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1121. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre troisième. La volonté libre »

Ce serait donc la parfaite attribution au moi, qui, nous l’avons vu, est la première condition de la liberté. […] Cette parfaite détermination de l’avenir dans ma pensée prouve que mon avenir, ici, dépend véritablement de moi, être conscient et raisonnable, non de telle ou telle influence extérieure, non de telle passion, qui se réduirait elle-même à une action extérieure et à une perturbation nerveuse.

1122. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse sociologique »

Pour la peinture, il faut que ceux qui l’aiment possèdent de délicates sensations visuelles correspondant au dedans à une organisation parfaite et à un développement extrême des appareils récepteurs de sensations colorées, dont un beau tableau doit être le résumé harmonieux. […] Ceux qui, lisant un livre, frémissent d’aise d’y trouver exprimées, en une langue parfaite, les idées qui leur sont sourdement chères ; ceux qui, devant un tableau, sentent leurs prunelles et tout leur être natté et comme vivifié par l’accord de nuances sombre ou violent, par la noblesse ou la ferveur de la composition ; ceux que transporte et qu’anéantit quelque pathétique andante ou le caprice d’un scherzo, sont les frères en esprit de l’homme chez qui ces œuvres sont d’abord écloses.

1123. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

La politique était toujours le premier texte de l’entretien : l’élévation du site, la solitude du lieu, la discrétion des rochers, qui inspiraient, dans ces temps suspects, une parfaite sécurité aux interlocuteurs, la confiance absolue qu’ils avaient les uns dans les autres, laissaient s’épancher leurs âmes dans l’abandon de leurs pensées. […] Ils me rappelèrent bien plus vivement cette scène, longtemps après, quand, visitant moi-même Athènes, la colline de l’Acropole, la roche taillée du Pnyx et les pentes dénudées du Pentélique, je reconnus une ressemblance parfaite entre ces collines rocailleuses de l’Attique et les collines ruisselantes de pierres de mon pays.

1124. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

« Quant à ceux qui ont voulu assimiler ce drame à une simple pastorale, comme s’il s’agissait ici de bergeries et de moutons à la manière de Florian, nous conviendrons volontiers avec eux que le premier acte se rapproche en effet de ce genre, et qu’il nous offre un modèle de l’idylle aussi parfait qu’il ait été conçu par aucun des meilleurs poètes bucoliques de l’antiquité ; mais, pour le reste, nous leur demanderons dans quelle espèce de pastorale ils ont jamais vu le pathétique, la noblesse, l’élévation des sentiments portés au point où ils le sont généralement dans ce drame, le quatrième acte surtout, qui, sous ce point de vue, nous semble avoir atteint le comble de la perfection. […] Depuis que mes yeux se sont portés sur cet étranger, j’éprouve une émotion tout à fait contraire au calme parfait que devrait seule inspirer cette sainte retraite !

1125. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

Partout on les retrouve en pleine possession d’eux-mêmes, en pleine conscience de leur liberté, en parfaite confiance dans la puissance de leurs facultés et dans l’efficacité de leurs œuvres. […] L’ordre, l’ordre moral s’entend, est la parfaite harmonie des moyens et de la fin.

1126. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

S’il était demeuré en parfaite union avec d’Alembert, ils auraient pu gouverner la compagnie ; mais ils se brouillèrent, et, même après le rapprochement, il en resta quelque chose.

1127. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — II. (Fin.) » pp. 398-412

Il est surtout un passage de son récit qui m’a paru charmant au milieu de sa recherche, et bien touchant d’invocation à travers sa grâce un peu affectée ; je vais le traduire aussi fidèlement que possible : on y verra un contraste parfait avec la manière et le ton de Villehardouin ; ce sont les deux civilisations et les deux littératures en présence.

1128. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — I. » pp. 131-146

À quoi Jeannin répondit en riant : « Oui, mon père, c’est moi, et j’en ai bien fait d’autres depuis que je ne vous ai vu : mais il faut commencer à devenir sage et à étudier. » Ce qui paraît certain, c’est que de bonne heure, et dès ses premiers exercices aux écoles publiques, il se fit remarquer, au milieu de ses vivacités, pour être d’un parfait et merveilleux jugement, « et capable de terminer un jour les différends des hommes ».

1129. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — II. (Suite.) » pp. 463-478

Pour lui, laissant là en arrière ses compagnons et son guide, et retrouvant son sentiment allègre des hautes Alpes, il se met à gravir seul et en droite ligne vers la cime : « Je l’atteignis en peu de temps, et, du bord d’un précipice effroyable, je vis un monde à mes pieds. » C’est ici qu’il entre dans une description parfaite et de ce que la vue embrasse du côté des plaines, et des rangées de monts qui s’étagent en amphithéâtre au midi, et des collines et pâturages plus rapprochés qui s’élèvent du fond du précipice vers la pente escarpée du Pic et forment un repos entre sa cime et sa base : Là, dit-il, j’apercevais la hutte du berger dans la douce verdure de sa prairie ; le serpentement des eaux me traçait le contour des éminences ; la rapidité de leur cours m’était rendue sensible par le scintillement de leurs flots.

1130. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

Au fond, il ne s’agit que d’un ou plusieurs moulins à prendre et à brûler, et Montluc, qui a bien de l’esprit, au moment d’entrer dans ce récit tout sérieux, comme s’il avait deviné que don Quichotte faisait quelque chose de pareil vers le même temps, se permet par précaution un petit sourire : « Or, pour déduire cette entreprise, dit-il, encore que ce ne soit pas la conquête de Milan, elle pourra servir à ceux qui en voudront faire leur profit. » Après cette légère précaution, il n’omet plus rien du détail et des circonstances du stratagème, et en fait un parfait modèle et un exemple à suivre.

1131. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Appendice » pp. 453-463

elle a répondu avec ardeur, avec feu et sur tous les tons, à l’appel et au vœu des fondateurs du concours, non pas qu’il soit sorti de cette mêlée générale, où 251 concurrents étaient aux prises, une œuvre achevée, complète, et qui réunisse toutes les conditions que les législateurs d’autrefois en ces matières eussent exigées pour une parfaite couronne ; mais il y a nombre de pièces, et même parmi celles qu’on a eu le regret de devoir éloigner, où s’est montrée l’empreinte du talent, le signe distinctif du poète ; et quelques-unes enfin dans lesquelles, d’un bout à l’autre, un souffle heureux a circulé.

1132. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — I — Vauvenargues et Fauris de Saint-Vincens » pp. 1-16

C’est une garantie de plus pour la parfaite sincérité.

1133. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — II » pp. 107-121

Toutes les formes gouvernementales ne sont à mes yeux que des moyens plus ou moins parfaits de satisfaire cette sainte et légitime passion de l’homme. » Lorsqu’on entre dans la politique avec une telle visée, on court risque de rencontrer sur son chemin bien des mécomptes.

1134. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

De plus, il a cela de particulier d’être un pur produit de l’armée républicaine d’Italie, et celui de ses enfants peut-être qu’elle eût pu présenter le plus avantageusement comme parfait émule en regard et en contraste d’un enfant de l’armée du Rhin.

1135. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

Si l’on essaye pourtant (car la pensée va d’elle-même) de se figurer ce qu’eût été Joubert devenu maréchal d’Empire, il me semble que l’illustre maréchal Suchet nous en donne assez bien l’idée : un militaire brave, instruit, progressif, un parfait lieutenant, capable de conduire à lui seul des opérations circonscrites, administrateur habile et intègre, combinant des qualités militaires et civiles, se faisant aimer même dans les pays conquis.

1136. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 64-81

Nous y retrouvons de petits romans dans lesquels tout est beau et parfait d’une part, tout est laid et gâté de l’autre, selon qu’on est ou qu’on n’est pas bon catholique.

1137. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Lettres de Madame de Sévigné »

Il avait réussi, croyait-il sincèrement, à la rendre plus parfaite, plus irréprochable de diction.

1138. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Contes de Perrault »

C’est assez que, dans sa rédaction parfaite (je ne parle par des moralités en vers qu’il ajoute), il ait conservé le cachet de la littérature populaire, la bonhomie.

1139. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Campagnes de la Révolution Française. Dans les Pyrénées-Orientales (1793-1795) »

Fervel avec une ardeur qui ne nuit en rien à la parfaite lucidité.

1140. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

Qui n’a connu un talent que tard et ne l’a apprécié que dans son plein ou dans ses œuvres dernières ; qui ne l’a vu jeune, à son premier moment d’éclat et d’essor, ne s’en fera jamais une parfaite et naturelle idée, la seule vivante.

1141. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Le jeu de mots, comme il arrive quelquefois, a conduit à la vive et parfaite vérité.

1142. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

» — Pour le bien expliquer, il faut, dit le père, reprendre les choses dès l’origine. » Et ici commence tout un récit fort admiré des Anciens, proposé comme un modèle de narration aux orateurs eux-mêmes par Cicéron, qui y fait remarquer le développement approprié, le mouvement dramatique, le parfait naturel des personnages introduits et des paroles qu’on leur prête, et, par instants, mais par instants seulement, la brièveté excellente, qui à toute cette abondance persuasive ajoute une grâce.

1143. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

Bignon, dans ses Souvenirs, a un avantage sur M. de Senfft dont il ne prévoyait pas les sévérités : il le réfute de la manière la plus propre à faire impression sur des lecteurs impartiaux ; il parle avec justice, et dans une parfaite mesure, de celui qui en a manqué à son égard : « M. de Sentit, dit-il, était en 1811 et est resté jusqu’à la fin de 1812 zélé partisan du système français (on le croyait, et il paraissait tel sans l’être au fond).

1144. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires du comte Beugnot »

Beugnot est un esprit des plus fins, des plus prompts à saisir les ridicules ; et il ne sort jamais, en les exprimant, de la ligne de la parfaite urbanité.

1145. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite.) »

Voilà la façon de penser du plus sincère ami que vous ayez et qui s’appelle Louis de Bourbon. » Nous aurions dès ce moment, si c’était le lieu, à faire quelques remarques sur le style particulier de ce prince du sang, style médiocre, délayé, imagé pourtant, mais d’images volontiers basses et communes, comme de quelqu’un qui use avec un parfait sans gêne des plaisanteries courantes dans le populaire et jusque sur le théâtre de la Foire.

1146. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite et fin.) »

Et osera-t-on bien comparer aussi, du plus loin qu’on veuille s’y prendre, à cette dame plus que vulgaire de Tourvoie, Mme de Montesson, qui tenait dans les dernières années la Cour du duc d’Orléans et qui réussit à être épousée ; celle-ci, une vraie madame de Maintenon en diminutif, un parfait modèle de maîtresse de maison dans la plus haute société, faible auteur de comédies sans doute, mais actrice de salon excellente, ingénieuse dans l’art de la vie et dans la dispensation d’une fortune princière, personne « de justesse, de patience et de raison », qui ne pouvant, sur le refus du roi, être reconnue pour femme légitime, sut par son tact sauver une position équivoque, éviter le ridicule et désarmer l’envie, saisir et observer, en présence d’un monde malin et sensible aux moindres nuances, le maintien si délicat d’une épouse sans titre ?

1147. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre IV. De l’amour. »

Mais s’il est dans l’univers deux êtres qu’un sentiment parfait réunit, et que le mariage a lié l’un à l’autre, que tous les jours à genoux ils bénissent l’Être Suprême ; qu’ils voient à leurs pieds l’univers et ses grandeurs, qu’ils s’étonnent, qu’ils s’inquiètent même d’un bonheur qu’il a fallu tant de chances diverses pour assurer, d’un bonheur qui les place à une si grande distance du reste des hommes ; oui, qu’ils s’effrayent d’un tel sort.

1148. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre V. La Fontaine »

Il n’y a rien d’inconscient dans son génie ; il est tout clair, avisé, réfléchi ; et il faut qu’il ait nettement conçu et la qualité de son naturel et le caractère de son idéal pour les réaliser dans des œuvres parfaites.

1149. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Gaston Paris et la poésie française au moyen âge »

Il est sûr, d’autre part, que le moyen âge n’a jamais su exprimer complètement, dans des ouvrages parfaits, cette poésie qui était en lui.

1150. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort »

La convenance était parfaite de l’instrument avec la tâche.

1151. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre X. La commedia dell’arte en France pendant la jeunesse de Molière » pp. 160-190

Si nous en croyons Le Boulanger de Chalussay, l’auteur d’Élomire hypocondre, Molière aurait positivement reçu de Scaramouche des leçons de pantomime, et lui aurait dû ses progrès dans l’art du comédien : ………… Par exemple, Élomire Veut se rendre parfait dans l’art de faire rire ; Que fait-il, le matois, dans ce hardi dessein ?

1152. (1890) L’avenir de la science « XII »

Il y a une merveilleuse grandeur et une profonde philosophie dans la manière dont les anciens Hébreux concevaient le gouvernement de Dieu, traitant les nations comme des individus, établissant entre tous les membres d’une communauté une parfaite solidarité, et appliquant avec un majestueux à-peu-près sa justice distributive.

1153. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXIV. Arrestation et procès de Jésus. »

Son récit, en effet, est en parfait accord avec ce que l’histoire nous apprend de la situation réciproque des deux interlocuteurs.

1154. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre II. L’analyse interne d’une œuvre littéraire » pp. 32-46

Un traité de géométrie, une lettre d’affaires, un manuel de la parfaite cuisinière n’ont rien à voir d’ordinaire avec la littérature.

1155. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Imaginons-le si harmonieux qu’il y ait accord parfait entre les tendances de tous les êtres qui le composent.

1156. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Poésies nouvelles de M. Alfred de Musset. (Bibliothèque Charpentier, 1850.) » pp. 294-310

» Byron a raison de parler ainsi pour lui et les siens ; mais il y a en regard et au-dessus l’école de Virgile, de celui qui voulait brûler son poème, parce qu’il ne le trouvait pas de tout point assez parfait.

1157. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le cardinal de Retz. (Mémoires, édition Champollion.) » pp. 238-254

Il mourut le 24 août 1678, tendrement regretté d’elle et loué dans des termes qui sont la plus belle oraison funèbre, laissant l’idée de l’homme le plus aimable et du commerce le plus aisé, et d’un délicieux et parfait ami.

1158. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

« Il est bon, s’écrie-t-il, d’être lassé et fatigué par l’inutile recherche du vrai bien, afin de tendre les bras au Libérateur. » On n’a jamais mieux fait sentir que lui ce que c’est que la foi ; la foi parfaite, c’est « Dieu sensible au cœur, non à la raison. — Qu’il y a loin, dit-il, de la connaissance de Dieu à l’aimer ! 

1159. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Walckenaer. » pp. 165-181

Parmi les notes et extraits de ses lectures, qui datent de cette époque, on lit comme par pressentiment une pensée de Mme de Sévigné : « Ne quittez jamais le naturel, cela compose un style parfait. » Pour le préserver pourtant, quelques années encore, des amorces d’un monde trop présent et pour diversifier ses études, M. 

1160. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre troisième. L’idée-force du moi et son influence »

Par cela même, chez un être sensible, la plus parfaite unité de forces vitales produit un sentiment de vie plus intense, c’est-à-dire un plaisir et, comme conséquence, une tendance croissante à la concentration des forces, un accroissement de gravitation intérieure.

1161. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre III. Le cerveau chez l’homme »

Je n’oserais pas contester ce tableau si saisissant et si spécieux, et qui paraît vrai dans sa généralité ; mais d’une part Gall voyait tout avec son imagination, et d’un autre côté, quand on a quelque expérience de ces questions, on sait qu’il est bien rare que les faits s’y présentent avec cette parfaite simplicité.

1162. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 13, qu’il est des sujets propres specialement pour la poësie, et d’autres specialement propres pour la peinture. Moïens de les reconnoître » pp. 81-107

Tous les traits que Moliere emploïe pour craïonner son misantrope, ne sont pas également heureux, mais les uns ajoutent aux autres, et pris tous ensemble, ils forment le caractere le mieux dessiné et le portrait le plus parfait qui jamais ait été mis sur le théatre.

1163. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

Ne pouvant donner à la copie une parfaite ressemblance, il doit craindre de ne lui pas donner tout ce qu’elle peut avoir.

1164. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

Le tome I : le Vice suprême est en opposition parfaite avec le tome XIV et dernier : la Vertu suprême, et l’on note encore : VIII, l’Androgyne, IX, le Gynandre, X, le Panthée, XIII, Finis Latinorum.

1165. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre XI. Seconde partie. Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère de la littérature et des arts » pp. 326-349

Nous devons renoncer désormais à cette critique verbale qui n’entre point dans le fond des choses, qui s’attache surtout aux formes du style, à l’économie d’une composition, à l’observance de certaines règles, à la comparaison superstitieuse avec les modèles, sorte de critique secondaire dont M. de La Harpe est souvent un modèle si parfait.

1166. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Les deux cathédrales »

Écoutez-le, ou plutôt écoutez son sosie, Durtal101, s’abîmer en extase devant le sanctuaire : « Elle est un résumé du ciel et de la terre ; du ciel dont elle nous montre la phalange serrée des habitants, Prophètes, Patriarches, Anges et Saints éclairant avec leurs corps diaphanes l’intérieur de l’Église, chantant la gloire de la Mère et du Fils ; de la terre, car elle prêche la montée de l’âme, l’ascension de l’homme ; elle indique nettement, en effet, aux chrétiens, l’itinéraire de la vie parfaite     Et cette allégorie de la vie mystique, décelée par l’intérieur de la Cathédrale, se complète au dehors par l’aspect suppliant de l’édifice.

1167. (1929) Amiel ou la part du rêve

N. est dans sa parfaite clarté et dans son art d’exposition. […] Pour qu’une femme me remplaçât toutes les autres, il la faudrait mobile comme l’onde et parfaite comme la lumière. » L’auteur du Journal recule devant le mannequin d’osier que, pour les philosophes de cette rare espèce, toute femme contient en puissance. Il lui préfère l’osier inutile et frais du rivage, entre l’onde mobile et la parfaite lumière. […] Elle deviendrait une femme parfaite. […] Le jour s’exhale en musique parfaite, « couronné de verveine et de roses.

1168. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

L’arrangement des mots n’a rien de laborieux ; l’art du poète est si parfait, qu’il réussit à se cacher tout entier. […] Il est impossible de lire sans émotion cette pièce dont chaque vers respire la sincérité la plus parfaite. […] Le Triomphe de la Mort, où le poète raconte la mort de Laure, est assurément un des morceaux les plus parfaits qui soient sortis de sa plume. […] En vérité, tout ce troisième acte est d’une niaiserie si parfaite, tous ces courtisans jouent à la scélératesse avec une candeur si imperturbable, que M.  […] Il est facile, en effet, de saisir la concordance parfaite du parti légal et du parti épiscopal.

1169. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

Mais la parfaite réussite des amours supprimerait la poésie élégiaque. […] Nous lui voulons, dans les manières et le costume aussi, une parfaite élégance. […] Brigitte si douce et parfaite, il ne saurait la comprendre. […] Quelqu’un l’aime : le jeune Célio, amoureux parfait. […] Et de belles épaules, des mains parfaites.

1170. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

C’est la vie des salons qui a dégrossi les hommes : il a fallu la société des dames, le manque d’intérêts sérieux, l’oisiveté, la vanité, la sécurité, pour mettre en honneur l’élégance, l’urbanité, la plaisanterie fine et légère, pour enseigner le désir de plaire, la crainte d’ennuyer, la parfaite clarté, la correction achevée, l’art des transitions insensibles et des ménagements délicats, le goût des images convenables, de l’aisance continue et de la diversité choisie. […] Des expressions terribles viennent accabler les oppresseurs des livres, les profanateurs de la pensée, les assassins de la liberté, « le concile de Trente et l’inquisition, dont l’accouplement a engendré et parfait ces catalogues et ces index expurgatoires, qui fouillent à travers les entrailles de tant de vieux et bons auteurs par une violation pire que tous les attentats contre leurs tombes478. » Des expressions égales flagellent les esprits charnels qui croient sans penser et font de leur servilité leur religion. […] Ainsi égaré ou gâté, il n’a pu produire d’œuvre parfaite : il n’a écrit que des pamphlets utiles, commandés par l’intérêt pratique et la haine présente, et de beaux morceaux isolés, inspirés par la rencontre d’une grande idée et par l’essor momentané du génie. […] Dans la première, lyrique et philosophe, possesseur d’une liberté poétique plus large et créateur d’une illusion poétique plus forte, il produit des odes et des chœurs presque parfaits.

1171. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

C’est le parfait gentilhomme étranger, naturalisé par le génie dans la vraie patrie des lettres. […] Les larmes qu’on répand ont le même goût, la sensibilité est la même, le récit est aussi parfait, la main aussi délicate. […] La parfaite vérité, la naïveté touchante des personnages, la simplicité vraisemblable et probablement vraie des aventures vous retiennent et vous captivent fortement par le charme sans prétention de l’auteur. […] Dans le monde entier, il n’en existe pas un pareil ; un régiment merveilleux ; colonel, officiers…, tout était parfait… Mais vous, avec votre blonde figure, votre taille mince, vous seriez mieux dans les uhlans.

1172. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Considérez encore qu’elles furent faites pour ce qu’elles font, que leur nature est conforme à leur destinée, qu’elles sont parfaites sans effort. […] Puis une seconde d’oubli parfait, insondable, comme si la morte, prise de pitié, s’était enfin laissé corrompre. » Mais cette fois, il a péché contre l’idéal. […] Ami des arts, bon patriote, fonctionnaire exact, il fut parfait. […] L’autre était-il donc parfait ? […] Elle est la préférée des croyants et des simples, des artistes épris de symboles, des délicats, qui recherchent la forme achevée et parfaite.

1173. (1910) Études littéraires : dix-huitième siècle

Eh bien, j’en vois un où il n’y a guère que des gens parfaits, et un autre où il n’y a guère que de plats gueux et des femmes perdues. […] Faudrait-il aux hommes parfaits un peu d’orgueil et de mépris, c’est-à-dire un défaut, pour être tout à fait dans le vrai ? […] Il croit que tout, même le mal, est réglé et voulu par une parfaite intelligence en vue d’une fin supérieure ; et par conséquent que tout est bien. […] Songez au bonheur sensuel (ce sont ses expressions) que Montesquieu éprouve à chérir les théories qui enchantent son esprit, à jouir pleinement et infiniment de sa « raison, le plus noble, le plus parfait, le plus exquis de tous les sens ». […] J’en suis aux questions où chez lui les plateaux de la balance sont dans le plus parfait équilibre.

1174. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7172-17709

.), l’orthographe ait été parfaite. […] On rencontre dans le langage populaire des hébraïsmes d’une autre espece : un homme de Dieu, du vin de Dieu, une moisson de Dieu, pour dire un très-honnête homme, du vin très-bon, une moisson très-abondante ; ou, en rendant par-tout le même sens par le même tour, un homme parfait, du vin parfait, une moisson parfaite : les Hébreux indiquant la perfection par le nom de Dieu, qui est le modele & la source de toute perfection.

1175. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

Il a pour Homère, Virgile et toute l’antiquaille, le parfait dédain du sénateur Pococurante, dont, du reste, il ne faudrait pas trop faire le porte-voix de Voltaire. […] Je les vois discuter longtemps avec fermeté, avec vigueur, avec une courtoisie parfaite de part et d’autre, en vrais philosophes. […] Eh bien, tout cela est du meilleur ton, de la plus parfaite décence, et peut être lu par tout le monde. […] Conduite, tenue et moralité parfaites. […] Il réfléchit ; toute terreur l’abandonne presque aussitôt et il écoute ensuite le grondement avec une parfaite quiétude.

1176. (1896) Études et portraits littéraires

Aime trop les formules et les définitions auxquelles il sacrifie trop souvent la vérité, sans s’en douter, il est vrai, car il est d’une parfaite sincérité. » Si observateur qu’il soit, et si consciencieux, il faut surtout voir en lui un esprit absolu, à priori. […] Alors paraît Gil Blas, le type inconsciemment élaboré, l’exemplaire parfait, terme des essais mal venus et des combinaisons incertaines. […] Descotes nous donne d’abondants détails sur son entrée, — à vingt ans, — dans la loge de la Parfaite Union, sur les illusions juvéniles et les exemples illustres qui l’y entraînèrent. […] Il a tâché, dit-il, de se faire Grec avec Aristote, et il y paraît au tour de plusieurs de ses pages, qui se peuvent classer, je pense, parmi les plus parfaites de notre littérature philosophique. […] Sa diction même, si parfaite, a des airs de prodigalité gaspilleuse.

1177. (1888) Études sur le XIXe siècle

« La beauté, écrit-il une fois, est l’école des profondes passions » ; et l’on croirait entendre quelqu’un de ses ancêtres intellectuels proclamer que : « La source de l’amour est la beauté, principalement la beauté de l’âme5 », ou que « chacun est nécessairement plus ou moins noble ou parfait, selon qu’il connaît plus ou moins la beauté 6 ». […] Sans doute, la légende chrétienne l’inspire encore à l’occasion : il aime surtout à lui emprunter des anges dont les robes ont des plis anciens, dont les figures sont d’une beauté parfaite, hiératique et monotone. […] De ces circonstances modifiantes résulte la multiplicité infinie des ordres de paysages, dont chacun présente un accord parfait entre ses parties. » Il n’est pas besoin de réfléchir longtemps sur ces conditions imposées à la peinture pour voir à quel point, malgré une superficielle analogie, elles s’écartent des diverses théories réalistes. […] Dès lors, au lieu de créer une œuvre d’art indépendante, son rôle se bornerait à montrer une habileté intelligente dans l’application des moyens musicaux d’expression à une désignation, aussi fidèle que possible, d’un sujet donné en dehors d’elle et déjà complet et parfait sans elle. […] Puisse la malédiction du ciel s’appesantir sur ma tête, si jamais il m’arrive de lui causer volontairement le moindre chagrin ou de froisser le plus petit sentiment de ce cœur parfait et adorable ! 

1178. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre II. La perception extérieure et l’éducation des sens » pp. 123-196

. — Aux vertèbres dorsales, au milieu du bras, de la cuisse et du cou58, nous ne distinguons deux attouchements que lorsque les points touchés sont distants de seize à vingt-quatre lignes ; à la face palmaire de la dernière phalange des doigts, il suffit que cette distance soit de 7/10 de ligne ; au bout de la langue, qui a le discernement le plus parfait, cette distance peut être un peu moindre qu’une demi-ligne. […] Sauf les cas rares où l’œil et l’oreille ont des sensations subjectives, la correspondance est parfaite. […] « J’ai vu écrire très correctement en interposant un gros livre entre le visage et le papier ; j’ai vu enfiler une aiguille très fine dans la même position, marcher dans un appartement, les yeux entièrement fermés et bandés ; tout cela sans autre guide réel que la résistance de l’air et la précision parfaite des mouvements guidés par le sens musculaire hyperesthésie. » (Annales médico-psychologiques, 3e série, t. 

1179. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

. — Non… et cependant, tenez… sous un régime monarchique c’était logique, mais sous un gouvernement républicain, l’ironie de la chose est vraiment amusante pour un sceptique… Mais examinons de haut la question… Nous avons comme président, un président qui peut être un parfait honnête homme, mais qui est la personnification du néant, et qui n’a dû sa nomination qu’à la constatation par tous de ce néant, et par là-dessus c’est un président très pudibard… Maintenant nous avons une Chambre qui est la représentation de la médiocratie intellectuelle de la province… car à l’heure qu’il est, Paris est sous le joug de l’obscurantisme des prétendus grands hommes de chefs-lieux… Autrefois, du temps où il y avait plus de Parisiens à la Chambre, il y en avait certes de médiocres dans le nombre, mais le Parisien médiocre ressemble un peu à nos jeunes gens sans grande intelligence de la diplomatie, qui au bout d’un certain nombre d’années, par la fréquentation de l’humanité supérieure des grandes capitales ou ils passent, ont dépouillé quelque chose de leur médiocrité. […] C’est extraordinaire la jouissance que procure à un amateur la possession d’un objet parfait : c’est si rare le bibelot qui vous satisfait complètement. […] Et la bataille se passait au milieu d’un cercle de ses pareils, observant une parfaite neutralité, et se reculant et se rangeant pour laisser le champ aux coups de poing.

1180. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre IV. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire. » pp. 87-211

Si ce grand homme avoit écrit un peu moins séchement, il seroit un modèle parfait pour l’histoire ; mais ses commentaires ne sont qu’un journal bien fait. […] Je vous conseille de commencer cette lecture par l’Histoire des révolutions d’Espagne, depuis la destruction de l’Empire des Goths jusqu’à l’entiere & parfaite réunion des Royaumes de Castille & d’Arragon en une seule Monarchie, par le P. d’Orléans, Rouillé & Brumoi, in-12, en cinq vol. 1737. […] LA constitution de la République Helvétique est si singuliere, qu’il est étonnant que nous n’ayons rien de parfait dans notre langue en ce genre.

1181. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

C’est une parfaite esquisse et qui a le charme de la vérité même : « Mme Récamier partit pour l’Italie avec sa femme de chambre et sa petite-nièce, depuis Mme Lenormant, au commencement de 1813. […] Il ne connaissait aucune des littératures étrangères, excepté les poëtes italiens et le philosophe Vico ; mais sa familiarité avec toutes les délicatesses et les finesses de la littérature française était complète, et le ton de sa conversation avait la saveur que donnent l’habitude et la contemplation du beau et du parfait dans l’art.

1182. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre I. De l’action »

A la fin, ne pouvant plus garder le silence, elle voulut dire : « Que les envieux aient les yeux crevés, s’ils ne peuvent me regarder. » Comparez à ce léger mouvement de vanité, qui n’est au fond qu’une boutade d’impatience, la présomption soudaine et l’impertinence parfaite de la tortue française : Miracle ! […] Ce comble de l’ingratitude parfaite est le dernier trait.

1183. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

La parfaite harmonie, c’était en tout le caractère de cette femme harmonique. […] La puissance d’une première apparition de la parfaite beauté est telle que, sans avoir jamais revu madame Pelaprat, cette vision m’éblouit encore.

1184. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIe entretien. Balzac et ses œuvres (2e partie) » pp. 353-431

Le col avait une rondeur parfaite. […] Mme des Grassins, pour laquelle Eugénie était parfaite de grâce et de bonté, persistait à tourmenter les Cruchot.

1185. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

Il renoncera au Monde des Apparences actuelles, même revêtues de l’Unité parfaite. […] Adolphe Gross, l’exécuteur testamentaire de Wagner, qui, après avoir été pour lui l’ami pratique, indispensable et sûr, a su, après sa mort, vaincre toutes difficultés, et a rendu les Représentations de 1883 et de 1884 plus parfaites encore que celles de 1882.

1186. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

Les prescriptions qui n’ont pas été puisées de l’homme même, de tous ses penchants, de la connaissance obscure du bien de son espèce, mais qui proviennent d’un élan passionné et pressant vers le parfait, d’un acte d’aveugle et d’exigeant amour, ont l’inefficacité des lois trop rigoureuses, commandent aux hommes d’excessifs devoirs, quelque retranchement essentiel de leur nature, auquel ils ne se résoudront jamais. […] IV L’œuvre qui est ainsi moralisante, qui juge, approuve et désapprouve, en vertu de considérations purement sentimentales, la société et les hommes, qui tantôt les dépeint en caricatures outrées, comiques ou monstrueuses, tantôt en indications disconnexes et mystérieuses, qui jamais ne les analyse et ne les donne à connaître, pas plus qu’elle ne décrit les lieux, ne ménage les développements humoristiques et personnels, les indications au lecteur, les exubérances, les prosopopées, les partis pris du style, qui procède par épisodes au gré d’une composition singulièrement lâche et mal faite, révèle chez l’écrivain que nous étudions une organisation mentale nettement accusée, simple et une, assez rare chez les hommes de lettres, fréquente au contraire chez les hommes ordinaires, chez les hommes d’action et qu’il sera intéressant d’étudier en un exemplaire parfait.

1187. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

Il me répondait de sa main, avec une bonté aussi parfaite qu’elle était prompte : « Qu’il jouait ce soir-là dans Britannicus, qu’il partait le lendemain, à midi, pour sa campagne de Brunoy ; mais que, si je n’étais pas effrayé de l’heure matinale, il me recevrait à huit heures du matin le lendemain, et qu’il entendrait avec intérêt la lecture de mon ouvrage. » La cordialité et la promptitude d’une réponse si gracieuse, faite de la main du grand homme de la scène à un jeune homme inconnu, m’attachèrent instantanément et pour jamais à Talma. […] Mais l’art y est aussi parfait que l’inspiration y est divine.

1188. (1840) Kant et sa philosophie. Revue des Deux Mondes

Ce n’est pas tout : indépendamment de cette langue, rude encore et mal exercée à la décomposition de la pensée, Kant a une autre langue qui lui est propre, une terminologie qui, une fois bien comprise, est d’une netteté parfaite et même d’un usage commode, mais qui, brusquement présentée et sans les préliminaires nécessaires, offusque tout, donne à tout une apparence obscure et bizarre. […] Or, comme il plaît à Kant, dans la langue qu’il s’est faite, d’appeler transcendental ce qui porte le double caractère d’être indépendant de l’expérience et de ne point s’appliquer aux objets extérieurs, il appellephilosophie transcendentale le système parfait de recherches qui porteraient sur la connaissance à priori.

1189. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Robert » pp. 222-249

C’est que Le Quénoy répondit à un amateur éclairé qui le regardait travailler, et qui craignait qu’il ne gâtât son ouvrage pour le vouloir plus parfait : vous avez raison, vous qui ne voyez que la copie ; mais j’ai aussi raison, moi qui poursuis l’original qui est dans ma tête… ce qui est tout voisin de ce qu’on raconte de Phidias qui projettant un Jupiter, ne contemplait aucun objet naturel qui l’aurait placé au-dessous de son sujet ; il avait dans l’imagination quelque chose d’ultérieur à nature. […] Dans l’ écurie, les objets communs d’un pareil local jettés pêle-mêle très-pittoresquement ; dégradation de lumière si parfaite, obscurité où tout se sépare, se discerne, se fait valoir ; ce n’est pas le jour, c’est la nuit qui circule entre les choses.

1190. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres de François Arago. Tome I, 1854. » pp. 1-18

Condorcet le premier sentit qu’il était temps d’exposer les vrais titres des hommes éminents dont l’Académie des sciences s’était honorée ; mais, malgré le mérite de quelques-uns de ses éloges, il ne sut point offrir de parfaits modèles de ce genre nouveau.

1191. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

Fénelon est surtout un parfait et souverain directeur.

1192. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — I. » pp. 343-360

Celui qui venait de développer dans une belle et lumineuse narration la marche et les progrès de la plus parfaite des sciences, cette série et cette gradation ascendante des grands hommes, Hipparque, Copernic, Galilée, Kepler et Newton, celui-là même s’amuse à noter le ton qui différencie les poésies fugitives des divers siècles ; comme quoi Chapelle, plus débauché que délicat, a peint un siècle où les mœurs n’étaient pas déguisées, et où le langage gardait de la grossièreté dans la franchise ; comment Chaulieu, venu après, appartenait à une époque plus polie, où l’on était déjà aimable, où l’on était encore passionné ; comment Gresset, enfin, n’a plus retrouvé ces sources du génie de Chaulieu : Il est venu, dit Bailly, lorsque la galanterie penchait vers son déclin.

