Une soif d’Au-delà persiste malgré tout, et, de quelque côté que nous nous tournions, nous nous heurtons au Mystère, ce mystère dont la plupart des symbolistes, à la façon de Maeterlinck, ont fait leur spécial élément et où ils ont pris la révélation du « tragique quotidien ». […] Il a pris sa doctrine à l’Église, mais non sa révérence, ni les fleurs du beau langage. […] Mal lui en prit, une décision de l’Index désapprouve le livre et le condamne au pilon. […] Voltaire, pour le définir en passant, est un imbécile malpropre19. » Ernest Hello nous rappelle, comme Pascal, à notre néant et veut humilier notre orgueil, mais ce péché satanique d’orgueil, qu’il dénonce chez les autres, a pris, sans qu’il s’en doute, racine chez lui et il offre un magnifique exemple de la vanité contemporaine. […] Ainsi prit naissance l’Ordre cabalistique de la Rose-croix, qui avait ses aspirants, ses grades, ses trois chambres, son conseil suprême.
Prenez, de ces œuvres, les plus saluées d’abord et les plus applaudies : combien de places déjà mortes, combien de couleurs déjà pâlies et passées ! […] Ce que les imitateurs prennent toujours, la forme, la superficie, le ton leste, le geste cavalier, les défauts fringants, toutes choses qui, au moins chez lui, sont portées avec une certaine grâce et désinvolture, et qu’eux ils se sont mis à copier religieusement. […] Ils ont pris le genre et le tic ; mais la flamme, la passion, l’élévation et le lyrisme, ils se sont bien gardés, et pour de bonnes raisons, de les lui emprunter. […] Et pourquoi, mes amis, me preniez-vous la main, Alors qu’une si douce et si vieille habitude Me montrait ce chemin ? […] Vous emportez nos pleurs, nos cris et nos regrets ; Mais la pitié vous prend, et sur nos fleurs fanées Vous ne marchez jamais.
Tel a été le sort de l’histoire de la philosophie, si populaire il y a trente ans, un peu oubliée aujourd’hui, et qui a vu l’archéologie, l’histoire des langues ou la critique religieuse prendre sa place dans l’opinion. […] L’individu, étant presque à lui seul un petit monde, surtout quand il est grand, prend une place et joue un rôle qu’aucun individu n’occupe dans la nature extérieure. […] C’est que l’accident prend ici la valeur d’un fait général. […] Aujourd’hui la critique religieuse a pris un intérêt supérieur et jouit d’une très-grande faveur ; mais l’histoire religieuse a été préparée et facilitée par l’histoire de la philosophie. […] Sans ce secours indispensable, on prendra les religions par le dehors, on n’en comprendra ni le sens ni les développements.
On conçoit bien comment les pantomimes pouvoient venir à bout de décrire intelligiblement une action, et de donner à entendre par le geste les mots pris dans le sens propre, comme le ciel, la terre, un homme, etc. […] Mais, dira-t-on, comment pouvoient-ils donner à entendre les mots pris dans le sens figuré, qui sont si fréquens dans le stile poëtique. Je répondrai en premier lieu, que le sens de la phrase donnoit quelquefois l’intelligence de ces mots pris au sens figuré. […] Cet auteur prend pour l’art des pantomimes, qui consistoit à réciter une piece ou une scéne suivie sans parler, ce que Tite-Live appelle amitandorum carminum actum, l’art d’exprimer à son gré et arbitrairement en dansant, quelques passions, art qui étoit certainement plus ancien qu’Auguste. […] Nous voïons même dans une lettre de Cassiodore que les pantomimes avoient pris des livrées differentes à l’imitation de ceux qui conduisoient les chariots dans les courses du cirque.
Pour prendre, ici encore, un exemple moderne, lorsque M. […] Mais il est surtout un genre dans lequel cette fantaisie des titres s’était toujours un peu exercée et qui prit, avec la découverte de l’imprimerie, une extension énorme : je veux parler des écrits religieux. […] D’ailleurs, vers la même époque, du genre mystique et religieux, cette habitude de prendre des titres allégoriques s’étendit, sans que cela parût le moins du monde ridicule, à des livres de toute espèce. […] * * * Une plus grande variété des titres s’introduisit dans la littérature lorsque, au xviiie siècle, un genre qui, jusque-là, n’avait eu qu’un développement médiocre, le roman, prit tout à coup une extension considérable, et destinée à devenir plus vaste encore de notre temps. […] Au xviiie siècle, où le roman commençait à prendre son essor, les titres varièrent surtout selon les modes.
Ce fut le premier âge de sa pensée, et c’est alors qu’il fut pris par la philosophie allemande. […] Cousin, dit-il, m’a pris quelques poissons, mais il les a bien noyés dans sa sauce. » M. […] Le nôtre prendra en aversion une métaphysique qui fait de Dieu non un roi et une personne, mais une loi abstraite et une force fatale, et qui remplace l’immortalité de l’individu par l’immortalité de la civilisation ou de l’espèce. […] Je prends pour doctrine « cette philosophie qui commence avec Socrate et Platon, que l’Évangile a répandue dans le monde, que Descartes a mise sous les formes sévères du génie moderne, qui a été au dix-septième siècle une des gloires et des forces de la patrie, qui a péri avec la grandeur nationale, et qu’au commencement de celui-ci M. […] Nous prendrons pour arguments ceux des philosophes qui nous ont précédés.
