/ 2003
1297. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

La sœur de Beaumarchais, Julie, que M. de Loménie nous a fait connaître, représente bien son frère par son tour de gaieté et de raillerie, son humeur libre et piquante, son irrésistible esprit de saillie ; elle le poussait jusqu’à l’extrême limite de la décence, quand elle n’allait pas au-delà ; cette aimable et gaillarde fille mourut presque la chanson à la bouche : c’était bien la sœur de Figaro, le même jet et la même sève5.

1298. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. » pp. 31-51

Giscon était près de réussir dans la composition qui se négociait, lorsque deux hommes dont l’histoire a conservé les noms se jetèrent à la traverse : un certain Campanien nommé Spendius, autrefois esclave chez les Romains, homme fort et hardi jusqu’à la témérité, et qui craignait, si les affaires s’arrangeaient, d’être rendu à son maître comme fugitif ; et un certain Mathos, Africain, qui, engagé dans la première sédition, avait tout intérêt à pousser les choses à l’extrémité.

1299. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

. — Le bon Sosie ne manque pas de glisser de nouveau son proverbe et de pousser, selon son habitude, l’idée de son maître jusqu’à en faire une maxime : « C’était bien sage à lui, dit-il, d’en agir ainsi ; car, par le temps qui court, la complaisance engendre l’amitié, la vérité fait des ennemis. » — « Cependant, poursuit le père, voilà bien trois ans de cela, arriva ici dans le voisinage une femme d’Andros, sans parents, pauvre, belle, à la fleur de l’âge. » — « Aïe !

1300. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Cervantes le suivit à Rome et fit partie de sa maison en qualité de chambellan ou valet de chambre ; mais cet état de domesticité, réputé honorable, paraît lui avoir peu convenu, et, au lieu de pousser sa fortune près de son patron, de devenir signor abbate et le reste, on le voit bientôt engagé soldat au service de la ligue conclue entre le pape, Philippe II et les Vénitiens, dans cette espèce de sainte croisade commandée par Don Juan d’Autriche contre les Turcs.

1301. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

A force de poursuivre tous les perfectionnements qu’a apportés l’Évangile dans la vie humaine et de pousser à bout toutes les conséquences de Jésus-Christ telles qu’il les comprend et qu’il les aime, il excède et il sort de toutes les proportions de l’histoire ; il est dans le dogme, il entre dans les mystères mêmes de la vie future et des récompenses destinées aux élus.

1302. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Cependant, nonobstant les dissidences possibles sur plus d’un point essentiel, on ne laisse pas de s’entendre en gros sur le mouvement général et complexe qui pousse et améliore la société en bien des branches, et M. 

1303. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite et fin.) »

Mais, en réduisant cette dernière à sa juste valeur et en ne voyant dans la princesse naine qui y tenait le sceptre qu’un bel esprit impérieux et fantasque, il serait vraiment injurieux de pousser plus loin la comparaison et de confondre pour la qualité des goûts la duchesse du Maine avec son neveu.

1304. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

Ackermann a publié en 1839 l’Illustration de du Bellay, avec une préface où il commençait l’exposé de ses vues littéraires ; il les a reprises et poussées depuis dans la préface d’un volume intitulé Chants d’Amour (Crozet, 1841).

1305. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

« L’amour est une grande chose, un grand bien, qui rend tout fardeau léger… L’amour pousse aux grandes actions, et excite à désirer toujours une perfection plus haute… Rien n’est plus doux que l’amour, rien n’est plus fort, ni plus liant, ni plus large, ni plus doux, ni plus plein, ni meilleur au ciel ni sur la terre… L’amour vole, court, il a la joie.

1306. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre II. Le mouvement romantique »

En Allemagne, Schiller (mort en 1805) avait produit toute son œuvre, et Goethe avait donné son premier Faust, si complexe d’inspiration et si peu classique de forme : puis avaient poussé les fantaisies romantiques, sentimentales, vagues, déconcertantes souvent pour l’esprit et troublantes pour le cœur, avec Novalis, Tieck, et autres.

1307. (1900) L’état actuel de la critique littéraire française (article de La Nouvelle Revue) pp. 349-362

Il est évident que les bonnes et dignes feuilles solennelles d’autrefois sont mortes, et que le reportage et l’afflux d’informations télégraphiques poussent tous les journaux à devenir des feuilles d’annonces et de nouvelles rapides, en sorte que les choses propres à faire penser lentement doivent en être exclues : il y a là de quoi décourager les esprits critiques soucieux de dignité, de quoi aussi encourager les directeurs à les renvoyer aux revues mensuelles.

1308. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Il feint de croire que la charité seule le guide vers la belle dormeuse et veut pousser très loin ses soins charitables, quand son élève arrive.

1309. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VIII. Les écrivains qu’on ne comprend pas » pp. 90-110

Si l’on pousse les gens, ils prennent dans l’édition Perrin les Morceaux choisis de Mallarmé, et se dilatent sur la Prose pour des Esseintes ou Une dentelle s’abolit.

1310. (1890) L’avenir de la science « XII »

Pas un seul n’a inséré son action dans le grand mouvement des choses ; pas un seul ne comptera dans la statistique définitive de ceux qui ont poussé à l’éternelle roue.

1311. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXIV. Arrestation et procès de Jésus. »

Judas, selon l’unanime tradition des premiers temps, accompagnait lui-même l’escouade 1095, et même, selon quelques-uns 1096, il aurait poussé l’odieux jusqu’à prendre pour signe de sa trahison un baiser.

1312. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 janvier 1887. »

Il a poussé à leurs extrêmes limites la science du développement, l’art d’exposer un motif, de le présenter sous des aspects nouveaux, et, usant de toutes les ressources polyphoniques, de le combiner à l’infini, soit avec ses propres imitations, soit avec des thèmes différents.

1313. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre II : L’intelligence »

Notre principale faculté active est traduite par la volition dont la nature est de nous pousser à fuir la douleur et rechercher le plaisir.

1314. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Poésies nouvelles de M. Alfred de Musset. (Bibliothèque Charpentier, 1850.) » pp. 294-310

Tout respire en ces lieux ; les fleurs des cimetières               Ne poussent point ici.

1315. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie-Antoinette. (Notice du comte de La Marck.) » pp. 330-346

On y pressent les fautes auxquelles ses alentours ne manqueront pas de la pousser, celles qu’on lui prêtera, et les armes qu’elle va fournir, sans y songer, à la malignité.

1316. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Son drame d’Abélard l’y a singulièrement poussé.

1317. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 13, qu’il est des sujets propres specialement pour la poësie, et d’autres specialement propres pour la peinture. Moïens de les reconnoître » pp. 81-107

Je n’ai point prêté d’esprit à Raphaël, et je doute même qu’il soit possible de pousser l’invention poëtique plus loin que ce grand peintre l’a fait dans les tableaux de son bon tems.

1318. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

Apparemment les auteurs attendaient une autre gloire et espéraient pousser par la curiosité leurs plus lointains arrière-neveux à lire aussi le contenu.

1319. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

Il n’y a dans son livre que les opinions du parti auquel elle appartient probablement depuis le berceau… À cela près d’un fort petit nombre d’esprits, chez qui la réflexion domine et pousse à la recherche de la vérité, on n’a guère communément que les opinions de sa naissance ou de son milieu.

1320. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

s’il fut jamais un homme, au contraire, qui s’éloignât par tous ses instincts révoltés de la philosophie du xviiie  siècle, ce fut Sterne, cet esprit tout âme, qui n’eut peut-être de génie qu’à force d’avoir de cette âme qu’on niait si fort dans son temps ; ce fut cette délicate sensitive humaine, dont la racine trempait dans cette idée de Dieu qui fait pousser leurs plus belles fleurs aux plus beaux génies !

1321. (1864) Le roman contemporain

Il nous serait facile de pousser plus loin cette histoire de la grandeur et de la décadence des romans qu’on pourrait appeler les éphémères de la littérature. […] Le public, refusant de servir de complice à l’auteur, vient donc d’applaudir Renée, la grande Vendéenne, et de siffler son triste mari, qu’il faut pousser par les épaules au péril et à la gloire. […] Octave Feuillet a résolu de pousser jusqu’au bout sa gageure. […] Octave Feuillet, décidé à pousser sa thèse à l’extrême et à ne s’arrêter que lorsque le terrain lui manquera sous les pieds ? […] Je ne crois pas que la Société protectrice des animaux pousse jusque-là ses exigences envers ses membres les plus zélés.

1322. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

De nos jours, les arts ont poussé jusqu’à l’exagération les emprunts qu’ils peuvent mutuellement se faire ; ils ont cherché à s’approprier les ressources les uns des autres par une confusion de leurs limites respectives, encore plus déplorable que l’isolement qui leur faisait autrefois méconnaître leurs communs rapports. […] Aux époques où, en l’absence de toute grande pensée, un art se fractionne en genres aussi étroits et aussi multipliés que les fantaisies des sens, il est fatalement poussé à sortir de ses limites. […] Ce n’est point un sentiment plus vif de l’unité qui, à des époques telles que la nôtre, pousse les artistes à franchir les bornes légitimes de leur art, c’est, au contraire, un oubli complet du but de l’art en général, et le désir de stimuler les sens blasés faute de pouvoir parler au cœur. […] Autour de ces écrivains qui ont poussé jusqu’au scrupule le respect pour la dignité de la pensée, il se fait d’ordinaire un silence dénigrant, au milieu duquel la légèreté conspire avec la malveillance contre leur renommée. […] Lorsque Dante lui-même m’a transporté entre Lucie et Béatrix au milieu de ses visions éblouissantes, après les premiers enivrements de l’hallucination, l’instinct même de la conservation pousse mon esprit à chercher une atmosphère moins subtile et à descendre précipitamment de ces hauteurs vertigineuses.

1323. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome I

Le thermomètre est introduit dans la veine et on le pousse jusque dans le cœur, en le dirigeant un peu de droite à gauche et d’arrière en avant. […] On pousse l’injection très lentement, et c’est un précepte général pour toutes les injections faites sur les animaux vivants. […] Enfin, nous poussons l’injection jusqu’à la fin de la seringue, parce que nous avons eu soin de chasser tout l’air de l’instrument. […] Quand on fait ces injections d’eau salée sous la peau, ainsi que vous nous le voyez faire en ce moment, l’animal pousse constamment des cris, ce qui provient sans doute de l’action du sel sur les nerfs. […] Alors à l’aide d’une seringue on aspira 24 grammes de sang de la veine que l’on poussa dans un flacon renversé sur le mercure et contenant 500 centimètres cubes d’oxygène.

1324. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Ils se sont formé un modèle, et, dorénavant, comme une consigne, ce modèle les retient ou les pousse. […] » Il finit par l’appeler bête féroce, apostat et Diable : « Ne doute pas que tu ne sois réservé à la même fin que Judas, et que, poussé par le désespoir plutôt que par le repentir, dégoûté de toi-même, tu ne doives un jour te pendre, et, comme ton émule, crever par le milieu du ventre456. » On croit entendre les mugissements de deux taureaux. […] J’ose dire qu’ils sont aussi animés et aussi vigoureusement productifs que les dents du dragon fabuleux, et qu’étant semés ici ou là, ils peuvent faire pousser des hommes armés. […] Une femme sage, aux explications d’un étranger, « préfère les explications de son mari. » Cependant Adam écoute un petit cours d’astronomie : il finit par conclure, en Anglais pratique, « que la première sagesse est de connaître les objets qui nous environnent dans la vie journalière, que le reste est fumée vide, pure extravagance, et nous rend, dans les choses qui nous importent le plus, inexpérimentés, inhabiles et toujours incertains514. » L’ange parti, Ève, mécontente de son jardin, veut y faire des réformes, et propose à son mari d’y travailler, elle d’un côté, lui d’un autre. « Ève, dit-il avec un sourire d’approbation, rien ne pare mieux une femme que de songer aux biens de la maison, et de pousser son mari à un bon travail515. » Mais il craint pour elle, et voudrait la garder à son côté.

1325. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

En effet, aucune philosophie dans aucun temps n’a poussé aussi loin l’assimilation de la raison humaine et de la raison divine ; aucune n’a tenté un effort plus hardi et plus violent pour déduire le monde entier de certaines idées à priori ; aucune n’a plus audacieusement affirmé qu’elle était parvenue à découvrir et à expliquer l’essence des choses. […] Que d’ailleurs ces degrés successifs soient distincts les uns des autres, et même qu’il puisse y avoir des intervalles plus grands à certains degrés de l’échelle, c’est ce qui n’a rien de contraire au principe de continuité, car si l’on voulait pousser ce principe jusqu’au bout, il nous entraînerait non-seulement à l’identité, mais à l’immobilité universelle. […] Ce qu’on ne saurait contester. ; c’est que, malgré la répugnance des savants pour les idées générales, malgré les progrès constants de l’analyse et les abus de la division du travail, la force des choses toute seule a poussé la science dans une voie de généralisation et de synthèse vraiment remarquable. […] Quand les formules scientifiques sont absolument inapplicables, ces esprits, si exacts dans leur domaine propre, deviennent confus, obscurs, inexacts dans les questions philosophiques proprement dites, et pour introduire dans la philosophie un genre de précision qui ne lui convient pas, ils négligent celui qu’elle peut admettre ; ils oublient ou ils ignorent des distinctions importantes parfaitement établies, des analyses de faits déjà poussées très-loin, des arguments très-solides.

1326. (1923) Critique et conférences (Œuvres posthumes II)

J’attends sans même conseiller, — mais non sans donner mon avis prudent, réservé, après avoir, comme on a bien voulu me le rappeler, poussé mon cri d’alarme contre la Rime abusive. […] Un jour, à Guernesey, après déjeuner, les deux hommes se prirent de discussion sur des matières philosophiques et religieuses, et comme Vacquerie poussait très avant sa pointe et rétorquait sans ménagement, à mesure qu’ils se produisaient, tous les arguments d’Hugo, celui-ci, tout rouge presque de colère, de se voir acculé de si près, s’écria : « Eh bien, je vous répondrai dans huit jours », et il monta s’enfermer dans le belvédère qui dominait sa maison et qui lui servait de cabinet de travail, y resta huit jours sans en descendre, y couchant, y mangeant. […] Aujourd’hui, l’affreux Caribert, à qui j’ai été, par suite d’une insinuation aussi odieuse que gratuite, forcé d’apprendre jadis que telle aventure judiciaire m’était arrivée par suite uniquement de violences, ce même monsieur, dis-je, me blâme — c’est son droit — de me présenter à l’Académie, mais il affirme que ce sont mes amis qui m’y poussent (il m’avait toujours semblé que c’était moi qui exerçais une influence sur eux). […] J’ai, il y a une quinzaine, adressé à M. le Secrétaire perpétuel de l’Académie la déclaration de ma candidature, et pousserai celle-ci du mieux possible.

1327. (1902) Propos littéraires. Première série

Anatole France arrive à un genre pour lequel j’ai toujours assuré qu’il était né et vers lequel je l’ai, pour mon compte, poussé, il s’en souvient peut-être, de tout mon pouvoir. […] C’est à quoi nos Étatistes poussent de toutes leurs forces, et qu’ils y réussissent un peu, et même beaucoup, cela ne me fera que plaisir ; mais ils n’y réussiront jamais entièrement. […] Il ne poussa pas un cri. […] Ce serait pousser un peu loin l’humeur contredisante attribuée quelquefois au sexe faible. […] Il y a vraiment beaucoup de rapports entre Musset et Henri Heine, sans, je le reconnais, qu’il faille pousser jusqu’à l’identification.

1328. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

Il pousse la subdivision et découvre bientôt qu’il y a six surprises, sept séparations, et quatre changements : soit en tout dix-sept paragraphes, de longueur à peu près égale. […] Certainement il serait difficile de le dire, et par conséquent facile de pousser le paradoxe. Mais il n’est jamais bon de pousser trop loin les paradoxes, parce qu’il y a toujours quelqu’un qui les prend au sérieux. […] Le philosophe en poussa des cris d’aigle. […] Si Voltaire et Rousseau n’avaient pas été là, d’Alembert et Diderot perdaient la bataille pour avoir voulu trop vivement pousser leurs premiers avantages.

1329. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Ils vous poussent à déchoir. […] Une curiosité naturelle nous pousse à remonter aux obscurs commencements des hommes connus. […] Brunetière, le premier, poussa l’attaque avec sa raideur coutumière. […] Mais quand il eut ôté son masque, elle poussa un cri d’horreur et s’enfuit épouvantée. […] Et il me faut pousser en avant et brûler la symbolique du faune de M. 

1330. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1888 » pp. 231-328

Et comme on le pousse là-dessus, Bonnetain avoue qu’il a une maladie de cœur, venue à la suite de scènes dont il a été le triste témoin, et qu’aujourd’hui encore, les cris, les chamaillades le mettent dans un tel état nerveux, que dans sa maison, où il y a un ménage qui se dispute fréquemment, quand cela arrive, il se lève de sa table et quitte son travail. […] Mardi 15 mai Enfin, ce soir, dans l’effacement du crépuscule, le doux bruit humide de la pluie sur les feuilles neuves, avec cette fraîche et revivifiante senteur de la pousse des choses de la nature. […] si j’avais encore quelques années à vivre, je voudrais écrire sur l’Art Japonais un livre dans le genre de celui que j’ai écrit sur l’Art du dix-huitième siècle, un livre moins documentaire, mais un livre encore plus poussé vers la description pénétrante et révélatrice des choses.

1331. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Janvier, lui, ce jeune acteur d’un si grand talent, gagne cent francs par mois, dans une compagnie d’assurances, et comme on le pousse à quitter sa compagnie, et qu’on lui prédit qu’il lui sera impossible de ne pas faire sa carrière du théâtre, il s’y refuse doucement, disant qu’il ne veut pas faire trop de peine à son père, qui peut très bien ne connaître rien aux choses d’art, mais qui l’aime beaucoup, et qu’il veut le laisser tranquillement évoluer, persuadé, qu’un jour, il le laissera jouer, mais alors sans trop de répugnance. […] Il faut cette année pousser les préparatifs de sa sortie de scène. […] Samedi 18 juillet Au moment de se coucher, pendant que Daudet soutenait que le talent n’était rien qu’une intensité de vie, un mélancolique cri de crapaud le faisait revenir à la fabrique de son père, où les ouvriers s’amusaient à mettre un crapaud sur une planche basculante, et avec un coup de bûche sur la planche, on le lançait dans l’air, et, disait Daudet, la pauvre bestiole poussait un cri dans les étoiles, et retombait escrabouillée sur le sol.

1332. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IV : Sélection naturelle »

D’autre part, la fertilité du Trèfle dépend, ainsi qu’on l’a déjà vu, de ce que les Abeilles en remuent les pétales, de manière à pousser le pollen sur la surface du stigmate. […] Mais dans la plupart de ces fleurs on remarque aussi une adaptation très curieuse entre leur structure et les habitudes ou les instincts des Abeilles qui, en suçant leur nectar, poussent le pollen de la fleur sur le stigmate, ou bien déposent sur celui-ci du pollen d’une autre fleur. […] — Mais nous pouvons pousser notre argumentation plus loin.

1333. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Il avait naturellement l’âme musicale et sensible jusqu’à la chimère, et cela était poussé au point que dans un temps il ne pouvait prononcer le simple nom de Cymodocée sans répandre des larmes. […] Suivant lui, le principe nouveau qui agite le monde, ou qui rôde à l’entour pour y pénétrer, s’incarne quelquefois prématurément en certains individus, les exalte, les égare et les pousse en automates à des forfaits : ainsi Louvel, ainsi l’Homme sans nom, le régicide.

1334. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre troisième. Les sensations — Chapitre II. Les sensations totales de la vue, de l’odorat, du goût, du toucher et leurs éléments » pp. 189-236

. — Sans pousser l’induction si loin, le cas de l’étincelle électrique montre que la sensation de lumière, comme la sensation d’un son très aigu, est composée d’une suite continue de sensations très nombreuses, successives et semblables qui, pour nous, forment un bloc indécomposable et simple. […] Mais ce n’est point là une différence d’action, c’est une différence d’excitant ; il n’y a dans la sensation musculaire proprement dite qu’une espèce de tiraillement semblable aux autres, et capable comme les autres de devenir douleur s’il est poussé loin.

1335. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (1re partie) » pp. 337-416

Rousseau pousse l’exigence du parvenu jusqu’à vouloir dîner, malgré son ambassadeur, avec les têtes couronnées qui passent à Venise et qui invitent à leur table l’ambassadeur de France. […] Est-ce aux témérités d’esprit d’un romancier solitaire, est-ce aux excentricités d’un cynique révolté contre la société, est-ce au suprême bon sens du plus chimérique des rêveurs, après Platon, est-ce à un courtisan des boudoirs des femmes légères de cour et de ville du siècle de Louis XV, est-ce au génie malade et malsain qui n’a jamais pu assujettir sa vie à aucun travail sérieux, à aucune règle de sociabilité utile, à aucune hiérarchie civile, toujours prêt à changer de Dieu et de patrie, comme poussé par une Némésis vagabonde à travers les régions extrêmes de l’idéal ou du désespoir, depuis le délire jusqu’au suicide ?

1336. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIe entretien. L’Imitation de Jésus-Christ » pp. 97-176

Il est difficile de juger au vrai si c’est le bon ou le mauvais esprit qui vous pousse à désirer ceci ou cela, ou si c’est un mouvement de votre esprit ; plusieurs ont été trompés à la fin, qui semblaient d’abord conduits par le bon esprit. […] Quand elle était levée, elle y mettait en guise de signet une petite branche de buis bénit le jour des Rameaux, comme si ce buis jauni par l’année avait poussé entre ses pages, puis elle nous faisait balbutier nos prières, et nous courions après au jardin.

1337. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1860 » pp. 303-358

Nous avons cette fébrilité qui vous chasse de votre chez soi et vous pousse dans la rue… Et à la fin de la journée, nous sommes au boulevard du Temple, dans le cabinet de travail de Flaubert, dont le milieu de cheminée est un Boudha. […] 25 mai Il y a en nous un instinct irraisonné qui nous pousse à l’encontre des despotismes d’hommes, de choses, d’opinions.

1338. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Nous poussions quelquefois jusques aux Invalides, Où, mêlés aux badauds descendus des faubourgs, Nous suivions la retraite et les petits tambours. […] Richepin, il n’y a de personnel et d’original que le degré de grossièreté auquel il a poussé le sentiment matérialiste252.

1339. (1856) Cours familier de littérature. I « IIIe entretien. Philosophie et littérature de l’Inde primitive » pp. 161-239

XIV Il en est de cet instinct du progrès et du bonheur indéfinis de l’humanité sur la terre, comme il en est d’un autre instinct que Dieu a donné invinciblement à l’homme ; instinct que l’homme sait parfaitement illusoire ici-bas, et qui cependant le pousse invinciblement aussi à tendre toujours vers un but dont il ne se rapproche jamais : nous voulons parler de l’aspiration au bonheur complet et permanent sur la terre. […] Ceux qui atteignent cette doctrine seront sauvés par leurs œuvres, les autres seront retardés. » XXXVII « Mais par qui, ô Krisna », demande le disciple, « les hommes sont-ils poussés à commettre le mal ? 

1340. (1840) Kant et sa philosophie. Revue des Deux Mondes

Ajoutez à ce défaut celui de la langue allemande de cette époque poussé à son comble, je veux dire ce caractère démesurément synthétique de la phrase allemande qui forme un contraste si frappant avec lecaractère analytique de la phrase française. […] Mais en même temps Kant n’hésite pas à proclamer qu’elle est possible ; il en appelle au besoin éternel de la nature humaine ; il compare la métaphysique à une plante dont on peut bien couper tous les rejetons qui ont poussé jusqu’ici, mais dont on ne peut extirper les racines.

1341. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire littéraire de la France. Ouvrage commencé par les Bénédictins et continué par des membres de l’Institut. (Tome XII, 1853.) » pp. 273-290

Il a poussé un soupir des plus profonds ; pour tout l’or du monde, il n’eût pu s’en retenir.

1342. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — I. » pp. 343-360

Martin68, a vu, non pas naître, mais se développer avec une faveur toute nouvelle deux hypothèses peu conciliables, et pourtant acceptées alors avec enthousiasme par les mêmes esprits, parce qu’elles dérivent d’une même source, de la passion pour le nouveau et l’inconnu, savoir : l’hypothèse du progrès indéfini de l’humanité, et l’hypothèse d’un âge d’or des sciences mathématiques et physiques près du berceau du genre humain. » En effet, dans le temps même où Turgot traçait pour l’humanité le programme d’une marche ascendante et d’un progrès indéfini, que Condorcet devait développer avec une sorte de fanatisme et pousser aux dernières limites, jusqu’à dire que la mort pour l’homme pourrait se retarder indéfiniment, Buffon, Bailly se reportaient en arrière vers un âge d’une date non assignable, dans lequel ils plaçaient je ne sais quel peuple sage, savant, inventeur à souhait, et créaient un véritable âge d’or pour des imaginations d’académiciens.

1343. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — I. » pp. 446-462

Cependant, poussé avant tout par l’instinct de voyageur, et de voyageur de montagnes, il commença de bonne heure à parcourir l’Alsace et les Vosges, associant partout les souvenirs de l’histoire aux impressions de la nature.

1344. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La Divine Comédie de Dante. traduite par M. Mesnard, premier vice-président du Sénat et président à la Cour de cassation. » pp. 198-214

Ses animosités, ses rancunes personnelles et ses haines, ses indignations patriotiques et généreuses, ses tendres souvenirs des amis, des maîtres et des compagnons regrettés et pleurés, il y introduisit successivement tout cela par une suite d’épisodes coupés et courts, la plupart brusquement saillants avec des sous-entendus sombres, et il était permis à ceux qui restaient en chemin dans la lecture et qui ne la poussaient point au-delà d’un certain terme, de ne pas apercevoir dans l’éloignement la figure rayonnante de Béatrix et de ne pas lui faire la part principale et souveraine qui lui revient.

1345. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Je ne pousserai pas plus loin, ni auprès de plus modernes, ma question qui deviendrait indiscrète : « Lisez-vous, avez-vous lu Homère ? 

1346. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. (Tome XII) » pp. 157-172

Thiers craint avant tout de pousser au tableau, à la couleur, au relief, à tout ce qui se détache et qui vise à un effet littéraire ou dramatique.

1347. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres complètes de Saint-Amant. nouvelle édition, augmentée de pièces inédites, et précédée d’une notice par M. Ch.-L. Livet. 2 vol. » pp. 173-191

Il avait des facultés naturelles très remarquable pour la poésie et le bel esprit : « C’était, a dit de lui l’exact et honnête abbé de Marolles, l’un des plus beaux naturels du monde pour la poésie, et de qui les bons sentiments de l’âme égalaient la gaieté de l’humeur. » Tallemant lui reproche une outrecuidance et une habitude de vanterie qui est un des caractères de la littérature de ce temps-là ; mais Saint-Amant ne paraît point avoir poussé ce défaut aussi loin qu’un Scudéry, et il n’en resta pas moins avant tout un bon vivant.

1348. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — I » pp. 39-56

Son père, qui avait poussé assez loin sa fortune, jusqu’à être lieutenant général et ambassadeur, avait eu à souffrir des revirements politiques du temps et des suites de la Fronde.

1349. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

Il aimait la gloire, mais pas si naïvement que l’ont bien voulu dire ceux qui ne peuvent marquer un trait saillant d’un grand homme sans pousser aussitôt à la caricature.

1350. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

Un grand vent du nord roulait sur la forêt et lui faisait pousser de profonds mugissements.

1351. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir a l’histoire de mon temps. Par M. Guizot »

N’oublions pas qu’il s’agissait de la bourgeoisie à discipliner, à rallier et à grouper pour la défense commune : si, au lieu de la tenir unie, on la choquait par le ton trop absolu, par la hauteur et la rigueur de la forme, par un certain ensemble d’idées trop logiques pour elle et qu’on poussait à outrance, si on la désaffectionnait enfin, qu’avait-on gagné ?

1352. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Bref, Mâtho, toujours poussé par les épaules, après avoir traversé en tremblant des scènes de fantasmagorie bizarre dignes de la franc-maçonnerie, se saisit du voile impossible appelé Zaïmph, que Spendius a osé décrocher le premier et qu’il a jeté à terre.

1353. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

Si les domestiques n’étaient accourus aux cris qu’elle poussa, il aurait pu y avoir malheur.

1354. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc »

Ce qui l’est moins, ce qui m’a le plus, je ne dirai pas étonné, mais choqué, c’est que les hommes considérables qui n’avaient certainement pas voulu pousser à cette résistance devenue du désordre, qui cependant, et très involontairement sans doute, n’y avaient pas nui, ne se soient pas tenus pour avertis, ne se soient pas arrêtés aussitôt après ces manifestations d’un assez mauvais caractère, et qu’ils aient cru devoir continuer publiquement la polémique engagée, en gens non informés et prétextant d’ignorance, comme si de rien n’était.

1355. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre. »

Sa sagacité même était un danger de plus : il ne pouvait plus être un instrument de conciliation, et l’on eût dit qu’il n’avait été maintenu dans son poste que pour envenimer les passions indomptées de la reine, et la pousser à quelque extrémité qui la perdît sans retour… « Le premier secrétaire d’ambassade, M. 

1356. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine. (suite et fin.) »

Le chrétien étant donné, cette faiblesse de sa part consistait, sur la fin, à rester courtisan un peu malgré lui, à n’oser se séparer de la-faveur, à vouloir mener de front deux choses inconciliables, la Cour et la dévotion, à vouloir pousser celle-ci jusqu’à la pénitence et à ne jamais passer outre.

1357. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. EDGAR QUINET.— Napoléon, poëme. — » pp. 307-326

— Un moi mystérieux Nous pousse ; alors on prend la vie au sérieux : Plus de jeux dans les prés, plus de frais sous le saule, Le soir plus de moments perdus en doux propos ; Il faut douze combats, et puis, pour le repos, La peau de lion sur l’épaule !

1358. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre II »

Mais tout à coup, il se renversa la tête en arrière, et poussa un cri rauque, guttural, effrayant, qui me fit fermer la fenêtre. » Aussitôt, sur son joli visage, apparurent des convulsions qui le bouleversèrent, déformant toutes les formes, changeant toutes les places, comme si elles voulaient les retourner, pendant que sa bouche tordue crachotait une écume sanguinolente.

1359. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VIII. De l’invasion des peuples du Nord, de l’établissement de la religion chrétienne, et de la renaissance des lettres » pp. 188-214

La religion chrétienne exige aussi l’abnégation de soi-même, et l’exagération monacale pousse même cette vertu fort au-delà de l’austérité philosophique des anciens ; mais le principe de ce sacrifice dans la religion chrétienne, c’est le dévouement à son Dieu ou à ses semblables, et non, comme chez les stoïciens, l’orgueil et la dignité de son propre caractère.

1360. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre X. De la littérature italienne et espagnole » pp. 228-255

Les Italiens ont-ils poussé très loin l’art dramatique dans leurs tragédies ?

1361. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre 2. La littérature militante »

Les réformés, poussés à la guerre par la persécution et par l’ambition des chefs de deux partis, ne sel contentèrent pas de discréditer leurs principaux ennemis par d’outrageux, mais parfois éloquents pamphlets223.

1362. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre I. La lutte philosophique »

Il ne poussa point à démolir la société : il se contenta de travailler à l’améliorer.

1363. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre onzième. »

Poussons plus avant, pénétrons jusqu’à la source.

1364. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Oscar Wilde à Paris » pp. 125-145

Trop de contrainte pousse à la rébellion.

1365. (1785) De la vie et des poëmes de Dante pp. 19-42

Navire sans gouvernail et sans voiles, poussé de rivage en rivage par le souffle glacé de la misère, les peuples m’attendaient à mon passage, sur un peu de bruit qui m’avait précédé, et me voyaient autre qu’ils n’auraient osé le croire : je leur montrais les blessures que me fit la fortune, qui déshonorent celui que les reçoit. » À une sensibilité profonde et à la plus haute fierté, Dante joignait encore cette ambition des républiques, si différente de l’ambition des monarchies.

1366. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « La Religieuse de Toulouse, par M. Jules Janin. (2 vol. in-8º.) » pp. 103-120

Tout indique qu’il était doux, modéré, de bon conseil, plus fait pour mitiger et retenir celle qu’il dirigeait que pour la pousser aux extrêmes.

1367. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

Mais il est immanquable qu’excité et une fois poussé dans l’entretien, il devait redevenir le Molière que nous savons.

1368. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Les Gaietés champêtres, par M. Jules Janin. » pp. 23-39

Mais un ami, un homme amoureux des lettres, du fin style, un connaisseur sans faux scrupule, qui sait son Horace et son Apulée, a devant lui, je suppose, la masse de ces feuilletons que nous donne Janin depuis vingt ans comme l’arbre pousse ses feuilles.

1369. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

L’abbé Barthélemy ne pousse pas le scrupule si loin ; il est le Tillemont de la Grèce, en ce sens qu’il compose volontiers son texte de la quantité de ses petites notes mises bout à bout ; mais, cherchant de plus l’agrément et animé du désir de plaire, il a donné à tout cela le plus de liaison qu’il a pu ; il a dissimulé les sutures ; il a insinué avec sobriété les explications ingénieuses ; il y a mêlé, comme par un courant secret, une vague allusion continuelle, un tour de réflexion qui porte sur nos mœurs, sur notre état de société.

1370. (1903) Zola pp. 3-31

Pendant ces quarante années, il a écrit une quarantaine de volumes, ce qui a fait pousser des cris d’admiration à ses thuriféraires et ce qui n’est qu’une production normale, beaucoup moins intense que celle de Voltaire, de Corneille, de Victor Hugo, de Guizot, de George Sand ou de Thiers.

1371. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une croisade universitaire » pp. 107-146

» Mais alors abattez donc tout de suite le chêne magnifique, puisque le champignon difforme pousse au bas du tronc, — et n’en parlons plus.

