Or, à moins d’admettre l’opinion cartésienne des bêtes machines, qui n’a plus de partisan que je sache, il faut bien reconnaître que les animaux ont leurs sensations, leurs sentiments, leurs désirs, leurs plaisirs et leurs douleurs, leur caractère, tout comme nous ; qu’il y a là un ensemble de faits psychologiques qu’on n’a aucun droit de retrancher de la science.
Une faculté créatrice est simplement une faculté assez puissante pour provoquer le désir et l’accomplissement de manifestations ; elle ne diffère d’une faculté purement réceptive de même nature que par une intensité supérieure.
On la verrait attirer à elle, absorber, s’assimiler, en les transformant, les diverses puissances de l’être : sentiments et affections, désirs et aversions, vices et vertus, tout cela deviendrait une matière à laquelle l’avarice communiquerait un nouveau genre de vie.
L’action de cette fatalité, connue sous le nom de force des choses, est trop considérable, trop visible, pour ne pas inspirer au spectateur d’un tel drame plus de curiosité d’observation que de désir d’action personnelle.
Ainsi, l’empirique expédient suggéré par le vain désir de maintenir, à tout prix, l’antique régime intellectuel, ne peut finalement aboutir qu’à laisser indéfiniment dépourvus de toute doctrine morale la plupart des esprits actifs, comme on le voit trop souvent aujourd’hui. […] Afin de mieux marquer cette tendance nécessaire, une intime conviction, d’abord instinctive, puis systématique, m’a déterminé, depuis longtemps, à représenter toujours l’enseignement exposé dans ce Traité comme s’adressant surtout à la classe la plus nombreuse, que notre situation laisse dépourvue de toute instruction régulière, par suite de la désuétude croissante de l’instruction purement théologique, qui, provisoirement remplacée, pour les seuls lettrés, par une certaine instruction métaphysique et littéraire, n’a pu recevoir, surtout en France, aucun pareil équivalent pour la masse populaire. l’importance et la nouveauté d’une telle disposition constante, mon vif désir qu’elle soit convenablement appréciée, et même, si j’ose le dire, imitée, m’obligent à indiquer ici les principaux motifs de ce contact spirituel que doit ainsi spécialement instituer aujourd’hui avec les prolétaires la nouvelle école philosophique, sans toutefois que son enseignement doive jamais exclure aucune classe quelconque.
Un désir plus brûlant, une rêverie plus active, vous délasseraient alors de l’action quotidienne. […] La beauté rougeaude qui allume les désirs de ces messieurs est d’une bonne touche, et bien faite pour plaire aux connaisseurs.
A plus forte raison en est-il ainsi des états plus profondément intérieurs, sensations, affections, désirs, etc., qui ne correspondent pas, comme une simple perception visuelle, à un objet extérieur invariable. […] Sa clarté apparente, notre impatient désir de la trouver vraie, l’empressement avec lequel tant d’excellents esprits l’acceptent sans preuve, toutes les séductions enfin qu’elle exerce sur notre pensée devraient nous mettre en garde contre elle.
Et presque sans rougir, dans la préface, heureusement rarissime, qu’il a écrite pour la seconde traduction anglaise de la soirée avec Monsieur Teste : j’étais affecté du mal aigu de la précision, je tendais à l’extrême du désir insensé de comprendre. […] l’intellect volontiers exigerait du langage commun des perfections et des puretés qui ne sont pas en sa puissance… je rejetais non seulement les lettres mais encore la philosophie presque tout entière parmi les choses vagues et les choses impures auxquelles je me refusais de tout mon cœur…j’étais fort de mon désir infini de netteté. c’est ici la tentation à son paroxysme ; le « grand refus » du don poétique sur le point d’être consommé ; l’« intellect » narguant la fine pointe de l’âme ; la prose elle-même bafouée comme encore trop semblable à la poésie.
