approvisionnées, n’hésite pas à sauver la France au prix d’une province, et met le feu aux villes et aux châteaux. […] La dernière scène, la scène de la confession ne serait plus un coup de foudre ; le ciel se couvrirait de nuages, l’éclair annoncerait la tempête, le front de la forêt se couronnerait d’une lumière terrible, nos yeux verraient sans surprise le chêne déchiré par le feu divin. […] Dans trois pages diffuses il n’y a pas toujours l’étoffe d’une page concise ; bien souvent il faudrait jeter au feu des couplets entiers et recommencer comme si rien n’était fait encore ; c’est à ce prix que s’achète la beauté durable. […] n’essayez pas d’aller plus loin que l’ouvrier, maintenant que le métal sort du feu, solide, éclatant et sonore ; un degré de plus, et tout va se briser et se résoudre en ruines.

1713. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Leurs filles sont des salamandres qui peuvent impunément traverser le feu, fût-ce le feu de l’enfer. […] Le vrai feu d’artifice est d’être magnanime… Pareillement, la « vraie statue » est d’avoir inscrit son nom avec son œuvre dans l’histoire de la littérature ou de l’art. […] Pour mettre un feu stérile en ton œil hébété Pour mendier ton rire ou ta pitié grossière Déchire qui voudra la robe de lumière De la pudeur divine et de la volupté. […] Il va, frottant ses reins musculeux qu’il bossue ; Et du mufle béant par la soif alourdi Un souffle rauque et bref, d’une brusque secousse, Trouble les grands lézards, chauds des feux de midi, Dont la fuite étincelle à travers l’herbe rousse. […] « Comme tous les grands problèmes de ce monde, s’écrivait-il dans un de ces articles, daté de 1852, le problème de l’esclavage sera résolu par le fer et le feu, et Spartacus ramassera encore son droit de cité dans la poussière et dans la cendre des batailles.

1714. (1927) Approximations. Deuxième série

Bouquets exquis, feux d’artifice étincelants, mais auxquels l’artiste semble n’attacher qu’une importance secondaire. […] Mais peut-être que ce n’est qu’un soudain mouvement de l’âme de l’un à l’autre de ces extrêmes, et qu’elle n’est jamais en effet qu’en un point, comme le tison de feu. […] Du moins je ne le sens pas — et dans sa sainteté même — ami du silence au même degré que tels autres. « Feu » — le terme essentiel, isolé au milieu de la ligne en tête du Mémorial — certitude, joie, (avec les pleurs qui en doublent la portée), — tels dans l’écrit décisif apparaissent les mots entre tous pascaliens : celui de paix n’y figure qu’une fois, dans le brouillon, et à la fin d’une énumération63. […] Il surprendra l’avenir, le cours accéléré de cette Garonne qui en trois ans rejeta sur sa rive Le Baiser au lépreux, net, irréprochable galet ; Le Fleuve de feu (des précédents livres de Mauriac le plus ambitieux, d’une ambition toute légitime parce que toute dans le sens de ses problèmes ; où peut-être seule la patience fit défaut, mais dont une troisième lecture vient de m’assurer que ne s’en épuise pas la qualité de bouleversement) ; Genitrix : cette eau-forte par endroits un peu soulignée, mais qui en sa fermeté si objective fixe les sombres dessous de plus d’une famille française ; — et voici que ce cours s’élargit, comme en son estuaire girondin, dans Le Désert de l’amour, à ce jour le chef-d’œuvre de son auteur. […] Des cadences que règlent toujours les oscillations du cœur, jamais nombreuses (au sens périodique), jamais cependant perçues comme brèves à cause de cette inclinaison florale du sentiment qui de sa caresse semble les délier ; — un contenu tout en raccourcis, nulle sensation de raccourci dans l’expression elle-même : autour de la moindre remarque, le très doux mouvement d’une vague qui se retire ; — et cependant, ainsi que me le disait si bien Gide : « Dans Aimée jamais Rivière ne quitte la ligne » : phrases aux proportions mesurées, aux attaches impeccables, closes mais qui ardent, et se refermant sur leur sens comme des bracelets bien ajustés enserrent et rehaussent de leurs feux la délicatesse d’un poignet.

1715. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

  Il y a précisément quinze jours, madame, qu’à cette heure-ci, à dix heures et dix minutes, nous étions assis près du feu, dans la cuisine, Rose derrière nous, qui se levait de temps en temps pour mettre sur le feu de petits morceaux de bois qu’elle cassait à mesure, et nous parlions de l’affinité qu’il y a entre l’esprit et la folie. […] Voici ce qu’on lit dans les registres de l’état civil de Lausanne : « Benjamin Constant, fils de noble Juste Constant, citoyen de Lausanne et capitaine au service des États-Généraux, et de feu madame Henriette de Chandieu, sa défunte femme, né le dimanche 25 octobre, a été baptisé en Saint-François, le 11 novembre 1767, par le vénérable doyen Polier de Bottens, le lendemain de la mort de madame sa mère. » Ainsi, Benjamin Constant, orphelin de mère, pouvait dire avec Jean-Jacques Rousseau : « Ma naissance fut le premier de mes malheurs. » On sent trop, en effet, qu’à tous deux la tendresse d’une mère leur a manqué.

1716. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite et fin.) »

C’est un peintre soldat : il en a le propos, la vanterie ; il en a le feu et le courage.

1717. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance. »

Nature chaleureuse, prompte à l’espérance, plus occupée des principes que des personnes, il prit feu à l’idée d’un réveil de la France, d’une conversion de l’Empire à la liberté, et se fit fort de défendre dans le Moniteur l’efficacité des garanties accordées aux citoyens français par l’Acte additionnel.

1718. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

Gesril, à la nage, s’approche des vaisseaux, crie aux Anglais de cesser le feu, leur annonçant le malheur et la capitulation.

1719. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

Le poëte, sans songer à mal, insulte au hasard, en passant, du haut de son char de feu.

1720. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la loi sur la presse »

Et plaignez-vous après cela qu’il y ait diminution du feu sacré dans la littérature !

1721. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mendès, Catulle (1841-1909) »

Haraucourt, éprouve le besoin de rimer, avec moins de génie et plus de chevilles, si c’est possible, que feu M. de Banville, des odelettes sur des traits d’actualité, ou des sujets voluptueux, mais d’une sûre vacuité.

1722. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

Il feint que l’auteur lui est inconnu ; que, voulant l’aller remercier du grand profit qu’il a fait à l’impression et au débit de l’ouvrage, « auquel, dit-il, on a couru comme au feu », il s’est longtemps enquis de sa demeure.

1723. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre dixième. »

Enfin, averti que c’était au genre même qu’on en voulait, et que plus il était conforme aux préceptes d’Horace, moins il plaisait à M. le prévôt de Paris91, il entendit le reproche, et il y fit cette réponse qui absout ses intentions : « La gaieté des contes, dit-il, fait moins d’impression sur les âmes que la douce mélancolie des romans les plus chastes. » Je craindrais bien plutôt que la cajolerie Ne mît le feu dans la maison.

1724. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 janvier 1886. »

Voici qu’au seuil profond de la Vague, apaisée, Avec Elle, — ô le feu de sa lèvre baisée !

1725. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre V. Le Bovarysme des collectivités : sa forme idéologique »

Or, « on ne peut appartenir ni à deux familles, ni à deux religions domestiques. » 13 Aussi, la cérémonie du mariage consistait-elle essentiellement en l’acte par lequel le père dégageait sa fille des liens religieux qui l’attachaient au foyer, et en cet autre acte par lequel l’épouse introduite dans la maison de l’époux était mise en présence du dieu domestique et touchait le feu sacré.