Sera-ce alors que l’on descendra dans soi-même, que l’on interrogera sa vie, que l’on se demandera ce que l’on a fait de grand ou d’utile, que l’on prendra la résolution de se consacrer enfin à des travaux pour l’État ou pour soi-même, que le fantôme de la postérité qui n’existait point pour l’âme indifférente, se réalisera enfin à ses yeux, et qu’elle consentira à mépriser la fortune, à irriter l’envie ? […] Qu’un homme se livre à un de ces mouvements, l’effet est prévu, il ne produit rien ; on croit voir quelqu’un qui s’échafaude pour étonner, et cette espèce d’appareil fait rire ; quelques hommes même ont pris ces formules pour de l’éloquence : autre source de ridicule. […] Cette connaissance, cette méditation profonde, vous donnera le plan et le dessein de votre ouvrage ; alors il en est temps, prenez la plume. […] Dans ce contraste, et d’organisation et de caractère, chacun cependant prend pour la nature ce qui est lui : nos passions ou nos faiblesses, voilà la règle de nos jugements. […] Mais soit que vous soyez éloquent, ou que vous ne le soyez point, soit qu’en célébrant les grands hommes vous preniez pour modèle ou la gravité de Plutarque, ou la vigueur de Tacite, ou la sagesse piquante de Fontenelle, ou de temps en temps l’impétuosité et la grandeur de Bossuet, n’oubliez pas que votre but est d’être utile.
Balzac, certes, ne prit jamais la peine de recopier. […] Tel est le drame simple et terrible, pris dans la réalité, qui immortalise Flaubert. […] Il rentre chez lui, prend ses pinceaux et, sans le moindre scrupule, reproduit sur la toile ce qu’il a vu. […] Il prit courage. […] On le prit pour un client du cabaret qu’il décrivait.
Je n’osais me renseigner, craignant d’être pris pour un fou. […] Ainsi comprise, cette pratique absurde prend un sens raisonnable. […] On ne prend pas la parole le premier, on attend. […] Prendre le chemin de fer, c’était imiter tout le monde. […] Dans l’un et l’autre cas, ils ont pris parti contre la foule.
En toute chose, il ne prend que la fleur. […] À la longue, on y prend une courbature. […] Le poids prit une forme, et la matière fut. […] il a pris la Bastille ! […] Il faut en prendre son parti avec nous.
Prenons cependant un dogme plus concret, dont la liaison soit plus évidente avec la morale, ou avec la pratique. […] Nous prenons aujourd’hui la religion par sa poésie ; nous la prenons par sa morale ; nous la prenons encore plus habituellement par son utilité sociale. […] Mlle de la Force prit le second parti, qu’elle dut tenir onze ou douze ans, de 1702 à 1713. […] Remarquez aussi le ragoût d’impiété dont ces dames prennent plaisir à relever leur libertinage. […] Elle le prend dans les entretiens la part que naguère encore y tenait la controverse.
Elle eut la bonne fortune de prendre une enseigne et de daguer un cacique. […] Pour lui, gibier traqué est gibier pris. […] Rendez-vous est pris. […] On ne prend pas congé de Sa Hautesse. […] Fréquenter Richelieu, c’est prendre des leçons de volonté.
Il convient de renoncer aux doctrines, ou du moins de renoncer à les prendre pour ce qu’elles ne sont pas, à les prendre pour des réalités incontestables. […] Une seconde de plus, il était pris et dévoré par les chiens. […] Il vous a pris, comme on dit volontiers, en traître ? […] La Guélotte a pris en détestation le pauvre Miraut, bon chien pourtant. […] Notre société, soumise au gouvernement des idées, prend leurs maladies.
Grâce à Dieu, Chapus a maintenant assez vécu pour prendre enfin cette revanche, attestation de sa force, qu’un homme de talent finit toujours par prendre contre une société sans sympathie ! […] Chapus prendrait facilement la tête de la high life littéraire.
Nous prendrons les lois telles que les sciences nous les présentent, réparties en groupes distincts. […] Ensuite, je prends un détour, et je dis : supposons que (a − 1) + 1 = 1 + (a − 1). […] Mais les catégories de Kant les laissent, comme elles les prennent, extérieures et étrangères les unes aux autres. […] Avec Descartes, la science, dans sein ensemble, prend un tout autre caractère. […] Aujourd’hui que les sciences naturelles prennent un admirable essor, on se les propose pour modèle.
La mère de Duclos, voyant ses dispositions précoces, prit sur elle de l’envoyer tout enfant à Paris pour y faire ses études, ce que bien des gens de qualité ne faisaient pas pour leurs fils et ce que nul bourgeois du pays n’osait alors se permettre. […] Chaque trait y est net, exact, mesuré, pris sur nature : ce sont des dessins excellents de justesse et de ressemblance. […] Il s’abandonnait chaque jour au même mouvement, pour lui facile, au même entrain sans cesse répété ; il ne se renouvelait pas, il ne grandissait pas : « Il n’est pas rare, disait-il, qu’on prenne dès la première entrevue l’opinion qu’on a de mon esprit. » Et en effet, c’est que, dans sa verve improvisatrice mondaine, il donnait d’abord sa mesure ; il jetait à tous venants ce qu’il avait de mieux, ce qu’il avait de plus original et de plus vif. […] Celle-ci a bien des défauts sans doute ; elle a aussi ses grossièretés, ses restes de détails matériels, ses affectations de sentiment ; on y voit l’échafaudage ; mais l’élévation y est, mais on entre décidément dans un ordre supérieur et habituel de pensées attachantes et de nobles désirsi : laissez-en la première partie, ne prenez que la seconde : un souffle d’immortalité y a passé. […] La plupart étant incapables d’un tel examen doivent consulter le sentiment intérieur : les plus éclairés pourraient encore en morale le préférer souvent à leurs lumières, et prendre leur goût ou leur répugnance pour la règle la plus sûre de leur conduite.