1193. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La Divine Comédie de Dante. traduite par M. Mesnard, premier vice-président du Sénat et président à la Cour de cassation. » pp. 198-214

On est revenu de l’idée de trouver dans les œuvres du passé, fût-ce même dans les chefs-d’œuvre, des modèles parfaits d’idéal et de pure et facile beauté.

1194. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Racan, au contraire, dans sa délicieuse pièce de la retraite, a tout fondu en une parfaite nuance : il a fait quelque chose d’original et d’imité, et où l’imitation s’oublie dans le naturel de la peinture et du sentiment.

1195. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. (Tome XII) » pp. 157-172

Je ne saurais accorder non plus que le plus parfait style en histoire doive être si limpide, si incolore, qu’il ressemble à la grande glace de l’exposition, qui laisse voir tous les objets au-delà sans qu’on la voie elle-même ; car remarquez, encore une fois, que les faits de l’histoire ne sont pas tout existants et tout disposés avec ordre indépendamment de celui qui les regarde.

1196. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

Jamais le sentiment mystérieux de l’âme des choses et de la vertu matinale de la nature, jamais la poétique et sauvage jouissance qu’elle fait éprouver à qui s’y replonge et s’y abandonne éperdument, n’a été exprimé chez nous avec une telle âpreté de saveur, avec un tel grandiose et une précision si parfaite d’images.

1197. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — I » pp. 39-56

Prince de Scythie, incomparablement beau et valeureux, fidèle à sa princesse Statira et rival auprès d’elle ou même successeur d’Alexandre, il offre l’image d’un vrai chevalier et l’idéal d’un parfait galant.

1198. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Tallemant et Bussy ou le médisant bourgeois et le médisant de qualité » pp. 172-188

Il y a dans Bussy plusieurs personnages qui se compliquent et qui se nuisent l’un à l’autre, en même temps qu’ils doivent nuire à la parfaite naïveté de sa parole.

1199. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

Jouffroy, pourront désirer quelque chose pour la parfaite ressemblance et nuance des physionomies : évidemment, l’auteur, jeune et solitaire, a causé avec quelques amis qui les avaient connus, mais surtout il a lu leurs écrits, il s’est enfermé avec eux comme avec des morts d’autrefois, dans le tête-â-tête de la pensée, et il a rendu avec une vivacité sans mélange l’impression pure qu’il en recevait.

1200. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — I » pp. 107-125

Au moment de ces noces et de ce couronnement de la reine de Pologne, il n’eut rien pour lui ; elle n’employa pas son crédit à lui procurer quelque charge ou emploi considérable (et il lui en fait un léger reproche), mais elle lui accorda avec une parfaite douceur et bienveillance tout ce qu’il demanda pour ses amis, et il obtint d’elle la permission qu’il réclamait comme une faveur, de faire graver son portrait par le burin de Mellan, satisfaisant ainsi à la fois sa double passion et de la personne et des images.

1201. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — II » pp. 231-245

La chaleur était à peine tombée avec le soleil ; les oiseaux, déjà retirés et non encore endormis, annonçaient, par un ramage languissant et voluptueux, le plaisir qu’ils goûtaient à respirer un air plus frais ; une rosée abondante et salutaire ranimait déjà la verdure… Ici une de ces descriptions naturelles dont il a le premier dans notre littérature donné le parfait exemple, mais où il a été depuis surpassé par ses grands disciples, par Bernardin de Saint-Pierre, par Chateaubriand, par George Sand, tous bien autrement particuliers, nuancés et neufs, et qui ne se contentent pas de peindre la nature en traits généraux devenus trop aisément communsy ; — et il continue : À ce concours d’objets agréables, le philosophe, touché comme l’est toujours en pareil cas une âme sensible où règne la tranquille innocence, livre son cœur et ses sens à leurs douces impressions : pour les goûter plus à loisir, il se couche sur l’herbe, et appuyant sa tête sur sa main, il promène délicieusement ses regards sur tout ce qui les flatte.

1202. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poème des champs, par M. Calemard de Lafayette (suite et fin) »

Vous savez aussi bien que moi ces beaux vers : Felix qui potuit rerum cognoscere causas… Fortunatus et ille deos qui novit agrestes…, ce qu’un de mes amis et qui l’est aussi des Littré, des Renan, et même de Proudhon, je crois, s’est amusé à paraphraser ainsi, à votre intention et presque à votre usage ; et c’est à peu près de la sorte, j’imagine, du moins pour le sens, qu’un Virgile, ou un parfait Virgilien par l’esprit, s’il était venu de nos jours, aurait parlé : « Heureux le sage et le savant qui, vivant au sein de la nature, la comprend et l’embrasse dans son ensemble, dans son universalité ; qui se pose sans s’effrayer toutes ces questions, terribles seulement pour le vulgaire, de fin et de commencement, de destruction et de naissance, de mort et de vie ; qui sait les considérer en face, ces questions à jamais pendantes, sans les résoudre au sens étroit et en se contentant d’observer ; auquel il suffit, dans sa sérénité, de s’être dit une fois que “le mouvement plus que perpétuel de la nature, aidé de la perpétuité du temps, produit, amène à la longue tous les événements, toutes les combinaisons possibles ; que tout finalement s’opère, parce que, dans un temps suffisant et ici ou là, tout à la fin se rencontre, et que, dans la libre étendue des espaces et dans l’infinie succession des mouvements, toute matière est remuée, toute forme donnée, toute figure imprimée40” ; heureux le sage qui, curieux et calme, sans espérance ni crainte, en présence de cette scène immense et toujours nouvelle, observe, étudie et jouit !

1203. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Etienne-Jean Delécluze »

Maintenant qu’on a une première idée du personnage, il va nous raconter lui-même sa vie, non sans finesse, mais cependant avec une bonhomie parfaite.

1204. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Ce retour du grand amiral, cette rentrée dans le port sont décrits avec un parfait détail : occasion et prétexte de nous dessiner le port intérieur et les bassins.

1205. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La Grèce en 1863 par M. A. Grenier. »

Grenier, qui nous fournit tous ces traits d’un parfait signalement, nous a tracé, d’après ses souvenirs de 1847, la rencontre qu’il fit d’un brigand ou du moins d’un berger très suspect et sans moutons ; c’est un très-joli croquis à détacher d’entre ses pages politiques, c’est une eau-forte : « Je chassais, dit-il, aux abords du golfe d’Éleusis, à gauche de la grand’route de Daphni.

1206. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc »

La forme n’est pour lui qu’un vêtement dont il couvre ses constructions, sans se préoccuper si ce vêtement est en harmonie parfaite avec le corps, et si toutes ses parties sont la déduction d’un principe.

1207. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Préface »

Il n’en persista pas moins dans sa résolution d’écrire désormais dans un journal modéré et libre de tout joug, où des amitiés éprouvées lui tendaient la main, et où il savait que les convictions philosophiques, qu’il venait de défendre au Sénat, trouveraient autour de lui non seulement la tolérance avec un peu d’indifférence (comme cela aurait pu lui arriver dans d’autres feuilles amies et libérales), mais aussi une sympathie sûre et de fermes soutiens, des plumes instruites et sérieuses avec lesquelles il se sentait en parfaite communion d’idées.

1208. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [I] »

C’était, selon lui, « l’unique moyen de poser le grand problème, de manière à le résoudre. » Son esprit juste, son jugement essentiellement modéré, en rabattront assez plus tard et bientôt, dès après Iéna et à partir d’Eylau, dès qu’il verra poindre et sortir les fautes et les exagérations du système nouveau et du génie qui l’avait conçu ; il dira alors, en rentrant dans la parfaite vérité : « Loin de moi la pensée de décider si le roi légitime de la Prusse, ne voulant que défendre son trône et son pays, pouvait provoquer, dès 1756, cette révolution immense dans l’art militaire qu’un soldat audacieux autant qu’habile introduisit, quarante ans après, par la force des événements qui l’entraînait !

1209. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. EDGAR QUINET.— Napoléon, poëme. — » pp. 307-326

Dans les deux vases, le liquide semble le même ; c’est presque le même poids, la même quantité et la même nature de sels ; à quoi tient-il qu’ici le cristal devienne parfait et de diamant, que là au contraire la cristallisation soit confuse ?

1210. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LE COMTE MOLÉ (Réception à l’Académie.) » pp. 190-210

Dupin, j’aime à me rappeler un mot qui aurait semblé parfait, s’il avait été moins accompagné : « Vous avez fait comme nous, monsieur, vous avez commencé. » — Cependant les temps étaient devenus meilleurs ; la société entière renaissait.

1211. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « APPENDICE. — CASIMIR DELAVIGNE, page 192. » pp. 470-486

Ici, tous les mérites du poëte sont retrouvés : style pur, nobles images, douce chaleur, mélodie parfaite.

1212. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

Chez lui, l’accord est parfait entre le moment de la venue, le talent et la vie.

1213. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre II »

Nous devons donc, pour trouver un sincère emploi de cette méthode, reculer à des temps moins avertis : jusqu’à Shakespeare, par exemple, le protagoniste parfait de ce procédé superbe.

1214. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre X. De la littérature italienne et espagnole » pp. 228-255

L’observation poussée en ce genre jusqu’à la plus parfaite sagacité, est un travail qui pourrait conduire à toutes les idées philosophiques.

1215. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

Artificiel et sec, voilà les deux traits du monde, d’autant plus marqués qu’il est plus parfait, et, dans celui-ci, poussés à l’extrême, parce qu’il est arrivé au suprême raffinement. — D’abord le naturel en est exclu ; tout y est arrangé, apprêté, le décor, le costume, l’attitude, le son de voix, les paroles, les idées et jusqu’aux sentiments. « La rareté d’un sentiment vrai est si grande, disait M. de V., que, lorsque je reviens de Versailles, je m’arrête quelquefois dans les rues à regarder un chien ronger un os297. » L’homme, s’étant livré tout entier au monde, n’avait gardé pour soi aucune portion de sa personne, et les convenances, comme autant de lianes, avaient enlacé toute la substance de son être et tout le détail de son action.

1216. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre II. Rapports des fonctions des centres nerveux et des événements moraux » pp. 317-336

D’un côté à l’autre, depuis la base jusqu’au sommet, la correspondance est parfaite.

1217. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Mais, surtout, il était conduit par sa méthode à certaines vérités que la religion aussi revendiquait comme siennes : un Dieu infini, parfait, une âme immatérielle, immortelle.

1218. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre I. La lutte philosophique »

Mais il n’y a en somme qu’une œuvre de Marmontel qui appartienne aujourd’hui à ce que j’appellerais la littérature vivante : ce sont ces Mémoires si naïfs, où il nous décrit sa carrière de beau gars limousin lancé à travers la plus libre société qui fût jamais, où il promène avec un si parfait contentement de soi-même sa robuste médiocrité parmi les cercles les plus distingués de ce siècle intelligent : corps, esprit, moralité, tout est solide, massif, insuffisamment raffiné chez ce paysan parvenu de la littérature.

1219. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

Weiss la rencontre en chemin, elle devient « la merveille unique entre toutes »  On sait que Perrault fut un esprit curieux et original, et nous goûtons tous la grâce parfaite des Contes de fées.

1220. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

Et, par cela seul qu’il applique à une passion profane le vocabulaire et les images de la « mystique » chrétienne, il se trouve presque composer, sans le savoir, une sorte d’élégie idéaliste aux airs déjà vaguement lamartiniens : Ses attraits réfléchis brillent dans vos pareilles… Il a sur votre face épanché des beautés Dont les yeux sont surpris et les cœurs transportés ; Et je n’ai pu vous voir, parfaite créature, Sans admirer en vous l’auteur de la nature, Et d’une ardente amour sentir mon cœur atteint, Au plus beau des portraits où lui-même il s’est peint.

1221. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

Plus humble maintenant, il préfère se plaire à des chefs-d’œuvre populaires et qu’on explique dans les classes ils sont plus parfaits.

1222. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

Le souper terminé, au moment où Mme de Graffigny, retirée dans sa chambre, se croyait en parfaite sécurité et solitude, elle est bien surprise de voir entrer Voltaire, qui lui dit brusquement « qu’il est perdu et que sa vie est entre ses mains ».

1223. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

Exposé dans un théâtre public, on me dissèque : un savant médecin explique devant tous, à mon sujet, comment la Nature a fabriqué le corps de l’homme avec beauté, avec art, avec une parfaite harmonie.

1224. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie Stuart, par M. Mignet. (2 vol. in-8º. — Paulin, 1851.) » pp. 409-426

Elle s’arrêta à la touchante histoire du bon Larron, qui lui sembla le plus rassurant exemple de la confiance humaine et de la clémence divine, et dont Jeanne Kennedy (l’une de ses filles) lui fit lecture : « C’était un grand pécheur, dit-elle, mais pas si grand que moi ; je supplie Notre-Seigneur, en mémoire de sa Passion, d’avoir souvenance et merci de moi comme il l’eut de lui à l’heure de sa mort. » — Ces sentiments vrais et sincères, cette humilité contrite de ses derniers et sublimes moments, cette intelligence parfaite et ce profond besoin du pardon, ne laissent plus moyen de voir en elle aucune tache du passé qu’à travers les larmes.

1225. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Les Gaietés champêtres, par M. Jules Janin. » pp. 23-39

Se souvenant des vœux qu’il a lus tant de fois chez les poètes latins de sa connaissance, et les combinant avec les siens, il en compose sa devise : Honnêtes gens, dit-il en s’adressant au docteur son ami, et dont vous êtes un si parfait modèle !

1226. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — II. (Suite.) » pp. 149-166

À voir l’ardeur que mit Franklin à cette question qu’il considérait comme nationale, on comprend que quinze ans plus tard, lorsque la rupture éclata entre les colonies et la mère patrie, il ait eu un moment de vive douleur, et que, sans en être ébranlé dans sa détermination, il ait du moins versé quelques larmes ; car il avait, en son âge le plus viril, contribué lui-même à consolider cette grandeur ; et il put dire dans une dernière lettre à lord Howe (juillet 1776) : Longtemps je me suis efforcé, avec un zèle sincère et infatigable, de préserver de tout accident d’éclat ce beau et noble vase de porcelaine, l’empire britannique ; car je savais qu’une fois brisé, les morceaux n’en pourraient garder même la part de force et la valeur qu’ils avaient quand ils ne formaient qu’un seul tout, et qu’une réunion parfaite en serait à peine à espérer désormais.

1227. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

Le Voyage proprement dit s’ouvre avec bonheur et avec émotion par une visite à Épaminondas, le plus parfait des héros anciens ; il se termine, au dernier chapitre, par un portrait du jeune Alexandre : le récit tout entier s’encadre entre cette première visite à Thèbes, où le sujet apparaît dans toute sa gloire, et la bataille de Chéronée, où périt la liberté de la Grèce.

1228. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Du Rameau » pp. 288-298

On sent qu’il n’est pas d’un portraitiste, il n’est pas léché, propre et neuf comme ceux de ces messieurs ; mais il y a plus de verve ; il est plus ragoûtant, plus pittoresque, mieux torché. à l’égard de la ressemblance, on l’assure parfaite.

1229. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « I »

Maurice Barrès, qui s’y connaît, me dit un jour une chose qui m’a frappé : « Plus je réfléchis, plus je suis convaincu que les grands écrivains sont ceux qui ont trouvé leur rythme. » Le rythme serait donc la ligne totale d’une phrase, sa forme arrêtée et définitive, l’ensemble de sa cohésion parfaite.

1230. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Gustave Droz » pp. 189-211

Exemple encore : toutes les figures secondaires de cette œuvre, où la Comédie, malgré le Drame, est en dominance, et entre autres cette excellente tête du baron Claudius, cette figure si moderne, qui fait de la haute politique en s’occupant d’assiettes cassées et parle de transformations sociales en cherchant de vieux pots… C’est vraiment parfait ; nous l’avons tous rencontré, ce fantoche.

1231. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IV : M. Cousin écrivain »

Cette énumération, qui semble négligente, est développée avec l’ordre le plus parfait.

1232. (1898) Essai sur Goethe

Entre la vie et l’œuvre, il y a, je ne dirai pas une parfaite unité, mais une cohésion complète : celle-ci continue celle-là, en la poétisant, en la corrigeant, en l’excusant quand il le faut ; elle n’est roman qu’à condition que l’autre le soit d’abord ; le travail de la fantaisie est limité : il consiste simplement à parer la mémoire, à embellir la transposition. […] Cette méthode l’a conduit à « une merveilleuse parenté avec chaque objet de la nature », à « un accent intérieur, une parfaite harmonie avec l’ensemble ». […] Il dépassait les proportions humaines ; ou plutôt, les siennes étaient si parfaites qu’elles le rapprochaient du divin, sans qu’il perdît cependant sa qualité d’homme. […] Par l’habitude et l’indulgence, cette liaison était devenue, de mon côté, plus passionnée que de raison ; au contraire, Charlotte et son fiancé gardaient gaiement une mesure si parfaite qu’il ne pouvait rien être de plus beau ni de plus aimable, et que la sécurité même que j’en avais me fit oublier tout danger. […] Telle est du moins la doctrine qui me paraît ressortir de ces lignes, je ne dirai point avec une clarté parfaite, car elles ne sont point claires, mais, à ce que je crois, avec une clarté suffisante.

1233. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Il nomme des chefs qui le gouvernent en parfait mépris des droits de l’homme ; il nomme des législateurs qui font des lois parfaitement despotiques ; et il est libre comme peuple, parfaitement ; seulement c’est un peuple libre, composé d’esclaves. […] L’amour de la démocratie est encore l’amour de la frugalité… Dans les républiques où les richesses sont également partagées, il ne peut y avoir de luxe, et cette égalité de distribution faisant l’excellence des républiques, il suit que moins il y a de luxe dans une république, plus elle est parfaite. » En conséquence, il va jusqu’à admirer de tout son cœur l’Etat du Paraguay qui est exactement une république collectiviste administrée par les R. […] Ce seraient des citoyens infiniment éclairés sur leurs devoirs et qui auraient un très grand zèle pour les remplir… Les principes du christianisme bien gravés dans les cœurs seraient infiniment plus forts que ce faux honneur des monarchies, ces vertus humaines des républiques et cette crainte servile des états monarchiques. » — Reprenant l’idée de Bayle, Rousseau, en visant directement Montesquieu, écrit : « On nous dit qu’un peuple de vrais chrétiens formerait la société la plus parfaite que l’on puisse imaginer. […] Ils sont en parfait accord avec les principes généraux qu’il professe sur l’unité et l’indivisibilité de l’Etat et l’omnipotence de la Volonté populaire. […] Dans les idées de Voltaire l’histoire universelle se distribue ainsi : Antiquité : despotisme absolu de l’Etat, ordre, tranquillité parfaits ; persécution et guerres religieuses inconnues ; bonheur universel. — Un petit peuple d’Orient connaît « les deux puissances », l’une spirituelle et l’autre temporelle, et leurs luttes.

1234. (1889) Ægri somnia : pensées et caractères

s’il plaisait à la foule de te dire en parfaite santé, te mettrais-tu à table en cachant mal le frisson qui ferait trembler tes doigts jusque dans le plat11. » J’ai connu, de nos jours, le pendant de ce Quintius. […] Il est donc vrai que, même chez les parfaits de la politique, le goût de la liberté n’est pas inséparable de l’ambition de gouverner, et que si c’est une vertu, cette vertu n’est pas pure de tout intérêt. […] A défaut de l’égalité parfaite, connue seulement au pays des chimères, est-il si difficile de trouver certaines inégalités qui, pour n’être pas des privilèges, n’en doivent pas moins être adoucies ou corrigées ? […] L’entretien n’eut donc pas de peine à s’engager entre nous sur le ton d’une parfaite confiance. […] Tandis que la joie du lettré est mêlée d’inquiétude, celle du savant est parfaite.

1235. (1911) Psychologie de l’invention (2e éd.) pp. 1-184

Un esprit parfait, entièrement coordonné, n’inventerait plus au sens ordinaire du mot. […] Une des conditions de l’invention par raisonnement (appelons-la ainsi, bien que ce nom ne soit pas tout à fait exact), c’est l’organisation avancée, la systématisation presque parfaite des tendances qui déterminent l’invention. […] Voir des chefs-d’œuvre dans son esprit, les contempler, les rendre parfaits par les yeux du cerveau, et quand on veut les réaliser sur la toile, les sentir s’évanouir et devenir intraduisibles ! […] Sans doute une routine se développe, en ce sens qu’elle devient plus parfaite, plus automatique, plus routinière en un mot, mais ce développement de la routine, précisément en ce qu’il contient un changement, implique un minimum d’invention. […] Aucun esprit ne doit pouvoir pousser à bout ses idées, parce que personne n’a au degré suffisant ni toutes les connaissances qui pourraient lui être utiles, ni toutes les habitudes, toutes les routines, tout le métier qui lui seraient nécessaires pour donner au développement de son invention la forme parfaite qu’il rêve.

1236. (1914) Une année de critique

C’était là, il me semble, le type parfait du journal. […] Et l’on sent que pour Rousseau de telles scènes offrent l’image parfaite du bonheur. […] Tout serait parfait, s’il suffisait, dans la vie, de s’abandonner au gré des événements ; or, il est des circonstances où l’on se trouve contraint de prendre une initiative. […] C’est justement ce que je me propose de demander à cet écrivain parfait, qui fut souvent un pamphlétaire redoutable : vous venez de m’indiquer le sujet de mon article. […] Racine est le marbre parfait et stérile.

1237. (1913) Poètes et critiques

Au début de sa conclusion, il cite cette parole échappée à Taine dans un moment d’enthousiasme ou de parfait contentement de soi : « Penser, surtout penser vite, est une fête. » M.  […] Il suppléa, pendant deux semaines, dans la rhétorique de Stanislas « un écrivain parfait et un pénétrant moraliste, Paul Desjardins ». […] Comme dans l’auteur des Eaux printanières, on retrouve, chez André Beaunier, le sentiment subtil de ce qui est l’âme secrète ou la muette expression de cette nature engourdie et comme emmurée dans une léthargie inéluctable jusqu’au moment de la résurrection : « Apprends du tranquille paysage d’hiver la résignation, la docilité parfaite aux lois de silence et d’oubli. » Les descriptions chaudes et colorées du printemps méridional, qui donnent tant de charme à d’autres parties du volume, font, avec ces tableaux de régions glacées, un contraste des plus heureux. […] Ce document est un cahier de poésies composées et transcrites par Paul Verlaine, pendant la période la plus secrète de son existence, au fond de ces cachots rébarbatifs de la Belgique d’où il sortit, le cœur redevenu chrétien, et avec un talent renouvelé ou accompli par le plus admirable effort vers la sincérité et la simplicité parfaites. […] Autant, d’ailleurs, cette influence prétendue, mais toute en apparence, de Leconte de Lisle est contestable, ou pour le moins, à négliger, autant on risquerait d’omettre un trait essentiel si, sur la foi de Verlaine lui-même, on évitait de signaler l’ascendant très marqué que prit, avant tout autre, et que reprit, plus d’une fois, sur le jeune poète, ce mystique blasphémateur aux vers industrieusement élaborés et nettoyés, de chevilles ou de longueurs jusqu’à nous paraître parfaits, ce mosaïste, armé de fine érudition, un vrai book-worm, dévorateur de certains livres seulement, des poètes latins et de quelques auteurs anglais pas toujours bien compris15, ce maladif, ce sombre, cet exsangue André Chénier de l’école des « impeccables ».

1238. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

Si Geoffroy n’épargna pas ses critiques à Corneille, s’il ne ménagea pas Molière, si Racine même, qu’il regarde comme l’écrivain le plus parfait, fut quelquefois soumis à ses investigations, il ne faut pas s’étonner de l’attention scrupuleuse avec laquelle il s’efforce de découvrir les moindres fautes des tragédies de Voltaire. […] C’est un tableau parfait des terribles catastrophes que la guerre produit dans une famille ; et le dénouement naturel de ces catastrophes, c’est le jugement qui arrache à l’ignominie du supplice le vainqueur des Curiaces. […] II 13 floréal an 11 (3 mai 1803) Le caractère de Sévère est au moins aussi beau et aussi intéressant que celui de Pauline ; c’est un grand trait de génie d’avoir placé à côté de l’héroïsme surnaturel qu’inspire une religion divine, ce que la nature et l’humanité ont de plus parfait et de plus sublime ; l’hôtel de Rambouillet, qui méconnut ce prodigieux mérite, était digne d’admirer les sonnets et les madrigaux de l’abbé Cotin. […] Le grand Corneille, dans la simplicité de son cœur, paraît craindre qu’on ne lui reproche d’avoir péché contre Aristote, en produisant sur la scène un héros aussi parfait que Polyeucte ; mais son scrupule est mal fondé. […] Ce n’est pas que ce caractère soit parfait ; la perfection ennuie plus qu’elle n’intéresse.

1239. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

La scène n’est-elle pas parfaite ? […] Son mariage, sa paternité, récits délicats, ensembles parfaits que je craindrais de dénaturer en en donnant seulement quelques lignes. […] Ils savent se disposer à merveille, ne se pressent jamais pour tirer, profitent des moindres accidents de terrain et ont une intelligence parfaite de cette guerre qu’ils font depuis cinq ans. […] Dans cette ménagerie figurait,-chose comique, le fameux rat à trompe sur lequel écrivit Geoffroy Saint-Hilaire, et qui n’était autre chose que le résultat d’une plaisanterie de soldats ; on greffait par une incision la queue du rat sur la tête, la cautérisation était parfaite et le tour réussi. […] Mon grand-père, tout à fait revenu de sa stupeur, conta la chose au prince Eugène, qu’elle amusa : — « C’est parfait », répondit son Altesse Impériale ; « je vois avec plaisir que mon filleul ne s’embrouillera pas dans les feux de file ! 

1240. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

La façon dont Verlaine accueillit le nouveau venu fut d’une parfaite bonhomie : c’était la bienveillance affectueuse avec laquelle on caresse un chien étranger. […] Comme l’auteur des Fleurs du mal, il essaya d’abord d’être un parfait comédien, de façonner son esprit à tous les sophismes, à toutes les corruptions. […] Il y a une correspondance parfaite entre le commentaire et l’œuvre commentée. […] Pierre Veber est, de tous les citoyens de la troisième République, celui peut-être qui réalise le mieux le type parfait du « pince-sans-rire ». […] Ne vous fiez pas à l’air idiot de ce parfait snob.

1241. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

Cette langue abondante et précise, qui se renouvelle incessamment à une source d’images jamais ralentie, l’attire d’abord ; mais c’est votre aisance parfaite, votre grâce qui nous charme par-dessus tout, justement parce que nous ne l’avons pas, hélas ! […] Flaubert cette aisance parfaite qui est le signe des vraiment grands. […] Le fond des Fleurs du Mal est d’une âme tourmentée, battue incessamment par le remords ; et le style dénonce une tranquillité parfaite, une imperturbable possession de soi-même. […] Tout bonnement parce que Molière et Regnard ne veulent pas le corrompre, mais le faire rire : l’innocence de l’intention de l’auteur est la sauvegarde parfaite de l’honnêteté du spectateur. […] Le cadre ne comporte pas tous les développements que réclame l’idée : elle le ferait éclater… » Et c’est ainsi qu’on le voit aller sans trêve de la comédie, dont il a le scenario fait et parfait, au roman pour lequel il a rassemblé des monceaux de notes et d’observations.

1242. (1896) Hokousaï. L’art japonais au XVIIIe siècle pp. 5-298

Et comme cette année où au bout de dix ans est revenu le cheval dans le calendrier japonais, ce retour a incité Hokousaï à faire une de ses séries les plus parfaites. […] Cascade de Nounobiki (de la Toile accrochée), chute d’eau dont les ondes ont les ondulations horizontales d’une toile mollement suspendue en l’air, et qui sont dans le dessin rehaussées de gouache, avec la poussière de l’eau sur les rochers rendue dans une imitation parfaite par une poussière de blanc d’argent. […] Lavis où l’arbuste est traité à l’encre de Chine, et les fleurs gouachées de blanc, de la plus parfaite exécution artistique. […] Spécimen d’une des peintures les plus parfaites et les plus travaillées d’Hokousaï. […] En ce kakémono, certainement un des plus soignés, et des plus parfaits du maître, Hokousaï a cherché une opposition entre la finesse de la linéature, pour ainsi dire graphique, faisant le contour des mains, du visage, du sein, de la cuisse, du pied, et le ton neutre et le lavage un peu brutal de la robe.

1243. (1884) L’art de la mise en scène. Essai d’esthétique théâtrale

Et encore c’est théoriquement que je compte ce dernier qui en fait n’existait pas et dont par conséquent la décoration correspondante serait restée d’une parfaite inutilité. […] La nappe, sur laquelle l’attention des spectateurs est formellement appelée, doit être d’une imitation beaucoup plus parfaite que les autres parties du service. […] Un habile directeur de théâtre arrive ainsi à produire une illusion parfaite en ne cherchant la perfection d’imitation que pour les objets qui doivent fixer l’attention du spectateur. […] Est-il un but plus noble que celui de convier à un plaisir aussi parfait et aussi pur un peuple récemment affranchi, mais libre, hélas ! […] Elle est pourtant une traduction aussi fidèle que possible, et la mise en scène en a été réglée avec un goût parfait.

1244. (1925) Feux tournants. Nouveaux portraits contemporains

Qu’ils apportent les raisons de leur réserve, c’est parfait, mais que M.  […] Action en réalité dérisoire, mais qui eut néanmoins l’avantage de maintenir Breton et quelques-uns de ses amis dans « un état de disponibilité parfaite » où ils sont actuellement et dont ils vont s’éloigner « avec lucidité vers ce qui les réclame ». […] Le Secret nous engageait dans la perversité d’une âme, peinture de la méchanceté naïve ; mais la méchanceté de Gabrielle n’était pas incompatible avec une certaine bonté : Gabrielle, en effet, désirait moins le malheur de son amie Henriette qu’elle ne pouvait supporter son bonheur qu’elle n’avait point préparé ; cette pièce a excité l’admiration d’un psychiatre célèbre : « C’est une exacte peinture de la perverse, dit-il à Bernstein, et jusqu’à l’indispensable confession, le tableau clinique le plus parfait. » Je ne mets pas un instant en doute que ce même psychiatre sera plus intéressé encore par la Galerie des Glaces, où le portrait de l’anxieux est tracé avec une précision aussi clinique. […] Xénophon, pour lui, est le type parfait du gentleman britannique. […] Et quand il sera interne à Châteauroux, Charles-Louis Philippe y fera justement paraître ses premières plaquettes, et c’est à l’auteur de l’Enclos 135, à peine broché, qu’il demandera des conseils pour ses lectures. « Au village, écrira-t-il plus tard, dans Simon le Pathétique 136, puis au lycée, je n’ai trouvé personne pour me protéger et m’instruire que des êtres parfaits.

1245. (1891) Lettres de Marie Bashkirtseff

Mais, à peine assis non loin du samovar, une tasse de thé à la main, je tombai en arrêt d’admiration devant un grand portrait, celui d’une des jeunes filles présentes, portrait d’une ressemblance parfaite, librement et largement traité, avec la fougue de pinceau d’un maître. […] La bouche est froide, les yeux sans expression ; certes les proportions sont admirablement gardées, mais que lui resterait-il donc, si les proportions étaient moins parfaites ! […] Ce n’était pas un acteur, ce n’était pas un chanteur, ce n’était pas un parfait Méfistophélès, c’était Satan lui-même. […] Chaque fois que vous vous impatienterez ou trouverez, en homme ordinaire, votre rôle ridicule, consultez ce petit Manuel du parfait amoureux ; il vous donnera la mesure de vos sentiments. […] Ou bien, si vous trouviez le moyen de donner à l’atelier une forme régulière ce serait parfait.

1246. (1888) Poètes et romanciers

Toute cette partie de l’œuvre du poète a perdu son intérêt pour nous, et nous lisons maintenant avec un calme parfait la lettre si cavalière à lord*** sur la soirée du 24 octobre 1829 et sur un système dramatique. […] Il n’aspire à rien moins qu’à des amours et à des gloires parfaites. […] Mais le génie accepta le défi ; et jamais peut-être, ni avant, ni depuis, l’expression poétique ne s’éleva à une pureté plus parfaite avec une plus audacieuse énergie. — Le ciel était ouvert ; un point lumineux apparut, qui rayonnait d’une clarté insoutenable à l’œil. […] Je donnai des larmes à la république, non de ces larmes écrites avec points d’exclamation, comme les poètes en prodiguent tant, mais de celles qu’une âme qui respire l’indépendance ne verse que trop réellement sur les plaies faites à la patrie et à la liberté. » Il est vrai qu’il s’empresse d’ajouter avec une bonne foi parfaite que plus tard il se rendit bien mieux compte des nécessités qu’imposait à Bonaparte la lutte à soutenir contre les entreprises sans cesse renaissantes de l’aristocratie européenne. […] Non ; mais n’est-ce rien que cette tolérance aimable, cette modération parfaite, ce désir continu de voir tout le monde heureux autour de soi et cette active bienfaisance qui a déjà sa légende parmi les pauvres ?

1247. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

Je vous le dis bien bas, c’est le plus aimable de tous, et malheureusement un jeune cœur qui vous aime tendrement et que vous protégez beaucoup s’est aperçu de cette amabilité parfaite. […] Mais si sa carrière de défenseur et d’athlète d’Israël est perdue, si ses yeux sont à jamais éteints, les cheveux ont repoussé à Samson et avec eux ses forces : il renverse un jour le temple de Dagon, écrase d’un seul coup ses trois mille ennemis, et il est vengé, Ce Samson va rejoindre, dans l’œuvre de M. de Vigny, son Moïse, et si j’avais aujourd’hui à nommer ses trois plus beaux et plus parfaits poèmes, je dirais : Êloa, Moïse et la Colère de Samson.

1248. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre premier. Nature et réducteurs de l’image » pp. 75-128

Abercrombie cite un peintre11 qui, de souvenir et sans l’aide d’aucune gravure, copia un martyre de saint Pierre par Rubens, avec une imitation si parfaite que, les deux tableaux étant placés l’un près de l’autre, il fallait quelque attention pour distinguer la copie de l’original. […] Au maximum de l’attention et de l’automatisme, l’hallucination est parfaite, et c’est justement la perte de ces deux caractères qui la défait. — Nous approchons du réveil.

1249. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

J’étais alors moi-même en correspondance quotidienne avec lui sur les affaires d’Italie, qui exigeaient une entente parfaite entre nous : il en tenait le nœud à Rome ; j’en tenais les fils en Toscane, à Lucques, à Modène et à Parme, où j’étais accrédité auprès des quatre cours centrales d’Italie. […] « Soyez tranquille sur tous les points », écrit-il à son amie qui avait sans doute manifesté quelque inquiétude à cet égard, « soyez tranquille ; la ressemblance n’est pas du tout parfaite, et, quand elle le serait, elle ne me rappellerait que des peines et le bonheur dont vous les avez effacées.