1372. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Seconde partie. Nouvelles preuves que la société a été imposée à l’homme » pp. 243-267

Ai-je besoin d’avertir que je n’entends point toucher à l’exaltation du sentiment religieux qui pousse certains hommes dans la solitude des cloîtres ?

1373. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Hippolyte Babou »

Ce talent, l’avait-il, ou lui a-t-il poussé ?

1374. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

Au verger, plein de lys et d’ombelles, au verger où poussent dans l’herbe humide les agarics, les bolets roses, les panais aux thyrses longs, les fenouils, l’angélique, l’anis, la ciguë couronnée de fleurs blanches.

1375. (1887) La banqueroute du naturalisme

Zola, — car, pour le dire en passant, ce n’en est jamais une d’avoir suivi, comme l’on dit, son tempérament, et le mieux, en tout cas, est toujours de commencer par y résister, — c’est qu’on l’a poussé de toutes parts dans la voie de ses pires défauts.

1376. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IV : M. Cousin écrivain »

Un souffle puissant pousse et soutient cette vaste machine ; suspendue deux fois, elle reprend son mouvement sans peine, par les tours les plus naturels et les plus simples : l’émotion va croissant ; elle est si vraie et si bien justifiée, qu’elle autorise deux mots qui ailleurs seraient emphatiques.

1377. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre V : M. Cousin historien et biographe »

Saint-Simon cite deux duchesses qui, s’étant disputées le pas dans une cérémonie publique, s’injurièrent, se poussèrent du coude, et, à la fin, « en vinrent aux griffes. » On sait le nombre infini de disputes, de négociations, de traités en règle que produisirent les questions de tabouret.

1378. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXII. »

L’aigle affamé pousse un cri et passe auprès.

1379. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Le déposant avait voulu aussitôt revenir ici, au bailliage, pour que le voyageur y fît sa déposition, mais celui-ci ne l’avait pas permis et lui avait ordonné de pousser jusqu’à Emskirchen. […] Tantôt il pousse au large, et, loin du bois obscur, Superbe, gouvernant du côté de l’azur. […] Poussez l’effrayant cri de l’ombre : Exterminons ! […] Brachet, puisqu’il faisait un dictionnaire spécial des étymologies, nous donnât deux ou trois volumes au lieu d’un et poussât l’analyse jusqu’à ses derniers retranchements. […] Il est clair que, dans cet ordre de questions, il n’eut jamais la force de pousser sa pensée jusqu’au bout.

1380. (1901) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Deuxième série

Bienheureux lès auteurs qui vivent à Paris et qui n’ont qu’à pousser le coude à leurs camarades de la presse ! […] Seul, le chiffre zéro exprime la part de libre initiative qu’il y a dans la foule, animal sans raison et purement instinctif, que certains individus directeurs poussent en avant, poussent en arrière, précipitent à droite ou à gauche. […] Leur vaine opposition serait celle de l’enfant qui barre le flot de la marée ; leur faveur légère s’ajoute comme une molle et simple caresse au vent soufflant d’ailleurs, qui seul enfle et pousse la voile. […] quelle peine a l’éminent penseur de Lausanne pour prendre enfin dans la littérature française la place qui lui est due, et cela, beaucoup moins par la résistance d’un public naturellement stupide et inerte, dont on finira toujours par faire tout ce qu’on voudra, que par le manque de foi, la tiédeur, les réticences perfides et la trahison des critiques qui poussent avec mollesse le siège de l’opinion ! […] Les poèmes antiques furent d’abord les cris d’effroi ou d’espérance poussés par l’homme devant le spectacle de l’univers, et les systèmes du monde sont composés avec les signes qui manifestèrent ces passions.

1381. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

À Saint-Malo, il pousse comme il plaît à Dieu, il vagabonde, se bat et polissonne tout le jour. […] Et le sentiment du péril, et de l’incertitude des choses et des ruines proches, les pousse tour à tour aux amours rapides, ou aux rêveries dans la solitude, « mêlées de tendresses indéfinissables ». […] Puis, l’auteur pousse son parallèle dans le détail, et en profite pour déballer en citations ses souvenirs de lecture. […] Mais les boutades, les poussées d’humeur, les confessions directes ou indirectes deviennent de plus en plus nombreuses. […] S’il est un cri que tout le monde, croyants et incroyants, peut pousser du fond du cœur, c’est apparemment celui-là.

1382. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Charles y pousse un peu. « Nous manquons de doctrinaires !  […] Pousser les choses jusqu’à créer une nation de malingreux et de rachitiques et aussi d’« inadaptés », et ici M.  […] Il a sondé le cœur et les reins ; il a interprété, il a discuté, il a poussé aux dernières limites son métier de casuiste. […] Doutez-vous qu’il n’eût pas, au moins, voulu arracher à l’Autriche ses provinces allemandes, annexer le Danemark, pousser l’Empire jusqu’à Varsovie ? […] Ce ne fut pas lui, du tout, qui mit Bernadotte sur le trône, ou qui même le poussa de ce côté.

1383. (1910) Propos littéraires. Cinquième série

Ses idées l’y poussaient ; son état d’âme aussi. […] J’ai dit que sa nature l’y poussait d’elle-même et que, de ce don, elle avait fait un art. […] Quel mandat limité et dans quelle passe étroite sont poussés les académiciens, dans quel goulet ! […] Et cette autre Nature, alors, qui vous pousse à contrarier l’autre ? […] Il ne faudrait pas pousser le parallèle plus loin qu’où je le mène, ni même, entre nous, aussi loin.

1384. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Vivant sous l’empire des idées poussées au fanatisme religieux le plus déplorable, il ne sacrifie pas aux passions du jour. […] En voici deux entre mille : Baron, père du fameux Baron et assez bon acteur, mais bien loin de valoir son fils, mourut assez jeune pour avoir, dans le rôle de Don Diègue, poussé du pied l’épée que le comte de Gomas lui fait tomber des mains. […] Il marquait une ardeur guerrière, il poussait, au moment opportun, des hennissements, il trépignait avec un tel naturel, que le public ne se lassait point d’admirer sa haute intelligence. […] Un mousquetaire trouve mauvais cette musique, pousse le coude de Pradon en lui disant que la tragédie est fort belle, que l’auteur est bien en cour et qu’il l’engage à se taire. […] A la fin du repas, il lui poussa quelques critiques amères sur la pièce, le mettant au défi de les rétorquer.

1385. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

Il y a là comme dans les meilleures choses un excès à craindre : il ne faut pas pousser l’admiration pour eux, jusqu’à n’oser porter les yeux sur leurs défauts : car ils ne sont pas grands d’une perfection absolüe, mais seulement d’une perfection relative, qui consiste dans le grand nombre des beautez, et dans la rareté des défauts, par rapport à d’autres écrivains. […] Ce n’est pas que je pousse le merveilleux jusqu’à l’impossible, et l’histoire romaine nous fournit un fait encore plus incroyable que celui de ma tragedie. […] Romulus pousse la valeur jusqu’à la témérité, et la confiance en ses propres forces jusqu’au fanatisme (qu’on me permette ce terme pour exprimer l’excès de la confiance). […] S’il dissimuloit alors, on s’autoriseroit de sa fausse indifférence, pour perdre Inés sans obstacle ; au lieu qu’en avoüant son amour, il donne à son épouse un protecteur qu’on n’osera pousser à bout. […] Corneille, de peur de manquer la nature, n’a pas poussé assez loin la vertu ; et pour mieux montrer l’homme, il a retranché du héros, et par conséquent de l’admiration qu’il devoit inspirer pour Cesar.

1386. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Ces hommes, que leur sang trop chargé de sève pousse au rire bruyant et à la grosse bonne humeur, ils sentiront à leur grand étonnement une larme mouiller leur paupière. […] Les doigts poussent d’instinct le crayon moitié dans le désir de tracer un portrait fidèle, moitié par envie d’amusement et par obéissance à une pensée de satire. […] D’où qu’il soit sorti, l’édifice est là, devant nos yeux, attestant son existence par l’admiration qu’il nous inspire et par la curiosité même qui nous pousse à chercher sur quels fondements il repose. […] Pour toute sorte de raisons, il sera donc sage de résister à la dangereuse tentation qui pousserait à interroger d’une manière trop pressante les détails et les épisodes particuliers du livre, et de s’en tenir à son ensemble et aux conclusions qui en sortent tout naturellement. […] Qui donc, par exemple, après un séjour de quelques heures à Cologne, la ville des miracles et des reliques, ne s’est pas senti pousser graduellement jusqu’au xve  siècle.

1387. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Le raisonnement que Renan faisait, par hypothèse, les jeunes gens d’aujourd’hui le font, ils ne peuvent pas ne pas le faire, d’après nature, et n’étant plus des Scientistes, mais des Scientifiques, ils le poussent jusqu’à son extrémité. […] Ils entreprennent alors de faire fortune, poussés par des motifs d’un ordre romanesque. […] Pour rester un genre littéraire, le Roman, s’il doit éviter le finissage trop poussé du style, ne doit pas éviter moins scrupuleusement le laisser-aller du mot et de la syntaxe. […] C’est encore Goethe qui disait : « Veux-tu pousser dans l’Infini ? […] Cet appel, vous n’avez pas été les seuls à le pousser dans ce pays, et d’innombrables indices témoignent qu’il est entendu.

1388. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Fleur si douce et si amère, on ne te peut arracher sans faire saigner le cœur à tous ses recoins, et de la tige brisée suintent des gouttes rouges… Fleur maudite, comme tu avais poussé dans mon âme ! […] Il voit la racine pousser son pied chevelu, l’épaisseur des feuilles dans la plante grasse, la dentelure des épines sur les côtes des verts poignards. […] Pour le même motif encore, il évite d’ordinaire les analyses poussées trop loin. […] C’est à même le peuple, à travers les affres de la plus lamentable misère, que pousse le fragile enfant. […] La belle humeur du Savoyard prenait vite le dessus, et l’on sentait battre ce cœur généreux, étranger aux mesquineries, qui poussait parfois le chevaleresque jusqu’au chimérique.

1389. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

S’il est encore en nous tous des sentiments égoïstes et à demi barbares, endormis au cœur de notre être et qui aiment parfois à se réveiller un instant sans acquérir assez de force pour nous pousser à l’action, ces sentiments devront aller s’affaiblissant par degrés, s’engourdissant. […] Si l’on poussait jusqu’au bout la doctrine de certains esthéticiens, on en arriverait à soutenir que les sculpteurs aveugles n’avaient pas le sentiment du beau en touchant de leurs mains les statues13. […] La théorie de l’école anglaise, si on la poussait à l’extrême, aboutirait à des conséquences que nous venons de montrer. […] Taine aime à le répéter — avaient pour la pureté de la forme, pour la proportion harmonieuse des membres, pour les belles nudités un amour poussé jusqu’à l’adoration ; la beauté offrait à leurs yeux un caractère sacré, et Sophocle, encore éphèbe, avant de chanter en public un hymne aux dieux de la Grèce vainqueurs à Salamine, jetait bas ses vêtements devant l’autel. […] Lors même que, poussé par la rime, le poète rapproche deux images qui semblent discordantes, il produit souvent ainsi des contrastes de couleur qui donnent un ton plus chaud à sa description.

1390. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

D’autres Corses, amicalement poussés dans les emplois publics par l’influence de Bonaparte et de ses frères, méritent encore d’être mentionnés. […] Une troupe de Marseillais soulevés s’était postée « en Avignon », d’où Carteaux, malgré son incapacité, la délogea et la poussa vivement, baïonnettes aux reins, jusqu’au-delà de Châteauneuf-des-Papes. […] D’où venait donc l’impulsion fatale qui poussait l’Empereur et l’Empire dans une vertigineuse course à l’abîme ? […] vaniteux, égoïstes, ambitieux, si l’on peut appeler ambition un vain désir de devenir riche ou de se pousser dans les commodes refuges de la bureaucratie. […] Enfin, désireux de pousser son enquête aussi loin que possible, il a complété ses observations personnelles par une série de consciencieuses lectures.

1391. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

Benjamin Constant et Mme de Staël, transformant ingénieusement le siècle accompli et s’essayant à le rajeunir, allaient semer les aperçus et pousser la découverte en bien des sens et sur bien des voies. […] Fauriel avait entrepris une Histoire du Stoïcisme ; il avait amassé dans ce but une quantité de matériaux, et avait sans doute poussé assez avant la rédaction de certaines parties. […] De fait, il ne s’occupait de littérature proprement dite que quand son intérêt pour un ami l’y poussait, comme il le fit pour Baggesen et pour Manzoni, et comme il fut poussé encore aux Chants grecs, indépendamment des autres affinités, par de nobles motifs de circonstance. […] Il en est un peu des critiques les plus sagaces, les plus avisés et les plus circonspects, comme des conquérants : ils veulent pousser à bout leurs avantages.

1392. (1925) Feux tournants. Nouveaux portraits contemporains

Sans doute poussent-ils la mystification un peu loin, pensais-je ; mon Dieu ! […] » poussa Xavier. « Moi non plus, dit Jacques Boulenger ; vous étiez pilote à la Spad25, moi à l’escadrille voisine, la F. 30, sur le Plateau de Malzéville ; je vous reconnais fort bien ! […] Ah, pourquoi ne pas s’en tenir là, quand il est si commode en vérité de se pousser dans le monde et d’y prendre discrètement la place qui vous est préparée ? […] Il pousse assez loin ce travers ou cette qualité, comme vous voudrez. […] Quand je poussai la grille de la villa Olga, je fus quelque peu stupéfait d’apercevoir un « court » de tennis parallèle à la façade de la maison que Romain Rolland m’avait pourtant indiquée comme étant la sienne.

1393. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Il était impatient de savoir ce que deviendrait le monstre, et comment il pousserait jusqu’au bout la doctrine des désirs permis et légitimes. […] Lebrun, dans Le Cid d’Andalousie madame Menjaud a poussé un de ces cris dont je vous parlais tout à l’heure, qui remuent toute une salle de fond en comble ; à cet instant on eût dit que l’obstacle était brisé, que la comédienne venait de découvrir enfin son Océan inconnu et tant cherché. — Hélas ! […] Et Desmousseaux avait été si terrible, que madame Menjaud avait poussé ce grand cri, tant son effroi était mêlé d’étonnement de trouver terrible… Desmousseaux ! […] Sganarelle poussé à bout par ce bon conseil, qu’il a imploré avec tant d’instance, met en avant des raisons sans réplique. — Il est résolu de se marier […] Savez-vous aussi une plus adorable réponse que la réponse au jaloux Sicilien poussé à bout par toutes ces galanteries ?

1394. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

Chacune est sortie en même temps de la souche et a poussé de son côté. […] Les différences ne sont pas des solécismes ; l’analogie a été non faussée, mais étendue, et entre le latin et le roman, il ne faut admettre qu’un néologisme qui devint de jour en jour plus indispensable32. » Il y a au fond, et derrière ce système, tout un système philosophique de la perfectibilité de l’esprit humain, qui le domine et qui l’enhardit. — Mais même de ces systèmes excessifs, quand ils sont maniés et appliqués par des hommes de talent et de forte étude, il reste toujours de certains points acquis et de profitables dépouilles, comme de ces conquêtes poussées trop loin et dont on est forcé de rendre une partie, mais dont on garde quelque chose.

1395. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre premier. Nature et réducteurs de l’image » pp. 75-128

« Je n’ai jamais joué une partie d’échecs, dit-il, sans l’avoir rejouée seul quatre ou cinq fois la nuit, dans mon lit, la tête sur l’oreiller… Dans l’insomnie, lorsque j’ai des chagrins, je me mets à jouer ainsi aux échecs en inventant une partie de toutes pièces, et cela m’occupe ; je chasse ainsi quelquefois les pensées qui m’obsèdent. » — Ce ne sont pas les plus profonds joueurs qui poussent le plus loin ce tour de force. […] Dans mon rêve, je me voyais tout garrotté, et l’on me poussait vers la guillotine en me roulant comme un tonneau.

1396. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre premier. La perception extérieure et les idées dont se compose l’idée de corps » pp. 69-122

Lancée contre un autre corps, elle le pousse en avant, comme fait notre main dans un cas semblable. […] S’il voit, flaire ou touche une pièce de viande, il a, par réviviscence et association, l’image d’une sensation de saveur agréable, et cette image le pousse à happer le morceau.

1397. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

VI Le hasard me les a fait connaître familièrement l’un et l’autre ; mais, avant de parler de l’un et de l’autre, on ne peut s’empêcher de remarquer que, par un phénomène littéraire qui doit avoir sa raison cachée dans les choses, c’est la même petite vallée de Savoie qui a donné au dix-huitième et au dix-neuvième siècle les deux plus magnifiques écrivains de paradoxes du monde moderne : Jean-Jacques Rousseau et le comte de Maistre ; l’un, le paradoxe de la nature et de la liberté poussé jusqu’à l’abrutissement de l’esprit et à la malédiction de la société et de la civilisation ; l’autre, le paradoxe de l’autorité et de la foi sur parole, poussé jusqu’à l’anéantissement de la liberté personnelle, jusqu’à la glorification du bourreau, et jusqu’à l’invocation du glaive du souverain et des foudres de Dieu contre la faculté de penser.

1398. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIIe entretien. Littérature politique. Machiavel (2e partie) » pp. 321-414

Jusque-là elle n’avait pas été trop impopulaire, depuis 1814, en Italie, et, par une versatilité habituelle aux peuples qui changent de joug, son retour à Milan, en 1814, avait été l’objet d’un fanatisme de joie poussé jusqu’à la férocité contre le gouvernement français que l’Autriche venait remplacer. […] Ce que nous voulons tout haut, nous le voulons tout bas ; ce ne serait pas une diplomatie sincère de la France vis-à-vis de l’Allemagne, qu’une diplomatie qui se proclamerait pacifique sur le Rhin, et qui vous pousserait à déclarer sous notre garantie une guerre d’agression sur le Pô.

1399. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (3e partie) et Adolphe Dumas » pp. 65-144

Comme la reine du jeu lance le ballon à l’une des suivantes, cette suivante le manque, et il tombe dans la profondeur du courant ; elles poussent de grands cris, et le divin Ulysse se réveille : il se redresse alors, et dans son esprit et son cœur il raisonne ainsi : III « “Hélas ! […] On dirait que cet infortuné avait voulu pousser à bout, par son exemple, un témoignage inouï des douleurs de la poésie abandonnée à ses propres forces.

1400. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (3e partie) » pp. 193-271

Seulement, Aristote a poussé beaucoup plus loin les déductions sévères de la science ; et il a substitué un système profond et solide à des vues restées un peu indécises, toutes grandes qu’elles étaient. […] Le nouveau bois pousse d’abord comme enveloppé d’une peau : il est même couvert de poil.

1401. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

« — Regardez cette toile d’araignée où cette grosse mouche pousse des cris à m’étourdir ? […] « Je t’embrasse, chère consolatrice qui m’apportes l’espérance, baiser de tendre reconnaissance ; ta lettre m’a ranimé ; après sa lecture, j’ai poussé un hourra joyeux. » La liste de ses ouvrages, avec la date qu’il leur assigna après les avoir remaniés, peut seule faire comprendre la valeur de ses travaux, car peu de lecteurs ignorent l’importance de ces livres.

1402. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

C’était pousser loin le conseil de s’affranchir de la tradition classique ; mais l’excès d’indépendance vaut mieux que la superstition. […] A la différence de Montesquieu qui, au début, hésite entre les sciences et les lettres, soit égale capacité pour les deux choses, soit penchant de jeunesse vers la plus populaire, Buffon va tout d’abord aux sciences, poussé par l’instinct du génie et l’amour de la gloire.

1403. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre onzième »

Rousseau et Marat, et donner le pas sur l’auteur du Contrat social à l’homme qui en avait poussé la logique jusqu’au massacre de ses contradicteurs, n’est-ce pas tout à la fois un fruit et un châtiment de ce livre ? […] Un homme qui s’accuse sincèrement n’a pas cette complaisance de pinceau pour les choses qu’il se reproche, et ne fait pas un travail de variantes pour pousser à l’effet la peinture de ses fautes.

1404. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Survint tout un bataillon de jeunes poètes pour pousser jusqu’au bout le mouvement qui emportait les esprits vers une poésie jalouse de rivaliser avec la musique. […] Si l’on voulait pousser dans le détail la comparaison, on pourrait observer que les cathédrales mettent plusieurs siècles à s’achever ; que, commencées dans un style, elles sont fréquemment finies dans un autre ; qu’elles sont de grandes œuvres collectives où ont collaboré beaucoup d’architectes inconnus ; que dans leurs statues, leurs bas-reliefs, leurs vitraux, elles sont la vivante image des croyances du temps ; mais que d’ailleurs elles laissent libre carrière à la fantaisie des artistes et admettent la satire et la parodie, fût-ce celle du clergé.

1405. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

Je ferai cependant encore remarquer que notre traducteur pousse la perversité jusqu’à dénaturer les simples indications scéniques, sans doute en voulant les embellir. […] Nous avons dû renoncer à faire l’analyse de l’orchestration ; ce qui eût été pousser l’étude de la partie musicale plus loin que nous n’aurions pu le faire pour les autres arts intéressés au drame : nous nous sommes contentés de rechercher dans la lecture de la partition réduite pour le piano les souvenirs de la richesse orchestrale que notre lecteur doit avoir conservés comme nous de ses auditions de Bayreuth.

1406. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

La petite-fille de Boucher, femme galante… En effet, c’était un peu dans le sang du peintre des Grâces impures… * * * — Ô Jeunesse des écoles, jeunesse autrefois jeune, qui poussait de ses deux mains battantes le style à la gloire ! […] 15 juin Nous allons voir des voisins de campagne, des gens aimables, accueillants… Ça ne nous pousse pas à faire des frais.

1407. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1864 » pp. 173-235

Nous voilà à étudier un accouchement césarien, en revenant de pousser aux Commissaires-priseurs, des dessins de Gravelot. […] Elle est, au nom des intérêts matériels, la conseillère qui pousse aux abaissements, aux platitudes, aux lâchetés, à toutes les petites misérables transactions de la conscience.

1408. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

De là, plus refoulé que jamais par la vengeance vers le parti de l’empereur, il ne cesse d’animer ce prince contre sa patrie et de le pousser de la main à l’oppression de Florence. […] Indépendamment de son mariage avec une fille d’une famille illustre de Florence, dont il avait eu sept enfants, Boccace confesse, dans l’histoire de sa vie, écrite sur les lieux et si peu d’années après la mort de Dante, que son héros et son poète avait eu la faiblesse des héros et des poètes : un amour de la beauté poussé quelquefois jusqu’à la licence du cœur.

1409. (1767) Salon de 1767 « Peintures — La Grenée » pp. 90-121

Je sentois toutes ces choses, et j’en étois transporté, lorsque m’étant un peu éloigné du tableau, je poussai un cri de douleur, comme si j’avois été blessé d’un coup violent. […] Si l’agriculture est la plus favorisée des conditions, les hommes seront entraînés où leur plus grand intérêt les poussera, et il n’y aura fantaisie, passion, préjugés, opinions qui tiennent.

1410. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — II. (Fin.) » pp. 20-37

À force de répéter au jeune roi : « Soyez tendre, humain, affable », Massillon, comme Fénelon lui-même, poussait un peu à la chimère ; il semblait croire à cet amour de nourrice que les peuples n’ont pas, et auquel les grands rois et les plus réputés débonnaires, les Henri IV même12, n’ont jamais cru.

1411. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Au moment de la première charge, voyant qu’on ne s’ébranlait pas, ils s’arrêtèrent à vingt ou trente pas des escadrons et bataillons allemands, sauf un petit nombre qui poussèrent à fond : Dans ce moment, dit Lassay, nos petites pièces de canon ayant commencé à tirer, et les bataillons à faire un feu prodigieux, on leur vit faire un mouvement quasi pareil à celui que fait le blé qui est agité par le vent ; et ensuite ils tournèrent, mais assez lentement ; toute notre ligne s’ébranla pour les suivre, mais fort lentement aussi, craignant de se rompre… En un mot, toutes les particularités et les circonstances de cette victoire de Gran se comprennent à merveille par le récit de Lassay.

1412. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

Quand son enfant fut né et aux moments où il poussait des cris, il suffisait pour l’apaiser, dit-on, que sa mère lui mît entre ses petites mains une fleur, et elle ne s’en étonnait pas.

1413. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Chateaubriand. Anniversaire du Génie du christianisme. » pp. 74-90

Et nous aussi, nous avons vu comme on tombe dans une révolution, et comme on en sort ; comment tous, et les derniers, et les plus distingués, y poussent à l’envi, comment plusieurs même aimeraient à y rester, mais comment un seul, inspiré de plus haut, vous en retire.

1414. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Prenez au contraire l’abbé de Chaulieu, de vingt ans plus jeune que Maucroix, et qui mourut onze ans après lui, ayant également poussé très loin sa carrière, et vous aurez l’épicurien à la fois de pratique et de système, celui qui, au milieu de ses refrains bachiques ou de ses nonchalances voluptueuses, raisonnera sur la mort en des vers philosophiques selon les principes d’Épicure tour à tour, ou selon ceux du déisme.

1415. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — II. (Fin.) » pp. 361-379

D’Alembert le lança dans la carrière des éloges, et lui montra en perspective la place de secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences qui devait être prochainement vacante, en lui promettant de l’y pousser ; mais dès qu’il eut Condorcet sous la main, il se détacha de Bailly et le sacrifia sans scrupule : ce n’était pas l’homme qu’il fallait à l’œuvre habile, agressive et plus ou moins couverte, que d’Alembert avait en vue.

1416. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

Montluc réplique à M. de Saint-Pol par de nouvelles raisons et assez bien fondées : il montre que le moral de l’armée de Piémont est excellent ; que, dans toutes les précédentes occasions et rencontres, l’avantage lui est demeuré sur l’ennemi ; qu’il ne s’agit que de pousser outre et d’achever : « Regardez donc, nous qui sommes en cœur et eux en peur, nous qui sommes vainqueurs et eux vaincus, nous qui les désestimons cependant qu’ils nous craignent, quelle différence il y a d’eux à nous ! 

1417. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

Un Octave qui est un politique tout fait dès vingt ans, et qui sait dès cet âge tout ce qu’il faut penser des hommes en certaines époques, jusqu’où on peut les pousser et comment oser les conduire, court risque par moments d’être un prodige ou même un monstre.

1418. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

La belle humeur en lui n’excluait nullement la religion, et son irrégularité et sa pétulance n’avaient jamais été poussées jusqu’au désordre et au libertinage.

1419. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

On a raconté qu’étant à Dijon pendant la tenue des états, en août 1697, un soir, à un souper chez M. le duc, ce dernier se divertit à pousser Santeul de vin de Champagne, et de gaieté en gaieté il trouva plaisant de verser sa tabatière pleine de tabac d’Espagne dans un grand verre de vin, et de le faire boire à Santeul pour voir ce qui en arriverait.

1420. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — II » pp. 414-431

Je me chargerai volontiers de sa dépense ; il pourra offrir jusqu’à cinq cent mille écus à la favorite (Mme de Pompadour) pour la paix, et il pourrait pousser les offres beaucoup au-delà si en même temps on pouvait l’engager à nous procurer quelques avantages.

1421. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

. — Oui, ennuyeux tant que vous voudrez ; ils parlaient de ce qu’ils ne savaient pas bien, ils entreprenaient un jeune homme qui y était peu propre, ils allaient comme sont allés si souvent nos théoriciens prêcheurs, tout droit devant eux et à tort et à travers ; mais l’idée pourtant, l’idée française d’une histoire suisse à faire, — du besoin qu’on avait d’une histoire suisse, — restait attachée à l’imagination et enfoncée dans l’esprit de Bonstetten ; il emportait sans y songer l’aiguillon ; et lorsque trois ans après, il rencontre Jean de Muller au seuil de sa magnanime entreprise, mais encore incertain sur la forme, sur l’étendue, sur la plénitude du dessein, Bonstetten se souvient à l’instant et se sert de l’aiguillon qu’il a reçu, et, devenu prêcheur à son tour, il pousse, excite et soutient son ami dans la grande carrière.

1422. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

Il rappelle, à bien des égards, ce Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII, cet autre prince si lâche de volonté, si misérable de conduite, avec cette différence que Gaston, poussé de même par ceux qui le gouvernaient, compromettait ses amis et ensuite les plantait là, au péril de leur tête, et que Philippe se laissa compromettre par eux au point d’y tout perdre, tête et cœur, honneur et vie.

1423. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Caractères de La Bruyère. Par M. Adrien Destailleur. »

Le chapitre de la Chaire, l’avant-dernier du livre, bien qu’essentiellement littéraire et relevant surtout de la rhétorique, achemine pourtant, par la nature même du sujet, au dernier chapitre tout religieux, intitulé des Esprits forts ; et celui-ci, trop poussé et trop développé certainement pour devoir être considéré comme une simple précaution, termine l’œuvre par une espèce de traité à peu près complet de philosophie spiritualiste et religieuse.

1424. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

Jouvin au Figaro dansdes articles de véritable critique, reprirent et poussèrent l’attaque : George Sand, dans le Siècle, sans répondre à personne en particulier, évoqua un Béranger noble, élevé, sérieux, fier, idéalisé et encore ressemblant, plusgrand que nature, une figure d’au-delà, telle qu’elle sort de la tombe à l’heure du réveil, en dépouillant toutes les petitesses humaines et les chétives misères.

1425. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres publiées par M. de Falloux. »

La plupart des Pensées de Mme Swetchine semblent avoir ainsi mûri au feu du soleil intérieur, et, au lieu d’être, comme des plantes naturelles d’Italie, écloses au grand air et aux rayons du matin, et qui ont bu la rosée avec l’aurore, elles ont l’air d’avoir poussé en serre et en chambre bien nattée.

1426. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Une monarchie en décadence, déboires de la cour d’Espagne sous le règne de Charles II, Par le marquis de Villars »

Un secrétaire d’État resté en place et très-habile à profiter des intérim pour pousser son crédit, don Jeronimo d’Eguya, avait concerté ce coup, avec la camarera-mayor.

1427. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poëme des champs par M. Calemard de Lafayette. »

Lerambert j’aurais bien plutôt à représenter qu’après avoir souffert il ne suffit pas de chanter purement, mélodieusement, avec sensibilité et avec goût, qu’il faut encore, pour être entendu, hausser le ton et le pousser même jusqu’au cri.

1428. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Je ne crois pas que, si on le poussait, il insistât sur ces caprices de sa philosophie en ses heures de rêve ; il m’est difficile notamment de concevoir quelle époque précise du haut Moyen-Âge a pu être si favorable au développement vigoureux de l’intelligence individuelle, à moins que ce ne soit dans le même sens qu’une prison avec ses barreaux est favorable à l’exercice de la force du prisonnier, s’il parvient à en sortir.

1429. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Connaissait-on mieux la nature humaine au XVIIe siècle après la Fronde qu’au XVIIIe avant et après 89 ? »

Non ; si inférieurs aux Retz et aux La Rochefoucauld pour l’ampleur et la qualité de la langue et pour le talent de graver ou de peindre, ils connaissaient la nature humaine et sociale aussi bien qu’eux, et infiniment mieux que la plupart des contemporains de Bossuet, ces moralistes ordinaires du xviiie  siècle, ce Duclos au coup d’œil droit, au parler brusque, qui disait en 1750 : « Je ne sais si j’ai trop bonne opinion de mon siècle, mais il me semble qu’il y a une certaine fermentation de raison universelle qui tend à se développer, qu’on laissera peut-être se dissiper, et dont on pourrait assurer, diriger et hâter les progrès par une éducation bien entendue » ; le même qui portait sur les Français, en particulier ce jugement, vérifié tant de fois : « C’est le seul peuple dont les mœurs peuvent se dépraver sans que le fond du cœur se corrompe, ni que le courage s’altère… » Ils savaient mieux encore que la société des salons, ils connaissaient la matière humaine en gens avisés et déniaisés, et ce Grimm, le moins germain des Allemands, si net, si pratique, si bon esprit, si peu dupe, soit dans le jugement des écrits, soit dans le commerce des hommes ; — et ce Galiani, Napolitain de Paris, si vif, si pénétrant, si pétulant d’audace, et qui parfois saisissait au vol les grandes et lointaines vérités ; — et cette Du Deffand, l’aveugle clairvoyante, cette femme du meilleur esprit et du plus triste cœur, si desséchée, si ennuyée et qui était allée au fond de tout ; — et ce Chamfort qui poussait à la roue après 89 et qui ne s’arrêta que devant 93, esprit amer, organisation aigrie, ulcérée, mais qui a des pensées prises dans le vif et des maximes à l’eau-forte ; — et ce Sénac de Meilhan, aujourd’hui remis en pleine lumière40, simple observateur d’abord des mœurs de son temps, trempant dans les vices et les corruptions mêmes qu’il décrit, mais bientôt averti par les résultats, raffermi par le malheur et par l’exil, s’élevant ou plutôt creusant sous toutes ; les surfaces, et fixant son expérience concentrée, à fines doses, dans des pages ou des formules d’une vérité poignante ou piquante.

1430. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

On avait fort vanté dans cette école et fort poussé Tieck, un homme d’esprit et de talent très-distingué, qu’on n’aurait pas été fâché d’opposer à Gœthe ; mais il n’était pas de taille à cela, et lui-même le sentait bien.

1431. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

À la nouvelle de l’approche des Français, la Junte de Navarre, assemblée à Pampelune, s’empresse d’envoyer offrir les clefs de la ville ; mais le maréchal de Bellefonds qui, sur la fin de sa carrière militaire, n’en faisait jamais plus qu’il ne fallait, n’avait pas ordre d’ailleurs de pousser sa visite jusque-là ; on se contenta d’occuper l’abbaye de Roncevaux et d’y souper.

1432. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Michelet, Quinet, George Sand dans quelques-unes de ses productions, poussaient au prosélytisme et à chercher je ne sais quel Dieu, mais un Dieu.

1433. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Legkzinska »

L’ambition, si elle avait longtemps tardé, lui poussait avec les années comme une excroissance d’égoïsme, comme une avarice dernière.