Qualités et défauts ainsi amalgamés et arborés avec faste faisaient de lui un homme des plus en vue, toujours en avant, actif, infatigable, moins incommode encore qu’amusant, dont tout le monde se moquait, mais qui dans ce rôle naïf qu’il avait accepté, et dont il prenait les bénéfices avec les charges, trouvait parfois des mots piquants, des ripostes imprévues, comme il arrive aux sots qui ont quelque esprit. […] disait-il, le sublime génie qui anime et soutient cet illustre corps m’a seul inspiré le glorieux dessein d’en être membre ; et comme, étant supérieur à tout, il n’a que de grandes vues, j’en reçois heureusement celles que je n’aurais osé prendre de mon chef, et que vous avez bien voulu rendre effectives. […] Vous le prenez, vous le quittez selon qu’il vous convient, et il est de l’intérêt de votre gloire de vous en détacher quelquefois, afin que les honneurs qu’on vous rend ne soient attribués qu’à votre seul mérite. L’ayant ainsi habilement dépouillé des grandeurs mêmes dont il vient de l’envelopper et de le draper à plaisir, il va prendre le prélat, sinon comme un écrivain, du moins comme un orateur, comme un des maîtres de la parole ; et c’est ici qu’il entre dans le vif, que le persiflage s’aiguise et s’enhardit, et que l’exécution commence. […] Le roi prit mal cette espièglerie d’un homme d’esprit dans un personnage public.
Le Gouvernement, là même où il ne prenait pas l’initiative, était envahi, débordé et obligé de céder. […] D’autres, simples assistants et hommes de désir, se plaisaient à voir le catholicisme s’essayer à des interprétations compatibles peut-être avec les progrès de la science et avec ceux de l’humanité ; ils prenaient goût à de hauts entretiens qui rappelaient ceux des philosophes ou des chrétiens alexandrins. […] Qu’elle n’en soit pas moins chère cependant, pour ne plus exister que dans le souvenir, cette union d’un jour, cette sympathie toute désintéressée des intelligences, et qu’aucun de ceux qui y ont pris part ne devrait oublier ! […] Certains corps religieux ont eu, de tout temps, l’art d’élever et de captiver les jeunes esprits : ils ne négligent rien pour cela, ni les méthodes nouvelles, ni les études variées, ni même l’agrément et les grâces : tout est bon pour prendre les enfants du siècle. […] C’est à croire que la Nature, après avoir produit l’auteur des Maximes, c’est-à-dire le moins dupe des hommes, s’est fait un malin plaisir de lui opposer le plus parfait contraste dans un de ses rejetons et qu’elle a voulu prendre sa revanche dans la même famille.
Les choses prises sur le vrai, dans le vif, voilà son champ et son horizon ; l’art au premier degré et de premier jet, ce fut le sien. […] Son père, qui s’en méfiait, prit de bonne heure ses précautions et coupa court à ses velléités guerrières en le mariant dès l’âge de vingt ans c’est vers ce même temps (1809) qu’Horace commença à exposer7. […] Se livrant avec une imagination vive et sensible à l’impression des objets, il en prend tour à tour le caractère : il change alternativement de style, de couleur, de moyens, et ne se ressemble qu’en une seule chose, la grâce et le naturel. […] Le tableau qu’il exposa en 1822 et qui représente l’Intérieur de son atelier donnerait, je crois, une idée un peu fausse si on le prenait au pied de la lettre et si on ne voyait Horace Vernet que dans cette heure de spirituelle ivresse, dans cette débauche de gaieté perpétuelle. […] » Si on prenait son dire au pied de la lettre, on serait tenté de moins l’estimer.
Je crains aussi que le public (ne) nous force à prendre un parti beaucoup plus humiliant pour les ministres et beaucoup plus fâcheux pour nous, en ce que nous n’aurons rien fait d’après notre volonté. Enfin je suis bien malheureuse… « Je crains beaucoup, dit-elle encore, que l’archevêque ne soit obligé de partir tout à fait, et alors quel homme prendre pour mettre à la tête de tout ? […] D’une part, la reine qui a bien conscience de l’énorme responsabilité qu’elle prend, écrit au comte de Mercy le 25 août 1788 : « L’archevêque est parti. […] À un moment, elle négocie avec Mirabeau ; elle prend sur elle et triomphe de ses préventions de femme en consentant à voir le monstre : elle le trouve de près plus séduisant qu’effrayant. […] Évidemment, un jour que l’office lui avait paru trop long, elle avait eu l’idée de faire ainsi arranger le volume pour le prendre une autre fois et se désennuyer en le lisant.
Autrement on semble pris au dépourvu, et la place est enlevée avant qu’on ait paru en mesure de la défendre. […] Elle avait besoin d’être pressée, et j’avais le plaisir de voir qu’elle prenait souvent le bon parti… » Voilà la véritable Marie-Antoinette, celle, à l’origine, dont la personne avait du charme, mais dont l’esprit n’avait certes rien du prodige. […] Il fait allusion à la jalousie et aux tracasseries dont il est l’objet et dont on peut prendre idée par les accusations grossies de Mme Campan : « Je ne parlerai pas à Votre Excellence, dit-il, de mille petites peines que j’ai souffertes presque continuellement : ce ne sont que des piqûres d’épingle, mais leur nombre creuse des plaies et rend la vie amère. » Le dauphin, le futur Louis XVI, n’aimait pas l’abbé et le lui marquait rudement. […] Il se rapporte à l’année 1776 : nous en donnerons les parties principales ; de telles esquisses d’après nature dispensent de bien des imaginations et des songes plus conformes à la poésie qu’à la réalité, et elles viennent à propos pour rompre de temps en temps la légende toujours prête à empiéter sur l’histoire : « La reine est très-bien de figure, et quoiqu’elle ait pris assez d’embonpoint, il n’y a néanmoins pas encore d’excès. […] Il est au fond assez naturel que cette princesse qui, étant arrivée si jeune en France, a pris tout à fait le ton et les goûts de la nation, cherche et trouve du plaisir à la fréquentation de ce qu’on appelle dans ce pays-là bonne compagnie.