1250. (1860) Cours familier de littérature. X « LVe entretien. L’Arioste (1re partie) » pp. 5-80

« Car l’un, ajouta-t-il, croit combattre pour la vertu, et combat pour la calomnie ; l’autre ignore s’il est dans le vrai ou dans le faux, et combat, par une magnanime générosité, pour arracher à la flétrissure et à la mort une si parfaite beauté. […] — Vous oubliez, belle Léna, dit gravement le professeur, qu’alors il ne serait plus l’Arioste, car le caractère de son génie est précisément de nager entre deux eaux, comme on dit en français, d’être un poète amphibie, si vous aimez mieux, et de passer du rire aux larmes ou de l’esprit au cœur, comme le parfait musicien passe d’une gamme à l’autre sur le même instrument : c’est le caractère du souverain artiste

1251. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

Il avait calculé, d’après les années qu’il faut à l’homme pour arriver à l’état parfait, que sa vie devait aller à cent ans et plus ; pour atteindre le plus, il prenait des soins extraordinaires et veillait sans cesse à établir ce qu’il appelait l’équilibre des forces vitales. […] et qui pourra bien un jour devenir député, parce qu’il est riche, l’homme parfait !

1252. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXIXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (1re partie) » pp. 241-314

Les temps sont dans un progrès éternel ; les choses humaines changent d’aspect tous les cinquante ans, et une disposition qui en 1800 sera parfaite est déjà peut-être vicieuse en 1850. — Mais il n’y a de bon pour chaque peuple que ce qui est produit par sa propre essence, que ce qui répond à ses propres besoins, sans singerie des autres nations. […] « “Et il soutint son opinion par de longs développements d’une parfaite justesse. — Je l’écoutai, gardant une expression de physionomie sereine, et lui répondis avec un sourire gai : « “— Je crois que personne ne m’a fait encore cette critique, mais je la trouve tout à fait juste, et j’avoue qu’il y a dans ce passage un manque de vérité.

1253. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

Fabriquer dans un cabinet un caractère parfait comme l’Eugénie de Beaumarchais, est plus facile que de prendre dans la nature un caractère mêlé. […] Philinte va-t-il garder un si parfait ami ?

1254. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre onzième »

Voilà donc la société et les familles accusées de déformer l’œuvre que la nature leur avait donnée parfaite. […] Passe encore s’il ne faisait que trouver tout mauvais ; par malheur, il sait quelque chose à lui substituer, non de mieux, mais de parfait ; et voici toute la foule des malaisés par leur faute qui se récrient sur la découverte, et qui, si l’on ne se met en défense, se ruent sur la société pour faire son bien malgré elle.

1255. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Sur telle pièce de vers qui s’épanouissait au soleil, drue, vivace, parfaite en son genre, sans désirer un inutile surcroît de grâce, le chant est venu se poser comme un oiseau sur un rameau fleuri. […] Gœthe, à propos de son Faust, illustré par Delacroix138, disait à Eckermann, qui remarquait combien de tels dessins aident à l’intelligence complète d’un poème : « C’est certain : car l’imagination plus parfaite d’un artiste nous force à nous représenter les situations comme il se les est représentées à lui-même.

1256. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre premier. Causes physiologiques et psychologiques du plaisir et de la douleur »

Qui ne connaît le passage classique de Bossuet : « Les yeux fixés sur le soleil y souffrent beaucoup et à la fin s’y aveugleraient ; mais le parfait intelligible récrée l’entendement et le fortifie ; la recherche en peut être laborieuse, mais la contemplation en est toujours douce. » Toutefois, ces plaisirs absolument purs de l’intelligence ne sont qu’un idéal irréalisable, la contemplation même dont parle Bossuet ne demeure douce que le temps pendant lequel l’attention n’est point fatiguée ; la plus haute extase ne va point sans une tension des muscles qui se manifeste dans l’attitude même, et sans un épuisement consécutif de la substance nerveuse. […] La parfaite indifférence n’est qu’un instant de transition plus idéal que réel ; là où elle existe, elle révèle l’habitude prise et transmise héréditairement, l’organisation devenue automatique, comme pour les battements du cœur.

1257. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre cinquième. Genèse et action des principes d’identité et de raison suffisante. — Origines de notre structure intellectuelle »

Une fois le germe développé, le cerveau sera ou plus imparfait ou plus parfait qu’à l’ordinaire. […] Nous ne trouvons une parfaite similitude entre deux phénomènes que quand nous les réduisons par la pensée à un seul phénomène.

1258. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

Un parfait honnête homme, mais avec toutes les illusions de l’honnête homme, et absolument garé des leçons sceptiques du jeu de la vie, et croyant presque les lois d’une Salente bonnes pour la France, et ne guérissant pas de cette crédulité ingénue par quatre années de législature… C’était un ancien capitaine d’artillerie, un peu sourd, brusquement cordial, appelant tout le monde mon camarade, puis encore un homme de la campagne, doué de tout le bon que la nature donne aux bons êtres, incapable de vouloir du mal à ses ennemis, et qui portait cette bonté ainsi que son courage, sans effort, presque sans mérite, comme faisant partie de son tempérament. […] Celle-ci est parfaite à cela près, qu’elle est prise en mangeant d’une crise de narration.

1259. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Un poète véritable, selon moi, est un homme qui, né avec une puissante sensibilité pour sentir, une puissante imagination pour concevoir, et une puissante raison pour régler sa sensibilité et son imagination, se séquestre complétement lui-même de toutes les autres occupations de la vie courante, s’enferme dans la solitude de son cœur, de la nature et de ses livres, comme le prêtre dans son sanctuaire, et compose, pour son temps et pour l’avenir, un de ces poèmes vastes, parfaits, immortels, qui sont à la fois l’œuvre et le tombeau de son nom. […] Mais quel hasard a pu contraindre une nature si désordonnée et si rebelle à s’arranger dans un ordre si parfait ?

1260. (1926) L’esprit contre la raison

Au reste, en admettant que l’Occident, limité par les raisons de sa raison, fût assez myope pour confondre ses vues dans le temps et l’espace avec le parfait, l’universel, l’éternel, d’ordre si vulgaire qu’ils aient pu être, les malheurs qui l’ont éveillé de sa béatitude, s’ils marquent une crise politique, économique, bien moins que la période satisfaite de relativo-réalisme, méritent-ils d’être pris pour les signes d’une crise de l’esprit. […] Tous deux mettaient au point depuis 1922 l’idée d’un crime parfait, avec choix arbitraire de la victime.

1261. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — I. » pp. 195-212

Aussitôt le mariage célébré en Normandie entre Blanche et le fils de Philippe Auguste, Louis emmène sa chère moitié à Paris : Les deux époux étaient à peu près pareils en âge, de treize à quatorze ans, tous deux d’un esprit enclin à la piété, éloigné du vice, pur, ouvert et sans fiel, et en tout tellement semblables l’un à l’autre, que de ce parfait rapport et de cette mutuelle correspondance naquit entre eux deux un amour saint, qui fut désormais l’âme de l’un et de l’autre.

1262. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gabrielle d’Estrées. Portraits des personnages français les plus illustres du XVIe siècle, recueil publié avec notices par M. Niel. » pp. 394-412

D’un esprit gentil et gracieux, elle avait surtout un naturel parfait, rien de savant ; le seul livre qu’on ait trouvé dans sa bibliothèque était son livre d’Heures71.

1263. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — II. (Fin.) » pp. 495-513

Le Nôtre, qui était le premier homme du monde dans son art, n’a jamais observé dans ses jardins une symétrie plus parfaite ni plus admirable que celle qu’Homère a observée dans sa poésie.

1264. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

En tout, Linné, l’homme de l’ordre et de la méthode, observateur neuf, ingénieux, inventif, à l’œil de lynx, écrivain concis et expressif, poète même dans son latin semé d’images et taillé en aphorismes, Linné fait un parfait contraste avec Buffon, le peintre du développement et des grandes vues, et dont la phrase aux membres distincts et nombreux, enchaînés par une ponctuation flexible, ne se décide qu’à peine à finir.

1265. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — II. (Fin.) » pp. 198-216

Et ce que j’y aurais gagné ou perdu dans ma verve et mon éloquence, ne serait-ce pas précisément ce qui y fait excès et aussi ce qui y manque en gravité, en proportion, en mesure, en parfaite justesse, et, par conséquent, en véritable autorité ? 

1266. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

C’est un tout qui se détache et qui fait un parfait ensemble ; la façon de dire et de raconter y est égale à l’action.

1267. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

Gabrielle même, avec cette galante lettre datée de devant son portrait (« Je vous écris, mes chères amours, des pieds de votre peinture… »), n’a rien obtenu de si parfait ni de si joli.

1268. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

La Fontaine, une si parfaite et si naïve image du poète, a trop d’esprit, de finesse, de goûts différents et d’oubli pour exprimer ce qu’ici je veux dire, et ce que Santeul nous personnifie plus au naturel : car ce n’est pas seulement la verve et l’inspiration que j’entends, c’est l’amour-propre, la jactance, l’emportement, l’infatuation de soi-même et de ses vers, c’est l’animal-poète dans toute sa belle humeur et dans toute sa gloire : ne le demandez pas à un autre que Santeul ; les curieux de son temps le savaient bien, et il est encore à montrer comme tel à ceux du nôtre.

1269. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — II » pp. 414-431

Je ne réponds pas du goût parfait de toutes les plaisanteries qu’on trouve dans ces premières lettres de la margrave ; elle est beaucoup de son siècle, et un peu de son pays.

1270. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

C’est très heureux ; il a, je crois, une conduite parfaite, et j’espère qu’un jour on saura l’apprécier. — Tous ses ingrats amis sont dans un moment de presse pénible ; il y en a bien quelques-uns qui ont eu la bassesse de chercher à se rattacher à lui.

1271. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Une monarchie en décadence, déboires de la cour d’Espagne sous le règne de Charles II, Par le marquis de Villars »

Il était d’une parfaite ignorance, d’un tempérament mélancolique, maladif, parlant peu, pensant encore moins, un de ces individus exemplaires marqués d’un signe, et au front desquels il est manifestement écrit : Comment les races royales finissent, tellement soumis à son confesseur, qu’il n’y avait pas moyen de lui faire prendre une détermination quelconque, sans que le confesseur en décidât : aussi ceux qui avaient intérêt à agir sur lui usaient-ils de ce secret ressort, qui ne manquait jamais son effet ; quand on voulait lui faire changer d’idée, on lui changeait son confesseur, et il en eut jusqu’à sept en cinq ans.

1272. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier »

Dans une lettre à sa mère, du 16 janvier 1812, il disait avec une naïveté parfaite et en livrant le fond de son cœur : « Genève est devenue chaque année plus triste et plus déserte pour Mme de Staël ; elle en a de l’humeur ; elle juge avec une extrême sévérité, et elle ne met presque rien de son cru pour réparer tout cela : il m’arrive très souvent de m’ennuyer chez elle, et cela arrivait aussi l’année passée, et cependant elle parle de l’ennui des autres d’une manière qui me met souvent en hostilité avec elle.

1273. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier (suite et fin.) »

Napoléon revenu de l’île d’Elbe inaugure ce nouvel empire si rapide et si court qui peut s’intituler l’Empire constitutionnel : il change de système, il modifie profondément sa manière de gouverner, il introduit dans les Constitutions de l’Empire ce fameux Acte additionnel dont Benjamin Constant est le principal rédacteur, reconnaissable à la parfaite clarté et à l’élégance ; dont Sismondi, alors à Paris, se fait l’avocat et le défenseur officieux dans le Moniteur, et qui est destiné à donner satisfaction au parti libéral, à tous les patriotes ralliés.

1274. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Journal de la santé du roi Louis XIV »

Les médecins liront avec intérêt toute cette description mémorable en son genre, et même, quand on est à demi profane, on partage presque l’enthousiasme du savant et pieux Vallot qui dit en finissant : « Cette évacuation (une très abondante sécrétion finale par les voies urinaires) continua neuf jours de cette même force, et fut tellement avantageuse qu’elle acheva ladite guérison de Sa Majesté, sans aucun accident et sans aucune rechute, et même sans aucun ressentiment de la moindre incommodité du monde ; de manière qu’après cette parfaite guérison, le roi s’est trouvé beaucoup plus fort, beaucoup plus vigoureux et plus libre de toutes ses actions, tant du corps que de l’esprit, et l’on peut dire avec vérité que Dieu a conduit cet ouvrage par des voies si extraordinaires et par des secours et des grâces si particulières, s’étant servi des causes secondes en une conjoncture qui semblait devoir être plutôt destinée au miracle qu’à l’industrie et l’expérience des médecins. » Vallot ne fait là que délayer le mot d’Ambroise Paré : « Je le traitai, Dieu le guarit.

1275. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Renan, dans ses diversions vers l’Art, n’a rien écrit de plus fin, de plus pénétrant, de plus touchant, que ce qu’il a donné sur la Tentation du Christ, d’Ary Scheffer ; c’est dans ce morceau d’une parfaite élégance et d’un exquis raffinement moral qu’il nous a peut-être livré le plus à nu le secret de son procédé, la nature et la qualité de son âme, et la visée de son aspiration dernière : « Toute philosophie, dit-il, est nécessairement imparfaite, puisqu’elle aspire à renfermer l’infini dans un cadre limité… L’Art seul est infini… C’est ainsi que l’Art nous apparaît comme le plus haut degré de la critique ; on y arrive le jour où, convaincu de l’insuffisance de tous les systèmes, on arrive à la sagesse… » Ceux qui craignaient d’abord que, malgré les précautions sincères de M. 

1276. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

Car de petits êtres comme nous ne sont pas capables de garder en eux la grandeur de pareilles œuvres ; il faut que de temps en temps nous retournions vers elles pour rafraîchir nos impressions. » Combien ce jugement sur Molière diffère en largeur et en sympathie de celui de Guillaume Schlegel, homme de tant d’érudition et de mérites si divers, mais fermé à quelques égards, auquel il ne fallait pas demander ce que ses horizons ne comportaient pas, et de qui Gœthe disait finement après un entretien très-instructif qu’il venait d’avoir avec lui : « Il n’y a qu’à ne pas chercher des raisins sur les épines et des figues sur les chardons, et alors tout est parfait. » Schlegel, qui est tout raisin et toutes figues quand il nous parle de la Grèce, ne nous a guère offert à nous, Français, quand il a daigné s’occuper de nous et de notre grand siècle littéraire, que ses épines et ses chardons.

1277. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Il y a mieux : ce parfait état de société, cet ordre idéal et simple que M. de Girardin a en vue, je le suppose acquis et obtenu, je l’admets tout formé comme par miracle : on a un pouvoir qui réalise le vœu du théoricien ; qui ne se charge que de ce que l’individu lui laisse et de ce que lui seul peut faire : l’armée n’est plus qu’une force publique pour la bonne police ; l’impôt n’est qu’une assurance consentie, réclamée par l’assuré ; l’individu est libre de se développer en tous sens, d’oser, de tenter, de se réunir par groupes et pelotons, de s’associer sous toutes les formes, de se cotiser, d’imprimer, de se choisir des juges pour le juger (ainsi que cela se pratique pour les tribunaux de commerce), d’élire et d’entretenir des ministres du culte pour l’évangéliser ou le mormoniser… ; enfin, on est plus Américain en Europe que la libre Amérique elle-même, on peut être blanc ou noir impunément.

1278. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Legkzinska »

Après une suite de recommandations insistant sur une parfaite et plate obéissance : C’est à vous de chérir ceux que nous chérissons, C’est à vous de haïr ceux que nous haïssons, l’écrit satirique se terminait par une insultante menace, en cas de mécontentement : Le renvoi de l’Infante est la preuve certaine Qu’à rompre votre hymen on aura peu de peine ; Et nous aurons alors de meilleures raisons Pour vous faire revoir vos choux et vos dindons.

1279. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens. par M. Le Play, conseiller d’État. (Suite et fin.) »

La raison qu’il en donne est que « Bourges est bien l’endroit le plus triste, le plus monotone et le plus ennuyeux du royaume », et que le roi, ne devant être suivi que des gens graves de sa Cour, se trouvera là en parfaite harmonie avec les lieux : dans ce séjour d’ennui choisi tout exprès, il pourra se livrer sans distraction et sans partage à l’œuvre immense de réparation qui pèse sur ses bras : « Milton, ajoute-t-il, si médiocre dans les écrits qu’il a faits pendant qu’il jouissait de la vue, devint sublime et fit son Paradis perdu, dès que, devenu aveugle, il ne fut plus distrait de ses inspirations et de ses méditations.

1280. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Observations sur l’orthographe française, par M. Ambroise »

62 Remarquez bien qu’il ne s’agit pas, pour que cette introduction soit plausible et motivée, de considérer uniquement si un mot de formation relativement récente est bon ou mauvais, s’il présente un sens agréable ou non : il s’agit simplement de savoir s’il a cours et s’il est nécessaire, s’il peut être suppléé par un autre plus ancien, son parfait équivalent.

1281. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Affaires de Rome »

Sans s’attendre à le trouver parfait, ce qui ne serait pas seulement de la simplicité, mais de la folie, on se figure qu’entre lui et le type idéal qu’on s’en est formé d’après les maximes spéculativement admises, il existe au moins quelque analogie.

1282. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

Les styles d’André Chénier et de Regnier, avons-nous déjà dit, sont un parfait modèle de ce que notre langue permet au génie s’exprimant en vers, et ici nous n’avons plus besoin de séparer nos éloges.

1283. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre I. Composition de l’esprit révolutionnaire, premier élément, l’acquis scientifique. »

De cette façon la science parfaite s’achèvera par une langue bien faite347  Grâce à ce renversement du procédé ordinaire, nous coupons court à toutes les disputes de mots, nous échappons aux illusions de la parole humaine, nous simplifions l’étude, nous refaisons l’enseignement, nous assurons la découverte, nous soumettons toute assertion au contrôle, et nous mettons toute vérité à la portée de tout esprit.

1284. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VI, « Le Mariage de Figaro » »

Le Barbier est une œuvre plus délicate, plus parfaite.

1285. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre II. L’éloquence politique »

Danton fait avec lui le plus parfait contraste : celui-ci sort grandi des plus récentes études sur la Révolution française.

1286. (1890) L’avenir de la science « V »

Or, le principe indubitable, c’est que la nature humaine est en tout irréprochable et marche au parfait par des formes successivement et diversement imparfaites.

1287. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

Une parfaite bienséance règne dans la salle avant l’arrivée du lecteur : dès qu’il est arrivé, le plus profond silence s’établit, et les moindres impressions se peignent, soit par un silence encore plus attentif, soit par un frémissement très sensible, comme dans les auditoires les plus exercés.

1288. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Éloges académiques de M. Pariset, publiés par M. Dubois (d’Amiens). (2 vol. — 1850.) » pp. 392-411

Si l’on ne composait ces notices que pour les lire devant des confrères et des connaisseurs, gens du métier, on pourrait s’en tenir aux traits simples et rester dans un parfait accord avec le sujet ; mais les séances publiques amènent le désir et le besoin des applaudissements, et les applaudissements s’obtiennent rarement par des traits fins et justes, par des nuances bien saisies, ou même par des vues simplement élevées.

1289. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres inédites de l’abbé de Chaulieu, précédées d’une notice par M. le marquis de Bérenger. (1850.) » pp. 453-472

Et continuant de parler d’elle : « C’est, ajoutait-il, comme une nuance de raison et d’agrément qui occupe les yeux et le cœur de ceux qui lui parlent ; on ne sait si on l’aime ou si on l’admire : il y a en elle de quoi faire une parfaite amie, il y a aussi de quoi vous mener plus loin que l’amitié. » Et l’éloge continue sur ce ton délicat.

1290. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Droz lui répond : « Il n’y a pas de parfait misanthrope ; vous croyez l’être, et votre vivacité même vous dément. » Mais surtout des hommes tels que Droz, de tels êtres de mansuétude répondent à Chamfort et aux irrités par leur présence et leur longanimité même.

1291. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le surintendant Fouquet. (Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M. P. Clément.) 1846. » pp. 294-312

Dans mon parfait désintéressement, j’ai peut-être le droit de dire ces choses, et l’exemple de Fouquet, qui y mêlait d’ailleurs un peu trop de pensions, me les suggère.

1292. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — II. » pp. 460-478

Confondant l’ordre moral avec l’ordre civil, raisonnant et concluant, sans s’en apercevoir, de l’un à l’autre, il brouillait tout et s’attirait de la part de son sage réfutateur des remarques parfaites de justesse et de finesse, qu’il n’a jamais lues, et qui ne l’auraient probablement point corrigé, tout homme d’esprit qu’il était.

1293. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

Marguerite en donne très gentiment une raison toute naturelle : Mais lors l’âge ancien de votre tante et mon enfantine jeunesse avaient plus de convenance, étant le naturel des vieilles gens d’aimer les petits enfants, et de ceux qui sont en âge parfait, comme était lors votre cousine, de mépriser et haïr leur importune simplicité.

1294. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — I. » pp. 201-219

Toutes les scènes où il met en cause Mme Goëzman, tête légère, assez jolie femme, qu’on retournait par un compliment, qu’on jetait hors d’elle par une vérité, et qui présentait dans toute sa conduite un mélange de coquinerie, d’impudence et d’innocence, sont des scènes parfaites de comédie.

1295. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

Étienne, ramena d’un mot les choses dans leurs justes bornes ; il loua d’ailleurs le récipiendaire en des termes dignes et d’une parfaite convenance : « Les applaudissements du public, disait-il, ont déterminé nos suffrages plus que la bienveillance des illustres amis dont votre jeunesse a droit de s’honorer. » M. 

1296. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Regnard en est peut-être, chez nous, l’exemple le plus parfait et le plus naïf, celui qui dispense le plus de toute autre définition.

1297. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

La correspondance de Franklin, en ces années, est d’une lecture des plus agréables et des plus douces : l’équilibre parfait, la justesse, l’absence de toute mauvaise passion et de toute colère, le bon usage qu’il apprend à tirer de ses ennemis mêmes, un sentiment affectueux qui se mêle à l’exacte appréciation des choses, et qui bannit la sécheresse, un sentiment élevé toutes les fois qu’il le faut, un certain air riant répandu sur tout cela, composent un vrai trésor de moralité et de sagesse.

1298. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1853 » pp. 31-55

Leroy, un grand brun avec une grosse voix ; il est l’ennemi des prêtres, des empereurs, des rois et des romantiques, et cache, sous des apparences de truculence et de férocité physique, une parfaite bonne enfance et des idées pas mal prudhommesques.

1299. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

La principale erreur des partisans passionnés de la démocratie est de considérer cette forme de société comme un type absolu et idéal qui, une fois réalisé ici-bas, donnerait aux hommes le parfait bonheur.

1300. (1912) Le vers libre pp. 5-41

Mais cet homme de grande bonne foi, de parfaite bonne volonté, avait d’un seul coup fourni à nos adversaires, dans À rebours, d’après quelques aimables dilettantes, et surtout d’après son imagination tourmentée et grossissante, de quoi nous persifler longtemps.

1301. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre II : Variations des espèces à l’état de nature »

Les monstres sont très fréquemment stériles ; de plus chaque être vivant, surtout chez les animaux, est si admirablement adapté à ses conditions d’existence, qu’il semble dès le premier abord improbable que des instruments aussi parfaits aient été soudainement produits dans leur perfection, de même qu’une machine compliquée ne saurait avoir été inventée par un seul homme avec tous ses perfectionnements successifs.

1302. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Seconde partie. Des mœurs et des opinions » pp. 114-142

Le bon goût et l’élégance des manières, qui pour être parfaits ont besoin d’être des choses naturelles au lieu d’être des choses apprises, donnent tout de suite de grands avantages aux femmes sur les hommes, et entretiennent dans notre nouveau système social des limites analogues à celles qui existaient auparavant.

1303. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Ces répétitions redoublées annonçaient, par leurs tâtonnements opiniâtres, un esprit insatiable de l’expression exacte, incapable de se reposer dans les idées ébauchées, invincible à la fatigue, obstiné à marcher jusqu’à ce qu’il eût atteint la parfaite clarté.

1304. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIII : De la méthode »

J’en sais de diverses espèces, plusieurs tout à fait excentriques, sceptiques, polythéistes, bouddhistes, matérialistes purs, panthéistes parfaits.

1305. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Ce tombeau est fait comme une petite chapelle en carré parfait, et de tous côtés il a environ vingt pieds de long, avec une belle coupole à pyramide qui porte en haut une belle croix ; dedans est le sépulcre, semblablement de figure carrée ; c’est à peine si une personne peut marcher entre le sépulcre et la muraille. […] Tout en haut est un endroit qu’on nomme la Croix de Charles, parce que Charles, se rendant en Espagne avec son armée, pratiqua, à l’aide de haches, de pics, de pioches et d’autres instruments, un chemin sur ce mont, et y éleva une croix… Là les pèlerins s’agenouillent, font une prière et plantent chacun une croix en terre ; aussi peut-on y voir des milliers de croix. » Rien n’engage à suspecter la parfaite exactitude de ce renseignement, qui s’applique sans doute à Château-Pignon, point culminant du Port de Cise. […] Il fit, de Montemonaco, deux visites à la Sibylle, et constata la parfaite exactitude, sauf les changements survenus depuis, des renseignements d’Antoine de la Sale ; mais il ne put, cette fois encore, pénétrer dans le couloir souterrain. […] Ils imaginaient le pays mystérieux où l’astre séjourne jusqu’à ce qu’il reparaisse de l’autre côté du ciel ; ils se plaisaient à y voir un monde enchanté, d’où l’astre éternellement jeune ressortait chaque jour aussi brillant, et où peut-être était réalisée cette félicité parfaite qui ne se trouve pas sur la terre. […] Nous voudrions accorder les joies éphémères de la vie avec une félicité plus parfaite et plus durable, la jouissance avec la noblesse morale, l’amour pur et dévoué avec la volupté aux appels puissants, et, ballottés entre nos inconciliables désirs, nous écoutons avidement et nous écouterons toujours les contes qui nous parlent, fût-ce pour nous faire frémir, de mortels comme nous qui ont pénétré, vivants, dans le monde de nos rêves et qui, revenus un moment parmi les hommes, ont pu leur en révéler quelques secrets.

1306. (1925) Comment on devient écrivain

Une prose n’est parfaite que si elle a été travaillée. […] Ces brûlants Eliacins sont peut-être de parfaits amants ; en littérature ce sont presque toujours de mauvais auteurs.‌ […] Comment expliquer ce goût de médiocrité morale chez un homme qui n’a connu que des êtres d’une parfaite honnêteté ? […] Une nouvelle parfaite vaut un long roman. […] Vous lisez un roman ; les cent premières pages sont parfaites, le ton excellent ; tout à coup, sans raison, c’est brutal, c’est faux ; on est consterné, on se dit : « Ah !

1307. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Mais nous, restes infortunés d’un grand naufrage, nous n’avons plus ce qu’il faut pour goûter un calme aussi parfait. […] C’est un équilibre parfait entre toutes les opinions. […] Il fut proclamé que l’idiome parfait devait être un assemblage de signes, chacun attaché irrévocablement à une même idée, et liés entre eux par des relations constantes. […] Alors, au milieu de ce vaste spectacle, les paroles solennelles, les expressions exaltées se trouvent dans un parfait accord avec notre âme, et produisent tout leur effet. […] Il ne sut jamais voir la littérature que d’après ses idées habituelles ; prenant les formes auxquelles il était accoutumé pour un type parfait, il ne sentit pas les beautés qui n’entraient point dans ce système.

1308. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

Le préfet a été parfait pour moi ; mais je n’en cause pas moins une peur terrible dans la ville. […] Il marche dans une parfaite union, dans un concert unanime avec Royer-Collard. […] et la carrière de Camille, sans être allée jusqu’à la vieillesse, est assez complète, assez parfaite en soi pour n’avoir rien à envier.

1309. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

Mérimée eût été auprès de lui un représentant bien venu et bien choisi de l’esprit et de l’art nouveaux ; mais c’eût été un représentant tout individuel, lui offrant en soi une forme déjà parfaite, un moule exact aux arêtes vives, un profil de bronze, artiste à la fois charmant et sévère, osant beaucoup, disant peu, et s’abstenant volontiers, en tant qu’esprit, des échappées au dehors, des vues critiques conjecturales, des idées innombrables qui traversaient l’air en ce temps-là, et dont il n’était pourtant pas indifférent d’indiquer les traces. […] On peut se faire une idée parfaite de ce qu’il était alors en causant, — de ce qu’il fut jusqu’à la fin, — par l’agréable relation qu’il a donnée de ce premier voyage. […] Ampère a cru démontrer que ce livre ne pouvait pas être de Gerson ni du xve  siècle, mais du xiiie ou xive , qu’il devait être d’un moine, et probablement d’un moine allemand ou lombard : un parfait contre-pied sur tous les points. — Il me semble qu’Ampère est dans le vrai. » Au moment où Ampère déboucha dans l’étude de la littérature française proprement dite, il eut un désagrément.

1310. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Mémoires du général La Fayette (1838.) »

Je ne méritai guère d’être châtié ; mais, malgré ma tranquillité ordinaire, il eût été dangereux de le tenter, et j’aime à penser que, faisant en rhétorique le portrait du cheval parfait, je sacrifiai un succès au plaisir de peindre celui qui, en apercevant la verge, renversait son cavalier. » Ce ne sont pas seulement les écoliers de rhétorique, ce sont quelquefois les hommes qui sacrifient un succès, c’est-à-dire la chose possible, au plaisir de peindre ou de faire une action d’où résulte le plus grand honneur à leur rôle, la plus grande satisfaction à leurs sentiments. […] Ces pages, datées de Lagrange, méditées et tracées à une époque de retraite, d’oubli et de parfait désintéressement, loin des rumeurs de l’idole populaire, y gagnent en élévation et en étendue. […] Son rôle, ou plutôt l’absence de tout rôle, à cette époque du Consulat et de l’Empire, est dictée par un tact politique et moral des plus parfaits.

1311. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

L’autre, mesurant notre force et notre faiblesse, nous a détournés des routes qui nous étaient fermées, pour nous lancer dans les routes qui nous étaient ouvertes ; elle a connu les faits et leurs lois, parce qu’elle s’est résignée à ne point connaître leur essence ni leurs principes ; elle a rendu l’homme plus heureux, parce qu’elle n’a point prétendu le rendre parfait ; elle a découvert de grandes vérités et produit de grands effets, parce qu’elle a eu le courage et le bon sens d’étudier de petits objets et de se traîner longtemps sur des expériences vulgaires ; elle est devenue glorieuse et puissante, parce qu’elle a daigné se faire humble et utile. […] Le parfait législateur est un exact intermédiaire entre l’homme de pure théorie, qui ne voit rien que des principes généraux, et l’homme de pure pratique, qui ne voit rien que des circonstances particulières. […] Penn, qui rejette entièrement l’Eucharistie, obtient la parfaite liberté de prêcher sans faire aucune déclaration, quelle qu’elle soit, à ce sujet.

1312. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

Le parfait & le prétérit simple ne sont pas usités, mais on dit j’ai abstrait, tu as abstrait, &c. […] Philosophes se sont imaginé qu’elles naissoient avec nous : ce qui veut dire qu’en venant au monde nous savons ce que c’est que l’infini, le beau, le parfait, &c. […] Beauté parfaite. […] Selon Platon, le monde fut fait d’après l’idée la plus parfaite que Dieu en conçut. […] Les Grecs, dit Pline, l’ont appellé d’un nom qui signifie ornement, & nous d’un nom qui veut dire, élégance parfaite.

1313. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

René Ghil était d’une parfaite bonne foi, et l’allure du symbolisme, en ce manifeste de M.  […] Le brillant conférencier était alors un aède jeune et enthousiaste, très intelligent et son petit bouquin, qui demeurera une pièce curieuse, eut été parfait, s’il n’avait jugé nécessaire de couronner le livre par une glose à lui spéciale du symbolisme qu’il désirait chrétien. […] Dans certaines qui sont d’un Rimbaud fort jeune, quelques menues tares, non dans la parfaite technique symétrique, mais en des détails adventices à la pensée. […] Les différences dans ce dernier livre sont justes assez importantes pour nous faire assister à cette évolution du vers parnassien parfait jusqu’à un vers modifié, libéré, assoupli, qui n’est pas le vers libre, mais qui s’en rapproche. […] Tout ce petit poème, en sa brièveté, est parfait.

1314. (1903) Propos de théâtre. Première série

Seulement, elle enveloppe tout cela d’une rhétorique exquise et de grâces parfaites d’expressions, et de périphrases, et de circonlocutions et de tout un langage de bonne compagnie. […] Lanson nous montre que la psychologie de Corneille est en parfaite concordance avec celle de Descartes dans son Traité des passions, en parfait accord aussi avec le portrait de la Rochefoucauld par lui-même, et, par conséquent, que c’est l’homme tel qu’il était compris par toute la première moitié du dix-septième siècle qui est l’homme des tragédies de Corneille. […] Les honnêtes gens, au contraire, se divisent en deux classes : honnêtes gens parfaits, honnêtes gens mêlés de quelques travers. Les honnêtes gens parfaits… Il n’y a pas d’honnêtes gens parfaits. […] Elmire n’y fait et n’y dit absolument rien qui ne soit parfait comme maladresse.

1315. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

. — Le style, dans le détail, arrive quelquefois à un parfait éclat de vraie peinture, à une expression entière et qui emporte avec elle l’objet : on compte ces vers-là dans notre poésie classique, même dans Racine, qui en offre peut-être un moins grand nombre que Boileau : Quand la lune arrondie en cercle lumineux Va, de son frère absent, nous réfléchir les feux, Il vous dira pourquoi, d’un crêpe enveloppée, Par l’ombre de la terre elle pâlit frappée. […] Tel adversaire conviendrait mieux au fond que tel allié. » En fait de croyances religieuses, il exprime partout l’idée qu’elles sont nécessaires aux sociétés humaines comme aux individus, qu’elles seules remplissent une place qu’à leur défaut envahissent mille tyrans ou mille fantômes ; et, à propos des superstitions des incrédules, il rappelle de belles paroles que Bonnet lui adressait en sa maison de Genthod, lorsqu’il l’y visitait en 1787 : « Il faut laisser des aliments sains à l’imagination humaine, si on ne veut pas qu’elle se nourrisse de poisons118. » Je trouve, dans ce même Mémorial, un parfait et incontestable jugement de Fontanes sur Mirabeau119, et un autre, bien impartial, sur La Fayette, qu’on croyait encore prisonnier à Olmütz120 : s’il exprime simplement une honorable compassion pour le général, il n’a que des paroles d’admiration pour son héroïque épouse ; de même qu’en un autre endroit il sait allier à une expression peu flattée sur l’ancien ministre Roland un hommage rendu à l’esprit supérieur et aux grâces naturelles de madame Roland, avec laquelle il avait eu occasion de passer quelques jours près de Lyon, en 1791. Enfin, nous trouvons Fontanes (sa ligne de parti étant donnée) aussi sage, aussi juste, aussi parfait de goût qu’on le peut souhaiter envers les personnes, envers toutes… excepté une seule : je veux parler de madame de Staël. […] Outre les articles de critique active, Fontanes donna au Mercure 132 un morceau sur Thomas, dans lequel l’élégance la plus parfaite exprime les plus incontestables jugements.

