Plusieurs des philosophes grecs confondent de même les rangs dans la morale, ils placent l’amour de l’étude sur la même ligne que l’accomplissement des premiers devoirs.
Montesquieu semble donner la vie aux idées, et rappelle à chaque ligne la nature morale de l’homme au milieu des abstractions de l’esprit.
Quand vous avez écrit, comme philosophe hégélien, une Méditation sur le drame comique, vos premières et vos dernières lignes ont clairement eu pour but de rassurer sur le compte de votre orthodoxie nos esprits qui prenaient l’alarme ; ce but, elles l’ont atteint, bien qu’assez gauchement, à l’aide de quelques phrases d’ironie qui, sans transition, ont précédé toute une exposition sérieuse, puis d’autres qui lui ont succédé — sans transition.
Je pose la question seulement et n’ai garde de la trancher, ni de suivre de près cette ligne légère, sensible pourtant, qui, chez les illustres les plus sûrs d’eux-mêmes, sépare déjà le mort du vif.
Les Pantalon et les zanni descendaient en ligne directe de ces histrions.
Elle vient, comme les valets ses camarades, en droite ligne des esclaves cyniques de la comédie latine.
Il n’est pas de ligne qui, suivie jusqu’au bout, ne mène à ce foyer.
Quand on a déterminé de la sorte les grandes lignes, et, pour ainsi dire, la charpente osseuse d’une œuvre, on travaille à démêler les autres éléments de cet organisme.
Nous n’avons en tête de ce livre que peu de lignes à écrire, et l’espace nous manque pour les développements nécessaires.
Il regne un continuel désordre dans tout ce qu’il écrit, & vous trouvez tel chapitre intitulé des Loix, où il n’y aura pas quatre lignes sur son sujet.
Il ne suffit pas aux peintres de concevoir des idées nobles, d’imaginer les compositions les plus élegantes, et de trouver les expressions les plus pathétiques, il faut encore que leur main ait été renduë docile à se fléchir avec précision en cent manieres differentes, pour se trouver capable de tirer avec justesse la ligne que l’imagination lui demande.
Saint-Victor a, lui, en ses Deux Masques, la pureté et la ligne irréprochable du fini dans l’œuvre accomplie, et la certitude, que rien ne trouble plus, d’un talent au point juste de sa maturité.
Il fallait tout dominer, tout écraser par le résumé souverain, par la foudroyante acuité du regard, par le despotisme du talent qui sait et qui ose abréger, ou entrer rigoureusement et patiemment dans le détail et ne pas raconter des poètes comme Rutebœuf et Villon en deux lignes, ni vouloir donner une idée de leur manière avec quatre vers !
On bafouait les moines sur toute la ligne, et le rire allait s’étendre de Luther à Rabelais.
Saisset n’ose rien de dogmatique et de réellement décisif sur la personnalité divine, d’abord parce que le déisme pur ne le permet pas, et ensuite parce que, sur cette question de Dieu, l’Institut ne se soucie pas qu’on dépasse la ligne circonspecte d’une haute convenance sociale.
Simon, au lieu de compliquer et de tortiller, à la manière allemande, les arabesques déjà si brouillées de la philosophie, les simplifient au contraire, jusqu’à la ligne la plus mince et la plus diaphane, afin que cela devienne si facile d’être philosophe que naturellement tout le monde le soit !
« Personne ne croit, nous dit M. de Beauverger dans sa préface, que la politique spéculative n’ait pas d’influence sur la destinée des empires et qu’il n’y ait pas d’enseignement à retirer de ses travaux. » Personne ne le croit, en effet ; seulement il s’agit de savoir quelle fut cette influence, si elle était nécessaire, si elle a été bonne ou funeste et si tous ses travaux valaient plus ou moins, de la part des esprits qui dominent ces sujets, que les deux lignes de résumé qui pouvaient être l’ouvrage de M. de Beauverger et qui, malheureusement, ne le sont pas.
il le conservera, s’il ne faut pas pour cela dévier de sa ligne droite, et il le perdra, sans souci, pour ne pas en dévier.
… Il devait y croire, en se regardant… Du reste, je l’ai dit aux premières lignes de ce chapitre, Maurice Bouchor est trop près des premières impressions de son éducation poétique pour avoir pu s’en abstraire et les effacer entièrement de sa pensée.