1726. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1856 » pp. 121-159

1er juillet Revenus de la campagne dans la journée, ce soir nous dînions au Restaurant de la Terrasse, une gargote au treillage mal doré, autour duquel montent desséchées une douzaine de plantes grimpantes, et nous avons, en face de nous, le soleil couchant illuminant de ses derniers feux les affiches-annonces, aux tons criards, qu’on voit au-dessus du passage des Panoramas.

1727. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

» — Nullement, nous sommes un peuple léger, à passions souvent superficielles comme les feux de paille ; nos idées sont malheureusement trop peu stables, surtout en politique.

1728. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre septième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie. »

Rappelez-vous ces vers qui expriment si bien la vie universelle et l’animation divine de la nature : Peut-être qu’en effet, dans l’immense étendue, Dans tout ce qui se meut une âme est répandue ; Que ces astres brillants sur nos têtes semés Sont des soleils vivants et des feux allumés ; Que l’océan frappant sa rive épouvantée Avec ses flots grondants roule une âme irritée ; . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1729. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre II : Examen critique des méditations chrétiennes de M. Guizot »

Guizot passer entièrement sous silence le grand débat qui a mis l’Europe en feu au xvie  siècle, pour lequel, dans les deux églises, tant de grands hommes sont morts martyrs de leur foi, le débat sur la présence de Jésus-Christ dans l’hostie.

1730. (1809) Quelques réflexions sur la tragédie de Wallstein et sur le théâtre allemand

Dans la première, on voyait Prométhée, bienfaiteur des hommes, leur apportant le feu du ciel, et leur faisant connaître les éléments de la vie sociale.

1731. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Mais moi, j’aurais jeté au feu ce paquet par intérêt pour Sainte-Beuve, dont je comprends la réputation mieux que vous !

1732. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

Annotations, citations, recherches, origine en marge des sources où il puise, rien n’y manque… que le feu sacré.

1733. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

Puis, — cet homme une fois instruit, forgé, fourbi, astiqué comme une arme, un revolver à dix mille coups, à autant de coups qu’il y a occasions de tirer sur l’ennemi dans la vie, et mis face à face avec toutes les difficultés, tous les obstacles, tous les problèmes, tous les sentiments, toutes les passions, toutes les résistances d’une société comme la nôtre, qui n’est pas plus athée résolument qu’elle n’est chrétienne, qui trempe par un bout dans l’athéisme, par l’autre bout dans un christianisme ramolli, — engager la lutte, une lutte hardie, à pleins bras, à plein corps, entre cet homme, trempé dans le feu et la glace de l’enfer, et cette société, écrasante de son poids seul, qui lui oppose la masse de ses préjugés, de son hypocrisie, de son ignavie, et même de sa moralité, s’il lui en reste encore.

1734. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’avenir du naturalisme »

Il avait bien regardé l’univers, mais il avait oublié d’y voir une chose, la source même de la vie « matérielle », l’« âme » ; je ne veux pas dire assurément cet étrange feu follet de la conception spiritualiste, cette entité indépendante et immortelle opposée au « corps », mais bien cette vie profonde et harmonique, cette conscience infinie du cosmos dont nous ne sommes que des étincelles et des parcelles.

1735. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

L’amour n’est que l’épisode ou le témoin de la vie, tantôt le feu d’artifice, tantôt la lampe sage qui veille.

1736. (1897) Un peintre écrivain : Fromentin pp. 1-37

Et il n’y avait pas de vie, et il n’y avait pas de tache dans cette harmonie ; seulement, là où la lumière mourante touchait plus directement la ligne d’un mur ou la rondeur d’une couba, on eût dit qu’elle se posait sur une poussière impalpable, sur une neige qui s’en pénétrait et la renvoyait en menues aigrettes d’un feu très doux.

1737. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre II. L’âme et le corps »

Nous le saurions même beaucoup mieux qu’elle, car cette soi-disant âme consciente n’éclaire qu’une petite partie de la danse intracérébrale, elle n’est que l’ensemble des feux follets qui voltigent au-dessus de tels ou tels groupements privilégiés d’atomes, au lieu que nous assisterions à tous les groupements de tous les atomes, à la danse intracérébrale tout entière.

1738. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Elle tomberait d’elle-même en dissolution, à moins que le feu du ciel ne se chargeât d’en faire bonne et prompte justice.

1739. (1773) Discours sur l’origine, les progrès et le genre des romans pp. -

Les Confessions du Comte de… par feu M. du Clos, de l’Académie Françoise, furent contemporaines des Egarements du cœur & de l’esprit.

1740. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

Il prit le ton d’un général trahi par ses propres troupes ; il ne s’enferma point dans sa tente, comme Achille ; mais, sans consulter le choix des armes, il réunit toute son artillerie, et fit feu de toutes parts : élancé sur sa tribune, il répondit en orateur au manifeste du diplomate : malgré la visière baissée de son ennemi, le vieil Amateur, il le reconnut et commença par lui déclarer qu’il n’était ni l’un ni l’autre. […] Quand il voulait appuyer quelque anecdote douteuse, quelque conte apocryphe, il ne manquait jamais de dire : Feu monsieur le maréchal de, etc., me disait un jour, etc. […] pourquoi, dans la première scène d’Alzire, a-t-il risqué un vers bien inférieur à celui qu’il blâme, lorsqu’il a fait dire à Alvarès : Par nous tout est en feu, par nous tout est en poudre, Et nous n’avons du ciel imité que la foudre.

1741. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome II

V 27 prairial an 12 (16 juin 1804) Vous donc qui, d’un beau feu pour le théâtre épris, Venez en vers pompeux y disputer le prix, Voulez-vous sur la scène étaler des ouvrages Où tout Paris en foule apporte ses suffrages, Et qui, toujours plus beaux, plus ils sont regardés, Soient au bout de vingt ans encor redemandés ? […] Nous voyons dans l’Iliade ce même Achille prêt à périr d’après les ordres suprêmes du Xante, qui avait commandé à ses eaux de se déborder et d’engloutir le héros ; ce qui serait arrivé si Vulcain ne lui eût prêté le secours de ses feux. […] On croirait, à l’entendre, que sa conscience l’oblige à révéler le larcin de M. de Lamotte : Je dois dire que la critique de Lamotte est de feu M. le marquis de Lassay ; il la fit à table chez M. de La Faye, où j’étais avec feu M. de Lamotte, qui promit qu’il en ferait usage ; et en effet, dans ses discours sur la tragédie, il fait honneur de cette critique à M. le marquis de Lassay . Mais puisque M. de Lamotte fait honneur de cette critique à M. le marquis de Lassay, pourquoi donc M. de Voltaire s’exprime-t-il en ces termes équivoques : Je dois dire que la critique de Lamotte est de feu M. le marquis de Lassay  ? […] Cinq ou six femmes en robes de juges entendent les accusations contre la pièce, et prononcent un arrêt dont voici le résultat : Ne devrions-nous pas la traiter comme infâme, Pour avoir en public dépouillé la pudeur, D’un sexe si charmant l’apanage et l’honneur, Et par un feu public punir son impudence ?

1742. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Désespérant de le réduire, et, comme le jour venait, les bandits, craignant que les colons n’envoyassent des secours, mirent le feu à la masure. Alors le garde, usant des pauvres ressources que contenait sa cabane, voulut combattre l’incendie, comme il avait combattu les voleurs ; mais le feu gagnait, dévorant tout, et la toiture enflammée s’effondra sur lui. […] J’ai toujours été bon soldat ; j’ai, à moi seul, autant de blessures que peut en avoir un régiment qui a été au feu… et puis, je pense que je me suis bien défendu, contre plus de cent Arabes, là-bas. […] Auguste Vitu, et auxquels feu Scribe doit sourire, du haut des cieux, sa demeure dernière. […] La cape est mangée aux vers ; l’épée rouillée et reforgée tourne, en grinçant, devant un feu de gaz, à la boutique d’un rôtisseur.