1316. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre IV. Shakspeare. » pp. 164-280

Tout son génie est là ; il avait une de ces âmes délicates qui, pareilles à un parfait instrument de musique, vibrent d’elles-mêmes au moindre attouchement. […] VII Rien de plus facile à un pareil poëte que de former des scélérats parfaits. […] Elle insiste, et lui dit de supposer une femme véritablement parfaite. « Celle-là, dit Iago, n’est bonne que pour donner à téter à des bambins et débiter de la petite bière255. » — « Ô noble dame, dit-il ailleurs, ne me demandez pas de louer quelqu’un, car je ne suis rien quand je ne critique pas256. » Ce mot donne la clef de son caractère. […] Voyez encore dans Timon, et surtout dans Hotspur, l’exemple parfait de l’imagination véhémente et déraisonnable.

1317. (1932) Le clavecin de Diderot

Ce coin de ciel bleu, cette loque rouge à une fenêtre : parfait échantillonnage. […] La négresse, dans les bordels métropolitains où la confine la toute-puissance du blanc, est à sa place, comme sa sœur de bronze, porteuse d’électricité, à l’orée des escaliers à tapis rouge et tringles d’or, expression si parfaite du contentement de soi que ne cessèrent d’éprouver le XlXe et le XXe naissant. […] Les méthodes introspectives réputées les plus audacieuses, à quoi il accepte de se soumettre — souvent par snobisme — à les supposer excellentes, parfaites quant à leurs résultats, devraient constituer un simple chapitre préliminaire de la science à la fois particulière et générale (triomphatrice de la vieille psychologie, analytico-métaphysique) qui, sans prétendre, par démagogie, à l’humain, à l’humanisme, aux humanités, à l’humanité, après avoir balayé les prétextes contemplatifs dont se prévaut l’individualisme, désignerait à l’homme sa place dans l’univers. […] Cet accord, dans la France de 1932 n’est certes point un accord parfait.

1318. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

La satire didactique, dont Horace nous a laissé des modèles si parfaits, et que Boileau, chez nous, a su renouveler et rajeunir heureusement, est moins vive, mais plus variée, que la déclamation satirique. […] Berryer se sait, mais ne s’avoue pas supérieur à son auditoire, et traite avec lui sur le pied d’une parfaite égalité. […] Scribe doit à l’intelligence parfaite de cette vérité la meilleure partie de ses succès, et nous devons avouer qu’il a usé largement de la recette. […] Cet agrandissement de la douleur, loin d’être une violation de la vérité, n’est qu’une intelligence plus parfaite, une manifestation plus complète de cette partie déterminée de la vérité. […] Nous savons, aussi bien que personne, la distance qui sépare le génie de la science ; mais dans la question que nous traitons, il ne s’agit pas de la valeur absolue de ces deux formes de la pensée, il s’agit des services que chacune des deux rend à l’autre ; or, à cet égard, le poète et le critique sont sur un pied d’égalité parfaite.

1319. (1925) Proses datées

Elles sont tenues pour un des plus parfaits ouvrages de la poésie contemporaine. […] Le milieu familial où grandit Alphonse était de parfaite dignité bourgeoise et de scrupuleuse honorabilité. […] Lorsque, en 1861, il fit paraître une édition des Fleurs du Mal, augmentées de nombreux poèmes nouveaux, il songea à s’en expliquer publiquement dans une préface dont nous avons les esquisses, mais à laquelle, en définitive, il renonça, se contentant d’inscrire, dans une note du poème le Reniement de saint Pierre, la revendication du droit absolu, pour le poète, de « façonner, en parfait comédien, son esprit à tous les sophismes et à toutes les corruptions » sans être tenu responsable de ses fictions.. […] Car, répétons-le encore une fois, les Fleurs du Mal ne sont pas un « jeu » et Baudelaire ne s’y est pas façonné un rôle « en parfait comédien ». […] Il est vrai qu’elle était logée dans un « petit palais meublé superbement et paré de bijoux comme une nymphe », mais il me semble que vous lui préfériez encore ces « chères : Ancilla, Camilla, Faustolla, Julietta, Angeletta, Catina, Spina, Agatina à qui vous dîtes un si tendre adieu, surtout à cette Ancilla que vous vîtes un jour « déguisée en Vénus de Médicis et aussi parfaite de tout point ».

1320. (1890) Les princes de la jeune critique pp. -299

dira quelqu’un, de quel droit celui-ci vient-il nous faire le manuel du parfait critique ? […] On retrouvera sans nul doute réparties entre les critiques dont j’ai parlé la plupart des qualités maîtresses qui constitueraient, selon moi, le critique parfait. […] Mais une chose m’inquiète : cet accord parfait avec le xviie  siècle. […] Ganderax est l’incarnation du parfait critique ? […] Mais la discussion pourrait bien être superflue, s’il est vrai qu’on ne saurait méconnaître sous la diversité de ses écrits une parfaite unité d’esprit.

1321. (1898) Impressions de théâtre. Dixième série

Et je m’aperçois ici que je suis en parfait accord avec M.  […] Cela est d’un débraillé parfait. […] Mais ma vraie raison, c’est que j’aimais et estimais singulièrement ce parfait honnête homme, si candide et si doux. […] La pièce de Donnay, Amants, nous a montré le sentiment du devoir et la parfaite « respectabilité » dans l’amour libre. […] Ma conscience m’oblige à dire que Rosine n’est point parfaite.

1322. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Le nombre de nations qui sont arrivées à être en possession parfaite d’elles-mêmes, à présenter au monde une expression définitive de leur être intime, n’est pas grand. […] Ces facultés sont l’espérance, la foi, l’amour et la joie, qui ne peuvent jamais se fixer sur les objets périssables de ce monde et qui n’aspirent qu’à ce qui est parfait et infini. […] La Tempête est comparable à un de ces fruits arrivés à une maturité parfaite, qui sont d’autant plus savoureux qu’ils sont plus près de l’instant où ils vont se corrompre, car la maturité n’est que le commencement de la corruption. […] Shakespeare a donc réuni en un seul faisceau les divers éléments qui constituent l’amour parfait. […] Or peu d’hommes sont capables de cet excès de délicatesse morale, et Sterne en était moins capable que tout autre, car il n’eut jamais aucune candeur ni aucun sens de cette bienséance qu’on peut appeler la politesse du parfait honnête homme envers son âme.

1323. (1907) Propos de théâtre. Quatrième série

parfait ! […] Donnay nous dit qu’elle n’est jamais vague, indécise, et que toute sa force réside dans le parfait accord de ses sentiments et de sa raison. […] Donnay appelle n’être ni vague ni indécis et avoir une force qui réside dans le parfait accord des sentiments et de la raison ! […] Judith est juive intransigeante de raison et de sentiment, car « ses sentiments sont en parfait accord avec sa raison » ; malgré cela, elle épouse le catholique Gaston de Chouzet ; et malgré cela elle s’unit librement et du reste amoureusement avec Michel Aubier.

1324. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome I

Aucune réfutation d’une erreur n’entraîne avec elle l’évidence parfaite, si elle ne se double d’une explication lucide de la genèse de cette erreur. […] Taine, pouvaient reconnaître leur théorie de l’âme humaine mise en œuvre avec une précision parfaite. […] Il est, en effet, des rapports de mots d’une si parfaite justesse qu’il serait impossible de les améliorer. […] Sans doute, la parfaite exactitude d’observation s’y trouve ; mais ce qui donne à ces livres leur saveur de vie profonde, c’est qu’une âme d’homme y apparaît, meurtrie et nostalgique, tourmentée et vaincue, inassouvie et violente. […] Leur énergie m’émeut, m’étonne, me ravit Par suite les vertus d’arrangement, l’harmonie régulière, la parfaite délicatesse, la mesure souveraine, auront pour moi un attrait moindre que l’outrance et les heurts violents.

1325. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Si vraiment Sainte-Beuve a imaginé un Vinet qui se serait tapi dans ses lettres privées, et tout différent du Vinet qui s’est montré en public, non seulement il a fait injure à l’écrivain vaudois, mais il a démenti du même coup tous les jugements qu’il avait portés antérieurement sur lui et qui sont autant d’hommages rendus à sa parfaite sincérité. […] Sainte-Beuve fait preuve ici d’une humilité très sincère et d’une parfaite loyauté. […] Sainte-Beuve vécut près d’un an à Lausanne dans une parfaite intimité intellectuelle avec Vinet ; je veux dire dans une commune curiosité et dans un commun respect des choses de la pensée. […] Et la preuve, c’est que, malgré sa parfaite clarté, il ne sera point généralement compris. […] Or, ce caractère nous est révélé dans le fait même où la grâce est renfermée ; et, ce que jamais nos spéculations à priori ne nous eussent fait trouver, quoiqu’une nécessité intérieure, à la fois logique et morale, nous le fît incessamment chercher, la rencontre et l’accord, en Dieu, de la souveraine miséricorde avec la souveraine justice, se manifeste à nous dans l’Évangile, et, nous manifestant Dieu lui-même tel qu’il est, nous le rend à la fois redoutable comme la loi parfaite, aimable comme la charité parfaite, dont le nom est devenu le sien ; car « Dieu est amour156 ».

1326. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — II. (Fin.) » pp. 213-233

. ; qu’on assemblât les États généraux de deux en deux ans, etc. » Dans toutes ces parties de son Histoire, l’opinion et les préférences personnelles de Mézeray percent assez : pourtant il n’y met pas de système ; il s’accommodera fort bien que, sous Henri IV, on arrive au bien public sans toutes ces machines qui sont à double fin en temps de passion, et qui ne sont parfaites que dans l’esprit des vertueux.

1327. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — I. » pp. 234-253

Vous avez tous les deux le même éclair dans l’esprit, mais il n’a pas votre sang-froid imperturbable ; vous ne faites et ne dites jamais rien qui ne soit parfait, jamais rien que vous puissiez vous reprocher : aussi n’y a-t-il jamais eu de mérite supérieur au vôtre, ni d’admiration qui égale la mienne pour mon cher maître.

1328. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — I. » pp. 431-451

Vers ce temps, comme s’il sentait qu’il doit commencer à se réconcilier avec l’idiome natal et à se diriger vers le but où l’appelle son secret talent, il se remet à lire les auteurs anglais, et surtout les plus récents, ceux qui, ayant écrit depuis la révolution de 1688, unissent à la pureté du langage un esprit de raison et d’indépendance, Swift, Addison ; puis, lorsqu’il en vient aux historiens, il est beau d’entendre avec quelle révérence il parle de Robertson et de Hume auxquels on l’adjoindra un jour : La parfaite composition, le nerveux langage, les habiles périodes du docteur Robertson m’enflammaient jusqu’à me donner l’ambitieuse espérance que je pourrais un jour marcher sur ses traces : la tranquille philosophie, les inimitables beautés négligées de son ami et rival, me forçaient souvent de fermer le volume avec une sensation mêlée de plaisir exquis et de désespoir.

1329. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

À travers cette sévérité apparente et en partie réelle, il s’attachait à reconnaître ceux qu’il appelait des esprits superbes, ceux « qui se regardaient et se faisaient un secret plaisir d’être regardés comme les justes, comme les parfaits, comme les irrépréhensibles ; … qui de là prétendaient avoir droit de mépriser tout le genre humain, ne trouvant que chez eux la sainteté et la perfection, et n’en pouvant goûter d’autre ; … qui, dans cette vue, ne rougissaient point, non seulement de l’insolente distinction, mais de l’extravagante singularité dont ils se flattaient, jusqu’à rendre des actions de grâces à Dieu de ce qu’ils n’étaient pas comme le reste des hommes : Gratias tibi ago, quia non sum sicut cœteri hominum ».

1330. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « De la poésie de la nature. De la poésie du foyer et de la famille » pp. 121-138

William Cowper est loin d’être parfait sans doute, et il a, lui aussi, ses excès, ses défauts ; il a ses parties pénibles et austères à côté de ses peintures les plus neuves et les plus riantes ; il semble déchiffrer parfois, en contemplant la nature, ce que d’autres après lui y liront avec plus d’ampleur et de facilité : mais ce qu’il possède incontestablement, sans parler de son style réel et hardi dans sa simplicité, c’est le fond même de la poésie qui lui est propre ; il en occupe toutes les sources pures émanées d’Éden, et il pratique tous les sentiers qui peuvent y ramener.

1331. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — I » pp. 93-111

Toutefois, ayant eu l’occasion de parcourir à la bibliothèque du Louvre, grâce à la parfaite obligeance du bibliothécaire administrateur, M. 

1332. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

Maurepas fut le type le plus parfait, au xviiie  siècle, de cette espèce de frivolité et de ce méchant esprit dans un homme en place.

1333. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Il y arrive, à l’éloquence, dans sa lettre du 22 mars 1740, non sans avoir passé par quelques lenteurs ; car il résume assez longuement les espèces de conférences morales qu’il tient avec le chevalier : ces conversations pour former un parfait honnête homme sont un peu sermon pour nous, comme elles l’étaient probablement pour son impatient élève ; puis tout à coup, à propos des lectures qu’il lui voudrait voir faire, entre autres celle des Vies de Plutarque, il s’enflamme et se laisse emporter : C’est une lecture touchante, j’en étais fou à son âge ; le génie et la vertu ne sont nulle part mieux peints ; l’on y peut prendre une teinture de l’histoire de la Grèce, et même de celle de Rome.

1334. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — II » pp. 18-34

Tout rentra dans l’ordre ; et Guérin, à la veille de se trouver lancé dans la mêlée du monde, goûta quelques mois de parfaite harmonie.

1335. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Il n’était pas de ceux qui « s’agréent en eux-mêmes », qui « estiment ce qu’ils tiennent au-dessus du reste », et « ne reconnaissent aucune forme plus belle que celle qu’ils voient. » Il laissait aux esprits routiniers ce parfait contentement de soi, des siens et de la coutume.

1336. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

Au réveil, le lendemain, et se croyant tout de bon homicide, il se voit recherché en effet, mené en cérémonie sur la place publique, solennellement accusé par une espèce d’avocat général qui fait un réquisitoire dans les règles : la parodie est parfaite.

1337. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire. »

Puis, et toujours de souvenir en souvenir, je me suis mis à ressonger mélancoliquement à Ducis, au bon Ducis, comme on l’appelle, qui en son temps avait entamé et remué cette grosse question dramatique à tout hasard et par pur instinct ; qui aima Shakspeare d’élan et de vague sympathie sans trop savoir pourquoi et sans l’avoir jamais connu, et de qui l’on a pu dire bien spirituellement, ici même, « qu’il a fait toute une révolution sans le vouloir, comme cela est arrivé quelquefois à la garde nationale67. » Le mot est parfait, mais il y a des jours, ne l’oublions pas en parlant de Ducis, où un garde national a son héroïsme aussi et se bat comme un lion.

1338. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

C’est à croire que la Nature, après avoir produit l’auteur des Maximes, c’est-à-dire le moins dupe des hommes, s’est fait un malin plaisir de lui opposer le plus parfait contraste dans un de ses rejetons et qu’elle a voulu prendre sa revanche dans la même famille.

1339. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet »

Par suite de je ne sais quel préjugé scolastique, nous sommes toujours tentés de faire plus de cas d’un peintre qui, pour peindre, s’enferme, regarde moins la nature, étudie les vieilles toiles et peut-être même les livres, que d’un peintre vif, avisé, extérieur, tourné à l’action, avide de mouvement, doué de toutes les adresses corporelles, excellent tireur, excellent lutteur, parfait cavalier, habile à tous les exercices qui eussent honoré un Grec du temps de Xénophon.

1340. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Cette restitution ingénieuse, qu’on admirerait si elle s’appliquait à une maison romaine du temps d’Auguste ou de Trajan ou à un intérieur de châtelaine du Moyen-Âge, ne mérite pas moins d’éloge et d’estime, se rapportant au xviie  siècle, qui est déjà pour nous une antiquité ; c’est un parfait tableau d’intérieur, digne en son genre de Mazois ou de Viollet-le-Duc ; on me saura gré de le donner ici : « Les époux Poquelin occupaient dans la maison de la rue Saint-Honoré une boutique avec salle à la suite servant de cuisine et probablement de salle à manger, et au-dessus de cette salle une soupente ; entre le rez-de-chaussée et le premier étage se trouvait une sorte d’entre-sol dans lequel étaient la chambre à coucher et un cabinet ; le premier étage était transformé en magasin.

1341. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois par M. Camille Rousset. Victor-Amédée, duc de Savoie. (suite et fin.) »

Le jeune duc, dans les derniers temps, paraissait soumis, résigné, caressant même, quand une maladie inopinée vint tout à coup à la traverse de ce parfait semblant d’obéissance.

1342. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Émile avait sauvé cela de ses premiers rêves, et toutes ses réflexions et ses expériences successives ne firent que l’y confirmer : il avait son système, son plan parfait et son idéal de société future, ce qu’on a pu appeler son coin d’utopie.

1343. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

Le premier Lauzun, si insolent et si dur avec Mademoiselle, avait fini par épouser une femme jeune, parfaite, dont lui-même, à certains moments de sincérité, se reconnaissait indigne : Bonneval de même, le futur pacha, avait une divine jeune femme qui avait fait de lui son idole chevaleresque et qui s’estimait heureuse pour des années quand elle l’avait entrevu au passage.

1344. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

Taine ne fait pas cet effort qu’il convient à l’historien littéraire d’exercer au besoin sur lui-même et contre lui-même, et il nous présente, avec une défaveur et une déplaisance marquées, ce poète réputé si longtemps le plus parfait de sa nation et que Byron saluait comme tel encore.

1345. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

S’il y avait trace aussi et aveu de quelque passion d’âge mûr, de quelque mystère de cœur, opposé au sentiment parfait d’une épouse fidèle, convenait-il de laisser de tels endroits et de découvrir le sein au défaut de la cuirasse ?

1346. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

Je conçois toutes vos inquiétudes, ne doutant pas de votre parfait attachement.

1347. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat. »

Ici Catinat va devenir négociateur ; on le charge d’une assez vilaine besogne et d’obtenir, d’arracher d’une manière ou d’une autre, et bon gré, mal gré, ce qui n’était pas dû en parfaite bonne foi.

1348. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre (suite et fin) »

La langue que parlait le grand roi était réellement en accord avec celle que parlaient ou qu’écrivaient de son temps les plus éloquents et les mieux disants des écrivains ; entre l’une et l’autre il y a convenance parfaite et harmonie.

1349. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Saint-Simon considéré comme historien de Louis XIV, par M. A. Chéruel »

Je conçois Saint-Simon exagérant, prenant et présentant pour un scélérat ou un coquin fini quelqu’un qui n’est coquin qu’à demi ; mais prendre pour un fourbe un parfait homme de bien et une belle âme, cela me paraît difficile à lui ; il a le flair de la vertu et du vice. — Eh !

1350. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

Son maintien est parfait ; quand elle le veut, elle est en général fort affable et populaire, et met beaucoup de grâce et d’agrément dans tout ce qu’elle fait et ce qu’elle dit.

1351. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « THÉOPHILE GAUTIER (Les Grotesques.) » pp. 119-143

Barbier, qui en a fait réunir les cahiers, les communique avec une parfaite obligeance.

1352. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVe entretien. Littérature grecque. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère » pp. 31-64

Mais nous ne croyons point et nous ne croirons jamais qu’une langue aussi parfaite de construction, d’image, d’harmonie, de prosodie, que la langue de l’Iliade, n’eût pas été écrite avant l’époque où Homère dicta ou chanta ses poèmes aux pasteurs, aux guerriers, aux matelots de l’Ionie.

1353. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre I. Le théâtre avant le quinzième siècle »

Je veux parler de l’imagination psychologique, du don de distinguer les formes générales des caractères et des vies humaines, et de composer les actes et paroles d’un personnage en parfait accord avec ses sentiments.

1354. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

Voici la première : « En cette parfaite association, sans joie… une seule note humaine et naturelle, l’enfant ; et cette note troubla l’harmonie. » Et voici l’autre : « … L’évolution toute naturelle de la douleur débordante à ce complet apaisement s’accentuait ici de l’appareil du veuvage inconsolable, etc…).

1355. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Son style militaire offre un digne pendant aux styles les plus parfaits de l’Antiquité en ce genre, à Xénophon et à César.

1356. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

Guizot parlait bien, mais sans rien d’extraordinaire ; il avait de la netteté, une lucidité parfaite d’exposition, mais des répétitions de termes abstraits, assez peu d’élégance, peu de chaleur.

1357. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

Le 11 de ce mois est mort, à l’âge de quatre-vingt-trois ans accomplis, un vieillard aimable, spirituel, qui recouvrait, sous les formes d’une politesse exquise et d’une parfaite urbanité mondaine, un caractère ferme, des opinions nettes et constantes, bien de la philosophie pratique ; un sage et un heureux qui avait conservé à travers les habitudes du critique, et avec un esprit volontiers piquant, un cœur bienveillant et chaud, une extrême délicatesse dans l’amitié.

1358. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Frédéric le Grand littérateur. » pp. 185-205

Enfin vous seriez parfait si vous n’étiez pas homme.

1359. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

Les Fables de Florian sont bien composées, d’une combinaison ingénieuse et facile ; le sujet y est presque partout dans un parfait rapport, dans une proportion exacte avec la moralité.

1360. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

» Il parle des principaux chefs et auteurs de ces maux avec mesure pourtant, et en parfaite connaissance de cause : jamais les Guise et Coligny n’ont été mieux jugés et mis en balance, vices et vertus, avec une plus impartiale équité.

1361. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

Ce qui lui manquait surtout, c’était le goût, si l’on entend par goût le choix net et parfait, le dégagement des éléments du beau.

1362. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Rulhière. » pp. 567-586

Homme de lettres, il était entré à l’Académie en 1787 avec un discours supérieur de vues et parfait d’élégance, qui lui avait valu un applaudissement unanime.

1363. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. » pp. 103-122

Son cerveau n’avait plus évidemment sa santé parfaite ni son équilibre ; il avait reçu un ébranlement.

1364. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « De la poésie et des poètes en 1852. » pp. 380-400

Il ne se pouvait de plus parfait contraste.

1365. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — II. (Suite et fin.) » pp. 421-440

Mme de Maintenon est inaccessible ; elle garde dans sa grandeur des habitudes de vie étroite et particulière : c’est comme un reste de prude dans une personne de si parfait agrément.

1366. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — I. » pp. 84-104

Mme Courier aurait bien désiré que le passage où se trouvait le mot d’équipée fût modifié et adouci, et elle visita Carrel : « Je vis là pour la première fois Mme Courier, me dit un témoin fidèle, et je n’oublierai jamais ni l’esprit avec lequel elle défendit sa thèse, ni la grâce parfaite de Carrel, maintenant son dire et son jugement. » Nous avançons lentement avec Carrel ; c’est que ce n’est pas un talent littéraire tout simple ni de première venue : c’est un esprit éminent, un caractère supérieur qui s’est tourné par la force des choses aux lettres, à la politique, qui s’y est appliqué avec énergie, avec adresse, et finalement avec triomphe, mais qui était plus fait primitivement, je le crois, pour devenir d’emblée un des généraux remarquables de la République et de l’Empire.

1367. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Si au contraire on cherche le goût, il faut s’en tenir à l’édition de Daunou (1826) ; il ne manque à cette dernière, pour être parfaite littérairement, qu’un sentiment plus net et plus sûr de ce qui distingue la bonne poésie de la bonne prose.

1368. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Le premier grand projet littéraire du jeune homme, cet idéal suprême qui ne prend bien qu’une fois dans notre imagination, comme le parfait amour ne prend peut-être qu’une seule fois dans notre cœur, se forma pour de Brosses sous le regard et sous l’influence du président Bouhier.

1369. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — II. (Fin.) » pp. 246-265

Il est un de ces architectes qui aiment mieux corriger les défauts d’un ancien bâtiment et le réduire par leur art à quelque symétrie supportable, que de le jeter à bas sous prétexte d’en rebâtir ensuite un autre tout parfait et accompli.

1370. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers libre  »

205, — toutes les autres rimes dites masculines pouvant s’accoupler en parfaite parité de son avec des rimes dites féminines, c’est-à-dire ornées du traditionnel e muet206.

1371. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

Il les veut si purs, il les rêve si parfaits, qu’il affecte de considérer comme un crime, chez un bourgeois, une action qui serait simplement douteuse si elle avait pour auteur un artisan ou un rustre.

1372. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 38, que les peintres du temps de Raphaël n’avoient point d’avantage sur ceux d’aujourd’hui. Des peintres de l’antiquité » pp. 351-386

La peinture et la sculpture, il est vrai, sont deux soeurs, mais elles ne sont pas dans une union si parfaite, que toutes leurs destinées leur soient communes.

1373. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

Et, dût-il s’en fâcher tout rouge, nous répéterons que la littérature contemporaine lui doit de fort poétiques pages : on n’est pas parfait.

1374. (1892) L’anarchie littéraire pp. 5-32

Le Décadisme est mort et enterré : Le Décadent est un homme tellement parfait qu’il n’y en a plus.

1375. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

Jusque-là, si quelque chose d’analogue avait été tenté en Angleterre ou en Allemagne, rien de si parfait, de si net, de si plein et en même temps de si rapide, n’avait été réalisé.

1376. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre IV. L’unification des sociétés »

« Le soleil s’est levé, disparaissez étoiles. » Ainsi Provinciaux, Italiens et Romains « s’abaissaient tous au niveau d’une parfaite égalité devant le pouvoir souverain qui planait sur le monde215 ».

1377. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Il retrouve par là le classicisme de la greffe parfaite entre la nature et le livre, celui de Ronsard et de La Fontaine. […] Le parfait pamphlet, ce genre passager, ne se trouve que là, comme les vraies rillettes à Vouvray même. […] Cette souveraineté du monologue est d’autant plus frappante qu’elle est juxtaposée sans s’y mêler à une personnalité commune et dialoguante, celle d’un homme d’esprit, d’un homme du monde parfait, d’un causeur charmant, d’un ami attentif et généreux, d’un fils admirable, d’un père affectueux, d’un amant aussi délicat que tendre.

1378. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

Elles ne sont ni nombreuses, ni parfaites. […] je prie Dieu que mon malheur, jamais, ne m’éloigne de ces lieux. » Voilà la vie d’un prêtre de campagne peinte avec un naturel parfait, poétiquement sans doute mais très exactement ; je ne crois pas que nos écrivains du temps aient connu cette rusticité, et, comme le bon recteur, aient su apprécier la bonhomie de la vie campagnarde. […] Cette poésie n’est parfaite et pure que dans le christianisme ; mais on la trouve, plus ou moins altérée, dans toute croyance qui affirme et reconnaît la personnalité humaine et la personnalité divine, même dans ces religions où le divin absorbe l’humain, où cette absorption n’est point totale, mais seulement une évolution de l’essence infinie en réalité féconde et inépuisable. […] Certes, l’Académie ne l’est pas : elle le prouva, ne sachant ouvrir ses portes — pour ne rien dire de Molière ou de Balzac — ni à Théophile Gautier, ni à Paul de Saint-Victor, ni à Fromentin, ni à Flaubert, ni même à Théodore de Banville, le parfait rimeur, quand il avait du talent. […] Le moyen est parfait s’il me mène à mes fins.

1379. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

Pelham, quoique mutilé avec une liberté plus que cavalière, fût cité partout à Paris, dans les cafés et les salons comme le manuel du dandysme le plus parfait et le plus pur. […] Laval et Lautrec sont généreux et chevaleresques ; la comtesse de Châteaubriant, jusqu’au moment de sa chute, est d’une vertu exemplaire, et même après qu’elle a souillé sa vertu d’une tache ineffaçable, elle garde encore dans toute sa conduite une parfaite innocence. […] Il y eut, d’une part, approbation silencieuse, et de l’autre indifférence parfaite. […] Le commencement surtout est confus ; mais le caractère de la comédienne est parfait. […] Mais outre ces deux figures principales, il y a, pour couvrir la toile, plusieurs autres types finement indiqués, et qui donnent à tout le récit un naturel parfait.

1380. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Il est absolument parfait. […] Nous ne verrons rien de comparable à ces deux théâtres demi-circulaires de Pison, qui d’abord se tournaient le dos (on donnait la comédie dans l’un et, dans l’autre, des jeux de gladiateurs), et qui ensuite pivotaient sur eux-mêmes et rejoignaient leurs extrémités, de manière à former un cercle parfait. […] J’ai constaté qu’en Algérie les indigènes regardaient nos chemins de fer et toutes nos inventions avec une parfaite indifférence. […] Les filles qui font cela (et qui sont médiocrement belles) le font avec une indifférence parfaite, comme elles rameraient des choux. […] Et tous ces corps brefs semblent élégants, sans doute parce que, de ces innombrables formes féminines, qui se meuvent parallèlement et dont les défauts se compensent, l’œil extrait involontairement une forme moyenne, qui a des chances d’être à peu près parfaite.

1381. (1899) Arabesques pp. 1-223

Tous étaient de parfaites canailles, s’assassinant, se parjurant, se trompant, se traînant aux gémonies pour la plus grande gloire de Dieu dont tous s’affirmaient les mandataires exclusifs. […] Zola donne, avec une netteté parfaite, les raisons pourquoi tout individu épris de vie normale rejette cet avorton conçu par l’espèce dans un moment de maladie. […] Le seul endroit qui soit attirant en cette ville de tourisme et de soldatesque, c’est un jardin situé près de l’étang des carpes et dans lequel prospèrent des chênes, des hêtres, des trembles et surtout des pins sylvestres d’une élégance parfaite. […] — Le philologue : il apprend à bûcher. — Quel est l’homme parfait ? […] Nullement : une pensée jaune est aussi belle, aussi parfaite en ses organes qu’une pensée panachée.

1382. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

Quel plaisir parfait on éprouve à écouter cette langue impérissable et jeune ! […] Ce misérable Kotzebue, par exemple, qui écrivit Misanthropie et repentir, était un chantre de l’humanité heureuse, parfaite, morale ; il se disait plein de mansuétude pour toute chose, et au fond, on sait trop ce qu’il aimait : l’argent et l’intrigue. […] — tout est parfait, tout est achevé. […] Non seulement l’œuvre d’art est superbe, d’une conservation parfaite, — quelques repeints exceptés, dans le bras, — mais encore c’est là comme une page d’histoire. […] Celle de La Fontaine s’y trouve, puis d’autres encore, mais nous n’en citerons que deux : Si dans son art c’est être un ouvrier parfait,                Que savoir trait pour trait                        Imiter la nature,                Molière doit passer pour tel ; Michel-Ange, Lebrun et toute la peinture Comme lui n’ont su faire un mort au naturel.

1383. (1875) Revue des deux mondes : articles pp. 326-349

L’expression de nos sentiments se fait par un échange entre le cœur et le cerveau, les deux rouages les plus parfaits de la machine vivante. […] Or, pour trouver la vérité, il suffit que le savant se mette en face de la nature, qu’il l’interroge librement en suivant la méthode expérimentale à l’aide de moyens d’investigation de plus en plus parfaits, et je pense que dans ce cas le seul système philosophique consiste à ne pas en avoir. […] La volonté qui part du cerveau ne s’exerce donc pas sur nos organes locomoteurs eux-mêmes ; elle s’exerce sur des centres nerveux secondaires qui doivent être pondérés par un équilibre physiologique parfait. […] Ce n’est donc pas un antagonisme qu’il faut voir entre les phénomènes chimiques et les manifestations vitales ; c’est au contraire un parallélisme parfait, une liaison harmonique et nécessaire. […] Si l’homme et les animaux à sang chaud paraissent libres et indépendants dans leurs manifestations vitales, cela tient à ce que leur corps présente un mécanisme plus parfait qui lui permet de produire de la chaleur en quantité telle qu’il n’a pas besoin de l’emprunter nécessairement au milieu ambiant.

1384. (1890) Le réalisme et le naturalisme dans la littérature et dans l’art pp. -399

C’est un accord savamment établi, harmonieux d’ailleurs et humainement parfait. […] D’abord il cède souvent la place à un précepteur plus aimable en qui Mentor se double de Calypso, à la princesse des Belles-Cousines, jeune veuve, qui, ne voulant pas renoncer à l’amour tout en renonçant au mariage, avise un jouvencel de treize ans, le petit Jehan de Saintré, se met en l’esprit de parachever son éducation et lui enseigne tout ce que dame jeune, vivant à la cour, plus belle que sévère, experte aux devis d’humaine sapience et aux déduits d’amour, peut inventer à cette fin « que son élève devienne un chevalier parfait, tant pour le renom qui s’acquiert dans les tournois et batailles que pour le los qu’on gagne à converser ès chambres des dames ». […] Ces comparaisons ne sont pas d’une justesse parfaite. […] « Chaque herbe, chaque fleur des champs a sa beauté distincte et parfaite, elle a son habitat, son expression, son office particulier, et l’art le plus élevé est celui qui saisit ce caractère spécifique, qui le développe et qui l’illustre, qui lui donne sa place appropriée dans l’ensemble du paysage et par là rehausse et rend plus intense la grande impression que le tableau est destiné à produire » ; impression toute bienfaisante qui est un excellent moyen d’édification : « Surprendre dans l’herbe ou dans les ronces ces mystères d’invention ou de combinaison par lesquels la nature parle à l’esprit ; retracer la fine cassure et la courbe descendante. et l’ombre ondulée du sol qui s’éboule, avec une légèreté, avec une finesse de doigté qui égalent le tact de la pluie ; découvrir, jusque dans les minuties en apparence insignifiantes et les plus méprisables, l’opération incessante de la puissance divine qui embellit et glorifie ; proclamer enfin toutes ces choses pour les enseigner à ceux qui ne regardent pas et qui ne pensent pas : voilà ce qui est vraiment le privilège et la vocation spéciale de l’esprit supérieur ; voilà par conséquent le devoir particulier qui lui est assigné par la Providence. » Ainsi c’est « par la lettre que doit régner l’esprit ». […]   Avec une résolution sûre d’elle-même, avec un de ces partis pris auxquels la spontanéité géniale d’un Hugo ne peut jamais se résoudre irrévocablement, mais dont s’accommode le talent, si haut, si original, si parfait qu’il soit, M. 

1385. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

Bien plus, après tant de mesures, d’additions, de soustractions et de récapitulations, il a des motifs de doute ; il doit se demander si ses triangles tracés sont absolument parfaits, si les divisions de son demi-cercle sont rigoureusement égales, si, en appliquant son demi-cercle aux angles, il fait coïncider exactement les lignes des divisions avec les côtés des angles. […] Partant, tout ce qu’il peut affirmer, c’est que, dans des triangles sensiblement parfaits, la somme des trois angles est sensiblement égale à deux droits. — À présent, faisons intervenir le géomètre ; il ne trace qu’un triangle ; encore n’est-ce point de celui-ci qu’il s’occupe ni d’aucun autre triangle tracé ; son objet est un triangle quelconque ; il nous en avertit expressément ; la figure sensible n’est pour lui qu’un moyen de faire plus aisément une construction mentale ; ses yeux suivent sur le papier ou sur le tableau des lignes idéales auxquelles le tracé physique ne correspond qu’à peu près. […] chez les divers corps, la tendance vers le bas pour la pierre qui tombe, la tendance vers le haut pour l’air et le feu qui montent, la tendance au mouvement parfait ou circulaire pour les astres qui tournent, l’horreur du vide, etc.