Il parle de chaumière, et on le prendrait pour un pasteur quand il dit en beaux vers à son initiateur chéri : C’est toi qui fus pour moi cet ange de lumière Qui se laisse tomber du haut du firmament, Et qui, sur le palais comme sur la chaumière, Se repose indifféremment. […] Il était triste encore quand, après la foire, où il avait rempli sa petite bourse en portant des paquets, il la donnait à sa mère, et qu’il voyait celle-ci la prendre avec soupir en disant : « Pauvre enfant, tu viens bien à propos. » La pauvreté s’annonçait ainsi par de rares pensées, que bientôt dissipait la légèreté de l’âge. […] Il y a là un art de poëte qui prend le soin d’interrompre, par une touche sensible, ce qui deviendrait un badinage trop prolongé. […] Au moment où elle prend un couteau pour trancher le mouton, il jette un coup d’œil sur sa main qu’elle voudrait dérober : ce n’est que trop vrai ! […] Est-ce que saint Joseph voudrait nous faire entendre, le bon saint, qu’à l’amour trop pressé il ne reste rien à prendre ?
André Chénier, en effet, à le prendre comme un de nos contemporains, selon la fiction qu’on aime, serait du groupe de Béranger, Victor Hugo et Lamartine ; c’est un des quatre, si l’on veut, et à ce titre il ne représenterait qu’un des côtés de la poésie de notre époque, ce qui est tout différent. […] Et souvenez-vous de moi dorénavant lorsqu’ici viendra, après bien des traverses, quelqu’un des hôtes mortels, et qu’il vous demandera : « O jeunes filles, quel est pour vous le plus doux des chantres qui fréquentent ce lieu, et auquel de tous prenez-vous le plus de plaisir ? […] remy aura pris, de réminiscence, ce Centaure pour la montagne. […] Qu’on relise la pièce originale, qu’on relise ensuite l’élégie xxxii de Chénier, et l’on verra, dans un excellent exemple, comment l’aimable moderne prend naturellement racine chez les Anciens, et par quel art libre il s’en détache. […] Celui qui demain va mourir sent un regret à quitter la vie que consolait sous les barreaux une vue si charmante, mais il exprime ce regret à peine, et son émotion prend encore la forme d’une pensée légère, de peur de jeter une ombre sur le jeune front souriant94.
Rien n’est mieux pris sur le fait que le mal et l’idée fixe d’Ourika, une fois éclairée sur sa couleur : « J’avais ôté de ma chambre tous les miroirs, je portais toujours des gants ; mes vêtements cachaient mon cou et mes bras ; et j’avais adopté, pour sortir, un grand chapeau avec un voile que souvent même je gardais dans la maison. […] Dans Édouard on voit deux siècles, deux sociétés aux prises, et le malheur qui frappe les amants devient le présage d’un avénement nouveau. […] L’une perdit son premier mari, l’autre son père sur l’échafaud ; toutes deux subirent l’émigration ; mais les idées de l’une de ces personnes distinguées étaient déjà faites, pour ainsi dire ; ses impressions, la plupart, étaient prises. […] Elle prenait même, on peut le soupçonner, une part assez active à la politique d’alors par ses amitiés et ses influences. […] En réalité, Mme de Duras avait pris l’idée première d’Édouard et de cette situation inégale dans l’inclination marquée que témoignait pour sa fille Clara (depuis duchesse de Rauzan) M.
Marivaux est trop près de Fontenelle, pour qu’on s’étonne de le voir prendre ce rôle : il le fait sans violence et sans âpreté, avec une grâce malicieuse, semant les hypothèses et les paradoxes de l’air d’un homme qui n’en soupçonne pas la portée. […] Il a posé en face l’un de l’autre ces deux êtres destinés à s’aimer, qui se sentent disposés à s’aimer avant de se connaître, et qui font effort pour se connaître avant de s’aimer, qui s’observent, s’étudient, se tendent des pièges, tâchent de forcer le mystère de l’âme par laquelle ils se voient pris irrésistiblement. […] Dans la Surprise de l’amour, c’est le heurt de la vanité qui fixe l’attention : chacun des deux personnages est fâché de n’être pas unique en sa bizarrerie, fait effort pour réduire la bizarrerie de l’autre à la banalité des façons universelles, et se prend en voulant prendre. […] Quand toutes les pensées de l’homme se rabattent vers la terre, le plaisir prend une valeur infinie. […] Laissant la peinture du monde et des ridicules mondains, La Chaussée prend pour objet la vie intime, les douleurs domestiques : il développe les tragédies des existences privées, le mari libertin ramené à sa femme par la jalousie, le riche ou noble fils de famille épris d’une pauvre fille, le fils naturel en face de son père, etc.
Il devient réellement insupportable de converser avec des hommes qui n’ont, dans le cerveau, que des cases où tout est pris, et où rien d’extérieur ne peut entrer. […] Paul Raynal, n’avait pris le soin pieux de recueillir ces fragments, de les enchâsser dans un certain ordre, et d’en faire comme une suite de pierres précieuses. […] C’est de l’esprit distillé et fixé dans tout son suc : on n’en saurait prendre beaucoup à la fois. […] Puis, j’ai pris La Bruyère au chapitre des « Ouvrages de l’esprit ». […] Joubert dans les papiers de Chênedollé, qui en avait pris note en le quittant.