1743. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

Le paysan qui évoque, le soir, au coin du feu, les légendes naïves du terroir ou les souvenirs familiaux, fait œuvre d’artiste au même titre que le poète, le musicien et le peintre qui s’inspirent des grandes traditions de l’humanité et cherchent à en traduire avec relief le sens émotif. […] L’entretien achevé, Siegfried saisit les morceaux qui doivent représenter les débris du glaive, les met au feu, les fait rougir, puis les forge et chante : “Heaho, heaho, hoho !” […] Ce badinage plutôt lourd, voilà sans doute ce que Nietzsche entendait, en 1888, par la gaya scienza, les pieds légers, la plaisanterie, le feu, la grâce, la grande logique, la danse des étoiles, l’insolente spiritualité, le frisson de lumière du Sud, dont il parle avec une affectation si parfaitement germanique ! […] Elle a du feu et du courage et, en même temps, la peau flasque et pâle des fruits qui mûrissent tard. […] Il m’est arrivé bien souvent d’assister à des lectures et répétitions de nos grands orchestres symphoniques ; toujours j’ai observé que, dès les premières mesures, lorsqu’on attaquait du Beethoven, la physionomie des exécutants s’illuminait en quelque sorte ; ils se redressaient, se dépensaient avec un feu qu’ils ne donnaient pas aux autres œuvres.

1744. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

On s’est si souvent trompé sur les choses et sur les hommes, qu’on veut bien soutenir son opinion, mais jusqu’au feu exclusivement, comme dit Montaigne. […] Tantôt sa muse a chanté les amours légères et voluptueuses de sa jeunesse, les charmes d’une vie facile et épicurienne, les plaisirs de l’amitié, les succès de l’amour-propre ; après, elle s’est entretenue avec les sciences, et les a animées de son feu ; plus tard, elle est entrée en commerce avec les rois, et a prêté à la flatterie le masque de la familiarité ; puis elle s’est plu à peindre les douceurs de la retraite et de la liberté, le déclin de l’âge, la fin des amours ; enfin, quand elle a été confidente de la vieillesse, elle a exprimé cette incertitude continuelle d’opinions, cette variation de principes, cette triste légèreté sur tout ce qui importe le plus à l’homme, et cette inquiétude de caractère que l’âge n’avait pu calmer. […] Mais c’était un feu sans aliment ; et le talent dont il a donné quelques indices, n’a reçu aucune application entière. […] La persuasion s’était affaiblie, mais l’amour-propre avait conservé tout son feu, et l’Église employait les derniers restes de sa force à montrer de l’intolérance contre une part de ses enfants. […] Enfin il y avait dans tout cet ensemble de circonstances quelque chose de plus moral et de moins dégradé que dans les dernières années du règne de Louis XV ; comme on voit quelquefois dans les vieillards un retour de force et d’activité, une étincelle inattendue du feu de la jeunesse, épuiser les faibles ressorts d’un corps usé, et présager quelque violente maladie.

1745. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome II

Et Port-Royal lui rendait ce témoignage : « Feu M.  […] Prêtres, nous n’avons pas discuté la loi qui nous était sur la ligne de feu. […] Mise au point de l’idée de progrès19 « … Il a été en plusieurs guerres où il y avait des Allemands qui, au déloger, mettent volontiers le feu en leur logis, le bon chevalier ne partit jamais du sien qu’il ne sût que tout fût passé, où qu’il ne laissât gardes, afin qu’on n’y mît point le feu. » Le bon Chevalier ! […] Il peut se hâter vers le plus magnanime devoir : la reconnaissance des positions ennemies sous le feu d’habiles tireurs qui le descendront peut-être, et cette fois, c’est la mort non plus donnée, mais reçue.

1746. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

Mais les gens comme nous brûlent d’un feu discret Avec qui, pour toujours, on est sûr du secret. […] Cette femme, qui inspira une si forte passion à Molière, et qui le rendit si malheureux, n’avait pas une beauté régulière ; voici le portrait que Molière en a fait lui-même à une époque où elle lui avait déjà causé beaucoup de chagrins: « Elle a les yeux petits, mais elle les a pleins de feu, les plus brillants, les plus perçants du monde ; les plus touchants qu’on puisse voir.

1747. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Le feu a l’air d’être à la vente. […] Et à peine sorti de table, dans cette maison à l’atmosphère littéraire, on cause poésie ancienne et grâce à la mémoire admirable de Léon, ç’a été la curieuse pièce de Villon : Comme je suis povrette et ancienne, Ni rien ne sais… Puis la mélancolique pièce de Ronsard sur la vieille maîtresse : Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle… Assise au coin du feu, devisant et filant.

1748. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1892 » pp. 3-94

Quant à Coppée, il s’est montré tout à fait extraordinaire, comme verve voyoute : ç’a été un feu d’artifice pendant toute la soirée de drôleries, à la fois canailles, à la fois distinguées. […] Ce soir, une femme du monde, m’attaque gentiment sur l’horreur, professée dans mon Journal, pour le progrès dans les choses, me parlant de la vie magique, surnaturelle, que lui a faite le téléphone : « Tenez, il y a une heure, je causais à Londres avec un Anglais, pour une affaire que j’ai là-bas ; quand vous êtes entré, je m’entretenais avec ma sœur, à Marseille, lui disant que je vous attendais ; dans la journée, j’avais arrangé un mariage et un divorce… Hier j’étais fatiguée, je m’étais couchée de bonne heure, mais ne dormant pas, je me suis mise à causer avec un monsieur, dont j’aime l’esprit… mais un monsieur, que les convenances m’empêchent de recevoir fréquemment… N’est-ce pas, dit-elle, en riant, c’est singulier pour une femme, dans son lit, de causer avec un monsieur, qui est peut-être dans le même cas… Et vous savez, si le mari arrive, on jette le machin sous le lit, et il n’y voit que du feu.

1749. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

C’est la haine qui « punit », et qui « damne », qui emploie à maudire la bouche même des poètes et des sages, et qui, si elle pouvait Prendre à Saturne en feu son cercle sidéral n’en ferait que l’anneau d’une chaîne. […] Tout tuteur honnête presse l’émancipation de son pupille… La Chambre… doit être le dernier échelon d’une échelle dont le premier échelon est une école. » Il s’imagine que toute brutalité « se fond au feu doux des bonnes lectures Humaniores litterae « quotidiennes. » Il faut faire faire au peuple ses hu-manités.

1750. (1913) Les livres du Temps. Première série pp. -406

Il donne lecture de ce manuscrit à Maxime du Camp et à Louis Bouilhet, qui lui conseillent de le jeter au feu. […] Mais la vision resplendissante et triomphale de l’auteur du Feu me paraît plus exacte, je l’avoue, et l’opinion publique, qui a horreur des sites désolés, s’accorde ici avec M. d’Annunzio. […] « Une femme de ménage ravaudait son logis, cirait ses bottes, préparait l’hiver son feu, et c’était tout. […] Elle fournit des lecteurs et des auditeurs à leurs confrères mieux doués ; elle perpétue la tradition et alimente le feu sacré, d’où jaillit, lorsqu’il plaît au destin, l’étincelle du génie. […] Verlaine, lors de ses démêlés conjugaux, laissa des manuscrits de Rimbaud chez les parents de sa femme, qui se refusèrent toujours à les restituer et les égarèrent sans doute où peut-être les jetèrent au feu.