Tel est le fond du poème, tel est le motif de roman ou de romance qui, par le détail, devient épique et qui fait jaillir de la pensée du poète tout un monde grandiose, passionné, héroïque, infini, où passent des lueurs à la Corrége sur des lignes à la Michel-Ange !
Arrivé aux dernières lignes de son ouvrage : « Ainsi finit, dit M.
Dès les premières lignes et les premières pages, vous sentirez, quel que soit le livre, quelles que soient les inventions ou les observations qui vont suivre, qu’il y a ici (s’en serait-on douté ?)
Puis vinrent tant de sénatus-consultes, par lesquels les cognats furent mis sur la ligne des agnats.
J’aurais aimé à trouver dans son Introduction d’Hippocrate quelque page vivante, animée, se détachant aisément, flottante et immortelle, une page décidément de grand écrivain et à la Buffon, comme il était certes capable de l’écrire, où fut restauré, sans un trait faux, mais éclairé de toutes les lumières probables, ce personnage d’Hippocrate, du vieillard divin, dans sa ligne idéale, tenant en main le sceptre de son art, ce sceptre enroulé du mystérieux serpent d’Épidaure ; un Hippocrate environné de disciples, au lit du malade, le front grave, au tact divinateur, au pronostic sûr et presque infaillible ; juge unique de l’ensemble des phénomènes, en saisissant le lien, embrassant d’un coup d’œil la marche du mal, l’équilibre instable de la vie, prédisant les crises ; maître dans tous les dehors de l’observation médicale, qu’il possédait comme pas un ne l’a fait depuis. […] Il faudrait bien peu pour donner à telle de ces pages de la couleur et de la flamme, de ce qui brille de loin ; mais ce peu eût sans doute paru de trop à l’esprit exact et consciencieux qui tient à ne pas excéder d’une ligne la limite du vrai. […] Selon moi, et si je m’écoute, Auguste Comte ne serait qu’un des hommes qui, depuis Lessing, Turgot, Condorcet, Saint-Simon, conçoivent le progrès de la société et celui de l’entendement humain selon une certaine ligne qu’on peut admettre dans sa généralité sans aller pourtant jusqu’à la serrer de trop près dans le détail.
» Voilà ce que j’appelle le Raphaël dans Théocrite : trois lignes simples, et l’horizon bleu qui couronne tout. […] Autant m’est odieux l’architecte qui chercherait à élever une maison égale à la cime du mont Oromédon, autant je hais, tous tant qu’ils sont, ces oiseaux des Muses qui s’égosillent à croasser à rencontre du chantre de Chio. »— Ainsi la ligne littéraire de Théocrite, comme nous dirions aujourd’hui, est nettement dessinée : il vient à la suite des maîtres et n’a d’ambition que de se voir accueilli par eux ; il se sépare des criailleurs de son temps, c’est le mot qu’il emploie ; mais, d’autre part, il ne croit nullement que la barrière soit fermée, ni qu’il n’y ait plus rien à faire en poésie. […] On se rappelle irrésistiblement, à l’aspect de cette riche peinture, Rabelais et Rubens ; mais ici on a de plus la pureté des lignes et la sérénité des couleurs.
Voilà l’histoire de la peinture en quelques lignes. […] Robert y prit le goût de la rectitude et de la sobriété des lignes de ses figures ; il ne pouvait y prendre ni l’expression des physionomies, ni la passion, ni le mouvement, ni le coloris, triple vie du tableau qui manquait entièrement à son maître. […] Il eut le vertige de l’Italie ; il conçut une peinture nouvelle, tout imprégnée de la pureté des lignes des horizons romains, de la beauté des têtes transtévérines, de la mâle sévérité des attitudes de ce peuple-roi, dont la majesté se révèle dans le pasteur des Abruzzes comme un diadème égaré des palais et retrouvé dans les cabanes, enfin de cette lumière de fournaise ardente qui se vaporise en touchant la terre et qui immerge toute la nature dans un océan de clartés, doublant les objets par les ombres crues qu’elle projette sur leur face obscure.
Schuré, sans embarrasser ses pages de citations, se laisse souvent pendant des chapitres entiers inspirer ligne par ligne par les écrits de Wagner. […] Aujourd’hui, je suis heureux de me sentir aussi dépourvu d’illusions que de rancunes, et, négligeant nos divergences d’avis, d’ajouter quelques lignes au présent numéro — le dernier de la Revue.