1434. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens. par M. Le Play, conseiller d’État. (Suite et fin.) »

Toutefois il a vu des plaies, il les a sondées, il a cru découvrir des dangers pour l’avenir et, à certains égards, des principes de décadence, si l’on n’y avisait et si l’on n’y portait remède ; et non seulement en bon citoyen il pousse un cri d’alarme, non seulement il avertit, mais en savant, en homme pratique, muni de toutes les lumières de son temps et de tous les matériaux particuliers qu’il a rassemblés, au fait de tous les ingrédients et les mobiles sociaux, sachant tous les rouages et tous les ressorts, il propose des moyens précis de se corriger et de s’arrêter à temps.

1435. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée, par M. le chevalier Alfred d’Arneth et à ce propos de la guerre de 1778 »

Malheureusement les propos tenus par plusieurs ministres du roi dans les Cours ont fait croire le contraire. » Dans de telles conjonctures, Marie-Antoinette, on le conçoit, ne réussit à rien tirer de bien net des ministres qui sont et doivent être plus Français qu’elle, et qui ne se décident point sur des impressions et d’après des convenances de famille : « Pour le roi personnellement, il est bien attaché à l’alliance, et autant que je puisse le désirer ; mais, pour un moment aussi intéressant, je n’ai pas cru devoir me borner à en parler au roi : j’ai vu MM. de Maurepas et de Vergennes ; ils m’ont fort bien répondu sur l’alliance et m’y paraissent véritablement attachés ; mais ils ont tant de peur d’une guerre de terre, que quand je les ai poussés jusqu’au point où le roi de Prusse aurait commencé les hostilités, je n’en ai pu avoir de réponse bien nette. (25 mars 1778.) » Novice qu’elle est dans ces sortes d’affaires, elle ne démêle pas très distinctement les motifs qui font agir nos ministres et les intérêts véritables qu’elle aurait dû comprendre comme eux, ce qui lui aurait permis d’agir de concert vers le seul résultat possible.

1436. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

La Coalition a poussé sa trame jusqu’au cœur de son système fédératif : il est décidé à ne plus tolérer dans sa sphère d’action que des souverains dévoués.

1437. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. (Suite) »

La bonne politique l’y poussait.

1438. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

Les Harmonies pour l’un, le livre des Progrès de la Révolution pour l’autre, les avaient poussés à des limites qu’après Juillet ils ont aisément franchies.

1439. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

Son audace inexorable poussait droit devant elle, et n’avait pas l’air de se douter d’elle-même.

1440. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Fontaine »

D’ailleurs, l’impression qu’une dernière et plus fraîche lecture a laissée en nous, impression pure, franche, aussi prompte et naïve que possible, voilà surtout ce qui décide du ton et de la couleur de notre causerie ; voilà ce qui nous a poussé à la sévérité contre Jean-Baptiste, à l’estime pour Boileau, à l’admiration pour madame de Sévigné, Mathurin Régnier et d’autres encore ; aujourd’hui, c’est le tour de La Fontaine19.

1441. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. le Cte Alfred de Vigny à l’Académie française. M. Étienne. »

Ce n’est point, en effet, par des traits isolés et poussés à l’extrême que se peignent des époques tout entières ; il faut de l’espace, des nuances, et considérer tous les aspects.

1442. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre II. Du goût, de l’urbanité des mœurs, et de leur influence littéraire et politique » pp. 414-442

Mais combien le mauvais goût, poussé jusqu’à la grossièreté, ne s’opposerait-il pas à la gloire littéraire, à la morale, à la liberté, à tout ce qui peut exister de bon et d’élevé dans les rapports des hommes entre eux !

1443. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre I. Composition de l’esprit révolutionnaire, premier élément, l’acquis scientifique. »

Poussez plus loin cette idée avec Turgot et Condorcet344, et, à travers des exagérations, vous verrez naître, avant la fin du siècle, notre théorie moderne du progrès, celle qui fonde toutes nos espérances sur l’avancement indéfini des sciences, sur l’accroissement du bien-être que leurs découvertes appliquées apportent incessamment dans la condition humaine, et, sur l’accroissement du bon sens que leurs découvertes vulgarisées déposent lentement dans l’esprit humain.

1444. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre II. Distinction des principaux courants (1535-1550) — Chapitre I. François Rabelais »

Car la nature est bonne, et veut ce qu’il faut, quand elle n’est ni déviée ni comprimée : « parce que gens libères, bien nés, bien instruits, conversans en compagnies honnêtes, ont par nature un instinct et aiguillon qui toujours les pousse à faits vertueux, et retire de vice ; lequel ils nommaient honneur ».

1445. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VI, « Le Mariage de Figaro » »

L’auteur fouettait énergiquement et succès et scandale : il faisait servir la bienfaisance au succès de sa comédie, qu’il poussait vers la centième, mettant en avant aujourd’hui les pauvres mères nourrices, demain une veuve d’ouvrier du port Saint-Nicolas.

1446. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre II. L’éloquence politique »

Et dans les lettres qui furent écrites depuis 1700 il serait facile de noter toute sorte de commencements, comme des poussées et des jets d’éloquence politique, même chez des femmes.

1447. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jean Richepin »

Avec cela je ne sais aucun poète capable, à l’heure où nous sommes, de pareilles poussées de vers alexandrins et autres.

1448. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Stéphane Mallarmé » pp. 146-168

Le poète s’y révélait comme un héritier avantagé des Rivarol, des Chamfort, de ces maîtres qui faisaient tenir en un mot la substance d’un livre et poussèrent l’art de causer dans son intégrale perfection31.

1449. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

C’est elle qui pousse d’autres imbéciles de la force de Bourget à reprocher à Jésus les cruautés de tels de ses disciples, ou à diffamer le noble Épicure parce que des porcs se vantèrent d’appartenir à son troupeau.

1450. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

Je ne pousserai pas plus loin cette échelle comparative d’impressions.

1451. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. de Lamartine. (Les deux premiers volumes. — Pagnerre.) » pp. 389-408

Pour que l’un et l’autre portraits fussent vrais et réellement ressemblants, on pourrait sans doute en garder bien des traits, et il suffirait presque toujours de réduire ; mais c’est cette réduction précisément dont M. de Lamartine s’est bien gardé, et qui est contraire à sa présente manière, dont le procédé est de tout amplifier, de tout pousser à l’excès et à l’effet.

1452. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — II. » pp. 494-514

Mais jusqu’où serait allée la confiance de Mallet du Pan, s’il avait poussé jusque-là sa carrière et s’il avait vécu l’âge d’un Barbé-Marbois ?

1453. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

Avant tout, et pour rattacher à sa vraie date ce nom modeste et qui s’est bien plus appliqué à s’effacer qu’à se produire, je rappellerai que sous la Restauration, vers 1820, à l’époque où ce régime, si peu assis d’abord, commençait à entrer en pleine possession de lui-même, il se fit de toutes parts, dans tous les jeunes esprits, un mouvement qui les poussait avec ardeur vers les études et vers les idées.

1454. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

Sa fin est toute dramatique, et l’historien en a marqué le caractère en quelques mots qu’il n’avait qu’à pousser un peu pour atteindre, au drame ; mais M. 

1455. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1853 » pp. 31-55

— Accusé, passez au banc… Qui vous a poussé à faire le printemps ?

1456. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre III. Zoïle aussi éternel qu’Homère »

Nous poussons l’horreur du servilisme jusqu’à préférer Grimod de la Reynière.

1457. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre V. Le génie et la folie »

Un autre médecin, plus hardi, a poussé plus loin les mêmes conclusions, et n’a pas hésité à considérer le génie comme un phénomène de la même famille que l’aliénation mentale.

1458. (1912) Le vers libre pp. 5-41

Si l’on pousse plus loin l’investigation on découvre que les vers sont ainsi scandés           3                          3                     3                3 Oui je viens — dans son temple — adorer — l’Éternel      2                   4                      2                    4 Je viens — selon l’usage — antique — et solennel soit un premier vers composé de quatre éléments de trois pieds ternaires, et un second vers scandé 2, 4, 2, 4. — Il est évident que tout grand poète ayant perçu d’une façon plus ou moins théorique les conditions élémentaires du vers, Racine a empiriquement ou instinctivement appliqué les règles fondamentales et nécessaires de la poésie et que c’est selon notre théorie que ses vers doivent se scander.

1459. (1912) L’art de lire « Chapitre III. Les livres de sentiment »

., tel que serait celui-ci s’il était plus poussé, plus entraîné par la fougue de la passion, placé du reste, dans des conditions un peu différentes, dans une petite ville ou dans un village, etc. » La lecture des romans suppose ainsi comme condition nécessaire du second moment, je veux dire de la réflexion qui juge, une assez grande connaissance des hommes, et je n’entends par là qu’une assez grande habitude d’observer les hommes autour de soi.

1460. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

C’est un fantaisiste ; c’est une imagination très vive qui pousse devant elle ; c’est un esprit flaireur et, mieux que flaireur, c’est un esprit découvreur, mais qui se grise souventes fois avec ses découvertes ; c’est par-dessus tout, enfin, un humouriste, ayant cette faculté délicieuse de l’humour, qui tient tout à la fois de la gaieté et de la mélancolie, et qui se permet d’aller, mais en se faisant pardonner à force de grâce, jusqu’à l’extravagance.

1461. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Ce jeune écrivain, qui s’est intitulé Bachaumont et qui vaut dix fois mieux, que le masque qu’il a pris, ne se contente pas, comme l’homme de son masque, de ramasser, sans choix et à la pelle, les cancans et les mots et tous les détritus d’un siècle, et de les jeter dans un tombereau qu’il pousse à la postérité.

1462. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

Car c’est un goût épousé par Michelet que l’amour de l’histoire naturelle, et non pas un goût qui ait poussé de soi dans l’ardent célibat de sa pensée.

1463. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Mais l’âme se cabre et pousse son cri : « Et pourquoi — reprend-il — ne pas dire : Je sens sur ma tête le poids d’une condamnation que je subis toujours, ô Seigneur !

1464. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — La banqueroute du préraphaélisme »

Le portrait de femme par Burne-Jones, exposé au salon du Champ-de-Mars en 1896, celui auquel nous faisions allusion au début de cette étude, et qui présente tous les défauts de l’artiste poussés à leur plus haute puissance, fut l’objet, de la part d’un critique parisien37, d’un jugement cruel mais juste, que je prends plaisir a mentionner ici, en l’opposant aux louanges enthousiastes qui ont accablé l’artiste au cours de sa carrière : Hélas !

1465. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

L’un d’eux, du pied, en sortant, dérangea par hasard un morceau de roche ; ils poussèrent un cri : les cinq autres pans de la pierre étaient labourés de signes plus pressés, entre-croisés, enroulés, en sorte que la surface disparaissait sous leur réseau.

1466. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

Si la raison l’éclaire souvent, si elle doit l’éclairer, c’est cependant l’instinct qui le pousse, qui lui suggérera ses plus belles inspirations. […] Il n’en fait rien, de même, du reste, qu’en tout ce travail il ne pousse jamais à fond, se contentant de développer superficiellement quelques observations plus ou moins justes. […] Eh bien, d’instinct, Wagner retrouve les éléments sur lesquels s’était développée la tragédie antique : irrésistiblement, il se sent poussé vers la Musique, et celle-ci est l’élément le plus spécifique de son génie. […] Mais ensuite, la toute-puissante nécessité de notre tâche nous poussa de nouveau bien loin l’un de l’autre, vers des mers, vers des climats différents ; et peut-être ne nous reverrons-nous jamais — peut-être aussi nous reverrons-nous bien, mais sans nous reconnaître, tant la mer et le soleil nous auront changés ! […] Psychologiquement, cette musique est essentiellement juvénile, active, elle pousse à l’action, elle exalte toutes nos énergies, plus » que celle d’aucun autre maître, avant ou après lui.

1467. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Encore ses héros, comme ceux du drame espagnol, poussent volontiers la religion du point d’honneur jusqu’à la superstition, puisqu’ils la poussent jusqu’au crime. […] D’autres, qui se rappellent la règle cartésienne : « Diviser les difficultés en autant de parcelles qu’il se pourra, et qu’il est requis pour les résoudre », font observer que Bourdaloue, dans ses Sermons, semblerait avoir voulu pousser à bout l’application de cette maxime. […] Par-delà les temps du moyen âge, le sentiment est le même qui pousse Ronsard à chercher ses modèles dans les littératures anciennes, et Calvin à réintégrer dans un christianisme corrompu la pureté de son institution primitive. […] Parce que gens libères, bien nés, bien instruits, conversans en compagnies honnêtes, ont par nature un instinct et aiguillon qui toujours les pousse à faits vertueux, et retire de vice : lequel ils nomment honneur. […] À tous tant qu’ils sont, aux Purgons comme aux Trissotins, aux Vadius comme aux Tartufes, il en veut de ce qu’ils ne suivent pas la nature, quand encore ils ne poussent pas l’excès de leur prétention jusqu’à la vouloir combattre.

1468. (1904) Zangwill pp. 7-90

Eu Allemagne, je découvrais dans les regards mie expression de vague mélancolie ou de résignation inerte ; d’autres fois, l’œil bleu gardait jusque dans la vieillesse sa limpidité virginale ; et la joue rose des jeunes hommes, la vaillante pousse des corps superbes annonçait l’intégrité et la vigueur de la sève primitive. […] Le langage devient impossible, si l’on pousse à l’excès le purisme à cet égard. […] Altier, entier, droit, Taine a eu cette audace ; il a commis cet excès ; il a eu ce courage ; il a fait cet outrepassement ; et c’est pour cela, c’est pour cet audacieux dépassement que c’est par lui, et non par son illustre contemporain, qu’enfin nous connaissons, dans le domaine de l’histoire, tout l’orgueil et toute la prétention de la pensée moderne ; avec Renan, il ne s’agissait encore, en un langage merveilleux de complaisance audacieuse, que de constituer une lointaine surhumanité en un Dieu tout connaissant par une totalisation de la mémoire historique ; avec Taine au contraire, ou plutôt au-delà, nous avons épuisé nettement des indéfinités, des infinités, et des infinités d’infinités du détail dans l’ordre de la connaissance, et de la connaissance présente ; désormais transportés dans l’ordre de l’action, et de l’action présente, nous épuisons toute l’infinité de la création même ; toute sa forme de pensée, toute sa méthode, toute sa foi et tout son zèle, — vraiment religieux, — toute sa passion de grand travailleur consciencieux, de grand abatteur de besogne, et de bourreau de travail, tout son passé, toute sa carrière, toute sa vie de labeur sans mesure, sans air, sans loisir, sans repos, sans rien de faiblesse heureuse, toute sa vie sans aisance et sans respiration, toute sa vie de science et la raideur de son esprit ferme et son caractère et la valeur de son âme et la droiture de sa conscience le portaient aux achèvements de la pensée, le contraignaient, avant la lettre, à dépasser la pensée de Renan, à vider le contenu de la pensée moderne, le poussaient aux outrances, et à ces couronnements de hardiesse qui seuls achèvent la satisfaction de ces consciences ; il devait avoir un système, bâti, comme Renan devait ne pas en avoir ; il devait avoir un système, comme Renan devait nous rapporter seulement des certitudes, des probabilités et des rêves ; mais, sachons-le, son système était le système même de Renan, étant le système de tout le monde moderne ; et ce commun système engage Renan au même titre que Taine ; il fallait que Taine ajoutât, au bâtiment, à l’édifice de son système ce faîte, ce surfaite orgueilleux, parce que ce que nous nommons orgueil était en lui un défi à l’infortune, à la paresse, aux mauvaises méthodes et au malheur, non une insulte à l’humilité, parce que ce que nous croyons être un sentiment de l’orgueil était pour lui le sentiment de la conscience même, du devoir le plus sévère, de la méthode la plus stricte ; et c’est pour cela que nous lui devons, à lui et non à son illustre compatriote, la révélation que nous avons enfin du dernier mot de la pensée moderne dans le domaine de l’histoire et de l’humanité.

1469. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

Plus tard, j’ai changé cela, j’ai fait entrer dans ma vie une douce philosophie et de la gaîté… » Là-dessus Flaubert, oui Flaubert, et Saint-Victor se mettent à soutenir la thèse qu’il n’y a rien à faire avec le moderne ; ce qui nous fait pousser des cris de paon et leur jeter : « La plastique est transposée, voilà tout !  […] Il regarde ces empâtements comme un malheur, et, un peu poussé par nous, il dit ne comprendre la peinture qu’avec une grisaille, recouverte de matières colorantes, de glacis. […] Les chalets ressemblent à des décors, les escaliers à des praticables, la mer du fond à la Muette de Portici, et l’on est poussé à croire que les vagues sont faites par des têtes de figurants sous une toile très bien peinte.

1470. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1865 » pp. 239-332

. — Si elle poussait quelqu’un à la Direction ? […] À ce propos, Giraud trouve qu’il y a des croix qu’on aurait dû donner, et, poussé par la princesse, finit par prononcer le nom de Carpeaux, déclarant que ceux qui la méritent le plus, sont ceux à qui on la fait le plus attendre. […] j’ai la conscience d’avoir dit la vérité, et d’avoir signalé la tyrannie des brasseries et de la bohème à l’égard de tous les travailleurs propres, de tous les gens de talent qui n’ont pas traîné dans les caboulots, d’avoir signalé ce socialisme nouveau, qui dans les lettres recommence tout haut la manifestation du 20 mars, et pousse son cri de guerre : « À bas les gants ! 

1471. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

cette guerre de couleur locale, de libre allure et de propriété d’expression qu’ils poussèrent plus tard à l’absurde. […] Le public ne s’inquiète guère des ânes qui ont poussé des beuglements quand la musique de Rossini fut représentée en France ; le spirituel, l’amoureux Rossini fut traité à ses débuts avec aussi peu de ménagements que M.  […] — S’il répond oui, je propose de lui décerner un prix spécial de vertu ; il aura poussé la modestie à ses dernières limites. […] Courbet pousser des cris de paon et faire des sauts de panthère comme si vous leur attaquiez la côte gaillarde.

1472. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Mallarmé pousse à sa limite extrême et presque théorique cette réaction contre la chose décrite. […] Si Mallarmé, dans un fanatisme de pureté, l’a poussé à une outrance absolue, sous divers visages s’en aperçoivent les formes approchées. […] La personnalité de l’art, l’horreur de l’inspiration reçue aussi bien que de celle communiquée, il les a poussées, elles aussi, à leur extrémité absolue, à leur hyperbole de poésie pure. […] Or ce scrupule fier de Vigny, cette déférence pour sa fonction, cet émerveillement attristé d’être poète, Mallarmé les pousse à un degré qui, à Vigny lui-même, eût semblé incroyable et maladif. […] « Il représente, l’ayant poussé à l’outrance, la perfection du système des parnassiens, et le dernier développement de l’art romantique. » M. 

1473. (1887) George Sand

Un jour, le Oui fut prononcé ; elle poussa son cheval hors de la voie marquée par le gué, dans le hasard des eaux profondes. […] On n’avait jamais poussé la piété si avant dans l’adultère. […] Je m’aperçois alors des brusques invraisemblances ou des mauvaises raisons de ces faits que le torrent de l’imagination a poussés devant lui, au mépris des obstacles de la raison ou de la vérité morale, et de là le mouvement rétrograde qui me repousse, comme tant d’autres, vers le lac uni et monotone de l’analyse ». On pourrait faire un travail de ce genre sur la plupart des romans de George Sand et fixer les proportions variables de ces deux éléments qu’elle emploie, le chimérique poussé à outrance et le réel finement observé. […] Elle m’en remercia et poussa la critique bien plus loin que je ne le faisais moi-même, ce qui me donna une idée très favorable de sa nature littéraire, avide de vérité et assez forte pour résister aux tentations subalternes de la flatterie.

1474. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Darlu me le refusa de la façon la plus absolue ; je lui représentai respectueusement que, si un chêne pousse, c’est qu’il veut pousser et que, s’il ne le voulait pas, personne ne pourrait l’y contraindre M.  […] Ohnet, pousser mes ouvrages à soixante treize éditions, je ne le pourrais point. […] Je crois ne pas me tromper en disant que l’Église se défie des apologistes qui, comme mon abbé L***, poussent en avant avec une excessive logique. […] En vérité, on ne saurait pousser plus avant que n’a fait ce maître l’art prestigieux du vers. […] Loulou pousse comme une herbe folle.

1475. (1890) Nouvelles questions de critique

Quelques lignes, en effet, lui suffisent pour pousser plus avant qu’aucun de ses maîtres avant lui, que M.  […] Mais c’est aussi pourquoi, tout au rebours de l’Académie française, qui n’achèvera jamais son Dictionnaire historique, on peut prévoir le temps où l’Académie des inscriptions renoncera d’elle-même à pousser plus avant l’Histoire littéraire de la France. […] Quand on est du Midi, c’est qu’on n’est pas du Nord ; et le bouleau ne pousse pas plus à Antibes ou à Cannes que le cactus à Stockholm. […] Coppée nous poussait, nous oserions bien dire que nous l’aimons mieux. […] Seulement, l’expression en demeure soumise à des lois qui ne sauraient différer de celles de la nature, je veux dire à cette logique intérieure qui ne permet pas que le semblable engendre immédiatement le contraire, qu’il pousse une citrouille sur un chêne, et qu’une grenouille soit aussi grosse qu’un bœuf.

1476. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

La condamnation des révolutionnaires est, au contraire, dans le meurtrier aveuglement qui les pousse à détruire des trésors de vie irremplaçables, aussitôt que cette vie se rebelle contre la dictature de leurs abstractions. […] Le procédé des Jacobins consistant, pour reprendre la profonde formule de Louis XVIII, à « pousser leurs observations métaphysiques au dernier degré » ; il y a dans toutes leurs théories une parcelle de vérité systématiquement faussée. […] Ainsi que l’écrivait à Félix Pécaut un directeur d’école normale en 1894 : « Leur véritable et dominant principe est qu’il faut se pousser. » Il est très possible encore que la diminution du nombre des candidats à ce poste peu rétribué dérive de la nouvelle loi militaire. […] Dans aucun pays ne s’est accompli un travail plus systématiquement destructeur que celui de ses Universités ; dans aucun n’a poussé une plus opulente efflorescence de croyances naïves. […] Le malheur était que, parlant ses opinions avec sa fougue habituelle de causerie, il les poussait, en les parlant, jusqu’à leur dernière limite.

1477. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Si je pousse encore plus loin, la thèse de M.  […] Je ne crois pas qu’il fallût beaucoup pousser l’auteur des Origines de la France contemporaine pour lui faire dire qu’il reconnaît la rhétorique du grand siècle dans la verbeuse phraséologie des Robespierre et des Saint-Just. […] Je pousserai plus loin la hardiesse, et, à ceux qui voudront étudier Pascal et ses Pensées, je conseillerai de commencer par étudier la religion même. […] Une indication, un mot, un hasard même auraient donc pu suffire à le pousser dans la voie où il devait rencontrer son chef-d’œuvre. […] Je la pousserai donc à bout, pour bien montrer ce qu’il y a sinon d’absolument immoral, tout au moins de peu moral dans le roman de Marivaux.

1478. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — I. » pp. 234-253

Il prend la campagne au retour des camps, dans l’intervalle de deux campagnes, comme il dirait lui-même en plaisantant : « Vous que la Cour et l’armée dispensent pour quelque temps de vos soins, amusez-vous dans vos jardins ; puis élevez vos âmes dans vos forêts. » Il est resté tellement sociable, même dans ses heures de solitude et de retraite, qu’il ne serait pas fâché que de son habitation champêtre on découvrît une grande capitale : « Voilà, dirais-je assis au pied d’un vieux chêne, le rassemblement des ridicules et des vices… » Et il entre dans l’énumération, il pousse jusqu’au bout le développement de ce joli motif qui parodie le sage de Lucrèce jouissant en paix du spectacle de l’orage.

1479. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

On regrette que Duclos n’ait pas continué et poussé plus loin ce récit.

1480. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

On a dit qu’il baissait volontiers les yeux en parlant, et qu’il s’interdisait cette éloquence du regard que Massillon s’accordait quelquefois : cela est possible ; mais, dans tous les cas, cette forme de débit n’était qu’une convenance de plus, une manière de pousser plus avant, et comme tout droit devant lui, dans sa démonstration inflexible et sévère.

1481. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

Dans le genre plus classique de Didon et d’Ariane, dans les romans du ton et de la couleur de La Princesse de Clèves, on prodigue moins les balles et les coups mortels, on a les plaintes du monologue, les pensées délicates, les nuances de sentiment ; quand on a poussé à bout l’un des genres, on passe volontiers à l’autre pour se remettre en goût ; mais, abus pour abus, un certain excès poétique de tendresse et d’effusion dans le langage est encore celui dont on se lasse le moins.

1482. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — I » pp. 395-413

D’Alembert serait plus l’homme de Frédéric ; celui-ci en parle en des termes si naturels, qu’on croit voir la personne même dans sa modestie de grand géomètre, et quand Diderot ne le poussait pas aux affaires de parti (7 juillet 1755) : J’ai vu à Wesel d’Alembert, qui me paraît un très aimable garçon ; il a beaucoup de douceur et de l’esprit, joint à un profond savoir, sans prétentions.

1483. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « II » pp. 21-38

Les autres sont des corbeaux qui se disputent quelques plumes de cygne du siècle passé qu’ils ont volées, et qu’ils ajustent comme ils peuvent à leurs queues noires. » À Le Kain il écrivait en 1765 : « Je vous souhaite un autre siècle, d’autres auteurs, d’autres acteurs et d’autres spectateurs. » Ce fut bien autre chose quand il crut voir qu’on abandonnait Racine pour Shakespeare, il poussa des cris d’aigle : « La canaille se mêle de vouloir avoir de l’esprit, écrivait-il en janvier 1778 au censeur Marin ; elle fait taire les honnêtes gens et les gens de goût.

1484. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Il y a plus d’un an, mon cher Mirabeau, que vous attaquez ma retraite et l’inaction où je vis ; je me défends par des retours et des généralités ; je me jette tantôt d’un côté, tantôt d’un autre ; je pousse la première idée que je trouve devant moi.

1485. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

Le plus grand inconvénient pour notre savant dans cette nouvelle et dernière patrie, c’est que le goût du roi le dirigea sur la théologie et le poussa à écrire contre Baronius.

1486. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Et cependant, avec « cette humeur avide de choses nouvelles et inconnues », il ne poussait pas son désir jusqu’à la passion et jusqu’à y sacrifier le repos.

1487. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

je laisse maintenant ces trouvailles à d’autres ; mais ce qui ne sera jamais démenti, c’est qu’ils étaient pleins de compassion pour les pauvres, qu’ils aimaient mieux les peindre que les puissants, qu’ils avaient pour les champs et les campagnards les aspirations de La Bruyère, qu’ils croyaient en leur art, qu’ils l’ont pratiqué avec conviction, qu’ils n’ont pas craint la bassesse du sujet, qu’ils ont trouvé l’homme en guenilles plus intéressant que les gens de cour avec leurs broderies, qu’ils ont obéi au sentiment intérieur qui les poussait, qu’ils ont fui l’enseignement académique pour mieux faire passer sur la toile leurs sensations : enfin, parce qu’ils ont été simples et naturels, après deux siècles ils sont restés et seront toujours trois grands peintres, les frères Le Nain. » J’honore le critique qui trouve de tels accents, et quand il aurait excédé un peu, comme c’est ici le cas, dans ses conjectures ou dans son admiration pour les trois frères indistinctement, il n’aurait fait que réparer envers ces bons et dignes peintres un long arriéré d’oubli et d’injustice, leur rendre avec usure ce que près de deux siècles leur avaient ôté ; il n’aurait pas fait d’eux un portrait faux, car il reconnaît et relève en toute rencontre leurs inégalités et leurs défectuosités originaires, il n’aurait donné en définitive qu’un portrait un peu idéal, ou du moins un portrait un peu plus grand que nature, un peu plus accusé et accentué de physionomie, mais toujours dans les lignes de la ressemblance et de l’individualité.

1488. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet »

Debout, les derniers, sont restés Scheffer, Horace Vernet, Delacroix, celui-ci le seul demeurant aujourd’hui ; eux, privilégiés en cela et favorisés du sort, ils ont poussé à bout leur vocation, ils ont rempli toute leur destinée de peintres ; ils ont fait rendre à leur palette tout ce qu’elle recelait, l’un de poésie, l’autre de vérité, l’autre de flamme ; ils n’ont certes rien à regretter.

1489. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Oeuvres inédites de la Rochefoucauld publiées d’après les manuscrits et précédées de l’histoire de sa vie, par M. Édouard de Barthélémy. »

Chacun, quoi qu’il fasse, y porte son intérêt le plus fin, je veux dire son idéal secret, composé du moi subtilisé, quintessencié, poussé au plus haut degré et au sublime.

1490. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite et fin.) »

Je n’ai point parlé non plus de cette joute de la Croix de Berny, de ce roman de société où il fut un des quatre tenants avec Mme de Girardin, Méry et Jules Sandeau, chacun faisant son personnage et reprenant le roman à l’endroit juste où l’autre l’avait poussé.

1491. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’Audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. »

Le bonhomme Chrysale, entre autres passages, poussé à bout par le purisme de sa sœur, de sa femme et de sa fille, s’écrie : Une pauvre servante au moins m’était restée, Qui de ce mauvais-air n’était point infectée ; Et voilà qu’on la chasse avec un grand fracas A cause qu’elle manque à parler Vaugelas !

1492. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

L’autre jetait le gant aussi, mais il le jetait aux préjugés, à la routine, quelquefois en apparence au sens commun, et, pour mieux frapper, il poussait l’idée neuve, l’idée juste jusqu’au paradoxe, jusqu’au scandale et à l’impossible, sauf à reculer légèrement après : il faisait trois pas en avant pour en gagner deux.

1493. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

Ce livre d’une critique originale et hardie est comme un arbre venu en pleine terre et qui pousse tous ses rameaux dans le sens et au profit de la sève anglo-saxonne.

1494. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite.) »

cet excès de précaution contre soi-même poussé à ce degré est puéril.

1495. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Exploration du Sahara. Les Touareg du Nord, par M. Henri Duveyrier. »

La plus noble forme que revêt la vocation des voyages est assurément celle qui réunit l’instinct et la science, qui pousse des hommes jeunes à aller chercher, loin des douceurs aisées de la patrie, les fatigues, les périls de tout genre, non uniquement pour changer et pour voir, et pour raconter ensuite au courant de la plume ce qu’ils ont vu en touristes et en amateurs, mais pour étudier, pour connaître à fond des contrées et des civilisations lointaines, pour les décrire avec rigueur, pour accroître ainsi sur quelques points nouveaux et compléter l’histoire de la planète que nous habitons.

1496. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire de la Grèce, par M. Grote »

D’ingénieux et savants disciples de Wolf poussèrent à bout les conséquences de ce système négatif et prétendirent ne laisser aucun coin de refuge à l’ancienne croyance9.

1497. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les fondateurs de l’astronomie moderne, par M. Joseph Bertrand de l’académie des sciences. »

Nous avons changé de forme de bel esprit, voilà tout ; nous aimons l’emphase, le lyrisme ; nous poussons à l’enthousiasme : M. 

1498. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre »

Jaloux de la faveur et du crédit, porté en naissant au sein de la fortune, il ne négligea aucun moyen de se pousser et de monter aussi haut qu’il le pourrait : il avait de quoi justifier cette ambition par son mérite et par divers genres de talents.

1499. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

Il n’y a plus moyen d’ajouter un trait, de pousser à la perfection, à l’art, de composer sa Princesse de Clèves à souhait.

1500. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SÉVIGNÉ » pp. 2-21

Et, maintenant, si dans tout ce qui précède nous paraissons à quelques esprits difficiles avoir poussé bien loin l’admiration pour Mme de Sévigné, qu’ils nous permettent de leur adresser une question : L’avez-vous lue ?

1501. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 193-236

Les rudes mains des sbires me séparèrent violemment et me poussèrent dans la rue.

1502. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre III. Comédie et drame »

Ce qui semble rester, c’est un peu plus de largeur dans la conception du genre, et le droit de pousser l’impression jusqu’au sentiment et au pathétique ; ici encore on pourrait dire que Voltaire a exprimé la moyenne du goût de son temps.

1503. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

Même le prince d’Athis humanise la courbe méprisante de son profil devant ce miracle de jeunesse et de grâce dansante qui, du bout de ses pointes, décroche tous ces masques mondains ; et le Turc Mourad Bey, qui n’a pas dit un mot de la soirée, affalé sur un fauteuil, maintenant gesticule au premier rang, gonfle ses narines, désorbite ses yeux, pousse les cris gutturaux d’un obscène et démesuré Caragouss.

1504. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IV. Ordre d’idées au sein duquel se développa Jésus. »

Jésus vécut à un de ces moments où la partie de la vie publique se joue avec franchise, où l’enjeu de l’activité humaine est poussé au centuple.

1505. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IV. Précieuses et pédantes »

Voyez-le ensuite s’égayer, l’œil grivois et la lippe grasse, de ce « pseudonyme à deux places » et pousser du coude une camarade rosse, pour qu’elle appelle Victoria : « Sacrée omnibus. » Cette drôlerie grossière n’est pas sans amuser une minute.

1506. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Puis, quand il a poussé à bout ses calculs d’ingénieur et de politique ; quand la population, dans ses diverses races, est tenue en échec ; quand il a régularisé l’inondation et organisé le désert, que tous les puits sont occupés, que pas un pied cube d’eau n’est perdu, alors seulement il lâche bride à son imagination ; il se retrace le beau idéal d’une Égypte bien gouvernée : Mais que serait ce beau pays, après cinquante ans de prospérité et de bon gouvernement ?

1507. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

Il aurait eu besoin plutôt de se modérer parfois et de se contenir ; car, au milieu d’un retour général louable et d’un désabusement salutaire, le vent poussait à la réaction, et le danger était, comme toujours, qu’on ne sortît d’un faux courant que pour se jeter aussitôt dans un autre.

1508. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. » pp. 432-452

Mais, à l’égard de Mme de Staël, l’oubli est poussé à un degré plus incroyable et qui passe tout.

