On drapait en violet sa vie, en attendant la grande draperie noire !
— et ensuite parce qu’elle avait atteint l’homme qui devait le plus y échapper, — s’éteignit tout à coup, un jour, comme la flamme d’un grand incendie qui ne peut plus rien dévorer et qui tombe sur des débris fumants et noirs… Après avoir aimé Madame Récamier comme il l’avait aimée, Benjamin Constant retourna à la vie ordinaire de ces passions qui ne sont plus la passion unique, la passion despotique et torturante qui donne bien l’idée de ce que les catholiques entendent par leur possession du démon… Benjamin revint à la vie de la pensée, à ses travaux, à ses ambitions, à ses passions même ; car il en eut pour d’autres que Madame Récamier.
Ému à la manière des ivrognes, sceptique et larmoyant, Hoffmann ne sort pas de la chambre noire de son cerveau.
Dans la splendeur animée du monde catholique, où nous assistons à la vie, les philosophes nous semblent des ombres chinoises, des marionnettes noires qui s’agitent sur une toile blanche tamisée de lumière, et cela nous cause je ne sais quel frémissement de plaisir de les voir se livrer aux affreux amusements de la discorde et se briser des meubles sur leur majestueux angle facial.
Soury s’est cru tenu d’exagérer et de pousser au noir, comme disent les peintres, la tête rayonnante de notre Dieu, ne se contentant pas d’en faire platement un homme, comme M.
Il se contente, vieillard placide, d’aller de son presbytère à son église, et, là, de s’asseoir dans l’encoignure d’une chapelle, sur une planche de bois noir, puis d’attendre… Et, tout à coup, des milliers d’êtres humains viennent s’agenouiller devant l’escabeau de ce prêtre, pour s’en relever fortifiés et y envoyer, à leur tour, ceux qui n’y sont pas venus encore !
Le Bossuet de la stalle en chêne de l’antique église de Metz, digne d’inspirer un poète comme Byron quand Byron devenait catholique et pleurait en entendant l’orgue, ce Bossuet ponctuel comme le Devoir et comme l’Humilité, qui arrivait, quarantième manteau noir, pour l’office de nuit, pendant dix-sept ans, à sa place accoutumée dans le chœur de l’église assombrie, a beaucoup frappé Floquet, qui n’est pas un rêveur, mais un esprit solide.
Il fallait nous peindre, avec le noir de ses meurtrissures, la tête radieuse si prématurément meurtrie, au lieu de ce gracieux profil fuyant, qui fuit trop… Ce n’est là ni l’Alfred de Musset de nos curiosités, ni celui de nos rêves, ni même celui de nos souvenirs.
Si vous avez peur lorsque la nuit est noire, Mon Dieu !
L’auteur des Iambes publia des Odelettes, dans lesquelles le terrible et noir Archiloque, voulant faire de l’Anacréon, culbuta dans le Fidèle Berger de la rue des Lombards.
Ces poésies, ces noires poésies de circonstance, appelées des Idylles par le poète avec une atroce ironie, écrites, comme il le rappelle : « au jour le jour du siège, quand les obus prussiens éventraient nos maisons », sont moins des hymnes qui entraînent en avant que des élégies désespérées, poinçonnant dans le cœur qu’elles déchirent des impressions qui ne doivent plus jamais s’en effacer… Memoranda terribles (seront-ils féconds ?)
Il fréquente en même temps les modernes représentants du diabolisme ; il assiste à la messe noire. […] L’astre, noir est une « contribution » à l’étude de l’homme de génie considéré comme une monstruosité dans la nature. […] Car une ancienne coutume veut qu’une lanterne, pendue aux volets clos et nouée de crêpe noir, dénonce les maisons qui ont été touchées par la mort. […] Golaud l’envoie rechercher cet anneau tout de suite et bien qu’il soit nuit noire ; il l’envoie avec Pelléas. […] Ivan Gilkin. « est un Raphaël noir ».