Par une pente naturelle, la volonté réagit de la même manière devant les mêmes objets douloureux ou agréables : elle se déploie selon une loi ; elle suit la ligne de la moindre résistance, qui n’est autre que celle de la moindre peine. […] Aussi plaçons-nous nécessairement nos représentations sur la ligne du temps, qui n’est que la direction linéaire de la perception. […] Le seul fait d’avoir agi de telle manière dans telles circonstances crée un précédent qui entraîne notre activité dans la même voie : c’est la ligne de l’action la plus facile, c’est le résultat d’une force positive et d’une vitesse acquise ; les tendances négatives tirées de notre ignorance n’ont qu’une valeur abstraite et hypothétique, non une action réelle.
Quel dommage, quelle perte qu’une pareille intelligence d’observateur et de physiologiste, n’écrive pas un livre dont il nous donnait, ce soir, un si curieux morceau sur les effets moraux des maladies de poitrine : un livre dont la première ligne n’a pas été encore écrite, un livre qui serait une clinique médico-littéraire de ces maladies de foie, de cœur, des poumons, si liées et si attenantes aux sentiments et aux idées du malade, et présenterait toutes les révolutions de l’âme dans la souffrance du corps ! […] Et il continue dans ce style, dans ce style, le portrait du mortel courageux allant à son travail, etc., etc., et le revêt de l’immortalité, que lui décernent les déesses, à la dernière ligne et au dernier mot de sa péroraison. […] dit bonnement Gautier, ça a si peu d’importance… les articles… Puis tu m’as assez lu… avec moi, il faut lire entre les lignes.
Ou à la ligne brûlante du jeune homme ? […] Maudit maître à écrire, n’écriras-tu jamais une ligne qui réponde à la beauté de ton écriture. […] Il faut auparavant que je vous montre comment un poête en quatre lignes, fait succéder plusieurs instants différents, et croyant n’ordonner qu’un seul tableau, il en accumule plusieurs.
Mais, à mon avis, rien ne marque mieux que cette épître la ligne qui sépare le vers de la prose ; car chacun des sentiments exprimés dans cette pièce emprunte à la versification la meilleure partie de sa valeur. […] Les lignes qu’elle décrit sont tellement capricieuses, tellement contradictoires, que l’œil le plus persévérant ne peut découvrir d’où elle vient, où elle va. […] La poésie, vouée à la pure description, a surtout besoin de synonymes, d’épithètes, il lui faut des phrases touffues, dont le branchage soit impénétrable ; préoccupée de mille détails qu’elle rencontre sur sa route, animée du désir de représenter tout ce qu’elle aperçoit, comment aurait-elle le temps de chercher les lignes principales d’une idée, de les dessiner nettement ? […] Après avoir traité les Nuées et les Guêpes comme des œuvres sans importance, il était naturel qu’il mît sur la même ligne le Prométhée, l’Œdipe-Roi et l’Hippolyte. […] Pour mieux expliquer le sens et la portée du récit, je l’ai réduit à ses lignes principales.
Ce sont ceux qui, ne pouvant sentir le dessin que là où deux couleurs tranchées se rencontraient et produisaient une ligne d’intersection, se sont mis à dessiner des contours extérieurs, qu’on a déclarés idéals parce qu’ils étaient faux. […] La sculpture est l’art silhouette par excellence, on lui demande à chaque instant des lignes heureuses. […] Aucun de nous n’intéresse qui que ce soit, bien qu’on crie beaucoup dans les journaux sur la couleur et sur la ligne. […] Je me suis mis dernièrement à regarder autour de moi, j’ai vu non seulement beaucoup de couleurs et des lignes qui ne sont pas plus étranges que celles d’autrefois, mais j’ai vu aussi la vie, une société, des actions, des professions, des physionomies, des milieux différents. […] « Balzac a mis le pied dans le bourbier, dans l’égout du réalisme ; Balzac a été réaliste en se plaisant dans le hideux, l’ignoble, l’horrible, l’infect, le corrompu, le fangeux, etc. » Cette litanie dure trois lignes.