1509. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. Le Chateaubriand romanesque et amoureux. » pp. 143-162

Quand M. de Chateaubriand essaie de nous peindre la douleur qu’il éprouva dans le temps, après avoir brisé le cœur de Charlotte, il parvient peu à nous en convaincre ; des tons faux décèlent le romancier qui arrange son tableau, et l’écrivain qui pousse sa phrase : « Attachée à mes pas par la pensée, Charlotte, gracieuse, attendrie, me suivait, en les purifiant, par les sentiers de la Sylphide… » et tout ce qui suit.

1510. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

J’ai voulu pousser la citation jusqu’à cette pièce de six blancs pour montrer qu’avec Rousseau nous ne sommes pas uniquement dans le René et dans le Jocelyn.

1511. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

Voltaire, tantôt à Paris, tantôt à Versailles, était alors dans sa veine passagère de faveur à la Cour, essayant de s’y pousser par la protection de la maîtresse favorite, et il devait avoir à rougir quelquefois devant Vauvenargues de ces distractions et de ces poursuites, si peu dignes de l’ami d’un sage.

1512. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Histoire du chancelier d’Aguesseau, par M. Boullée. (1848.) » pp. 407-427

M. de Valincour, en discutant avec d’Aguesseau, avait beaucoup de la méthode de Pascal, qui méprisait la raison, la poussait à outrance, et qui lui contestait de pouvoir trouver seule le commencement et l’ébauche des hautes vérités.

1513. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Maintenon. » pp. 369-388

Elle a raison, en un sens, de se comparer à un Louvois, à de grands ministres, aux grands ambitieux : je ne crois pas qu’on ait jamais poussé plus loin qu’elle l’esprit de suite, le culte de la considération et la puissance de se contraindre.

1514. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — I. » pp. 401-420

À la différence de Mme de Maintenon, elle a des idées politiques ; elle ose les avouer et pousser à l’exécution.

1515. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

V, p. 414), quand l’ambitieux, jeune encore et non rassasié, s’insinue, se pousse et aspire ; l’autre au faîte de la vie (t. 

1516. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — I. » pp. 84-104

Son instinct de guerre le poussait à entrer dans leurs rangs : la peur de paraître avoir peur l’y obligeait.

1517. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

La seconde période, de 1669 à 1677, comprend le satirique encore, mais qui de plus en plus s’apaise, qui a des ménagements à garder d’ailleurs en s’établissant dans la gloire ; déjà sur un bon pied à la Cour ; qui devient plus sagement critique dans tous les sens, législateur du Parnasse en son Art poétique, et aussi plus philosophe dans sa vue agrandie de l’homme (Épître à Guilleragues), capable de délicieux loisir et des jouissances variées des champs (Épître à M. de Lamoignon), et dont l’imagination reposée et nullement refroidie sait combiner et inventer des tableaux désintéressés, d’une forme profonde dans leur badinage, et d’un ingénieux poussé à la perfection suprême, à l’art immortel.

1518. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

L’ouvrage qui a fait sa réputation et qui a paru en 1788 semble depuis quelque temps mis de côté et jugé avec une sévérité qu’il ne faudrait pas pousser à l’injustice.

1519. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre deuxième. Rapports du plaisir et de la douleur à la représentation et à l’appétition »

Nous commençons par peiner, dans tous les sens du mot, avant de tendre vers un plaisir déterminé ; le besoin nous pousse par derrière, avant que le désir nous attire en avant.

1520. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers libre  »

L’alexandrin s’allonge et s’accourcit selon que l’idée a besoin d’ampleur ou de resserrement et le rejet, comme un rejeton de rosier planté en bonne terre, pousse et verdoie selon sa vie propre : l’allitération et les assonances internes ou finales rejoignent les deux vies et les parent de leurs feuillages.

1521. (1767) Salon de 1767 « Adressé à mon ami Mr Grimm » pp. 52-65

Lorsque je m’arrache les entrailles, lorsque je pousse des cris inhumains ; ce ne sont pas mes entrailles, ce ne sont pas mes cris, ce sont les entrailles, ce sont les cris d’un autre que j’ai conçu et qui n’existe pas… or il n’y a, mon ami, aucune espèce de poëte à qui la leçon de Garrick ne convienne.

1522. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 33, que la veneration pour les bons auteurs de l’antiquité durera toujours. S’il est vrai que nous raisonnions mieux que les anciens » pp. 453-488

Newton n’auroient point poussé la geométrie où ils l’ont poussée, s’ils n’eussent pas trouvé cette science en un état de perfection qui lui venoit d’avoir été cultivée successivement par un grand nombre d’hommes d’esprit, dont les derniers venus avoient profité des lumieres et des vûës de leurs prédecesseurs.

1523. (1911) Jugements de valeur et jugements de réalité

C’est la société qui le pousse ou l’oblige à se hausser ainsi au-dessus de lui-même, et c’est elle aussi qui lui en fournit les moyens.

1524. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

Poussé sans doute par ces criailleries malveillantes, Murger tenta un jour une excursion par-delà la Bohême.

1525. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Ayez horreur, avant tout, de cette poésie misanthropique, ou plutôt infernale, qui semble avoir reçu sa mission de Satan même, pour pousser au crime, en le montrant toujours sublime et triomphant ; pour dégoûter ou décourager de la vertu, en la peignant toujours faible, pusillanime et opprimée.

1526. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

Selon la méthode de Taine, qui indigne du Méril, mais qui l’indigne si doux, le talent lui-même n’est plus qu’un champignon d’une espèce particulière, qui pousse tout à coup quand l’humus se trouve contenir du phosphore, qu’aucun nuage ne neutralise l’action du soleil et que l’air ambiant est suffisamment saturé d’oxygène.

1527. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Prosper Mérimée »

Il valeta comme pas un pour y entrer, et quand, essoufflé et sur les dents, de ses marches, contremarches et démarches pour se pousser dans la Française, il y fut entré à la fin, il repartit, comme une locomotive haletante, pour forcer celle des Inscriptions !!!

1528. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

S’il avait eu seulement, dans sa placide main, la bienheureuse mâchoire d’âne avec laquelle on casse si bien celles des autres, les mâchoires qu’il aurait cassées eussent poussé des cris, et, j’en suis sûr, auraient fait des articles.

1529. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

Seulement, par une inconséquence qui nous touche et dont nous connaissons la cause, il se mêle à ces poésies, imparfaites par là au point de vue absolu de leur auteur, des cris d’âme chrétienne, malade d’infini, qui rompent l’unité de l’œuvre terrible, et que Caligula et Héliogabale n’auraient pas poussés.

1530. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVI. Des oraisons funèbres et des éloges dans les premiers temps de la littérature française, depuis François Ier jusqu’à la fin du règne de Henri IV. »

Ce roi brave, mais d’une valeur moins éclatante que son père protecteur des lettres, mais sans cette espèce de passion qui tient de l’enthousiasme, et le fait naître chez les autres ; avide de gloire, mais incapable de cette hauteur de génie qui s’ouvre de nouvelles routes pour y parvenir ; gouverné par des favoris qui dirigeaient à leur gré sa faiblesse ou sa force, et poussé en même temps par l’esprit de sa nation et de son siècle, qu’il trouva créé et auquel il n’ajouta rien, n’eut ni dans l’esprit, ni dans l’âme, cette espèce de ressort qui fait la grandeur.

1531. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

Il serait facile de pousser trop loin, jusqu’au paradoxe et peut-être à quelque absurdité, ce que j’indique et voudrais atténuer sans me dédire. […] … Il ne faut pas qu’un jeune homme, ou un barbon qui a gardé hors de saison trop de verdeur, se pousse dans la conversation des lettrés comme un petit impertinent. […] Telle, une branche d’arbre pousse, obéit aux lois d’une essence et confie aux fantaisies du hasard les menus détails de son dessin. […] Il ne manque plus que Le Constitutionnel pour me faire pousser des cucurbitacées jusque dans le nez !  […] Il supplia Barbey de ne pas pousser plus loin son imprudence.

1532. (1896) Les époques du théâtre français (1636-1850) (2e éd.)

Mais je me sens poussé D’un souffle impétueux, d’un destin insensé. […] Ébauches ou esquisses, il n’y a rien là, je ne dis pas d’achevé, je dis d’assez poussé seulement. […] et l’intérêt même de sa réputation, ses amis, ses goûts, sa jeunesse, son génie, tout enfin ne devait-il pas le pousser du côté de la nouveauté ? […] a dit quelqu’un, mais nous en poussons tous, des « cris du cœur » ! […] Je poussai jusqu’à son cabinet, et je le trouvai en chemise, entre son remora et une autre personne de quinze ans, son fils l’abbé versant des rasades à deux inconnus, des verres cassés, plusieurs cervelas sur la table, et lui assez chaud de vin.

1533. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

» Ici encore, je pousse un « oh !  […] La bonne Riquette pousse Mme Champcourtier dans la chambre voisine. […] Et elle pousse des cris aigus, elle enfle ses joues fraîches, elle roule en agitant ses bras potelés : c’est une tempête rosée ! […] Seize ans, c’est l’âge ingrat, l’âge où on est laid, où on est gauche, où la voix mue, où la barbe commence à pousser inégalement, où les traits ont quelque chose d’imparfait et de transitoire. — Et que fait Zanetto ? […] Le vieux lord Fingall, poussé par sa jeune et jolie femme Dora, s’est rallié au prince ; mais ses tenanciers sont peu disposés à le suivre.

1534. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

On peut même, sans injustice, l’accuser d’avoir poussé trop loin l’emploi de ce moyen, qui dégénère quelquefois en pédantisme. […] Le connétable, poussé à bout, passe à Charles-Quint, et va combattre l’armée française à la tête des impériaux. […] Il ouvre les biographies de Plutarque, et s’en contente sans pousser plus avant ses études. […] L’épanouissement des premières feuilles, la pousse des branches, rien ne manque à la curiosité du lecteur. […] Il est impossible de pousser plus loin l’ardeur et la chasteté de la poésie.

1535. (1906) L’anticléricalisme pp. 2-381

Il me semble ainsi, et il ne faudrait pas beaucoup me pousser pour me faire dire que j’en suis sûr. […] En réprimant, en proscrivant la liberté de pensée, vous poussez tel sentiment à ce degré d’acuité où il se préfère à l’idée de patrie et s’insurge contre une patrie qui l’opprime. […] Il est très vrai que la diversité de pensée peut aller jusqu’à rompre le faisceau national ; mais il est aussi vrai que « l’unité morale » imposée pousse tout simplement les pensées indépendantes à devenir antipatriotiques et rompt le faisceau national bien plus complètement. […] Il fit remarquer spirituellement qu’il y a en France, sinon une grande science théologique, du moins un sentiment théologique poussé à une singulière véhémence, à savoir la haine théologique, invidia theologica, et que « beaucoup de libres penseurs n’ont pas d’autre conception de la libre pensée que de prendre l’envers du cléricalisme qu’ils combattent avec tant d’énergie, si bien que, gardant toutes les habitudes d’esprit qu’ils reprochent à leurs adversaires, ils ne sont que des cléricaux à rebours ». […] Nous aurions voulu — et cela est peut-être la vérité et ce n’est pas ici le lieu de démontrer pourquoi, mais c’est peut-être la vérité et je pourrai le démontrer une autre fois — nous aurions voulu, de ferme propos, de dessein prémédité et de forte persévérance, nous aliéner l’Alsace et la pousser doucement du côté de l’Allemagne que nous n’aurions pas parlé, agi et légiféré autrement.

1536. (1902) Le critique mort jeune

Mais je puis successivement étudier divers systèmes philosophiques, ce qui, du reste, me sera agréable, et, aussitôt qu’en exposant chacun d’eux je me sentirais arriver au scepticisme, pousser le cri d’alarme et dire : cette philosophie mène au doute, elle est condamnée. […] Maurice Barrès avoue qu’il y a quelque chose d’effrayant dans cet automatisme qu’il ne faudrait pas, sous peine d’absurdité, pousser à ses conséquences extrêmes. […] Joseph Monneron, fils de paysans de l’Ardèche, distingué à l’école pour son intelligence, instruit aux frais de l’État et poussé jusqu’à l’Ecole Normale, est, au moment où s’ouvre le livre, titulaire d’une chaire de rhétorique dans un des premiers lycées de Paris. […] Bourget a poussé aux dernières limites son analyse du mal qui travaille la famille Monneron : « Dans les familles, grandies, comme celles des Monneron, au rebours des lois fondamentales des sociétés saines, il se rencontre sans cesse un phénomène plus tragique peut-être, bien qu’uniquement moral, que les catastrophes terribles ou sinistres : ainsi l’escroquerie d’Antoine, ainsi la faute de Julie. […] En le choisissant universitaire, il obtenait le « déraciné » par excellence, l’homme qui, ayant oublié ses traditions, nie la coutume et l’hérédité, les remplace par l’idéologie et, professionnellement habitué aux déductions logiques, pousse à l’extrême ses principes et y conforme toute sa vie, ne se montrant même pas « conciliant en fait », comme le recommandent et la sagesse et la facilité de l’existence.

1537. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

Tous les peuples ont eu des sacrifices sanglants, et tous, aussi, poussés par une invincible logique dont ils ont accepté les conséquences, ont compris que la conclusion nécessaire de cette conception était le sacrifice humain. […] Et comme l’homme de combat s’en accommode aisément, la suite des déductions paraissant si bien pousser et refouler au loin l’adversaire ! […] Il s’est placé au centre des opérations et a poussé droit devant lui. — Il a pensé ceci : le christianisme, c’est la création. […] A le prendre par où il n’est pas simplement négatif et destructeur, le fond du xviiie  siècle est individualisme poussé à outrance, et théorie de la perfectibilité humaine. […] Quand on consulte son Journal intime, il fait l’effet d’un personnage de l’ancienne comédie, un peu invraisemblable, un peu outré et poussé à la caricature.

1538. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviiie entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

L’attrait des vœux d’amour les poussait l’un vers l’autre. […] « Sîfrit saisit aussitôt un aviron et poussa la barque loin du rivage. […] « — Si vous ne voulez croire ce que vous m’avez entendu dire, venez écouter les gémissements que poussent Kriemhilt et sa suite sur la mort de Sîfrit. » Sigemunt s’émut fortement : une angoisse terrible s’empara de lui.

1539. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Dans aucun de ses livres, M. de Balzac n’a peut-être mis autant d’afféterie, ni poussé aussi loin le goût des phrases entortillées ? […] Après cette déclaration nous n’avons pas à pousser cette étude plus loin ; ce que nous condamnons, M.  […] Observateur délicat, nul n’a poussé plus loin l’attention pour découvrir des beautés que peu de gens, sans lui, auraient soupçonnées.

1540. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

L’ironique enterrement, qui s’est terminé, Mlle Barbier partie, par cette phrase du ribaud : « Oui, très gentil, ce monsieur Nicolardot… oui, tous les matins, il poussait une petite blague aux femmes de ma maison !  […] Aujourd’hui elle a adopté les couleurs fausses, fabriquées par le Septentrion saxon, et ce sont d’épouvantables nuances que ces verts pousse de panais, ces rouges bisque d’écrevisse, ces jaunes bruns des vieux Rouen. […] Une heure de marche, au bout de laquelle, on arrivait à un grand pré, qui avait presque toujours, çà et là, des taches d’un vert plus vivace que le reste de l’herbe, des taches qui étaient des places à mousserons, poussés la nuit, et qu’on cueillait dans la rosée.

1541. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1894 » pp. 185-293

Dimanche 8 avril Voici Paul Margueritte, qui pousse la porte du Grenier, bien vivant, bien portant. […] Samedi 5 mai Frédéric Régamey me fait voir une série de portraits, publiés dans le Matin, des dessins assez poussés, dont il fait une sorte de résumé à la plume, très largement traité, et qui a le caractère et les tailles de ces bois, illustrant les livres du xvie  siècle. […] Et le plafond s’éclaire sous un grand foukousa, du rose d’un soleil couchant à Tokio, dans lequel s’élancent des bambous verts, au vert tendre d’une pousse arborescente dans le mois de mai, et coupés par un nuage, où volent de blanches grues.

1542. (1930) Le roman français pp. 1-197

Et ce dernier trait, abominable : « Une attaque d’apoplexie nous en a délivrés. » On ne saurait pousser plus loin l’expression de la haine. […] Flaubert et Maupassant Nul sans doute ne saurait pousser l’erreur jusqu’à croire que Flaubert fut suscité par les Goncourt. […] De surcroît ses origines normandes le poussent au style oratoire (procès, tribunaux, réquisitoires, plaidoiries). […] Et c’est Mme de Caillavet, encore une fois, qui l’engage à pousser cette nouvelle — dont nous n’avons pas cette fois la première version, qui ne fut d’ailleurs, je crois, jamais écrite — jusqu’au roman. […] On constatait, d’autre part, assez clairement, que l’Église qui se posait désormais comme le rempart vivant des institutions monarchiques, n’entendait pas seulement exiger l’accomplissement des rites, ne se contentait plus d’une soumission extérieure aux dogmes, mais instituait une surveillance — qu’on l’accusait de pousser jusqu’à l’espionnage — sur les mœurs et la vie privée.

1543. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « LEOPARDI. » pp. 363-422

On a souvent remarqué cette alliance, au premier abord singulière, du génie poétique et du génie philologique ; mais ici elle a cela de plus particulier encore que le poëte énergique et brûlant qui va nous apparaître ne finit point par la philologie, ne s’y retira point après son premier feu jeté, mais qu’il débuta par là, et que, si ses souffrances précoces ne l’avaient impérieusement détourné des études suivies, c’est de ce côté sans doute qu’il aurait, avant tout, frayé sa voie et poussé sa veine patiente. […] Les autres se préoccupaient davantage de l’Allemagne, du moyen âge et des théories dramatiques : lui, il resserra et poussa uniquement ses efforts dans la haute poésie lyrique, et aussi dans des écrits en prose d’une extrême perfection.

1544. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

Deux phrases plus loin, la même insinuation revient plus précise. « Quelques-uns, dit Tibère, pourraient représenter sa sévérité publique comme l’effet d’une ambition ; dire que sous prétexte de nous servir, il écarte ce qui lui fait obstacle ; alléguer la puissance qu’il s’est acquise par les soldats prétoriens, par sa faction dans la cour et dans le sénat, par les places qu’il occupe, par celles qu’il confère à d’autres, par le soin qu’il a pris de nous pousser, de nous confiner malgré nous dans notre retraite, par le projet qu’il a conçu de devenir notre gendre. » Les Pères se lèvent : « Cela est étrange132 !  […] Ainsi font les autres artistes de cet âge ; ils ont le même genre d’esprit et la même idée de la vie ; vous ne trouverez dans Shakspeare que les mêmes facultés avec une pousse plus forte, et la même idée avec un relief plus haut.

1545. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VII. Les poëtes. » pp. 172-231

Mais Pope, qui vit tranquille et admiré dans sa villa, et qui n’est poussé que par des rancunes littéraires ! […] Les lettrés faisaient comme ces coquettes pour qui les superbes déesses de Michel-Ange et de Rubens ne sont que des vachères, mais qui poussent un petit cri de plaisir à l’aspect d’un ruban à vingt francs l’aune.

1546. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

« Ils ont résolu de me tuer ou de me pousser au suicide », écrit-il ce jour-là à Licinio. […] « Tancrède poursuit sa victoire ; et, la menace à la bouche, il la pousse, il la presse ; elle tombe : mais dans le moment un rayon céleste l’éclaire ; la vérité descend dans son cœur, et d’une infidèle en fait une chrétienne.

1547. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCIXe entretien. Benvenuto Cellini (1re partie) » pp. 153-232

Ils poussèrent des cris qui me réveillèrent, et m’avertirent de ce qui venait de se passer. […] Quand ils virent que la cassette n’avait pas été touchée, et que tous les trésors y étaient encore, ils poussèrent des cris de joie, ce qui me rendit toutes mes forces, et me fit remercier Dieu.

1548. (1864) Cours familier de littérature. XVII « Ce entretien. Benvenuto Cellini (2e partie) » pp. 233-311

Soudain je pousse la porte, je lui mets la pointe de mon épée sur la poitrine, sans lui donner le temps de tirer la sienne, et je lui dis : Vil poltron, recommande ton âme à Dieu, car tu vas mourir ! […] J’étais lié, dans ce temps-là, avec Jérôme Albizzi, commissaire de l’infanterie, qui me dit qu’il voulait m’accorder avec le duc, et que je ne devrais point pousser les choses au point de l’irriter contre moi.

1549. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVe entretien. Ossian fils de Fingal »

Mon âme est accablée de douleur ; il faut que ce soit moi qui donne la main au premier des mortels. » « Je poussai un soupir profond ; je levai le tranchant de ma lame : le jeune Ferda tomba sur la terre, Ferda, le premier des amis de Cuchullin. […] Nos épées en ont détruit quelques-uns : mais tels que les flots de l’Océan poussés par les vents sur les sables de Mora, tels s’avancent les guerriers de Loclin sur la plaine de Lena : les fantômes de la nuit jetèrent des cris sinistres, et j’ai vu étinceler les météores, avant-coureurs de la mort.

1550. (1893) Du sens religieux de la poésie pp. -104

Percé de coups de couteau, il ferme ses grands yeux « sans pousser un seul cri ». […] Quant aux inventions pratiques de la mécanique et de l’industrie — quoiqu’elles soient des progrès réels si nous savons les employer vers le but suprême de la vie, lequel est hors de l’espace et du temps — elles ont eu le grand tort de donner aux passants trop de vanité et de pousser à toute outrance la vie individuelle.

1551. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre I. Des poëtes anciens. » pp. 2-93

L’auteur dit qu’il a poussé l’ambition jusqu’à ôter à son ouvrage l’air de traduction, pour lui donner celui d’un ouvrage de premiere main. […] Les argumens d’Epicure, de Lucréce & des Sceptiques qui venoient depuis peu d’être poussés très-loin dans le Dictionnaire critique, le furent peut-être encore davantage dans la conversation.

1552. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

Le climat d’Angleterre a bien poussé sa chaleur jusqu’à produire de grands sujets dans toutes les sciences et dans toutes les professions. […] Les grecs ont poussé le vice et la vertu plus loin que les autres hommes.

1553. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Granier de Cassagnac » pp. 277-345

La révolution qui le poussait au pouvoir le connaissait bien ! […] Le journaliste, cet orateur sur papier, dure un peu davantage ; mais il meurt aussi, l’action à laquelle il a poussé, ou contre laquelle il a résisté, accomplie.

1554. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Touchés de tant de merveilles, épanchons nos cœurs sur la piété de Louis ; poussons jusqu’au ciel nos acclamations, et disons à ce nouveau Constantin, à ce nouveau Théodose, à ce nouveau Marcien, à ce nouveau Charlemagne, ce que les six cent trente Pères dirent autrefois dans le concile de Chalcédoine ; « Vous avez affermi la foi, vous avez exterminé les hérétiques : c’est le digne ouvrage de votre règne, c’en est le propre caractère. […] C’est encore Saint-Simon qui en témoigne : « Bossuet tenait au Roi par l’habitude et l’estime, et par être entré en évêque des premiers temps dans la confiance la plus intime du Roi, et la plus secrète, dans le temps de ses désordres. » Lorsque Louis XIV fut las de ses maîtresses, ce fut Bossuet qui, aidé du confesseur La Chaise, le poussa à la dévotion et au repentir de ses désordres.

1555. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Mme de La Maisonfort était de ces personnes rares comme on en connaît quelques-unes en tout temps, qui se portent d’abord au sommet de toutes les curiosités de leur époque, juges suprêmes et raffinés des ouvrages de l’esprit, oracles et prosélytes des opinions en vogue : elle eût fait agréablement du jansénisme avec Racine ou avec M. de Tréville, comme elle distillait du quiétisme avec Fénelon, comme au xviiie  siècle elle se fût éprise de David Hume avec la comtesse de Boufflers, comme au xixe elle eût brillé dans un salon doctrinaire, eût discuté sur la psychologie ou l’esthétique, et peut-être eût poussé jusqu’aux Pères de l’Église, non sans effleurer le socialisme en passant.

1556. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — III » pp. 178-197

Viens lui parler de devoir, de convenance, lui dire combien la vérité morale est aimable, combien le sens moral infaillible… Ne t’épargne pas sur ce sujet… Déploie toutes tes facultés de déclamation et d’emphase à la louange de la vertu… Pousse ta prose éloquente jusqu’à surpasser l’éclat de la poésie… Il y manque toujours une toute petite parole à voix basse, que Celui-là seul peut prononcer de qui le verbe atteint d’un coup son plein effet, et qui dit aux choses qui ne sont pas d’être, et elles sont à l’instant.

1557. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Une petite guerre sur la tombe de Voitture, (pour faire suite à l’article précédent) » pp. 210-230

M. de Girac, poussé à bout, traité comme un sauvage qui, pour juger des élégances, sortirait tout hérissé de la lecture d’un rabbin ou du scholiaste de Lycophron, ne se contint plus, et, comme s’il eût voulu justifier le reproche, il se mit à puiser à pleines mains dans l’arsenal des Scaliger et des Scioppius, ou, si l’on aime mieux, dans le vocabulaire de Vadius.

1558. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

Il n’osa toutefois assumer la responsabilité d’un refus, et il se mit de la partie avec ce même sentiment de la difficulté et de la non-réussite qui constitue son étoile : « Je considérais quel fardeau je prenais sur mes épaules pour la troisième fois ; je me ramentevais l’inconstance de nos peuples, l’infidélité des principaux d’iceux, les partis formés que le roi avait dans toutes nos communautés, l’indigence de la campagne, l’avarice des villes, et surtout l’irréligion de tous. » Par irréligion il faut simplement entendre l’affaiblissement de ce principe religieux exalté qui ne s’était vu qu’au xvie  siècle et qui poussait à tous les sacrifices de vie et de fortune pour la foi, affaiblissement qui tenait déjà de l’esprit moderne, et un vertu duquel beaucoup d’estimables réformés préféraient le commerce à la guerre ; Ce n’était pas le compte de Rohan ni des chefs féodaux.

1559. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Voilà où se bornent mes soucis… Mirabeau toujours expansif, abondant dans son propre sens, et d’ailleurs aussi cordial en ceci que clairvoyant, pousse sa thèse et, imbu des idées du jour, il prononce le grand mot, celui des lettres dont l’avènement et le règne étaient prochains dans la société et qui allaient faire l’opinion publique, cette autre reine : Je sais, dit-il à Vauvenargues, que votre peu de disposition3 et de santé ne vous permet pas de courir ce que quelqu’un comme vous doit appeler fortune ; mais quelle carrière d’agréments ne vous ouvrent pas vos talents dans ce qu’on appelle la République des lettres !

1560. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

[NdA] Dans un écrit de Furetière, Nouvelle Allégorique, ou histoire des derniers troubles arrivés au royaume d’Éloquence (1659), on lit : « Il y vint (à l’armée du Bon Sens) un illustre abbé de Marolles, qui poussa ses conquêtes jusques dans les terres de Tibulle, Catulle, Properce, Stace, Lucrèce, Piaule, Térence et Martial ; terres auparavant inconnues à tous ceux de sa nation ; cependant il les dompta, et les mit sous le joug de ses sévères versions, et il les traita avec telle exactitude et rigueur, que de tous les mots qu’il y trouva, il n’y eut ni petit ni grand qu’il ne fît passer au fil de sa plume, et qu’il n’obligeât à parler français et à lui demander la vie… » Ce jugement ne ferait guère d’honneur à la critique de Furetière qui était d’ailleurs un homme d’esprit, mais il est à croire qu’il ne parlait pas sérieusement quand il écrivait cela.

1561. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de l’Académie française, par Pellisson et d’Olivet, avec introduction et notes, par Ch.-L. Livet. » pp. 195-217

Depuis la venue de Malherbe, un souffle général y poussait.

1562. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers. »

On doit s’attendre que des hommes dans sa condition ne seront pas poussés à agir par des mobiles privés… Il pourrait faire sans doute un pas extraordinaire en considération d’un mérite extraordinaire… Mais, s’il ne le fait point, aurait-on bonne grâce à s’en plaindre et à en concevoir le moindre ressentiment ? 

1563. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Sa mère était une personne supérieure que Sismondi plus tard n’hésitera pas à comparer à Mme de Staël, non pour le génie et le brillant de l’esprit ; Mme de Staël l’emportait par ces côtés : « Mais ma mère, dira-t-il dans la conviction et l’orgueil de sa tendresse, ne le cède en rien ni pour la délicatesse, ni pour la sensibilité, ni pour l’imagination ; elle l’emporte de beaucoup pour la justesse et pour une sûreté de principes, pour une pureté d’âme qui a un charme infini dans un âge avancé. » Cette mère, femme d’un haut mérite et d’un grand sens, dominera toujours son fils, influera sur lui par ses conseils, le dirigera même à l’entrée de la carrière littéraire et, le détournant tant qu’elle le pourra des discussions théoriques pour lesquelles il avait du goût, le poussera vers les régions plus sûres et plus abritées de l’histoire7.

1564. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette »

Tout un courant s’est créé en ce sens, et le vent y pousse.

1565. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Vous y tracez le portrait le moins ressemblant de mon caractère et poussez l’erreur jusqu’à prendre le change sur mes impressions.

1566. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [III] »

L’entrée à Smolensk signala ainsi la troisième grande manœuvre manquée de la campagne : « ce fut la dernière de notre côté. » À partir de là, Napoléon n’eut plus qu’à pousser tout droit en avant et à marcher sur Moscou, en perçant de vive force au cœur de sa fatale conquête.

1567. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

, elle pousse nuit et jour des chants aigus et saccadés comme la cigale sur l’épi.

1568. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre III »

De province en province, on les suit à la trace : quatre mois plus tard, aux environs d’Étampes, quinze brigands forcent trois fermes avant la nuit, et les fermiers, menacés d’incendie, sont obligés de donner, l’un trois cents francs, l’autre cent cinquante, probablement tout l’argent qu’ils ont en coffre774. « Voleurs, galériens, mauvais sujets de toute espèce », ce sont eux qui, dans les insurrections, feront l’avant-garde, « et pousseront le paysan aux dernières violences775 ».

1569. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre II. De l’expression »

196          Et, si j’eusse eu pour maître Un serpent, eût-il su jamais pousser si loin L’ingratitude ?

1570. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

Comme il n’y a pas encore de goût public, et qu’il n’y a plus de doctrine d’école, chacun suit en liberté la pente de sa pensée et va où les nécessités de sa vie intellectuelle et morale le poussent.

1571. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

Paul Bourget ait une assez grande influence sur la jeunesse d’à présent, non pas peut-être sur celle dont les études classiques ont été poussées très avant et que la tradition latine et gauloise munit et défend, mais sur la partie la plus inquiète, la plus nerveuse et la plus ignorante de la jeunesse qui écrit.

1572. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

Mais, le voyant souvent le nez dans un livre, un des habitués du samedi dit au père qu’il le fallait pousser.

1573. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

Une œuvre est belle moralement, quand elle montre et par conséquent suggère le triomphe du devoir sur un désir mauvais, de la volonté raisonnable sur les appétits grossiers ; quand elle inspire l’horreur d’un vice comme l’hypocrisie ou l’avarice ; quand elle pousse au dévouement, au sacrifice ; quand elle combat l’injustice, la misère, l’égoïsme.

1574. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

De bons travaux178 ont déjà commencé à établir entre plusieurs d’entre eux cette espèce particulière de balance du commerce ; il n’y a qu’à pousser plus avant dans cette voie.

1575. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XI, les Suppliantes. »

C’est vers cet Olympe hospitalier que Danaos pousse l’essaim craintif de ses filles ; chacune tient à la main un rameau cueilli aux oliviers du coteau. — « Un autel est plus sûr qu’une tour, leur dit-il, et protège mieux qu’aucun bouclier. » — Il n’est que temps de s’abriter derrière ce rempart ; une troupe de guerriers, montés sur des chars, s’est élancée des portes d’Argos.

1576. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

En se livrant à l’étude du droit, il se sentit d’abord poussé bien moins vers les lois civiles que vers les lois politiques ; il lut avec avidité, il s’empressa d’extraire et d’approfondir tous les ouvrages français composés sur ces matières de gouvernement et d’institutions.

1577. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de La Tour-Franqueville et Jean-Jacques Rousseau. » pp. 63-84

Un jour qu’il s’était vu trop harcelé et chicané par les deux amies sur la rareté et la brièveté de ses réponses, Rousseau, poussé à bout, écrivit la lettre suivante à Mme de La Tour : À Montmorency, le 11 janvier 1762.

1578. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) «  Mémoires et correspondance de Mme d’Épinay .  » pp. 187-207

C’est un homme de trente ans, raisonnable, que je voudrais ; un homme en état de vous conseiller, de vous conduire, et qui prit assez de tendresse pour vous pour n’être occupé qu’à vous rendre heureuse. » — « Oui, lui répondis-je, cela serait charmant ; mais où trouve-t-on un homme d’esprit, aimable, enfin tel que vous venez de le dépeindre, qui se sacrifie pour vous et se contente d’être votre ami, sans pousser ses prétentions jusqu’à vouloir être votre amant ? 

1579. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

Cet art ne fut jamais mieux connu ni pratiqué que dans le xviiie  siècle, au sein de cette société régulière et pacifique, et personne ne le poussa plus avant, ne le conçut plus en grand, et ne l’appliqua avec plus de perfection et de fini dans le détail que Mme Geoffrin.

1580. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Je ne pousserai pas plus loin la citation de ce portrait des plus frappants, et qui est d’original.

1581. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

Il le prônait partout ; il lut de ses vers à la reine ; il le poussa auprès de M. de Calonne.

