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841. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre xi‌ »

Nous sommes unis, en France, parce que, depuis l’intellectuel jusqu’au petit paysan, nous avons la claire vision de quelque chose de supérieur à nos petits intérêts personnels et une sorte d’instinct qui nous fait accepter joyeusement le sacrifice actif de nous-mêmes au triomphe de cet idéal.

842. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XII. »

Après cette amnistie personnelle au milieu d’une telle vengeance, Alexandre, qui dans sa fougue cruelle ne négligeait aucun prestige religieux, voulut emporter en Asie quelques-unes de ces réponses de Delphes jadis venues si à propos dans la guerre médique, et dont Pindare avait été l’inspirateur et l’écho.

843. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Les ennemis qu’il rencontre sont pour l’auteur des ennemis personnels. […] Telles sont les phases bizarres du gouvernement personnel. […] Nous n’imaginons les objets que par ces précisions et ces contrastes ; il faut marquer les qualités distinctives pour rendre les gens visibles ; notre esprit est une toile unie, où les choses n’apparaissent qu’en s’appropriant une forme arrêtée et un contour personnel. […] Il n’écrivait pas sur des sujets d’imagination, lesquels dépendent du goût régnant, mais sur des choses personnelles et intimes, uniquement occupé à conserver ses souvenirs et à se faire plaisir. […] Ce caractère n’est pas propre à l’invention solitaire des opinions personnelles et des actions indépendantes ; il est trop bien fourni des facultés qu’emploie la société, trop bien approprié à la camaraderie et à la compagnie, trop sociable pour ne pas agir et penser d’après autrui.

844. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

Il a cru que l’originalité était possible, même en parlant de l’Italie, et son espérance n’a pas été déçue ; car le Pianto est un des poèmes les plus beaux de notre langue, et en même temps une des œuvres les plus personnelles que nous ayons lues depuis longtemps. […] Delavigne n’a pas de volonté personnelle, qu’il se propose pour but unique le succès, et rien de plus : il a pris la tradition comme un appui, mais non comme un autel. […] Dumas, qui, aujourd’hui, annonce la régénération de la tragédie, mais qui comprend cette régénération d’une façon toute personnelle, et, selon nous, très étroite, a commencé par écrire pour le théâtre avec des intentions toutes différentes. […] Alfred de Vigny, en écrivant pour le théâtre, s’est placé sur un terrain personnel. […] Qu’il prenne l’étoffe de ses créations à venir dans ses souvenirs personnels ou dans les récits de l’histoire, il ne perdra pas la délicatesse de son goût ; les habitudes de sa pensée, aussi bien que les habitudes de son style, nous sont un sûr garant qu’il ne désertera pas la cause de l’idéal.

845. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

Ces inégalités peignent bien le Germain solitaire, énergique, imaginatif, amateur de contrastes violents, fondé sur la réflexion personnelle et triste, avec des retours imprévus de l’instinct physique, si différent des races latines et classiques, races d’orateurs ou d’artistes, où l’on n’écrit qu’en vue du public, où l’on ne goûte que des idées suivies, où l’on n’est heureux que par le spectacle des formes harmonieuses, où l’imagination est réglée, où la volupté semble naturelle. […] Voilà ce qu’aperçoit Carlyle ; l’homme est devant lui, ressuscité ; il perce jusque dans son intérieur, il le voit sentir, souffrir et vouloir, de la façon particulière et personnelle, absolument perdue et éteinte, dont il a senti, souffert et voulu. […] Son ami Sterling lui envoie de longues dissertations pour le ramener au Dieu personnel. […] Je puis vérifier, en lisant celle-ci, le jugement de l’auteur ; je ne pense plus d’après lui, mais par moi-même : l’historien ne se place pas entre moi et les choses ; je vois un fait, et non le récit d’un fait ; l’enveloppe oratoire et personnelle dont le récit recouvre la vérité a disparu ; je puis toucher la vérité elle-même. […] Ils sont dévoués à la vérité abstraite comme vos puritains à la vérité divine ; ils ont suivi la philosophie comme vos puritains la religion ; ils ont eu pour but le salut universel comme vos puritains le salut personnel.