Elle n’est pas, Créon, l’ouvrage d’une année ; Elle est née avec nous ; et sa noire fureur Aussitôt que la vie entra dans notre cœur. […] Nous dirions aujourd’hui que les Plaideurs furent « un four noir ». […] En effet, l’idée de Narcisse, d’Agrippine et de Néron, l’idée, dis-je, si noire et si horrible qu’on se faisait de leurs crimes ne saurait s’effacer de la mémoire du spectateur, et, quelque effort qu’il fasse pour se défaire de la pensée de leur cruauté, l’horreur qu’il s’en forme détruit en quelque manière la pièce. […] Il vit plusieurs fois Bajazet à qui on permettait de se promener quelquefois à la pointe du sérail, sur le canal de la mer Noire. […] Et, tandis qu’ils s’agitent dans cette ombre funèbre, nous avons l’impression que quelqu’un des esclaves noirs qu’on voit glisser au fond de la scène conclura le drame.
Tout auprès, un tableau, peint avec du noir et du blanc, représente un groupe de moines violâtres, les plus étranges qu’on puisse imaginer… Sont-ce des moines ? […] J’ai connu une jeune fille de haute famille et de grande beauté qui s’était affolée d’un muletier bossu, noir, le nez planté de poils, hideux. […] L’habit noir, c’est la tenue grave, sévère, un peu chagrine ; l’habit bleu, la tenue fleurie qui sied à la jeunesse studieuse et souriante. […] Les autres, moins tranchants, qui tiennent à motiver leur avis et qui, d’ailleurs, veulent épargner Molière, disent : « Il est absurde, à nous, de parler en vers, parce que nous portons des habits noirs et que l’habit noir est un costume essentiellement prosaïque. » Ils oublient, ces messieurs, que le pourpoint et la rhingrave semblaient et devaient sembler tout aussi prosaïques aux gens du xviie siècle que notre costume moderne, à nous, peut nous le paraître. […] supprimer le vers à cause de l’habit noir, c’est toujours supprimer Molière et Regnard.
C’est le temps des rochers ombreux où l’on boit le vin noir des monts Biblines, au bord d’une source claire, le visage éventé par les souffles tièdes. […] Un démon poursuit Mahomet avec un tison enflammé, comme un démon noir, dans le huitième cercle, court sur Dante les ailes ouvertes, le pied léger, et armé d’un harpon. […] Ses murailles semblaient de naissance vieilles et noires. […] Si grand que soit leur succès, je doute qu’ils étendent aussi loin une influence aussi profonde que celle de ces « romans noirs ». […] Et on y voyait des flacons étincelants pareils à des fleurs « où des lucioles feraient vibrer leur lumière sous un cyprès dans la nuit noire ».
Je suis le ténébreux, — le veuf, — l’inconsolé, le prince d’Aquitaine à la tour abolie, ma seule « étoile » est morte, et mon luth constellé porte le « soleil noir » de la mélancolie… la poésie populaire de tous les pays, et même du nôtre, aime le non-sens. […] Raison, je ne sais ; mais poésie, cela est certain, quoique naturellement un peu noire. […] La raison est sa bête noire. […] Les vers poétiques seront imprimés en rouge-feu ; les prosaïques, en noir ; ceux que traverse un courant à peine perceptible, en jaune. […] on ne doit pas présenter, écrit-il, comme dépouillé de tout sens un discours où sont entassés des mots aussi évocateurs que « ténébreux », « prince d’Aquitaine », « étoile », « luth constellé », « soleil noir », « mélancolie… » l’action exercée sur l’attitude mentale est seulement indirecte, tout comme dans tel vers de Mallarmé, par « angoisse », « minuit », « lampadophore… »… etc : c’est très juste.