1386. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

» et que s’étant retournée, elle avait aperçu un jeune homme d’une ressemblance parfaite avec moi, un de Goncourt de 25 ans. […] Maupassant, de retour de son excursion en Afrique, et qui dîne chez la princesse, déclare qu’il est en parfait état de santé. […] Du reste cette danseuse, une danseuse tout à fait extraordinaire, et qui lorsqu’on l’applaudissait, dans la parfaite immobilité de son corps, avait l’air de vous faire de petits saluts avec son nombril.

1387. (1910) Rousseau contre Molière

Alceste le lui dit avec une sincérité absolue et une clarté parfaite ; mais avec la politesse qui lui est due. […] Mais, rien n’étant parfait ni personne, Philinte a un défaut dont il ne fait pas mention dans le portrait qu’il trace de lui-même. […] Cependant ce portrait du vrai Philinte, du parfait Philinte, étant inspiré à Rousseau par le Philinte imparfait, par le Philinte manqué de Molière, nous fait mieux comprendre comment Rousseau a entendu le Philinte de Molière, comment il lui est impossible de ne pas l’entendre. […] Qui se ferait une idée du XVIIe siècle d’après ce que nous en a peint Molière se figurerait un temps où les hommes, parfaits du reste, n’ont eu à se reprocher que quelques légers ridicules. […] Et maintenant, replaçons Cléante et demandons-nous un peu quelle est, à le bien voir et à le bien prendre, la religion de ce très parfait honnête homme, la religion de celui-ci même.

1388. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

Dans l’article Genève, il parle ainsi d’eux : « Plusieurs ne croient plus la divinité de Jésus-Christ, & n’ont d’autre religion qu’un socianisme parfait, rejettant tout ce qu’on appelle mystère ». […] Plusieurs de ces messieurs, dit-il, s’imaginent que le premier caractère d’une religion est l’accord parfait de celle-ci avec la raison. […] « Plusieurs pasteurs de Genève n’ont, selon vous, qu’un socianisme parfait. […] Il resteroit donc à penser, sur ceux de nos pasteurs, que vous prétendez être sociniens parfaits, & rejetter les peines éternelles ; qu’ils vous ont confié là-dessus leurs sentimens particuliers : mais, si c’étoit en effet leur sentiment, & qu’ils vous l’eussent confié, sans doute ils vous l’auroient dit en secret ; dans l’honnête & libre épanchement d’un commerce philosophique, ils l’auroient dit au philosophe & non pas à l’auteur ». […] A peine fut-il libre, qu’il reprit son train ordinaire de vie, joignant, à la réputation d’écrivain le plus ingénieux, le plus piquant, le plus naturel & le plus agréable de son siècle, celle d’épicurien parfait.

1389. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

Thiers à l’entreprendre, et qui, le voyant ensuite si bien attaquer l’œuvre, y renonça lui-même avec une parfaite bonne grâce. […] Cousin l’écrivait récemment34, « le style n’est rien que l’expression de la pensée et du caractère : quiconque pense petitement et sent mollement n’aura jamais de style ; quiconque, au contraire, a l’intelligence élevée, occupée d’idées grandes et fortes, et l’âme à l’unisson de cette intelligence, celui-là ne peut pas ne pas écrire de temps en temps des lignes admirables, et, si à la nature il ajoute la réflexion et l’étude, il a en lui de quoi devenir un grand écrivain. » Napoléon, certes, réunissait en lui plusieurs de ces hautes conditions, et, toutes les fois qu’il a parlé de ce qu’il savait à fond, il a dit les choses d’une manière parfaite, définitive.

1390. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE CHARRIÈRE » pp. 411-457

Elle habitait d’ordinaire à Colombier, à une lieue de Neuchâtel ; elle observa les mœurs du pays avec l’intérêt de quelqu’un qui n’en est pas, et avec la parfaite connaissance de quelqu’un qui y demeure. […] Mistriss Henley, personne romanesque et tendre, épouse un mari parfait, mais froid, sensé, sans passion, un Grandisson insupportable, lequel, sans s’en douter et à force de riens, la laisse mourir.

1391. (1813) Réflexions sur le suicide

Il s’y mêlait, assure-t-on, la plus parfaite innocence. […] C’était une personne d’une piété parfaite, et dont toute l’existence était empreinte de douceur et de dignité.

1392. (1893) Du sens religieux de la poésie pp. -104

D’autre part, l’expression industrielle ou scientifique est vérifiable parce qu’elle est limitée, parce qu’elle s’adresse au raisonnement : l’expression poétique, sans désintéresser la raison, s’adresse au sentiment surtout, garde du vague à cause de l’infini de son domaine, qui est le parfait ou le divin, et à cause aussi des variations individuelles de ses procédés qui sont souples, subtils et changeants comme l’âme même de l’artiste et sa compréhension personnelle de la beauté. […] Peut-être peut-on supposer un peu plus longue l’opération de mémoire essentielle à la parfaite compréhension de l’œuvre pour un esprit toujours gouverné par la pensée générale et curieux aussi des lignes arabesques dont elle s’agrémente ou à dessein se travestit.

1393. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Si je ne cite aucun des écrits plus récents qui ont pu paraître sur Swift, c’est que je n’ai trouvé dans ceux que j’ai pu lire que la collection habituelle de ces anecdotes, que d’innombrables notices sur Swift ont déjà répandues dans le public, et parmi lesquelles j’avais déjà choisi le petit nombre de celles qui me semblent nécessaires pour la parfaite intelligence du caractère de ce grand écrivain ; et celles-là, Craufurd, Walter-Scott, et les œuvres mêmes de Swift me les avaient fournies. […] L’astrologue Bickerstaff, qui, en 1708, prédisait comme « une bagatelle51 » la mort de son rival Partridge, et soutenait, au point d’embarrasser le vivant lui-même, que sa prédiction s’était accomplie ; le valet-secrétaire de Prior, qui, en 1713, racontait avec tant de naturel le voyage de Prior en France et ses entretiens avec Madame de Maintenon52 ; le drapier, enfin, qui voulait échanger marchandises contre marchandises et qui n’eût pas voulu de Wood pour garçon de boutique : tous ces êtres imaginaires, si vivants et si réels, le cèdent encore au parfait naturel et à la véracité ingénue de Gulliver.

1394. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Ce qu’il faut marquer, c’est, au lieu de l’acrimonie et de la malveillance qu’on s’est plu à chercher en ces pages, la parfaite et essentielle bonhomie qui, évidemment, respire en elles, à chaque ligne, et qui permit à Wagner de les joindre à ses Œuvres complètes, en 1873. […] Parsifal, sans être, déjà, un Drame, tient la traduction, parfaite, de telles émotions ; Ma Religion est un merveilleux poëme de psychologie, où vit l’âme de Tolstoï, mieux que, en Anna Karénîn, les âmes préférées.

1395. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

L’orfévrerie en grand et en petit, enfin tous les arts qui relevent du dessein sont plus parfaits en France que par tout ailleurs. […] Il semble que cet esprit s’en retire après avoir rendu deux ou trois generations plus parfaites que les generations précedentes et que les generations suivantes.

1396. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Et puis l’ambition lui est venue : du moment qu’il n’est plus un simple particulier, jouissant à son gré des douceurs et des agréments de la société, il n’y a plus qu’à être un homme public occupé et utile ; il résume en termes parfaits cette alternative : « Être libre et maître de son loisir, ou remplir son temps par des travaux dont l’État puisse recueillir les fruits, voilà les deux positions qu’un honnête homme doit désirer ; le milieu de cela ressemble à l’anéantissement. » De Versailles, certains ministres, qui craignaient son retour, lui tendaient des pièges ; on employait toutes sortes de manèges dont le détail nous échappe, pour l’immobiliser là-bas dans ses lagunes : « Je vois clairement, disait-il, que, par ces artifices, on trouvera le secret de me faire rester les bras croisés dans mon cul-de-sac. » Duverney le conseillait et le calmait dans ces accès d’impatience, qui sont toujours tempérés de philosophie chez Bernis, et qui ne vont jamais jusqu’à l’irritation : Tout ici-bas dépend des circonstances, lui écrivait Duverney, et ces circonstances ont des révolutions si fréquentes, que ce que l’on peut faire de plus sage est de se préparer à les saisir au moment qu’elles tournent à notre point.

1397. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

Louis XV coupa court à la difficulté par un ordre que Bernis reçut le 13 décembre et qui l’exilait dans son abbaye près de Soissons : une lettre de lui au roi écrite au reçu de l’ordre, et une autre lettre écrite dans la soirée de la même journée à Mme de Pompadour, n’expriment que des sentiments de soumission parfaite et de reconnaissance infinie pour le passé, sans un seul mouvement de plainte.

1398. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — I. » pp. 325-345

Il eut là un moment de pureté encore, d’enthousiasme, mais aussi d’effort sur lui-même, qui lui laissa un vif et parfait souvenir : Je restai donc enthousiaste, dit-il.

1399. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — II. (Fin.) » pp. 513-532

Et lors je demandai à boire… — Notons la naïveté et la sincérité parfaite.

1400. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

Au contraire de la nature des femmes, elle n’a aucune envie de plaire, aucune coquetterie : « Nulle complaisance, dit Saint-Simon, nul tour dans l’esprit, quoiqu’elle ne manquât pas d’esprit. » On lui demandait un jour pourquoi elle ne donnait jamais un coup d’œil au miroir en passant : « C’est, répondit-elle, parce que j’ai trop d’amour-propre pour aimer à me voir laide comme je suis. » Le beau portrait de Rigaud nous la rend d’une parfaite ressemblance dans sa vieillesse, grasse, grosse, à double menton, aux joues colorées, avec la dignité du port toutefois et la fierté du maintien, et une expression de bonté dans les yeux et dans le sourire.

1401. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Rien d’abord ne paraît plus simple ; on se met en campagne ; on trouve bien des chemises de gens qui l’offrent d’eux-mêmes, et qui se piquent de parfait bonheur : aucune n’opère.

1402. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — I » pp. 139-158

Il fut malade trois jours ; durant ce temps, je le nourris moi-même, je le tins séparé de ses compagnons pour qu’ils ne lui fissent point de mal (car les lièvres, comme plusieurs autres animaux sauvages, tourmentent l’individu de leur espèce, qu’ils voient malade), et, grâce à des soins constants et en le traitant avec des herbes variées, je lui rendis une parfaite santé.

1403. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — III » pp. 178-197

Dans son premier chant, après cette promenade avec Mme Unwin que j’ai citée, et cette description si parfaite du paysage, il ne s’en tient pas là : comme poète, son morceau est fait ; comme amant de la nature, que de choses il a à dire encore !

1404. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

On m’a assuré qu’au Palais il était bon juge, sans avoir une parfaite connaissance des lois, parce qu’il a l’esprit droit et le jugement bon.

1405. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Une petite guerre sur la tombe de Voitture, (pour faire suite à l’article précédent) » pp. 210-230

Il reprocha à Costar (qui s’appelait primitivement Cousiart) son nom, sa naissance, l’état de ses père et mère, et jusqu’à celui de son grand-père, qui apparemment n’était pas en parfaite odeur.

1406. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — I » pp. 432-453

L’auteur des prétendus mémoires fait dire à la marquise « qu’elle a passé trente ans avec M. de Créqui dans un bonheur sans mélange. » Elle revient en plus d’un endroit, d’un air d’attendrissement, sur « tant d’années » d’un parfait bonheur qu’elle lui a dû.

1407. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie de Maupertuis, par La Beaumelle. Ouvrage posthume » pp. 86-106

[NdA] Le père de lord Bolingbrocke n’était pas lord et on ne l’appelait pas milord ; mais il ne faut jamais demander à La Beaumelle une parfaite exactitude.

1408. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

Si je perds l’image du parfait philanthrope et de l’homme de bien modèle qu’on avait réussi à nous faire accepter alors, je me dédommage de reste en retrouvant l’homme de bien original et particulier qui ne ressemble à nul autre.

1409. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Caillot d’un extrait du procès-verbal de la séance du 3 octobre 1793 (vieux style), constatant que notre Comité ne connaissait aucuns suspects ; — au bas duquel on a certifié « que les deux citoyennes Boufflers, en particulier, n’avaient donné aucune preuve d’incivisme ; qu’au contraire elles avaient manifesté la plus parfaite soumission aux lois. » Une autre pièce, également à décharge, présentait d’une manière avantageuse leur conduite depuis leur rentrée, et nous prouve toute la bienveillance qu’elles inspiraient : « An II, 5 germinal (25 mars 1794). — Extrait d’un tableau d’observations (en conciance) envoyé ledit jour par le Comité de surveillance d’Auteuil au Directoire du district de Franciade (Saint-Denis).

1410. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

Un homme qui connaissait bien les hommes, le cardinal de Forbin-Janson, avait tiré son horoscope : « M. de Noailles, avait-il dit, sera un jour chef de parti, mais ce sera sans le vouloir ni le savoir. » Encore une fois, au point de vue politique et ecclésiastique extérieur, et comme archevêque dirigeant tout un Ordre auguste et vénérable, M. de Harlay n’avait qu’un défaut, celui qui fit tort au sage roi Salomon ; et La Bruyère, ce grand et excellent juge, l’a dit avec bien de la modération et de la finesse ; car c’est très probablement à l’archevêque de Paris qu’il pensait lorsqu’il a tracé ce Caractère : « Il coûte moins à certains hommes de s’enrichir de mille vertus que de se corriger d’un seul défaut ; ils sont même si malheureux que ce vice est souvent celui qui convenait le moins à leur état et qui pouvait leur donner dans le monde plus de ridicule : il affaiblit l’éclat de leurs grandes qualités, empêche qu’ils ne soient des hommes parfaits et que leur réputation ne soit entière.

1411. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

En un mot, M. de Talleyrand, parfait diplomate et ambassadeur excellent, n’avait pas l’étoffe d’un premier ministre constitutionnel et d’un président du conseil.

1412. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Elle a beaucoup d’intelligence ; sa tenue est parfaite, et l’on pourrait même la proposer pour modèle à plus d’une actrice du premier Théâtre-Français.

1413. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — M. de Sénancour, en 1832 »

Les circonstances déterminent nos affections ; mais les sentiments expansifs sont naturels à l’homme dont l’organisation morale est parfaite.

1414. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « GRESSET (Essai biographique sur sa Vie et ses Ouvrages, par M. de Cayrol.) » pp. 79-103

C’est le poëte des Grâces, et il a prouvé qu’il pouvait être autre chose, de moins parfait à la vérité, mais qu’on croyait incompatible avec tant d’agréments et de légèreté.

1415. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

On y sent le tact parfait d’un homme qui n’écrit pas pour être lu, mais pour profiter aux familles.

1416. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

Ils les aiment pour leur inconscience plus grande, pour ce qu’ils ont gardé de rude et de primitif, pour la poussée, plus forte chez eux, des antiques instincts, et parce qu’ils font partie de la campagne et sont en parfaite harmonie avec elle.

1417. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

Ce dénouement serait parfait, s’il ne visait à la théorie ; mais il montre à la jeunesse la borne d’un champ comme le but de toute ambition, il lui trace un sillon pour unique carrière, il l’envoie planter ses choux avant l’âge… C’est trop de prudence et trop de sagesse. « Jeunesse oblige ! 

1418. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XII »

Pour celui-là, le type est parfait.

1419. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mlle de Lespinasse. » pp. 121-142

Mon ami, je suis parfaite, car je vous aime en perfection.

1420. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) «  Mémoires et correspondance de Mme d’Épinay .  » pp. 187-207

En quelques endroits seulement, quand elle veut faire du sentiment pur, quand elle veut hausser le ton, elle donne un peu dans l’invocation et l’exclamation, ce qui n’est permis qu’à Jean-Jacques ; mais partout ailleurs ce sont des lettres familières, des conversations vives, naturelles, dramatiques, reproduites d’un air parfait de vérité.

1421. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Procès de Jeanne d’arc, publiés pour la première fois par M. J. Quicherat. (6 vol. in-8º.) » pp. 399-420

» Ils revenaient sans cesse sur cette sotte question ; elle y coupa court en leur disant que l’archange, quand il lui apparaissait, « était en l’habit et la forme d’un très vrai prud’homme », — d’un parfait honnête homme.

1422. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon. » pp. 270-292

Sa femme, qui était Boucher d’Orsay, était une grande créature, maigre, jaune, qui riait niais, et montrait de longues et vilaines dents, dévote à outrance, d’un maintien composé, et à qui il ne manquait que la baguette pour être une parfaite fée.

1423. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

Développant pour la première fois cette pensée qu’il a depuis résumée ainsi et qui fait loi : « La littérature est l’expression de la société », M. de Bonald examine dans leurs rapports la décadence des arts et celle des mœurs : « Ce serait, ce me semble, nous dit-il, le sujet d’un ouvrage de littérature politique bien intéressant, que le rapprochement de l’état des arts chez les divers peuples avec la nature de leurs institutions. » Et il en donne à sa manière un aperçu, indiquant que la plus grande perfection des arts et des lettres, comme il les conçoit, répond généralement à l’état le plus parfait des institutions sociales, c’est-à-dire à la monarchie.

1424. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Mémoires du cardinal de Retz. (Collection Michaud et Poujoulat, édition Champollion.) 1837 » pp. 40-61

Après ces quatre premières années de la régence, durant lesquelles le mouvement d’impulsion donné par le cardinal de Richelieu continua de pousser le vaisseau de l’État sans qu’il fût besoin d’imprimer de secousse nouvelle, après ces quatre années de calme parfait, de sourire et d’indulgence, on entre, sans s’en apercevoir d’abord, dans de nouvelles eaux, et un nouveau souffle peu à peu se fait sentir : c’est le souffle des réformes, des révolutions.

1425. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame de Motteville. » pp. 168-188

Reposons-nous un moment avec Mme de Motteville, l’auteur des judicieux Mémoires, avec cet esprit sage et raisonnable qui a vu de près les choses de son temps, qui les a appréciées et décrites dans une si parfaite mesure, avec une si agréable justesse.

1426. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) «  Mémoires de Gourville .  » pp. 359-379

Gourville, en un mot, c’est le type le plus complet et le plus parfait de l’homme d’affaires ; il y a, par-ci par-là, un reste de subalterne en lui ; il y a du galant homme aussi, et même des commencements de l’homme d’État.

1427. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — II. (Suite et fin.) » pp. 341-361

Il était de ces individus distingués à qui il a été donné d’arriver à la perfection dans leur genre et de mettre le fini à leur nature : ils ont fait peu, mais ce peu est parfait et terminé.

1428. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — I. » pp. 41-62

Il était plein de l’Angleterre en arrivant, et il dut repousser et ajourner l’idée de publier d’abord un livre sur ce gouvernement original et si peu semblable au nôtre, qui le tentait : il donna de préférence ses Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence (1734), qui sont restées le plus classique et le plus parfait de ses ouvrages, le seul même qui nous paraisse aujourd’hui sorti tout d’un jet comme une statue.

1429. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — I. » pp. 127-148

Dans un petit journal de voyage écrit à l’âge de vingt ans (1726), pendant son retour de Londres à Philadelphie, parlant de je ne sais quelle peinture atroce qu’on lui fait d’un ancien gouverneur de l’île de Wight : Ce qui me surprit, dit-il, ce fut que le vieux bonhomme de concierge qui me parlait de ce gouverneur eût une si parfaite notion de son caractère.

1430. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Il pensait qu’il était difficile à chacun d’avoir de soi-même l’opinion qu’il en doit avoir : Les hommes qui ont une parfaite opinion d’eux-mêmes sont des heureux ridicules.

1431. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Je ne citerai que la première et la dernière de ces pièces que je viens d’énumérer ; la dernière d’abord, qui est parfaite : Le Colimaçon.

1432. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse esthétique »

Que l’artiste use d’éléments choisis dans le réel et agissant par leur vérité, ou d’éléments empruntés de même, mais de valeur émotionnelle accrue, parfaits, et agissant par leur caractère d’idéal, — qu’il se serve de faits minutieusement décrits comme dans tout l’art prosaïque et réaliste, ou de mots et par conséquent de types vagues, comme dans tout l’art poétique et idéaliste, puisés à ces deux sources, ses œuvres tenteront également d’émouvoir et d’émouvoir stérilement.

1433. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre VI. Des Livres qui traitent de la Rhétorique. » pp. 294-329

Un ouvrage si bien digéré, & dont toutes les parties tiennent par un fil presque imperceptible, suppose la méditation la plus profonde, la parfaite connoissance des vraies beautés de l’Eloquence, & l’attention la plus sérieuse aux principes & aux conséquences qui en résultent.

1434. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Non pas que ce drame, conçu dans une forme voulue, soit parfait au point de vue de ceux qui ne veulent voir dans toute œuvre dialoguée qu’une œuvre faite exclusivement pour être jouée sur un théâtre ; ceux-là trouveront des redites, des longueurs, de la monotonie, parce qu’ils se figureront qu’on ne peut goûter une conception d’art que dans un fauteuil d’orchestre, après un bon dîner, alors que l’esprit paresseux perçoit moins que les yeux, et que la digestion est plus responsable que l’homme de ses applaudissements, de ses sévérités ou de ses dédains. […] Son humeur n’avait pas d’aspérités et, sans quelques promptitudes, elle eut été d’une égalité parfaite. […] Nous ne sommes plus au grand siècle où l’on cherchait dans toutes les productions du génie cette fermeté et cette sobriété de caractère qui étaient l’expression de la raison parfaite. […] Abel Hermant, se faire passer pour mort, et faussement décédé, se livrer aux ébats qui rendent difficile le port, en parfait équilibre, d’une couronne sur la tête, d’un manteau d’hermine sur les épaules et d’un sceptre symbolique dans la main, que de compromettre aussi légèrement le prestige royal. […] Il y a des scènes de mariage, de forçats évadés devenus de parfaits gens du monde ; rien de plus étonnant que la description du petit village de Bourail, peuplé de bourgeois et de boutiquiers très honnêtes, tous anciens forçats.

1435. (1856) Articles du Figaro (1855-1856) pp. 2-6

Un poète n’est pas parfait. […] qu’à force d’être sensée notre littérature est à la veille de n’avoir plus le sens commun. — Tout ce qui se publie, tout ce qui se lit et s’affiche d’inédit, est d’une honnêteté, d’une bégueulerie, d’une anodinerie et d’une platitude parfaites. […] Pichat, si constamment belle et si irréprochablement parfaite, qu’on comprend, sans trop de peine, qu’elle soit passée au rang de favorite. […] Baschet l’avantage d’une exécution plus parfaite.

1436. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

Eugène Sue n’est l’idéal du parfait notaire. […] Comme il s’agit d’un même rôle, celui de Desdémone d’Otello, et que les expressions en sont presque identiques, j’extrais les lignes suivantes de celle des deux appréciations qui rend de la façon la plus complète la pensée de l’écrivain : « … Mme° Frezzolini, d’une beauté parfaite dans le rôle de Desdémone, a été, d’un bout à l’autre de cette élégie sublime, admirablement belle de poésie, de tendresse, d’accablement, de résignation douloureuse et de mélancolie profonde… c’est un modèle de sentiment, d’inspiration et de style. […] À l’Europe artiste L’Europe artiste, dont je suis l’obligé pour toutes les choses agréables que son rédacteur en chef ne cesse de dire et de penser de moi, relève, avec une courtoisie parfaite, une inexactitude d’appréciation qui se serait glissée, à mon insu suivant elle, dans le compte rendu de la Cour de Célimène. […] Je cite : « Il y avait ce soir-là, à l’Opéra, des Italiens, des Allemands, des Suédois, des Espagnols, des Hollandais, des Anglais qui jurèrent de n’avoir jamais rien entendu chez eux de plus exquis et de plus parfait … ils étaient venus de tous les points du globe ; ils parlaient au foyer toutes les langues et tous les patois ; mais ne croyez point qu’il y eût désordre et confusion comme à la tour de Babel, car ils s’accordaient tous à trouver Roger fort beau… Je ne parle pas des provinciaux de toutes les provinces, qui en étaient comme abasourdis… Cette soirée n’a été d’un bout à l’autre qu’un triomphe… La voix de Roger, loin de s’altérer ou de s’affaiblir au rude métier qu’il a fait dans ses derniers voyages, a gagné en force, en pureté, en volume. l’art n’a plus de secrets pour lui ; c’est un acteur et un chanteur complet.

1437. (1907) Le romantisme français. Essai sur la révolution dans les sentiments et dans les idées au XIXe siècle

Il termine en montrant comment le romantisme procède de l’esprit allemand, « sorte d’imagination à reculons qui s’évertue à réaliser la plus haute exaltation de la sensibilité dans le plus parfait vide de l’esprit » (Deuxième partie, livre 3, chap.  […] Il est difficile, après ce que nous savons de la stupidité native de l’homme et de sa parfaite sécurité dans cette condition, de comprendre que l’état social soit né. […] Ainsi leurs amours furent parfaites. […] ce poète n’était peut-être pas René ; mais il en avait profondément subi la séduction, qui ne laisse complètement intacte aucune des parties d’un cœur ou d’un esprit où elle a pénétré, qui ne laisse aucune place à la parfaite pureté du naturel dans le sentiment et la notion de la vie. […] Les meilleurs moralistes excellent à suivre et à démasquer les avatars infinis du combat intérieur qui n’existe plus chez le démon, malice incarnée, ni chez l’ange, vertu parfaite mais qui est la condition de l’homme.

1438. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Quoique Béranger ne m’ait fait à cet égard aucune confidence, je crois pouvoir écrire ces noms avec une sécurité parfaite. […] La Bacchante nous emporte bien loin des chansons du Caveau, si longtemps applaudies comme le modèle le plus parfait du genre. […] La malice se cache sous la bonhomie avec un art si parfait, que les intelligences vulgaires, en lisant cette chanson, peuvent s’étonner de l’admiration unanime qu’elle a excitée. […] Je ne vois qu’une seule manière de répondre à cette question : c’est d’admettre la sincérité parfaite du narrateur. […] Il a suffi d’un trait de plume pour biffer toute la science humaine, ou du moins la partie la plus sublime et la plus parfaite de la science.

1439. (1905) Études et portraits. Portraits d’écrivains‌ et notes d’esthétique‌. Tome I.

Seule la religion donne le mot de l’énigme : l’homme est grand parce qu’il a été créé parfait, et qu’en lui éclatent visiblement les traces de sa primitive splendeur. […] Mais aussi les tempêtes politiques et sociales qui ont passé sur notre France nous ont rendus presque incapables de manier les idées avec la parfaite indépendance qui fut l’étourderie charmante de nos aïeux. […] Vous me permettrez, messieurs, d’apporter ici mon tribut d’hommage a cette précieuse mémoire et de mettre sous les auspices de ce parfait prosateur, dont je m’honore d’avoir eu la sympathie, le court et un peu technique essai que je vais vous lire. […] L’un et l’autre étaient mis avec une recherche de tenue qui disait un goût à la fois très personnel et très sûr, — car une harmonie parfaite de physionomie et de toilette est chose aussi rare chez un homme à la mode que chez une femme élégante. […] La parfaite politesse des tragédies de Racine, elle aussi, décèle la parfaite politesse des aristocratiques spectateurs pour lesquels le poète ciselait ses alexandrins.

1440. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

parfaite, notable prostituée ! […] Pour faire des désespérés, des scélérats parfaits, des misanthropes acharnés69, pour noircir et blasphémer la vie humaine, surtout pour peindre la dépravation effrontée et la férocité raffinée des mœurs italiennes, personne ne l’égale70. […] » Voilà les touchantes et poétiques figures que ces poëtes mettent dans leurs drames ou à côté de leurs drames, parmi les meurtres, les assassinats, le cliquetis des épées, et les hurlements des tueries, aux prises avec des furieux qui les adorent ou les supplicient, conduites comme eux jusqu’à l’extrémité de leur nature, emportées par leurs tendresses comme ils le sont par leurs violences ; c’est ici le déploiement complet, comme l’opposition parfaite de l’instinct féminin porté jusqu’à l’effusion abandonnée, et de l’âpreté virile portée jusqu’à la roideur meurtrière.

1441. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

La prose parfaite et le style classique ont mis à la portée des esprits les plus arriérés et les plus lourds les opinions de la littérature et les découvertes de la science. […] En cinquante ans, la population double, et l’agriculture devient si parfaite que, malgré cet accroissement énorme de bouches qu’il faut nourrir, un sixième des habitants avec le même sol fournit des aliments au reste ; l’importation triple et au-delà, le tonnage des navires sextuple, l’exportation sextuple et au-delà1135. […] Un véritable historien n’est pas sûr que sa civilisation soit parfaite, et vit aussi volontiers hors de son pays qu’en son pays.

1442. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Puisque le printemps règne dans sa grâce parfaite, puisque les sèves s’émeuvent en frissons de verdure, puisque les femmes, dans le crépuscule, se trouvent tout alanguies d’une souffrance adorable et que le crépuscule lui-même paraît resplendissant de roses aériennes, obéissons donc aux vœux de cette saison, sachons y conformer nos lectures. […] N’est-ce pas d’une stupidité parfaite ? […] Je connais de lui des proses lyriques, passionnées, ensoleillées, qui sont presque parfaites.

1443. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Arrêtons-nous un moment à l’écouter sur ce point, et recueillons ses doctrines littéraires qu’il sut mettre en parfait accord avec la nature et la saveur de ses productions.

1444. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

D’Argenson aimait à faire ces sortes de plans ; il ne les faisait pas toujours aussi grandioses, et il les réalisait à moins de frais quelquefois (Voir, par exemple, dans ses Remarques en lisant, le no 2338, qui commence par ces mots : « Une vie parfaite avec sa maîtresse est celle-ci, etc. »).

1445. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

C’est à bien des égards un premier essai et un diminutif de parfait Condillacien.

1446. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire du règne de Henri IV, par M. Poirson » pp. 210-230

Sur celle-ci en particulier, tout a été dit de ce qui pouvait l’être ; les défauts et les mérites du livre ont été mis en lumière avec une mesure parfaite, dans une suite d’opinions qu’il eût suffi de sténographier pour avoir un excellent modèle de discussion littéraire et historique : que d’instruction j’y ai recueillie moi-même sur un sujet que j’avais précédemment étudié !

1447. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Son affectation alors était, dans la conversation courante, de nommer tout haut familièrement et avec un parfait sans-gêne les jeunes illustres ; s’il pouvait, dans un Cours public, pendant la demi-heure d’attente, citer tout haut, et en parlant d’un banc à l’autre, Alphonse, Victor, Alfred, Prosper, Eugène, il était content : cela voulait dire dans sa bouche, Lamartine, Hugo, de Vigny, Mérimée et Delacroix.

1448. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Don Carlos et Philippe II par M. Gachard Don Carlos et Philippe II par M. Charles de Mouy »

Il y a là trente pages (p. 237-266) d’une texture exacte et parfaite.

1449. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. »

Il fait donc des personnes qui sont entre elles en parfait rapport de mouvements, de gestes ; mais comme son faire modifie quelque peu les figures qu’il veut reproduire, qu’il a vues en réalité ou plutôt qu’il a présentes dans l’esprit et en idée, comme de plus l’impression sur la pierre va les modifier quelque peu encore, il attend le retour de l’épreuve afin de faire dire à ses personnages ce qu’ils ont l’air réellement de dire ;’et c’est alors seulement qu’il se demande en regardant son épreuve : « Maintenant que se disent ces gens-là ? 

1450. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier. »

Mais ici, partout, même dans les choses d’enfance et jusque dans lès blancheurs de l’aube, le trait est toujours pur, net, sans rien qui hésite ; le vers est parfait de rhythme et de forme.

1451. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc (suite et fin.) »

Hausse encore ; assez, arrête : c’est au mieux, c’est parfait.

1452. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. (suite et fin.) »

Son intégrité, dans les deux temps de sa vie publique, est parfaite et au-dessus du soupçon.

1453. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Essai de critique naturelle, par M. Émile Deschanel. »

Si je parlais à des Anglais je dirais : Est-ce que, pour le sentiment et la dégustation parfaite de Shakespeare, Charles Lamb n’est pas en progrès sur Pope — Eh !

1454. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

Parny, à cette date, était encore considéré par les hommes de l’école dernière du xviiie siècle, de l’école de Marie-Joseph Chénier, comme un parfait modèle d’élégance, de pureté (pour le goût), et le Racine de l’Élégie.

1455. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

Mes amis ont raison, j’aurais tort, en effet, De me plaindre ; en tous points mon bonheur est parfait : J’ai trente ans, je suis libre, on m’aime assez ; personne Ne me hait ; ma santé, grâce au ciel, est fort bonne ; L’étude, chaque jour, m’offre un plaisir nouveau, Et justement le temps est aujourd’hui très-beau.

1456. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

Puis il inaugure, avec Marguerite, mais dans une forme plus parfaite, la poésie moderne, dont la loi est vérité et sincérité : cette œuvre toute de circonstance et d’actualité est éminemment vraie et sincère.

1457. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Mouche et Mlle Préfère, deux vénérables personnes d’une hypocrisie sereine et d’une parfaite méchanceté, disent bien ce qu’ils doivent dire, mais ne le disent pas tout à fait comme ils le diraient dans la réalité : leurs propos, comme leurs figures nous arrivent répercutés et réfléchis  Cette continuelle et presque involontaire ironie, c’est bien le ton habituel d’un homme qui se regarde vivre lui et les autres, et pour qui tout est apparence, phénomène, spectacle ; car une telle façon de prendre le monde ne va pas sans un détachement de l’esprit qui est nécessairement ironique.

1458. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

Je n’irai pas jusqu’à dire avec La Bruyère que « les enfants des dieux se tirent des règles de la nature, que le mérite chez eux devance l’âge et qu’ils sont plus tôt des hommes parfaits que le commun des hommes ne sort de l’enfance ».

1459. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7761-7767

Les anciens n’avoient pas bien demêlé ceci ; ils regardoient comme des qualités positives toutes les qualités relatives de notre ame ; ce qui fait que ces dialogues où Platon fait raisonner Socrate, ces dialogues si admires des anciens, sont aujourd’hui insoûtenables, parce qu’ils sont fondés sur une philosophie fausse : car tous ces raisonnemens tirés sur le bon, le beau, le parfait, le sage, le fou, le dur, le mou, le sec, l’humide, traités comme des choses positives, ne signifient plus rien.

1460. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

C’est un art borné, mais parfait.

1461. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre douzième. »

Tels passages ressemblent à certains tableaux qu’on cite dans l’histoire de l’art ; il manque à ces tableaux, parfaits dans les détails, un objet principal dont tous les accessoires tirent leur prix.