Lui, qui voyait bien qu’après la gloire qu’il s’était acquise, il y avait vraisemblablement en cette dispute beaucoup plus à perdre qu’à gagner pour lui, se tenait toujours sur le compliment, et répondait : « Que cette occupation n’était pas digne de l’Académie ; qu’un libelle, qui ne méritait pas de réponse, ne méritait point son jugement ; que la conséquence en serait dangereuse, parce qu’elle autoriserait l’envie à importuner ces Messieurs, et qu’aussitôt qu’il aurait paru quelque chose de beau sur le théâtre, les moindres poëtes se croiraient bien fondés à faire un procès à son auteur par-devant leur Compagnie. » Enfin, pressé par Bois-Robert, qui lui donnait assez à entendre le désir, c’est-à-dire l’ordre du Cardinal, Corneille, après avoir dit, dans une lettre du 13 juin 1637, les paroles que nous venons de rappeler, ajouta celles-ci : « Messieurs de l’Académie peuvent faire ce qui leur plaira. […] Ces aveux que lui arrache la force de la vérité, malgré le vif désir qu’elle a de ne point déplaire au Cardinal, n’en ont que plus de prix. […] Le père, qui semble assez bonhomme pour le moment, mais qui se déploiera plus tard dans sa grandeur, se résigne au fait accompli de ce mariage contracté à son insu, et même exprime à son fils le désir de faire venir sa bru, le plus tôt possible, de Poitiers à Paris.
Mais, très vite, ils y reviennent ; et les voilà encore promenant leurs yeux enchantés sur les brillantes formes des choses, ou savourant leur cher et profond désir, et s’écriant : « Que c’est beau ! […] Félix a été nommé par l’empereur Décius (247) gouverneur d’Arménie, et, au moment où l’action commence, Pauline vient d’épouser, par obéissance aux désirs de son père, Polyeucte, riche seigneur de cette province. […] Polyeucte peut, au sortir du baptême, par le seul effet d’une passion ardente qu’allume la grande pensée qu’il vient d’embrasser, avoir la vive impatience de déclarer hautement sa croyance ; il peut, les idoles brisées, échauffé par le scandale même qu’il a provoqué, avoir la soif de la confession de sa foi par la mort. — Pauline peut, son époux mort sous ses yeux, entraînée par une admiration contagieuse et enflammée d’une émulation qui n’est qu’une forme de l’amour, vouloir rejoindre Polyeucte dans la tombe. — Félix peut, insulté et menacé formellement par Sévère, pencher brusquement du côté où le pousse le bras toujours adoré du pouvoir, et aller à un excès d’acquiescement aux sentiments du favori, comme il donnait tout à l’heure dans un excès de complaisance aux désirs supposés de celui-ci. […] Il possédait mon cœur, mes désirs, ma pensée ; Je ne lui cachais pas combien j’étais blessée, Nous soupirions ensemble et pleurions nos malheurs ; Mais au lieu d’espérance il n’avait que des pleurs.
Sitôt que nous sommes pris de ce désir, un premier besoin se déclare ; il y a des lacunes dans nos idées ; il faut combler ces lacunes. — Par exemple, la notion qu’un homme ordinaire a du corps humain est fort pauvre et incomplète ; il ne le connaît qu’en gros ; pour lui, c’est une tête, un tronc, un cou, quatre membres, de telle couleur et de telle forme ; cela lui suffit pour la pratique.
Du désir d’aller au but.
Son lot fut d’enthousiasmer les désirs, jamais de les assouvir.
Rousseau vivait du prix de ces copies et de la musique qu’on lui commandait par le désir d’obliger un homme illustre.
L’évolution des sensations, leur passage de l’homogénéité à l’hétérogénéité, est déterminé par le besoin, par le désir de vivre.