1582. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame de Motteville. » pp. 168-188

On voit que c’eût été une royaliste assez libérale que Mme de Motteville ; mais cette femme d’esprit et de sens, qui assiste à ces scènes terribles, et qui les raconte, n’est pas dupe des grands mots, ni des apparences ; elle y mêle de ces remarques qui honorent l’historien, et que les politiques ne désavoueraient pas : « Quand les sujets se révoltent, dit-elle, ils y sont poussés par des causes qu’ils ignorent, et, pour l’ordinaire, ce qu’ils demandent n’est pas ce qu’il faut pour les apaiser. » Elle nous montre ces magistrats mêmes, qui avaient été les premiers à émouvoir le peuple, s’étonnant bientôt de le voir se retourner contre eux et ne les pas respecter : « Ils se reconnaissaient la cause de ces désordres, et n’y auraient pu remédier s’ils avaient voulu l’entreprendre ; car, quand le peuple se mêle d’ordonner, il n’y a plus de maître, et chacun en son particulier le veut être. » Rentrons un peu en nous-mêmes, et demandons-nous si ce n’est pas là encore notre histoire.

1583. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) «  Mémoires de Gourville .  » pp. 359-379

Ce Figaro, qui mérite un nom plus sérieux, parce que, sans viser à la dignité, il s’abstient toujours de la déclamation et qu’il ne pousse pas son rôle à l’extrême, a très bien jugé en quelques mots ce prince de Conti qui le raillait.

1584. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

Marmont envoie le colonel Fabvier pour dire au roi Joseph que, si les choses ne vont pas plus mal sur le reste de la ligne, rien ne presse encore ; il avait l’espérance de pousser la défense jusqu’à la nuit.

1585. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — II. (Suite et fin.) » pp. 341-361

Courier, et dont l’un était déjà mort au moment de ce second procès ; il les accusait de l’avoir poussé à l’acte, de l’y avoir conduit et d’avoir fait de lui leur instrument, eux présents sur les lieux et lui forçant la main ; il prétendait prouver qu’ils avaient à cette mort plus d’intérêt que lui.

1586. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Michaud, de l’Académie française. » pp. 20-40

Bien qu’il se prononce dans un sens plutôt favorable aux croisés et à l’inspiration religieuse qui les a poussés, l’auteur ne dissimule rien des désordres ni des brigandages ; il reste tout philosophique dans son mode d’examen et d’explication.

1587. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — I. » pp. 41-62

Au milieu des hardiesses et des irrévérences des Lettres persanes, un esprit de prudence se laisse entrevoir par la plume d’Usbek ; en agitant si bien les questions et en les perçant quelquefois à jour, Usbek (et c’est une contradiction peut-être à laquelle n’a pas échappé Montesquieu) veut continuer de rester fidèle aux lois de son pays, de sa religion : « Il est vrai, dit-il, que, par une bizarrerie qui vient plutôt de la nature que de l’esprit des hommes, il est quelquefois nécessaire de changer certaines lois : mais le cas est rare ; et, lorsqu’il arrive, il n’y faut toucher que d’une main tremblante. » Rica lui-même, l’homme badin et léger, remarquant que dans les tribunaux de justice, pour rendre la sentence, on prend les voix à la majeure (à la majorité), ajoute par manière d’épigramme : « Mais on dit qu’on a reconnu par expérience qu’il vaudrait mieux les recueillir à la mineure : et cela est assez naturel, car il y a très peu d’esprits justes, et tout le monde convient qu’il y en a une infinité de faux. » C’est assez pour montrer que cet esprit qui a dicté les Lettres persanes ne poussera jamais les choses à l’extrémité du côté des réformes et des révolutions populaires.

1588. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Ce n’est pas mal qu’un législateur pousse les hommes, fût-ce même moyennant un peu d’illusion, à toutes leurs facultés et à toute leur vertu ; mais il doit savoir au-dedans à quelles conditions cela est possible et prendre ses précautions en conséquence.

1589. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — I. » pp. 287-307

. — Sans cette campagne, ajoute-t-il, je n’aurais jamais eu idée jusqu’où peut être poussé l’excès de la misère et de l’injustice des hommes.

1590. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre sixième. Genèse et action des idées de réalité en soi, d’absolu, d’infini et de perfection »

L’opposition de ce qui existe en soi et de ce qui n’existe que pour nous est encore due à la conscience, car c’est simplement l’opposition du sujet et de l’objet, par exemple de vous et de moi, de vous qui poussez mon bras dans une direction et de moi qui résiste à votre effort ; c’est la distinction du moi et du non-moi.

1591. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre quatrième. L’expression de la vie individuelle et sociale dans l’art. »

Poussés par la soif de la science, huit observateurs infatigables se réunissent à deux heures de la nuit sur la glace et discutent longtemps si la température de la mer doit être notée avec — 1, 4 ou — 1, 35° c.

1592. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse esthétique »

Cela est si vrai que, depuis l’origine même de l’art, les écrivains, les musiciens et les peintres n’ont jamais hésité à présenter dans leurs œuvres les spectacles les plus pathétiques, à user des modulations les plus plaintives ; les genres les plus élevés dans l’estime publique sont les genres tragiques ; les plus grandes œuvres que l’art humain a produites, sont des œuvres montrant des images tristes et développant des idées lugubres qui restent grandioses, saisissantes, charmantes et ne font jamais à quelque point qu’on les pousse, de peine nocive, de vrai mal, de mal dont on veuille se défendre6.

1593. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

Ce que sa notion des hommes et des choses avait de menu, de nuancé, d’épais, de peu concluant, de peu poussé, le laissait comme en une sorte d’admiration rêveuse pour un spectacle qui lui apparaissait étrangement varié, singulier, multiple surtout et compliqué ; une douce sympathie lui venait pour les êtres qu’il avait connus intimement et confusément comme penché sur eux de trop près, l’intelligence de leurs erreurs, la tristesse de leurs fautes, l’étonnement navré de les apercevoir eux si intensément vivants et complexes, bornés, faibles, isolés, perdus et passagers en ce vaste monde dont le romancier ne parvenait à comprendre ni l’arrangement ni le but, ni l’infinie petitesse.

1594. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Émile Zola » pp. 70-104

Gervaise raisonnable et fraîche, au début de l’Asommoir, est aimable ; Mme Hédouin illumine de sa beauté de femme de tête l’ignoble bourgeoisie de Pot-Bouille ;  Denise pousse à bout la raison vertueuse ; et l’héroïne de la Joie de vivre est de même une fille sensée, forte et savante.

1595. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre II : Rapports de l’histoire de la philosophie avec la philosophie même »

Le système est le ferment de la philosophie : c’est lui qui pousse, qui excite à la découverte, et il est lui-même un résultat nécessaire des découvertes déjà faites.

1596. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Doyen » pp. 178-191

De là, des figures poussées trop en devant seront trop grandes, et d’autres repoussées trop en arrière seront trop petites ; ou, plus communément, toutes s’entassant les unes sur les autres, plus d’étendue, plus d’air, plus de champ, nulle profondeur, confusion d’objets découpés et artistement collés les uns sur les autres, vingt scènes diverses se passant comme entre deux planches, entre deux boiseries qui ne seront séparées que de l’épaisseur de la toile et de la bordure.

1597. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

Or l’activité du cœur et l’ardeur de la foi poussent au prosélytisme ; et c’est ce prosélytisme embrasé d’une croyante qui voudrait partager le pain de sa vérité avec l’univers, qu’on respire dans ce petit livre, offert aux imaginations désoccupées dans un but que l’auteur est trop habile pour ne pas cacher !

1598. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rivarol » pp. 245-272

Je viens de lire ces pages concentrées, calmes et profondes, où l’éloquence toujours un peu tribunitienne du journaliste ne s’est pas montrée une seule fois, où l’homme de parti n’a pas poussé une seule fois de ces cris familiers aux partis.

1599. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ernest Hello » pp. 207-235

Un ongle de plus n’a pas poussé aux quatre griffes de ce lion.

1600. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — L’inter-nationalisme »

Aussi n’ai-je tenté, dans les pages qui précèdent, qu’un vague relevé de ce terrain fécond et presque vierge, où d’autres que moi pousseront des reconnaissances de plus en plus hardies, afin d’y ouvrir un jour de larges avenues pour la traversée commune.

1601. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Mais il croit devoir y pousser fortement le cri « Léonidas !  […] L’idée du nouveau pouvoir spirituel nécessaire à l’humanité dans la vie nouvelle où la Révolution la pousse, voilà la création propre de Saint-Simon, transmise par lui à Auguste Comte et Renan. […] Comme l’Empire de 1811, la poésie du Lamartine de 1847 et 1848 pousse une transgression politique démesurée, qui appelle inévitablement la réaction.

1602. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

D’autres pousseront la porte close, et survivront à titres divers : Haraucourt qui donne en 83, sa Légende des sexes que regrettera son extrême assagissement ! […] Et elle laisse aux œuvres, c’est-à-dire au Moi des plus, divers tempéraments, le soin de la pousser selon qu’elles le pourront, sans limites. […] Si j’étais de vous, je pousserais cela, dans le prochain effort, jusqu’à la pensée et au chant, sauf à reprendre mais alors maîtrisé votre jeu complexe et en effet symphonique. […] Mais, avec sa science prosodique très avertie, Gustave Kahn poussait à l’extrême, et en poète suavement mélodique, les recherches de Becq de Fouquières53 en ce sens. […] Il a été à l’extrême dans le sens de toute une partie de la Poésie, il a poussé aux limites dernières la préoccupation irrésistible du grand nombre : la préoccupation de « Forme « — dont relève avant tout le « Symbolisme ».

1603. (1939) Réflexions sur la critique (2e éd.) pp. 7-263

L’édition Conard nous apporte une masse précieuse de documents sur la terre riche et lyrique où poussa l’art strict et discipliné de Flaubert. […] Victor Bérard nous a révélé la véracité locale, la salure marine, et de l’Enéide, que Virgile ne voulait pas récrire définitivement sans avoir fait ce voyage de Grèce (et sans doute il aurait poussé jusqu’à Troie), d’où il revint à Brindes épuisé et mourant. […] C’est pousser à son extrême logique la Course du Flambeau, et M.  […] Elle implique de grands partis pris, des caractères vigoureusement poussés en avant, pleins de puissance, de substance et de suc. […] Marrh, qui est de 1839, est un informe champignon poussé au pied de Faust, mais aussi une première ébauche de la Tentation de saint Antoine.

1604. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Or on commence ordinairement par se faire des amis pour être poussé et soutenu. […] Il ose pousser les cris les plus aigus, prendre un cor comme Vivier et y sonner les choses les plus extravagantes : donc il est le plus fort, le plus entouré ; il ne peut pas en être autrement. […] Poussés par une sorte d’opinion publique qui a besoin de se manifester, nous voilà les uns à lui enlever son manteau politique, les autres à lui ôter sa couronne de poète, et à lui faire expier trente ans de gloire… Après tout, s’il a eu trente années de gloire parce qu’il l’a enlevée par surprise, que peut-il demander de plus ? […] On n’a parodié ni Musset, ni Lamartine, et je crains qu’un enfant de douze ans ne puisse calquer les vers d’Hugo comme avec un crayon, sur des idées analogues à celles-ci : « L’araignée Réalité dévore la mouche Idéal. — L’horreur, bagne de l’âme, antre insondable et formidable d’où s’échappent des cris surhumains poussés par les voix monstrueuses des sombres angoisses invisibles […] Alors a été poussé ce grand cri : la vie est laide, la nature est laide, la réalité est laide !

1605. (1905) Promenades philosophiques. Première série

L’autre idéalisme, qu’on aurait mieux fait d’appeler idéisme, et que Nietzsche a poussé jusqu’au phénoménalisme, est une conception philosophique du monde. […] Il est inutile de pousser la discussion plus loin. […] On le laisse pousser ; on ne le cultive plus, son utilité diminuant de jour en jour, en présence de la houille et du fer. […] L’instruction, cela est douloureusement visible dans la vie, n’est pas autre chose qu’un engrais ; c’est de l’azote ou do phosphate de chaux ; cela fait pousser la plante, mais ne change pas sa nature. […] Ses hardiesses et ses intempérances se poussent toujours dans le sens de la beauté linguistique.

1606. (1896) Les Jeunes, études et portraits

Ils s’enquièrent des littératures étrangères ; ils ont raison et pour notre part nous n’avons cessé de les y pousser. […] Gundry n’écoute que son instinct… Cette prairie où rien ne pousse qui soit de culture humaine, c’est la table rase des philosophes. […] Ils ont poussé les choses à bout. […] Qui oserait dire qu’il n’a jamais poussé cette exclamation de dépit ou de colère : « Ah ! […] Jean de Scordio forme ce souhait : « Puisse cet enfant être aussi bon que le pain qu’on fera avec le blé qui poussera dans ce sillon ! 

1607. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Contre les longues angoisses des prisons infectes, contre tout ce qui peut énerver ou séduire, ils étaient invincibles : cinq moururent de faim à Cantorbéry : ils étaient aux fers nuit et jour, sans autre couverture que leurs habits, sur de la paille pourrie ; cependant des traités couraient parmi eux, disant « que la croix de la persécution » était un bienfait de Dieu, « un joyau inestimable, un contre-poison souverain, éprouvé, pour remédier à l’amour de soi et à la sensualité mondaine. » Devant de tels exemples, le peuple s’ébranlait. « Il n’y a pas d’enfant, écrivait une dame à l’évêque Bonner, qui ne vous appelle Bonner la bourreau, et ne sache sur ses doigts, comme son Pater, le nombre exact de ceux que vous avez brûlés au bûcher ou fait mourir de faim en prison pendant ces neuf mois… Vous avez perdu les cœurs de vingt mille personnes qui étaient des papistes invétérés il y a un an. » Les assistants encourageaient les martyrs, et leur criaient que leur cause était juste. « On dit même, écrivait l’envoyé catholique, que plusieurs se sont voulu volontairement mettre sur le bûcher à côté de ceux que l’on brûlait362. » En vain la reine avait défendu, sous peine de mort, toutes les marques d’approbation. « Nous savons qu’ils sont les hommes de Dieu, criait l’un des assistants, c’est pourquoi nous ne pouvons nous empêcher de dire : Que Dieu les fortifie. » Et tout le peuple répondait : « Amen, amen. » Rien d’étonnant si, à l’avénement d’Élisabeth, l’Angleterre entra à pleines voiles dans le protestantisme ; les menaces de l’Armada l’y poussèrent plus avant encore, et la Réforme devint nationale sous la pression de l’hostilité étrangère, comme elle était devenue populaire par l’ascendant de ses martyrs. […] Ils peuvent résister dorénavant, et, poussés à bout, ils résistent ; ils aiment mieux prendre les armes que de se laisser acculer à l’idolâtrie et au péché. […] Cependant les autres, fugitifs en Amérique, poussent jusqu’au bout ce grand esprit religieux et stoïque, avec ses faiblesses et ses forces, avec ses vices et ses vertus. […] Un pamphlet du temps demande la liberté de conscience, et tire ses arguments : « 1º De la parabole du blé et de l’ivraie qui poussent ensemble jusqu’à la moisson ; 2º de cette prescription des apôtres : Que chaque homme soit persuadé dans son propre entendement ; 3º de ce texte : Partout où manque la foi est le péché ; 4º de cette règle divine de notre Sauveur : Faites à autrui ce que vous voudriez qu’on vous fît à vous-mêmes408. » Plus tard, quand la Chambre en fureur veut juger James Naylor, le procès s’enfonce dans une interminable discussion juridique et théologique, les uns prétendant que le crime commis est une idolâtrie, d’autres qu’il est une séduction, chacun vidant devant l’assemblée son arsenal de commentaires et de textes409.

1608. (1778) De la littérature et des littérateurs suivi d’un Nouvel examen sur la tragédie françoise pp. -158

Jamais le mépris des bienséances n’a été poussé si loin, & la critique est devenue si dure, si pédantesque, qu’elle a manqué l’effet qu’elle se proposoit. […] Cette sorte de dispute a des charmes inconnus à ces esprits atrabilaires, qui ne veulent que contredire, rabaisser autrui, & qui poussent la tyrannie jusqu’à vouloir ôter à un homme ses propres idées ; tyrannie plus commune qu’on ne l’imagine, mais qui du moins ne devroit pas être le partage de ceux qui savent que les plus importantes découvertes & les innovations les plus heureuses ont été, dès leur abord, également combattues & rejetées. […] Dès qu’un peuple est arrivé au point d’avoir goûté les Sciences & les Arts, il faut qu’il les pousse au plus haut degré de perfection, s’il ne veut pas augmenter ses maux. […] On peut être insurgent en Littérature à son gré & pousser la licence, jusqu’à se rendre criminel de lèse-majesté Racinienne ; car si l’on n’est pas libre au sein de la République des Lettres, où le sera-t-on ?

1609. (1893) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Première série

L’intérêt général de l’homme à connaître la vérité ennoblit la recherche du savant, dont la personnalité chétive disparaît ; mais l’instinct qui pousse l’artiste à produire, est-ce autre chose, au fond, que sa propre volupté et l’intérêt de sa gloire ? […] Les meilleurs professeurs de littérature ne sont, en général, que d’honnêtes serviteurs du ministère de l’instruction publique, plus dévoués à leur fonction et à leurs élèves que réellement curieux des choses qu’ils enseignent, ayant été poussés vers ce gagne-pain tantôt par la pression des circonstances, tantôt par l’entraînement de l’exemple et de la routine, ne concevant même pas la possibilité de sortir du chemin battu de la tradition et de professer une doctrine un peu différente de celle qu’ils ont apprise au lycée. […] Lamartine, au contraire, grand poète d’occasion et d’inspiration, a été un beau jour improvisé par les circonstances grand citoyen et grand orateur ; comme ici la nature était supérieure à l’art, l’homme a pu sans effort atteindre plusieurs cimes ; il a dépensé les riches dons du ciel avec une prodigalité et une insouciance magnifiques ; et la gloire de l’action, de l’éloquence et du courage s’est aisément trouvée chez lui, — l’esprit de Dieu l’ayant poussé là par hasard, — égale à celle de la poésie. […] Car, si la multiplicité des aptitudes natives est une belle chose, il est beau aussi qu’un démon exclusif et jaloux pousse irrésistiblement le génie dans la voie unique où sa supériorité doit triompher, et là où nous ne sentons point cette pression tyrannique du dieu, nous appréhendons qu’une honnête médiocrité générale ne remplace l’éclat glorieux d’un don prééminent et extraordinaire. […] Aussi bien que les génies instinctifs, qui, sous le souffle divin qui les pousse, ressemblent aux forces déchaînées de la nature, les artistes les plus maîtres d’eux-mêmes ont leurs moments d’inspiration, et quelques-uns ont appliqué leurs rares facultés d’analyse à l’étude de ce phénomène, dont le caractère essentiel est l’inconscience.

1610. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome III pp. 5-336

L’examen de Virgile eût commandé des sacrifices moins coûteux à notre pudeur : pour peu qu’un instinct de flatterie nous eût poussés, notre rhétorique se serait aisément promenée dans la grandeur du magnifique monument que bâtit l’Amphion latin au prescripteur Octave : encore n’eussions-nous pas eu la licence de remarquer qu’il n’immortalisa dans cet usurpateur que l’Auguste qui ferma pacifiquement le temple de Janus, dont nous avons trop largement rouvert les portes. […] « Junon pousse les Grecs, Apollon défend Troie ; « En des fleuves de sang la Discorde se noie ; « Sur un char fond Ajax terrible, menaçant, « Le plus grand des guerriers, lorsqu’Achille est absent ; « Mars combat et rugit ; le vaillant Diomède « Blesse Énée, et Vénus, accourue à son aide. […] pénètre en son asile « Ce bruit, signal affreux de ses promptes douleurs, « Fait rugir l’amitié de ce lion en pleurs ; « Son sein ne nourrit plus une vengeance oisive ; « Et tandis que sa mère, à sa valeur captive, « Prépare un bouclier brillant d’or et d’airain, « Prodige étincelant du ciseau de Vulcain, « Achille, si longtemps retiré du carnage, « Pousse vers les Troyens, frappés de son visage, « Un triple cri, vainqueur de mille combattants, « Et qui jette la fuite et la mort dans leurs rangs. […] Puisée dans la plus antique des traditions, elle répand son intérêt sur l’universalité des hommes : la curiosité qui les pousse à sonder le passé le plus reculé n’est pas moins pressante en eux que le besoin inquiet de pénétrer un avenir infini : depuis que la race humaine respire, elle chercha toujours à marquer son époque originelle dans l’éternité ; et la mesure des temps limités que nous parcourons nous incite à remonter sans cesse vers un instant précis de notre formation. […] Qui de vous ne se souvient des plaintes que pousse l’âme de la belle Clorinde, au moment où le haut cyprès qui la couvre, blessé par l’épée de Tancrède, verse des flots de sang aux pieds du héros, et l’accuse de donner une seconde mort à sa maîtresse, dont il frémit d’entendre la voix sortir d’une écorce entrouverte ?

1611. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Une période de transition est une période où la pensée littéraire se cherche elle-même, s’essaye, et marche vers un but qu’elle ignore : ce qui suppose que tantôt elle hésite, tantôt pousse des pointes audacieuses vers l’avenir, tantôt rebrousse. […] On trouve dans ce volume des phrases comme celles-ci : « Ce juste sentiment de moi-même, cette proportion exacte entre mes facultés et mes ambitions me poussaient donc invinciblement vers la politique, où je pouvais en déployer une plus grande dose » ; ou comme celle-ci : « Tous les hommes politiques qui avaient appartenu au gouvernement du duc de Richelieu étaient fidèles à ce salon et cultivaient avec désintéressement sa sœur. » — Et à côté on rencontre des lignes comme celles que je vous citais à propos de Thiers, ou comme celles-ci, sur Talleyrand : « Partout où j’ai eu à en parler ou à en écrire, je l’ai fait avec indulgence, admiration et respect. […] Une passion énorme, dominatrice, tyrannique, qui envahit tout l’homme, qui, en lui, asservit à elle-même toutes les forces de l’être humain, les fait servir à ses desseins, et pousse l’être qu’elle chevauche ainsi et qu’elle éperonne, à travers toutes les aventures et tous les précipices et jusqu’à la folie ou à la mort : voilà, très souvent, voilà presque toujours, pour Balzac, un caractère. […] À la vérité, il la poussait loin. […] Pendant ces quarante années, il a écrit une quarantaine de volumes, ce qui a fait pousser des cris d’admiration à ses thuriféraires et ce qui n’est qu’une production normale, beaucoup moins intense que celle de Voltaire, de Corneille, de Victor Hugo, de Guizot, de George Sand ou de Thiers.

1612. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Ébloui, Jasmin regarda les spirales opalines que le vent poussait contre les buissons34. […] Ceux de Rœk et ceux de Botsem naissaient, ayant l’inimitié dans toutes les veines ; c’était le plus sûr héritage des parents39. » Cette rivalité développe chez les uns et les autres des sentiments détestables, excite tous leurs sens, les pousse au meurtre : de là, le lugubre et le tragique du livre. […] Il lui semble à chaque cri qu’elle pousse, que non sa voix seule, mais toute elle-même, parcourt et couvre au galop la place autour d’elle. […] En face, placez ces autres « Conquérants » dédiés à Camille Lemonnier : Ta gloire évoque en moi ces navires houleux Que de fiers conquérants aux gestes magnétiques Poussaient, dans l’infini des vierges Atlantiques, Vers les archipels d’or des lointains fabuleux. […] Mais Verhaeren n’aurait sans doute jamais créé des chefs-d’œuvre tels que Le Paradis, Hercule, Les Barbares, Michel-Ange, Le Maître, s’il n’avait laissé jadis caracoler furieusement Pégase ; aux poussées chaotiques d’antan, il doit de libérer son alexandrin des banalités et des fadeurs.

1613. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — I. » pp. 88-109

L’impitoyable Faculté poussa la rigueur au sein du triomphe, et voyant son ennemi à bas, jusqu’à ne point pardonner à ses deux fils et à leur refuser le bonnet, « après lequel ils attendent depuis quatre ans, dit Gui Patin, et attendront encore ».

1614. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — II. (Fin.) » pp. 109-130

Il ne se trompe certainement pas lorsqu’il montre les grands, les nobles, le haut clergé, les femmes à la mode, ceux qu’on appellera aristocrates quelques mois plus tard, commencer par être les vrais démocrates, désirer un changement dans le gouvernement, y pousser à l’aveugle pour se procurer chacun plus de crédit dans sa sphère, se comporter en un mot comme des enfants qui, en maniant des armes à feu, se blessent et blessent les autres : « Ces aristocrates, dit-il, sont les véritables auteurs de la Révolution ; ils ont enflammé les esprits dans la capitale et les provinces par leur exemple et leurs discours, et n’ont pu ensuite arrêter ou ralentir le mouvement qu’ils avaient excité. » La bourgeoisie française a fait depuis, et sous nos yeux, ce que l’aristocratie avait fait alors ; ç’a été la même répétition, et selon le même esprit, à un autre étage.

1615. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — I. » pp. 235-256

Ce qu’il faut lui demander en attendant, avant de pousser plus loin le récit de sa vie et pour nous bien persuader qu’il mérite l’examen et l’attention de tous, ce sont les pensées du cœur, les mouvements puisés dans la sublime logique de l’amour ; car c’est à quoi il était le plus sensible et le plus propre : J’ai été attendri un jour jusqu’aux larmes, dit-il, à ces paroles d’un prédicateur : « Comment Dieu ne serait-il pas absent de nos prières, puisque nous n’y sommes pas présents nous-mêmes ? 

1616. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

Garat avait l’air de souhaiter que je me fisse connaître davantage et que j’entrasse plus amplement en matière, mais je ne m’y sentis nullement poussé, et je me contentai d’avoir lancé mon trait… Ce n’était qu’une première escarmouche.

1617. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — II » pp. 454-475

Dans une trentaine de pages qui seraient aussi bien un fragment de mémoires historiques, il montre comment cette Révolution est née sans qu’on le voulût, et avec quel zèle imprudent on y poussait dans les hautes sphères qui devaient le plus terriblement s’en ressentir.

1618. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) «  Essais, lettres et pensées de Mme  de Tracy  » pp. 189-209

Toutes ces formes bizarres viennent de ce que ces pauvres arbres sont torturés dans leur jeunesse pour servir de clôture, et alors ils poussent comme ils peuvent et se tortillent dans tous les sens.

1619. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Benjamin Constant. Son cours de politique constitutionnelle, ou collection de ses divers écrits et brochures avec une introduction et des notes, par M. Laboulaye »

Les républicains n’ont pas pris le change : si quelques droits précieux ont été passagèrement suspendus, si quelques formes ont été violées, si quelques parties de la liberté ont été froissées, nous en accusons le royalisme ; c’est lui qui nous a poussés dans ces défilés où le danger semblait motiver l’oubli momentané de la loi.

1620. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

Il poussait même la conséquence logique de son idée du beau et de l’agréable jusqu’à ne pas aimer les lunettes à demeure sur le nez de quelqu’un, et rien ne lui déplaisait plus chez un visiteur que cette machine anguleuse et bizarre braquée et faisant obstacle entre le miroir de l’âme et lui.

1621. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. (suite et fin) »

Cette doctrine particulière, qu’il étudia et analysa avec une fermeté ingénieuse, ne fut jamais chez lui que secondaire et subordonnée à des principes religieux et moraux supérieurs ; il ne poussa jamais l’examen à ses dernières limites, et les aventures, les constructions de système de ceux qui affectaient en toute occasion de se proclamer ses disciples, par un sentiment de reconnaissance et de déférence sans doute, mais aussi pour se couvrir au besoin de lui, lui restèrent choses extérieures et presque étrangères.

1622. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Or, pour cela, quoi de mieux, en présence d’un tableau vivant, intéressant, animé, où tout parle, se comprend, où là foule s’arrête, et qui est signé d’un nom célèbre, que de hocher la tête, de pousser un profond soupir ou de hausser les épaulés de pitié ?

1623. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

Une très belle épigramme de Léonidas, et qui tranche par le ton avec les précédentes, est celle qu’il fit pour un certain Phidon qui s’était donné la mort à lui-même, et qui paraît y avoir été poussé par pur dégoût de la vie, par une sorte de mélancolie méditative et philosophique : « Infini, ô Homme, était le temps avant que tu vinsses au rivage de l’Aurore ; infini aussi sera le temps après que tu auras disparu dans l’Érèbe.

1624. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid (suite.) »

Mais je ne crois pas qu’il faille pousser plus loin cette vue ni en faire rien de systématique, comme on l’a essayé de nos jours.

1625. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

Et puis la légende tend sans cesse à pousser dans ces émouvants récits comme une herbe folle : il faut, à tout moment, l’en arracher.

1626. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.) »

Catinat, en apprenant la perte soudaine de l’homme qui l’avait toujours apprécié, poussé, protégé et aimé jusque dans les rudesses et brusqueries qu’il ne ménageait à personne, écrivait à Barbezieux, son fils et son successeur (20 juillet) : « Je suis dans une situation où je me fais de grandes violences pour ne me point laisser aller à la vive douleur que je ressens de la grande perte que vient de faire le roi, l’État, et moi de mon protecteur, dont l’affection m’a toujours cent fois plus touché que tous les biens qu’il pouvait me faire. » Louvois de moins, tout changeait ; Catinat perdait un point d’appui solide et puissant ; il dut être porté à en devenir plus circonspect encore.

1627. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Joséphine de Saxe dauphine de France. (Suite et fin.) »

Un des bons effets, une des conséquences satisfaisantes de l’ouvrage du comte Vitzthum est de convaincre, indépendamment de toutes les considérations stratégiques, que le maréchal de Saxe avait sincèrement travaillé à la paix pendant tout l’hiver de 1746-1747, et qu’il ne poussait pas à la continuation de la guerre.

1628. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. » p. 232

Tout ce que je sais d’un Virgile compréhensible pour moi, c’est que le nôtre ou celui de la Bretagne voyage dans le Midi, sous le nom de Brizeux, dont la santé et le silence commencent à m’inquiéter, à moins que tu n’en aies reçu quelque lettre. » Ce diminutif de Virgile, Brizeux, qui n’avait rencontré à temps ni Auguste ni Mécène, ni leur diminutif, ne touchait guère Paris qu’en passant ; il se sauvait bien vite, pendant des mois et des saisons, tantôt dans sa Bretagne, tantôt à Florence ; il craignait d’écrire et poussait l’horreur de la prose jusqu’à ne se servir le plus souvent que d’un crayon pour tracer des caractères aussi peu marqués que possible.

1629. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

La théologie cessa de tout comprendre et de plonger dans le sol immense qui la nourrissait : elle se dessécha peu à peu, et ne poussa plus que des ronces.

1630. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

Et c’est ce qui suffit après tout, un roman ne devant jamais être un livre d’oraison, une règle de conduite, mais une inspiration passagère qui mérite indulgence et faveur si elle est relativement bonne à quelques-uns et les pousse même vaguement au bien.

1631. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

On l’a peu affiché, on l’a peu vanté dans les journaux ; aucun des grands moyens en usage n’a été employé pour pousser à un succès ; eh bien, du 14 décembre dernier au 19 avril, c’est-à-dire en quatre mois (et quels mois de disette, de détresse, on le sait, pour la librairie !)

1632. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

Je ne pousserai pas plus loin les détails de son odyssée, dont on vient de toucher le point le plus extrême, mais qui fut continuelle jusqu’à son dernier soupir.

1633. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIe Entretien. Chateaubriand »

Fontanes, l’homme aux habiles pressentiments, pouvait deviner ces choses et n’en pas moins pousser sa pointe : il avait ses éperons à gagner, a-t-on dit, contre la nouvelle Clorinde ; et d’ailleurs, sans chercher tant d’explications, il suivait son instinct de critique en même temps que d’homme du monde, très-décidé à n’aimer les femmes que quand elles étaient moins viriles que cela.

1634. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Ce futur janséniste poussait le zèle de secte et de famille jusqu’à appeler dans sa correspondance Fénelon : « cette bête féroce ! 

1635. (1892) Boileau « Chapitre II. La poésie de Boileau » pp. 44-72

Voici maintenant trois vers, où non les rimes seules, mais tous les mots, sont choisis pour la qualité expressive de leur son : Sous les coups redoublés tous les bancs retentissent ; Les murs en sont émus ; les voûtes en mugissent ; Et l’orgue même en pousse un long gémissement.

1636. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre I. Roman de Renart et Fabliaux »

C’est la faim, je le sais, la gloutonnerie qui les poussent hors de chez eux : il y a pourtant aussi, au moins chez quelques-uns, chez Renart, chez Ysengrin, chez Tibert, une inquiétude d’humeur, un besoin de courir fortune, de chercher le péril, qui est en quelque façon une transposition de l’idéal chevaleresque.

1637. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Il a tâtonné d’abord, s’étant formé dans un temps où nul ne songeait à diriger l’œuvre dramatique vers cette fin : il a poussé sa fantaisie dans tous les sens : vers l’extravagance galante avec Mélite, vers l’imbroglio romanesque avec Clitandre, vers la rhétorique raffinée avec Médée, vers la bouffonnerie copieuse avec l’Illusion comique.

1638. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre II. Boileau Despréaux »

Le tempérament de Boileau — les satires pittoresques en donnent la preuve — le poussait à répondre : toute nature est objet de l’imitation artistique ; et l’imitation n’a pas d’autre limite que l’identité avec l’objet.

1639. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre V. Le roman »

Car toutes les branches de la famille des Rougon-Macquart poussent de tous côtés, à toutes hauteurs, et la série ne me donne pas même cette impression générale que produit la Comédie humaine de Balzac : les récits divergents ne concourent pas à former en moi l’idée d’un vaste ensemble social, où les diverses parties se tiennent et se raccordent.

1640. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Il s’efforça, avec quelques autres jeunes gens, de pousser plus loin qu’on ne l’avait fait encore l’art de combiner exactement de beaux mots qui suscitent de belles images.

1641. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

Elle n’a rien de la dignité et de la noblesse avec laquelle se justifie la Lucile de Molière40 ; mais dans la pièce italienne, le comique de la situation est poussé beaucoup plus loin et jusqu’à l’extrême.

1642. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre III. La notion d’espace. »

Le plus souvent ils commencent par définir les surfaces comme les limites des volumes, ou parties de l’espace, les lignes comme les limites des surfaces, les points comme limites des lignes, et ils affirment que le même processus ne peut être poussé plus loin.