1462. (1887) Discours et conférences « Rapport sur les prix de vertu lu dans la séance publique annuelle de l’Académie française »

À son arrivée à Château-l’Évêque, ce monsieur, qui est médecin, demande immédiatement des renseignements sur cette jeune fille qui l’a frappée, et, après qu’on lui a dit ce qu’elle est, ce qu’elle fait : — Mais cette jeune fille, dit-il, mérite le prix Montyon ; je la signalerai à l’Académie. » Je ne sais si la signature de cet admirateur d’Emmeline figure parmi les innombrables attestations qui montrent l’estimé que l’on professe pour elle à Chancelade et à Château-l’Évêque ; mais ce qui est bien honorable pour cette jeune fille, c’est la notice qu’a faite sur elle M. le curé de Château-l’Évêque, notice composée avec un sentiment des plus justes, un tact parfait, et une pleine inconscience littéraire.

1463. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

Le roi vit pour la première fois une taille parfaite, les plus beaux bras et le plus beau cou du monde… La vive rougeur de madame de Maintenon rendait en cet instant sa figure éblouissante ».

1464. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Huet, évêque d’Avranches, par M. Christian Bartholmèss. (1850.) » pp. 163-186

Quand il fut revêtu d’un caractère sacré, il s’attacha à disposer sa vie dans un parfait accord avec ses nouveaux devoirs.

1465. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Goethe et de Bettina, traduites de l’allemand par Sébastien Albin. (2 vol. in-8º — 1843.) » pp. 330-352

Cette vieille mère de Goethe, Mme la conseillère de Goethe, comme on l’appelait, d’un caractère si élevé, si noble, j’allais dire si auguste, toute pleine de grandes paroles et de conversations mémorables, n’aime rien tant que d’entendre parler de son fils ; elle a, quand on lui parle de lui, de « grands yeux d’enfant » qui se fixent sur vous et dans lesquels brille le plus parfait contentement.

1466. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

Il l’a comme sauvé au milieu des orages politiques de la vie active, à travers les luttes les plus vives qui aient mis un homme d’État en contradiction apparente avec son passé, tant il a laissé à tous, même à ses adversaires, le sentiment de sa droiture, de son haut désintéressement et de sa parfaite sincérité d’homme de bien !

1467. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

J’avais eu l’idée, après avoir montré le parfait langage du siècle de Louis XIV dans sa fleur et son élégance dernière chez la plus charmante élève de Mme de Maintenon, après avoir considéré le style du xviiie  siècle dans sa plénitude de vigueur et d’éclat chez Jean-Jacques Rousseau, d’aborder aussitôt la langue révolutionnaire chez l’homme qui passe pour l’avoir maniée avec le plus de verve et de talent, chez Camille Desmoulins.

1468. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

Pendant le ministère même des Girondins, Condorcet est en parfait accord avec eux, et ce n’est qu’après leur sortie du ministère qu’il pousse visiblement à l’insurrection qui doit les reporter au pouvoir.

1469. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame Émile de Girardin. (Poésies. — Élégies. — Napoline. — Cléopâtre. — Lettres parisiennes, etc., etc.) » pp. 384-406

L’auteur écrit ces petits feuilletons si légers, d’un style des plus nets, et les compose avec un art parfait ; l’imagination aussi s’en mêle.

1470. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « L’abbé de Choisy. » pp. 428-450

D’Alembert dans ses Éloges, le marquis d’Argenson dans ses Mémoires, ont donné sur Choisy des notices parfaites.

1471. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mademoiselle de Scudéry. » pp. 121-143

Tout apprendre, tout savoir, depuis les propriétés des simples et la confection des confitures, jusqu’à l’anatomie du cœur humain, être de bonne heure sur le pied d’une perfection et d’une merveille, tirer de tout ce qui passe dans la société matière à roman, à portrait, à dissertation morale, à compliment et à leçon, unir un fonds de pédantisme à une extrême finesse d’observation et à un parfait usage du monde, ce sont des traits qui leur sont assez communs à toutes les deux ; les différences pourtant ne sont pas moins essentielles à noter.

1472. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits du comte Joseph de Maistre. (1851, 2 vol. in-8º.) » pp. 192-216

Et M. de Maistre énumérait hardiment ces diverses suppositions : « Si la maison de Bourbon est décidément proscrite, il est bon que le gouvernement se consolide en France, il est bon qu’une nouvelle race commence une succession légitime, celle-ci ou celle-là, n’importe à l’univers… J’aime bien mieux Bonaparte roi que simple conquérant. » Si c’est le contraire qui arrive, et si les Bourbons ne sont pas à jamais rejetés, il faut bien qu’on leur prépare les voies du retour, car eux-mêmes ne sont pas gens à rien inventer pour cela : Les Bourbons français, dit M. de Maistre par une appréciation historique d’une parfaite justesse, ne sont certainement inférieurs à aucune race régnante ; ils ont beaucoup d’esprit et de bonté.

1473. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

Il y a jusqu’à la fin de délicieux détails ; mais le tout finit dans un parfait imbroglio et dans un tohu-bohu d’esprit.

1474. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

. — Son honneur durable, si on le dégage de tout ce qui a mérité de périr en lui, sera d’avoir été un excellent voyageur, d’avoir bien vu tout ce qu’il a vu, de l’avoir souvent rendu avec une exactitude si parfaite que l’art d’écrire ne se distingue pas chez lui de l’art d’observer, et une fois au moins, dans son tableau de la Syrie, d’avoir le premier offert un modèle de la manière dont chaque partie de la terre devrait être étudiée et décrite.

1475. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie »

Claude Bernard me paraît établir avec une parfaite rigueur qu’il y a un déterminisme absolu des phénomènes tout aussi bien dans l’ordre de la vie que dans l’ordre de la matière brute26.

1476. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Première partie. Écoles et manifestes » pp. 13-41

Il est la plus parfaite, et la plus complète figuration de l’idée.

1477. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XII] »

Aspirons à ces joies célestes, qui seront d’autant plus touchantes qu’elles seront accompagnées d’un parfait repos, parce que nous ne les pourrons jamais perdre.

1478. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Plan, d’une université, pour, le gouvernement de Russie » pp. 433-452

Si le plan général est au-dessus des ressources du moment, attendre d’un avenir plus favorable son entière et parfaite exécution, mais ne rien abandonner au caprice de l’avenir ; en user avec une maison d’éducation publique comme en use un architecte intelligent avec un propriétaire borné dans ses moyens ; si celui-ci n’a point de quoi fournir subitement aux frais de tout l’édifice, l’autre creuse des fondements, pose les premières pierres, élève une aile, et cette aile est celle qu’il fallait d’abord élever ; et lorsqu’il est forcé de suspendre son travail, il laissé à la partie construite des pierres d’attente qui se remarquent, et entre les mains du propriétaire un plan général auquel, à la reprise du bâtiment, on se conformera sous peine de ne retirer de la dépense qu’on a faite et de celle qu’on fera qu’un amas confus de pièces belles ou laides, mais contradictoires entre elles et ne formant qu’un mauvais ensemble.

1479. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Loutherbourg » pp. 258-274

Sur un de ces plans-ci, à gauche, tout à fait au loin, sur le fond, c’est un groupe de voyageurs qui se reposent, qui s’entretiennent, les uns assis, les autres couchés ; tous dans la plus parfaite sécurité.

1480. (1920) Action, n° 4, juillet 1920, Extraits

L’Atlante m’en voulut inonder, m’amenant d’un coup Careo et Apollinaire, Pour une modeste agape qui a laissé, je le crains, d’insuffisants souvenirs à notre parfait Tyrtéej de Montmartre, j’avais adjoint à tant d’inconnu, doux tempéraments, un poète suissek et un jeune peintre français qui revenait avec élégance du front où il avait reçu une blessure et trouvé envers les Hommes de la bonté fraternelle.

1481. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’art et la sexualité »

Le solitaire découvreur des terres vierges du songe ne permet pas aux grossiers produits d’humanité d’embarrasser la route qu’il suit, perdu qu’il est dans son rêve d’épuration toujours plus artistique et plus parfaite.

1482. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre IV. Le rêve »

Il faut d’ailleurs que tu obtiennes l’adhérence parfaite, qu’il n’y ait pas le plus léger écart entre eux (sinon, tu serais précisément dans le rêve) ; cet ajustement, tu ne peux l’assurer que par une attention ou plutôt par une tension simultanée de la sensation et de la mémoire : ainsi fait le tailleur quand il vient t’essayer un vêtement simplement « bâti » —, il épingle, il serre autant qu’il peut l’étoffe sur ton corps qui s’y prête.

1483. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Telle est son œuvre, à ce correct et parfait gentleman, comme nous disons aujourd’hui, et, encore un coup, il n’est ni méchant ni même corrompu. […] Il reste à la rendre parfaite dans son détail, et c’est, dans les ténèbres des salles de répétition, des prises et des reprises du rôle, vers à vers, mot à moi, jusqu’à ce que, parvenue aux derniers moments qui précèdent la représentation, l’actrice, par un suprême effort, incruste héroïquement son personnage fictif dans sa vie vraie. […] C’est le Paul Petrovitch Kirsanof de Pires et Enfants, qui achève de mourir en parfait gentleman sur la terrasse de Brühl, à Dresde. […] Barrès et qui explique cette absence de clarté parfaite que je signalais tout à l’heure, si un tel procédé est excellent lorsqu’il s’agit de la sensibilité d’un solitaire, retiré hors du siècle et soustrait aux influences du dehors, il n’en va pas ainsi lorsqu’il s’agit d’un jeune homme de nos jours, lancé en plein courant de vie extérieure, surtout lorsque ses souffrances intimes ont pour cause un conflit habituel avec cette vie extérieure. […] Elle n’est plus teintée, colorée, vibrée, affectée, elle est en équilibre… La paix psychologique, l’accord parfait et virtuel n’est que le zéro, puissance de tous les nombres ; elle n’est pas la paix morale, victorieuse de tous les maux, éprouvée, réelle, positive et pouvant braver de nouveaux orages… » Il suffirait de rencontrer quelques expressions de ce genre — et elles abondent dans le journal d’Amiel — pour conclure que l’écrivain capable de les découvrir n’appartient pas à la tradition française.

1484. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Il a dans l’âme la révélation des vrais attributs de la divinité : l’amour infini, la miséricorde sans limites qui, chez l’être parfait, n’est que la stricte justice. […] Une autre figure est placée immédiatement au-dessus, moins grandiose et moins parfaite ; elle va pourtant l’éclipser, car déjà la nuit se dissipe, le soleil monte, et le front de Byron se dore aux premiers reflets. […] Le classement qu’il avait entrepris devait être l’œuvre du reste de sa vie ; aussi n’est-il point parfait encore ; mais, tel qu’il est, il embrasse tant d’horizons qu’il s’en faut peu qu’on ne voie le monde entier du point où il vous place. […] Il parlait avec une bonhomie parfaite de ces premières tentatives, et les critiquait avec plus d’esprit que personne n’eût pu le faire. […] L’humanité n’est point si parfaite qu’il faille exiger d’elle l’amour du bien sans l’amour de soi dans le bien.

1485. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Mme de l’Ambermesnil approuva beaucoup les vues de son hôtesse sur le Goriot, vues excellentes, qu’elle avait d’ailleurs devinées dès le premier jour ; elle le trouvait un homme parfait. » IV Le drame du père Goriot commence avec une hideuse vérité, et finit avec une odieuse invraisemblance. […] On dit, je le sais, et je me le suis dit moi-même en finissant la lecture de ce merveilleux artiste : Il est parfait, mais il est triste ; on sort, avec des larmes dans les yeux, de cette lecture. — Balzac est triste, c’est vrai ; mais il est profond. — Est-ce que le monde est gai ?

1486. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLIXe Entretien. L’histoire, ou Hérodote »

L’histoire, ou Hérodote I Hérodote passe pour le premier (en ordre de date) des historiens grecs, cela n’est certainement pas vrai ; car Homère, dont il a écrit la biographie, est bien plus ancien qu’Hérodote, et l’histoire a, sans contredit, précédé la poésie et surtout la poésie parfaite. […] Ils ont adopté la circoncision par recherche de propreté, et paraissent faire plus de cas d’une pureté de corps parfaite que de tout autre ornement.

1487. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

Vous serez étonné de la prodigieuse activité de ce cerveau et de la parfaite bonté de cette âme. […] Mais rien ne l’avait amenée à réfléchir sur les préjudices que l’organisation présente de la société apporte aux privilèges de l’âme, et, par un autre instinct plus parfait dans son coeur et plus connu, elle se soumit humblement à ce qu’elle regardait comme la condition nécessaire de la femme, qui lui ôte le droit de choisir et ne lui laisse que tout juste celui de refuser.

1488. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

Je veux parler du laque, dont la qualité supérieure, la beauté suprême, le resplendissement parfait, sont si peu voyants : le laque qui vous ravit par ses reliefs qu’il faut presque deviner, par la laborieuse dissimulation de son éclat, par le discret emploi des ors usés, enfin par l’effacement distingué de son luxe et de sa richesse. […] Ce salon est le vrai salon du xixe  siècle, avec une maîtresse de maison qui est le type parfait de la femme moderne.

1489. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre III. De l’organisation des états de conscience. La liberté »

Mais le déterministe va beaucoup plus loin : il affirme que la contingence de notre solution tient à ce que nous ne connaissons jamais toutes les conditions du problème ; que la probabilité de notre prévision augmenterait à mesure qu’on nous fournirait un plus grand nombre de ces conditions ; et qu’enfin la connaissance complète, parfaite, de tous les antécédents sans exception aucune rendrait la prévision infailliblement vraie. […] Or, si l’on veut bien remarquer que ce fluide est d’une parfaite homogénéité, qu’il n’existe entre ses parties ni un intervalle vide qui les sépare ni une différence quelconque qui permette de les distinguer, on verra que tout mouvement s’accomplissant au sein de ce fluide équivaut en fait à l’immobilité absolue, puisque avant, pendant et après le mouvement rien ne change, rien n’est changé dans l’ensemble.

1490. (1842) Discours sur l’esprit positif

L’astronomie elle-même, quoique objectivement plus parfaite que les autres branches de la philosophie naturelle, à raison de sa simplicité supérieure, n’est vraiment telle que sous cet aspect humain : car l’ensemble de ce Traité fera nettement sentir qu’elle devrait, au contraire, être jugée très imparfaite si on la rapportait à l’univers et non à l’homme ; puisque toutes nos études réelles y sont nécessairement bornées à notre monde, qui pourtant ne constitue, qu’un minime élément de l’univers, dont l’exploration nous est essentiellement interdite. […] Dans les arts même les plus simples et les plus parfaits, un développement direct et spontané reste constamment indispensable, sans que les indications scientifiques puissent, en aucun cas, y suppléer complètement. […] Cette parfaite continuité spontanée deviendra surtout irrécusable à tous ceux qui reconnaîtront, dans l’ouvrage ci-dessus indiqué, que le même principe encyclopédique fournit aussi le classement rationnel des diverses parties constituantes de chaque étude fondamentale, en sorte que les degrés dogmatiques et les phases historiques peuvent se rapprocher autant que l’exige la précision des comparaisons ou la facilité des transitions.

1491. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

En tout ceci, Molière s’est montré d’une habileté et d’une convenance parfaites. […] Il n’y a rien de parfait ici-bas, heureusement pour les critiques, surtout pour ceux qui, de bonne heure, ont appris à contempler le grand, le beau, l’excellent, le parfait. […] C’est lui, c’est sa bonté, c’est son esprit, c’est son austérité tant soit peu janséniste, c’est le ton parfait qu’il avait pris, de très bonne heure, dans l’intimité du prince de Conti et dans les petits appartements du roi ; c’est son amour passionné pour cette indigne femme, si jolie et si éclatante, qui l’a rendu le plus malheureux des hommes ; c’est cette jalousie cachée dont il rougissait en lui-même comme il eût rougi d’une mauvaise action.

1492. (1892) Portraits d’écrivains. Première série pp. -328

Enfin, je ne crois pas qu’on puisse trouver nulle part de plus parfaite incarnation de la lâcheté masculine que ce « Monsieur Alphonse », qui a, suivant l’expression de son parrain, « déshonoré un nom de baptême » ; ou ce duc de Septmonts, que Sganarelle aurait appelé un grand seigneur méchant homme, et en qui le chimiste Rémonin ne voit qu’un vibrion. […] Leur corps a des lignes trop parfaites. […] De là les interminables énumérations d’objets qu’il emprunte aux traités spéciaux, et où il épuise la collection des Manuels-Roret. — C’est le manuel du parfait charcutier. […] Ou du moins il la résout dans le sens d’un accord intime et parfait. […] Que ce soit le bon docteur Rivais ou le bon camelot Bélisaire, leur bonté est trop parfaite et trop continue On leur voudrait une défaillance.

1493. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

Nous avons déjà dit ailleurs que cette sorte d’indépendance des manifestations vitales de l’homme et des animaux supérieurs est le résultat d’une perfection plus grande de leur organisme, mais non la preuve que les manifestations de la vie chez ces êtres, physiologiquement plus parfaits, se trouvent soumises à d’autres lois ou à d’autres causes. […] La machine humaine sera d’autant plus parfaite qu’elle se défendra mieux contre la pénétration des influences du milieu extérieur ; quand l’organisme vieillit et qu’il s’affaiblit, il devient plus sensible aux influences extérieures du froid, du chaud, de l’humide, ainsi qu’à toutes les autres influences climatériques en général. […] Le sexe et l’état physiologique des organes génitaux peuvent amener des modifications quelquefois très profondes, surtout chez des êtres inférieurs où les propriétés physiologiques des larves diffèrent dans certains cas complètement des propriétés des animaux parfaits et pourvus d’organes génitaux. […] De même en physiologie il ne faut jamais donner des descriptions moyennes d’expériences, parce que les vrais rapports des phénomènes disparaissent dans cette moyenne ; quand on a affaire à des expériences complexes et variables il faut en étudier les diverses circonstances et ensuite donner l’expérience la plus parfaite comme type, mais qui représentera toujours un fait vrai. […] Dans toute science le progrès réel consiste à changer les théories de manière à en obtenir qui soient de plus en plus parfaites.

1494. (1878) Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et aux végétaux. Tome I (2e éd.)

Or, c’est l’inverse qui est vrai : les découvertes de la physique et de la chimie biologique ont établi, au lieu de cet antagonisme, un accord intime, une harmonie parfaite entre l’activité vitale et l’intensité des phénomènes physico-chimiques. […] C’est un parallélisme parfait, une union harmonique nécessaire. […] C’est là que l’animal passe de l’état de larve à l’état parfait ; ses organes sexuels, qui ne s’étaient point encore développés, apparaissent et atteignent leur perfectionnement organique ; la femelle pond des œufs qui arrivent à éclosion et vivent à l’état de larve dans la cavité qui renferme les parents destinés à périr. […] L’organisme, a-t-on dit, est une machine, et même assez parfaite ; car, pour une semblable quantité de combustible, elle fournit deux fois plus de travail que les moteurs les plus économiques. […] Il y a bien longtemps que j’ai entendu dire à Mitscherlich : « La vie n’est qu’une pourriture. » Hoppe-Seyler (1875) s’exprime ainsi quelque part : « Sans vouloir poser en principe, l’identité de la vie organique avec la putréfaction, je dirai pourtant que, selon moi, les phénomènes vitaux des plantes et des animaux, n’ont pas d’analogues plus parfaits, dans toute la nature, que les putréfactions. » On admet donc que dans les organismes il peut y avoir des processus analogues à ceux de la pourriture.

1495. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

Dans la Fleur des pois, qui s’est appelée plus tard le Contrat de mariage, la physionomie des deux notaires, maître Mathias et maître Solonet, est parfaite ; rien de mieux posé que la scène où Mathias, le notaire de l’ancien temps, dispute à l’élégant Solonet, le notaire moderne, la fortune de son client, Paul de Manerville. […] Peut-être se servira-t-il, pour mieux l’écrire, des hommes d’esprit attelés d’abord à ce succès impossible en vertu de cette parfaite indépendance de goûts, d’opinions et d’idées, qui a toujours distingué l’école révolutionnaire, et qui a donné Panurge pour berger à tant de moutons démocratiques. […] Gaberel ; nous y avons rencontré un tel fond d’honnêteté et de bonne foi, une si parfaite convenance de ton et de langage, et, en même temps, des documents si nouveaux, si précieux pour cet intéressant chapitre de l’histoire littéraire du dix-huitième siècle, que nous n’avons pu résister au plaisir d’en causer un moment avec nos lecteurs. […] Nouvel indice de la parfaite aptitude, de la vocation éclatante de ce noble esprit pour ce beau sujet ! […] Il faut louer la parfaite indépendance avec laquelle M. d’Haussonville, malgré ses prédilections lorraines, raconte et juge cette étrange vie et cet étrange caractère, et l’art qu’il met à faire de son duc dépossédé le centre de ses tableaux, à y ramener constamment le lecteur sans se priver de ce que le voisinage ajoute de grandeur et d’intérêt à cet épisode historique.

1496. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

La réunion d’un certain art et du naturel au sein de l’imagination la plus vive n’aura lieu que chez Mme de Sévigné ; et cet art encore plus insensible et qui n’est plus que du goût, joint au naturel le plus parfait et le plus continu, ne se rencontrera qu’une fois dans tout son complet, chez Voltaire.

1497. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

En ces années où Bonstetten prend décidément son parti et où, faisant une bonne fois son deuil de tous les regrets, le rajeunissement pour lui commence, Genève offrait la réunion la plus complète d’esprits éclairés et distingués : Mme de Staël encore, qui allait trop tôt disparaître ; Dumont, l’interprète de Bentham, l’ancien ami de Mirabeau ; le médecin Butini ; l’illustre naturaliste de Candolle, « l’homme parfait, qui avait un aussi bon esprit pour les affaires du monde que pour les végétaux, et le cœur comme s’il n’avait que cela » ; les savants Pictet ; l’érudit Favre ; bientôt Rossi, dont l’esprit fin et l’habile carrière devaient aboutir à la grandeur ; Sismondi, droit, loyal, instruit, mais qui se trompait à coup sûr quand il croyait voir en Bonstetten « un débris de la secte de Voltaire » ; bien d’autres que j’omets, et jusqu’à cet aimable Diodati, qui m’a entretenu d’eux autrefois, et qui, le dernier de tous, vient tout récemment de mourir.

1498. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid, (suite.) »

Nation étrange et forte qui a enfanté, à quatre ou cinq siècles de distance, à l’origine et au déclin de la chevalerie, ces deux grands types, le Cid et don Quichotte, — l’idéal suprême et sa parodie parfaite, le premier des chevaliers et le dernier !

1499. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure  »

À mon retour de la Suisse française où j’avais gardé des amis, vers 1840, je concevais un parfait journal littéraire dont il y aurait eu un rédacteur double, l’un à Paris pour tout savoir, l’autre à Lausanne ou à Neuchâtel pour tout dire, — j’entends tout ce qui se peut dire honnêtement et avec convenance.

1500. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

Le maréchal Ney était le type de ce que l’on pouvait désirer de plus parfait en ce genre. » C’est qu’en effet, dans ce rôle de général d’arrière-garde, on ne perd pas de vue l’ennemi un seul instant.

1501. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

Le germe heureux, fils de l’onde ou des airs, Tout fruit parfait béni dans sa semence, Le gland du chêne, ou la perle des mers, Petit ou grand, est cher à l’univers.

1502. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — L'abbé de Lamennais en 1832 »

Dès 1807, nous voyons paraître de lui une traduction exquise du Guide spirituel, petit livre ascétique du bienheureux Louis de Blois ; la préface, aussi parfaite de style que tout ce que l’auteur a écrit plus tard, respire un parfum de grâce céleste, une ravissante fraîcheur de spiritualité.

1503. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

De l’importance de la littérature dans ses rapports avec la vertu La parfaite vertu est le beau idéal du monde intellectuel.

1504. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

votre bénédiction, mon père, avant de me quitter. » Aussitôt, courbant la tête, abaissant son regard et offrant la plus parfaite image de la piété, il répondit de mémoire et sacramentalement aux paroles et aux prières du prêtre, nullement ému de l’expression de la douleur de ses familiers qui éclatait et ne se dissimulait plus.

1505. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

« Lave tes mains et tes dents cure », dit Amour à son vassal ; point de parfait amant avec des ongles en deuil.

1506. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. Le théâtre romantique »

Le type parfait de cette comédie, c’est Bataille de Daines : cela ressemble aux petits jeux de société, où l’on fait trouver un objet caché : il s’agit d’escamoter, ou de découvrir un proscrit politique.

1507. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Francisque Sarcey »

Rien n’empêche d’ailleurs qu’un drame parfait soit par surcroît une œuvre de belle littérature : on en a vu des exemples aux deux derniers siècles et de nos jours.

1508. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Victor Hugo, Toute la Lyre. »

La preuve, c’est que Toute la Lyre se compose de pièces écrites par le poète aux diverses époques de sa vie, et que cependant l’unitéd’impression est parfaite, va presque jusqu’à l’ennui.

1509. (1921) Enquête sur la critique (Les Marges)

Marcel Ballot ou Philippe Gille, ses prédécesseurs ; Le Gaulois possède Abel Hermant, les Débats Pierrefeu et Narsy, Le Journal Descaves, Excelsior Brousson, etc… D’autre part de grandes revues ont créé des feuilletons littéraires qui naguère n’existaient point : Fernand Vandérem et Henry Bidou y tiennent au courant leurs lecteurs ; peut-être que la Revue des deux mondes, elle-même, jugeant le système bon, y viendra dans vingt ou vingt-cinq ans… Tout est donc parfait, et il semble, en somme, que les amateurs de littérature — ceux-là seuls importent — soient très suffisamment renseignés.

1510. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre huitième »

En tout cas, il en restera la plus parfaite expression, et s’il arrive jamais que les principes de la science sociale se perdent dans quelque catastrophe universelle, nos enfants pourront les rapprendre dans ce livre immortel, le legs le plus précieux que le dix-huitième siècle ait fait à la France, le plus grand service que la France ait rendu à la société moderne.

1511. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Appendice »

Le bonheur n’est pas quelque chose d’assez saint pour qu’il ne faille l’accepter que d’une parfaite raison.

1512. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre X. La littérature et la vie de famille » pp. 251-271

Mais il est bon de se rappeler que dans ce long effort, qui tend à établir une équivalence parfaite, c’est-à-dire une égalité de droits n’excluant pas une diversité de fonctions entre les deux moitiés de l’humanité, il y a eu des moments d’arrêt, de progrès rapide et aussi d’effervescence désordonnée.

1513. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre II : La Psychologie. »

Mill est en parfait accord avec eux et les cite fort longuement.

1514. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Discours préliminaire, au lecteur citoyen. » pp. 55-106

Oui, je suis Abbé [je veux dire, tonsuré], & je lis les Pieces de Théatre : je les lis, non pas comme ces Esprits superficiels à qui une légere broderie fait oublier les défauts du fond ; non pas comme ces Lecteurs humoristes que quelques pensées aussi fausses que hardies transportent, & qui ne peuvent être émus que par la bizarrerie & la surcharge ; non pas comme ces Panégyristes aveugles qui transforment en beautés les défauts, & immolent à leur prévention le goût & le bon sens ; non pas comme ces Journalistes à gages, qui ravalent des Grands Maîtres de la Scene, pour célébrer les intrus qui y rampent loin d’eux ; non pas enfin comme tant de petits Abbés frivoles, dignes échos des fatuités du siecle, comme ils en sont les parfaites images.

1515. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

Il est « Bouddha », c’est-à-dire sage, parfait et tout-puissant.

1516. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XV »

Elle l’exhorte à se réconcilier avec la duchesse, et à ne pas laisser périr, faute d’être reproduite, l’espèce des vibrions, dont il est le parfait modèle.

1517. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Bussy-Rabutin. » pp. 360-383

Il garda toujours de grandes mesures avec les gens de lettres, et, tout en affectant bien de s’en distinguer, il les traita avec une déférence parfaite.

1518. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — I. (Dialogues inédits.) » pp. 1-28

Ici le trop d’audace avait dépassé le but, et la scène, qui supposait le parfait sang-froid des deux acteurs, avait manqué.

1519. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1861 » pp. 361-395

» Hugo supporte avec une parfaite indifférence l’exil, n’admettant pas que la Patrie soit seulement la terre d’un sol et répétant : « La Patrie, qu’est-ce ?

1520. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1879 » pp. 55-96

* * * — La douce sensation d’avoir, le matin, en entrant dans son cabinet de travail, la perspective de douze heures de travail, sans sortie, sans visites, sans dérangement, dans la jouissance parfaite et l’exaltation intérieure de la solitude.

1521. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre III : Examen de la doctrine de Tocqueville »

Il ne pensait pas que le peuple fût nécessairement parfait, irréprochable, infaillible ; il pensait que, tout en développant la démocratie d’un certain côté, il était urgent en même temps de la tempérer, de la surveiller, de la retenir ; il accusait, enfin, la démocratie de répandre partout un esprit d’uniformité, de médiocrité et de servitude.

1522. (1856) Les lettres et l’homme de lettres au XIXe siècle pp. -30

Le génie n’est souvent qu’une seule grande idée, qui se produit dans plusieurs épreuves successives, jusqu’à ce qu’elle arrive à sa forme définitive et parfaite.

1523. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre II. Le fond et la forme dans la littérature indigène. »

Peut-être le parfait symbolisme est-il après tout celui qui se prête à mille interprétations différentes.

1524. (1913) La Fontaine « III. Éducation de son esprit. Sa philosophie  Sa morale. »

Il s’agit d’un berger qui a pratiqué le commerce, qui a fait des négociations financières, qui a fait « des affaires », qui a tout perdu, et qui, ensuite, résigné à son sort, instruit par l’expérience, regarde les vaisseaux arriver au port avec une parfaite indifférence stoïcienne.

1525. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vi »

Mais qu’elle soit bénie, cette animosité, si elle donnait du plaisir et du réconfort, si elle servait de tonique au vaillant que je salue avec une parfaite amitié.

1526. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

Ce singulier phénomène tient à la puissance du coloriste, à l’accord parfait des tons, et à l’harmonie (préétablie dans le cerveau du peintre) entre la couleur et le sujet.

1527. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Résumé et conclusion »

La nécessité absolue serait représentée par une équivalence parfaite des moments successifs de la durée les uns aux autres.

1528. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

L’organisme le plus parfait est celui qui est capable d’exécuter le plus d’actes divers, et de ne mettre en branle, pour exécuter chacun d’eux, que juste les muscles nécessaires.

1529. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre III. »

Un savant du dix-septième siècle a cherché principalement cette similitude dans les maximes de Platon comparées aux prescriptions de la loi mosaïque ; il indique en exemple : 1° la crainte affectueuse de Dieu ; 2° l’interdiction de se venger et de faire aucun mal à autrui ; 3° l’obligation de la prière, d’accord avec le précepte pythagoricien : « Commence tous tes actes par la prière, afin de pouvoir les achever » ; 4° le devoir pour les puissants et les princes de se conformer au Roi des rois, au Dieu unique, parfait modèle de toute sagesse et de toute justice.

1530. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

sachez-le, ces quatre personnages vivent, les uns sans le savoir et les autres sans en souffrir, dans une parfaite ignominie. […] Sarcey, est d’une invraisemblance parfaite. […] La constitution du « milieu » est parfaite. […] Quel dommage que la pièce de M. de Curel ne soit pas parfaite ! […] Il l’a fait avec une exactitude et une justesse parfaites.

1531. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Or Claude est inaccessible, étant parfait. […] Songez cependant que tout ce qu’elle dit se peut expliquer par une finesse et une précocité d’intelligence qui n’est pas rare chez les petites filles, et, d’autre part, se concilier avec la plus parfaite ignorance enfantine. […] Et dans ce drame, qui est le comble du métier, se détache, au troisième acte, une scène qui est le comble de l’art, et telle que l’auteur n’en avait point écrit d’aussi parfaite depuis Patrie et depuis la Haine. […] Et c’est pourquoi, après lui avoir fait une cour assez vive, il se retire d’elle, subitement ; et comme elle lui demande l’explication de sa conduite (la scène se passe dans une garden-party offerte par Rennequin à la belle étrangère), Amaury lui allègue, avec une émotion de parfait comédien, qu’il a peur de ses millions et qu’il renonce à son amitié afin de conserver son estime. […] Et le bon chapelain dit : « C’est parfait, et voilà la vraie extrême-onction. » Puis elle enveloppe Rudel de ses grands cheveux ; elle le berce contre son sein, et, comme le mourant a empoigné une de ses tresses, elle la coupe pour ne point la lui arracher.

1532. (1910) Propos de théâtre. Cinquième série

doit être reconnu comme le modèle parfait de l’art dramatique dans la littérature universelle. […] Du moment que c’est là le modèle parfait de l’art dramatique dans la littérature universelle, je ne lirai jamais une pièce de théâtre. » De Victor Hugo : « Lear, c’est l’occasion de Cordelia. […] Là-dessus eut lieu entre le roi, Thiers et Casimir lui-même une scène de comédie si parfaite, d’un si haut goût, que je ne puis pas me mettre dans l’esprit qu’elle n’ait pas été concertée. […] George Sand, malgré une modestie qui fut parfaite, qui ne fut nullement jouée, qui était le fond même de sa nature, a très souvent parlé d’elle et de ses œuvres. […] , à travers ce songe mystérieux et ces coups de grâce, au fond la raison règne et commande ce caractère si charmant, si solide et si sérieux de Pauline, une raison capable de tout le devoir dévoué, de tous les sacrifices intrépides, de toutes les délicatesses mélangées, une raison qui, même dans toutes les extrémités les plus rapides, lui conserve une sobriété parfaite d’expression, une belle simplicité d’attitudes… Rien d’égaré ni d’éperdu.

1533. (1903) La pensée et le mouvant

Si l’insertion n’est pas parfaite, ce sera qu’il y a quelque chose à redresser dans notre science, ou dans notre métaphysique, ou dans les deux. […] Cette consolidation est d’autant plus parfaite que l’activité sociale est plus intelligente. […] C’est simplement trouver des rapports, établir des relations stables entre des faits qui passent, dégager des lois : opération d’autant plus parfaite que la relation est plus précise et la loi plus mathématique. […] Il n’y a d’ailleurs pas un métaphysicien, pas un théologien, qui ne soit prêt à affirmer qu’un être parfait est celui qui connaît toutes choses intuitivement, sans avoir à passer par le raisonnement, l’abstraction et la généralisation. […] Mais l’absolu est parfait en ce qu’il est parfaitement ce qu’il est.

1534. (1802) Études sur Molière pp. -355

Ceux-là n’auraient, ce me semble, qu’à s’en faire donner à leur tour par ceux-ci, avec la ferme résolution d’en profiter ; et, grâce à cet échange, les voilà parfaits les uns et les autres. […] Nous ne détaillerons point les beautés du style, celles de l’économie théâtrale ; tout est parfait, divin, et au point qu’on craint de proférer un blasphème, en osant parler des légères taches qu’une sévérité scrupuleuse pourrait peut-être y découvrir. […] Le goût mit peu à peu L’Avare à sa véritable place, malgré les jaloux, malgré Racine même ; c’est le cas d’appliquer ici ces deux vers de La Métromanie : Mais à l’humanité, si parfait que l’on fût, Toujours par quelque faible on paya le tribut. […] Madame, répondit Ménage, j’ai vu la pièce ; elle est parfaite : on n’y peut trouver à redire ni à critiquer.