1751. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Souvenez-vous maintenant des récits que nous font ceux qui reviennent, en ce mois de novembre 1915, où j’écris, de la ligne de feu, et de la solennité, du recueillement des messes dites dans les tranchées. […] En action d’abord : — il s’est usé, trop âgé déjà pour aller au feu, en multipliant les besognes de dévouement à l’Infirmerie spéciale, à Laennec, à la Faculté, à Sainte-Anne, au Val-de-Grâce. […] Ce seul nom doit réveiller en lui toutes ces visions, et surtout le fantôme du Grand Serviteur des Hohenzollern, à qui son roi serra les deux mains devant tout son état-major, la veille de ce 2 septembre, sur la tragique colline d’où ces deux Prussiens regardaient Bazeilles en feu et Sedan sous les bombes… Donchery ! […] Pourtant, à vingt pas, feu de salves ; les Boches arrêtés sur les jarrets. […] Pour Augustin Cochin, être au feu avec ses hommes, ce n’est pas seulement se battre comme eux, souffrir comme eux, mourir comme eux, c’est leur attester par tout son être le bienfait de sa foi.

1752. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

L’âme du vrai poëte lyrique, après qu’y a pâli l’amour, est comme un Bosphore où le feu grégeois n’illumine plus la nuit, et qui éclaire moins ses rivages, mais qui les réfléchit mieux.

1753. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

La voici : N’admirez tant que la belle Cordière D’Amour en elle ait conçu tout le feu : Son bon mari qui n’entendoit le jeu Chez lui tenoit fabrique journalière, Grand magasin de câbles et d’agrès, Croyant le tout étranger à la Dame ; Mais Amour vint, la malice dans l’âme, Choisit la corde et n’y mit que les traits3.

1754. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre IV. Services généraux que doivent les privilégiés. »

Sur un seul feu d’artifice, le duc de Gesvres gagne 50 000 écus par les débris et charpentes qui lui appartiennent en vertu de sa charge113  Grands officiers du palais, gouverneurs des maisons royales, capitaines des capitaineries, chambellans, écuyers, gentilhommes servants, gentilshommes ordinaires, pages, gouverneurs, aumôniers, chapelains, dames d’honneur, dames d’atour, dames pour accompagner, chez le roi, chez la reine, chez Monsieur, chez Madame, chez le comte d’Artois, chez la comtesse d’Artois, chez Mesdames, chez Madame Royale, chez Madame Élisabeth, dans chaque maison princière et ailleurs, des centaines d’offices pourvus d’appointements et d’accessoires sont sans fonctions ou ne servent que pour le décor. « Mme de la Borde vient d’être nommée garde du lit de la reine avec 12 000 francs de pension sur la cassette du roi ; on ignore quelles sont les fonctions de cette charge, qui n’a pas existé depuis Anne d’Autriche. » Le fils aîné de M. de Machault est nommé intendant des classes.

1755. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

Alors restituez les Gaules à ces légionnaires de César qui asservissaient vos pères, qui incendiaient tout ce qu’ils ne pouvaient pas soumettre dans vos provinces, et qui massacraient en une seule nuit, après la victoire, soixante-dix mille vaincus sous les murailles en feu de votre capitale !

1756. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (3e partie) » pp. 369-430

Acte de foi perpétuel dans la raison et dans la justice ; sainte fureur du bien qui la possédait et qui la faisait se dévouer elle-même à son œuvre, comme ce statuaire qui, voyant le feu du fourneau où il fondait son bronze prêt à s’éteindre, jeta ses meubles, le lit de ses enfants, et enfin jusqu’à sa maison dans le foyer, consentant à périr pour que son œuvre ne pérît pas.

1757. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (3e partie) » pp. 161-219

Ils ne sentent le feu sacré des religions qu’à la chaleur des bûchers qu’elles allument.

1758. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

On n’entendait que la musique de cuivre des régiments, les tambours et le bruit de l’exercice à feu sur les remparts de Lucques et dans les plaines.

1759. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Quelques esprits secs, jaloux, et chicaneurs avec leurs propres sensations, essayèrent de rire et de nier ; mais les larmes prévalurent, et elles écrivirent le nom de Chateaubriand en traits de splendeur et de feu dans tous les cœurs jeunes.

1760. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Mme de Montespan, avec sa vie scandaleuse, est une « intellectuelle », et c’est chez la prude que couvent tous les feux de l’imagination et de la sensibilité.

1761. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Notre imagination, qui peut-être dort en nous comme le feu dans le caillou qui le recèle, peut s’enflammer à l’étincelle électrique qui jaillit des œuvres d’imagination.

1762. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre sixième. »

Si, dans tout le reste, il doute, c’est résistance d’une haute raison à toutes ces opinions qui croyaient tenir la vérité, et qui l’imposaient à leurs contradicteurs par le fer et par le feu.

1763. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 février 1885. »

Concert : Les Adieux de Wotan et l’Incantation du feu.

1764. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 avril 1886. »

  Les Forces jaillissantes, d’où comme les coursiers qui s’élancent, Bondissent les puissances du sol, du feu et des airs, Les mers qui refluent et les fleuves qui s’écoulent   Prirent voix, — transformés en chant … oui, toutes choses Avec toutes leurs œuvres reçurent de par son art magistral Un verbe pareil à celui des Forces dont la voix met à nu Le grand cœur de la Terre.

1765. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juillet 1886. »

Le fragment de Siegfried exécuté à St James’s Hall commence au moment où Siegfried, après avoir écarté Wotan, monte au sommet du roc sur lequel Brünnhilde repose endormie, entourée par le feu.

1766. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 décembre 1886. »

D’autres jugements : « L’analyse psychologique des personnages fait le plus souvent défaut » ou : « Wagner a porté tout l’effort de sa puissance révolutionnaire sur un seul objectif : l’illusion théâtrale … » Rectifions quelques informations erronées : dans Siegfried la scène de Siegfried et du Voyageur est après la traversée du feu ; ce qu’on appelle la scène d’amour de la Walkure est au premier acte ; etc. ; encore : Madame Vogl est de Munich, Mademoiselle Therese Malten de Dresde ; etc.

1767. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre II : La Psychologie »

La sensation est une partie nécessaire du mécanisme ; c’est le grand ressort de la montre, le feu de la machine à vapeur.

1768. (1904) En méthode à l’œuvre

Œuvre qui, retournant au primogène tact sensationnel la digression luxuriante des sensations, des émotions et des idées et les renouvelant dans la phonalité et l’idéogramme primordiaux, de nouveaux associés, — et reprenant tout ainsi qu’aux racines du Monde : d’une part (et tandis que son centre est situé en l’âme et le milieu modernes de l’Individu et des nécessaires agglomérats ethniques gardant le sens de Races, en notre instant), remonte à la Genèse cosmique et à la prime danse du Feu et du Serpent de l’être anthropoïde.

1769. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

La charge épique des cuirassiers de Millaud, la panique, les carrés de la garde tenant comme des îlots au milieu de l’écoulement des fuyards, par la nuit tombante, et sous le feu des canons qui la trouent ; cela est inhumain.

1770. (1707) Discours sur la poésie pp. 13-60

S’il met quelque feu dans un ouvrage, et s’il fait regarder à de certaines gens les poëtes comme des hommes inspirés, il les avilit à des yeux plus philosophes, qui les regardent comme des fous yvres de leur art et d’eux-mêmes.

1771. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

Il a de l’Érigone ivre dans la manière ; mais l’Érigone sait se renverser sur son thyrse et rejeter, avec un geste délicieusement ivre, la coupe à laquelle elle a bu par-dessus son épaule rougie, tandis que Villemain n’a ni thyrse, ni coupe, ni feu de bacchante dans la veine.