1643. (1900) Poètes d’aujourd’hui et poésie de demain (Mercure de France) pp. 321-350

Ce style de décadence est le dernier mot du Verbe, sommé de tout exprimer et poussé à l’extrême outrance.

1644. (1887) Discours et conférences « Rapport sur les prix de vertu lu dans la séance publique annuelle de l’Académie française »

« Ils m’avaient ennuyé, dit-il, je les ai poussés et je les ai regardés se débattre. » Un an après, ce petit misérable sauvait trois personnes en danger ; c’est maintenant un excellent soldat.

1645. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

Chose remarquable et qui s’explique par ce fait que les mœurs sont toujours en avance sur les lois et souvent la littérature sur les mœurs, tant que le mariage apparaît comme une chaîne rivant l’un à l’autre pour la vie deux malheureux, victimes d’une illusion plus ou moins courte, la plupart des romanciers et des dramaturges plaignent ou même poussent à la révolte les couples prisonniers.

1646. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IV, Eschyle. »

La pluie qui tombe du Ciel générateur féconde la Terre ; alors elle enfante, pour les mortels, la pâture des bestiaux et le grain de Déméter. » — Ailleurs, il pousse ce cri qui dissout l’Olympien sculpté par Phidias, et disperse dans l’infini son corps et son âme, sa foudre et son sceptre, sa barbe pluvieuse et sa chevelure rayonnante ; « Zeus est l’air, Zeus est le ciel, Zeus est la terre, Zeus est tout ce qu’il peut y avoir au-dessus de tout. » Dans un Chœur de l’Orestie, le Dieu qu’on invoque semble invité à choisir lui-même son nom, dont le poète n’est pas sûr. — « Zeus !

1647. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE XIV »

Ce système, apparent déjà dans ses Idées de madame Aubray, contenu dans sa Princesse Georges, affirmé par ses brochures et par ses préfaces, poussé à l’excès dans la Femme de Claude, consiste à faire d’une pièce une prédication d’idées vraies ou fausses, usurpant la place de l’action, et dressant une chaire par-dessus la scène.

1648. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Goethe et de Bettina, traduites de l’allemand par Sébastien Albin. (2 vol. in-8º — 1843.) » pp. 330-352

Restée Italienne par son imagination, qui était colorée, pittoresque et lumineuse, elle y combinait la rêverie et l’exaltation allemande, qu’elle semblait pousser par moments jusqu’à l’hallucination et l’illuminisme : « Il y a en moi, disait-elle, un démon qui s’oppose à tout ce qui veut faire de la réalité. » La poésie était son monde naturel.

1649. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Gil Blas, par Lesage. (Collection Lefèvre.) » pp. 353-375

Il passe tour à tour par toutes les conditions, par les plus vulgaires et les plus basses : il ne se déplaît trop dans aucune, bien qu’il cherche toujours à se pousser et à s’avancer.

1650. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « L’abbé Galiani. » pp. 421-442

Il s’applique aussi à des ouvrages nouveaux ; il pousse plus loin son étude sur Horace, qu’il avait déjà commenté avec un goût rare, aiguisé de paradoxe ; il pense à tirer de son poète favori toute une philosophie morale.

1651. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Car, pour revenir encore une fois à la conclusion de Quintilien interprété à la moderne par Gédoyn, facilité, discrétion, finesse, ne pas trop appuyer, ne rien pousser à bout, ce sont là certes des conditions de l’urbanité, mais tout cela n’est rien sans un certain esprit de joie et de bonté qui anime l’ensemble : « c’est proprement un charme », a dit La Fontaine.

1652. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

Il écrivait au jour le jour, par besoin, par nécessité, s’aidant de tous les moyens à sa portée : « Il semble que ma fatale destinée soit d’être toujours obligé de tout faire en vingt-quatre heures. » Pourtant, à travers les inégalités et les obstacles, sa puissante nature intérieure suivait sa pente et poussait sa voie.

1653. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mademoiselle de Scudéry. » pp. 121-143

Une des corrections auxquelles Mlle de Scudéry poussa et contribua le plus, ce fut de mettre de l’accord entre la manière de causer et celle d’écrire.

1654. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Lambert et madame Necker. » pp. 217-239

Elle poussa jusqu’au bout la maladie de l’esprit, car elle choisit pour confesseur l’abbé Couet, qui avait beaucoup d’esprit et qui était connu pour tel. » Mme de Lambert, qui ne se séparait pas volontiers de sa raison et de sa pensée, même dans ces choses de religion, a trouvé de belles paroles à la fin de ce même Traité de la vieillesse, lorsqu’elle a dit : Enfin, les choses sont en repos, lorsqu’elles sont à leur place : la place du cœur de l’homme est le cœur de Dieu.

1655. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le comte-pacha de Bonneval. » pp. 499-522

Ce même point d’honneur, qui l’avait déjà poussé si loin, l’empêcha de revenir à résipiscence et de se prêter à une réparation, à un raccommodement avec le prince Eugène.

1656. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — I. » pp. 414-435

Aimé Martin, a rendu à sa mémoire plus d’un service ; il a complété sur quantité de points l’édition des Œuvres de celui qu’il admirait par-dessus tout : pourtant il a poussé le zèle et l’enthousiasme jusqu’à tracer de lui un portrait romanesque et une de ces biographies impossibles qui mettent tout d’abord en garde un lecteur de bon sens.

1657. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — I. » pp. 389-410

Il vint à Paris vers 1776, y poussa fortement ses études de linguistique et d’histoire, débuta par un mémoire sur la chronologie d’Hérodote, et brisa une lance contre Larcher44 ; il s’annonçait comme devant marcher sur les traces du docte Fréret.

1658. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Histoire » pp. 179-240

Mais les livres, les lettres, la bibliothèque et le cabinet noir du passé, ne seront point encore assez pour cet historien : s’il veut saisir son siècle sur le vif et le peindre tout chaud, il sera nécessaire qu’il pousse au-delà du papier imprimé ou écrit.

1659. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1881 » pp. 132-169

Et cet anéantissement heureux est mêlé d’une inquiétude nerveuse, qui vous pousse à vous en aller de chez vous, pour éloigner, d’une douzaine d’heures, l’embêtement qui peut vous tomber sur les reins.

1660. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

Sans pousser la règle à l’absolu et sans requérir le secours précaire des comparaisons, on dira plus nettement que la phrase est une suite de mots liés entre eux par un rapport logique.

1661. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Ce qui est constitutionnel dans Heine, c’est l’instabilité des sentiments et des sensations, une instabilité qui rompt la suite de ses moindres poèmes, qui le fait terminer une pièce triste par une gambade, et une épigramme par un sanglot, qui le pousse dans tous les genres, dans toutes les opinions, dans toutes les liaisons, et du salon de Rahel Lewin dans le mariage d’une grisette à peu près nulle.

1662. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre I. Shakespeare — Son génie »

L’arabesque pousse, croît, se noue, s’exfolie, se multiplie, verdit, fleurit, s’embranche à tous les rêves.

1663. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XII] »

Il poussera encore plus loin ses conquêtes, il abattra aux pieds du Sauveur la majesté des faisceaux romains en la personne d’un proconsul, et il fera trembler dans leurs tribunaux les juges devant lesquels on le cite.

1664. (1860) Ceci n’est pas un livre « Hors barrières » pp. 241-298

En vain, désormais, vous ferez courir le bruit que Paris est exclusivement habité par des cochers de fiacre pleurant le départ d’Ulysse, — et qu’on a vu des serpents à sonnettes glisser entre les herbes poussées sur le boulevard Montmartre !

1665. (1920) Action, n° 4, juillet 1920, Extraits

Nous assistons à une apothéose du cerveau, de l’intelligence qui crée et produit pousse et fructifie, d’où jaillit, incendiaire et constructeur, l’élan vital.

1666. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

M. de Maistre remarque admirablement bien que « toute religion, par la nature même des choses, pousse une mythologie qui lui ressemble ; et que la mythologie de la religion chrétienne est, par cette raison, toujours chaste, toujours utile, et souvent sublime, sans que, par un privilège particulier, il soit possible de la confondre avec la religion même ».

1667. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

À les entendre, les Romains tombent de corruption et de sanie devant les Barbares qui les poussent du pied et qui passent.

1668. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « X. M. Nettement » pp. 239-265

Il n’a pas plus l’expression qu’il n’a la réflexion, qu’il n’a la méthode, qu’il n’a quelque chose, si ce n’est de pousser devant lui sa plume d’une main qui défie la fatigue de l’alourdir.

1669. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pommier. L’Enfer, — Colifichets. Jeux de rimes. »

Retrouvant leurs chairs et leurs lombes, Les habitants des Catacombes Poussent le couvercle des tombes, Et sur leurs pieds se sont dressés !

1670. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre II. Réalité des idées égalitaires »

En nous présentant l’égalitarisme comme préhistorique, elle nous permet de penser qu’il est essentiellement naturel à l’homme, — d’attribuer à notre idéal une sorte de réalité vague à souhait, — de donner un air scientifique à nos préférences, — et enfin de satisfaire à ce vœu de symétrie qui nous pousse à voir partout, tant dans le champ du droit que dans celui de l’économie politique, des reviviscences, des ricorsi, des rééditions de l’histoire.

1671. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVIII. Des obstacles qui avaient retardé l’éloquence parmi nous ; de sa renaissance, de sa marche et de ses progrès. »

Heureusement Pascal, La Rochefoucauld et La Bruyère, poussés par leur génie et par le genre même qu’ils traitaient, prirent une route opposée et plus conforme en même temps à la langue et à la nation. 

1672. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

La nécessité le fixe au sol et un instinct le pousse vers des pays nouveaux. […] L’homme normal qui reçoit des impressions diverses, externes et internes, réagit également aux unes et aux autres ; les unes le poussent, les autres le retiennent : il se forme un équilibre. […] Une force le pousse que ne vient pas contrebalancer la force contraire : il tombe. […] Tels sont les Chinois, race positive ; ils ont poussé si loin l’art des supplices que nous avons peine à en croire les voyageurs. […] Les nuages naissent de la mer, et le vent les pousse vers les forêts, où ils font de la pluie qui gonfle les rivières.

1673. (1929) La société des grands esprits

Bergson, lui aussi philosophe de la mobilité, et contempteur de l’intelligence, poussera l’antiplatonisme à l’extrême, jusqu’à considérer les idées ou concepts comme des créations fausses et pernicieuses. […] Elles n’en sont pas moins fausses, lorsqu’on les pousse à cet excès. […] Il y a eu, surtout à la Renaissance, des esprits encore plus universels (car Pascal est étranger aux arts), mais qui n’ont pas poussé aussi loin dans tous les sens. […] Plutôt que par vastes constructions ou larges vues d’ensemble, son génie — même dans le domaine scientifique — procédait par intuitions fulgurantes et par poussées sur tel ou tel point, en profondeur. […] On peut croire que le fanatisme a poussé ces membres de la famille à noircir le grand homme dont ils rougissaient.

1674. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Jamais encore Molière n’avait recouru à ce genre de publicité pour aucune de ses comédies, et peut-être n’aurait-il pas songé à faire alors imprimer ses Précieuses, si leur succès n’eût poussé quelque spéculateur à vouloir tenter l’entreprise au mépris de ses intérêts. […] Molière tint bon, et leur fit observer que, puisqu’ils l’avaient poussé à demander cet ordre et que le Roi avait daigné le leur accorder, ils en devaient subir les conséquences. […] Grimarest prétend qu’il poussait chez lui l'ordre jusqu’à la minutie, et que le moindre retard, le moindre dérangement le faisait entrer en « convulsions », et l’empêchait de travailler pendant quinze jours. […] Ayant un jour loué une brouette pour se faire rouler au spectacle, pressé d’arriver et contrarié de la marche du conducteur, trop lent pour son impatience, il mit pied à terre et vint l’aider à pousser la voiture. […] Un soir qu’on s’était réuni chez lui pour souper, Racine et Despréaux, en raillant le fabuliste, poussèrent un peu loin la plaisanterie.

1675. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

Dans la presse, lorsqu’un nouveau livre important paraît, il est d’ordinaire examiné ou agité par cinq ou six des plus habiles feuilletonistes ou chroniqueurs littéraires qui tous, dans l’espace de quelques semaines, y viennent tour à tour s’exercer, tournoyer, jouter, pousser ou briser une lance comme à un jeu de bague ou dans une quintaine. […] eut-il l’occasion, un jour, de combattre Sully et de le pousser si vivement l’épée à la main, que plus tard le guerrier devenu surintendant en garda rancune au poète ?

1676. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

L’armée d’Allemagne, sous Moreau, accrue le plus possible, devait faire sur tous les bords du Rhin, de Strasbourg à Bâle, de Bâle à Constance, des démonstrations trompeuses de passage, puis marcher rapidement derrière le rideau que forme ce fleuve, le remonter jusqu’à Schaffhouse, jeter là quatre ponts à la fois, déboucher en masse sur le flanc du maréchal de Kray, le surprendre, le pousser en désordre sur le haut Danube, le gagner de vitesse s’il était possible, le couper de la route de Vienne, l’envelopper peut-être, et lui faire subir l’un de ces désastres mémorables dont il y a eu dans ce siècle plus d’un exemple. Si l’armée de Moreau n’avait pas ce bonheur, elle pouvait toutefois pousser M. de Kray sur Ulm et Ratisbonne, l’obliger ainsi à descendre le Danube, et l’éloigner des Alpes de manière à ce qu’il ne pût jamais y envoyer aucun secours.

1677. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Eugène de Rastignac, jeune homme pauvre, de famille noble, que l’ambition naissante poussait à l’étude et à l’intrigue. […] Poussé par une avidité d’enfant, je me précipitai dans la longue antichambre qui traverse la maison.

1678. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la société des visiteurs des pauvres. » pp. 230-304

. — J’aurais voulu sans doute que la politique et les intrigues de Barras fussent un peu plus poussées (je songe à Bertrand et Raton ou à Rabagas) : tel qu’il est, néanmoins, le Barras de M.  […] Si j’avais l’avantage (très appréciable aujourd’hui) d’être né protestant, j’aurais bien autrement poussé la satire.

1679. (1879) À propos de « l’Assommoir »

 » Le passage souligné est la clef de tout le caractère : cette Nana, d’ailleurs, est la suite, le développement de la Nana que nous avons vue l’œuvre dans L’Assommoir : n’ayant pas assez de cœur pour être méchante, elle aurait peut-être pu prendre de la raison si elle s’était développée dans un autre milieu ; mais dans la boue où elle a poussé, elle a puisé toute une sève mauvaise  Un peu plus loin, dans les notes dont nous venons de citer quelques fragments, on peut lire cette phrase profonde : « Nana, c’est la pourriture d’en bas, l’Assommoir remontant et pourrissant les classes d’en haut. […] Grâce à leur combinaison, tout le mal vient de Virginie, qui guette sans cesse sa proie, qui ne manque aucune occasion de la pousser à sa perte.

1680. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1875 » pp. 172-248

» Mercredi 17 mars On parlait, ce soir, des jeunes filles incurables de Notre-Dame des Sept Douleurs, de ces tronçons humains, de ces corps sur l’un desquels il y a cinquante-trois plaies à panser, tous les jours ; de ces malheureuses à la tête qui pousse, et qu’on est obligé d’enfermer et de contenir dans un cerceau. […] C’est bien là, la maison qu’il fallait habiter pour écrire Fromont jeune et Risler aîné, une maison, où, du cabinet de l’auteur, on a devant soi de grands et mélancoliques ateliers vitrés, et de petits jardins plantés d’arbres noirs, dont les racines poussent dans des conduits de gaz : de petits jardins aux cailloux verdissants, à l’enceinte faite de caisses d’emballage.

1681. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

. : la première porte l’artiste vers les harmonies, les consonances, tout ce qui plaît aux yeux et aux oreilles ; la seconde le pousse à transporter dans le domaine de l’art la vie sous tous ses aspects, avec ses qualités opposées, avec tous ses heurts et toutes ses dissonances. […] La scène sur la terre n’était pas moins ravissante : le jour bleuâtre et velouté de la lune descendait dans les intervalles des arbres et poussait des gerbes de lumière jusque dans l’épaisseur des ténèbres… Dans une savane, de l’autre côté de la rivière, la clarté de la lune dormait sans mouvement sur les gazons ; des bouleaux agités par les brises et dispersés çà et là formaient des îles d’ombres flottantes sur celle mer immobile de lumière.

1682. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre dixième. Le style, comme moyen d’expression et instrument de sympathie. »

« La vieillesse des bons arbres (du verger), pareils à des grands-pères pleins de gâteries271. » Shelley compare les nuages qui moutonnent à un troupeau que pousse « ce berger indolent, indécis, le vent. » Il y a un moyen d’élargir la perception en l’intellectualisant par le raisonnement, de faire comprendre afin de faire mieux sentir, de généraliser pour donner ensuite plus de force à l’émotion particulière qu’on veut traduire. […] Adonaï, les vents ont emporté ta voix, Et le Nazaréen, pâle et baissant la tête, Pousse un cri de détresse une dernière fois.

1683. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

Moumou poussa un léger gémissement, comme pour se plaindre ou pour demander pardon. […] poussez la touloupe en dedans. » On entendit un second aboiement. […] Des centaines de cailles chantaient à l’envi, les râles de genêt poussaient leurs cris vibrants.

1684. (1842) Discours sur l’esprit positif

D’après son caractère contradictoire, le régime métaphysique ou ontologique est toujours placé dans cette inévitable alternative de tendre à une vaine restauration de l’état théologique pour satisfaire aux conditions d’ordre, ou de pousser à une situation purement négative afin d’échapper à l’empire oppressif de la théologie. […] Son influence croissante devait d’abord paraître organique, tant qu’il restait subordonné à l’impulsion théologique mais sa nature essentiellement dissolvante a dû ensuite se manifester de plus en plus, quand il a tenté graduellement de pousser la simplification de la théologie au-delà même du monothéisme vulgaire, qui constituait, de toute nécessité, l’extrême phase vraiment possible de la philosophie initiale. […] Si d’une part, la perfection scientifique ne saurait dépasser une telle limite, au-dessous de laquelle, au contraire, elle se trouvera réellement toujours, elle ne pourrait, d’une autre part, la franchir sans tomber aussitôt dans une appréciation trop minutieuse, non moins chimérique que stérile, et qui même compromettrait finalement tous les fondements de la véritable science, puisque nos lois ne peuvent jamais représenter les phénomènes qu’avec une certaine approximation, au-delà de laquelle il serait aussi dangereux qu’inutile de pousser nos recherches.

1685. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

Cependant il n’est pas imprudent d’être brutal et d’aller droit au fait, quand à chaque phrase le je couvre un nous, nous immense, nous silencieux et invisible, — nous, toute une génération nouvelle, ennemie de la guerre et des sottises nationales ; une génération pleine de santé, parce qu’elle est jeune, et qui pousse déjà à la queue, coudoie et fait ses trous, — sérieuse, railleuse et menaçante22 ! […] Tout arbre immoral qui s’est permis de pousser tout seul et à sa manière est nécessairement abattu ; toute mare à crapauds ou à têtards est impitoyablement enterrée. […] Charles Le Roux, pousse encore plus loin la sécurité et l’audace ; car il n’est qu’une chose inimitable, qui est la bonhomie.

1686. (1884) La légende du Parnasse contemporain

Une fois, Albert Glatigny dédia un poème à Théophile Gautier sous ce titre : l’Impassible ; Louis-Xavier de Ricard, un des nôtres que les études sociales nous ont ravi, s’avisa, dans une lettre à un ami, qui fut imprimée je ne sais où, de recommander l’impassibilité aux penseurs, et moi-même j’avais écrit ces deux vers : La grande Muse porte un péplum bien sculpté Et le trouble est banni des âmes qu’elle hante ; Dès lors, nous eûmes beau pousser des cris et faire des gestes de réclamation, prendre, en un mot, toutes les attitudes que le dogme de l’impassibilité réprouve, c’en était fait, il n’y avait plus à revenir là-dessus, nous étions les Impassibles. […] Son visage se penche sur le mien, féroce, épouvantable ; je sens la fétidité de son haleine courir sur ma figure ; sous prétexte de me fouiller, il me secoue, me pousse me bouscule. […] Je pousse un cri, devinant que la rage du misérable allait se tourner contre la pauvre bête. En effet, avec un éclat de rire méchant, lugubre, il empoigne Cosette par la peau, la jette par terre et la pousse dans la cour avec un coup de pied dans le ventre. […] » Voilà, sans pousser aussi loin les choses Cependant, voilà tout ce que je fais.

1687. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Au gouffre que pour nous creusait la Destinée, Une invisible main nous poussait acharnée : Comme un bourreau, craignant de nous voir échapper, À nos côtés marchait le Malheur inflexible. […] Il demandait pardon à Dieu, cependant il poussait l’enquête, anxieux de connaître la vérité, impatient de lumière. […] Il était venu la vendre à Paris, et il poussait des hurlements horribles et s’arrachait les cheveux quand on lui disait qu’en réalité c’était un méchant ouvrage de peinture, dû à quelque seigneur cavalier, académicien de Rome ou de Venise, florissant vers 1800 ou 1810. […] Des lys Y poussent dans le sable………… Il descend, si j’en crois ses biographes, du navarque Tombazis, que les marins de l’Archipel nomment encore dans leurs chansons, et de Papadiamontopoulos, qui mourut en héros dans Missolonghi. […] Tellier convenait lui-même, de bonne grâce, qu’il poussait jusqu’à la superstition le culte de la poésie et des poètes.

1688. (1878) Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et aux végétaux. Tome I (2e éd.)

Pourtant, Magendie, poussé dans la voie physiologique par les conseils de Laplace, continuait les saines traditions qu’il avait puisées dans la fréquentation de ce célèbre savant. […] Dès le lendemain, au bout de vingt-quatre heures, la germination était très évidente, les radicelles étaient toutes poussées et les folioles commençaient à se dégager. […] Quelquefois cependant deux ou trois graines poussaient bien, mais le plus souvent aucune ne germait. […] La sensation de la soif, qui est sous la dépendance de ce système, se fait sentir toutes les fois que la proportion de liquide diminue dans le corps à la suite de quelque condition telle que l’hémorrhagie, la sudation abondante ; l’animal se trouve ainsi poussé à réparer par l’ingestion de boissons les pertes qu’il a faites. […] Ranvier a constaté dans les globules lymphatiques de l’axolotl un bourgeonnement véritable du noyau qui, primitivement arrondi, pousse en différents points des prolongements autour desquels se groupe la substance protoplasmique ; de telle sorte que chacun de ces prolongements apparaît bientôt comme le début d’une organisation nouvelle et comme le premier âge d’un globule lymphatique de seconde génération.

1689. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Au milieu du onzième siècle, l’Europe latine n’était plus ce qu’elle avait été avant Charlemagne, mais pour déclarer ce mouvement et lui donner une énergie créatrice, il fallait ce qui avait manqué depuis Charlemagne, et ce qui vint alors, des grands hommes, des hommes qui changent l’esprit des nations, ou qui l’adoptent et le poussent, en leur disant ce qu’elles croient, et leur faisant faire ce qu’ils veulent. […] Un homme qui, comme Bertram de Born, ne possédait qu’une petite seigneurie, et avec des peines infinies, n’avait pu que reconquérir son château de Haute-Fort et quatre ou cinq villages, n’avait d’autre moyen de se rendre redoutable que de pousser à la guerre ces puissants vassaux. […] Quand Richard devint roi d’Angleterre, il fit de son mieux pour le pousser à la guerre contre Philippe-Auguste, et lança des sirventes en guise de manifestes. […] Ainsi, cette disposition déjà visible des peuples de l’Europe qui, par leur culte et leurs lois naissantes, les poussait vers l’amélioration des mœurs, leur inspirait une haine naturelle contre le despotisme musulman, qui reculait vers la barbarie. […] C’est alors que les alliés poussent la guerre avec plus de force ; la ville de Constantinople est prise et pillée le jour de Pâques fleuries.

1690. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

Il a sur les cérémonies, et même sur des points de dogme, des poussées de hardiesse qui semblent ne plus vouloir s’arrêter ; mais cela ne se tient pas.

1691. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — II » pp. 57-80

Il eut peine à le croire, et poussa plus d’une demi-lieue, et trouva qu’il était vrai. — On trouva fort ridicule l’envoi du comte d’Ayen pour apporter les drapeaux pris, et qu’il en eût accepté la commission, ne s’étant pas trouvé du tout à la bataille.

1692. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « M. Boissonade. »

Boissonade comme érudit, je commencerais par répondre que je n’y entends absolument rien, et par conséquent pas assez pour prononcer ; que j’ai ouï dire à de bons juges que précisément c’est cette œuvre de marque qui lui manque : puis, si l’on me poussait, je me risquerais jusqu’à conjecturer pourtant que cette œuvre, qui serait chez lui essentielle et caractéristique, pourrait bien être tout bonnement son édition d’Aristénète, méditée et couvée durant vingt-cinq ans, faite avec amour et complaisance.

1693. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

L’abbé Courbezon a également la passion, — mais qu’il pousse jusqu’à la manie, — des fondations, des constructions ; ce faible l’entraîne beaucoup trop loin : avec un cœur d’or il lui arrive de commettre de sublimes, mais aussi d’irréparables imprudences.

1694. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

Il écrivait donc de Londres le 27 août 1815 à l’abbé Jean, qui, de son côté, venait en aide à l’abbé Carron et qui poussait dans le même sens : « Tu m’écrivais, mon cher ami, la veille du jour où tu as offert pour moi le saint sacrifice, et j’ai reçu la lettre la veille du jour qui a terminé ma retraite.

1695. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres mêlées de Saint-Évremond »

Enfin, pour être et paraître quelque chose de plus, pour pousser ses essais jusqu’à l’œuvre, pour porter son esprit jusqu’au talent, il n’a manqué à Saint-Évremond qu’un enthousiasme, une ambition, une illusion, un mobile : il en faut aux plus heureuses natures.

1696. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Il se formoit de tout cela un certain air de douceur et de grandeur qui prévenoit agréablement et qui le faisoit aimer et respecter tout ensemble. » Avec une complexion très-délicate, on comprenait à peine qu’il pût suffire à des exercices aussi divers : il portait dès lors dans son activité aux choses disparates ce quelque chose d’excessif et d’infatigable qu’il a depuis poussé dans un seul sillon ; on aurait dit qu’il avait hâte d’exterminer le jeune homme en lui.

1697. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

Il pousse même la rancune contre ce pauvre latin qu’il n’entend pas, et que parlait son ancêtre Horace, jusqu’à reprocher avec assez d’irrévérence à notre langue, à notre poésie, d’avoir été élevée et d’avoir grandi dans le latin : témoin Malherbe et Boileau qui l’ont coup sur coup disciplinée en ce sens, il ajoute méchamment que cet honnête latin a tout perdu ; que, sans les lisières de ce mentor, il nous resterait bien d’autres allures, plus libres et cadencées : Courier, en son style d’Amyot, ne marquerait pas mieux ses préférences.

1698. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — L'abbé de Lamennais en 1832 »

Dans le moyen âge, il n’en allait pas ainsi : la puissance spirituelle régnait ; les princes, fils de l’Église, tuteurs au temporel, administraient les peuples robustes, encore en enfance ; s’ils faisaient sentir trop pesamment le sceptre, au cri que poussaient les peuples le Saint-Siège s’émouvait et portait sentence.

1699. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « PENSÉES FRAGMENTS ET LETTRES DE BLAISE PASCAL, Publiés pour la première fois conformément aux manuscrits, par M. Prosper Faugère. (1844). » pp. 193-224

Pour guérir cela, il faut commencer par montrer que la religion n’est point contraire à la raison ; qu’elle est vénérable, en donner le respect ; la rendre ensuite aimable, faire souhaiter aux bons qu’elle fût vraie, et puis montrer qu’elle est vraie : — vénérable parce qu’elle a bien connu l’homme, aimable parce qu’elle promet le vrai bien. » On n’aurait que le choix entre les passages pour faire voir que Pascal n’avait nullement dessein de pousser les choses à l’absurde, comme on le pourrait augurer d’après certaines pensées publiées isolément.

1700. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — I »

Il est à regretter qu’il n’ait pas poussé plus loin cette espèce de composition religieuse, et que, dans les huit dernières années qui suivirent Athalie, il n’ait pas fini par jeter avec originalité quelques-uns des sentiments personnels, tendres, passionnés, fervents, que recelait son cœur.

1701. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

Chez lui, le plan des surfaces décide tout ; un flot pousse l’autre ; le phénomène domine ; rien n’est conçu par masse, rien n’est assis ni organisé.

1702. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

M. le ministre de l’instruction publique y pousse de toutes ses forces, et je l’en loue.

1703. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

Rien ne pousse dans ces confins reculés et sublimes par lesquels la parole touche à la musique et à la peinture.

1704. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre I »

Pourquoi ceux-ci sont-ils si pauvres, et par quel hasard, sur un sol aussi bon que la France, le pain manque-t-il à ceux qui font pousser le grain   D’abord, quantité de terres sont incultes et, ce qui est pis, abandonnées.

1705. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIIe entretien. Poésie sacrée. David, berger et roi » pp. 225-279

Les livres sont les pyramides des pensées de l’homme, ou plutôt les livres sacrés sont les temples intellectuels qui semblent avoir poussé d’eux-mêmes et sans architectes du sol, pour contenir les idées de l’humanité sur Dieu ou les dieux.

1706. (1892) Boileau « Chapitre IV. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » » pp. 89-120

D’autres enfin, partant eu sens inverse, au lieu de tout embellir, ne savaient que pousser à la charge et charbonner des caricatures.

1707. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Francisque Sarcey »

Ne la poussez pas, elle vous jetterait superbement au nez un d’sir où il ne resterait plus d’e du tout.

1708. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Victor Hugo, Toute la Lyre. »

Enfin, dans les dernières années de sa vie, il poussait l’inconscience du ridicule jusqu’à un excès qui affligeait les esprits délicats.

1709. (1895) La musique et les lettres pp. 1-84

Je souhaiterais qu’on poussât un avis jusqu’à délaisser l’insinuation ; proclamant, salutaire, la retraite chaste de plusieurs.

1710. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Il est poussé sur une pente si glissante, et s’y retenir demande tant de vertu !

1711. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

Ceux mêmes qui les avaient si vivement niés quand ils leur étaient contraires se sont trouvés par la force des choses amenés à les invoquer et à exiger qu’on pousse à leurs dernières conséquences les hérésies qui les avaient détrônés.

1712. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — Y. — article » pp. 529-575

Ils ont osé même lui imputer avec assurance des désordres dont elle n'a été que le prétexte, & ont poussé la mauvaise foi jusqu'à mettre sur son compte toutes les horreurs commises par le Fanatisme.

1713. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XV »

La famille de Sottenville, de Molière, ne montre pas plus de zèle à faire Georges Dandin ce qu’il est, que ce complaisant entourage n’en met à pousser l’ingénieur entre les bras de Catherine de Septmonts.

1714. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — I. (Dialogues inédits.) » pp. 1-28

Si loin que Mme de Monnier eût poussé la faiblesse avec M. de Montperreux, il n’y avait point eu de sa part faute entière et irréparable.

1715. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Études sur Saint-Just, par M. Édouard Fleury. (2 vol. — Didier, 1851.) » pp. 334-358

Nommé député à la Convention en septembre 1792, il court à Paris rejoindre Robespierre, vers lequel il s’était senti poussé dès longtemps par une affinité secrète, et à qui il avait écrit dès le 19 août 1790 : « Je ne vous connais pas, mais vous êtes un grand homme !

1716. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1861 » pp. 361-395

— Tout droit et à gauche. » Nous montons un escalier et nous poussons une porte.

1717. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre II. Des poëtes étrangers. » pp. 94-141

L’auteur nous avoit promis de pousser ce travail beaucoup plus loin ; & en particulier, de nous faire connoître les Ecrivains dramatiques espagnols, & les obligations qu’il croit que nous leur avons ; il n’a pas tenu parole.

1718. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre II. Le fond et la forme dans la littérature indigène. »

Dans Namara Soundiéta, celui-ci menace le chef qui lui refuse un terrain où enterrer sa mère, de détruire ses villages (balles et poudre), de tuer quiconque accepterait le prix de la concession (un couteau) de démolir ses cases où les volailles viendront prendre leurs ébats (poules et pintades) et de mettre ses villages en tel état que les arachides et le coton y pousseront sans être cultivés ni récoltés.

1719. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IX. Eugénie de Guérin »

Elle n’offensait pas les gens vulgaires, ces sensitives de grossièreté, à qui la moindre distinction fait des maux affreux, et qui poussent partout, même à la campagne.

1720. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre x »

Parfaits en nous, cela signifie développer notre personnalité jusqu’au bout et lui faire donner tout ce qu’elle peut donner, la pousser jusqu’à la stature parfaite du Christ.

1721. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

L’un vendait des journaux et soufflait dans une corne de cuivre, l’autre poussait une de ces petites charrettes que les gens de la profession nomment des « balladeuses », et où il y avait de la mercerie, des bonnets de tulle, des pièces d’étoffe, des miroirs, des lanternes de fer-blanc, et celui-ci, pour appeler ses clients répandus dans l’immensité des blés, portait à ses lèvres, de temps en temps, la pointe d’un grand coquillage rose, qui s’évasait en forme de trompe.

1722. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre premier. »

Ainsi tous les hommes commencent par les mêmes infirmités : dans le progrès de leur âge, leurs années se poussent les unes les autres, comme les flots ; leur vie roule et descend sans cesse à la mort par sa pesanteur naturelle ; et enfin, après avoir fait comme des fleuves un peu plus de bruit, et traversé un peu plus de pays les uns que les autres, ils vont tous se confondre dans ce gouffre infini du néant, où on ne trouve plus ni rois, ni princes, ni capitaines, ni tous ces noms qui nous séparent les uns des autres, mais la corruption et les vers, la cendre et la pourriture qui nous égalent. » C’est ainsi, c’est avec un semblable regard mélancolique et vaste, que souvent, à l’occasion d’une prouesse vulgaire et d’un nom sans souvenir, le poëte thébain suscite une émotion profonde par quelque leçon sévère sur la faiblesse de l’homme et les jeux accablants du sort.