. — Derrière le carrosse et sur les flancs courent les gardes du corps, avec l’épée et la carabine, en culottes rouges, grandes bottes noires, habit bleu couturé de broderies blanches, tous gentilshommes vérifiés ; il y en a 1 200, choisis à la noblesse et à la taille ; parmi eux sont les gardes de la manche, plus intimes encore, qui, à l’église, aux cérémonies, en hoqueton blanc étoilé de papillotes d’argent et d’or, ayant en main leur pertuisane damasquinée, sont toujours debout et tournés vers le roi « pour avoir de toutes parts l’œil sur sa personne ». […] Les paniers des dames rangées en cercle ou étagées sur les banquettes « forment un riche espalier couvert de perles, d’or, d’argent, de pierreries, de paillons, de fleurs, de fruits avec leurs fleurs, groseilles, cerises, fraises artificielles » ; c’est un gigantesque bouquet vivant dont l’œil a peine à soutenir l’éclat Point d’habits noirs comme aujourd’hui pour faire disparate. […] Au chapitre d’Alix, près de Lyon, les chanoinesses vont au chœur en paniers, « habillées comme dans le monde », sauf que leur robe est de soie noire et que leur manteau est doublé d’hermine214.
Et vos enfants au loin épars sur la pelouse, Et votre époux absent et sorti pour rêver, J’entre pourtant ; et Vous, belle et sans vous lever, Me dites de m’asseoir ; nous causons ; je commence À vous ouvrir mon cœur, ma nuit, mon vide immense, Ma jeunesse déjà dévorée à moitié, Et vous me répondez par des mots d’amitié ; Puis revenant à vous, Vous si noble et si pure, Vous que, dès le berceau, l’amoureuse nature Dans ses secrets desseins avait formée exprès Plus fraîche que la vigne au bord d’un antre frais, Douce comme un parfum et comme une harmonie ; Fleur qui deviez fleurir sous les pas du génie ; Nous parlons de vous-même, et du bonheur humain, Comme une ombre, d’en haut, couvrant votre chemin De vos enfants bénis que la joie environne, De l’époux votre orgueil, votre illustre couronne ; Et quand vous avez bien de vos félicités Épuisé le récit, alors vous ajoutez Triste, et tournant au ciel votre noire prunelle : « Hélas ! […] Mais comme au lac profond et sur son limon noir Le ciel se réfléchit, vaste et charmant à voir, Et, déroulant d’en haut la splendeur de ses voiles, Pour décorer l’abîme y sème les étoiles, Tel dans ce fond obscur de notre humble destin Se révèle l’espoir de l’éternel matin ; Et quand sous l’œil de Dieu l’on s’est mis de bonne heure, Quand on s’est fait une âme où la vertu demeure ; Quand, morts entre nos bras, les parents révérés Tout bas nous ont bénis avec des mots sacrés ; Quand nos enfants, nourris d’une douceur austère, Continueront le bien après nous sur la terre ; Quand un chaste devoir a réglé tous nos pas, Alors on peut encore être heureux ici-bas ; Aux instants de tristesse on peut, d’un œil plus ferme, Envisager la vie et ses biens et leur terme, Et ce grave penser, qui ramène au Seigneur, Soutient l’âme et console au milieu du bonheur. […] Dans l’île Saint-Louis, le long d’un quai désert, L’autre soir je passais : le ciel était couvert, Et l’horizon brumeux eût paru noir d’orages, Sans la fraîcheur du vent qui chassait les nuages ; Le soleil se couchait sous de sombres rideaux ; La rivière coulait verte entre les radeaux ; Aux balcons çà et là quelque figure blanche Respirait l’air du soir ; — et c’était un dimanche.
La fauvette à claquets ou la petite meunière se fait entendre chez nous dès la fin de mars, quinze jours plus tard viennent la fauvette à tête noire, le moine ; puis, environ une semaine après, le rossignol, et seulement à la fin d’avril ou au commencement de mai, la fauvette grise. Tous ces oiseaux avec leurs petits de la première couvée muent chez nous en août ; aussi on prend ici, à la fin d’août, de jeunes moines qui ont déjà leur petite tête noire. […] Elle monta l’escalier noir devant moi, me tenant par la main pour me conduire.