846. (1933) De mon temps…

Il le faisait passer outre à ses préférences personnelles. […] Poictevin fut, si l’on peut dire, une sorte d’impressionniste, procédant par touches verbales, et, parti d’un goncourtisme exaspéré, il arriva à se créer un moyen d’expression personnel, infiniment délicat et infiniment scrupuleux. […] Du Golfe Persique et de l’Inde il avait rapporté de précieux spécimens et il s’était formé une importante collection personnelle qu’il étiquetait et classait avec amour. […] Cette œuvre si curieuse et si personnelle, où tout est exact, où chaque détail a sa raison d’être dans un texte ou dans un inventaire, Maurice Maindron la poursuivit opiniâtrément en dépit de ses travaux d’entomologiste et d’encyclopédiste. […] Forain, il faut bien le dire, travaillait un peu pour la galerie, tandis que Degas n’avait en vue que sa satisfaction personnelle.

847. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

On fait de la science étroite à laquelle se mêlent la vanité personnelle ou les diverses passions humaines. […] Nous n’aurions donc rien de mieux à faire que de réunir nos efforts au lieu de les diviser et de les neutraliser par des disputes personnelles. […] La révolution que la méthode expérimentale a opérée dans les sciences consiste à avoir substitué un critérium scientifique à l’autorité personnelle. […] Elle ne reconnaît d’autre autorité que celle des faits, et elle s’affranchit de l’autorité personnelle. […] Elle secoue non seulement le joug philosophique et théologique, mais elle n’admet pas non plus d’autorité scientifique personnelle.

848. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

Je ferai quelques changements dans la seconde édition qui va paraître, et je répondrai, dans les notes et dans une courte préface, à quelques objections de Fontanes, laissant de côté les insinuations personnelles, ces jouissances de l’esprit de parti. […] Je n’y suis, moi, pour rien de personnel. […] Cabanis (et je n’entends hasarder ici que mon opinion personnelle) n’est pas encore bien jugé de nos jours ; malgré un retour impartial, on ne me paraît pas complétement équitable. […] Il est ingénieux à les faire valoir, à les venger des injustices des chroniqueurs grossiers, à donner un sens national à ce qui semblerait de vaines mobilités d’humeur ou des révoltes purement personnelles ; le chapitre qui traite de la révolte de Gondovald, par exemple, et qui offre presque l’intérêt d’un roman, tire du point de vue de l’historien un sens sérieux et nouveau, qu’on peut du moins entrevoir. […] N’ayant pas d’avis propre et personnel à exprimer en telle matière, je dois me borner à signaler en ces termes généraux l’état de la question.

849. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Molière »

13 Si Molière n’a pas laissé de sonnets, à la façon de quelques grands poëtes, sur ses sentiments personnels, ses amours, ses douleurs, en a-t-il transporté indirectement quelque chose dans ses comédies ? […] Il est infiniment probable qu’il a songé dans Arnolphe, dans Alceste, à son âge, à sa situation, à sa jalousie, et que sous le travestissement d’Argan il donne cours à son antipathie personnelle contre la Faculté. […] Chez tous ces grands hommes évidemment, chez Molière plus évidemment encore, le génie dramatique n’est pas une extension, un épanouissement au dehors d’une faculté lyrique et personnelle qui, partant de ses propres sentiments intérieurs, travaillerait à les transporter et à les faire revivre le plus possible sous d’autres masques (Byron, dans ses tragédies), pas plus que ce n’est l’application pure et simple d’une faculté d’observation critique, analytique, qui relèverait avec soin dans des personnages de sa composition les traits épars qu’elle aurait rassemblés (Gresset dans le Méchant). […] Le génie lyrique, élégiaque, intime, personnel (je voudrais lui donner tous les noms plutôt que celui de subjectif, qui sent trop l’école), ce génie qui est l’antagoniste-né du dramatique, se chante, se plaint, se raconte et se décrit sans cesse.

850. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre premier. Aperçu descriptif. — Histoire de la question »

Dans la conversation, d’ordinaire, on invente peu, on répète plus volontiers ce que l’on a déjà dit, appris ou pensé ; la parole intérieure, au contraire, est le langage de la pensée active, personnelle, qui cherche et qui trouve et s’enrichit par son propre travail ; elle a donc pour mesure chez la plupart des hommes l’énergie et la vivacité de la pensée. […] Selon Maine de Biran, le langage est l’oeuvre de la volonté humaine ; l’homme ne s’approprie un langage qu’en le refaisant lui-même, et il n’y a pas de langage extérieur sans un « langage intérieur » préalable ; ce qu’il appelle improprement ainsi, c’est d’abord le langage personnel et volontaire de l’enfant, qui se comprend lui-même avant de comprendre le langage de ses parents ; — c’est ensuite une sorte d’écho musculaire par lequel les organes de la voix s’associent instantanément aux impressions que l’oreille reçoit de la voix d’autrui ; par ces ébauches de mouvements, l’enfant s’approprie la langue qu’il entend et se fait des signes avec les sons ; — c’est enfin la parole personnelle par laquelle nous imitons les sons que nous nous souvenons d’avoir entendus. […] Ailleurs (Instr., VII, 16), Bossuet admet une « oraison passive » ; alors, dit-il, « Dieu tient l’école du cœur, où il se fait écouter en grande tranquillité et en grand silence » ; ce sont là des métaphores ; sauf que la quiétude remplace l’élan, Bossuet décrit toujours le même état ; il ne prétend pas qu’un discours de Dieu remplace la parole intérieure personnelle.

851. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

On comprendrait aisément une préférence personnelle de Mme de Sévigné pour le vieux Corneille ; on comprendrait à la rigueur un succès passager de Pradon ; mais cette opposition presque générale ? […] De par son tempérament, de par sa philosophie, de par ses expériences personnelles, Molière portait le drame en lui ; il l’aurait créé, lui qui a pris tant de libertés avec les formes et les combinaisons d’éléments, s’il y avait été encouragé. […] Ce xviie  siècle, si riche en œuvres et en hommes, nous montre mieux que toute autre époque l’action combinée de trois forces souvent contraires : l’esprit général de la période (qui est épique), la tradition savante (qui enseigne le culte de la tragédie, de l’épopée, et qui donne les règles précises de ces « formes »), l’individualité (qui tend à la liberté) ; de là les résultats les plus variés, dans les œuvres de valeur relative comme dans celles de valeur absolue ; par exemple : le moule rigide étouffant l’esprit (épopée) ; la forme nouvelle et vivante (roman) ; la forme vidée (lyrisme) ; la forme en conflit avec le contenu (tragédie romanesque), mais galvanisée par le génie héroïque (Corneille) ; l’art suprême, original, s’harmonisant avec la tradition savante, méconnu du public (Racine) ; ou se créant une forme personnelle (La Fontaine) ; l’individualité du précurseur, arrêtée à mi-chemin, révélant un monde en fait, et un autre en puissance (Molière). […] Pour la généralité toutefois, le lyrisme se fige, dans son inspiration et dans ses formes, ce qui expliquera la réaction des symbolistes et verslibristes. — Banville, Gautier, Baudelaire, Richepin représentent, chacun à sa façon très personnelle, la décadence du romantisme proprement dit.

852. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

Le vrai talent est toujours personnel. […] Le mot ne peut jamais évoquer que les représentations que l’individu possède déjà, et, en dernière analyse, chacun ne travaille qu’avec le fonds d’aperceptions qu’il a acquises par une observation personnelle attentive du monde. […] Le désir de saisir sans lacunes l’ensemble du monde phénoménal est irrésistible, mais la possibilité d’aperceptions personnelles est restreinte même dans le cas le plus favorable. […] Pour eux, le moyen âge avait un puissant attrait, par cela seul qu’il était l’époque de la foi enfantine, de l’enivrement des simples d’esprit dans le commerce personnel avec la Sainte Trinité, la Sainte Vierge et tous les saints tutélaires. […] Le développement historique conduisit en Angleterre à deux résultats qui s’excluent en apparence l’un l’autre : à la domination de caste et à la liberté personnelle.

853. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Note »

le voilà à même de pratiquer et de professer ces sciences faciles. » « — Ce n’est pas en lui-même ni dans son bon sens personnel que Lamartine puise ce qui lui reste de bon aujourd’hui : il le doit à ses habitudes antérieures, au milieu social d’où il est sorti, à une certaine atmosphère d’homme comme il faut dont il ne pourra jamais se défaire.

854. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre II. Des tragédies grecques » pp. 95-112

On voit dans ces trois auteurs et leur talent personnel, et le développement de leur siècle ; mais aucun d’eux n’atteint à la peinture déchirante et mélancolique que les tragiques anglais, que les écrivains modernes nous ont donnée de la douleur ; aucun d’eux ne présente une philosophie sensible, aussi profondément analogue aux souffrances de l’âme.

855. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XX. Du dix-huitième siècle, jusqu’en 1789 » pp. 389-405

L’exercice de la pensée, plus que toute autre occupation de la vie, détache des passions personnelles.

856. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre IV »

Celui-ci insiste pour que, dans le cahier, on couche par écrit et tout au long ses griefs locaux et personnels, sa réclamation contre les impôts et redevances, sa requête pour délivrer ses chiens du billot, sa volonté d’avoir un fusil contre les loups796.

857. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre I. Malherbe »

Il dit aussi les grands lieux communs de la vie et de la mort ; il les dit en apparence sans intérêt personnel, dérobant la particularité de ses expériences sous l’impersonnelle démonstration de la vérité générale.

858. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Stendhal, son journal, 1801-1814, publié par MM. Casimir Stryienski et François de Nion. »

Ferdinand Brunetière) toute cette « littérature personnelle », journaux, mémoires, souvenirs, impressions, est fort en faveur aujourd’hui.

859. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XV. Les jeunes maîtres du roman : Paul Hervieu, Alfred Capus, Jules Renard » pp. 181-195

Ce donc que j’entends par l’heureux choix de ses sujets n’est pas le bonheur des anecdotes, dont les Charivaris et les Tam-Tam de 1860 ou les Fliegende Blätter d’aujourd’hui servent aux confrères pauvres de mine inépuisable ; non, c’est l’ingénieuse façon de voir, sa compréhension personnelle de tout fait-divers.

860. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXV. Mort de Jésus. »

Peut-être même la hauteur extrême du caractère de Jésus ne rend-elle pas un tel attendrissement personnel vraisemblable, au moment où, uniquement préoccupé de son œuvre, il n’existait plus que pour l’humanité 1184.

861. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIII » pp. 109-125

Elle se dévoua à consoler de respectables douleurs, au lieu de rechercher des plaisirs ou des avantages personnels : en entrant dans le monde, elle sembla vouloir s’y placer sous un vénérable patronage qui la préservât des écarts et des calomnies.

862. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau, et Joseph Saurin. » pp. 28-46

L’auteur du Siècle de Louis XIV pense que Boindin ne les a chargés tous trois que par esprit de vengeance & de haine personnelle.

863. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 10, continuation des preuves qui montrent que les anciens écrivoient en notes la déclamation » pp. 154-173

Ils expriment bien la même chose que les autres airs, mais c’est dans un goût particulier et conforme à ce caractere, que j’appellerois, si je l’osois, un caractere personnel.

864. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIV. L’auteur de Robert Emmet »

Il est débile, anémique, inerme, sans style personnel, sans pensée nouvelle, correct et coulant (et déjà coulé !)

865. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Louis XVI et sa cour »

L’histoire, pour lui, est, avant tout, personnelle.

866. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Chamfort »

Ceux qui disent le plus haut, avec la soif de la justice ou la sympathie pour l’infortune, que les fautes sont personnelles, ont-ils jamais pénétré dans la conscience de l’homme que les sociétés ont nommé partout du nom expiatoire de bâtard ?

867. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Oscar de Vallée » pp. 275-289

Le poète qui, jusque-là, n’avait chanté que l’amour, l’amitié, tous ses sentiments personnels, et qui forçait son génie à tenir archaïquement dans des vers que par le contour, la grâce et la perfection grecque, on pouvait croire du pays de sa mère, devint un prosateur à la phrase carrée du xviie  siècle, balancée dans le mouvement, continu et contenu, de l’orateur.

868. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Armand Carrel » pp. 15-29

À la fin du troisième volume, nous sommes en 1833, à l’année qui précéda la fondation du National, l’œuvre personnelle de Carrel, l’hégire de ce nouveau prophète d’une république qui se révélait.

869. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XX. M. de Montalembert »

Dans des notes combinées sans doute pour resserrer des liens déjà chers, M. de Montalembert n’a pas manqué de nous présenter tout le personnel du Correspondant, vivants et morts, et sa scrupuleuse exactitude à nommer tout le monde et à n’oublier personne du cénacle dont il est l’oracle est telle, qu’on finit par ne plus savoir si Les Moines d’Occident, cette suite de petites histoires, transcrites et traduites d’histoires plus longues et mieux racontées, sont, tels que les voilà, une besogne faite par un seul homme ou par sa petite société.

870. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Maynard »

Cette omniprésence du saint à toutes ses œuvres, le soin infatigable qu’il y donnait, les lettres, instrumenta regni, par lesquelles il les gouvernait des distances les plus éloignées, toutes ces fortes qualités, incessamment appliquées, de direction, d’influence et d’irrésistible commandement, frappent plus encore que sa charité, et tout cela est d’une telle proportion en saint Vincent de Paul, qu’il est impossible de bien comprendre son action souveraine sur tout ce monde immense dont il ne cessa d’être, jusqu’à la mort, le père de famille et la providence, sans l’aide personnelle, directe et surnaturelle de Dieu !

871. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Guizot »

— de plus vague, de moins appuyé, de moins personnel, quoique ce soit infiniment plat, — voilà pour la forme ! 

872. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Marquis Eudes de M*** »

C’est un livre singulier, direct comme un mémoire à une académie, dont il a pris la forme décidée, vibrante et personnelle.

873. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Laurent Pichat »

dans ce volume que les idées impies d’un siècle qui a confisqué l’âme d’un homme, mais il y a aussi les sentiments personnels de cet homme, qui vaut mieux, sans nul doute, que les idées qui l’ont confisqué.

874. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Jean Richepin »

Jean Richepin, qui n’a pas d’injure personnelle à venger, est-il le chevalier d’une madame André, qu’alors il n’eût pas inventée ?

875. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Madame Sand et Paul de Musset » pp. 63-77

Elle et Lui, Lui et Elle, ne sont point, en effet, à ce qu’il paraît, deux études de nature humaine désintéressées et sévères, mais — dit le scandale — deux actes personnels d’un caractère acharné, deux horribles accusations dont l’une a pour visée de déshonorer un homme mort, l’autre de déshonorer une femme vivante.

876. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Deux romans scandaleux » pp. 239-251

Elle et Lui, Lui et Elle ne sont point, en effet, à ce qu’il paraît, deux études de nature humaine, désintéressées et sévères, mais, — dit le Scandale — deux actes personnels d’un caractère acharné, deux horribles accusations dont l’une a pour visée de déshonorer un homme mort, l’autre de déshonorer une femme vivante.

877. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Gogol. » pp. 367-380

Tel est le Jérôme Paturot russe à la recherche d’une position sociale, et que l’auteur des Ames mortes, qui nous donne sa carte, appelle le Conseiller de collège, Paul Ivanovitch Tchitchikoff, propriétaire terrier, voyageur pour ses affaires personnelles !

878. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iv »

Les originaires d’Alsace, Français de la même manière que les habitants de Nantes ou de Marseille, ont en plus un besoin personnel de la victoire, un intérêt immense à l’écrasement de l’Allemagne.

879. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Introduction »

Entre deux hommes qui s’entendent sur la définition de l’idéal social à réaliser, tout en ne s’entendant pas sur le choix des types d’institutions à favoriser ou à combattre, ne peut-on décider, abstraction faite de tout sentiment personnel ou de tout principe métaphysique, par une recherche objective ?

880. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

La rigueur du niveau démocratique ajoute encore à cette froide activité du bon sens aiguisée par l’intérêt personnel et le besoin d’un bien-être égal.

881. (1894) Critique de combat

Est-il victime de la difficulté qu’on rencontre pour faire accepter à la foule moutonnière toute conception neuve et personnelle des choses ? […] Quoi qu’il en soit, Walras a traité ainsi d’une façon personnelle et neuve quatre grands problèmes, ceux qui ont pour objets l’échange, la production, la capitalisation et le crédit, la monnaie. […] Il y a trois sortes de richesses : deux naturelles, la terre et les facultés personnelles ; une artificielle, fabriquée (mobilier, outillage, etc.) […] Or quel est le siècle où notre pays a pris pour jamais conscience de sa mission personnelle, de cet idéal national qui est comme l’âme d’un peuple ? […] Pas la moindre conception artistique qui lui soit personnelle.

882. (1930) Le roman français pp. 1-197

Quant à « l’écriture artiste », les deux frères sont à la recherche « d’un seul style bien personnel, bien Goncourt ». […] Et, dans La Vagabonde, dans La Retraite sentimentale, Les Vrilles de la vigne, une langue directe, personnelle, enveloppante, — féline encore !  […] Puis on discerne que c’est tout différent, personnel. […] » Ce grand écrivain se faisait ainsi une religion personnelle, « mystique et stoïcienne tout à la fois ». […] Il lui est bien personnel.

883. (1862) Notices des œuvres de Shakespeare

Là réside vraiment, bien plus que dans ses chagrins ou dans ses périls personnels, la source de la mélancolie de Hamlet ; c’est là son idée fixe et sa folie. […] Qu’après cela, le spectacle de l’âme de Brutus soit, pour Johnson, moins touchant et moins dramatique que celui de telle ou telle passion, de telle ou telle situation de la vie, c’est là un résultat des inclinations personnelles du critique, et du tour qu’ont pris ses idées et ses sentiments ; on n’y saurait trouver une règle générale, sur laquelle se doive fonder la comparaison entre des ouvrages d’un genre absolument différent. […] « Pendant que Pierre d’Aragon tenait sa cour à Messine, un certain baron, Timbrée de Cardone, favori du prince, devint amoureux de Fénicia, fille de Léonato, gentilhomme de la ville : sa fortune, la faveur du roi, et ses qualités personnelles plaidèrent si bien sa cause, que Timbrée fut en peu de temps l’amant préféré de Fénicia, et obtint l’agrément de Léonato pour l’épouser. […] C’est Othello, Cassio, Jago, Desdémona, êtres réels et vivants, qui ne ressemblent à aucun autre, qui se présentent en chair et en os devant le spectateur, enlacés tous dans les liens d’une situation commune, emportés tous par le même événement, mais ayant chacun sa nature personnelle, sa physionomie distincte, concourant chacun à l’effet général par des idées, des sentiments, des actes qui lui sont propres et qui découlent de son individualité. […] De tels rapprochements sont presque toujours de vains jeux d’esprit qui ne prouvent rien, si ce n’est l’opinion personnelle de celui qui juge.

884. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Au premier rang combattit Milton, prédestiné à la barbarie et à la grandeur par sa nature personnelle et par les mœurs environnantes, capable de manifester en haut relief la logique, le style et l’esprit du siècle. […] Il déclara « que l’Erreur soutient la Coutume, que la Coutume accrédite l’Erreur, que les deux réunies, soutenues par le vulgaire et nombreux cortége de leurs sectateurs, accablent de leurs cris et de leur envie, sous le nom de fantaisie et d’innovation, les découvertes du raisonnement libre. » Il montra que « lorsqu’une vérité arrive au monde, c’est toujours à titre de bâtarde, à la honte de celui qui l’engendre, jusqu’à ce que le Temps, qui n’est point le père, mais l’accoucheur de la Connaissance, déclare l’enfant légitime et verse sur sa tête le sel et l’eau. » Il tint ferme par trois ou quatre écrits contre le débordement des injures et des anathèmes, et au même moment osa plus encore : il attaqua devant le Parlement la censure, œuvre du Parlement463 ; il parla en homme qu’on blesse et qu’on opprime, pour qui l’interdiction publique est un outrage personnel, qu’on enchaîne en enchaînant la nation. […] Il n’invente plus un genre personnel, il imite la tragédie ou l’épopée antique. […] Il n’avait appelé le chrétien qu’au salut personnel et à la liberté laïque. […] Jeté par le hasard d’une révolution dans la politique et dans la théologie, il réclame pour les autres la liberté dont a besoin sa raison puissante, et heurte les entraves publiques qui enchaînent son élan personnel.

885. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « L’obligation morale »

Un être intelligent, à la poursuite de ce qui est de son intérêt personnel, fera souvent tout autre chose que ce que réclamerait l’intérêt général. Si pourtant la morale utilitaire s’obstine à reparaître sous une forme ou sous une autre, c’est qu’elle n’est pas insoutenable ; et si elle peut se soutenir, c’est justement parce qu’au-dessous de l’activité intelligente, qui aurait en effet à opter entre l’intérêt personnel et l’intérêt d’autrui, il y a un substratum d’activité instinctive primitivement établi par la nature, où l’individuel et le social sont tout près de se confondre. […] Ainsi, même si l’on érige en principe de la morale l’intérêt personnel, il ne sera pas difficile de construire une morale raisonnable, qui ressemble suffisamment à la morale courante, comme le prouve le succès relatif de la morale utilitaire. L’égoïsme, en effet, pour l’homme vivant en société, comprend l’amour-propre, le besoin d’être loué, etc. ; de sorte que le pur intérêt personnel est devenu a peu près indéfinissable, tant il y entre d’intérêt général, tant il est difficile de les isoler l’un de l’autre. […] Et si c’est l’intelligence d’un philosophe, elle construira une morale théorique où l’interpénétration de l’intérêt personnel et de l’intérêt général sera démontrée, et où l’obligation se ramènera à la nécessité, sentie par nous, de penser à autrui si nous voulons nous rendre intelligemment utiles à nous-mêmes.

886. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « LEOPARDI. » pp. 363-422

A côté des satisfactions fort douces qu’il y recueillit, il ressentit bien des ennuis, bien des gênes, sans parler de celles qui tenaient à sa situation personnelle. […] » — Le Dernier Chant de Sapho, tout vibrant d’une sauvage âpreté et tout chargé des plus sombres couleurs de l’Érèbe, peut sembler, sous ce masque antique, un cri presque direct de l’âme du poëte, à l’une de ces heures où, lui aussi, il fut tenté de lancer sa coupe au ciel et de rejeter l’injure de la vie : …… Lucemque perosi Projecere animas…… Mais c’est autour de la pièce intitulée Bruto minor (Brutus le jeune, celui de Philippes), qu’il faut surtout nous arrêter, parce qu’ici est la clef de toute la philosophie négative de Leopardi, le cachet personnel et original de son genre de sensibilité poétique. […] Car qu’on ne croie pas que Leopardi était tout entier dans les énergiques et farouches accents dont nous avons déjà cité maint exemple, et dont la paraphrase qu’il donne des paroles de Brutus est chez lui l’expression la plus superbe148 : on a là le côté, pour ainsi dire, historique de son talent ; c’est comme la ruine romaine dans le grand paysage ; mais souvent il s’y promène seul, rêveur, et animé d’une mélancolie personnelle, toujours profonde et à la fois aimable.

887. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre I. Principe des mœurs sous l’Ancien Régime. »

. — Personnel et dépenses. — Sa maison militaire, son écurie, sa vénerie, sa chapelle, sa faculté, sa bouche, sa chambre, sa garde-robe, ses bâtiments, son garde-meuble, ses voyages. […] Notez encore sa musique profane, 128 chanteurs, danseurs, instrumentistes, maîtres et surintendants ; son cabinet de livres, 43 conservateurs, lecteurs, interprètes, graveurs, médaillistes, géographes, relieurs, imprimeurs ; le personnel qui orne ses cérémonies, 62 hérauts, porte-épées, introducteurs et musiciens ; le personnel qui pourvoit à ses logements, 68 maréchaux des logis, guides et fourriers.

888. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

Relisez dans le Banquet l’histoire de cette perpétuelle et nécessaire ascension de l’amour, qui toujours dépasse les êtres finis pour monter plus haut, soit à un Dieu personnel, soit à ce qu’on a appelé, faute d’autres mots, la « catégorie de l’Idéal ». […] Elle faisait la chronique de la cour, la chronique de la ville, la chronique de la littérature et du théâtre, la chronique de la province, la chronique de la campagne, la chronique des villes d’eaux, la chronique de la guerre, la chronique des crimes célèbres, la chronique de la mode, la chronique familière et de confidences personnelles— toutes les chroniques qu’on fait encore. […] Il y a les frères veufs, dont le mort avait du talent, et qui en ont aussi peut-être, mais qui, pouvant tranquillement jouir d’une gloire indivise, ont voulu, par leurs productions personnelles, nous mettre à même de dégager de l’œuvre commune l’apport du défunt.

889. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

Finalement il y a une exaltation de la sympathie : le plaisir purement personnel est doublé, en étant partagé avec un autre ; et les plaisirs d’un autre sont ajoutés à nos plaisirs purement personnels. Ainsi, autour du sentiment physique qui forme le noyau du tout, sont rassemblés les sentiments produits par la beauté personnelle, ceux qui constituent le simple attachement, le respect, l’amour de l’approbation, l’amour-propre, l’amour de la possession, l’amour de la liberté, la sympathie.

890. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre IV. Services généraux que doivent les privilégiés. »

Si, dans sa conduite ordinaire, les motifs personnels ne l’emportaient pas sur les motifs publics, il serait un saint comme Louis IX, un stoïcien comme Marc-Aurèle, et il est un seigneur, un homme du monde semblable aux gens de sa cour, encore plus mal élevé, plus mal entouré, plus sollicité, plus tenté et plus aveuglé. […] Le fermier est souverain législateur dans les matières qui font l’objet de son intérêt personnel.

891. (1860) Cours familier de littérature. X « LXe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 401-463

Cette volonté diplomatique du roi Louis-Philippe était sans cesse contrariée et contrainte par les cabales parlementaires, qui reprochaient à ce gouvernement sa seule vertu, et qui lui remettaient sans cesse sous les yeux, comme un contraste, les grandeurs de Napoléon, sans parler jamais des catastrophes et des expiations de ce génie qui avait dépensé deux fois la France pour payer sa gloire personnelle. […] M. de Metternich ne renonça à nous sauver que quand nous voulûmes obstinément nous perdre : il ne quitta Dresde que découragé par les injures personnelles de Napoléon.

892. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre V. Le roman romantique »

Sainte-Beuve n’a donné qu’un roman, Volupté (1834) : cette œuvre très moderne, plus facile à goûter aujourd’hui qu’il y a soixante ans, est lyrique par certains détails d’exécution, par des couplets effrénés, fort ridicules aujourd’hui, mais surtout par le caractère strictement intime et personnel de l’étude morale. […] En dehors des grandes lignes de sa vie, ses aventures personnelles ne sont guère intéressantes.

893. (1914) Enquête : Les prix littéraires (Les Marges)

Ce serait de trouver un amoureux d’art, plein de goût et de discrétion, n’ayant en conséquence qu’une vague ressemblance avec feu Chauchard ; il adresserait, sous le voile de l’anonymat, un chèque copieux au littérateur, dénué de millions et de relations, qui se serait contenté d’écrire un beau livre, pour sa joie personnelle, et qui n’aurait employé aucuns moyens louches et malpropres afin de décrocher a timbale d’argent doré. […] Et les grands écrivains ont tiré leurs meilleures pages de ces expériences personnelles de l’existence.

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