1535. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

Le fond du personnage est un amour parfait de soi-même. […]     J’ouïs que l’un des deux disait à son confrère : Seigneur, trouvez-vous pas bien injuste et bien sot,     L’homme, cet animal si parfait ?

1536. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

Les portraits qui composent ce volume sont d’une ressemblance parfaite, et aucun des nombreux imitateurs que M.  […] Arcadi Pavlitch est, comme il le dit lui-même, sévère mais juste ; il se préoccupe beaucoup du sort de ses serfs, et ne les punit que pour leur bien. « Ils demandent à être traités comme des enfants », — dit-il à ce propos ; — « l’ignorance, mon cher, il faut prendre cela en considération 3. » Lorsqu’il se trouve dans la triste nécessité en question, aucun signe d’emportement ne trahit les sentiments qui l’agitent ; il n’aime point à élever la voix ; il donne un coup sec en portant le bras en avant et se borne à dire avec un calme parfait : — « Je te l’avais pourtant recommandé, mon cher. » Ou encore : — « Qu’est-ce qui te prend, mon ami ?

1537. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

Rousseau attaque sans cesse leur frivolité, leur inconstance, leur coquetterie ; personne n’en a dit plus de mal et n’en a été plus aimé: il les traite de grands enfants, il se plaît à les montrer faibles ; les plus parfaites succombent dans ses écrits. […] Ainsi, les tableaux de Bernardin de Saint-Pierre ont toujours quelque chose d’idéal, sans cependant jamais sortir de la nature ; il est comme ces statuaires des temps antiques, qui reproduisaient la figure humaine avec des proportions si parfaites, que sous une forme mortelle on reconnaissait une divinité.

1538. (1898) Émile Zola devant les jeunes (articles de La Plume) pp. 106-203

Elle est le suprême épanouissement de la matière, elle est la fructification la plus haute, la plus parfaite, la plus féconde de la riche plante humaine. […] La description de ce vieux cimetière de Plassans, où fermentent de riches végétations, où la floraison sanguine des giroflées éclate et bouillonne en des teintes vivaces, où des amoureux se baisent furieusement les lèvres, où les petits enfants de la ville viennent s’ébattre joyeusement au soleil, cette description du vieux cimetière de Plassans demeure assurément l’une des plus parfaites, et des plus purement païennes de l’œuvre de Zola.

1539. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

Il en est resté un témoignage piquant : c’est ce mot de Vardes, un des seigneurs les plus à la mode au commencement du règne, qui disait, en revenant d’un long exil : « Sire, quand on est loin de Votre Majesté, on n’est pas seulement malheureux, on devient encore ridicule. » Le portrait que font de son caractère les mêmes témoins n’est guère moins beau : « Dieu, dit l’un d’eux, lui avait donné toute l’élévation nécessaire à un grand roi205. » Un autre loue en lui la parfaite égalité d’humeur ; un cœur ouvert, sincère, et dont on croyait voir le fond ; un esprit de droiture et d’équité jusqu’à prononcer contre soi-même206. […] A aucune époque notre société n’a offert une image plus parfaite de l’esprit français.

1540. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

C’est sans contredit une grande chose que cet univers, mais, quand je le compare avec l’énergie de la cause productrice, si j’avais à m’émerveiller, c’est que son œuvre ne soit pas plus belle et plus parfaite encore. […] — Oui. — Avez-vous jamais rencontré dans la nature des figures aussi belles, aussi parfaites que celles-là ?

1541. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre I. De la sélection des images, pour la représentation. Le rôle du corps »

Toutes ces images agissent et réagissent les unes sur les autres dans toutes leurs parties élémentaires selon des lois constantes, que j’appelle les lois de la nature, et comme la science parfaite de ces lois permettrait sans doute de calculer et de prévoir ce qui se passera dans chacune de ces images, l’avenir des images doit être contenu dans leur présent et n’y rien ajouter de nouveau. […] Il est donc de l’essence du matérialisme d’affirmer la parfaite relativité des qualités sensibles, et ce n’est pas sans raison que cette thèse, à laquelle Démocrite a donné sa formule précise, se trouve être aussi ancienne que le matérialisme.

1542. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Ils allaient, ils allaient, les bras enlacés, sans parler… Souvent, du haut d’une montagne, ils apercevaient, tout à coup, quelque cité spendide, avec des dômes, des ponts, des navires, des forêts de citronniers et des cathédrales de marbre blanc, dont les clochers aigus portaient des nids de cigognes… » Le défaut d’un pareil morceau, si parfait soit-il, et il se prolonge durant cinquante lignes, c’est que ces phrases ne peuvent pas s’être prononcées dans le cerveau de la pauvre femme d’un petit praticien de province. […] En concevant l’âme individuelle, à la façon de Leibnitz, comme un miroir où se reflète l’univers, c’est par la Science qu’elle peut réfléchir une portion plus ou moins grande de ce qui est, et approcher de sa fin, qui serait d’être en parfaite harmonie avec l’universalité des choses. » Comment deux personnalités chez lesquelles on constate à première vue de telles ressemblances sont-elles arrivées dans leur développement à des divergences si marquées que l’esprit renanien peut être considéré comme la négation même de l’esprit pascalien, et vice versa, c’est une énigme dont la clef ne doit pas être cherchée dans une antithèse de leurs existences. […] « Pour trouver le parfait et l’éternel », conclut-il, « il faut dépasser l’humanité et se jeter dans la haute mer. » La Science est pour lui un moyen de s’associer en pensée à cette évolution du cosmos vers un terme indéfiniment reculé, si démesuré par rapport à notre chétive personnalité que vraiment elle ne compte plus. […] Toutes les chances d’une parfaite union se rencontraient dans ce choix, depuis la plus délicate et la plus passionnée tendresse jusqu’à la conformité la plus entière de pensée. […] Son œuvre n’est pas considérable, mais elle est parfaite, et, si jamais la vieille prophétie : « Excelle et tu vivras » peut s’appliquer à un écrivain, c’est à l’occasion de Gabriel Vicaire qu’il convient de la prononcer.

1543. (1893) Alfred de Musset

La raison est pleinement revenue et le calme est parfait. […] La pièce est de moindre envergure et moins puissante que Lorenzaccio, mais elle est parfaite. […] Théophile Gautier écrivait dans son feuilleton dramatique : « Ce petit acte, joué samedi aux Français, est tout bonnement un grand événement littéraire… Depuis Marivaux… il ne s’est rien produit à la Comédie-Française de si fin, de si délicat, de si doucement enjoué que ce chef-d’œuvre mignon enfoui dans les pages d’une revue et que les Russes de Saint-Pétersbourg, cette neigeuse Athènes, ont été obligés de découvrir pour nous le faire accepter. » Théophile Gautier louait ensuite « la prodigieuse habileté, la rouerie parfaite, la merveilleuse divination des planches de ce proverbe qui n’avait pas été écrit pour la scène, et qui était pourtant plus adroitement conduit que du Scribe ». […] Sa prose courante est parfaite.

1544. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

D’ailleurs, suis-je certain moi-même de la juger avec une impartialité parfaite ? […] Flourens, tels que Broussais, Cabanis, Destutt de Tracy, sans aborder des sujets qui risquaient de désorienter un peu le public habituel des solennités académiques ; il s’est acquitté de cette tâche ingrate avec une mesure et une lucidité parfaites. […] Les conversions politiques ne sauraient jamais être aussi parfaites que les conversions religieuses, et, parmi les nombreuses raisons que je pourrais en donner, il y en a une qui me paraît suffisante ; c’est que l’humilité est la première vertu que nous prêche la religion, et la dernière que nous enseigne la politique. […] Albert de Broglie, non pas de ce banal coup de chapeau qui n’est que la politesse de l’indifférence, mais de ce geste amical et sympathique qui signifie l’estime parfaite, affermie plutôt que troublée par le désir de le voir faire encore un pas de plus sur ce chemin où nous sommes fier de nous rencontrer avec lui. […] Toutes ces figures élégantes ou joyeuses, tragiques ou mignardes, sérieuses ou bouffonnes, aboutissent à la plus parfaite, à la moins oubliée de celles qui n’existent plus, à mademoiselle Mars.

1545. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Maubant est à peu près parfait dans le rôle de don Diègue. […] Surtout elle a la chance d’être tombée sur des gens comme ces Villemer et ces d’Aléria ; car, dans la réalité, elle aurait beau être jolie et parfaite, on ne l’épouserait pas. […] Pour que la bonté soit parfaite, il faut qu’elle soit sans salaire, il faut que ceux à qui elle a fait du bien lui aient fait du mal. […] J’en avais cependant commencé la lecture avec un parfait détachement, sans désir d’admirer et d’être ému. […] Mais Orphée n’est pas seulement le parfait amant, fidèle et épris jusque par-delà la mort, c’est l’ancêtre des poètes, le père de la civilisation, le législateur inspiré qui rassemble les hommes, les déshabitue de la vie éparse et sauvage, leur enseigne la douceur et la concorde, et fonde la première cité.

1546. (1923) Nouvelles études et autres figures

Il nous semble que nos idées de bonheur ne se justifient que par le souvenir confus d’un bonheur parfait que nos premiers pères auraient goûté. […] Les mystiques et les philosophes s’en emparent et en font des transpositions symboliques dont les dernières et les plus parfaites sont celles du prince de la mystique hispano-musulmane, le Murcien Abenarabi. […] « Il n’avait aucun défaut de l’un et l’autre sexe, mais toute la grâce de chacun d’eux ; son visage était celui que choisirait un artiste, dont l’art ne devrait jamais mourir, s’il pouvait exprimer une parfaite pureté. » Et ce portrait, que de fois il l’a refait ! […] S’imagine-t-on que tout soit parfait même dans les plus belles scènes du divin Racine, qu’on n’y soulignerait aucun prosaïsme, aucune épithète défaillante ? […] Des œuvres semblables ne sont possibles que dans un pays qui a derrière lui un long passé de civilisation ; et ce n’est que dans un air saturé d’intelligence que le talent, qui se recueille, peut atteindre à un art aussi parfait.

1547. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

On peut répondre aujourd’hui en parfaite certitude : C’est que tout cet édifice public si brillant, si orné, était au fond destitué de principes, de fondements ; c’est que le tout était bâti sur l’amas de poussière et de cendre que nous avons vu. […] En cette rude circonstance, Benjamin Constant se montra parfait de dévouement filial. […] Dans ce qui suit, on devra aussi reconnaître la prédisposition opposante de Benjamin Constant, ses opinions libérales Préexistantes, ses instincts de justice politique, le tout exprimé, il est vrai, avec une parfaite irrévérence et avec cette pointe finale d’impiété qui caractérise en lui sa période voltairienne.

1548. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Werther. Correspondance de Goethe et de Kestner, traduite par M. L. Poley » pp. 289-315

Poley, anciennement attachée à la légation de Prusse, qui appartient à l’Allemagne par la langue et à la France par un long séjour, à traduit cette correspondance comme il est à souhaiter qu’on fasse toujours pour ces sortes d’ouvrages : ce qui importe en effet, c’est bien moins d’éviter quelques incorrections de style que de conserver la parfaite exactitude et le caractère de l’original : et c’est à quoi M. 

1549. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

Il est facile de juger à l’accueil qu’il lui a fait que la plus parfaite amitié règne entre les deux frères… Je crois qu’il n’y a point d’homme que j’aimerais autant que M. 

1550. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Appendice. »

La Suisse française, Genève et notre chère Lausanne m’ont toujours paru de parfaits belvédères pour nous bien observer et pour nous étudier dans nos vrais rapports avec l’Allemagne.

1551. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite et fin.) »

Nommé colonel de la garde nationale de Versailles, il fit son devoir en parfait grognard, et ceux qui l’ont vu à cette époque, qui l’ont rencontré à Paris dans les journées de juin 1848 au poste de l’Institut qu’il était chargé de garder, savent à quel point il était dans son rôle de citoyen en armes ou plutôt de vieille moustache, strict et ferré sur la discipline.

1552. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Dans cette Élégie tout est présenté en beau et en majestueux : c’est d’un parfait contraste avec les sonnets des Regrets.

1553. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

Nous sommes de son avis en cela, et il nous semble qu’en ce qui touche les portions toutes romanesques de la vie des grands hommes, s’il y a peu à faire pour les rendre plus complètes et harmonieuses, il est permis de l’oser ; mais un goût parfait, une discrétion extrême, devraient présider à ces légères et chastes atteintes.

1554. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

La duchesse d’Angoulême et ses enfants, Marguerite et François, s’aimaient tous les trois passionnément ; c’était, comme le dit Marguerite, un parfait triangle , et une vraie trinité.

1555. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la loi sur la presse »

S’il en était des lois comme des ouvrages d’esprit au temps de Boileau, celle-ci devrait être bien parfaite, car ce n’est pas vingt fois, c’est trente fois, c’est cent que les faiseurs ont remis sur le métier leur ouvrage ; et pourtant la loi n’est pas devenue pour cela meilleure quant au fond ; et, en ce qui est de la forme, le bienveillant rapport que vous avez entendu n’a pu lui-même dissimuler qu’elle laisse à désirer pour la bonne rédaction.

1556. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) » pp. 5-56

La société politique ne peut pas, sans s’avilir, se borner à aider l’homme à vivre dans son corps : elle doit l’aider surtout à perfectionner son âme, à renaître plus parfait par une vie plus sainte, à vivre de devoirs et à revivre éternellement de félicité.

1557. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

Ces nuages fermaient au loin l’entrée de la mer Noire, qu’on entrevoit de Thérapia par une courte échappée ; et leur ceinture, jointe au calme des ondes, faisait de cet espace, le plus resserré du Bosphore, l’image parfaite d’un petit lac.

1558. (1824) Observations sur la tragédie romantique pp. 5-40

laissons aux poètes le droit d’oser tout ce qui doit nous émouvoir et nous instruire, de trouver dans leur imagination, dans leur génie, ce qui achèvera l’histoire par une parfaite représentation des mœurs.

1559. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre IV. Racine »

Mais il est bien certain qu’il y a un parfait accord entre la conception psychologique de Racine et le dogme caractéristique du jansénisme : de là vient la facilité avec laquelle Arnauld accepta Phèdre, lorsqu’on voulut réconcilier Racine avec lui, et de là le mot fameux que la reine incestueuse est « une chrétienne à qui la grâce a manqué ».

1560. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Son dessein était de « prouver que, de toutes les religions qui ont jamais existé, la religion chrétienne est la plus poétique, la plus humaine, la plus favorable à la liberté, aux arts et aux lettres ; que le monde moderne lui doit tout ; … qu’il n’y a rien de plus divin que sa morale, rien de plus aimable, de plus pompeux que ses dogmes, sa doctrine et son culte ; … qu’elle favorise le génie, épure le goût, développe les passions vertueuses, donne de la vigueur à la pensée, offre des formes nobles à l’écrivain, et des moules parfaits à l’artiste649…. » Ce vaste dessein d’apologie se développait à travers quatre parties : Dogmes et doctrines, Poétique, Beaux-Arts et Littérature, Culte.

1561. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

Les mêmes hommes qui ne croyaient pas qu’un poète pût être supérieur à Ronsard, imaginaient un prosateur plus parfait que Montaigne.

1562. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre premier »

Cette théorie d’un prince parfait d’après un idéal rêvé dans la solitude, loin des affaires et des princes, et dont Balzac, à la fin de chaque chapitre, rapportait uniformément les traits à Louis XIII, fut médiocrement goûtée.

1563. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Août 1886. »

Levi et Motti est plus parfait encore que précédemment ; les interprètes, toujours les premiers artistes d’Allemagne, sont tout à fait maîtres de leurs rôles : les personnages secondaires ont la même bonne volonté ; enfin, la mise en scène est simple toujours et minutieusement soignée ; et, toujours, c’est l’effet extraordinaire de ce théâtre vraiment féerique, où le drame apparaît comme la vision d’un autre univers qui se révèle aux assistants.

1564. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « I »

Ensuite, comme le dit Wagner, « quelle épouvantable bizarrerie de voir qu’on considère comme décourageants les résultats d’une philosophie qui est basée sur la morale la plus parfaite » (X, 329).

1565. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « II »

Elle s’y est montrée parfaite, d’une conviction absolue.

1566. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre I : L’histoire de la philosophie »

Ce procédé est parfait pour la logique, qui a à montrer les formes de la pensée, non leur origine.

1567. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur de Latouche. » pp. 474-502

On me le peint encore, dans cette même demi-teinte à la fois fidèle et adoucie, arrivant tard à la littérature sérieuse, ne s’y naturalisant qu’avec effort ; s’en distrayant souvent ; s’essayant de bonne heure à des sujets de poésie plus ou moins imités de l’anglais, de l’allemand, à de petites pièces remarquables de ton et de coloris, mais où l’expression trahissait la pensée, et qu’il a corrigées et retravaillées depuis, sans les rendre plus parfaites et plus faciles ; « nature exquise pour l’intelligence, avec des moyens de manifestation insuffisants ; point d’amour-propre en tête-à-tête, humble aux observations dans le cabinet, douloureux et hargneux devant le public ; généreux de mœurs et désintéressé, mais faisant mille tours à ses amis et à lui-même. » D’un cœur ardent, passionné, d’un tempérament vif et amoureux, il avait un grand souci de sa personne et de tout ce qui mène à plaire.

1568. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

Au coin du feu, comme distraction d’un rhume, faire, tranquillement et posément et raisonnablement, la facture de la mort de son père en parfaite santé.

1569. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1877 » pp. 308-348

Et je vis dans cette anxiété jusqu’au dîner, où je trouve toute la maison Charpentier, dans la tranquillité la plus parfaite d’esprit.

1570. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre septième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie. »

Rechercher l’art pour lui-même, ce n’est donc pas rechercher exclusivement l’art pour sa forme ; c’est l’aimer aussi pour le fond qu’il enveloppe. « La poésie, c’est tout ce qu’il y a d’intime dans tout79. » La poésie est « dans les idées ; les idées viennent de l’âme. » La poésie peut s’exprimer en prose, « elle est seulement plus parfaite sous la grâce et la majesté du vers.

1571. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre II : Examen critique des méditations chrétiennes de M. Guizot »

Si l’on dit que c’est d’un Dieu bon et parfait tout est bon, je n’en disconviens pas ; mais c’est là précisément l’explication philosophique que l’on a déclarée insuffisante, et cette explication, une fois admise, rend inutile toute autre hypothèse, y compris celle du péché originel.

1572. (1913) La Fontaine « VII. Ses fables. »

Et l’éléphant répond : « Mais je suis parfait ! 

1573. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

C’est parfait… de connu.

1574. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Ce maître d’étude a une large carrure, des épaules solides, de grosses lèvres, des mains velues : un physique parfait de brute vulgaire ; le moral est exactement à la hauteur du physique.

1575. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Elle s’y oppose d’ailleurs directement s’il est vrai que, en raison même de son homogénéité parfaite, une société a toutes les chances possibles d’être fermée, exclusive, et de modeler à son image, fermés et exclusifs, les esprits qu’elle rassemble.

1576. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre IV. Conclusions » pp. 183-231

Malgré la vanité toujours latente, il en est beaucoup parmi nous qui ne voient aucune honte à changer d’opinion, à se rendre à l’évidence, à céder devant la force d’une date, devant la logique d’un raisonnement ; entre honnêtes gens de cette sorte, la discussion sera toujours féconde, même si elle ne menait pas à une entente parfaite ; et, quoi qu’en pensent les positivistes et les amateurs d’inédit, il sera toujours plus utile de discuter sur la mission de l’humanité que de savoir quel fut le premier amant de Mlle de Lespinasse.

1577. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Car il est le plus parfait des hommes.

1578. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

Il va, et ses heureuses brebis le suivent là où il les nourrit de roses immortelles et d’une fleur qui s’épanouit plus abondante, plus elle est cueillie ; il les conduit à la montagne du bien suprême ; il les baigne dans la source de l’immortelle joie ; il leur donne la pleine moisson, le pasteur et le pâturage, le seul parfait bonheur.

1579. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

N’oubliez pas ce petit récit qui est plein de grâce et bien conté : « Quelqu’un parlait, l’autre jour, de l’amour sincère de la princesse Hélène pour la France, de la connaissance parfaite qu’elle avait déjà de notre pays. « Ce n’est pas étonnant », répondit un légitimiste « elle a passé un mois à Carlsbad avec madame la Dauphine !  […] » La justice et le bon sens, que soutient un beau langage, tels sont les premiers mérites de l’histoire ; ajoutez une âme libre, et une parfaite connaissance des choses que l’historien raconte. […] Sa voix, son geste, son regard, son sourire, sa passion et les trésors infinis de cette mémoire abondante et féconde comme l’eau des claires fontaines qui murmurent autour des ruines de l’ancienne Rome, tout en lui raconte et racontait des merveilles supérieures aux étonnements modernes, des miracles que l’éternité consacre, des chefs-d’œuvre auxquels le génie et le hasard ne peuvent rien ajouter, ne peuvent rien retrancher ; des œuvres si parfaites et si complètes, qu’on ne sait pas si ce sont vraiment des hommes à notre image qui les ont accomplies. […] M. l’aîné portait le chapeau galonné et l’habit d’un parfait cavalier ; moins l’épée ; il jouait de la guitare et donnait des sérénades aux jeunes pensionnaires de Sainte-Catherine. […] Avec un tact parfait, elle devinait l’âge, la condition, et les mille petites douleurs de la vie oisive, de la vie pauvre, de la vie riche ; elle reconnaissait toutes les passions à certains signes qui ne la trompaient jamais.

1580. (1855) Louis David, son école et son temps. Souvenirs pp. -447

Blond, paresseux, d’une honnêteté parfaite, ne manquant pas d’esprit, c’était d’ailleurs un peintre plus propre à faire des croquis et des compositions faciles qu’à mettre à bonne fin le plus léger ouvrage. […] Voici le chapitre où il est question de ces deux personnages : Deux beaux types de la plus parfaite organisation humaine. […] Les arts sont l’imitation de la nature dans ce qu’elle a de plus beau et de plus parfait ; un sentiment naturel à l’homme l’attire vers le même objet. […] La faveur d’être admis dans cet atelier, le respect qu’inspirait le maître et l’émotion profonde qu’éprouva Étienne à la vue de cette figure de Tatius, dont l’imitation lui parut parfaite, firent battre si fortement son cœur qu’il demeura muet. […] Cette petite manœuvre avait ordinairement le plus grand succès auprès des belles dames de Paris, qui racontaient ensuite qu’elles avaient vu peindre Girodet, et qu’il n’était pas étonnant que les ouvrages de ce peintre fussent si parfaits, puisqu’il les corrigeait jusqu’au dernier moment.

1581. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome II

La salive obtenue ainsi d’une fistule sous-maxillaire pratiquée à un chien, est, comme nous le voyons, d’une limpidité parfaite, mais elle est beaucoup moins fluide que la salive parotidienne. […] Peu à peu la plaie se cicatrise, l’animal revient en peu de jours à la santé parfaite ; et, lorsqu’au bout de quelque temps on en fait l’autopsie, on trouve que le conduit pancréatique est complètement régénéré, et que le liquide sécrété s’écoule absolument comme dans l’état normal. […] L’huile, à cause de sa pesanteur spécifique, se tint à la surface ; mais en agitant pour opérer le mélange des liquides, il en résulta aussitôt une émulsion parfaite, et tout se transforma en un liquide semblable à du lait ou à du chyle. […] Cela permettra d’expliquer toutes les qualités intermédiaires possibles du suc pancréatique, depuis son état normal ou d’activité parfaite jusqu’à son état de complète altération ou d’entière inertie. […] Ce chien, avant ensuite servi à une fistule gastrique, a été conservé pendant environ un mois et demi, et pendant tout ce temps il présenta toutes les apparences de la santé la plus parfaite.

1582. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Je sais ta passion, et suis ravi de voir Que tous ses mouvements cèdent à ton devoir ; Qu’ils n’ont point affaibli cette ardeur magnanime ; Que ta haute vertu répond à mon estime ; Et que, voulant pour gendre un cavalier parfait, Je ne me trompais point au choix que j’avais fait. […] Dans la musique par exemple, n’est-ce pas pour le public français, pour le public parisien, que Gluck, Mozart, Rossini, Meyerbeer, composeront leurs œuvres dramatiques les plus belles et les plus mûries, les plus riches et les mieux équilibrées, les plus variées et les plus parfaites ? […] Quant à La Bruyère, j’ai cité précédemment trois lignes de son jugement sur le Cid, mais il faut lire le passage tout entier : « Quelle prodigieuse distance, dit-il, entre un bel ouvrage et un ouvrage parfait ou régulier !

1583. (1927) Les écrivains. Deuxième série (1895-1910)

Il ne faut pas connaître ce très galant homme et ce parfait écrivain, en qui notre profession s’honore, pour supposer un instant qu’il puisse rechercher le succès dans le scandale. […] Et, maintenant que je l’ai lu, ce livre, je ne puis penser, sans un redoublement d’indignation et de révolte, que le parfait artiste qui l’écrivit est séparé de la vie et subit un affreux supplice pour des actes qui ne sont ni des crimes, ni des délits ; des actes fâcheux, il est vrai, mais qu’il était libre de commettre et dont personne n’avait à lui demander compte, car, je ne cesserai de la répéter, ils ne relèvent que de sa conscience et de notre dégoût. […] … Une matinée qu’il pleuvait, et que nous étions réunis chez lui, à regarder la mer, à regarder la pluie tomber sur la mer, il me donna, avec une bonne grâce parfaite, non moins qu’avec une évidente sincérité, la raison de cette transformation qui me ravissait. […] … Débraillé, pitre, roulant d’ordure en ordure, souteneur, sans doute, pochard certainement, et voleur au besoin, il appartenait à ce grand parti que Louis Veuillot, dans son ironie vengeresse, appelait : les Respectueux… C’était, aussi, un de ces personnages préhistoriques, une de ces formes zoologiques disparues qui vous parfait encore — avec quel verbeux enthousiasme !  […] Avec les journaux, même avec les journaux d’un décorum aussi parfait que celui du Gaulois, on ne sait jamais à quoi s’en tenir sur le compte des vieux habitués… Et ils auraient peut-être de drôles de surprises, les lecteurs assidus — car il y a aussi les lecteurs assidus — s’ils pouvaient voir les drôles de types que recouvrent ordinairement ces masques troublants de « vieil habitué », de « vieil académicien », de « vieux général », de « vieux juriste », de « vieux sénateur », qui, de temps en temps, au moment des grands événements parisiens, viennent conter, dans les journaux, leurs souvenirs et leurs regrets.

1584. (1900) La culture des idées

Mais cette dépendance mutuelle est loin d’être parfaite et aussi claire dans la réalité que dans une comparaison mécanique : en somme, les mots et les sensations ne s’accordent que très peu et très mal ; nous n’avons aucun moyen sûr, que peut-être le silence, pour exprimer nos pensées. […] S’il était permis de compter les degrés du médiocre au pire, comme du passable au parfait, l’échelle serait longue des couleurs et des nuances : il y a si loin de la Légende de Saint-Julien l’Hospitalier à une oraison parlementaire qu’en vérité on se demande s’il s’agit de la même langue, s’il n’y a pas deux langues françaises et en dessous une infinité de dialectes presque impénétrables les uns aux autres. […] Stuart Mill composa sa logique dans les rues de Londres, pendant le trajet quotidien de sa maison aux bureaux de la Compagnie des Indes ; croira-t-on que cet ouvrage ne fut pas ordonné en état de conscience parfaite ? […] Il n’est pas colossal, il est parfait. […] Mais là encore, et puisque l’expérience d’un tel résultat peut s’acquérir, le désintéressement n’est pas absolu ; la conscience du but n’est pas toujours ni tout à fait absente et, quoique rien de social ou de pratique ne souille de tels actes (ils peuvent être, cela est toujours sous-entendu, socialement criminels), c’est encore plus loin qu’il nous faut chercher le principe de la charité parfaite.

1585. (1888) Portraits de maîtres

La Conscience de Victor Hugo, l’Akhab de Leconte de Lisle, ces poèmes parfaits, ne sont venus, ne l’oublions pas, qu’après l’initiative d’Alphonse de Lamartine. […] Le déluge, Éloa, Moïse encore, venaient enseigner le secret des narrations parfaites dans le genre héroïque, secret qui réside en grande partie dans la science de la composition et que de notre temps ont si bien retrouvé dans un autre ordre de sujets des poètes habiles autant que sympathiques, François Coppée, Armand Renaud, Eugène Manuel. […] Il nous reste à noter des mérites qui tiennent à l’homme même, une douce philosophie, une sensibilité de bon aloi, que nous retrouverions un peu partout, mais notamment dans l’Orage, ce joli motif sur une ronde d’enfants, ma Vocation, le Retour dans la patrie, le Dieu des bonnes gens dont le parfait écrivain M.  […] Non qu’il dispose du grand vol lyrique ou du suave enchantement de mélodie, mais il garde toujours une proportion parfaite entre la forme et l’idée ; il excelle dans la précision, la propriété, le définitif de l’expression. […] Eugénie Rozat voulut son enfant « parfait », nous dit Mme Quinet dans son étude sur l’Histoire de mes idées.

1586. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

Une bonne foi naïve et un peu bête (1), un dévouement parfait, une sorte de difficulté à être ému par les petits incidents et à les comprendre, mais en revanche une grande constance dans l’émotion et une grande peur de l’enfer, séparent l’Anglais de 1600 des Français de 1820. […] Le major Bridgenorth de Pévéril du Peak, dont le père avait vu Shakspeare, agit avec une bonne foi morose et sombre d’après des principes absurdes ; notre morale est à peu près parfaite, mais en revanche on ne trouve plus de dévouement sans bornes que dans les adresses insérées au Moniteur.

1587. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre III. Le lien des caractères généraux ou la raison explicative des choses » pp. 387-464

Admettons cette fois qu’il a sous la main une quantité de quadrilatères parfaits, que ses instruments de mesure sont parfaits, et qu’il les applique parfaitement.

1588. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

Ce « fin parler de France » souple et protéen, qui est devenu par l’effort de nos artistes, la langue des langues, l’idiome parfait, supérieur au marbre pour l’expression des formes, et l’égal des sonorités mélodiques pour l’expansion aérienne des rythmes, cet étranger le fit fleurir de floraisons imprévues. […] Si l’art est l’expression parfaite, l’écho religieux de cet entretien, M. 

1589. (1772) Discours sur le progrès des lettres en France pp. 2-190

Mais Térence, dont le style simple, noble, élégant & poli, joint à la connoissance parfaite des mœurs, & à la vérité frappante des caractères, fit dire à l’envie que Scipion & Lælius avoient plus de part que lui à ses Comédies ; Térence, dis-je, en copiant Ménandre, fut le premier qui donna le modèle de la bonne Comédie, & la fit goûter. […]   Mais, supposons nos Drames aussi parfaits qu’ils pourroient l’être, quels avantages les mœurs en retireront-elles ?

1590. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Où sont les vrais poètes, sinon dans une certaine faculté qui les invite à rêver une vie plus belle et plus parfaite, dût-elle naître de la douleur qu’ils prennent à celle-ci ? […] Ces pièces, de seize vers au plus, sont autant de médailles, la plupart parfaites, M. 

1591. (1886) Le roman russe pp. -351

Cet équilibre parfait, Pouchkine le doit aussi à sa gaieté. […] Moins harmonieux et moins parfaits que les vers de Pouchkine, ceux de Lermontof ont parfois des vibrations plus douloureuses, et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots. […] La parfaite simultanéité des deux mouvements exclut toute subordination de l’un à l’autre ; dans toute l’Europe, les mêmes causes produisaient les mêmes effets. […] Ses saillies douloureuses sont d’un idéaliste déçu, étonné de voir que ses chères idées, appliquées aux hommes, ne les ont pas rendus parfaits. […] Taine me permettra de citer ici une opinion qui emprunte un grand poids à l’autorité de son nom ; je lui ai souvent entendu dire qu’à son estime, Tourguénef était un des artistes les plus parfaits que le monde ait possédés depuis ceux de la Grèce.

1592. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

Teste serait un critique plus parfait que Sainte-Beuve. […] La tendance subalterne sert d’ombre, pour donner du relief à l’autre, et lorsque celle-ci, par une exigence de logique, veut s’étaler et s’expliquer dans une lumière parfaite, elle n’hésite pas à sacrifier complètement l’autre. […] La critique de Valéry et de Hugo suppose l’œuvre parfaite (c’est le sens de l’ admirer comme une brute qu’on a reproché, sans le comprendre, à Hugo). […] La critique pleinement créatrice, celle qui ne s’appuie sur une œuvre elle-même parfaite que pour la retourner et la maîtriser de toutes les façons, la féconder, la dépayser, en faire le point de départ d’une création géniale qui demeure pourtant jusqu’au bout incorporée à la critique, elle a été réalisée au moins une fois, et c’est par Platon dans le Phèdre.

1593. (1908) Jean Racine pp. 1-325

La Bruyère écrit en 1693 : « Quelques-uns ne souffrent pas que Corneille lui soit préféré, quelques autres qu’il lui soit égalé. » Au xviie  siècle, tout le monde, à la suite de Voltaire, adore Racine, le juge parfait. […] Et presque tout de suite après, sentant bien qu’au point de vue du pur christianisme, c’est Port-Royal qui a raison, il laisse la question doctrinale et, en parfait journaliste, prend brusquement l’offensive : De quoi vous êtes-vous avisés de mettre en français les comédies de Térence ? […] Il a conquis, comme parfait amoureux, le cœur de la princesse Ériphile ; il n’aurait qu’à le cueillir. […] Cette finesse féminine parmi tant de vertu et de douleur et une aussi parfaite fidélité conjugale, il me semble que cela fait une combinaison exquise, et hardie, et vraie. […] Bref, elle songe aux autres (et à sa race) beaucoup plus qu’à elle-même ; ce qui est la marque d’une parfaite éducation.

1594. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

« Le discours, dit-il, ou l’oraison, par laquelle l’esprit fait entendre ce qu’il a conçu est de deux sortes, l’une libre, étendue et comme négligée ; l’autre, contrainte sous de certaines lois, renfermée dans quelques bornes, et parée avec un soin particulier… Les maîtres de l’art donnent plusieurs règles pour reconnaître quand cette partie qu’ils appellent composition est parfaite, mais il me semble que toutes peuvent se rapporter à ces trois choses : l’ordre, la liaison ou la suite, et le nombre. […] Certes, il n’y avait pas de chrétien plus sincère — disons, si l’on veut, plus candide — que Malebranche, mais il n’y avait pas non plus de cartésien plus naïf, ni de philosophe ou de spéculatif qui s’assurât plus tranquillement de la parfaite orthodoxie de ses sentiments, sur la droiture et la pureté de ses intentions. […] … L’Être parfait se peut-il plaire à élever une créature au plus haut degré de sa gloire, pour la précipiter ensuite au plus bas degré de l’ignominie ? […] À moins enfin que les mots aussi — dont nous savons que la coïncidence avec les idées qu’ils ont pour fonction de traduire n’est jamais entière ni parfaite — ne s’adaptent que lentement, comme les espèces de la nature, aux exigences ou aux conditions d’un milieu nouveau ! […] Il cherche et il trouve sous nos yeux, à nos pieds, des faits d’une ressemblance parfaite avec ces phénomènes célestes que des millions de demi-diamètres de la terre séparent d’elle.