Feuilletez encore, si vous en avez le courage, les tomes volumineux de la Dame en noir et vous y trouverez un pendant admirable à ce délicat épisode. […] Il s’est jeté tête baissée dans le dédale des sombres aventures, poétisant de son encre la plus noire le crime et l’assassinat, n’oubliant pas de promener les cœurs naïfs à travers les situations les plus funestes, enchevêtrant presque avec art les quiproquos et les mystères, se perdant et se retrouvant le mieux du monde parmi les zigzags innombrables du dialogue, destinés à prolonger les suites insidieuses au prochain numéro ; enfin s’acquittant en conscience de son office. […] Dans la politique intérieure, même triomphe du roman-feuilleton : l’outrage et la calomnie ; d’un côté, le rédacteur, qui est la loyauté, la franchise, la nation même et l’âme de la patrie ; de l’autre, tous ceux qui ne pensent pas comme lui, les traîtres, des gens qui trament dans l’ombre les plus noirs complots, et auxquels, fussent-ils d’ailleurs les meilleurs serviteurs du pays, par tous les moyens, contre les lois, contre tout droit, il faut imposer silence.
Dimanche 19 janvier Aujourd’hui, après de longs mois de complète disparition, apparaît Villedeuil tenant amoureusement par la main, sa petite fille, et dont la barbe devenue blanche lui donne un air patriarcal… Le voyant ainsi, mon souvenir n’a pu s’empêcher d’évoquer le Villedeuil à la barbe noire des soupers de la Maison d’Or. […] Puis il était question du fameux corset de soie noire, que fait porter Bourget à sa femme chic, et qu’elle n’a jamais porté, et l’on parlait d’un corset idéal, d’un corset coûtant 80 francs, et durant huit jours, d’un corset fabriqué de deux morceaux de batiste, avec des baleines de la grosseur des arêtes du hareng. […] Là-dessus, élégamment déverticalisés dans des penchements sur le côté, les silhouettes des noirs patineurs.
Elle fouille dans les coffres de ses mansardes pour y trouver la veste noire, le chapeau de feutre, le morceau de crêpe qu’elle réserve aux tristes solennités de ses propres convois ; elle les étale sur le lit ; elle se promet de les revêtir en masse au lever du soleil, pour que la ville ait changé de couleur pendant cette triste nuit. […] Un second corridor noir s’offrait à vous ; vous le suiviez ; un jour de reflet vous indiquait au fond du corridor la lumière répercutée d’une pièce éclairée par le soleil. […] Un lit, un canapé, une table ronde où les journaux et les brochures du jour faisaient place à leur heure à la bouteille de verre noir et au frugal repas du matin, une cheminée au fond de laquelle couvait un petit feu de fagots dans un massif de cendres, une ou deux gravures pendues à des clous contre la muraille, représentant les amis de sa jeunesse, dieux lares de son cœur : Manuel, le favori de ses souvenirs, près de qui il doit lui être doux de reposer dans son tombeau d’emprunt ; Laffitte, le Mécène bienfaisant des factions, dans un temps où les factions vendaient et achetaient la gloire ; Chateaubriand, qu’il avait cru aimer, et dont il avait pris les morosités monarchiques pour des convictions républicaines ; Lamennais, dont il estimait le courage, mais dont il aimait peu le caractère ; un masque mort du premier Napoléon couché sur le grabat de Sainte-Hélène, relique obligée chez ce dévot railleur à la grande armée : ce masque est moitié pathétique et moitié lugubre.
Cette terre est située au milieu d’un groupe ou d’un nœud confus de montagnes noires dont j’aperçois et dont je reconnais encore les gorges sombres avec l’émotion des jeunes souvenirs, quand je passe en chemin de fer à la station alors inconnue de Mâlins. […] Ce groupe de noires montagnes est percé à peine de quelques vallées étroites et tortueuses. […] À la forme du volume et à la couleur de la couverture en bois noir, nous pensions que c’était un vieux bréviaire de notre oncle ou un missel de sacristie, dans le temps qu’il y avait au château l’aumônier de notre grand-père.