1723. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre III. »

Et ce ne sont pas de médiocres esprits, mais des Scaliger, des Grotius, des Selden, des Huet, qui poussèrent plus ou moins loin cette hypothèse, où se plaisait le génie savant et inspiré de Milton.

1724. (1898) Introduction aux études historiques pp. 17-281

L’instinct naturel pousse à juger de la valeur des affirmations d’après leur forme. […] En fait, tous ont gardé l’habitude, comme au moyen âge, d’affirmer d’après l’autorité de Thucydide ou de César ; beaucoup poussent la naïveté jusqu’à le dire en propres termes. […] Une tendance naturelle à la conciliation pousse alors à chercher un compromis, à prendre un moyen terme. […] L’instinct naturel pousse à y chercher surtout les conclusions et à les adopter comme vérité établie ; il faut, au contraire, par une analyse continuelle, y chercher les faits, les preuves, les fragments de documents, bref les matériaux. […] Un désir puissant d’accroître le plus possible la masse de nos renseignements et de nos conclusions nous pousse à nous délivrer de toutes les restrictions négatives.

1725. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Une certaine inquiétude le pousse sans cesse hors de lui ; il veut tout voir, et puis il se plaint quand il a tout vu. […] Les missionnaires français et les coureurs canadiens avaient poussé les découvertes jusqu’au lac Ouinipic ou Ouinipigon 14, à l’ouest, et jusqu’au lac des Assiniboïsl ou des Cristinaux, au nord. […] Cet homme, pressé par la faim, rencontre dans les forêts un objet propre à la satisfaire ; il pousse un cri de joie en le voyant ou en le portant à sa bouche. […] — Oui : les chauves-souris et les singes. » L’assemblée poussa des cris d’admiration. […] Quand le despote est faible, ou quand à force de maux il a poussé à bout ses esclaves.

1726. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

Toujours est-il que Platon est assez « complexe » pour que, même en politique, même sur le point où il était le plus séparé de ses adversaires, il fût encore au moins disposé à leur accorder quelque chose et c’est à savoir la faveur flatteuse de pousser la condescendance jusqu’à affecter de les comprendre, et mieux qu’ils ne se comprenaient eux-mêmes. — L’égalité ? […] Ce qui peut pousser d’ailleurs à croire, sans l’affirmer précisément, que notre âme est immortelle, à quoi, comme on vient de le voir, la morale est intéressée, c’est que l’âme, ou, comme on voudra le nommer, le principe intérieur qui gouverne tout notre être, a une nature très particulière. […] Si la vertu était un bon placement, il y a longtemps que les banquiers s’en seraient aperçus. » Si l’on me pousse ainsi, répondrait Platon, j’irai plus loin d’un pas et je dirai que, fût-il faux que l’intérêt bien entendu se confonde avec la vertu dans le courant des choses humaines, cela redevient vrai pour ainsi parler à une plus grande profondeur, à pousser plus avant. […] Dominer. » Et remarquez que si on les poussait encore ils répondraient, s’ils mettaient de côté toute dernière fausse honte : « Plutôt pour l’injuste que pour le juste » ; et ne laisseraient pas d’être assez logiques en le disant. […] Ils ont raison en ce sens que leurs idées, poussées à l’extrême et beaucoup plus loin qu’où ils les voient, sont la vérité.

1727. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

On prend l’habitude de se caresser en ses vertus, de s’attendrir sur elles, de pousser les autres à s’attendrir sur elles également. […] Tantôt il pousse à la nouveauté et paraît extrêmement révolutionnaire, tantôt il retient ses interprètes sur la pente des exagérations et des « nouveaux jeux » excentriques. […] C’est Dumesnil, c’est Clairon, c’est Lekain qui ont absolument changé tout cela ; mais c’est Voltaire qui les y a poussés, les unes et l’autre, de toutes ses forces. […] À quoi ne pousse point le désir de parvenir, laudumque immensa cupido  ? […] La variété ne pouvait se retrouver que dans les formes du travers… Mon tableau pousse au noir, je le reconnais.

1728. (1892) Essais sur la littérature contemporaine

Poussons plus loin encore ; élevons-nous plus haut : « reconnaissons notre être propre dans toute autre créature », et ne demandons pas d’autre destinée pour nous « que celle de l’humanité en général ». […] Mais ont-ils fait attention que leurs leçons, poussées trop loin, et leur technique, trop fidèlement suivie, tournaient peut-être contre leur objet même ? […] L’Éloa de Vigny est une « sœur des anges » ; elle est aussi la femme ; elle est encore le mystérieux et impur attrait qui pousse les Elvire dans les bras des don Juan. […] Les vaudevillistes le savent bien, dont une partie de l’art, et non pas la moins difficile à manier, consiste à pousser cette logique au-delà, de toute vraisemblance : rappelez-vous plutôt la Cagnotte ou le Chapeau de paille d’Italie. […] Si nous voulions maintenant approfondir ou pousser plus avant, nous ne manquerions pas de bonnes raisons pour protester contre l’abus que l’on fait du nom de Molière dans ce débat.

1729. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Wallon lui avait bien reproché de pousser trop loin son admiration pour la morale antique et de méconnaître la nouveauté et la supériorité du christianisme ; M.  […] Ce qu’on peut lui reprocher, c’est d’avoir trop simplifié le problème, d’en avoir négligé certains éléments, d’avoir, malgré l’abondance des faits réunis par lui, laissé de côté d’autres faits qui leur servent de correctifs, d’avoir, en un mot, poussé au noir un tableau déjà sombre en ; réalité. […] La vocation qui m’a poussé vers les études historiques, c’est à lui que je la dois. […]   Ce ne furent pas seulement les nécessités nouvelles de son enseignement qui le poussèrent à écrire l’Histoire de France. […] La Grèce, la Perse, voilà où j’aimerais à puiser, parce que la religion de ces peuples, au lieu d’endormir les esprits, les pousse vers le progrès. » Tous ses petits livres d’histoire naturelle ne rentrent-ils pas dans l’ouvrage qu’il méditait en 1825 : Étude religieuse des sciences naturelles ?

1730. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

Cet excès même de grandeur qui y pousse toute vertu à l’héroïsme, tout vice au crime, ne vient que d’une ressemblance trop fidèle avec un temps où l’imitation étrangère avait donné un air de mode même à la vertu. […] Il est fort différent, surtout pour la comédie, d’avoir à peindre ses personnages au repos, dans le naturel de leurs habitudes, où d’être forcée de les saisir dans quelque mêlée, au passage, dans le flot qui les pousse avec le poète lui-même.

1731. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre deuxième. Troubles et désagrégations de la conscience. L’hypnotisme et les idées-forces »

Pierre Janet se pince fortement le bras, Mme B… endormie pousse des cris et s’indigne d’être pincée au bras. […] Mme B… poussa des cris terribles, et M. 

1732. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

Tu n’as donc pas quitté ce port de ton bonheur ; Ce soleil du matin qui réjouit ton cœur, Comme un arbre au rocher fixé par sa racine, Te retrouve toujours sur la même colline ; Nul adieu n’attrista le seuil de ta maison, Jamais, jamais tes yeux n’ont changé d’horizon, L’arbre de ton aïeul, l’arbre qui t’a vu naître N’a jamais reverdi sans ombrager son maître ; Jamais le voyageur en voyant du chemin Ta demeure fermée aux rayons du matin, Trouvant l’herbe grandie, ou le sentier plus rude, N’a demandé, surpris de cette solitude, Sur quels bords étrangers, dans quels lointains séjours Le vent de l’inconstance avait poussé tes jours. […] C’est avec lui que je satisfis pour la première fois ce sentiment passionné et enthousiaste de curiosité qui me poussait à contempler de près les grands hommes.

1733. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIe entretien. Sur le caractère et les œuvres de Béranger » pp. 253-364

« Laffitte, dont j’étais l’oracle et l’ami, était étendu sur un fauteuil, son pied foulé sur un tabouret, écoutant tout le monde, souriant à tous les avis, semant selon son habitude les mots spirituels à l’oreille de l’un et de l’autre, penchant secrètement pour la monarchie et pour le duc d’Orléans, mais n’osant le dire trop haut de peur d’avorter dans un cri de trahison poussé par le peuple. […] chacun d’eux pousse Frais comme un bouton printanier.

1734. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Mais cette variété intermédiaire, par cela même qu’elle habitera une aire moins étendue, sera représentée par un moins grand nombre d’individus : or, dans l’observation des faits, aussi loin que j’ai pu pousser mes recherches, cette règle s’applique exactement aux variétés à l’état de nature. […] Nous devrions admirer aussi, bien que cela nous puisse paraître difficile, la haine sauvage et instinctive qui pousse la reine-Abeille à détruire les jeunes reines, ses filles, aussitôt qu’elles sont nées, ou à périr elle-même dans le combat ; sans doute, c’est le bien de la communauté qui l’exige, et la haine maternelle peut provenir comme l’amour, bien que par bonheur plus rarement, de ce même principe inexorable de sélection naturelle.

1735. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre I. De la sélection des images, pour la représentation. Le rôle du corps »

Cette représentation, on la pousse hors de l’espace, pour qu’elle n’ait plus rien de commun avec la matière d’où l’on était parti : quant à la matière même, on voudrait s’en passer, on ne le peut cependant, parce que ses phénomènes présentent entre eux un ordre si rigoureux, si indifférent au point qu’on choisit pour origine, que cette régularité et cette indifférence constituent véritablement une existence indépendante. […] Il faudra donc aller plus loin, et après avoir fait converger les sensations vers le centre cérébral, les pousser tout à la fois hors du cerveau et hors de l’espace.

1736. (1911) Nos directions

Plus nettement encore, la position de Ghéon sur la notion de classicisme rejoint celle du groupe de la NRF, on l’a vu, même si sa fibre patriotique le pousse à ménager Maurras et les nationalistes davantage encore que ne le fait Gide, engagé pour sa part dans une lutte ambiguë avec des adversaires dont il partage alors en partie les convictions10. […] Libre à l’auteur en d’autres œuvres, et libre à nous, de réduire la part de la poésie pure, d’accentuer les poussées alternatives de l’action, — mais non de renier le dynamisme lyrique sous-jacent dont est né le présent ouvrage. […] Car la tragédie sera close : une simple anecdote, développée en toute logique devra pousser à bout, épuiser chaque caractère, au point que le rideau tombé, on ne désire plus rien d’aucun d’eux ; et en retour quelques caractères choisis, par simple contact réciproque, devront complètement et exclusivement, vivre l’anecdote posée. […] Il est généreux avant tout ; son acte extrême ne peut être qu’un acte de générosité ; Candaule pousse à bout sa vertu principale. […] Si loin que le dramaturge pousse le souci de « faire vrai « il ne peut pas ne pas tricher avec la vie, se moquât-il même de l’art : car rien ne doit paraître sur la scène que de significatif et la vie est étrangement inégale dans sa portée. — Si on ne consent pas à réduire l’expression théâtrale d’un débat intérieur, à une mimique passionnée qui ne vaudra qu’autant que vaut le mime ; si on accorde que tout personnage est tenu de « parler » ses sentiments les plus secrets, les plus résolument tacites, et que le théâtre ne saurait vivre sans cette transposition, — pourquoi le héros qui consent à nous dévoiler sa pensée, n’aurait-il pas la faculté, en outre, d’élucider, d’exprimer par des mots, tout l’inconscient de son être, ce poème confus de sensations, d’intuitions, de rêves, de souvenirs et de réactions obscures que chacun de nous porte en lui, ce lyrisme sourd et caché que l’émotion délivre ?

1737. (1862) Notices des œuvres de Shakespeare

Et quand le terme arrive, c’est aussi la mort qui règne ; tous meurent, les innocents comme les coupables, la jeune fille comme le prince, et plus folle que lui : tous vont rejoindre le spectre qui n’est sorti de son tombeau que pour les y pousser tous avec lui. […] Duncan, au contraire, prince peu guerrier, poussait jusqu’à l’excès la douceur et la bonté ; en sorte que si l’on eût pu fondre le caractère des deux cousins et les tempérer l’un par l’autre, on aurait eu, dit la chronique. « un digne roi et un excellent capitaine ». […] Othello est bien autre chose qu’un mari jaloux et aveuglé, et que la jalousie pousse au meurtre ; ce n’est là que sa situation pendant la pièce, et son caractère va fort au-delà de sa situation. […] Ce n’est point, comme Edgar, la nécessité qui le pousse, le hasard qui vient à sa rencontre ; c’est sa volonté qui le détermine ; rien ne la change ni ne la trouble ; et le spectacle du malheur auquel il se dévoue lui arrache à peine une exclamation de douleur. […] On voit le brave Hotspur acceptant l’entreprise qu’on lui propose avant de la connaître, certain du succès dès qu’il est frappé de l’idée de l’action ; on le voit perdant successivement tous les appuis sur lesquels il avait compté, abandonné ou trahi par ceux qui l’ont entraîné dans le danger, et comme poussé par une sorte de fatalité vers l’abîme qu’il n’aperçoit qu’au moment où il n’est plus temps de reculer, et où il tombe en ne regrettant que sa gloire.

1738. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre I. La Restauration. »

C’est le dévergondage d’une imagination véhémente, qui se salit comme une autre se pare, qui se pousse en avant dans l’ordure et dans la folie comme une autre dans la raison et dans la beauté. […] Il charge ses pièces d’incidents, il multiplie l’action, il pousse la comédie jusqu’aux situations dramatiques ; il bouscule ses personnages à travers les coups de main et les violences, il va jusqu’à les fausser pour outrer la satire. […] Insensiblement le courant se nettoie et marque sa voie, comme il arrive à un fleuve qui, entrant violemment dans un nouveau lit, clapote d’abord dans une tempête de bourbe, puis pousse en avant ses eaux encore fangeuses qui par degrés vont s’épurer. […] Partout ici le vice est cru, poussé à ses extrêmes, présenté avec ses accompagnements physiques. « Quand j’appris que mon père avait reçu une balle dans la tête, dit un héritier, mon cœur fit une cabriole jusqu’à mon gosier. —  Consultez les veuves de la ville, dit une jeune dame qui ne veut pas se remarier, elles vous diront qu’il ne faut pas prendre à bail fixe une maison qu’on peut louer pour trois mois635. » Les gentlemen se collettent sur la scène, brusquent les femmes aux yeux du public, achèvent l’adultère à deux pas, dans la coulisse.

1739. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Mais tel est le pouvoir d’une idée générale, qu’aussitôt qu’on la pousse à ses dernières applications, elle n’en devient pas plus vraie, quand elle est fausse, mais de toutes parts les questions se lèvent, en quelque sorte, et voici que des aspects de la nature et de la vérité, jusqu’alors enveloppés d’ombre, ou même inaperçus, s’éclairent brusquement d’une lumière nouvelle. […] S’il existait, dans une certaine position, — c’est-à-dire sur le Saint Siège, — un homme qui sentît cela et qui se plaçât, pour ainsi dire, au milieu de l’action divine, jamais il n’aurait paru sur la terre rien de si grand que cet homme. » On reconnaît ici les idées de Joseph de Maistre, exagérées sans doute, et poussées déjà jusqu’au mépris sinon jusqu’à la haine encore des « puissances ». […] Voilà le souvenir enivrant qui voltige Dans l’air troublé ; les yeux se ferment ; le Vertige Saisit l’âme vaincue, et la pousse à deux mains Vers un gouffre obscurci de miasmes humains… Si la forme, si la facture de ces vers n’a rien de très original, ou si peut-être encore, cette poésie de la sensation n’était pas absolument nouvelle aux environs de 1858, cependant on ne l’avait pas demandée jusqu’alors au plus suggestif peut-être, mais le plus « animal » aussi de tous nos sens : j’entends le seul dont les plaisirs n’aient jamais en soi rien d’intellectuel, le plus grossier par conséquent ; et, pour cette raison peut-être, le seul dont aucun poète, avant Baudelaire, ne se fût avisé de se faire un art, une « manière », ou un procédé, de noter les impressions. […] Si, pour chasser de lui la terreur délirante, Elle chante parfois, une toux déchirante La prend dans sa chanson, pousse en sifflant un cri, Et lance les graviers de son poumon meurtri. […] « Ce qui a poussé nécessairement et naturellement l’homme à la formation des sons et du langage, c’est le besoin puissant de faire des conventions réciproques et de s’entendre avec ses semblables… Il n’y a pas de rapport de dépendance nécessaire entre les notions et les sons qui servent à les exprimer… un son quelconque peut désigner une notion quelconque… et lorsqu’un son à la longue a fini par désigner une notion spéciale, ce fait n’a jamais été que le résultat du hasard… L’organisme des langues est issu de la faculté et du besoin de parler, universel chez les hommes, et il provient de la nation entière… Le langage n’est pas un produit libre de l’homme considéré isolément, il appartient toujours à la nation entière… C’est par un très grand nombre de langues que les hommes primitifs commencent à exprimer leurs pensées.

1740. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Mais, du reste, en cela elle n’a pas laissé d’être logique, et elle a seulement poussé plus loin que l’ancien Régime l’accaparement de toutes choses par l’Etat. […] Telles sont les idées générales de Montesquieu sur l’individualisme et le socialisme, idées suggestives, comme toujours, insuffisamment précises, insuffisamment poussées au degré nécessaire de clarté, de force probante et de décision. […] Nous troublons l’Etat ; nous nous tourmentons nous-mêmes pour faire recevoir des points de religion qui ne sont point fondamentaux ; et nous ressemblons à ce conquérant de la Chine qui poussa ses sujets à une révolte générale pour les avoir voulu obliger à se rogner les cheveux et les ongles.  » Le Catholicisme inspire à Montesquieu une espèce d’horreur que j’appellerai l’horreur patriotique. […] L’Église catholique pousse au célibat et le célibat épuise et ruine la nation : « Je parle des prêtres et des dervis de l’un et de l’autre sexe qui se vouent à une continence éternelle. […] Nous n’avons rien de comparable à ces assassinats religieux dans nos derniers temps, si ce n’est peut-être la Saint-Barthélemy et les massacres d’Irlande… » « Un législateur, selon nos notions communes, doit se faire aimer et craindre ; mais il ne doit pas pousser la sévérité jusqu’à la barbarie : il ne doit pas, au lieu d’infliger par les ministres de la Loi quelques supplices aux coupables, faire égorger au hasard une grande partie de sa nation par l’autre.

1741. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

Il revient sans cesse à ses dénouements de pièces, en vue du puissant interprète qu’il a dans la main et qui peut pousser plus avant la bataille, la charge à fond de train sur le spectateur, et décider la victoire : « Je brûle de voir l’effet de ce nouveau cinquième acte.

1742. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite et fin.) »

Je dis avec prudence : ce n’est pas qu’il y eût eu un danger personnel à pousser mes investigations fort avant dans le Maroc, mais la moindre petite inconséquence pouvait amener une collision entre nous et les agents d’Abd-el-Kader, que nous avions en avant et en arrière, chose qui aurait mis à l’aise la diplomatie de M. le général de La Rue… » Le général de La Rue avait été, on se le rappelle, chargé d’une mission auprès de l’empereur du Maroc.

1743. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. (Suite et fin.) »

Il avait donc, lui aussi, ses scrupules, mais très-arriérés, et il ne voulait pas qu’on les poussât trop loin, ni jusqu’à s’y asservir au préjudice de l’expression des pensées : « Il y en a, disait-il, qui, plutôt que d’employer une diction tant soit peu douteuse, renonceraient à la meilleure de leurs conceptions ; la crainte de dire une mauvaise parole leur fait abandonner volontairement ce qu’ils ont de meilleur dans l’esprit ; et il se trouve à la fin que, pour ne commettre point de vice, ils se sont éloignés de toute vertu. » Le fait est qu’avec le souci qu’ont perpétuellement les Vaugelas, les Pellisson, et en s’y tenant de trop près, on se retrancherait beaucoup de pensées à leur naissance, de peur d’être en peine de les exprimer.

1744. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Le poète a ouvert la bouche et a poussé un beau son, mais les mots gaulois, le français de son temps, sont trop minces pour cette gravité latine et cette plénitude continue qu’il y faudrait.

1745. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) » pp. 5-56

VI La nation fondée et défendue, un instinct qui s’élargit la pousse à se civiliser chaque jour davantage.

1746. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (4e partie) » pp. 81-143

La détresse du peuple, les travailleurs sans pain, le dernier des Condés disparu dans les ténèbres, Bruxelles chassant les Nassau comme Paris les Bourbons, la Belgique s’offrant à un prince français et donnée à un prince anglais, la haine russe de Nicolas, derrière nous deux démons du midi, Ferdinand en Espagne, Miguel en Portugal, la terre tremblant en Italie, Metternich étendant la main sur Bologne, la France brusquant l’Autriche à Ancône, au nord on ne sait quel sinistre bruit de marteau reclouant la Pologne dans son cercueil, dans toute l’Europe des regards irrités guettant la France ; l’Angleterre, alliée suspecte, prête à pousser ce qui pencherait et à se jeter sur ce qui tomberait ; la pairie s’abritant derrière Beccaria pour refuser quatre têtes à la loi, les fleurs de lis raturées sur la voiture du roi, la croix arrachée de Notre-Dame, la Fayette amoindri, Laffitte ruiné, Benjamin Constant mort dans l’indigence, Casimir Périer mort dans l’épuisement du pouvoir ; la maladie politique et la maladie sociale se déclarant à la fois dans les deux capitales du royaume, l’une la ville de la pensée, l’autre la ville du travail ; à Paris la guerre civile, à Lyon la guerre servile ; dans les deux cités la même lueur de fournaise ; une pourpre de cratère au front du peuple ; le midi fanatisé, l’ouest troublé, la duchesse de Berry dans la Vendée, les complots, les conspirations, les soulèvements, le choléra, ajoutaient à la sombre rumeur des idées le sombre tumulte des événements. » VIII Tout cela mène à ce que l’auteur nomme l’Épopée de la rue Saint-Denis, c’est-à-dire aux barricades.

1747. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Le petit chevalier, qu’on n’avait désiré que pour suppléer à la perte possible de l’aîné, poussa comme il plut à Dieu, sur le pavé de Saint-Malo, au bord des grèves, plus rudoyé que surveillé, polissonnant tout le jour, rentrant au logis les vêtements en loques et l’oreille parfois déchirée.

1748. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mendès, Catulle (1841-1909) »

Pendant les dernières années de l’Empire, il a été le centre du seul groupe poétique qui ait poussé après la grande floraison de 1830.

1749. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre premier »

Ne serait-ce pas vouloir trop pousser la définition, que d’ajouter que, pour la France en particulier, il faut entendre par un langage parfait, celui dont tout le monde est d’accord, et qui est considéré comme définitif ?

1750. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre deuxième »

Pour ses amis, la plupart poussés à l’incrédulité par haine pour les sectaires, une mort à la façon des épicuriens était la plus belle.

1751. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Si nous entrevoyons que les qualités qui ont désigné un homme à l’admiration universelle, auraient pu, en d’autres circonstances, le pousser à l’échafaud, et réciproquement, peut-être aurons-nous une compréhension plus saine, sinon un plus vif amour des forces que nous méprisons.

1752. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre VI. Premiers pas hors de Saint-Sulpice  (1882) »

Dès qu’on se sent poussé par des gens qui veulent prendre les devants, le devoir est de se reculer, d’un air qui signifie : « Passez, monsieur. » Mais il est clair que celui qui tiendrait à cette prescription en omnibus, par exemple, serait victime de sa déférence ; je crois même qu’il manquerait aux règlements.

1753. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 août 1885. »

. — Ainsi le Drame se lève : — un rideau s’entrouvre, et, dans le fond, — saillant d’un cadre lointain, noir, obscur, vague, et indistinct, — un paysage apparaît, que nous attendions, et les hommes y sont, dont la vie, en nous inconsciemment vécue déjà, se va en nous revivre évidemment ; — tandis que, parmi l’angoisse des vivantes passions, des désespoirs, des joies, et des extases qui se poussent et s’appellent, parmi l’inéluctable empoignement des très réelles émotions, peu à peu nous descend, insensiblement et nécessairement, l’Explication, l’Idée, la Loi, le prodigieux troublement de l’Unité dernière, comprise.

1754. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Août 1886. »

Maintenant48, c’est une résignation à la nécessaire fin ; l’âme sachante de la nécessaire fin, erre désintéressement par les mondes, pour savoir, non pour agir ; et dans les cavernes où tâchent les désirs, dans les bois vastes où s’extasient les désirs, dans les champs admirables où pousse le haut désir, errante et contemplative, elle erre sous la mélancolie tranquille de l’Erdaaw enténébrée ; et, quand par le désir resurgi (par le désespoir, subitement conscient, de n’être plus) retraînée à l’action, l’âme est par l’action trahie, elle se retire, l’âme, dans le sombre de son condamnement… Walhall, burg splendide, burg maudit, adieu, voici, le crépuscule !

1755. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « I »

.) ; il était profondément religieux, mais toute théologie lui était antipathique au plus haut degré, il lui fallait voir de ses yeux le Christ crucifié et entendre de ses oreilles le soupir poussé sur Golgotha (Bayr.

1756. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 457-512

Les lumieres du discernement ont été éclipsées par les transports de l’enthousiasme, & on aura peine à croire jusqu’à quel point cette espece de fanatisme a poussé son aveuglement.

1757. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

Il avait reçu de la nature, sous des formes agréables et jolies, une certaine énergie ardente qui constitue à un haut degré le tempérament littéraire et qui pousse au talent : Cette énergie, a-t-il remarqué, condamne d’ordinaire ceux qui la possèdent au malheur non pas d’être sans morale et de n’avoir pas de très beaux mouvements, mais de se livrer fréquemment à des écarts qui supposeraient l’absence de toute morale.

1758. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Sieyès. Étude sur Sieyès, par M. Edmond de Beauverger. 1851. » pp. 189-216

Nous avons de beaux arts, nous produisons des effets sensitifs, nous communiquons des émotions vagues ou particularisées, mais nous ignorons l’art d’éclairer un parti, et de pousser à le prendre… Les discours qui se tiennent au Parlement d’Angleterre ont un but ; ils ne ressemblent point à notre style oratoire ; il n’y a point cette emphase, ce ton de dignité… Ce sont des gens qui ont des affaires ; nous sommes oiseux et nous nous arrêtons à faire les beaux.

1759. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre V. Le Bovarysme des collectivités : sa forme idéologique »

*** Après avoir montré dans l’idéal humanitaire, tel qu’en fait il s’exerce, une attitude d’utilité particulière engendrée par l’instinct de puissance des races anglo-saxonnes, on peut pousser plus loin la démonstration et faire voir comment ce même idéal, succédané du christianisme, est encore, sous son déguisement religieux et philosophique, et coloré d’une nuance nouvelle, une attitude combative, d’attaque et de défense, au profit de certains groupes, au détriment de ceux qui se laissent prendre au déguisement d’un intérêt particulier en idée générale.

1760. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1856 » pp. 121-159

. — Elles se promènent deux par deux dans l’allée entre les tables, jouant à se pousser et fumant des cigarettes ; — De temps en temps, un chanteur récite quelque ordure d’une voix de basse-taille. — Les garçons ont de longues moustaches. — Le maître de l’établissement est appelé par les filles : le vieux marquis.

1761. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

» fait la voix glapissante d’un crieur qui pousse par les épaules la foule hébétée.

1762. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1870 » pp. 321-367

… » Suivit bientôt un instant de calme, de tranquillité, ses regards doux, sourieurs fixés sur moi… Je crus à une crise semblable au mois de mai… Mais tout à coup, il se renversa la tête en arrière, et poussa un cri rauque, guttural, effrayant, qui me fit fermer la fenêtre.

1763. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre septième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie. »

Mais quand cela ne lui suffit plus, qu’il est poussé à bout, ce ne sont plus des raisons d’espérance qu’il se forge, c’est un acte de foi qu’il prononce ; il espère, non parce qu’il se croit en droit de le faire, mais parce qu’il n’est pas en son de ne pouvoir point espérer.

1764. (1809) Quelques réflexions sur la tragédie de Wallstein et sur le théâtre allemand

C’est un être pour ainsi dire aérien, qui plane sur cette foule d’ambitieux, de traîtres, de guerriers farouches, que des intérêts ardents et positifs poussent les uns contre les autres.

1765. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre III : Règles relatives à la distinction du normal et du pathologique »

Le devoir de l’homme d’État n’est plus de pousser violemment les sociétés vers un idéal qui lui paraît séduisant, mais son rôle est celui du médecin : il prévient l’éclosion des maladies par une bonne hygiène et, quand elles sont déclarées, il cherche à les guérir47.

1766. (1913) La Fontaine « II. Son caractère. »

Oui, La Fontaine a été un Rousseau, c’est-à-dire qu’il a eu le goût de l’indépendance et de la solitude poussé à un très grand point et mélangé d’un certain goût, toujours persistant aussi, pour les plaisirs de la société.

1767. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Il avait poussé l’amour de son article si loin, qu’il avait pris un professeur de grec, vrai grec, pour la beauté de son article !

1768. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « II. M. Capefigue » pp. 9-45

Eux, les chevaliers déshérités de l’Histoire, les Ivanhoë sans tournoi, doivent-ils, royalistes quand même, pousser le respect pour la royauté jusqu’à l’applaudir de leurs mains aveugles, jusqu’à la glorifier de ses fautes ?

1769. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

Or, puisque nous parlons de psychologie, il n’y a que l’amour, en effet, et un amour maniaque, qui puisse pousser un homme comme M. 

1770. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre »

Il est bien évident que, pour nous qui sommes restés fidèles à la vérité, de pareilles assertions peuvent être discutées et poussées, les unes après les autres, dans l’abîme tourbillonnant de l’inconséquence ; mais, quoi qu’il en soit, on n’en reconnaît pas moins, sous ces affirmations plus faciles à articuler qu’à prouver, les racines à moitié arrachées du catholicisme, le germe oublié que rien n’a pu étouffer, la trace de ces idées traditionnelles mal effacées d’abord et qui finiront par reparaître, lettre par lettre, comme les merveilleux caractères de quelque palimpseste divin.

1771. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

Il faut même leur rendre cette justice qu’ils poussent le scrupule jusqu’à ne pas mêler, d’ordinaire, à leur drame, un personnage étranger.

1772. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Comme ce qui les a séduits d’abord et a déterminé leur vocation, c’est le système, une fois emportés par lui, ils poussent jusqu’au bout.

1773. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Nous pouvons donc retenir que la nature de l’imitation qui porte d’homme en homme, dans les sociétés modernes, les habitudes et les croyances, est bien telle qu’elle les pousse vers l’idée des droits de l’homme ; car il est clair que la mode y gagne tous les jours sur la coutume.

1774. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

La flotte ottomane, forte de plus de deux cents galères poussées par les rames d’esclaves chrétiens, et traînant à sa suite une foule de navires, s’était embossée au rivage.

1775. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Il pousse le courage jusqu’à l’aveuglement, et la pensée jusqu’aux dernières limites de l’abstraction. […] Le blâme et l’approbation sont poussés à l’extrême, et souvent le dédain coudoie l’admiration. […] Ce verset terrible résout tous les doutes de Paolo, et Luigi poignardé par la main de son frère pousse des cris lamentables. […] Mais dans une fable aussi claire, aussi limpide, elle fait tache et pousse à l’incrédulité. […] Tisbe pousse la générosité jusqu’au bout.

1776. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

Je puis vous pousser ainsi jusqu’à l’espace infini. […] Le scepticisme de Kant, dont le bon sens fait si aisément justice, est poussé à bout et forcé dans son retranchement par la distinction de la raison spontanée et de la raison réfléchie. […] Mais attendez un peu, et bientôt vous verrez l’apôtre de l’état naturel, poussé, par une inconséquence forcée, d’un excès dans l’excès contraire, au lieu des douceurs de la liberté sauvage, nous proposer le Contrat social et Lacédémone. […] Un homme pousse-t-il le désintéressement jusqu’au dévouement, ou l’appelle un héros, qu’il soit caché dans la condition la plus humble ou placé sur un théâtre. […] L’intérêt est ce ressort qui nous pousse à rechercher en toutes choses notre plaisir et notre bonheur.

1777. (1884) Cours de philosophie fait au Lycée de Sens en 1883-1884

Le plaisir esthétique ne nous pousse pas à posséder pour nous et rien que pour nous l’objet qui l’a causé. […] Ce n’est pas l’amour de l’art qui le pousse, c’est le besoin et la gloire de posséder. […] C’est l’instinct qui pousse l’enfant à prendre le sein de sa mère, et à exécuter les mouvements nécessaires à sa vie. […] Supposons que toutes les fois qu’elle désire se tourner d’un côté, le vent l’y pousse. […] Ainsi, l’amour de nos semblables est un mobile qui nous pousse à faire la charité.

1778. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre III. Le lien des caractères généraux ou la raison explicative des choses » pp. 387-464

Voilà pourquoi, à une certaine limite, notre explication s’arrête, et, quoique, de siècle en siècle, nous la poussions plus avant, il est possible qu’elle vienne toujours s’arrêter devant une limite. […] De même, dans une cathédrale, les derniers éléments sont des grains de sable ou de silex agglutinés en pierres de diverses formes ; attachées deux à deux ou plusieurs à plusieurs, ces pierres font des masses dont les poussées s’équilibrent ; et toutes ces associations, toutes ces pressions s’ordonnent en une vaste harmonie.

1779. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

toi monade en naissant engloutie, Qui jettes sur le gouffre un regard insensé, Et qui meurs quand le cri de ta vie est poussé ! […] Voyez, par exemple, le cri de Vive l’Empereur poussé dans les Misérables à la face du ciel étoile, et certaines pages de Quatre-vingt-treize sur la Révolution. — « Il y a, disait Hippocrate, l’inconnu, le mystérieux, le divin des maladies, quid divinum. » Ce qu’il disait des maladies.