1772. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

Les femmes, ébouriffées comme des bohémiennes, cachent leur peau noire et jaune sous cinq ou six colliers de grosses boules de verre : « Ni pot au feu, ni plats lavés. […] La cantarella, cette poudre sucrée qui recelait un feu corrosif, entama pourtant ses entrailles. […] Quel est le prix des objets de première nécessité, le pain, la viande, la boisson, le logement, le feu, la lumière ? […] Jean-Antoine, qui a jugé sur les fleurs de lis, qui a gouverné, obéi, commandé, fait la guerre par terre et par mer, été chef d’un sénat, membre d’un autre, … Jean-Antoine a rêvé les deux tiers du songe de la vie ; excepté la messe qu’il n’a pas dite encore, il a fait de tout, et vu, comme feu Salomon, que tout est vanité « et tourment d’esprit. » — Tout est vanité, même la continuation de cette famille pour laquelle il a tant fait. […] Les peintres espagnols mettront sous vos yeux le type de leur race, l’animal sec, nerveux, aux muscles fermes, durci par la bise de ses sierras et la brûlure de son soleil, tenace et indomptable, tout bouillonnant de passions comprimées, tout ardent d’un feu intérieur, noir, austère et séché, parmi des tons heurtés d’étoffes sombres et de fumées charbonneuses, qui tout à coup s’entrouvrent pour laisser voir un rose délicieux, une pourpre de jeunesse, de beauté, d’amour, d’enthousiasme, épanouie sur des joues en fleur.

1773. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Sous l’haleine de cette bouche qui lui souffle son feu d’enfer, Macbeth s’écrie d’abord : « C’est dit !  […] En 1820, on voyait, à la pointe d’un clocher de Sisteron, un étincellement de feux. […] Une fois la cornue sur le feu, en avant le fiacre aux stores baissés… » (peut-être trouverez-vous une saute d’images un peu vive entre cette cornue et ce fiacre), « la chambre d’hôtel borgne, les verrous prévoyants et toutes les tapisseries traditionnelles, les amis qu’il faut éviter dans les rues, les valets qu’il faut corrompre, les servitudes de tout genre, les humiliations de toute espèce, les souillures de toute sorte. […] Paul est assis au coin du feu de la salle à manger. Il est obligé de se tenir là, car on n’est pas assez riche pour avoir plusieurs feux dans l’appartement.

1774. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

Ç’a été un feu de paille ; ç’a n’a pas réussi du tout et le public populaire en est revenu à ses mélodrames et à ses vaudevilles. […] Elle semble douce ; mais de temps en temps elle a un regard… Tout ce qu’on sait, c’est qu’elle adorait le feu roi. — Et par conséquent qu’elle exècre la reine ? […] ô vous, mon premier feu ! […] Les employés le craignent, je ne dis pas comme le feu, que les employés ne craignent jamais mais comme le froid. […] Il semble, à les recueillir et interpréter sans parti pris, que Voltaire jouait avec feu et avec quelque emphase.

1775. (1907) Propos de théâtre. Quatrième série

Guignol, guignol à feu et à sang, guignol gigantesque, mais pur guignol. […] L’homme est de glace aux vérités, Il est de feu pour les mensonges. […] La princesse comprend et, triste, mais très loyale, elle lui fait passer immédiatement le carnet aux mille feux. […] Qu’il soit donc bien entendu que ce qui va suivre n’est que le squelette décharné, comme on dit souvent, et je crois qu’il suffirait de dire squelette, d’un merveilleux petit feu d’artifice. Mais c’est aussi un peu la faute de l’auteur si, en elle-même, l’architecture des pièces de son feu d’artifice est un peu conventionnelle, un peu banale et d’une certaine incertitude de dessin.

1776. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Tout autre, Anna, dont le cœur est sournois, dont le cœur est un feu qui couve, puis s’élève et flambe ; Anna, exacte aux heures des offices dans le temple, et qui n’est que volupté chaude ; Anna aux pieds nus qui, de nuit, longe les corridors, pour aller à Christophe, dans le danger. […] Une ferveur si bien allumée ne va pas s’éteindre : il y a, pour la nourrir, tous les sentiments les plus divers, anciens et nouveaux, ceux qui couvent depuis des siècles comme les grosses bûches d’un foyer, ceux qui flambent comme des fagots sans cesse jetés sur un feu profond. […] Seulement, son regard passe au-dessus des gens avec lesquels il cause ; il a au coin des lèvres un sourire « orgueilleux et acquiesçant », et ses yeux, sur les gens, opèrent une fascination bizarre : le feu secret qui est en lui lance des flammes invisibles, mais fortes. […] Maurice Maeterlinck que les révélations de Mme Piper, touchant le docteur Hodgson, s’expliqueraient le mieux du monde, sans nulle intervention de feu Hodgson, par les phénomènes de la télépathie : Mme Piper ne lisait-elle pas, à distance, la pensée de William James ? […] bien, c’est « un ardent désir qui descend au fond du cœur » ; et c’est, au bord des lèvres, un afflux de paroles bondissantes ; et c’est mille frissons vivants, joints à des rêves qui frémissent aussi ; c’est les tempes qui battent ; c’est un tourment qui vous harcèle ; c’est une crispation ; et c’est un feu.

1777. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

Mais je me retire la moitié de la journée dans une région meilleure… mon travail. » Et encore : « Quand je suis à ma table, ou les pieds à mon feu, suivant mes idées ou écrivant mes expériences, je suis au paradis… Quand je pense à tant de pauvres diables, je suis près de devenir socialiste contre moi-même, et de me maudire comme privilégié. » Ce n’est pas là le quiétisme d’une âme tiède et que les passions n’ont jamais tourmentée. […] Si ces instituteurs, recrutés de plus en plus péniblement, brûlaient de ce feu sacré dont furent possédés les éducateurs de l’Allemagne après Iéna, le déchet numérique serait un gain spirituel. […] Mais ceux qui l’écoutaient ainsi s’abandonner à la frénésie d’une causerie souvent féroce de truculence, ne se rendaient guère compte que ce causeur dissimulait sous ce feu d’artifice de mots une âme follement irritable et qu’un rien faisait saigner. […] Nous l’avons tous vu, pendant des années, tolérer auprès de lui, avec une indulgence jamais lasse, ce terrible Louis N… parasite de lettres qu’il nourrissait, par lequel il se savait haï, qui lui imposait sa présence, lui prenant le coin de son feu dans sa petite chambre.

1778. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Dans le cabinet de travail qui fait suite, tout petit aussi, un feu de bois est en train de mourir ; il y a là des bois sculptés du moyen âge, des statuettes, des vieux cuivres, des fragments de bas-reliefs bibliques ; dans un cadre un curieux morceau de sculpture, le baptême de saint Jean-Baptiste, avec des détails ingénus : l’eau qui baigne les pieds du saint, au fond le soleil figuré par des traits rayonnants ; puis des gravures de Dürer et de Rembrandt et deux anges habillés de plis extraordinaires. […] Quand je fus assis, près du feu, dans un antique fauteuil, et que j’eus exposé mes questions : — Évidemment, fit-il, le naturalisme est fini… Une pouvait pas toujours durer ! […] tenez, voyez cette fraxinelle, les soirs d’été, quand elle a grandi, elle secrète des gaz et s’en enveloppe comme d’une atmosphère ; il n’y a qu’à en approcher une allumette, cela s’enflamme, et ce sont nos feux d’artifice multicolores, nos feux de bengale, à nous autres de Pont-de-l’Arche. […] réalistes, naturalistes, si l’on veut, bien que feu Champfleury et le médanisme aient fort galvaudé ces beaux termes ; — nous, les évolutionnistes, ou mieux encore les positivistes littéraires (oui, cette dernière appellation conviendrait, il me semble), nous les héritiers, les continuateurs de Sainte-Beuve et de Flaubert, enfin.

1779. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Mémoires du général La Fayette (1838.) »

Je sais la part qu’il faut faire au feu de la jeunesse, et lui-même, quand il revient, pour la raconter, sur cette époque, il semble parler de quelque excès que l’âge aurait tempéré et guéri. […] Elle n’a d’objet, comme on l’a dit, que la construction de lui-même  ; mais le feu sombre et dévorant d’une ambition bouillante et néanmoins dirigée par de profonds calculs a dû produire de grandes conceptions, de grandes actions, et augmenter l’éclat et l’influence de la nation dont il a besoin pour commander au monde.