L’amour, la jeunesse, les premières ivresses de la vie, tout cela est si beau quand tout cela n’est plus, tout cela s’empourpre tant en nous quand le noir de la nuit nous tombe sur la tête, qu’il n’est pas dit que cette Juliette et ce Roméo, ce groupe exquis et très certainement le plus pur que le Génie humain ait produit pour exprimer l’Amour partagé, n’aient pas une beauté plus grande que la simple beauté de la vie : — la beauté divine des fantômes ! […] Depuis qu’il existe des peintres, n’est-ce pas toujours sur une palette noire que se broie le rose le plus doux ? […] Je l’aime mieux et je le trouve plus beau jusque dans le mystère de sa vie, qui est peut-être une gracieuseté du bon Dieu ; car l’être moral que l’homme fait en soi n’est jamais si beau que l’être intellectuel que Dieu y crée, et la statue de diamant se voit mieux sur son noir piédestal d’ombres !
Publiant en 1808 son premier recueil de chansons, il toucha, dans sa préface, quelque chose de ces horribles scènes dont il avait été témoin et victime ; mais, chez les êtres vivement doués et qui ont été désignés en naissant d’une marque singulière, la nature au fond est si impérieuse, et elle donne tellement le sens qui lui plaît à tout ce qui vient du dehors, qu’il y voyait plutôt un motif de s’égayer désormais et de chanter : « Permettez-moi, disait-il au lecteur de cette préface, de payer à la Gaieté, ma généreuse libératrice, un hommage que l’ingratitude la plus noire pourrait seule lui refuser ; daignez m’entendre, et vous en allez juger. […] Ce ne sont pas celles qui ont pour titre et pour sujet un de ces noms tirés au sort, comme c’était d’usage dans les réunions du Caveau, la neige, la plume, le noir, le long ; il s’agissait de broder là-dessus quelques couplets, vraie gageure de société et pur jeu d’esprit.
Le style de Valérie a, comme les scènes mêmes qu’il retrace, quelques fausses couleurs de la mode sentimentale du temps : je ne saurais aimer que le Comte envoie, pour le tombeau de son fils, une belle table de marbre de Carrare, rose (dit-il) comme la jeunesse, et veinée de noir comme la vie. […] Elle ne connaissait encore l’empereur Alexandre qu’indirectement, bien qu’elle l’appelât déjà le Sauveur universel, l’Ange blanc, et qu’elle l’opposât sans cesse à l’Ange noir, Napoléon.
Ressuscitez les royaumes de Chypre, de Crète, sous ses lois, la mer Noire couverte de ses flottes, Constantinople crénelée de ses forts, le Péloponnèse tout entier courbé sous ses vice-doges, la monarchie universelle des mers d’Orient donnée en dot au Bucentaure qui allait épouser en souverain les flots ; ressuscitez le commerce entier de l’Orient et le transport des armées de toute l’Europe au profit des vaisseaux de Venise ! […] Mais, si vous voulez ressusciter Gênes (et ce serait une des plus justes de vos résurrections), rendez-lui donc d’abord son indépendance, rendez-lui donc ses établissements maritimes tout autour de la mer Noire, depuis Caffa jusqu’à Trébizonde !
Le seul charme de ce séjour, c’est son site : de quelque côté qu’on porte ses regards, aux quatre horizons de ce monticule, on s’égare, depuis le fond de la vallée jusqu’au ciel, sur des flancs de montagnes à pentes ardues, entrecoupés de forêts, de clairières, de genêts dorés, de ravines creuses, de hameaux suspendus aux pentes, de châtaigniers, d’eaux écumantes, d’écluses, de moulins, de vignes jaunes, de prés verts, de maïs cuivrés, de blé noir, d’épis ondoyants, de huttes basses de bûcherons et de chevriers, à peine discernables du rocher au dernier sommet des montagnes, habitations qui ne se révèlent que par leur fumée. […] Deux têtes d’hommes vêtus de noir apparurent derrière un rideau bas de noisetiers de l’autre côté du ravin.