Si jamais vous allez en Perse, dans ce pays de vieille civilisation, qui a subi bien des conquêtes, bien des révolutions religieuses, mais qui n’a pas eu, à proprement parler, de Moyen Âge, et dans lequel certaines traditions se sont toujours conservées, prenez un homme d’une classe quelconque, et dites-lui quelques vers de Ferdousi : il y a chance, m’assure-t-on, pour qu’il vous récite de lui-même les vers suivants ; car les musiciens et chanteurs vont en redisant à plein chant des épisodes entiers dans les réunions, dans les festins. […] À le lire naïvement, on y saisit à la fois le fond des choses qui ont dû être transmises, et le génie individuel qui les a prises en main et rehaussées. […] … La couronne, le trône et le diadème ne m’importent pas ; j’irai au-devant de mes frères sans armée, et je leur dirai : Ô mes frères illustres, qui m’êtes chers comme mon corps et mon âme, ne me prenez pas en haine, ne méditez pas vengeance contre moi ! […] Voltaire n’avait pas lu assurément Ferdousi, mais il a eu la même idée, celle d’un père, dans un combat, aux prises avec son fils, et le tuant avant de le reconnaître. […] Au premier rayon de l’aurore, Roustem prit un onyx qu’il portait au bras, et qui était célèbre dans le monde entier ; il le donna à Tehmimeh en disant : Garde ce joyau, et si le ciel veut que tu mettes au monde une fille, prends cet onyx et attache-le aux boucles de ses cheveux sous une bonne étoile et sous d’heureux auspices ; mais si les astres t’accordent un fils, attache-le à son bras, comme l’a porté son père… Là-dessus Roustem part au matin, monté sur son cheval Raksch ; il s’en retourne vers l’Iran, et, durant des années, il n’a plus que de vagues nouvelles de la belle Tehmimeh et du fils qui lui est né ; car c’est un fils et non une fille.
Qui, enfin, a mieux pris sur le fait et rendu dans sa plénitude le genre bourgeois, triomphant sous la dynastie de Juillet, le genre désormais immortel et déjà éclipsé, hélas ! […] On voit comment le xviiie siècle prenait encore légèrement cette réhabilitation en forme, qui ne dura qu’une soirée. […] Il y a eu un moment où, à Venise, par exemple, la société qui s’y trouvait réunie imagina de prendre les noms de ses principaux personnages, et de jouer leur jeu. […] Mérimée pourrait se prendre comme opposition de ton et de manière, comme contraste. […] Elle s’en prend surtout à la société, et déprime des classes entières, pour faire valoir quand même des individus, qui restent encore, malgré tout, à demi abstraits.
Je prends donc mon parti sur le style comme sur les choses. […] Les mots, en ce chef-d’œuvre de l’art, ont pris une magie nouvelle ; ce sont des mots pleins de lumière et d’harmonie. […] Il y a toutes les fois qu’il nous parle de la beauté, laquelle, même lorsqu’elle est imaginaire comme sa Julie, prend avec lui un corps et des formes bien visibles, et n’est pas du tout une Iris en l’air et insaisissable. […] C’est par tous ces côtés vrais, combinés dans son éloquence, qu’il nous prend et nous saisit. […] Je me levai, me secouai : la faim me prit ; je m’acheminai gaiement vers la ville, résolu de mettre à un bon déjeuner deux pièces de six blancs qui me restaient encore.
Aujourd’hui, la Société des bibliophiles, considérant qu’il n’y avait jusqu’à présent aucune édition exacte des contes et nouvelles de cette princesse, que dès l’origine les premiers éditeurs en avaient usé avec le royal auteur très librement, et qu’on ne savait où trouver le vrai texte de ce curieux ouvrage beaucoup plus célébré que lu, a pris à tâche de remplir cette lacune littéraire : elle a chargé un de ses membres les plus consciencieux, M. […] Marguerite, vers ce temps, voit mourir à Lyon son mari, l’un des fuyards de Pavie ; elle le pleure, mais après les deux premiers jours où elle n’a pu surmonter sa douleur, elle prend sur elle de la dissimuler devant la régente ; car, ne pouvant rendre de services par elle-même, elle se tiendrait trop malheureuse, dit-elle, d’empêcher et d’ébranler l’esprit de celle qui en rend de si grands. […] Le portrait qui est en tête du présent volume rabattra de l’idée exagérée qu’on s’en pourrait faire si l’on prenait à la lettre les éloges du temps. […] « Ne parlons point de celle-là, dit le roi, elle m’aime trop : elle ne croira jamais que ce que je croirai, et ne prendra jamais de religion qui préjudicie à mon État. » Ce mot résume le vrai : Marguerite ne pouvait être d’une autre religion que son frère, et Bayle a très bien remarque, dans une très belle page, que plus on refuse à Marguerite d’être unie de doctrine avec les protestants, plus on est forcé d’accorder à sa générosité, à son élévation d’âme et à son humanité pure. […] Mais, à prendre les choses telles qu’elles nous apparaissent en France à la fin du xve siècle, on remarque un mélange, une lutte très sensible entre le pédantisme et la licence, entre le raffinement et la grossièreté.
Mais, en 1855, Émile Augier prend possession du théâtre contemporain. […] Il aurait pu prendre pour lui la devise du coq gaulois : « Je chante clair ! […] Au nom de mes compatriotes, je désire exprimer la vive part que nous prenons à la perte qu’ont faite le théâtre et la littérature français. […] Vous me prenez de court, car il est difficile de constituer, entre six heures et minuit, un dossier personnel sur Émile Augier. […] C’est lui qui prendra la parole, sur la tombe, au nom de la Comédie.