Jeudi 16 octobre J’ai été longtemps, et je suis encore tourmenté par le désir de faire une collection d’objets à l’usage de la femme du xviiie siècle, une collection des outils de son travail, — et une petite collection qui tiendrait dans le dessous d’une vitrine de la grandeur d’une servante.
Les passions qu’il étudie sont des passions de second ordre et il ne lui est pas venu le désir de s’occuper des grands intérêts et des grands instincts de l’homme.
Ainsi un homme qui désire un Chien d’arrêt se procure le meilleur Chien qu’il peut, mais sans avoir aucun désir ou aucune espérance d’altérer la race d’une façon permanente par ce moyen.
Celui-ci vous dira qu’il est consumé du désir de connaître, qu’il s’éloigne de sa patrie par zèle pour elle, et que s’il s’est arraché des bras d’un père et d’une mère et s’en va parcourir à travers mille périls, des contrées lointaines, c’est pour en revenir chargé de leurs utiles dépouilles ; n’en croyez rien : surabondance d’énergie qui le tourmente.
Michelet, comme la plupart des hommes nés dans le pêle-mêle social qui suit toujours les révolutions, et placé bien plus près de ce qui est en bas que de ce qui est en haut par les hasards de sa destinée, a dû se pencher avec les avides aspirations du désir et de l’orgueil souffrant vers la popularité, ce souffle qui nous vient de la terre, mais qui nous enlève.
C’est l’application du mot de Bacon : « Les hommes ont peur de la mort comme les enfants ont peur de l’ombre. » Cette peur des sens soulevés prend mille formes dans les Histoires de Poe ; mais soit qu’elle se traduise et se spécifie par l’horreur qu’il a d’être enterré vivant, ou par le désir immense de tomber, ou par quelque autre hallucination du même genre, c’est toujours la même peur nerveuse du matérialiste halluciné.
Ruggieri : Votre Majesté comble tous mes désirs… Depuis longtemps j’en eusse acheté une, si le prix exorbitant qu’il faut y mettre… Et au second acte… c’est prodigieux, et Dezobry est enfoncé. […] Et ainsi, nous qui sommes la foule, nous qui n’avons que des désirs et qui ne savons rien créer, nous contribuons, en un sens, à tout ce qui se fait de beau de notre vivant : nous y contribuons à force de l’attendre et de l’aimer… Pour revenir à Dumas, Henri III est postérieur à Cromwell, mais antérieur à Marion Delorme. […] Pour que nous ne soyons pas gênés, il faut nous faire sentir que depuis longtemps ces deux êtres ont cessé, à leur insu, d’éprouver l’un pour l’autre les sentiments d’une mère et d’un fils et que ce passage de l’affection insexuelle et sacrée au désir d’amour s’est accompli très secrètement, dans le fond le plus caché de leur conscience, et sans qu’ils en aient eu d’abord aucun soupçon. […] Elle voudrait une rupture tranquille ; elle lui dit gentiment : « Voyons, Raphaël, soyons amis….Il faut venir quelquefois me demander à dîner à Paris, comme les autres. » Pourtant » quand elle sait qu’il y a, dans l’atelier de Raphaël, une honnête et jolie fille qui l’attend, elle veut le reprendre ; elle a un regain de désir. […] Si jamais artistes ont eu la généreuse inquiétude et l’enragé désir du nouveau, le goût de la vie, de la réalité concrète, l’horreur d’une certaine littérature conventionnelle et, en général, de tout ce qui ressemble à de la rhétorique, ce sont assurément les frères de Goncourt.