« Il sera rejeté comme ce noir génie « Effrayant par sa gloire et par son agonie, « Qui tomba jeune encor, dont ce siècle est rempli. […] « Pour dire l’avenir à notre âme débile, « On a l’écumante sibylle, « Que bat à coups pressés l’aile d’un noir démon.
Il est nuit, mais une de ces nuits lumineuses sur les collines de Judée ; les disciples de ce sage, qui voit sa mort pour le lendemain dans la colère des grands et dans l’indifférence du peuple de Jérusalem, reposent endormis et à peine visibles, étendus sur les racines des noirs oliviers ; le Christ les fuit comme des compagnons qui commencent à douter et dans l’esprit de qui la trahison s’insinue pour ébranler la foi chancelante. […] Il y aurait de quoi passer la nuit ici à décrire ce qui se voit, s’entend, dans ma délicieuse chambrette, ce qui vient m’y visiter, de petits insectes, noirs comme la nuit, de petits papillons mouchetés, tailladés, volant comme des fous autour de ma lampe.
Je n’ai qu’à fermer les yeux pour le revoir, en ma mémoire, ainsi que je l’ai vu, le béret de velours noir sur ses cheveux d’argent lisse, en veston de satin noir, sa tête de géant, énorme et fine, dominant sa taille ramassée qu’elle grandissait.
Fechner raconte que, s’éveillant dans son lit, étant immobile, il regarde sa pipe noire sur le mur opposé ; puis, fermant les yeux, il a la sensation de son lit en noir et de la pipe en blanc ; mais les deux sensations consécutives lui apparaissent sur le même plan, avec le lit considérablement raccourci.
Après avoir, comme Childe-Harold et comme René, promené ça et là sa noire misanthropie, Daniel (c’est Daniel sans autre nom, Daniel, toujours comme René et comme Childe-Harold) rencontre au bord des mers une jeune fille qu’il décrit pendant tout le roman et qu’il ne nous montre pas une seule fois avec ce trait qui grave une image dans notre âme ; et, cette jeune fille, il se met à l’aimer dès la première vue avec la passion de l’épigraphe du livre, une de ces passions qui font deux êtres l’un à l’autre de par la nature et de droit divin, plus légitimes par conséquent que les lois et les conventions ! […] Aujourd’hui, il a changé de place sa chambre noire.
Un homme de cet acabit, en effet, un égoïste à la fois si oublieux, a gardé jusque dans son calcul des portions de naïveté, d’inadvertance, d’ignorance de soi, de confiance et de persuasion en sa faveur, qui le garantissent de toute action noire, basse ou fausse : il y a donc lieu, malgré tout, à l’indulgence.
nuit noire !
Il est quelque chose comme le raisonnement opposé au sentiment, ainsi que le Docteur noir de M.
En été, pendant les travaux de la campagne, il restait peu de monde à la setch ; mais l’hiver y ramenait une garde nombreuse ; et c’est là qu’au premier danger, au premier cri d’appel, accouraient tous les chefs répandus dans les pays d’alentour ; c’est là, comme dans un champ de mai, que se décidaient tumultuairement les grandes entreprises, soit les courses de piraterie par mer sur les rivages de la mer Noire, soit les formidables invasions en Turquie et en Pologne.
Au-dessus d’elle, la culture latine a accaparé les idées générales qui pouvaient la nourrir et la développer ; un petit peuple noir de théologiens et de disputeurs les a prises pour son apanage, et cet enclos ecclésiastique en restant stérile, a imposé la stérilité au reste du champ.
Il donne aux arbres une immortalité « sur les bords du noir rivage. » Et il rend vraisemblable par ce ton naïf qui dégénère quelquefois en gentillesse enfantine, mais qui n’en convient que mieux à l’historien de Jupin et de la fourmi.