Ne vous arrêtez pas aux effets ; remontez aux causes, et vous conclurez que le sens artistique a tout envahi, a pris toute la place. […] Prenons-y garde : à ce compte, Shakespeare serait un réaliste. […] Rien de plus simple : prenez le petit Cupidon de cire aux pieds délicats et rosés, chaussez-le de sabots ferrés et lourds, plongez-le, la tête la première, au fond d’un baquet rempli d’eau de vaisselle ; maintenez-le quelque temps dans cette mare gluante ; vous le retirez avec de la chassie aux yeux, des détritus infects pris à sa chevelure blonde, et de la crotte aux ailes. […] En résumé, et pour parler sans métaphore : Prendre le Laid de préférence au Beau ; quand on rencontre le Beau, en faire quelque chose de Laid, — voilà le procédé réaliste […] Ces délicatesses du sentiment, Murger les prend craintivement, du bout des doigts, « comme chose ailée et fragile ».
Le curieux de sa rubrique aurait-il été de préconiser la liberté sans oser la prendre et sans vouloir qu’on la prît avec elle, en faisant la critique dupe ou victime d’une étiquette de bal masqué, qui lui donnait, à elle, toutes les cartes et l’impunité de son jeu ? […] Tout déguisement, en effet, expose deux personnes, celle qui le prend et celle pour laquelle il est pris. […] Espèce de Christine de Suède à sa manière, qui n’a pas abdiqué le trône, mais la royauté de la femme, le trône de sa grâce et de sa faiblesse ; elle a pris l’habit équivoque dont nous parle la Palatine et elle a mis sur sa pensée, qu’elle a cru viriliser, une forme qui n’a pas gagné en énergie ce qu’elle a perdu en abondance. […] Elles sont des hommes par la pensée » ; mais le temps, qui est un galant homme aussi, et plus homme qu’elles, les a prises sous son bras et, comme on fait à l’enfant qu’on va fouetter, il leur a, d’une main patiente et douce, mais irrésistible, ôté simplement leurs culottes. […] Il y a aussi toujours un homme à côté, quand une femme prend l’ambition de faire œuvre d’homme, et quelle plus œuvre d’homme que l’histoire ?
— Où avez-vous pris cela ? […] Tout le monde sait où il les a pris. […] C’est à l’Église que Luther s’en est pris d’abord, avant d’examiner ce qu’elle enseigne. […] L’auteur de la Vie de Jésus, qui troue les Évangiles, n’atteint que l’Église évangéliste et ne ricoche pas même sur nous, dont la tête chaude a pris l’alarme ! […] Voltaire même a vanté la sagesse de cette religion sans missionnaires, qui reste chez elle, tandis que l’Église, par les siens, déborde sur le monde et doit un jour le prendre tout entier dans ses bras infinis.
Le corps a pris une place que l’âme occupait autrefois. […] Je le voudrais prouver par quelques exemples pris au hasard de ses livres. […] Elle nous circonvient et nous séduit avant que nous ayons pris conscience de notre être. […] Prenons-y garde cependant. […] Une étude sur Lamennais, de 1854, le montre aux prises avec le surnaturel.
Jupiter consent à l’intervention de Minerve pour provoquer les Troyens à rompre les premiers la trêve, afin de les prendre en faute et d’avoir le droit de les abandonner. […] Les divinités s’y confondent aux hommes, pour prendre la part du ciel et du destin aux événements de la terre. […] Si beau de jeunesse, prends donc pitié de mon désespoir ; reste ici sur la plate-forme de cette tour ; ne laisse pas ton épouse veuve, ton fils orphelin ! […] « Prends pitié de ton malheureux père, que le puissant Jupiter réservait au terme de ses jours pour le rendre témoin des dernières ruines ! […] Prends compassion de moi en songeant à ton père.
tu l’envoies prendre les armes contre la république ! […] Si j’avais cru que le meilleur parti à prendre fût de faire périr Catilina, je ne l’aurais pas laissé vivre un moment. […] Comment ensuite oserait-elle prendre résolument et poursuivre énergiquement un parti, s’il n’y a point de règles certaines qui la dirigent ? […] Sera-ce garder suffisamment la pudeur que de prendre sans témoins des plaisirs honteux ? […] Par ce moyen la vie d’ici-bas tiendra déjà d’une vie céleste, et nous en serons mieux disposés à prendre notre essor quand nos chaînes se briseront.
MOI, j’avais pris pour maxime de me dissimuler soigneusement et de réfléchir l’objet aussi nettement que possible. » Ainsi, dès le début, cet homme sans personnalité fait taire bien aisément la sienne, et, se créant un procédé à contrario de ce qu’il prend peut-être pour un procédé dans Sterne, il imite les choses en les renversant. […] Cet homme, que les Quinze-Vingts de l’admiration la plus générale qui ait jamais existé ont pris pour un créateur, n’est qu’un Trublet colossal, sans les épigrammes de Voltaire. […] Le plaisant, ici, mais qui n’est point un plaisant neuf, c’est que le voleur caché reconnaît, au rendez-vous, sa femme, et ne peut se trahir et se faire prendre comme voleur. […] Il avait pris ses précautions contre elle. […] Le vague sur les hommes et les choses est comme l’atmosphère de sa pensée, et c’est même l’indéfini, l’indéterminé de ce vague qui donne à sa phrase l’apparence de draperie flottante qu’on prend pour de la majesté d’écrivain, comme on prend son parti de s’intéresser petitement à tout et de ne s’émouvoir grandement de rien pour du calme olympien et de la jupitéréenne sérénité.