Arrivés à un certain âge, la vue d’une jeunesse vigoureuse et puissante, pleine d’illusions et de verve, de folles ambitions et de désirs inépuisables, peut nous enivrer un moment ; nous pouvons retourner avec elle vers les jours où la vie nous apparaissait à travers les vapeurs dorées d’une matinée d’été, mais, une fois le rêve passé, nous rentrons dans notre vieille enveloppe sans murmures et sans regrets. […] « J’avais, dit-elle, le désir de me relever, par la bonne réception qu’on me promettait en Allemagne, de l’outrage que me faisait le premier consul, et je voulais opposer l’accueil bienveillant des anciennes dynasties à l’impertinence de celle qui se préparait à subjuguer la France. […] Il me manquait quelque chose pour remplir l’abîme de mon existence : je descendais dans la vallée, je m’élevais sur la montagne, appelant de toute la force de mes désirs l’idéal objet d’une flamme future ; je l’embrassais dans les vents ; je croyais l’entendre dans les gémissements du fleuve ; tout était ce fantôme imaginaire, et les astres dans les cieux et le principe même de la vie dans l’univers. » Certes, si nous pouvons regretter l’idéal, ce n’est pas cette vague et lâche contemplation dont la perte doit nous toucher ! […] La plupart des idyllistes modernes ont été mus sans doute par le désir d’intéresser, d’instruire et de moraliser les gens du peuple, en leur offrant la peinture de leurs propres mœurs.
Nous apprenons seulement par une autre lettre, datée du 1er août 1771, que, toujours soucieuse de contenter les moindres désirs de l’ami de son frère, mademoiselle Girault lui avait ménagé dans les environs de Rouen, chez une dame Burel, une agréable retraite. […] C’est Edmond Scherer qui s’étonnait, qui s’indignait que l’auteur de Bellah, de la Petite Comtesse, du Roman d’un jeune homme pauvre, de Sibylle, osât, comme il disait, « se poser en romancier » ; et, depuis lors, ce qu’il y avait, je ne dis pas d’outré, mais d’impertinent dans ce jugement, ni Monsieur de Camors, ni Julia de Trécœur, ni le Journal d’une femme, ne lui ont inspiré, que je sache, le désir de l’atténuer ou de le rétracter. […] Mais ce qui est curieux, ce qui nous appartient ici, c’est d’en suivre les conséquences ; et, rien qu’en les suivant, c’est de voir tant de figures charmantes ou tragiques venir l’une après l’autre, en enchantant notre imagination, nous prouver qu’une idée, et le désir de la répandre, n’ont jamais rien gâté dans un drame ou dans un roman. […] Mais si rien ne répond dans l’immense étendue, Que le stérile écho de l’éternel Désir !
S’il y a de quoi s’étonner, ce n’est pas qu’ils aient accepté la commission que César leur a donnée, c’est qu’entre tant de scélérats qui l’environnaient, qui connaissaient les désirs de son âme sanguinaire, et qui n’auraient pas mieux demandé que de le servir à son gré, il ait choisi deux personnages intègres que le souvenir de bienfaits reçus ne pouvait manquer d’incliner à l’indulgence. […] Elle se montrait rarement en public, mais toujours le visage à demi voilé, et laissant un aiguillon à la curiosité du désir. […] XIV, cap. ii) que Néron conçut de la passion pour sa mère, et qu’il n’allait point en litière avec elle sans que ses désirs incestueux ne laissassent des traces indiscrètes sur ses vêtements : Quoties lectica cum mater veheretur, libidinatum inceste, ac maculis vestis proditum affirmant. […] Le désir de l’impunité n’est pas le seul obstacle aux entreprises périlleuses ; mais on veut tout prévoir, on craint d’abandonner quelque chose au hasard.
Le désir que nous avons de rectifier, de compléter, d’enrichir notre représentation pour la porter à toute son intensité, évoque de lui-même nos souvenirs ; ils s’élèvent des profondeurs de notre mémoire, nous rendant jusqu’à ces confuses réminiscences du passé, ces lointaines impressions d’enfance qui entrent pour une si grande part dans notre sentiment de la nature. […] Mais il est impossible que ces accents pathétiques n’éveillent pas en nous des espoirs, des désirs, des regrets, des nostalgies, qui comme tous nos sentiments tendront à s’épanouir en souvenirs et en images. […] Il restera donc enfermé dans son splendide isolement, et perdra presque toute action sur les âmes. — Que le poète commence donc par vivre sa vie personnelle ; que jeune il chante son amour, ses désirs et ses mélancolies.