1780. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Plein d’un tendre amour pour son petit champ, je me représente le doux vieillard assis pendant les feux du jour, à l’ombre ; il écoute « le murmure d’un ruisseau », regarde passer « un laboureur inquiet pour ses moissons, un berger conduisant son troupeau, une nourrice attendrie pour son petit enfant ». […] Ce fut une succession de toutes les fantaisies qui peuvent charmer et ravir les sens, travestissements, cavalcades, courses de bagues, concerts de voix et d’instruments, récits de vers, festins servis par les Jeux, les Ris et les Délices, ballets, machines, feux d’artifices, illuminations, loteries, collations.

1781. (1864) Le positivisme anglais. Étude sur Stuart Mill

Quand je dis que le feu est chaud, je veux dire par là que, lorsque le feu est à portée de mon corps, j’ai la sensation de chaleur.

1782. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

Il est permis de croire que, si Laure se fût donnée à son amant, elle n’eût pas été chérie moins fidèlement et moins longtemps, car elle avait pour entretenir le feu de la passion quelque chose de plus que la beauté. […] Sur la foi d’une pierre gravée qui représente Prométhée construisant l’homme nouveau pour l’animer du feu dérobé à Jupiter, il affirme que les sculpteurs construisent le squelette avant de poser les muscles, et, pour donner à sa méprise un caractère complet de naïveté, il distingue les muscles de la chair.

1783. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Mais la vie paisible qu’il a menée ne pouvait lui fournir l’occasion de pareilles études ; ce n’est pas au banc de l’œuvre ou dans la fabrique de sa paroisse, au coin du feu, en face d’une partie d’échecs, qu’il pouvait apprendre quels sont les vrais devoirs d’une femme, ni à quelles conditions ces devoirs s’accomplissent. […] Un bon lit, une bonne table, un bon feu, sont pour lui tous les biens avoués par la raison, et il ne craint pas qu’une femme élevée dans la misère, familiarisée avec toutes les souffrances du dénuement, compromette jamais la possession de pareils avantages pour une intrigue romanesque. […] Toute l’habileté de mademoiselle Mars ne peut réussir à jouer le rôle d’Agnès : l’intelligence la plus ingénieuse ne peut effacer les rides du front, éteindre le feu du regard habitué à traduire les passions ; la naïveté sur les lèvres de Célimène et d’Araminte ressemble à une raillerie, et parfois même excite l’impatience ; mademoiselle Plessy est taillée pour le rôle d’Agnès. […] Elle se fait gaie, insouciante, frivole, elle jette au feu ses parchemins, et ne s’aperçoit pas que le tiers-état sourit de pitié. […] Nul homme parmi nous n’a été plus constant et plus progressif ; la voie qu’il avait ouverte, il l’a suivie courageusement sous le feu croisé des moqueries et du dédain.

1784. (1890) Les princes de la jeune critique pp. -299

Voltaire reçut un jour d’un perruquier nommé maître André je ne sais quelle horrible élucubration, poème épique ou tragédie ; il lui répondit une grande lettre qui ne contenait que ces mots répétés à satiété : « Maître André, faites des perruques ; faites des perruques, maître André… » Mais, si l’on est contraint parfois de recourir au fer et au feu, comme un chirurgien, ce n’est que dans des cas très graves et presque désespérés, quand il s’agit d’œuvres malsaines et non viables. […] Dans le feu de la lutte il devient presque léger ; il a du moins du mouvement, de l’éclat, d’heureuses trouvailles de style. […] Autrement dit, le livre dont ils parlent ne leur est souvent qu’un prétexte à faire briller leur talent, à tirer des feux d’artifice, à donner une fête à leur esprit et à celui des autres. […] Il n’est pas bien sûr que la mère, réduite à pleurer son fils mort, que le père de famille sans feu et sans pain, apprécient de même le bonheur de souffrir.

1785. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

Elle sortit pour les mettre en sûreté chez un ami ; mais ne l’ayant pas trouvé, elle rentra précipitamment et les jeta au feu.

1786. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Note I. De l’acquisition du langage chez les enfants et dans l’espèce humaine » pp. 357-395

Cet échelon se reconnaît à divers indices, à la possession d’un langage fondé sur des racines, à l’art d’allumer ou au moins d’entretenir le feu (un singe en est incapable), à l’invention de l’ornement (tatouage, peinture des sauvages, déformation volontaire du nez, des oreilles, des lèvres, etc.), à la fabrication des premiers outils (haches en silex, bâtons pointus, etc. ; un singe se sert d’une pierre ou d’un bâton, mais ne sait pas les transformer pour les approprier à un usage).

1787. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 65-128

Fior d’Aliza (suite) Chapitre VI (suite) CLXXXII À ces mots, la jeune Maremmaise poussa son amant à gauche, dans un sentier qui menait à la mer ; quant à elle, elle saisit le tromblon, la poire à poudre, le sac à balles et le chapeau pointu du brigand, et, se jetant à gauche, sous les arbustes moins hauts que sa tête, elle se mit à tirer, de temps en temps, un coup de son arme à feu en l’air, pour que la détonation et la fumée attirassent les sbires tous de son côté, et laissassent à son compagnon le temps de descendre par où on ne l’attendait pas, vers la mer ; elle laissait voir à dessein son chapeau calabrais par-dessus les feuilles, pour faire croire aux gendarmes que c’était le brigand qui s’enfuyait en tirant sur eux.

1788. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Mais la mort de Bègue est un récit d’un grand effet dans sa couleur grise, avec cette accumulation rapide de petits détails pressés d’une si exacte et précise notation : la vie paisible de Bègue dans son château de Belin, entre sa femme et ses enfants, l’ennui qui prend à la fin ce grand batailleur, sourde inquiétude, désir de voir son frère Garin qu’il n’a pas vu depuis longtemps, et son neveu Girbert qu’il n’a jamais vu, désir aussi de chasser un fort sanglier, fameux dans la contrée du Nord ; la tristesse et la soumission douce de la femme ; le départ, le voyage, la chasse si réelle avec toutes ses circonstances, l’aboi des chiens, le son des cors, la fuite de la bête, l’éparpillement des chasseurs, qui renoncent ; Bègue seul âpre à la poursuite, dévorant les lieues, traversant plaines et forêts et marais, prenant ses chiens par moments sur ses bras pour les reposer, jusqu’à ce qu’il se trouve seul, à côté de la bête morte, ses chiens éventrés, en une forêt inconnue, sous la pluie froide de la nuit tombante : il s’abrite sous un tremble, allume un grand feu, prend son cor et en sonne trois fois, pour appeler les siens.

1789. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Paul Verlaine et les poètes « symbolistes » & « décadents ». »

Mais un d’eux est triste ; il propose aux autres de supprimer l’enfer, de se sacrifier à l’amour universel, et alors les démons mettent le feu à la ville, et il n’en reste rien ; mais     On n’avait pas | agréé le Sacritice.

1790. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

Nous ne quittons pas le coin de notre feu, mais, de ce coin, nous nous plions sans peine à toutes les façons de sentir des diverses races, et des plus lointaines.

1791. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, le 8 décembre 1885. »

Jalouse de ses droits écrasés, la déesse d’amour se vengea : le philtre d’amour destiné selon les mœurs du temps par la prévoyante mère à l’époux marié par politique, elle le fit par une rusée mégarde présenter au jeune couple ; eux, l’ayant bu, s’enflammèrent tout à coup d’un clair feu, et se durent avouer qu’ils s’appartenaient l’un à l’autre seulement.