Or, chacun sait que les myopes, incapables de percevoir les lignes, ne voient, dans l’univers, qu’un bariolage de couleurs juxtaposées. […] Quand j’avais deviné une ligne éraflée ou « restitué », à force de conjectures, un mot tronqué, j’étais content. […] Les lignes et les couleurs lui raconteront des histoires sentimentales ou des fantaisies vicieuses. […] Paul Hervieu est sensible, tout comme un autre, à la grâce des lignes brisées où zigzague et se tourmente, de plus en plus, le profil des Parisiennes. […] Voilà, si je ne me trompe, beaucoup de choses en quelques lignes.
Cette « maîtresse d’erreur sombre » est restée stérile sur toute la ligne et ne s’est pas sauvée davantage, bien qu’elle n’ait aucunement enrichi l’humanité. […] « Une petite française vue à l’église (à Beaugency)… Un petit muguet fleuri, dans une robe neuve… La volupté est encore étrangère à ces lignes adolescentes. […] Ces lignes sont tirées des Derniers essais de littérature et d’esthétique (traduction Savine). […] Lasserre nomme, en première ligne, Leibniz, pour lequel il considère que la question ne se pose même pas. […] Dans son Abrégé d’histoire de France à l’usage du Dauphin, Bossuet ne consacre à la Pucelle que trois lignes dédaigneuses.
Dès ses premières lignes, il soulève des objections, qui à vrai dire ne concernent pas Ponchon lui-même. […] Pour la syntaxe, où il paraît que Victor Hugo n’entre plus en ligne, Racine et La Fontaine peuvent seuls être opposés à Ponchon. […] En voici un, cerné sur une surface carrée par une ligne d’un millimètre de relief. […] Il apercevra pour la première fois l’intérieur des surfaces planes que des lignes suffisaient à lui rendre invisibles. […] Mais le docteur Armaingaud n’est pas universitaire… Il ne donne que quatre lignes à l’abbé Bremond, et douze à M.
Quelle harmonie dans l’épouvante de ces quatre vers en désarroi, suivis d’une grande ligne tout d’une venue où la succession de mots égaux, terminés par une note mugissante et sourde, imite la fuite désespérée et la poursuite implacable ! […] Leconte de Lisle ne semble se soucier que de cette qualité tout extérieure, l’éclat des couleurs et la correction des lignes ; le fond des choses lui importe peu. […] Un autre jour, il lit ces lignes dans les Paroles de philosophie positive de M. […] Il était à craindre que cette volonté inflexible, résolue à suivre sa ligne tout droit sans faire aucune concession au goût, venant un jour à prévaloir sur les heureuses et libres inspirations de la nature, ne s’engageât irrévocablement dans une fausse direction. […] Au contraire, le sacrifice mercenaire du bonheur public à l’intérêt propre est le sceau éternel du vice. » Après avoir écrit ces lignes, cet esprit si fin et si consciencieux eut un scrupule.
(Je conseillerais à un écrivain que la dépense effraie, de faire des économies plutôt sur le nombre des lignes que sur leur fréquente répétition). […] Songez à l’obsession d’une ligne, d’un mot qui, tous les jours, vient frapper nos yeux ! […] Mettant Montaigne et Charron exactement sur la même ligne, il les appelait « deux écrivains distingués, qu’un homme qui aime la propreté et le choix doit avoir dans sa bibliothèque ». […] Le roi des prédicateurs serait le Père Gaillard, qui prêcha devant sa Majesté quatorze Avents ou Carêmes ; ensuite viendraient, sur la même ligne, Bourdaloue et Mascaron ; puis le Père La Rue, jésuite, et l’oratorien Le Boux, évêque de Périgueux. […] Nous évitons la répétition du même vocable à deux lignes de distance, l’embarras et la cacophonie dès que enchevêtrés et des de formant grappe.
César se plaça sur la ligne des plus grands orateurs : Auguste eut le discours prompt et facile qui convient à un souverain. […] A chaque ligne de ses sages instructions aux députés pour la confection des lois, l’habile et grande souveraine du Nord dit, du crime de lèse-majesté, qu’elle n’y croit pas. […] J’invite le lecteur à méditer ces lignes, et à nous apprendre, si, consulté par le philosophe incertain s’il s’éloignera ou s’il restera, il ne lui dira pas : « Vous éloigner après la mort de votre collègue ! […] Mettra-t-on sur la même ligne un Sénèque, l’instituteur du prince, son ami, l’âme de ses conseils, avec un Pallas, un Narcisse, un Tigellin, les ministres de sa débauche et de ses cruautés ? […] Un philosophe qui passe ses journées à écrire, et qui n’écrit pas une ligne qui ne soit une satire sanglante de lui-même !