si vous enlevez aux écrivains le désir de plaire, et ensuite sans doute aux femmes et aux hommes, croyez-vous que votre république lacédémonienne en aura meilleure figure ? […] Pleine de regrets stériles, de désirs impuissants, et de rancunes inexorables, elle traduit au public indifférent et paresseux ce qu’elle ne comprend pas. » On pense bien que « à peu d’exceptions près » concerne les critiques qui, montés sur le dos du poète, s’en vont criant : « Voilà l’éléphant blanc des éléphants blancs, tous les autres sont noirs. » Le Journal des Goncourt entasse les témoignages comiques de l’antagonisme entre les artistes et la critique professorale, de la lutte entre les chantres et les chanoines du Lutrin littéraire. […] Car c’est bien le romantisme qui a introduit dans la critique cette étincelle vivante, ce désir et cet idéal de création.
Et sans aucun doute, en y travaillant par tous les moyens qui étaient en leur pouvoir, elles n’ont pas résisté au désir ou à la tentation de se singulariser, de former des coteries entre elles, et comme l’on dit, de se « distinguer ». […] Un troisième caractère en dérive, ou s’en compose, explique les autres et s’explique par eux, qui est qu’en même temps que du désir de plaire, toutes ces œuvres sont animées de l’ambition d’instruire, didactiques ou morales, dans le sens élevé, dans le sens large de l’un et l’autre de ces deux mots. […] Mais elles trahissent le désir de plaire, et c’est un dernier caractère de la transformation de la langue : plus logique et plus simple en sa construction, plus facile à suivre en son tour et plus spirituelle, elle devient en même temps plus « sociale », ou si l’on veut plus mondaine. […] Édouard Fremy, Paris, s. d.] ; — l’Académie florimontane. — Une phrase de l’abbé d’Olivet sur Balzac : « Les beaux esprits, dit-il, avaient formé jusqu’alors une république où les dignités se partageaient entre plusieurs, mais cette république devint tout à coup une monarchie où Balzac fut élevé à la royauté par tous les suffrages. » — Que la première ébauche de l’Académie de Conrart [Cf. ses Mémoires] a répondu précisément à cette intention de mettre de l’ordre et de la hiérarchie dans les lettres. — Coïncidence de cette intention avec les désirs de l’hôtel de Rambouillet ; — avec le vœu commun des gens de lettres ; — et avec les desseins plus généraux du cardinal de Richelieu. — Les Lettres patentes du 29 janvier 1635. — Pourquoi le Parlement a refusé deux ans de les enregistrer ?
Le gouverneur du château de Meudon arrive en visite ; il connaît Diderot, il apprend son désir ; il lui assigne une chambre au château.
.) ; et d’ailleurs, puisque cet amour est combattu, on regagne à la noblesse des remords ce qu’on perdait à la grossièreté des désirs. » Il serait fort aisé de railler La Motte, et, comme dernier terme de ce perfectionnement amoureux dont il parle, de le montrer lui-même, le soupirant platonique et perclus de la duchesse du Maine, à qui il adressait tant d’agréables fadeurs ; l’Altesse y répondait comme une bergère de vingt ans, quand elle en avait cinquante.
Cependant, les érudits français purs, j’appelle ainsi ceux qui ne se souciaient pas de travaux allemands, des principes généraux de linguistique, et de cette science de formation récente due aux travaux de Guillaume de Humboldt, de Jacob Grimm et de Franz Bopp, mais qui pratiquaient et maniaient les vieux textes et qu’animait le zèle louable de les produire, allaient leur train et étaient à l’œuvre ; avertis et éclairés par l’exemple de Raynouard, ils portaient désormais dans ces publications une exactitude et un désir de précision que les Méon et les Barbazan n’avaient pas connus.