1595. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

Ces livres instructifs tomberont peut-être comme des feuilles mortes, à moins que la beauté d’une forme parfaite ne les sauve de la caducité ; mais des générations reconnaissantes se souviendront d’avoir beaucoup appris grâce à ces complaisantes vulgarisations. […] Affranchie des rigueurs matérielles, la visitandine dut se consacrer tout entière à réduire en une parfaite humilité et obéissance son esprit et sa volonté. […] Il y avait, dans les écoles de philosophie, des directeurs de conscience, en quelque sorte « professionnels », des confidents qui se chargeaient de détacher leurs contemporains des faux biens qu’adore la multitude, et de les amener à l’équilibre parfait de l’intelligence, à la soumission des passions apaisées, à la tranquillité de l’âme, victorieuse d’elle-même et de l’Univers. […] Blondel consent à ne pas être trop métaphysicien, il est parfait et il rappelle par sa fluidité gracieuse, par je ne sais quel sourire de moraliste disert, l’abondance intarissable de Nicole. […] Ces nouveaux Trissotins, chez lesquels il y a du cuistre et du paltoquet, du Rastignac et du Giboyer, de la malice et de l’ineptie, ces parfaits exemplaires de veulerie malfaisante, et, si j’ose m’exprimer ainsi, de « muflerie », sont dignes d’être fustigés en public.

1596. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Vous cherchez en vain ce jaillissement, ce parfait naturel qui, chez Balzac, se traduit en verve, chez Scott en bonhomie. […] L’art de Théophile Gautier4 Nous nous préparons à célébrer cette année le centenaire de la naissance de ce « parfait magicien ès lettres françaises », comme disait Baudelaire, que fut Théophile Gautier. […] La parfaite mesure préside à ces demi-confessions qui révèlent une sensibilité surveillée, une intelligence avertie, une bonne humeur contenue. […] Le prince devait pourtant avoir le jeune homme à sa table quelques mois plus tard, et ce dernier nous conte, à cette occasion, une anecdote où se révèle la magnifique impertinence de ce grand seigneur, chez lequel une finesse d’ancien prélat, un doigté d’homme d’affaires, une éducation parfaite s’associaient à une insolence de talon rouge.

1597. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

De tels esprits sont capables d’utiliser l’association d’idées de la manière la plus parfaite, de donner la plus grande acuité et la plus grande clarté à toutes les représentations appelées par elle à la conscience, de les supprimer sûrement et rapidement si elles ne s’accordent pas avec les autres, de se créer de nouvelles impressions sensorielles si celles-ci sont nécessaires pour rendre encore plus vivaces et plus nets les idées et jugements qui justement prédominent en eux ; ils obtiennent de cette façon un tableau du monde d’une incomparable luminosité, et découvrent entre les phénomènes des rapports réels qui restent nécessairement cachés à une attention plus faible. […] C’est le parfait usage de ce mystère qui constitue le symbole ; évoquer petit à petit un objet pour montrer un état d’âme, ou, inversement, choisir un objet et en dégager un état d’âme par une série de déchiffrements ».

1598. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Non seulement pour les livres, mais pour les comptes rendus des pièces de théâtre, des séances de l’Académie, on était sûr d’avoir de lui une critique fine, non pédante, bien informée, ou le blâme et l’éloge étaient distribués avec une parfaite mesure.

1599. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Jouffroy »

. — Qu’il nous suffise de répéter ici que, nonobstant toutes les variations subséquentes, cet historique du Globe reste d’une parfaite exactitude.

1600. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIe entretien. Poésie lyrique » pp. 161-223

Il semble que la statue de Memnon, rendue musicale par un rayon de soleil, est la parfaite image du cœur humain, que la présence divine rend plus mélodieuse que le marbre.

1601. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (3e partie) » pp. 369-430

C’est le plus parfait des gouvernements pour cette fonction.

1602. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIe entretien. La passion désintéressée du beau dans la littérature et dans l’art. Phidias, par Louis de Ronchaud (1re partie) » pp. 177-240

XXXVII Il n’y a rien de plus grand que l’admiration ; elle est plus grande même que le génie, car elle est le génie désintéressé de soi-même, l’amour pour l’amour, le quiétisme de Fénelon, la charité parfaite transportée du christianisme dans l’art, le beau pour le beau.

1603. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

Au contraire, un bon nombre de nos grands prosateurs, des originaux, des parfaits, sont du Midi… Certainement ce n’est pas un hasard !

1604. (1914) Enquête : Les prix littéraires (Les Marges)

Aucun tribunal humain n’est parfait.

1605. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Conclusion »

Il y a en effet les paroles, expression des pensées, et un musicien invisible qui les accompagne avec un instrument sans nom, plus riche, plus doux et plus mélodieux que le plus parfait qui ait été fabriqué de main d’homme.

1606. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Oui, je l’aime, je l’aime pour tout ce qu’il y a dans son œuvre d’encouragement à vivre, je l’aime pour son grand cantique à la nature, bien que ce soit le cantique d’un protestant, je l’aime parce qu’il n’a rien des superstitions modernes et qu’il est d’une parfaite irrévérence, comme doivent l’être tous les grands esprits aux nouvelles idoles de la démocratie, à ses prétendus grands hommes et à ses dieux et déesses : sainte Morale, sainte Science, sainte Hygiène, sainte Dignité, saint Progrès, saint Socialisme, etc.

1607. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

Il met en doute l’existence du monde extérieur, et il ne peut la démontrer (circuit étrange) que par l’existence de l’âme qui perçoit le monde et par l’existence de Dieu qui, étant parfait, ne peut avoir voulu tromper l’homme en lui donnant de fausses perceptions.

1608. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 décembre 1886. »

L’exécution ne fut pas absolument parfaite du côté des chanteurs masculins (MM. 

1609. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VII. Repos »

Le préfacier trouve déjà la pensée de Boissier « revêtue d’une forme parfaite, solide, souple et brillante comme une arme de luxe ».

1610. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

Celui-ci est le professeur parfait et amorphe.

1611. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Tâchons donc d’écrire médiocrement, d’écrire mal, même plutôt que ne pas écrire du tout ; mais qu’il soit bien entendu qu’il n’existe pas un patron de style unique, ainsi que l’enseignent les professeurs de l’éternel beau, mais que le style de La Bruyère, le style de Bossuet, le style de Saint-Simon, le style de Bernardin de Saint-Pierre, le style de Diderot, tout divers et dissemblables qu’ils soient, sont des styles d’égale valeur, des styles d’écrivains parfaits.

1612. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — La déformation  »

Incarnat, que les dictionnaires définissent : entre rose et rouge, ne contenait pour Voltaire que l’idée de carnation : « Votre peau, dit Cunégonde à Candide, est encore plus blanche et d’un incarnat plus parfait que celle de mon capitaine. » Carbonate.

1613. (1707) Discours sur la poésie pp. 13-60

Nous avons un avantage qui manquoit aux anciens, puisqu’ils sont nos maîtres, et qu’ils n’en ont pas eu, du moins d’aussi parfaits.

1614. (1856) Cours familier de littérature. II « IXe entretien. Suite de l’aperçu préliminaire sur la prétendue décadence de la littérature française » pp. 161-216

On peut dire, avec une parfaite exactitude, que la médiocrité gouverne le monde.

1615. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre II : Règles relatives à l’observation des faits sociaux »

Il en conclut qu’il n’y a pas de rapport régulier entre le progrès social en général et l’avancement progressif vers un type parfait de vie familiale.

1616. (1913) La Fontaine « V. Le conteur — le touriste. »

» Si La Fontaine a peu parlé de lui dans ces lettres familiales et domestiques où il apporte son élégance et certainement même un peu de coquetterie d’auteur, par instant, il y met avant toute la plus parfaite sincérité et la naïveté la plus grande, et ainsi il s’est peint tout entier ou presque ; il s’est peint distrait, curieux, admirateur de la nature, sensible.

1617. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

En produisant devant le public une voix qui s’adressait avec une parfaite confiance au cercle étroit de la famille, je risque de défigurer le caractère vrai de.

1618. (1898) Introduction aux études historiques pp. 17-281

Les érudits passent leur vie à perfectionner sans cesse leurs connaissances « auxiliaires », que, avec raison, ils n’estiment jamais parfaites. […] Blass, Reinach, Lindsay, dans leurs opuscules signalés en note, mentionnent plusieurs tours de force du même genre, d’une parfaite élégance. […] Pflugk-Harttung. « Les parties les plus hautes de la science historique, dit cet auteur dans ses Geschichtsbetrachtungen121, sont dédaignées : on n’attache de prix qu’à des observations micrologiques, à la correction parfaite de détails sans importance. […] Renan, qui a plaidé, sur ce point, le pour et le contre avec une égale vigueur, a clos définitivement le débat en ces termes : « On peut dire qu’il y a des recherches inutiles, en ce sens qu’elles absorbent un temps qui serait mieux employé à des sujets plus sérieux… Bien qu’il ne soit pas nécessaire que l’ouvrier ait la connaissance parfaite de l’œuvre qu’il exécute, il serait pourtant à souhaiter que ceux qui se livrent aux travaux spéciaux eussent l’idée de l’ensemble qui, seul, donne du prix à leurs recherches. […] Les auteurs de ces « Manuels », dont les spécimens les plus nombreux et les plus parfaits ont été composés de nos jours dans les Universités allemandes, n’ont d’autre visée que de dresser minutieusement l’inventaire des connaissances acquises, afin de rendre plus aisée et plus rapide aux travailleurs l’assimilation des résultats de la critique et de fournir un point de départ à des recherches nouvelles.

1619. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Faust y est parfaitement désespéré au commencement et plongé dans un parfait désespoir à la fin. […] Sans doute il nous montre, ou des hommes de la plus parfaite nullité morale comme M.  […] Il eût dit d’elle, comme Montesquieu : « Elle est le plus parfait, le plus noble et le plus exquis de tous les sens. » C’est à ce titre qu’il la chérissait. […] Il convenait à un philosophe comme Taine d’y chercher, en remontant du reste beaucoup plus haut, ce que d’ailleurs il a fait, les origines de la France actuelle ; mais, pour ce qui est des faits et des hommes, d’en parler avec une parfaite tranquillité, un peu hautaine. […] Imiter bien, imiter avec un parfait naturel, c’est ressembler, tout simplement.

1620. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

N’étant point d’humeur endurante, surtout en ce temps de retraite maussade, il allait cingler du fin bout de sa houssine le maroufle indiscret, lorsque celui-ci, le regardant comme en extase, s’écria : « Je salue en Votre Excellence l’image parfaite du prince des mortels… Oh ! […] Quand un monsieur est de l’Académie, on ne peut plus le lire en parfaite sécurité. […] Et cette élégance raffinée se continue dans les longues boucles en torsade qui retombent en avant, creusées de délicates lignes en hélice, d’une précision parfaite. […] Hermès est beau d’une beauté surhumaine et parfaite ; sa poitrine est large et svelte, ses cuisses fortes et fines. […] Nous ne pouvons le quitter, tant nos yeux aiment à suivre le contour parfait de sa forme vigoureuse et souple.

1621. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

C’est une parfaite erreur — et Taine le sait parfaitement, — de croire qu’au dix-septième siècle on jouât la tragédie avec « le feutre à longs poils ombragé d’un panache », ou avec le chapeau plus discret déjà de 1670, enfin exactement dans le costume du temps où l’on jouait. […] Ma foi, l’inquiétude ardente des préparations, la netteté farouche de la proposition quand elle arrive, quand on a forcé Rodogune à la faire, ne laisse aucun doute sur la sincérité absolue de Rodogune et sur le parfait sérieux de son dessein. […] J’ai maintenu tout le fond de mes observations premières, mais en reconnaissant que Cléopâtre et Rodogune ne se font pas pendant et réplique en parfaite symétrie et en égalité et parité ; qu’on ne peut pas, qu’on ne doit pas les caractériser toutes deux des mêmes termes et les marquer toutes deux de la même définition, comme j’avais voulu faire tout d’abord, pour une première vue générale, quitte à mettre ensuite les nuances. […] Dauvilliers, dans le rôle de des Arcis, n’a l’air que d’un parfait imbécile. […] Il était de manières parfaites, et l’on ne s’étonne pas que parmi cinq ou six opuscules ou essais, que l’on tire pour nous des revues ou journaux du temps et que l’on remet en lumière, il y en ait un sur le savoir-vivre.

1622. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Lamartine »

Si le sacrifice de Jocelyn en faveur de sa sœur est d’une beauté parfaite, le second, son obéissance aveugle à l’évêque, est bien discutable. […] Le poète nous annonce qu’il la recommencera neuf fois, avant que son âme devienne l’âme parfaite et sublime de Jocelyn. […] C’est un flux et reflux d’ineffable puissance, Où tout emprunte et rend l’inépuisable essence, Où tout foyer remonte à ce foyer commun, Où l’œuvre et l’ouvrier sont deux et ne sont qu’un, Où la force d’en haut, vivant en toute chose, Crée, enfante, détruit, compose et décompose ; S’admirant sans repos dans tout ce qu’elle a fait, Renouvelant toujours son ouvrage parfait ; . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

1623. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Quant à La Grange, doué d’une intelligence parfaite, d’une rare aménité de mœurs, et sûr dans le commerce de la vie, il devint l’ami de Molière, et donna en 1682, avec Vinot, la première édition complète des Œuvres de notre auteur. […] Il se contenta de lire le premier acte du Misanthrope, auquel il travaillait dès ce temps-là, disant qu’on ne devait pas s’attendre à des vers aussi parfaits que ceux de M.  […] Pour vous répondre donc sur la connaissance parfaite que vous dites que j’ai du cœur de l’homme par les portraits que j’en expose tous les jours en public, je demeurerai d’accord que je me suis étudié autant que j’ai pu à connaître leur faible ; mais, si ma science m’a appris qu’on pouvait fuir le péril, mon expérience ne m’a que trop fait voir qu’il était impossible de l’éviter ; j’en juge tous les jours par moi-même. […] Lesdites parts d’auteur furent partagées. » Ce n’était là du reste que le prélude du tort que le même poète leur fit en enrôlant à Pâques 1667 mademoiselle Du Parc, qui était alors l’actrice la plus parfaite dans les deux genres et l’un des plus utiles soutiens de la troupe de Molière, pour l’hôtel de Bourgogne où elle débuta par le rôle d’Andromaque. […] C’est là que, montrant les abus qu’elle entraîne nécessairement, il enseigne à quel prix le sage doit acheter les avantages qu’elle procure ; que, dans un système d’union fondé sur l’indulgence naturelle, une vertu parfaite est déplacée parmi les hommes et se tourmente elle-même sans les corriger : c’est un or qui a besoin d’alliage pour prendre de la consistance et servir aux divers usages de la société.

1624. (1927) André Gide pp. 8-126

Gide porte à Racadot une sympathie morale et approuve son crime, vous ne donnez peut-être pas un parfait exemple de bonne foi dans la controverse. […] Il aime à citer ce mot de l’Évangile : « Celui qui veut sauver sa vie la perdra, et celui qui consent à la perdre la sauvera… » Il l’applique spontanément à l’originalité littéraire, et montre fort bien que les maîtres classiques sont originaux sans s’y évertuer, en ne s’efforçant que d’être humains et d’être parfaits.

1625. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre V. Swift. » pp. 2-82

Son Art de couler bas en poésie 983 a tout l’air d’une bonne rhétorique ; les principes y sont posés, les divisions justifiées, les exemples rapportés avec une justesse et une méthode extraordinaires : c’est la parfaite raison mise au service de la déraison. […] Elle vient de se marier, et il lui dit que l’amour est une niaiserie ridicule987 ; puis il ajoute avec une brutalité parfaite : « Vos pareilles emploient plus de pensées, de mémoire et d’application pour être extravagantes qu’il n’en faudrait pour les rendre sages et utiles.

1626. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre V. La philosophie. Stuart Mill. »

Moins une science exige de suppositions et de données, plus elle est parfaite. […] J’ose dire que la théorie que vous venez d’entendre est parfaite.

1627. (1864) Le positivisme anglais. Étude sur Stuart Mill

Moins une science exige de suppositions et de données, plus elle est parfaite. […] J’ose dire que la théorie que vous venez d’entendre est parfaite.

1628. (1896) Les époques du théâtre français (1636-1850) (2e éd.)

III Est-ce à dire, en terminant, que le Cid soit une chose parfaite ? […] ORONTE Vous croyez donc qu’une comédie est plus parfaite en prose qu’en vers ? […] Je ne la mis dans cet état qu’après l’avoir embrassée mille fois avec toute l’ardeur du plus parfait amour. […] Enfin, mes forces recommençant à s’affaiblir et craignant d’en manquer tout à fait avant la fin de mon entreprise, j’ensevelis pour toujours dans le sein de la terre ce qu’elle avait porté de plus parfait et de plus aimable.

1629. (1896) Les Jeunes, études et portraits

J’entends par là, de façon très générale : le sens de la forme, ce secret qui nous avertit de donner à une idée une expression tout à fait appropriée, ce besoin qui fait qu’on ne se contente que de ce qui est complet, achevé, parfait. […] Tout contribue à nous montrer dans Hippolyte l’être inférieur et délicieux, objet pour l’homme de tous les rêves, source de tous, les bonheurs, instrument de toutes les déchéances et de toutes les ruines. — Entre cet homme et cette femme va se passer l’éternel drame de l’humanité : c’est d’abord le mirage du bonheur parfait dans l’amour, c’est le désir d’arriver à l’entière possession, d’absorber une autre vie dans la sienne et de s’absorber dans autrui ; et c’est enfin devant le démenti des faits, et dans la nécessité de renoncer à réaliser l’impossible, la déception qui aboutit à la haine. […] Mais une réunion de cent quarante et un écrivains dont le moindre est un profond penseur et un écrivain parfait, voilà ce qui ne s’était jamais rencontré. […] Louis Denise « est un érudit délicat et un parfait artiste ». […] Bernard Lazare de « parfait entre les écrivains ».

1630. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. » pp. 124-157

Ce fils parfait, digne en tout d’une telle mère, et qui ne lui a donné que des consolations, est devenu l’un des plus utiles et des plus méritants employés du ministère de l’instruction publique.

1631. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

On se plut même et on applaudit aux singularités les plus passées de ce langage héroïque ou amoureux, comme à de belles modes du temps de MMes de Longueville ou de La Vallière ; on aima jusqu’au parfait amant et jusqu’à l’adorable furie, tout comme on aime des meubles de Boule.

1632. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

Il n’est que le plus gracieux et le plus parfait des menus trouvères de son temps, dans le goût à la mode.

1633. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (4e partie) » pp. 1-63

Ce qui fait le droit, la beauté et la sainteté de la cause des peuples, c’est la parfaite moralité de leurs actes.

1634. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

Le génie semble s’accumuler et s’amonceler lentement, successivement et presque héréditairement pendant plusieurs générations dans une même race par des prédispositions et des manifestations de talents plus ou moins parfaits, jusqu’au degré où il éclot enfin dans sa perfection dans un dernier enfant de cette génération prédestinée au génie ; en sorte qu’un homme illustre n’est en réalité qu’une famille accumulée et résumée en lui, le dernier fruit de cette sève qui a coulé de loin dans ses veines.

1635. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Mme Desbordes-Valmore » pp. 01-46

Je note quelques-unes de leurs apparitions, à mesure que je les rencontre dans la correspondance de Marceline. « On frappe… C’est Dumas lui-même, avec Charpentier ; Dumas, grand comme Achille, bon comme le pain, et qui se baisse en deux pour arriver à me baiser la main… Il est parfait, il a couru de suite à la maison du roi de toutes ses immenses jambes, mais il est rentré désolé.

1636. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIV » pp. 126-174

Certes, il ne viendra dans l’esprit de personne que cela regarde la maison de Rambouillet Molière, dans la préface de la pièce, exprime positivement une intention opposée aux applications de nos biographes modernes : « Les vicieuses imitations de ce qu’il y a de plus parfait, ont été de tout temps, dit-il, la matière de la comédie ; les plus excellentes choses sont sujettes à être copiées par de mauvais singes.

1637. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVII, l’Orestie. — les Euménides. »

Elle lui bâtit le seul temple parfait qu’ait éclairé le soleil ; elle lui voua les plus belles fêtes qui aient réjoui la terre et le ciel ; elle lui fit tailler par Phidias, dans l’or et l’ivoire, cette statue suprême dont un Ancien a dit « qu’elle ajoutait quelque chose au prestige de la religion ».

1638. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE IX »

Il était difficile, en effet, d’oublier, après l’avoir vu, ce visage ovale et blanc comme une perle parfaite, cette pâle fraîcheur, cette bouche enfantine et pieuse, ces sourcils fins et légers comme des touches d’ombres sur une transparence.

1639. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre II. Axiomes » pp. 24-74

Les philosophes par leurs raisonnements arrivèrent à l’idée d’un droit plus parfait que celui que pratiquaient les Gentils ; mais ils ne parurent que deux mille ans après la fondation des sociétés païennes.

1640. (1906) L’anticléricalisme pp. 2-381

Il était, en très parfaite exactitude, à pieds de satyre. […] Il y eut accord presque parfait entre la bourgeoisie française et la magistrature jusqu’aux approches de la Révolution de 1789. […] Mme de Staël semble dans le vrai, elle qui connaît fort bien l’opinion publique de cette époque, en disant : « A l’époque de l’avènement de Bonaparte, les partisans les plus sincères du catholicisme, après avoir été si longtemps victimes de l’inquisition politique, n’aspiraient qu’à une parfaite liberté religieuse. […] Cette Église internationale, dirigée par un monarque étranger, par un monarque tout-puissant et qui se dit infaillible, par un monarque auquel ses sujets font profession de soumettre toute leur conscience, toute leur personne morale ; cette Église organisée en une solide et serrée hiérarchie despotique ; cette Église qui prétend être elle-même une cité, une société, un État, l’État parfait, l’État dans lequel devraient s’absorber tous les États ; cette Église qui affecte un rôle mondial, à la fois politique et social, le rôle de conductrice de peuples, et qui conduit en effet les peuples à un idéal opposé à celui des sociétés modernes, affichant la haine et le mépris de la civilisation actuelle, de la liberté de conscience, de toutes les libertés, de la raison ; cette Église, enfin, qui complote ouvertement la destruction de l’édifice politique et social élevé par la Révolution française et l’abolition des Droits de l’homme qu’elle appelle sataniques ; comment cette Église pourrait-elle se réclamer du droit commun ? […] Remarquez encore le mot, parfait pour moi, inquiétant pour eux, de M. 

1641. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Chez Ibsen, la sincérité et la simplicité sont parfaites ; et l’angoisse morale a un accent d’une intensité incroyable. — La femme incomprise de nos romans de 1840, pour protester contre la tyrannie sociale et conjugale, prenait un amant, et son mari était inévitablement un personnage dépourvu de toute délicatesse. […] Mais il est bon comme le pain, et, à travers toutes les situations bizarres où sa destinée le promène, il reste un parfait gentleman. […] Elle nous a donné une grande joie, une joie qui se multiplie à mesure qu’on la sent : celle de l’unanimité, de l’accord parfait dans un sentiment essentiel, simple et profond, et où l’existence même de toute la communauté se trouve intéressée. […] Je m’arrête à la Petite Marquise par nonchalance, car, si on faisait l’effort de remonter un peu plus haut, c’est dans les romans de Voltaire, et particulièrement dans Candide, qu’on verrait les plus parfaits exemplaires de cette reproduction ironique des pires inconsciences morales. […] Caprice charmant, d’une convenance imprévue et parfaite !

1642. (1883) Le roman naturaliste

L’imparfait, ici, sert à prolonger la durée de l’action exprimée par le verbe, et l’immobilise en quelque sorte sous les yeux du lecteur. « Sans le sou, sans couronne, sans femme, sans maîtresse, il faisait une singulière figure en redescendant l’escalier. » Changez un mot et lisez : « Sans le sou, sans couronne, sans femme, sans maîtresse, il fit une singulière figure en redescendant l’escalier. » Le parfait est narratif, l’imparfait est pittoresque ; il vous oblige à suivre des yeux le personnage pendant tout le temps qu’il met à descendre l’escalier. […] Mais on peut affirmer en tout cas que de cette épreuve il ne sortira jamais, — je n’ai garde de dire une œuvre de premier ordre, — je dis seulement, dans tel genre secondaire que l’on voudra choisir, une œuvre complète et parfaite en ce genre. […] Quoi qu’il en soit, ce qui est certain, c’est qu’au cœur même de ce dramatique récit d’Adam Bede, et jeté brusquement, — avec cette parfaite insouciance de l’art de composer qui caractérise trop souvent les Anglais, — on pouvait lire un long manifeste sur la portée duquel il était impossible de se méprendre un seul instant : « Je n’aspire, disait donc l’auteur, qu’à représenter fidèlement les hommes et les choses tels qu’ils se sont reflétés dans mon esprit. […] Un Dodson ne devait point être accusé de négliger quoi que ce soit de bienséant, indiqué par l’exemple des principaux paroissiens et par les traditions de famille, comme l’obéissance aux parents, la fidélité conjugale, le travail, l’honnêteté rigide, l’activité, le nettoyage a fond des ustensiles de bois et de cuivre, la conservation des pièces d’argent menacées de disparaître de la circulation, la production de denrées de premier ordre pour le marché… Les Dodson étaient une race très fière, et leur fierté consistait à rendre impossible toute accusation de manquement aux usages ou aux devoirs traditionnels : orgueil sain, à plusieurs égards, puisqu’il unissait l’honneur à la parfaite intégrité, le vrai travail et la fidélité aux règles admises. » Ce n’est pas George Eliot, c’est moi maintenant qui souligne.

1643. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

quitter tout ce qu’il y a de parfait ! […] Nous sommes prêts à conclure que vous êtes un couple d’anges envoyés ici-bas pour rendre la vertu aimable ou pour offrir des modèles aux poëtes, quand ils voudront instruire et charmer leur siècle en peignant la bonté sous la forme la plus parfaite et la plus séduisante qui soit dans la nature752. » Ailleurs, se tournant vers Monmouth, il ajoutait : « Tous les hommes se joindront à moi pour le tribut d’adoration dont je m’acquitte envers Votre Grâce753. » Sa Grâce ne sourcillait pas, ne bouchait pas sa narine, et Sa Grâce avait raison.

1644. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

Ainsi tu acquerrais une connaissance parfaite du bien et du mal, — tu deviendrais semblable à Dieu ! […] Il y a beaucoup d’égoïsme dans ton renoncement, car enfin tu te désintéresses de tes frères moins parfaits que toi. […] Si nous vous sommes supérieurs à vous, les hommes, c’est simplement parce que nous possédons des sens plus nombreux et plus parfaits que les vôtres.

1645. (1803) Littérature et critique pp. 133-288

Il faut nécessairement que la philosophie ou madame de Staël se trompe : il faut que l’esprit humain, malgré la philosophie, puisse rester encore dans l’enfance avec une langue parfaitement analytique, ou qu’il se soit très développé, malgré madame de Staël, chez un peuple qui possédait une langue aussi parfaite. […] L’effet naturel des contrastes est de faire sortir les idées, les couleurs, et de leur donner plus de jeu : mais quand les contrastes s’appliquent à de grands objets, ils acquièrent une sorte de dignité imposante qu’ils n’ont point par eux-mêmes Il ne faut donc point s’étonner si la langue poétique de Voltaire, quoique moins parfaite que celle de Racine, a une sorte d’éclat éblouissant qui subjugue les esprits et attache l’imagination, surtout dans la jeunesse, âge où le premier besoin est d’être vivement frappé, et où l’on demande plutôt des effets qu’on ne les juge. » Comment, après avoir si bien senti les effets de cette imagination impétueuse et mobile, qui entraîne Voltaire et le lecteur après lui, Thomas a-t-il mis si peu de mouvement et de rapidité dans son style ? […] L’autre article (au tome 2, page 575) porte contre les nouveaux mots et les locutions révolutionnaires qui faisaient invasion dans la langue ; il se résume dans cette heureuse pensée : « Ce n’est peut-être pas dans les langues les plus faciles à manier qu’on doit produire les ouvrages les plus parfaits et les plus durables : la nôtre est comme la mine où l’or ne se trouve qu’à de certaines profondeurs. » — Ces explications données, il a paru suffire ici de recueillir les trois principaux morceaux de critique publiés par Fontanes en ces années, sur madame de Staël, sur le Génie du Christianisme, et sur Thomas.

1646. (1862) Notices des œuvres de Shakespeare

Jusqu’en 1825, la plus ancienne édition qu’on eût conservée du Hamlet de Shakespeare était un in 4º, daté Je 1604, dont le titre donnait la pièce comme « imprimée de nouveau et augmentée presque du double, suivant le texte véritable et parfait ». […] Cette dernière circonstance paraît même assez clairement indiquée dans la scène où l’on insiste principalement sur la continence qu’ont promis de garder les jeunes époux jusqu’au parfait accomplissement de toutes les cérémonies nécessaires. […] Lorsque Rome fut conquise, en 1527, par les Espagnols et les Allemands ; il se trouva parmi les prisonniers un riche marchand nommé Ambrogio, qui avait un fils et une fille, tous les deux d’une beauté et d’une ressemblance si parfaites que, s’ils changeaient d’habillements, le père lui-même avait peine à les distinguer5. […] Tant qu’ils demeurèrent à Venise, ils vécurent ensemble dans un si parfait accord et un repos si doux que jamais il n’y eut entre eux, je ne dirai pas la moindre chose, mais la moindre parole qui ne fût d’amour.

1647. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

Que mon excellent et ancien ami et collègue d’autrefois durant mon court passage dans l’Université, que M. le ministre de l’instruction publique, si zélé pour le bien, si occupé en ce moment même, avec des ressources restreintes, de doter la science des instruments qui lui sont indispensables, que ce parfait et honnête représentant en haut lieu de la classe moyenne éclairée, me permette de le lui dire : Il a lui-même beaucoup pris sur lui en déclarant que la thèse « contient la négation du principe même de la morale et de l’autorité des lois pénales. » Telle n’est point, à mon sens, la conclusion obligée de cette thèse, quelque jugement qu’on en porte.

1648. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre III. Combinaison des deux éléments. »

Ils ne sont qu’une flatterie publique des passions régnantes. « Plus la comédie est agréable et parfaite, plus son effet est funeste », et le théâtre, même chez Molière, est une école de mauvaises mœurs, « puisqu’il excite les âmes perfides à punir, sous le nom de sottise, la candeur des honnêtes gens ».

1649. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

, le monde physique comme le monde moral avait commencé par un état plus parfait, plus pur et plus lumineux, par un Éden dans lequel l’homme naissant avait entendu les confidences de Dieu par des révélateurs divins.

1650. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (2e partie) » pp. 365-432

En continuant son apostolat d’évêque sur la terre, il retient donc dans son cœur le dernier mot de sa foi ; il trompe donc pour le bien son troupeau : mais enfin tromper, même pour le bien, ce n’est pas d’un parfait honnête homme.

1651. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

L’empereur ne tarda pas à être convaincu de sa parfaite innocuité en Toscane, et l’y laissa retourner, vieillir et mourir !

1652. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

Son style scénique n’est ni si mâle et si tendu que celui de Corneille, ni si parfait et si harmonieux que celui de Racine ; ce style, qui sent trop l’improvisation, la facilité, la négligence, n’a point cette solidité qui résiste au temps dans l’œuvre des beaux vers ; mais le mouvement, l’éclat, l’héroïsme, la tendresse, toutes ces qualités de surface qui séduisent l’œil et l’oreille, lui donnent un caractère voltairien indéfinissable par un autre nom que par le nom de l’auteur.

1653. (1834) Des destinées de la poésie pp. 4-75

Lui seul sait à quelle destinée il appelle ses créatures, et pénible ou douce, éclatante ou obscure, cette destinée est toujours parfaite, si elle est acceptée avec résignation et en inclinant la tête !

1654. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre II. Attardés et égarés »

La nouveauté était de réunir fréquemment les mêmes hommes et mêmes femmes, dans une égalité momentanée et dans une liberté parfaite, non point pour la cérémonie, mais pour le plaisir, non point pour un plaisir extérieur et précis, danse, souper, spectacle (quoique ces plaisirs naturellement ne fussent pas exclus), mais pour le simple et essentiel plaisir qui se pouvait tirer de la réunion des esprits, s’excitant mutuellement par le contact, et s’efforçant de produire ce qu’ils avaient de meilleur.

1655. (1914) Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne pp. 13-101

(Car on voit mal comment un éther serait un conducteur parfait de l’attraction et de la gravitation, comment un éther conduirait instantanément de l’attraction et de la gravitation à distance, comment un éther ferait des transports instantanés de forces qui seraient celles de l’attraction et de la gravitation.)

1656. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

C’était un parfait honnête homme, dont les opinions se rapprochaient de celles de l’école universitaire modérée, si décriée alors dans le clergé.

1657. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 novembre 1886. »

Wagner a écrit quelque part qu’on pouvait juger Tristan d’après les lois les plus rigoureuses qui découlent de ses affirmations théoriques, — tant il est sûr de les avoir suivies d’instinct, — mais il avoue qu’il s’était, en composant, affranchi de toute idée spéculative et qu’il sentait même, à mesure qu’il avançait dans son œuvre, combien son essor faisait éclater les formules de son système écrit. « Il n’y a pas, ajoute-t-il avec quelque nuance de regret, de félicité supérieure à cette parfaite spontanéité de l’artiste dans la création, et je l’ai connue en composant mon Tristan. » Il en fut de même, à ce qu’on peut croire, quand il termina l’Anneau du Nibelung, interrompu pour Tristan, et quand il écrivit les Maîtres Chanteurs et Parsifal.

1658. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre III »

Il ne lui manque qu’un million ou deux pour être parfait.

1659. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre premier. Sensation et pensée »

répond de Hartmann, l’égalité ne se tire pas davantage des perceptions seules que les choses font naître en nous, car le même raisonnement s’appliquerait ici aux perceptions, dont la première ne peut enrichir la seconde d’une qualité nouvelle. » De Hartmann est dupe des jeux de sa dialectique : il considère les perceptions comme de petits cubes qui existent l’un en dehors de l’autre avec une parfaite indifférence l’un pour l’autre, si bien que leur voisinage ne leur apporte pas le moindre changement.

1660. (1856) La critique et les critiques en France au XIXe siècle pp. 1-54

Mais la première forme, moins éloquente et moins parfaite, donne peut-être une idée plus juste de la doctrine et de la méthode adoptées alors par le professeur.

1661. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Dans vingt ans elle sera parfaite — comme Turcaret ou comme Mercadet. […] Denise, cette personne parfaite, a commis une faute. […] Dumas fils et de son théâtre un poète lyrique qui ignore Jésus, pour qui Racine et Molière sont comme s’ils n’étaient pas, et pour qui Victor Hugo n’est pas un artiste assez parfait ni assez pur ? […] la Légende des siècles n’est pas aussi parfaite que les Poèmes barbares. […] Car, outre la clarté parfaite, il a le mouvement, il a la vie.

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