1780. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Du timide, a gardé cette faculté de méditation solitaire qui domine aussi bien la douleur du Livre de Pierre (extrait d’un de ses premiers romans) que les Voyages de Psychodore et qui le poussa aux audaces de la pensée. […] La musique et l’amour redoublent sa folie…ad   Au contact de ces subtiles arabesques, de ces chatoiements, on se demande quel égarement peut pousser à n’y voir que charges et gaudrioles.

1781. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Il serait oiseux d’accumuler ici des témoignages, des preuves ; je préfère un simple fait divers : je flânais l’autre soir dans les rues de Paris, observant et réfléchissant ; passent deux ouvriers, et je surprends ces mots de l’un à l’autre : « Vois-tu, il faut se faire une logique, et dire : va comme je te pousse ! » Ailleurs, on aurait dit : il faut se faire une morale, ou bien : il faut se faire une raison (dans le sens de résignation) ; le Français se fait une logique ; et son histoire, moins soumise que d’autres aux accrocs du hasard, à l’inertie de l’habitude, va comme il la pousse.

1782. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

Elle va, comme le ballon libre, où le vent la pousse. […] Le vent, ce sera le berger indolent, indécis dont parle Shelley, qui pousse devant lui le troupeau des nuages ; ou quand il s’irritera, il évoquera vaguement l’image d’une figure hurlante, d’un génie ailé qui passe emporté dans un tourbillon. […] On peut pousser le jeu plus ou moins avant, s’enfoncer dans le merveilleux ou s’en retirer. […] Nous nous complaisons surtout dans les œuvres qui poussent l’imitation assez loin pour évoquer immédiatement l’image intégrale de l’objet, sans pourtant aller jusqu’à nous faire oublier un seul instant que nous sommes en présence d’une simple représentation.

1783. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Magnin, qu’il avait peut-être fallu un peu enhardir et pousser d’abord, demeura ensuite fidèle aux impressions de cette forme de drame où l’imagination et la fantaisie jouaient un si grand rôle et s’accordaient plus d’exagérations en tous sens que la fibre française, hélas !

1784. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite et fin.) »

C’est pour le coup que tout le monde n’eût point applaudi et n’eût pas été content, que la famille n’y eût point poussé avec un si beau zèle peut-être, que le confesseur aurait eu un rôle difficile et rare.

1785. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

Et, ne pouvant pousser sa route plus avant, Les chênes l’abritaient du soleil et du vent ; Les tentes, aux rameaux enlaçant leurs cordages, Formaient autour des troncs des cités, des villages, Et les hommes épars sur des gazons épais  Mangeaient leur pain à l’ombre et conversaient en paix : Tout à coup, comme atteints d’une rage insensée, Ces hommes se levant à la même pensée  Portent la hache aux troncs, font crouler à leurs piés  Ces dômes où les nids s’étaient multipliés ; Et les brutes des bois sortant de leurs repaires, Et les oiseaux fuyant les cimes séculaires. 

1786. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

« Il n’est pas sorti de son abattement par une violente secousse : c’est un esprit trop analytique, trop réfléchi, trop habitué à user ses impressions en les commentant, à se dédaigner lui-même en s’examinant beaucoup ; il n’a rien en lui pour être épris éperdument et pousser sa passion avec emportement et audace ; plus tard peut-être : aujourd’hui il cherche, il attend et se défie.

1787. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

Si l’Italie l’avait écouté, elle serait libre ; si elle ne l’est pas, que la responsabilité de ses réactions futures ne retombe pas sur la France, qui a versé son sang pour les Italiens ; mais que cette responsabilité retombe sur le radicalisme d’annexion du cabinet de Turin, et sur l’impulsion intéressée du cabinet de Londres, qui pousse le Piémont aux abîmes, au lieu de guider, comme nous, l’Italie à la régénération et à la liberté.

1788. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIe entretien. La passion désintéressée du beau dans la littérature et dans l’art. Phidias, par Louis de Ronchaud (1re partie) » pp. 177-240

XLIII D’un coup de plume M. de Ronchaud a effacé pour moi vingt années de vicissitudes et de ténèbres ; il m’a reporté à une belle aurore d’une journée de voyage, couché sur le pont de mon navire, et poussé par la main des Néréides, du cap Sunium au Pirée, où, par un vent de terre tiède et frais qui faisait frissonner ma voile, je regardais le blanc mausolée du Parthénon monter et se découper sur le firmament bleu de l’Attique, semblable plutôt à un autel s’élevant vers le ciel pour y faire monter l’encens du matin.

1789. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (3e partie) » pp. 161-219

Si vous aviez continué à occuper ce poste, les choses n’auraient pas été poussées aussi loin.”

1790. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxive Entretien. Réminiscence littéraire. Œuvres de Clotilde de Surville »

L’enthousiasme ne sait pas choisir, il va où l’engouement de son temps le pousse, et le monde des idées est plus mobile encore que celui des réalités.

1791. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

LIII Cependant, la coalition de M. de Chateaubriand avait produit ses fruits ; la garde nationale, pervertie par la presse liguée contre Charles X, avait poussé ce prince téméraire, mais faible, à tout oser contre elle.

1792. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Tout honnête homme qu’il était, il eût fallu qu’il fût bien invraisemblablement scrupuleux pour ne pas estimer innocente la profession d’avocat, où MM. de Port-Royal voulaient pousser en ce temps-là Racine, leur disciple chéri.

1793. (1839) Considérations sur Werther et en général sur la poésie de notre époque pp. 430-451

Ils ont fini par sentir que la vraie poésie de notre époque est celle qui pousse à l’avenir en peignant les profondes souffrances du présent.

1794. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

Henri Duvernois Il ne faut pas me pousser des colles aussi difficiles.

1795. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

« Il parle, il parle, il parle, et son débit écrase, « Comme ces lourds grêlons, qu’en nos champs désolés « Un vent impétueux pousse à coups redoublés.

1796. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre sixième. »

On n’avait pas d’ailleurs cessé un seul jour en France d’écrire ou de parler en latin, en sorte que depuis longtemps, par la religion, par l’usage, par ces grands traits de ressemblance avec le peuple romain, nous inclinions du côté où nous poussait le catholicisme, vainqueur de la Réforme.

1797. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Conclusion »

La pousser plus loin, dire ce qui durera de tout ce que les deux premiers tiers du dix-neuvième siècle ont vu naître d’ouvrages d’esprit, je ne m’en sens pas l’autorité.

1798. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

En revanche, on nous faisait pousser assez loin l’étude des mathématiques.

1799. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juillet 1886. »

Le crescendo qui nous pousse du commencement à la fin de cet acte est d’une véhémence sans exemple.

1800. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VII. Repos »

Tel autre, pour un effet d’art ou dans un élan sincère, poussera le réalisme jusqu’à la brutalité, et il ne me choquera point.

1801. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

Il serait hasardeux, certes, de pousser loin la comparaison et, pour rendre les époques symétriques, on déformerait le détail ; mais plusieurs appellent l’espérance une vertu et ceux-là trouveront le recommencement assez manifeste pour attendre un xviie  siècle historique.

1802. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre X »

Seulement, M. de Jalin met une légèreté gaie dans ses polémiques, il les voile d’élégance et d’aisance mondaine, tandis que M. de Ryons les pousse à la familiarité brutale, à l’agression tyrannique, et met, comme on dit, les pieds dans le plat.

1803. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre premier. La sélection et la conservation des idées dans leur relation à l’appétit et au mouvement. »

Nous verrons d’abord si on ne peut pas pousser plus loin encore qu’on ne l’a fait, dans leur sphère légitime, les explications mécaniques de la mémoire.

1804. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

que de prédispositions et de motifs et de raisons, elle trouvait en elle pour se dévorer et saigner en dedans : d’abord le repoussement par moments d’idées religieuses avec les terreurs d’un enfer de feu et de soufre ; puis la jalousie, cette jalousie toute particulière qui, à propos de tout et de tous, empoisonnait sa vie ; puis, puis… puis le dégoût que les hommes, au bout de quelque temps, lui témoignaient brutalement pour sa laideur, et qui la poussait de plus en plus à la boisson, l’amenait un jour à faire une fausse couche, en tombant ivre-morte sur le parquet.

1805. (1857) Cours familier de littérature. III « XVe entretien. Épisode » pp. 161-239

Un seul vieux chien invalide se traîna péniblement à ma rencontre, et poussa quelques tendres gémissements en léchant les mains de son maître.

1806. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre II : Règles relatives à l’observation des faits sociaux »

C’est seulement ensuite qu’il sera possible de pousser plus loin la recherche, et, par des travaux d’approche progressifs, d’enserrer peu à peu cette réalité fuyante dont l’esprit humain ne pourra jamais, peut-être, se saisir complètement.

1807. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

L’une poussait un faix, l’autre prêtait son dos : L’amour du bien public empêchait le repos.

1808. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VII. M. Ferrari » pp. 157-193

En ces quatre volumes à peine, — par l’histoire des Révolutions d’Italie s’arrête vers le milieu du quatrième, où l’auteur nous apprend tout à coup que sa tâche est finie parce qu’il touche à l’époque de Charles-Quint, et qu’à cette époque l’ère des révolutions est fermée, — il n’y a pas moins (l’auteur s’en est assez vanté) que sept mille révolutions qu’il a mesurées « à l’équerre et au compas », nous dit-il, avec l’orgueil d’un Képler de l’Histoire, Assurément, sept mille révolutions, poussées, bousculées en quinze cents pages à peu près, font un entassement formidable, et on aurait vraiment le droit de se demander comment elles sont passées sous l’angle d’un compas si peu ouvert, pour peu qu’elles méritent le nom qu’on leur donne et qu’elles soient réellement des révolutions !

1809. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

On devra pousser davantage le dessin et même multiplier les chapitres.‌

1810. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre VI. L’espace-temps à quatre dimensions »

La pensée ne saurait y loger un événement, si court fût-il, pas plus qu’on ne pousserait un meuble dans le salon aperçu au fond d’une glace.

1811. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Malgré les raisonnements serrés, lucides, irréfutables, suppliants, tragiques, de son ami, Edouard « n’ose pas »… L’autre, alors, lui pousse un dernier argument : « … Qui sait ce qui peut arriver ? […] Ce qui la pousse, c’est donc la haine toute pure, une haine impersonnelle, — car son mari est un bon mari, — une haine qui s’attache au sexe mâle tout entier, et qui ne voit en lui qu’un instrument malheureusement nécessaire de procréation. […] Cet amour découvert, il reste à le confesser, et cela est difficile, car tous deux sont timides et fiers, et enclins à prendre le plus long… Un ami, également poète, Y aura qu’des poèt’s à c’te noç-là, les devine, les aide, les pousse dans les bras l’un de l’autre. […] C’est elle qui sauvera son vieil ami et qui poussera dans ses bras Jeanne et Pierre et leurs petits, et qui lui enseignera ce qu’il a commencé à deviner : comment il faut aimer à soixante ans.

1812. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Songez à la marée descendante : il semble qu’elle ne descend pas ; elle garde le mouvement, en apparence ascensionnel, des vagues ; elle ne le rétracte que petit à petit, fait des poussées, s’attarde à un rocher où elle mousse en triomphe, s’attarde autour d’une hauteur de sable, a l’air de ne jamais vouloir laisser à nu cet écueil encore, là-bas, presque en pleine mer… Mais si l’on revient quelques heures après, le flot s’est tout à fait retiré, et c’est le roc, le sable, l’écueil et le désert sans marée. […] Il a poussé le dédain de la vie actuelle non seulement jusqu’à voir ce qu’elle avait de las et de médiocre, mais jusqu’à nier ce qu’elle pouvait avoir de renaissant et de beau ; affirmateur, par la beauté de son œuvre, il fut un négateur, quant à la beauté de beaucoup d’autres œuvres ; plusieurs d’entre nous ont dû se défaire de ses injustices. […] Parce qu’Armand Silvestre, selon la bonne et irrésistible loi qui pousse les uns vers les autres les honnêtes esprits, fut un Parnassien, la mode s’est établie de penser que l’auteur de la Gloire du souvenir et de Tristan de Léonois est un très précieux et très raffiné versificateur, uniquement préoccupé de la rime et des trouvailles pittoresques de rythmes et d’images. […] » À vrai dire, Mallarmé ajoute prudemment : « Le seul petit reproche que je me permettrai de vous adresser, c’est d’avoir quelquefois poussé plus loin qu’on n’ose le faire ici même, certaines modes récentes d’unir les vers, qui tendent à supprimer l’hémistiche placé sur un mot rapide ou de son muet.

1813. (1856) Articles du Figaro (1855-1856) pp. 2-6

Pousserons-nous plus loin notre analyse ? […] Barbara, de maîtriser l’attention du lecteur, et de la pousser devant lui, surmenée, hors d’haleine, sous l’éperon de la surprise. — Ce qui vaut mieux encore, c’est que les coups de théâtre et les incidents forcés n’entraient pour rien dans ce résultat : il y arrivait par les moyens les plus simples. […] Mais quelle sacro-sainte fureur vous poussait à refuser à Balzac toute espèce de sens moral ; à persuader à vos lecteurs que l’immortel écrivain devait être rangé parmi les corrupteurs sociaux, les fauteurs d’immoralité ; et que son œuvre contient ces éléments de mort, ces principes de destruction latente, qui empoisonnent les âmes, allument les révolutions et préparent la ruine des sociétés ?

1814. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Ceux qui ont l’honneur d’approcher madame de Girardin assurent même que sa conversation parlée est supérieure à sa causerie écrite, et que toutes ses qualités naturelles, tous ses défauts acquis, tous ses traits prémédités ou spontanés, s’y fondent dans un ensemble merveilleux, éblouissant, qui fait songer à la vraie Corinne un de ses habitués pousse, sur ce-point, l’enthousiasme jusqu’à prétendre qu’elle serait la première femme de son siècle si elle n’avait jamais rien écrit. […] Des académiciens, des pairs de France, des hommes d’État, tous ceux qui avaient gémi de nos équipées littéraires, battirent des mains et poussèrent des cris d’allégresse. […] Ainsi, humiliation ou désappointement de ceux qui avaient cru aux promesses du romantisme, dégoût ou colère de ceux qu’irritait la vogue de la grosse littérature, revanche secrètement désirée par ceux qui avaient regardé comme un scandale chaque victoire de la jeune école, goût de la tradition classique subitement ranimé par mademoiselle Rachel, ressentiment des vaincus, lassitude des vainqueurs, Lucrèce répondait à tout cela : Ajoutez-y cet esprit de réaction, habituel à un pays que le regret de chacune de ses sottises pousse violemment vers l’excès contraire : ajoutez-y les transports de joie des lettrés émérites, des vétérans de la littérature grave, des hommes d’État académiciens, de ces honorables députés qui, tous les ans, à propos de la discussion du budget des Beaux-Arts, protestaient pour les saines doctrines tragiques comme M. de Montalembert pour la Pologne et le général Bertrand pour la liberté illimitée de la presse ; et vous comprendrez que le succès de Lucrèce ait été éclatant, qu’il ait pris ( pour me servir d’une expression dont on abuse) les proportions d’un événement, et que l’œuvre la moins faite en elle-même pour exciter l’enthousiasme ait passionné les esprits au point d’être proclamée comme le symbole d’une restauration, d’une renaissance littéraire. […] Il lève l’interdit ; la France se sent revivre, et pousse un cri de délivrance et de guerre par la mâle poitrine des intrépides compagnons de Philippe : le roi est au désespoir, mais la victoire le consolera, et, le jour où il aura conquis la Normandie, peut-être oubliera-t-il qu’il a perdu Agnès. […] Mais la société est-elle aussi mauvaise, aussi ingrate envers le bien qu’on nous la représente, surtout dans une de ces circonstances solennelles, éclatantes, où l’homme qui pousse la loyauté jusqu’à l’héroïsme appelle nécessairement l’attention publique ?

1815. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Ceux-là, au contraire, Bourget, par exemple, ont voulu considérer ces appétits comme le ferait un savant d’une plante qu’il étudierait, en considérant toutes ses racines, la terre où elle pousse et l’atmosphère où elle se développe. […] « Du jour où le poil vous pousse, ne se sent-on pas un homme prêt à s’ébattre avec toute la force de ses instincts parmi les hommes ? […] L’écrivain est un terrain où la pensée pousse en fleurs de style, larges, hautes et sauvages. […] Je m’aperçois que ce serait sans doute sortir de mon programme que de pousser plus loin mes interrogations sur le magisme ; j’ajoute pourtant : — Il y a, n’est-ce pas, solidarité absolue entre tous les mages, et hiérarchie ? […] Voilà comment le naturalisme peut être mort ; mais ce qui ne peut pas mourir, c’est la forme de l’esprit humain qui, fatalement, le pousse à l’enquête universelle, c’est ce besoin de rechercher la vérité où qu’elle soit, que le naturalisme a satisfait pour sa part.

1816. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

pourquoi a-t-il poussé si vite ses destinées jusqu’à l’Empire ? […] Mais, déterminé en effet par des motifs plus hauts que ces votants que pousse au hasard l’adulation ou l’exemple, j’ai besoin de marquer, dans une conduite semblable, la différence des vues ; il m’importe que ma pensée entière soit connue : n’ayant pu la consigner sur un registre, je la déposerai dans cet écrit.

1817. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

Il n’était poussé ni par une haine héréditaire, ni par un intérêt privé ; il était homme de goût, poli et aimable. […] Il n’est pas à croire que saint Dominique, pour le meilleur archevêché de la chrétienté, eût poussé des pillards féroces à voler et à massacrer une population pacifique et industrieuse, qu’Éverard Digby, pour un duché, eût fait sauter une grande assemblée en l’air, ou que Robespierre eût tué, moyennant salaire, une seule des personnes dont il tua des milliers par philanthropie.

1818. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre V. La philosophie. Stuart Mill. »

Quand je dis que le feu est chaud, je veux dire par là que, lorsque le feu est à portée de mon corps, j’ai la sensation de chaleur. « Quand nous disons d’un esprit qu’il est dévot ou superstitieux, ou méditatif, ou gai, nous voulons dire simplement que les idées, les émotions, les volontés désignées par ces mots reviennent fréquemment dans la série de ses manières d’être1475. » Quand nous disons que les corps sont pesants, divisibles, mobiles, nous voulons dire simplement qu’abandonnés à eux-mêmes, ils tomberont ; que tranchés, ils se sépareront ; que, poussés, ils se mettront en mouvement ; c’est-à-dire qu’en telle et telle circonstance ils produiront telle ou telle sensation sur nos muscles ou sur notre vue. […] En aucune façon, et c’est ici que Mill pousse aux dernières conséquences ; car la loi qui attribue une cause à tout événement n’a pour lui d’autre fondement, d’autre valeur et d’autre portée que notre expérience.

1819. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLe entretien. L’homme de lettres »

L’ouragan des tropiques l’avait poussé dans la fausse rade d’Aral ; voici la fin des naufragés, on ne peut l’abréger: À quelque distance de là, nous vîmes, à l’entrée du bois, un feu autour duquel plusieurs habitants s’étaient rassemblés. […] Il assura qu’il l’avait vu mouiller au-delà de l’île d’Ambre ; en sorte que, si le vent venait à s’élever au matin, il serait le maître de pousser au large ou de gagner le port.

1820. (1864) Le positivisme anglais. Étude sur Stuart Mill

« Quand nous disons d’un esprit qu’il est dévot ou superstitieux, ou méditatif, ou gai, nous voulons dire simplement que les idées, les émotions, les volontés désignées par ces mots reviennent fréquemment dans la série de ses manières d’être4. » Quand nous disons que les corps sont pesants, divisibles, mobiles, nous voulons dire simplement qu’abandonnés à eux-mêmes, ils tomberont ; que, tranchés, ils se sépareront ; que, poussés, ils se mettront en mouvement ; c’est-à-dire qu’en telle et telle circonstance ils produiront telle ou telle sensation sur nos muscles ou sur notre vue. […] En aucune façon, et c’est ici que Mill pousse aux dernières conséquences ; car la loi qui attribue une cause à tout événement n’a pour lui d’autre fondement, d’autre valeur et d’autre portée que notre expérience.

1821. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

Amené, par une pente invincible, de la profanation de l’amour à la profanation de l’art, il a noblement exprimé une pensée qui sommeille au fond de bien des âmes, et qui se révélerait par une plainte unanime, si toutes les lèvres savaient parler ; il a montré comment le mépris de la passion sincère, de la passion pure et désintéressée, mène fatalement au mépris de la pensée elle-même, et de toutes les œuvres de la pensée, comment le plaisir, prenant la place de l’amour, diminue les sympathies de la multitude pour la poésie, la peinture, la statuaire, et comment, à son tour, le mépris de l’art pousse la multitude aux jouissances brutales. […] L’auteur a pris la peine de transcrire, d’après les pièces du procès, tous les cris poussés par chacun des patients pendant les épreuves successives de la torture. […] Or, la tragédie, ramenée à son expression la plus générale, ne se propose-t-elle pas l’analyse et la peinture de la douleur morale, des passions qui agitent l’âme humaine, et qui la poussent au désespoir et au crime ? […] Dans celui qui le soutenait et qui marchait près de lui, il ne veut plus voir qu’une plante parasite, incapable de pousser par elle-même des branches vigoureuses et feuillues ; il s’attribue, dans les jours qui ne sont plus, une force et un courage qu’il n’avait pas ; de son ami, il fait un disciple obéissant ; il oublie les clameurs envieuses, les railleries insultantes que seul il eût écoutées en frémissant, et auxquelles il n’eût peut-être pas résisté si personne n’eût été près de lui pour relever son courage ; il oublie les conseils qu’il a reçus, les conversations pleines de franchise et d’entraînement où il a puisé plus d’une leçon imprévue.

1822. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Comme le hardi assaillant qui veut s’enlever jusqu’à l’idée de redescendre du créneau sanglant où l’a élancé son courage, pousse et brise de son pied son échelle inutile, ici le poète renverse au-dessous de lui toutes ces notions sur lesquelles reposent les inventions les plus aventurées des poètes. […] Ils y ont trouvé un reste du genre humain ; une meute d’empires que le Néant menait en laisse, s’en allaient par mille et mille sentiers, l’oreille basse, le chef enclin, chercher leur Dieu qui fuit plus loin ; et toujours dévoyés, l’un fouille l’abîme, l’autre passe, et puis regarde, qui se dépite, qui retourne en arrière, qui pousse un cri dont la terre tremble ; et chacun se met en quête, et veut hurler à son tour, et dévorer avant le soir sa part d’une ombre. […] … Allons voir si nous nous sommes trompés quand nous buvions notre sang comme l’eau, quand nous poussions la roue de notre chariot de guerre, et quand nous faisions depuis mille ans la sentinelle sur le bord de la haute tour que le genre humain s’était bâtie. […] Je me fais mille chimères sur l’amour divin : si je pouvais le goûter, sûrement elles se dissiperaient ; car c’est une folie plus forte que moi qui me pousse à aimer plus que d’amour, et à adorer je ne sais quoi dont je ne sais pas même le nom. […] Qu’est-ce donc que toute cette sapience régénératrice, maîtresse du présent, reine ‘ de l’avenir, sinon la même qui a coulé, en tout temps des lèvres de tous les sages, sans jamais combler l’abîme de nos douleurs et de nos angoisses, et sans avancer l’humanité d’un seul pas vers le terme ou la poussent. aujourd’hui si hardiment les espérances chrétiennes ?

1823. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

.] — Quelques caractères de la maladie : — ne rien nommer par son nom, mais procéder toujours par périphrase, allusion, ou sous-entendu ; — exagérer plaisamment les petites choses, et abaisser les grandes au ton de la conversation ; — jouer sur les mots, faire des pointes, des concetti, des agudezas, Ne dis plus qu’il est amarante Dis plutôt qu’il est de ma rente ; tirer des comparaisons d’où l’on ne les attendait point ; — pousser à bout ses métaphores [Cf.  […] La Jeunesse de Corneille. — Fausse idée que l’on se fait d’un Corneille constamment héroïque ; — et qu’au contraire ses débuts ont été d’un poète comique. — Mélite, 1629 ; Clitandre, 1632 ; La Veuve, 1633 ; La Galerie du Palais, 1633 ; La Suivante, 1634 ; La Place Royale, 1634 ; L’Illusion comique, 1636. — Intérêt littéraire des comédies de la jeunesse de Corneille. — Elles ne doivent rien à l’imitation de l’étranger ; — ce sont des aventures de la vie commune à peine « romancées » ; — et dont les personnages sont déjà de condition presque bourgeoise. — La galanterie dans les comédies de Corneille ; — et qu’elle y est une parfaite imitation du langage des ruelles ; — et, à ce propos, qu’il y a un style Louis XIII en littérature comme en architecture. — La « jeune fille » dans les comédies de Corneille ; — le style des comédies. — Caractère singulier de L’Illusion comique ; — et d’où viennent, vers 1635, tant de comédies des comédiens. — Médée, la première tragédie de Corneille. — Quelles raisons ont poussé Corneille, vers la tragédie [Cf.  […] Dans la nature de son éloquence et de son style. — Bourdaloue est le plus continûment éloquent de nos prédicateurs. — Par où l’on veut dire : — qu’il répand une lumière égale sur toutes les parties de son sujet ; — que le mouvement ordinaire de son éloquence a moins de variété que d’ampleur ; — et qu’il n’a presque point de traits ni de morceaux. — Simplicité du style de Bourdaloue. — Son dédain de toute rhétorique, — et si peut-être il ne l’a pas poussé au-delà des justes bornes ? […] 3º Les Œuvres. — Les Œuvres de Perrault se composent : 1º d’un certain nombre de pièces de circonstance, telles que le Discours sur l’acquisition de Dunkerque par le Roi, 1663, ou Le Parnasse poussé à bout, sur la difficulté de décrire la conquête de la Franche-Comté, 1668 ; — 2º de son Poème sur la peinture, 1668 ; de son Saint Paulin, 1686 ; de son Siècle de Louis le Grand, 1687 ; — 3º de ses Parallèles, cinq dialogues en quatre volumes, publiés, ainsi qu’il a été dit, de 1688 à 1696 ; et auxquels il faut joindre, comme tendant au même but, son recueil des Hommes illustres, 1696-1700 ; — et enfin, 4º de ses Contes de fées, qui sont : — La Belle au bois dormant, Le Petit Chaperon Rouge, La Barbe bleue, Le Chat botté, Les Fées, Cendrillon, Riquet à la houppe, Le Petit Poucet, en prose ; — et Griselidis, Peau d’âne, et Les Souhaits ridicules, en vers. […] La jeunesse de Fénelon. — Sa famille ; — ses premières études : Cahors, le collège du Plessis, et le séminaire de Saint-Sulpice. — Ses lettres de jeunesse [à Bossuet, à la marquise de Laval] ; — et qu’elles sont marquées aux signes de la préciosité. — Il est nommé directeur des Nouvelles catholiques. — S’il en faut croire Saint-Simon sur les intrigues de l’abbé de Fénelon pour se pousser ?

1824. (1903) Hommes et idées du XIXe siècle

Et l’on réfléchit que ces sentiments si adroitement agencés ne semblent pas indiscutables… et qu’enfin, pour pousser à bout cette comparaison digne d’un ingénieur préposé aux enclenchements, cette mécanique exploitation de la psychologie ne pouvait, comme sur nos grandes voies ferrées, échapper à quelque catastrophe ». […] Ils pousseraient la liberté d’esprit jusqu’à la désinvolture, et, préoccupés avant tout de l’élégance, ils seraient prêts à sacrifier à ce souci un peu frivole les raisons mêmes qu’a la critique d’exister. […] Au temps de la Révolution, il eût été Danton, eût fait couper des têtes et, sous la pression de la Terreur, poussé ses compatriotes aux frontières. […] Si grands sont les services qu’il a rendus que c’en est encore le moindre d’avoir sauvé de la misère des provinces entières et défendu de grandes industries contre la ruine ; il a lutté victorieusement contre la maladie et la mort, rayé de la surface de la terre des fléaux dont le souvenir assombrit l’histoire, fait taire des cris que la douleur n’avait cessé de pousser à travers les siècles, épargné à des milliers de créatures aimantes les deuils les plus atroces, et fait courir à travers l’humanité, avide de moins souffrir, une immense espérance qui ne sera pas déçue. […] Son style est maniéré, contourné, alambiqué, poussé à l’effet, peinturluré, surchargé et surchauffé, et il n’y manque aucune des variétés de la prétention.

1825. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « L’abbé Fléchier » pp. 383-416

Il caresse volontiers son idée jusqu’au bout et concerte son expression ; il pousse et redouble à plaisir son antithèse.

1826. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. » pp. 124-157

Ses projets mûrissent toujours Sa graine germe et pousse ; Le bouton, amer quelques jours Donne une fleur plus douce.

1827. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

Le plus léger des houzards romantiques, M. de Stendhal, poussait des pointes en divers sens ; des esprits studieux et libres, comme M.

1828. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

Par malheur, en 1815, pendant les Cent-Jours, quelques circonstances particulières, que sans doute elle s’exagéra, la poussèrent à craindre pour des papiers si pleins de choses et de noms : ce qui est véridique est presque toujours terrible.

1829. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

Diderot le pousse à bout jusque dans l’emphase larmoyante ou furibonde, par des exclamations, des apostrophes, des attendrissements, des violences, des indignations, des enthousiasmes, des tirades à grand orchestre, où la fougue de sa cervelle trouve une issue et un emploi  En revanche, parmi tant d’écrivains supérieurs, il est le seul qui soit un véritable artiste, un créateur d’âmes, un esprit en qui les objets, les événements et les personnages naissent et s’organisent d’eux-mêmes, par leurs seules forces, en vertu de leurs affinités naturelles, involontairement, sans intervention étrangère, de façon à vivre pour eux-mêmes et par eux-mêmes, à l’abri des calculs et en dehors des combinaisons de l’auteur.

1830. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 321-384

— Ne vous attristez pas, disait-il à ma belle-sœur, à sa fille et à Hyeronimo, le capitaine est de bon cœur ; il ne veut que ce qui lui revient, il ne poussera pas les choses à l’extrême ; il m’a chargé de vous ménager.

1831. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

IV Nous ne pousserons pas plus loin la démonstration de l’incompatibilité de la vie publique dans les femmes avec la vie domestique qui leur a été dévolue, non par la loi, mais par la nature, oracle de la loi.

1832. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Quelquefois je rougissais subitement, et je sentais couler dans mon cœur comme des ruisseaux d’une lave ardente ; quelquefois je poussais des cris involontaires, et la nuit était également troublée de mes songes et de mes veilles.

1833. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Mme Desbordes-Valmore » pp. 01-46

Qui aura jamais poussé l’amour triste plus loin que moi pour eux ?

1834. (1912) Enquête sur le théâtre et le livre (Les Marges)

Rachilde Je pense que la société contemporaine a le goût de l’exhibition poussé au point précis où commence la névrose.

1835. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

Ce courant magnétique des harmonies progresse donc à travers elles de même qu’un objet entraîné par son poids, sur un plan incliné, roule et se meut selon presque l’horizontale, bien que ce poids même le pousse dans la direction verticale.

1836. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre cinquième »

Il y en a eu depuis lors, et d’éminents, aux yeux de qui Agamemnon est un bon ouvrage ; et la preuve que l’étude des modèles n’inspire pas si mal, c’est que l’originalité très réelle de Lemercier, — et il la poussa souvent jusqu’à se lasser d’être raisonnable, — ne lui a rien suggéré de mieux.

1837. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre V. Le Séminaire Saint-Sulpice (1882) »

La nécessité de pousser aussi loin que possible mes études d’exégèse et de philologie sémitique m’obligea d’apprendre l’allemand.

1838. (1913) La Fontaine « VIII. Ses fables — conclusions. »

Les hommes de 1660 sont en réaction contre le premier romantisme français, qui est, non pas de 1830, mais de 1630 ; ils sont en réaction contre l’école de la fantaisie, de l’imagination libre et un peu désordonnée, aussi de la littérature burlesque, c’est-à-dire de la littérature qui pousse l’imagination et la fantaisie jusqu’à cet extrême désordre et cet extrême abandonnement… Et qu’est-ce qu’ils sont en eux-mêmes ?

1839. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Première partie. De la parole et de la société » pp. 194-242

Mais ni le président de Brosses ni Court de Gébelin ne sont descendus assez avant, n’ont poussé assez loin leurs conséquences.

1840. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

Dans tout effort intellectuel il y a une multiplicité visible ou latente d’images qui se poussent et se pressent pour entrer dans un schéma.

1841. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Les gens, poussés d’ailleurs par les courtisans du succès, sont descendus si bas — je l’ai dit, ne faut-il pas le répéter ?  […] C’est ainsi que les grandes convulsions, guerres ou révolutions, stérilisantes dans l’immédiat, fécondent le tout proche avenir, achèvent de pousser dans l’oubli telles règles ou telles modes qui menaçaient de perpétuer leur désuétude : la Grande Révolution porte le coup suprême au Classicisme qui se survivait languissamment dans un épuisement abominable, incapable de produire œuvre de vie et fertile seulement en monstruosités. […] Pour trouver et combiner les développements et les péripéties de son poëme ou de son drame, il n’a eu qu’à pousser à leurs extrêmes conséquences ses sentiments imaginaires, mais sincères, les sentiments qui lui ont bouleversé l’âme alors qu’il se demandait, exalté par la propre fumée de son génie et par l’électricité de l’air orageux : « Si j’avais la toute-puissance, que ferais-je de mes ennemis, que ferais-je du monde ?  […] C’est le plus clairvoyant et le plus insouciant des Romantiques, le plus gai, pourtant aussi celui qui poussa les plus douloureux cris. […] Nous les suivons du regard, figures pâles, figures colorées, agitées de maladies, névroses ou chloroses, poussées par la faim, par l’ivresse, par la sensualité, unies ou séparées par la communauté ou par la différence de leurs besoins, — toutes des figures sur qui pèse la Fatalité d’un vice physique ou d’une hérédité de folie. — La Fatalité !

/ 2003