En redevenant françaises, selon le désir qu’elles en ont manifesté avec éclat, par leur protestation en 1871 contre le traité de Francfort, et par leur enthousiasme de 1918 à l’entrée de notre armée qui les délivrait, l’Alsace et la Lorraine se sont retrouvées exactement dans la même situation que l’Ile-de-France, la Normandie, la Touraine, la Picardie, la Bourgogne, la Gascogne, la Provence, etc… Dans ces conditions, parler d’oppression est un non-sens.
Pourquoi donc sont-ils l’un et l’autre si entiers dans leur opinion, si ardents du désir de la communiquer, et si incapables chacun d’être convaincu ou de convaincre ?
Nous ne pouvons résister au désir de traduire ce délicieux retour de Lorenzo d’Aponte dans sa petite ville de l’État de Venise : nos lecteurs nous le pardonneront.
Un homme bien supérieur à nous, Voltaire lui-même, quoique coupable d’une débauche d’esprit bien autrement cynique et bien autrement répréhensible dans son poème de la Pucelle, avait commencé, comme nous, par mépriser l’Arioste sur parole ; mais quand il eut vieilli, quand il eut essayé vainement lui-même d’imiter et d’égaler cet inimitable modèle de plaisanterie poétique, il changea d’avis ; il se reconnut vaincu, il écrivit les lignes suivantes en humiliation et en réparation de ses torts : « Le roman de l’Arioste, dit-il dans son examen des épopées immortelles, est si plein et si varié, si fécond en beautés de tous les genres, qu’il m’est arrivé plusieurs fois, après l’avoir lu tout entier, de n’avoir d’autre désir que d’en recommencer la lecture.
Mais l’absence complète et volontaire de fortune ne lui laissait pas l’illusion d’être recherchée, et l’espèce de langueur désintéressée d’amour qui suit ces circonstances l’avait détachée de toutes ces espérances, sinon de tous ces désirs.
Laisse-moi toucher ton bras. » J’obéis à son désir ; ses mains tremblantes touchèrent mon bras : il soupire ; il pleure : « Mon fils, me dit-il, tu es robuste ; mais non pas autant que le roi de Morven ; mais qui est semblable à ce héros ?
Il a vu lever le soleil au Monte en face de Turin, en 1728 ; et l’abbé Gaime qui l’y a mené, lui a fourni, avec l’abbé Gàtier, le professeur du séminaire d’Annecy, les traits du Vicaire savoyard ; de sa passion profonde pour Mme d’Houdeto est sortie la Nouvelle Héloïse : les amours de Julie et de Saint Preux, ce sont les leurs, brutalement tranchés dans la réalité, délicieusement achevés par le rêve ardent de son désir ; les paysages où s’encadrent ces amours, ce sont les bords du lac de Genève, de son lac ; et les sensations de ses personnages dans cette charmante nature, ce sont les siennes, ses profondes émotions d’enfance.
Jamais, en effet, autant que pendant cette période séculaire, l’humanité ne paraît avoir été travaillée par un tel désir de renouveau.
Le désir de rapprocher la littérature de la sculpture n’a pas abouti à un pareil mélange.
Or, Amour implique deux désirs, deux pôles : pour se connaître, dirons-nous métaphysiquement, ils entrent en action, et la résultante de cette action est le troisième mouvement qui naît d’elle — et qui détermine la sortie hors de la non-connaissance, de la non-conscience : c’est-à-dire qu’il détermine l’Evolution, troisième mouvement de l’unité trinaire que nous avons représenté par l’Ellipse, signe de l’Univers évoluant.
C’est à propos de tout et de rien, un antagonisme de désirs, une rébellion de menus vouloirs, une guerre de petites résolutions incessantes et comme faites à plaisir.