Contrastes heurtés, exagérations furieuses, apostrophes, exclamations, tout le délire de l’ode, renversement d’idées, accumulation d’images, l’horrible et le divin assemblés dans la même ligne, il semble qu’il n’écrive jamais une parole sans crier. « Qu’ai-je fait ? […] Ces traces innombrables ont été imprimées en une seconde dans l’espace d’une ligne. À la ligne suivante, il y en a autant, imprimées aussi vite et dans le même espace. […] Les gens du peuple ne suivent pas la ligne droite du raisonnement et du récit ; ils reviennent sur leurs pas, ils piétinent en place ; frappés d’une image, ils la gardent pendant une heure devant leurs yeux, et ne s’en lassent pas. […] Des palais, de lointains paysages, les nuées transparentes qui tachent de leurs flocons gris l’horizon matinal, l’embrasement de splendeur rouge où se plonge le soleil du soir, de blanches colonnades prolongées à perte de vue dans l’air limpide, des cavernes, des chaumières, le défilé fantasque de toutes les passions humaines, le jeu irrégulier des aventures imprévues, voilà le pêle-mêle de formes, de couleurs et de sentiments que je laisse se brouiller et s’enchevêtrer devant moi, écheveau nuancé de soies éclatantes, légère arabesque dont les lignes sinueuses, croisées et confondues, égarent l’esprit dans le capricieux dédale de leurs enroulements infinis.
Beauté précise et mesurée de ces paysages qui se succèdent sans à coup, c’est presque avec la sage ordonnance de tableaux composés par un maître qu’ils développent sous nos yeux les lignes harmonieuses de leurs formes. […] Désir d’étonner, où il trouvait une sorte de rajeunissement de la forme littéraire épuisée par l’âge, une ligne de démarcation entre les Anciens et les Modernes… nous l’avons vu chez lui proche de la mystification, et trop souvent ses ennemis le confondirent avec elle. […] Thème éternel et tant de fois repris, depuis Don Juan jusqu’à Priola, le plus original des créateurs ne saurait qu’ajouter quelques variations à la donnée première, et d’ailleurs sa ligne conductrice s’impose avec une telle rigueur que celles-ci ne pourraient s’en écarter. […] Comme si elle voulait nous montrer que, sous sa plume d’or, la prose française peut avoir des caresses et des douceurs d’accent égales à celles de la plus suave poésie, l’élève de Sapho décrit en prose rythmée le berceau de son héroïne, — « La terre d’où jaillit une fleur sans pareille est en vérité la patrie de la volupté et du Désir, une île amoureuse que berce une mer sans reflux, au fond de laquelle s’empourprent les algues. » — Que de tendresse et de regrets dans ces quelques lignes ! […] Il y a, dans ces strophes, tels visages aux contours suaves, telles lignes pliantes du corps, qui ne laissent aucun doute sur la vraie complaisance de l’artiste.
Et puis mon pauvre orage ne tient pas en tout trois lignes, et à des endroits différents ! […] Ces talents étaient éclos et inspirés d’eux-mêmes et sortaient bien en droite ligne du mouvement français inauguré par Chateaubriand.