Avec la croyance à l’âme immortelle, l’homme est forcé de prendre avant sa mort une décision, un parti ; puisque du parti qu’il prend son salut dépend. […] Dégoût… Tu es pris d’un mauvais accès ; la raison te violente. […] Pourquoi ne prends-tu pas conscience de ta conscience ? […] Je prends grand plaisir aussi aux pauvres d’esprit : ils accélèrent le sommeil. […] L’esprit ancien prenait sa revanche.
Prenons au hasard un exemple. […] Rien qu’à les voir de loin, le dégoût vous en prend. […] Qu’a-t-il pris aux autres ? […] Allez-y et prenez des notes. […] Prenez les faits ordinaires.
Ils prennent la boue à pleines mains et la lancent à leur adversaire sans croire se salir. […] … Bien. » Il prend des habits de Posthumus, et s’en va à Milford-Haven, comptant l’y rencontrer avec Imogène. […] » Il improvise le rôle grondeur du roi Henri avec tant de naturel, qu’on le prendrait pour un roi ou pour un comédien. […] Un jour il prit maladroitement un bain dans l’Hellespont, et là-dessus les poëtes ont dit qu’il est mort d’amour. […] Tout à l’heure, à son réveil, il se prendra d’amour pour celle qu’il apercevra la première.
Musidorus a voulu prendre un baiser à Paméla. […] Désespérée, elle prend une flèche qu’elle enfonce dans son beau corps. […] Prenez cette phrase pour modèle. […] Diane prit l’une, et en fit la plus pure des vierges. […] Quel sujet prend il ?
Il vient de faire, pour sa santé, le voyage d’Ischia où il a pris les eaux, il est revenu par Florence, et rapporte, dit-on, des fruits nouveaux de son inspiration dans ces contrées déjà chantées par lui et gardiennes de ses plus beaux souvenirs43. […] Voltaire, qui s’était enrichi par d’autres voies, savait très-bien l’influence de la richesse sur les mœurs de la littérature (je prends mœurs dans le sens que lui donnent les rhéteurs), et quand on venait lui faire de grandes phrases à la Jean-Jacques, il vous répondait par le Mondain. […] Concilier en ce sens-là la religion et la philosophie, n’est-ce pas les prendre par un côté tout politique et empirique, et les abdiquer foncièrement toutes les deux ? […] L'éclectisme, qui touche à tout, n’a pas mis jusqu’ici le doigt sur le grand ressort de rien. — Quant à ce que pourrait objecter d’autre part une philosophie originale et convaincue contre cette manière de prendre un peu à un siècle et un peu à un autre pour se composer une doctrine raisonnable, nous ne nous en chargeons pas et nous laissons ce soin aux doctes Allemands de Berlin ou de Kœnigsberg, et aux professeurs comme Rosenkranz, qui sont en train de s’en acquitter à merveille.
À Rousseau encore, Bernardin de Saint-Pierre a pris sa philosophie sociale, dont les effusions, mêlées sans cesse aux descriptions de la nature, font des Études un étonnant chaos. […] il est responsable en grande partie du cours qu’a pris pendant vingt ou trente ans la religiosité excitée puissamment par Rousseau. […] Lisez dans l’Étude onzième une page sur les migrations des animaux598 : vous verrez où Chateaubriand a pris la méthode et l’idée de son livre. […] Prises comme enseignement d’art, ces études sont étonnantes par la justesse des indications qu’elles donnent sur les formes que l’univers offre pour matière à l’artiste.
Poussée par cet amour qui enflamme le courage des lions, et non par celui qui habite d’ordinaire au cœur des jeunes vierges… Enfin, par charité, j’ai dû en prendre compassion. […] D’en venir aux prises avec un vieillard de soixante ans. […] Qu’ils y pensent ceux qui les ont prises ! […] Il est vrai qu’on doit trembler pour la famille où cet intrus a pris un tel empire ; mais rien ne donne encore à prévoir ces éventualités funestes.
Il en prit possession : mais l’état de curé lui convenoit encore moins que celui de jésuite. […] On ne connoissoit guères avant lui ce genre de critique qui, sans donner dans la sécheresse de la froide analyse ni dans le dégoût de l’érudition, ne prend de celle-ci que ce qu’elle a d’agréable. […] Le magistrat de la police prit lui-même la peine de le justifier, « non seulement aux yeux de sa famille, mais encore par une lettre qu’il écrivit à M. l’abbé Bignon ; & cette lettre ayant été lue dans l’assemblée des journalistes, l’abbé Desfontaines fut rétabli d’une voix unanime ». […] Mais personne ne prit le change, & l’on n’a pas manqué de comprendre la Voltairomanie dans la liste qu’on a donnée récemment de tous ses ouvrages.
C’est le pendant d’un lourd et pesant érudit qui a besoin d’un passage, qui monte à son échelle, prend et ouvre son auteur, vient à son bureau, copie la ligne dont il a besoin, remonte à l’échelle, et remet le livre à sa place. […] L’artiste qui prend de la couleur sur sa palette, ne sait pas toujours ce qu’elle produira sur son tableau. […] C’est celui qui a pris le ton de la nature et des objets bien éclairés, et qui a su accorder son tableau. […] Et ce Chardin, pourquoi prend-on ses imitations d’êtres inanimés pour la nature même ?