Nous n’avons obéi à aucun petit et misérable sentiment dans ce portrait, ayant bien certainement plutôt à nous louer qu’à nous plaindre du critique ; nous avons été tout bonnement mordus par ce désir d’analyste, de pousser à fond la psychologie d’une individualité très complexe, ainsi qu’un naturaliste, amoureux de sa science, disséquerait et redisséquerait un animal, dont l’anatomie lui semblerait avoir été incomplètement ou mal définie par ses confrères.
Il était si absorbé par le désir de se caser dans un ministère bonapartiste, qu’il ne s’aperçut pas que les Morny, les Persigny et les autres Cassagnac de la bande avaient accaparé l’imbécile et qu’ils entendaient s’en réserver l’exploitation.
VII Sans sonder l’horizon qui s’enfuit sous la brume, Sans rêver au-delà je ne sais quel grand sort, Dans ton île, au soleil toute enceinte d’écume, Aucun de mes désirs n’en passerait le bord.
La conscience, tourmentée d’un insatiable désir de distinguer, substitue le symbole à la réalité, ou n’aperçoit la réalité qu’à travers le symbole.
Seuls, les marbres rouges avec leurs veines ardentes, — allusion symbolique aux flammes du Désir, — les petits Éros des jets d’eau qui lutinent les tiges dorées des héliotropes de bronze, rappellent la destination amoureuse du logis.
Mais à cette heure, je ne veux pas de toi, tu me fais peur, tu as trop de vices sérieux à ta suite ; il y a dans ton regard quelque chose de funeste ; tu es trop méchant pour que de toi, l’on rie, et tu es trop damné pour qu’on te sauve ; malheureux qui a dépassé même le doute, en ton esprit perverti ; malheureuse victime de tes désirs impuissants ! […] Remarquez cependant, une fois que son héros est lâché dans ce monde trop étroit pour ses vastes désirs, comment s’y prend Molière pour le suivre, afin que ce bandit ne cause pas trop de ravages ; comment il muselle cette bête fauve ; comment enfin il parvient à faire une comédie véritable, de la biographie ardente de ce fatal Don Juan.
Eh bien, la grande qualité comme le grand défaut de Molière traçant des caractères de femmes, c’est qu’il a pris, non pas autant qu’on pourrait le croire, la femme telle que la société l’a faite, non pas telle que la bonne éducation doit la faire, non pas telle que les bons instincts mêlés aux mauvais peuvent la créer, mais la femme la plus rapprochée de l’état de nature, de l’état de nature le moins louable ; cela vient aussi du désir qu’avait Molière de ne peindre qu’à fresque et d’une grande touche. […] Ainsi, dans nos desseins l’une à l’autre contraire, Nous saurons toutes deux imiter notre mère ; Vous, du côté de l’âme et des nobles désirs, Moi, du côté des sens et des grossiers plaisirs ; Vous, aux productions d’esprit et de lumière, Moi, dans celles, ma sœur, qui sont de la matière25. […] Figurons-nous, en étudiant les personnages de l’ancienne comédie, combien de temps s’est écoulé avant qu’un médecin, un savant, un juge, un procureur, un avocat, un notaire devinssent des hommes qui, dans la vie ordinaire, ne différassent point trop, par leurs manières et le ton de leur langage, des autres hommes ; et nous conviendrons que d’avoir banni comme ridicule tout ce qui rebutait le bon goût comme excessif, d’avoir mis la variété à la place des disparates, effacé les saillies choquantes, amolli l’austère écorce qui prêtait aux mœurs de la haute bourgeoisie je ne sais quoi de raide et de raboteux, d’avoir créé, au-dessus des classes et des professions, cette société française, type achevé de la société élégante, où l’on ne plaît qu’en apportant comme un témoignage d’estime et de respect pour autrui le ferme désir de plaire, où l’on n’est supporté que si l’on se fait modeste, où quiconque veut être trop n’est plus rien, où il faut, pour être accueilli, que l’argent perde de sa suffisance, les grandes charges et le rang de leur orgueil, le mérite de sa fierté susceptible, la vertu même ces airs tristes qu’elle a quelquefois et qui la gâtent, d’avoir créé cette société si polie, si appropriée à tous et en définitive si humaine, puisqu’elle a pour code la condescendance réciproque, pour ennemies les prétentions de toute espèce, pour seule arme et pour seule sanction la raillerie, cela n’est point une œuvre frivole, et telle a été chez nous l’œuvre de l’esprit.