1792. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVII, l’Orestie. — les Euménides. »

Pas de conscience chargée qu’il n’allège, pas d’impureté qu’il ne lave ; le sang versé s’évapore à son feu céleste.

1793. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Edgar Allan Poe  »

Comme la peur s’empare de tout un public silencieux à l’abaissement des feux de la rampe, le sommeil magnétique des convulsionnaires aux longs déchirements d’une cymbale, ces préfaces subjuguent, prédisposent et saisissent, entraînent dans la brume violette où surgit la vision d’Auguste Bedloe, au versant des molles collines que côtoie la frôle barque de la fée, aux voûtes sombres sous lesquelles Roderick Usher pâlit et s’étiole.

1794. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre V : Règles relatives à l’explication des faits sociaux »

En somme, quand on rapporte avec cette rapidité à des facultés esthétiques congénitales le caractère artistique de la civilisation athénienne, on procède à peu près comme faisait le moyen âge quand il expliquait le feu par le phlogistique et les effets de l’opium par sa vertu dormitive.

1795. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Première partie. De la parole et de la société » pp. 194-242

Cependant des hommes d’un génie extraordinaire, qui, comme Prométhée, avaient dérobé le feu du ciel, ou comme Orphée avaient apprivoisé les animaux des forêts, fondèrent une société religieuse.

1796. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Crétineau-Joly »

Les erreurs bouillaient sous le feu de l’esprit d’un siècle incendiaire.

1797. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Le prologue (Aux amis inconnus) est un morceau précieux : Parfois un vers, complice intime, vient rouvrir Quelque plaie où le feu désire qu’on l’attise ; Parfois un mot, le nom de ce qui fait souffrir, Tombe comme une larme à la place précise Où le cœur méconnu l’attendait pour guérir. […] Toute petite, en noir, dans le grand fauteuil rouge, Tranquille auprès du feu, ma vieille mère est là. […] Il s’exprime absolument comme au coin du feu avec des « Oh ! 

1798. (1858) Du roman et du théâtre contemporains et de leur influence sur les mœurs (2e éd.)

De l’autre, les utopies nouvelles qui fermentaient déjà dans les têtes prirent feu aux passions tout à coup rallumées. […] s’écria la Lucrezia avec feu. […] Vous êtes riches, c’est le sceau de l’anathème ; richesse veut dire iniquité : Allez, maudits, dans le feu éternel ! […] On dirait que le feu sacré, qui n’est pas éteint, Dieu merci ; qui, je l’espère, ne s’éteindra jamais en France, languit sur l’autel abandonné et ne jette plus aujourd’hui que de mourantes clartés… On dirait que le culte de l’idéal est tombé en désuétude et en dédain ; que votre cœur, indifférent aux joies de la pensée, ne bat plus que pour les voluptés grossières.

1799. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

Le feu prend en un même instant à des magasins de marchandises combustibles et les embrase tous à la fois : rapide à sa naissance, le vent ajoute à son activité, et le défaut de maisons revêtues de gros murs, ou de temples munis de remparts, favorise ses progrès ; il ravage les espaces de niveau, il monte, il redescend avec plus de force. […] On n’ose garantir sa propre maison : ce sont de toutes parts des gens qui menacent, si l’on essaye d’arrêter le feu ; d’autres qui lancent, à la vue du peuple, des torches enflammées, et qui crient qu’ils y sont autorisés, soit en conséquence d’ordres réels, soit à dessein d’étendre le pillage. […] Ce fut alors qu’on publia des prodiges de toute espèce : des oiseaux funèbres s’étaient abattus sur le Capitole ; la terre avait été secouée par des tremblements ; le feu du ciel avait embrasé les enseignes militaires ; une truie avait mis bas un petit qui avait les serres d’un épervier ; une femme était accouchée d’un serpent ; le figuier ruminal221 avait perdu ses branches.

1800. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

On en a fait une espèce de feu d’artifice, quelque chose d’ironique et de déplaisant, une gaieté outrancière, une virtuosité frondeuse qui tient le milieu entre la pose, le rire et la blague. […] L’esprit d’autrefois jaillissait en éclairs ; aujourd’hui c’est une poignée de poudre jetée sur du feu. […] Lisez ce tableau de forêts : « Des coups de bec contre le tronc des chênes, des froissements d’animaux qui marchent, broutent ou broient entre leurs dents les noyaux des fruits ; des bruissements d’ondes, de faibles gémissements, de sourds meuglements, de doux roucoulements remplissent ces déserts d’une tendre et sauvage harmonie. » Et cet orage célèbre : « L’obscurité redouble, la nue se déchire, et l’éclair trace un rapide losange de feu. […]  » Quelle nuit j’ai passée… Les cheveux trempés de la vapeur de la nuit, je croyais voir une femme qui se jetait dans mes bras ; elle me disait : « Viens échanger des feux avec moi et perdre la vie ! […] Ce fut un amour d’artiste et de femme raffinée, un rapide éblouissement, un feu vite consumé.

1801. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Et comme là-haut, —  ces feux roulants ne découvrent que la voûte céleste — sans nous éclairer ici-bas ; tel le rayon vacillant de la raison — nous fut prêté, non pour assurer notre route incertaine, —  mais pour nous guider là-haut vers un jour meilleur. —  Et comme ces cierges de la nuit disparaissent — quand l’éclatant seigneur du jour gravit notre hémisphère, —  ainsi pâlit la raison quand la religion se montre ; —  ainsi la raison meurt et s’évanouit dans la lumière surnaturelle789. […] —  Ma jeunesse imprudente a volé parmi les vains désirs ; —  mon âge viril, longtemps égaré par des feux vagabonds, —  a suivi des lueurs fausses, et quand leur éclair a disparu, —  mon orgueil a fait jaillir de lui-même d’aussi trompeuses étincelles. —  Tel j’étais, tel par nature je suis encore. —  À toi la gloire, à moi la honte. —  Que toute ma tâche maintenant soit de bien vivre !

1802. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1894 » pp. 185-293

Et ma foi, il avait construit de ses mains une rôtissoire en fer-blanc, et faisait rôtir la bécasse devant un feu de bois clair et flambant, ayant l’art de la faire couler dans le canapé, et soutenant qu’il n’y avait pas dans le monde, un rôtisseur de bécasses comme lui. […] » Un autre jour, la mère parlant encore de son enfant, de sa manie de toucher aux allumettes, de sa crainte qu’il n’incendiât la maison, et racontant que pour lui faire peur du feu, elle lui avait tenu un moment le doigt au-dessus d’une bougie, la sœur de s’écrier : « Le pauvre petit…, oui, ça sentait la fonte de la graisse ! 

1803. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

Dans le système de l’assonance, la rime vraie n’est qu’un hasard ; dès le xiie  siècle, elle est assez fréquente : dei et tornei, parpens et tens, conseil et soleil, triforie et ivorie, Les rocs sont de crisoprase Color de feu ont qui embrase… Cela est tiré du Roman de Thèbes, lequel est rimé avec beaucoup de soin. […] Et voici des vers que, par jeu, le poète voulut bien écrire à notre intention pour cette enquête : Toute l’âme résumée Quand lente nous l’expirons Dans plusieurs ronds de fumée Abolis en autres ronds Atteste quelque cigare Brûlant savamment pour peu Que la cendre se sépare De son clair baiser de feu Ainsi le chœur des romances À ta lèvre vole-t-il Exclus-en si tu commences Le réel parce que vil Le sens trop précis rature Ta vague littérature Qu’on ne s’étonne pas si nulle ponctuation ne précise ces vers — banvillesquement rimés — : ce fut par expresse volonté du poète qui exprime ainsi le « flou du flou ».