Prenons un exemple qui nous frappe encore davantage. […] Tite-Live raconte que les champions ne furent pas des gladiateurs ordinaires pris chez le marchand, mais des barbares dont peut-être Scipion étoit bien aise de se défaire, et qui se battirent l’un contre l’autre par differens motifs. […] Ils prennent ce qui s’y fait pour la regle de ce qui se doit faire par tout, et de ce qui auroit dû se faire toujours. […] Le parthe qui s’éloigne à bride abbatue après n’avoir pas réussi dans une premiere charge, et cela pour mieux prendre son temps et pour ne pas s’exposer sans fruit aux traits d’un ennemi qui ne plie point, ne doit pas être regardé comme coupable de lâcheté, parce que cette maniere de combattre étoit autorisée par la discipline militaire des parthes, fondée sur l’idée qu’ils avoient de la fureur et de la valeur véritable.
I Je ne crois pas que par ce livre, d’un titre écrasant : De l’Intelligence, Taine, ce Paradol de la philosophie, à qui la renommée a été tout de suite facile, comme à Paradol, force l’attention et la prenne… Ce n’est plus ici que la critique, animée, superficielle, mais épigrammatique, des Philosophes classiques du xixe siècle en France. […] Il y a plus : j’estimais que si un homme était capable de mettre de l’agrément dans un livre philosophique, c’était le philosophe qui s’était une fois si joliment moqué des philosophes, et si c’était ainsi pour moi, si raisonnable, comme vous voyez, dans mon amour pour Taine, qu’est-ce que cela devait être pour ses admirateurs, qui le prennent pour le Génie en herbe de la littérature et le considèrent comme un jeune dieu ? […] C’est lui-même, Taine, le critique littéraire qui s’était si agréablement balancé entre Tite-Live et La Fontaine ; lui, les lunettes professorales du palais des Beaux-Arts et le binocle des Musées d’Italie ; lui, le poète fantaisiste des petits cochons roses, c’est lui-même qui a renoncé à la littérature, au binocle, aux petits cochons, à la fantaisie, qui s’est changé en philosophe ardu et qui a pris pour nourrice la philosophie au lait d’ânesse ! […] La vérité n’y est pas… et l’erreur, qu’on prend quelquefois pour elle quand elle est puissante, l’erreur — j’entends la forte erreur d’une tête robustement organisée — n’y est pas davantage.
Arrivé à la dernière limite que les sensations puissent atteindre, et toujours affamé de sensations nouvelles, il s’imagine que de prendre la vie à rebours c’est le seul parti qui lui reste pour y trouver quelque goût et quelque saveur, et il le prend, ce parti de la vie à rebours, et il décrit tous les vains efforts qu’il fait pour l’y mettre. […] Eux seuls, ces esprits blasés et tombés dans l’enfance des vieilles civilisations, s’intéresseraient aux efforts et aux rétorsions de ce misérable Des Esseintes, corrompu par l’ennui, qui engendre toutes les autres corruptions, et qui s’imagine qu’on peut prendre à rebours la vie, — cette difficulté de la vie ! […] prenez pitié du chrétien qui doute, de l’incrédule qui voudrait croire, du forçat de la vie qui s’embarque dans la nuit sous un firmament que n’éclairent plus les fanaux consolants de l’espoir !
Tel est précisément le sens où nous prenons le mot « image » dans notre premier chapitre. […] La critique kantienne, sur ce point au moins, n’aurait pas été nécessaire, l’esprit humain, dans cette direction au moins, n’aurait pas été amené à limiter sa propre portée, la métaphysique n’eût pas été sacrifiée à la physique, si l’on eût pris le parti de laisser la matière à mi-chemin entre le point où la poussait Descartes et celui où la tirait Berkeley, c’est-à-dire, en somme, là où le sens commun la voit. […] Prenez une pensée complexe qui se déroule en une série de raisonnements abstraits. […] La complication de certaines parties du présent ouvrage tient à l’inévitable enchevêtrement de problèmes qui se produit quand on prend la philosophie de ce biais.
Mais Thalie à son gré prendra ses libertés Dans le cercle amusant de nos infirmités. […] Mais si parmi les Goths, les Pictes, les Teutons, Nos rimeurs aujourd’hui vont prendre des leçons, Que nos historiens n’en suivent point la trace, Et des Anglais surtout n’imitent point l’audace. […] Vous me direz en vain que ce genre est bizarre ; Qu’il infesta Paris d’une école barbare ; Que, le maître excepté, ces nouveaux Lycophrons Devraient tenir séance aux petites-maisons ; Que, ne pouvant du maître imiter le génie, À défaut de sa verve, ils ont pris sa manie ; Que, pour être immortel, il faut du sens commun, Et que les temps futurs n’en connaîtront pas un. Que nous fait l’avenir, si nous vivons célèbres ; Si le siècle applaudit nos œuvres des ténèbres ; Si nos contemporains, sur la foi des journaux, Nous prennent bêtement pour des soleils nouveaux ; Si, courbés sous le poids des honneurs littéraires, Nous voyons, l’or en main, accourir les libraires ; Si, grâce à nos patrons, la cassette du roi Nous paie en bons louis nos vers de faux aloi ?
On n’eût pas encore osé le prendre à la théologie, qui en avait le privilège exclusif. […] Dans tous les deux je remarque un jugement plus ferme et plus sûr qu’étendu ; un esprit net et droit plutôt que vaste ; trop peu de cette sensibilité qui vient d‘une âme que les passions ont remuée, mais beaucoup de facilité à prendre feu sur les ouvrages de l’esprit. […] On prenait l’ombre pour la chose : illusion féconde, à la veille d’une grande époque littéraire ; illusion fâcheuse le lendemain. […] Après lui, et grâce à lui, le public lettré comprit toutes les conditions des écrits durables, et l’esprit français prit une plus haute idée de lui-même. […] Balzac prend le monde à témoin de la violence de ses ennemis ; il s’échauffe et se travaille pour faire de son grief le grief même du genre humain ; il veut y intéresser la Providence elle-même.