Il y a pourtant un motif de vanité universel, c’est le désir de paraître tenir un rang élevé et jouer un rôle important. […] L’observateur doit être placé de façon à voir exactement, sans aucun intérêt pratique, aucun désir d’atteindre un résultat donné, aucune idée préconçue sur le résultat. […] Un désir puissant d’accroître le plus possible la masse de nos renseignements et de nos conclusions nous pousse à nous délivrer de toutes les restrictions négatives. […] Il faut résister au désir de couronner, comme il arrive, par des conclusions subjectives, ambitieuses et vagues, une monographie impropre à les porter229. […] Leur désir de produire une impression forte les conduit à relâcher quelque chose de la rigueur scientifique et à revenir aux habitudes condamnées de l’ancienne historiographie.
De même, au commencement du dix-septième siècle, la grande pastorale d’Honoré d’Urfé, ce fameux roman de l’Astrée, dans lequel il y a plus de cent personnages, tous bergers, tous amoureux, et presque tous vertueux, exprime le désir des imaginations, le besoin des âmes, la soif des esprits et des cœurs, en un mot, l’idéal de la société, après les cruautés sauvages des guerres religieuses du seizième siècle, après la corruption hideuse de la cour des derniers Valois, et au milieu de la licence encore un peu soldatesque de la nouvelle cour du Béarnais. […] La tête d’un Langrois est sur ses épaules comme un coq d’église au haut d’un clocher : elle n’est jamais fixe dans un point ; et, si elle revient à celui qu’elle a quitté, ce n’est pas pour s’y arrêter. — Avec une rapidité surprenante dans les mouvements, dans les désirs, dans les projets, dans les fantaisies, dans les idées, ils ont le parler lent. — Pour moi, je suis de mon pays. […] Un sentiment de puissance physique et intellectuelle élève son audace au niveau de son ambition, lui fait concevoir les projets les plus gigantesques ; projets, du reste, aussi facilement abandonnés que conçus ; transforme ses désirs, les rêves de son imagination, en convictions délirantes… Pauvre, souffreteux, inconnu, il vit dans une perpétuelle attente de richesses, de santé, de réputation, d’honneurs. […] La dissimulation, l’hypocrisie, se trahissent à tous les instants ; les désirs sont impétueux. « Dans ce genre de maladie, dit Esquirol, les sensations ne sont point lésées, la mémoire est exaltée, les raisonnements sont justes, la conversation est vive, emportée, les malades passent d’une idée à l’autre avec une grande rapidité… » Ainsi un homme de génie est un fou : seulement sa folie ne dépasse pas le premier degré, l’excitation.
Dès les premières pages, on sent un esprit de modération élevé, supérieur, qui ne vient pas du désir de répondre à certaines objections anticipées, mais qui n’est que l’âme de l’histoire hautement comprise par une intelligence généreuse.
On la dirait innée en quelques individus et produite par la nature, tant elle se prononce chez eux de bonne heure ; et, bien qu’elle se mêle dans la jeunesse au désir de savoir et d’apprendre, elle ne s’y confond pas nécessairement.
Blessé d’un désir soudain, Volpone se déguise en charlatan, et va chanter sous les fenêtres avec une verve d’opérateur ; car il est comédien par nature, en véritable Italien, parent de Scaramouche, aussi bien sur la place publique que dans sa maison.