Chacun y est touché et marqué en quelques lignes ; ils passent tous l’un après l’autre devant nous dans leurs physionomies différentes, et le digne Sers (depuis sénateur), aimable philosophe, habitué aux jouissances honnêtes, mais lent, timide et par là même incapable en révolution ; et Gensonné si faible à l’égard de Dumouriez dans l’affaire de Bonne-Carrère, qui ne sait pas saisir le moment de perdre un homme quand il le faut ; avec trop de formes dans l’esprit et pas assez de résolution dans le caractère ; et l’estimable Guadet, au contraire trop prompt, trop vite prévenu ou dédaigneux, s’étant trompé d’ailleurs sur la capacité de Duranthon qu’il a poussé aux affaires, et ayant à tout jamais compromis son jugement par cette bévue sans excuse ; et Vergniaud qu’elle n’aime décidément pas ; trop épicurien, on le sent, trop voluptueux et paresseux pour cette âme de Cornélie : elle ne se permettrait pas de le juger, dit-elle, mais les temporisations subites de l’insouciant et sublime orateur ne s’expliquent pas pour elle, aussi naturellement que pour nous, en simples caprices et négligences de génie ; mais elle le trouve par trop vain de sa toilette, et se méfie, on ne sait pourquoi, de son regard voilé, qui pourtant s’éclairait si bien dans la magie de la parole. […] A en juger par les survivants, par Louvet, Lanjuinais et ceux des 71 qui se rattachèrent à leur mémoire, ils seraient restés dans la ligne d’une liberté franche, entière, républicaine, dans la liberté de l’an III, dût-elle se trouver insuffisante encore contre les passions et les intrigues.
S’il n’y a pas une seule ligne de son livre unique qui, depuis le premier instant de la publication, ne soit venue et restée en lumière, il n’y a pas, en revanche, un détail particulier de l’auteur qui soit bien connu. […] Il devait trouver au fond de son âme que c’était un peu trop de pur bon sens, et, sauf le vers qui relève, aussi peu rare que bien des lignes de Nicole.
Rien ne saurait donner une plus juste idée du brusque changement qui se fit d’un règne à l’autre que ces phrases naïves de la mère de François Ier, Louise de Savoie, écrivant en son Journal : « Le 22 septembre 1314, le roi Louis XII, fort antique et débile, sortit de Paris pour aller au-devant de sa jeune femme la reine Marie. » Et quelques lignes plus bas : « Le premier jour de janvier 1515, mon fils fut roi de France. » Son fils, son César pacifique, ou encore son glorieux et triomphant César, subjugateur des Helvétiens, comme elle le nomme tour à tour. […] On n’est jamais sûr que la ligne de démarcation tombe exactement, et qu’il ne se soit pas introduit quelque confusion sur ces points limitrophes : Lucanus an Appulus anceps 9.
Le vigoureux coup de collier d’éloquence qui avait enlevé la première ligne ne s’est pas renouvelé, — Il vient seulement de se renouveler ici, tout à l’heure. […] Ce que je tiens à faire observer ici, c’est que, dans la pratique, ce point de vue qui sépare le livre du journal est plus apparent que réel ; la ligne de démarcation est toute fictive ; le livre est presque forcément impliqué et compris dans la situation qu’on fait à la presse périodique.
Par exemple, quand, après avoir revu la ligne serpentine du sentier, je m’imagine tournant la tête à gauche, je revois le lac ardoisé et sa broderie de paillettes luisantes, au-delà les montagnes en pyramides qui descendent toutes vertes jusque dans l’eau ; en effet, le bord extrême de la côte confine au lac, la surface uniforme est rayée de franges brillantes, l’autre côté de l’eau rejoint les verdures et les coteaux qui montent ; ainsi, la fin de chaque image coïncide avec le commencement de l’autre, et partant l’autre entre en résurrection quand la première disparaît. […] Quand j’imagine le monument, je retrouve bien les lignes qui toutes les fois sont demeurées les mêmes ; mais les coupures d’ombre et de lumière, les valeurs changeantes des tons, l’aspect du pavé grisâtre ou noirci, la bande du ciel au-dessus ; bleuâtre et vaporeuse dans un cas, charbonneuse et ternie dans un autre, tantôt d’un blanc enflammé, tantôt d’une pourpre sombre, bref, toutes les diversités qui, selon les moments divers, sont venues se joindre à la forme permanente, s’effacent mutuellement.
Ici, le vrai sentiment de M. de Marcellus se dévoile, comme à son insu, dans un jugement de trois lignes, en marge dans ces lettres. […] « Comme l’entretien se prolongeait, je le priai de lire à son choix quelques lignes de son bagage élémentaire.
L’abus de la pompe, l’étrangeté de la métaphore, un vocabulaire neuf où les harmonies se combinent avec les couleurs et les lignes : caractéristiques de toute renaissance. […] L’abus de la pompe, l’étrangeté de la métaphore, un vocabulaire neuf où les harmonies se combinent avec les couleurs et les lignes : caractéristiques de toute renaissance. » Après cela, on voit de reste pourquoi M.