1804. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre VI. La parole intérieure et la pensée. — Second problème leurs différences aux points de vue de l’essence et de l’intensité »

L’habitude est comme l’extinction graduelle du feu par la combustion ; l’attention est comme une force qui ajouterait à chaque instant le combustible nécessaire à l’entretien du feu sacré.

1805. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

On faisait cas de l’Essai de Voltaire sur la Nature du feu, et de ses Doutes sur la mesure des forces motrices, 1741. […] Le parlement de Paris répond en condamnant au feu le Dictionnaire philosophique, 1765. […] Eugène Asse, ses éditions des Lettres de Mme de Graffigny, Paris, 1879 ; et des Lettres de Mme du Châtelet, Paris, 1882]. — Variété des travaux de Voltaire : — son Alzire, 1736 ; — Le Mondain, 1736 ; — et de la netteté avec laquelle s’y trouve exprimée l’idée de progrès. — La comédie de L’Enfant prodigue, 1736 ; — Voltaire entre en correspondance avec le prince royal de Prusse, depuis Frédéric II ; — l’Essai sur la nature du feu, 1737 [Cf. 

1806. (1891) Lettres de Marie Bashkirtseff

Ce teint olivâtre, cette barbe noire, ce crâne nu, ces yeux arabes énormes, brillants, tout cela s’enflamme du feu le plus naturel à la vue de mes cheveux blonds et de ma peau blanche. […] Jusqu’au départ de Soria, B. et Rapsaïd, ce fut un feu d’artifice de mots, de musique, d’éclats de rire. […] La famille est aux petits soins, les nouveaux me trouvent délicieuse, les anciens trouvent que je suis devenue sérieuse et calme… Il y a cinq ans, je venais montrer mes premières jupes longues et je leur ai servi un feu d’artifice à tout casser ; à présent je viens chercher quelque chose qui flotte entre oubli et repos.

1807. (1888) Études sur le XIXe siècle

Il en est réduit à se contenter des rétributions insuffisantes et peu sûres que lui rapportent quelques travaux pour des éditeurs, et encore, pour pouvoir se mettre en route, est-il obligé de recourir à ses oncles, au marquis Carlo Antici ou au comte Ettore Leopardi : « Que la somme qu’il vous plaira de m’accorder soit petite ou grande, elle me serait un gage de votre bonté, et je vous en serais reconnaissant jusqu’au fond de l’âme : surtout je vous prie de me pardonner la liberté que j’ai prise, et de croire qu’en dehors d’une telle circonstance (il s’agit d’un départ pour Milan), je n’aurais jamais eu le courage de vous incommoder… » Voilà des faits qui éclairent définitivement les relations de Leopardi avec sa famille, et l’on est forcé d’admettre qu’il fut malheureux par elle : il souffrit de la sécheresse de cœur de sa mère, de la faiblesse de son père, de la gêne où on le laissa ; et, par ce qu’il en dit dans ses lettres, par ce qu’en dit aussi sa sœur Paolina, nous pouvons jusqu’à un certain point deviner tout ce qu’il n’y a pas dans les documents : l’enfance morose, sans joie, sans caresses, sans sourires, sans jouets ; puis les blessures continuelles infligées au jeune cœur qui veut se donner et qu’on repousse et qui crie désespérément : « J’ai besoin d’amour ; amour, amour, feu, enthousiasme, vie !  […] « Ô toi qui, à l’heure de l’Amour, avec extase — offres sans cesse à mon cœur — enveloppé du feu de l’Amour, ton cœur, testament de l’Amour ; — toi que j’ai approchée et dont j’ai respiré le souffle — « Comme le plus pur encens du sanctuaire de l’Amour, — toi qui as rendu témoignage de l’Amour sans parole, et, soumise — à sa volonté, as confondu ta vie avec la mienne, — et murmuré : “Je suis à toi, tu ne fais qu’un avec moi !” […] Il est vie, esprit, germe, ouragan, vertu, feu ; Car le mot, c’est le Verbe, et le Verbe, c’est Dieu. […] Et ces fiers insulaires le prouvent bien en entretenant le feu sacré dans les montagnes !

1808. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Ses feuilletons étaient les feuillets déchirés ou volants d’un beau livre sans suite. » Ils nous le montrent, jetant au papier, le samedi matin « ses douze colonnes, tantôt belles, rythmées, profondes et tendres comme un psaume, tantôt pleines de la vie, du feu de la passion d’un témoin contemporain. » Plus perspicaces qu’ils ne le sont d’habitude, — car le discernement des causes leur manque trop souvent, — les deux frères apercevaient le principe de cette supériorité du feuilletoniste : son énorme et passionné travail intérieur à la Gœthe. […] En tête de ce papier, un seul mot : « Feu. » Puis des cris : « Certitude, Certitude, Sentiment, Joie, Paix, Joie, Joie, Joie, Pleurs de joie… » Cette certitude, comment la faire partager ? […] Les volcans se découvrent, avec leurs cratères échancrés qui furent des bouches de feu. […] « Mes lèvres sourient », écrit le père au comte de Falloux, « mais mon cœur se tord, quand je vois mon fils aîné déguisé en lancier, et s’exerçant six heures par jour, pour être prêt à aller au feu, la semaine prochaine, Dieu sait où !

1809. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LONGUEVILLE » pp. 322-357

Dans les entretiens du soir, le bon Arnauld, près de s’endormir au coin du feu, et rentrant tête baissée dans l’égalité chrétienne, défaisait tout doucement ses jarretières devant elle, ce qui la faisait un peu souffrir.

1810. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

« Ne croyez pas que monsieur l’exécuteur des hautes œuvres ait la permission de jeter au feu les livres dont les titres figurent dans l’arrêt de la Cour.

1811. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 5-79

L’Angleterre aurait placé le quartier général de ses flottes et de ses armées dans le Bosphore ou à Constantinople ; le monde eût été en feu pour une chimère du cabinet de Charles X, et cette chimère aurait dévoré les Bourbons eux-mêmes !

1812. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviie entretien. Un intérieur ou les pèlerines de Renève »

On entrait par un vestibule au bout duquel était une vieille horloge de campagne qui avait si souvent sonné les heures de l’heureuse famille alors ; une rangée de sacs de farine pour la maison était debout d’un côté, une large cuisine s’ouvrait du côté opposé, pleine de bruit, de feu, de domestiques, de mendiants et de malades, comme du temps de M. et de madame de Lamartine.

1813. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

. — Jacqueline Pascal (1625-1661), esprit vif, imagination de feu, fut comme une enfant prodige, obtint à treize ans un prix de poésie.

1814. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Cette solitude et cette contention opiniâtre le fatiguèrent tellement, que, s’il faut en croire son biographe Baillet, le feu lui prit au cerveau et qu’il fut troublé par des songes et des visions.

1815. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Les idéalistes comme nous doivent n’approcher de ce feu-là qu’avec beaucoup de précautions.

1816. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

Ainsi, par qui nous ont été révélés le ciel de feu et la végétation luxuriante des tropiques ?

1817. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mai 1886. »

Le chevalier est en un instant transporté du fond de ces retraites où les cassolettes et les lampes odorantes éclairent de leurs feux colorés une nuit de plaisirs sans fin, au milieu d’une fraîche et pure matinée de printemps.

1818. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 novembre 1886. »

Dupont et Lapissida se proposent de monter l’œuvre de Wagner avec tout le soin désirable ; la chevauchée des Valkyries et la scène du feu seront rendues avec autant de réalisme que possible.

1819. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

Et il arrivait que mon indignation d’être arrêté, l’horreur de la société au milieu de laquelle je me trouvais, la perte de mon manuscrit, tout cela disparaissait dans la recherche que je faisais, en ma cervelle en feu, du moyen de me transporter près de ces deux femmes, sans éveiller l’attention d’un garde-chiourme terrible qui fumait un brûle-gueule, adossé au mur, à côté de moi.

/ 1984