Au centre, une sorte de ville perdue environnée de solitude ; puis un peu de verdure, des îlots sablonneux, enfin quelques récifs de calcaires blanchâtres, ou de schistes noirs, au bord d’une étendue qui ressemble à la mer ; dans tout cela, peu de variété, peu d’accidents, peu de nouveautés, sinon le soleil qui se lève sur le désert et va se coucher derrière les collines, toujours calme, dévorant sans rayons ; ou bien des bancs de sable qui ont changé de place et de forme aux derniers vents du sud.
Au commencement du siècle, le Romantisme, qui fut un peu factice et postiche, vécut d’une « religion littéraire » dont nos plus modernes catholiques duChat Noir nous donnaient la parodie.
Je sais, depuis, maintenant, un nouveau livre où l’on peut pleurer, aux soirs noirs où c’est la jouissance désirée ; j’aurai la Mort d’Isabelle et ses ultimes paroles Floris, où, comme aux adieux de Wotan, toutes nos contraintes écorchées se fondront dans les sanglots, les sanglots de bénédiction qui sont, après le sommeil, le meilleur don des dieux mauvais aux hommes faibles.
Combien ces réunions sont simples, cordiales, empreintes d’une bonhomie fraternelle et différentes de celles du Chat noir, par exemple, où l’art tourne vite au puffisme et à la parodie !
Il se servait d’une mule, monture en Orient si bonne et si sûre, et dont le grand œil noir, ombragé de longs cils, a beaucoup de douceur.
Ce rêve noir, il le dit en des vers qui ne s’irritent jamais, qui sourient souvent, qui parfois s’amusent.
Binet, « comme s’il était écrit à la craie sur un tableau noir ».
Cheveux blancs très courts, sourcils restés noirs, des yeux qui semblent des yeux d’émail entre des paupières sans cils, coloration bilieuse du teint, galbe osseux, sculpture émaciée des chairs.
On avait décidé de nommer acrochordons les verrues, emprosthotonos les convulsions, lipothymie la pâmoison, alexipharmaques les contre-poisons, anacathartiques les expectorants, eccoprotiques les purgatifs, anaplérotiques les cicatrisants ; il y eut des médicaments antihypocondriaques, à savoir : l’ellébore noir, la scolopendre, l’hépatique, le senné, le safran de mars, les capillaires et l’extrait panchimagogue.
Leur séjour est celui de mille maux affreux, Des soucis, des revers, des noires injustices.
Selon que vous serez heureux ou misérable, Les jugemens de cour vous rendront blanc ou noir.
Comme deux notes noires doivent dans notre musique durer autant qu’une blanche, dans la musique des anciens deux sillabes breves duroient ni plus ni moins qu’une longue.
Mais c’était un Jacquemont supérieur au Jacquemont des Indes de toute la supériorité d’un peintre, d’un artiste, sur un philosophe et un bourgeois de la rue Saint-Denis, qui habite et parcourt les Indes comme le plongeur habite la mer, sous une cloche de verre, la tête éternellement recouverte de son bonnet de soie noire et d’un dôme de préjugés voltairiens.
Quand l’affreux maréchal de Retz disait sa messe noire ; lorsque les bâtards d’Armagnac et de Bourbon, ces Antechrists, déchiraient tant de seins outragés et faisaient coucher la Débauche dans le sang qu’ils avaient versé ; quand Pierre de Giac, — un des favoris de Charles VII, — quand Pierre de Giac, le bourreau équestre, emportait en croupe sur son cheval sa femme empoisonnée et forçait ainsi son agonie à chevaucher pendant quinze lieues, Jacques Cœur, bien différent de ces hommes terribles, menait à Bourges une de ces bienfaisantes et magnifiques existences qui rappellent les Médicis.
que sous le ciel bleu de la Grèce, chez un peuple qui aima la lumière, il se rencontrât une tête indigne de cet azur, — une tête grecque que Phidias n’aurait pas sculptée, car il l’eût faite plus intelligente, — qui allât s’enfouir dans la crasse et dans la poussière des plus noires bibliothèques allemandes, pour en rapporter le détritus de chroniques ignares et menteuses !