Comte, au lieu de suivre les lignes infiniment flexueuses de la marche des sociétés humaines, leurs embranchements, leurs caprices apparents, au lieu de calculer la résultante définitive de cette immense oscillation, aspire du premier coup à une simplicité que les lois de l’humanité présentent bien moins encore que les lois du monde physique. […] Comte fait exactement comme les naturalistes hypothétiques qui réduisent de force à la ligne droite les nombreux embranchements du règne animal.
V Je termine ici ces souvenirs, en demandant pardon au lecteur de la faute insupportable qu’un tel genre fait commettre à chaque ligne. […] Si ces lignes étaient les dernières confidences que j’échange avec le public, qu’il me permette de le remercier de la façon intelligente et sympathique dont il m’a soutenu.
Voici la luxurieuse séduction des visages féminins, une blanche floraison d’appels ; une symphonie de languides yeux, de descendantes lignes chaudes, et de rondes clartés, Parsifal ; et voici l’étonnante sonate, chef-d’œuvre de l’artiste, suprême ravissement, les onduleux contours de nymphes, dans une tranquille lumière épanouie, et plus loin, sur un horizon où pointent d’angoissantes ténèbres, la fugitive figure assombrie d’un héros, Siegfried et les Filles du Rhin. […] L’analyse de son buste nous fait voir dans le front, dans les yeux, dans le menton, dans la bouche surtout, si minutieusement étudiée, les lignes caractéristiques essentielles.
* * * — Dans le nu, peint, sculpté, décrit, quelques-uns ne voient que la ligne du Beau. […] Et la parole, et l’attaque, et la riposte soudaine, par des voix comme grisées, et que semble applaudir, à la cantonade, la batterie sonnant creux des marteaux sur les futailles vides… Sous le hangar aux vieilles poutres, couleur de glaise, là, près des tonneaux rangés en ligne sur un plan incliné, en un air enivré de l’odeur du raisin qui fermente, et dans lequel roulent, les ailes lourdes, des mouches à miel, au milieu du murmure du vin qui coule, goutte à goutte, faisant dans les rigoles de la chanlatte, un ruisseau rouge, sur lequel surnage une mousse rose et comme fouettée, dans le bruit mat de la verrée, tombant d’un coup, toutes les quatre ou cinq secondes, contre le bois du baquet, et scandant le temps comme un hoquet d’ivrogne, parmi le glouglou incessant des cannelles de bois, au bout desquelles pend toujours une goutte, où le soleil met la pourpre d’un rubis ; près de ce raisin foulé qui sera du vin un jour, — la pensée fermente et bout, et le crayon à la main, j’y foule mon livre.
De même que, pour le mathématicien, notre monde est pauvre en combinaisons de lignes et de nombres, et que les dimensions de notre espace ne sont qu’une réalisation partielle de possibilités infinies ; de même que, pour le chimiste, les équivalents qui se combinent dans la nature ne sont que des cas des mariages innombrables entre les éléments des choses, ainsi, pour le vrai poète, tel caractère qu’il saisit sur le vif, tel individu qu’il observe n’est pas un but, mais un moyen, — un moyen de deviner les combinaisons indéfinies que peut tenter la nature. […] La Judée et ses aspects se retrouvent d’une manière générale dans les poètes bibliques et dans leur forme d’imagination ; la nature orientale se peint dans l’exubérance littéraire des Hindous, la Grèce aux lignes précises dans la poésie grecque.
Ainsi la parole intérieure, considérée comme puissance, est à son acte ce qu’une majeure générale est à une conclusion particulière ; c’est une puissance imparfaitement déterminée, dont l’acte n’est pas à l’avance rigoureusement fixé, mais seulement préparé dans ses lignes générales et, par là, rendu facile à l’imagination. […] La parole extérieure, jetée dans l’âme par la sensation, s’est trouvée être une semence féconde, parce que l’attention l’a fécondée, et parmi les mobiles de l’attention, parmi les désirs, les besoins, les tendances de l’âme, l’analogie de l’âme et du son doit figurer en première ligne : si nous sommes séduits à chaque instant à maintenir l’union de fait, de la parole et de la pensée, ce n’est pas seulement parce qu’elle est utile ou commode à l’entendement [ch.