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988. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

Quand nous nous remémorons des faits passés, quand nous interprétons des faits présents, quand nous entendons un discours, quand nous suivons la pensée d’autrui et quand nous nous écoutons penser nous-mêmes, enfin quand un système complexe de représentations occupe notre intelligence, nous sentons que nous pouvons prendre deux attitudes différentes, l’une de tension et l’autre de relâchement, qui se distinguent surtout en ce que le sentiment de l’effort est présent dans l’une et absent de l’autre. […] C’est donc l’effort de mémoire, ou plus précisément de rappel, qui nous occupera d’abord dans un précédent essai 64, nous avons montré qu’il fallait distinguer une série de « plans de conscience » différents, depuis le « souvenir pur », non encore traduit en images distinctes, jusqu’à ce même souvenir actualisé en sensations naissantes et en mouvements commencés. […] Mais, dans le cas de l’effort intellectuel, les images qui se succèdent peuvent justement n’avoir aucune similitude extérieure entre elles : leur ressemblance est tout intérieure ; c’est une identité de signification, une égale capacité de résoudre un certain problème vis-à-vis duquel elles occupent des positions analogues ou complémentaires, en dépit de leurs différences de forme concrète.

989. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre II. Axiomes » pp. 24-74

. — Ainsi nous comprenons sous le nom de philologues tous les grammairiens, historiens, critiques, lesquels s’occupent de la connaissance des langues et des faits (tant des faits intérieurs de l’histoire des peuples, comme lois et usages, que des faits extérieurs, comme guerres, traités de paix et d’alliance, commerce, voyages.) […] Cet axiome (avec la définition suivante) nous ouvrira une critique nouvelle relative aux auteurs des peuples, qui ont dû précéder de plus de mille ans les auteurs de livres, dont la critique s’est occupée jusqu’ici exclusivement. […] Il existe nécessairement dans la nature une langue intellectuelle commune à toutes les nations ; toutes les choses qui occupent l’activité de l’homme en société y sont uniformément comprises, mais exprimées avec autant de modifications qu’on peut considérer ces choses sous divers aspects.

990. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

Il s’occupait des choses et non des mots ; il n’avait pas la splendeur naturelle de l’élocution, et il ne la cherchait pas : il s’en tenait à ce style d’honnête homme qui ne veut que donner à la vérité un corps sans lui imposer de couronne. […] Bourdaloue fut témoin et instrument de ce retour ; il assista et prépara le héros dans les deux dernières années ; il l’entendit, à l’heure de la mort, proférer ces nobles paroles, répétées par Vauvenargues : « Oui, nous verrons Dieu comme il est, Sicuti est, facie ad faciem. » Il l’entendit exprimer cette seule crainte touchante : « Je crains que mon esprit ne s’affaiblisse, et que par là je ne sois privé de la consolation que j’aurais eue de mourir occupé de lui et m’unissant à lui. » Et lorsque Condé eut légué son cœur à la maison professe de la Société, il dut, par reconnaissance, par devoir, prononcer une seconde fois une oraison funèbre68.

991. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

La Bruyère a très finement touché ce coin singulier, et ce travers d’être en tout l’opposé du commun des mortels, dans le portrait qu’il a donné de Tréville sous le nom d’Arsène (chapitre « Des ouvrages de l’esprit ») : Arsène, du plus haut de son esprit, contemple les hommes, et, dans l’éloignement d’où il les voit, il est comme effrayé de leur petitesse : loué, exalté et porté jusqu’aux cieux par de certaines gens qui se sont promis de s’admirer réciproquement, il croit, avec quelque mérite qu’il a, posséder tout celui qu’on peut avoir, et qu’il n’aura jamais : occupé et rempli de ses sublimes idées, il se donne à peine le loisir de prononcer quelques oracles : élevé par son caractère au-dessus des jugements humains, il abandonne aux âmes communes le mérite d’une vie suivie et uniforme, et il n’est responsable de ses inconstances qu’à ce cercle d’amis qui les idolâtrent ; eux seuls savent juger, savent penser, savent écrire, doivent écrire… À l’heure dont nous parlons, Tréville n’avait point encore eu d’inconstance proprement dite, mais une simple conversion ; seulement il l’avait faite avec plus d’éclat et de singularité peut-être qu’il n’eût fallu et qu’il ne put le soutenir : il avait couru se loger avec ses amis du faubourg Saint-Jacques, il avait rompu avec tous ses autres amis ; il allait refuser de faire la campagne suivante sous les ordres de Louis XIV : « Je trouve que Tréville a eu raison de ne pas faire la campagne, écrivait un peu ironiquement Bussy : après le pas qu’il a fait du côté de la dévotion, il ne faut plus s’armer que pour les croisades. » Et il ajoutait malignement : « Je l’attends à la persévérance. » Tel était l’homme dont la retraite occupait fort alors le beau monde, lorsque Bourdaloue monta en chaire un dimanche de décembre 1671 et se mit à prêcher Sur la sévérité évangélique : il posait en principe qu’il faut être sévère, mais que la sévérité véritablement chrétienne doit consister, 1º dans un plein désintéressement, un désintéressement même spirituel et pur de toute ambition, de toute affectation même désintéressée ; — 2º qu’elle doit consister dans une sincère humilité, et 3º dans une charité patiente et compatissante.

992. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

Le défaut de Beyle comme romancier est de n’être venu à ce genre de composition que par la critique, et d’après certaines idées antérieures et préconçues ; il n’a point reçu de la nature ce talent large et fécond d’un récit dans lequel entrent à l’aise et se meuvent ensuite, selon le cours des choses, les personnages tels qu’on les a créés ; il forme ses personnages avec deux ou trois idées qu’il croit justes et surtout piquantes, et qu’il est occupé à tout moment à rappeler. […] Plusieurs écrivains dans ces derniers temps, et après M. de Balzac, se sont occupés de Beyle, de sa vie, de son caractère et de ses œuvres : M. 

993. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Instruction générale sur l’exécution du plan d’études des lycées, adressée à MM. les recteurs, par M. Fortoul, ministre de l’Instruction publique » pp. 271-288

Je sais bien que Socrate, en son temps, se détournait des sophistes, des prétendus sages qui raisonnaient à perte de vue sur le principe des choses, sur les vents, les eaux, les saisons ; Socrate avait raison de se passer de la mauvaise physique de son temps, de ses hypothèses ambitieuses et prématurées, pour ne s’occuper que de l’homme intérieur et lui prêcher le fameux « Connais-toi toi-même ». « C’est une grande simplesse, a dit Montaigne tout socratique en ce point, d’apprendre à nos enfants “Quid moveant Pisces…”, la science des astres et le mouvement de la huitième sphère, avant les leurs propres. » À cela je répondrai encore que Montaigne n’avait pas tort de préférer de beaucoup l’étude morale à celle d’une astronomie compliquée et en partie fausse. […] Pour moi, simple rapporteur et jusqu’ici très peu juge en ces matières, j’ai été amené naturellement à m’en occuper, au moment où des devoirs nouveaux m’appellent à un enseignement imprévu52.

994. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

Cela renouvelle d’ailleurs, de s’occuper de ceux qui arrivent, même quand ces jeunes gens n’ont de la jeunesse que la force et se produisent déjà très faits et très mûrs. […] Dans ces heures de solitude et de silence, sous la lampe nocturne, quel effet leur font les œuvres, souvent si incomplètes et si légères, qui occupent le monde et passionnent pour un temps la curiosité de la foule !

995. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

Mirabeau avait fort usé dans ses précédentes lettres de l’exemple et de l’autorité de M. de Saint-Georges, cet homme d’esprit et ce philosophe dont j’ai parlé, qui demeurait rue Bergère, et qui l’avait engagé à quitter le service pour se créer une existence agréable, occupée, indépendante. […] Mais lorsqu’il lui est refusé d’étendre au dehors son action, elle l’exerce en elle-même, d’une manière inconnue aux esprits faibles et légers, que l’action du corps seul occupe.

996. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

Le forgeron et sa femme, et l’un des enfants, vous regardent bien en face, mais le vieux père et un autre enfant qu’il a près de lui regardent ailleurs et ont l’air distraits ou occupés par je ne sais qui ou je ne sais quoi qui est de côté. […] Un chien et un chat occupent les deux coins opposés sur le devant : le chat près de la chaise de la grand’mère, le chien aux pieds de la jeune mère.

997. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame, secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. »

L’abbé Legendre, qui a écrit jusqu’à quatre Éloges de M. de Harlay, sans compter ce qu’il en dit dans ses Mémoires ; qui l’a loué une première fois en français, mais un peu brièvement40, une seconde fois en français encore41 et en s’attachant à ne mettre dans ce second morceau ni faits, ni pensées, ni expressions qui fussent déjà dans le premier ; qui l’a reloué une troisième fois en latin42, puis une quatrième et dernière fois en latin encore43, mais pour le coup avec toute l’ampleur d’un juste volume, Legendre a commencé ce quatrième et suprême panégyrique qui englobe et surpasse tous les précédents par un magnifique portrait de son héros ; je le traduis ; mais on ne se douterait pas à ce début qu’il s’agit d’un archevêque, on croirait plutôt qu’il va être question d’un héros de roman : « Harlay était d’une taille élevée, juste, élégante, d’une démarche aisée, le front ouvert, le visage parfaitement beau empreint de douceur et de dignité, le teint fleuri, l’œil d’un bleu clair et vif, le nez assez fort, la bouche petite, les lèvres vermeilles, les dents très bien rangées et bien conservées jusque dans sa vieillesse, la chevelure épaisse et d’un blond hardi avant qu’il eût adopté la perruque ; agréable à tous et d’une politesse accomplie, rarement chagrin dans son particulier, mangeant peu et vite ; maître de son sommeil au point de le prendre ou de l’interrompre à volonté ; d’une santé excellente et ignorant la maladie, jusqu’au jour où un médecin maladroit, voulant faire le chirurgien, lui pratiqua mal la saignée ; depuis lors, s’il voyait couler du sang, ou si un grave souci l’occupait, il était sujet à des défaillances ou pertes de connaissance, d’abord assez courtes, mais qui, peu à peu, devinrent plus longues en avançant : c’est ce mal qui, négligé et caché pendant plus de vingt ans, mais se répétant et s’aggravant avec l’âge, causa enfin sa mort. » L’explication que l’abbé Legendre essaye de donner des défaillances du prélat par suite d’une saignée mal faite est peu rationnelle : M. de Harlay était sujet à des attaques soit nerveuses, soit d’apoplexie plus probablement, dont une l’emporta. […] Jaloux néanmoins de briller et de paraître, il s’occupait fort de la prédication et d’y réussir.

998. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Oeuvres inédites de la Rochefoucauld publiées d’après les manuscrits et précédées de l’histoire de sa vie, par M. Édouard de Barthélémy. »

En nous parlant du La Rochefoucauld de la fin, de celui qui n’était plus que l’auteur des Maximes et le plus aimable homme de la société, vous dites : « Il paraît aussi désormais s’être médiocrement occupé de la politique, quoique cependant il ait encore demandé, en 1666, la place de gouverneur du Dauphin… » Mais est-ce que c’était s’occuper de politique que de désirer la charge de gouverneur du Dauphin ?

999. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

La littérature classique bien conçue n’a pas seulement à s’occuper des chefs-d’œuvre de la langue, tragédies, épopées, odes, harangues et discours, elle ne néglige pas les victoires : je veux dire les victoires illustres, celles qui font époque dans la vie des nations. […] Il fallait, pour que l’entreprise pût réussir, que le prince Eugène fût tout entier engagé et occupé autour de Landrecies, et l’originalité militaire de cette attaque sur Denain était de la faire non pas avec un détachement, mais avec le gros de l’armée française qui se déroberait de devant Eugène et lui masquerait sa marche pendant un temps suffisant.

1000. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

Introduit dans la Cour d’Apollon et trouvant tous les sièges occupés par les poëtes ses confrères, Cervantes se plaint d’être seul sans place au Parnasse ; Apollon, après quelques lieux communs de morale, lui dit : « Si tu veux pourtant mettre fin à ta plainte, te contenter et te consoler, plie en deux ton manteau et t’assieds dessus. […] Au xviie  siècle, ils étaient trop occupés à combattre l’infâme pour s’amuser à ce fou rire innocent.

1001. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

Oui, il existe, en effet, une classe bien peu nombreuse de philosophes sages, sobres, vivant de peu, sans intrigue, occupés, — comme ce Woepke mort récemment et dont M. Taine nous entretenait l’autre jour27, — occupés, dis-je, à rechercher uniquement et scrupuleusement la vérité dans de vieux livres, dans des textes ingrats ou par des expériences difficiles ; des hommes qui voués à la culture de leur entendement, se sevrant de toute autre passion, attentifs aux lois générales du monde et de l’univers, et puisque dans cet univers la nature est vivante aussi bien que l’histoire, attentifs nécessairement dès lors à écouter et à étudier dans les parties par où elle se manifeste à eux la pensée et l’âme du monde ; des hommes qui sont stoïciens par le cœur, qui cherchent à pratiquer le bien, à faire et à penser le mieux et le plus exactement qu’ils peuvent, même sans l’attrait futur d’une récompense individuelle, mais qui se trouvent satisfaits et contents de se sentir en règle avec eux-mêmes, en accord et en harmonie avec l’ordre général, comme l’a si bien exprimé le divin Marc-Aurèle en son temps et comme le sentait Spinosa aussi ; — ces hommes-là, je vous le demande (et en dehors de tout symbole particulier, de toute profession de foi philosophique), convient-il donc de les flétrir au préalable d’une appellation odieuse, de les écarter à ce titre, ou du moins de ne les tolérer que comme on tolère et l’on amnistie par grâce des errants et des coupables reconnus ; n’ont-ils pas enfin gagné chez nous leur place et leur coin au soleil ; n’ont-ils pas droit, ô généreux Éclectiques que je me plais à comparer avec eux, vous dont tout le monde sait le parfait désintéressement moral habituel et la perpétuelle grandeur d’âme sous l’œil de Dieu, d’être traités au moins sur le même pied que vous et honorés à l’égal des vôtres pour la pureté de leur doctrine, pour la droiture de leurs intentions et l’innocence de leur vie ?

1002. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

Dieu veuille qu’enfin nous puissions faire le bien dont nous sommes uniquement occupés ! […] L’empereur Léopold, prince sage, prudent, peu disposé à intervenir, très occupé à contenir les émigrés, n’était pas toujours bien au fait des dispositions de sa sœur ; il la croyait quelquefois affaiblie, découragée ; il lui écrit un jour en ce sens et lui donne le conseil de quitter la partie, d’échapper à ce rôle de victime.

1003. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les fondateurs de l’astronomie moderne, par M. Joseph Bertrand de l’académie des sciences. »

En se choisissant pour disciple un esprit de jeune femme, il s’adressait à son meilleur public, c’est-à-dire à des esprits plutôt vides et vacants que déjà occupés par d’opiniâtres erreurs ; il s’adressait à « l’esprit des ignorants qui, disait-il, étaient ses véritables marquises. » Mieux valait avoir affaire à un ignorant certes qu’à un esprit encroûté, entêté de la vieille science. […] Nous occupons une sorte de juste milieu, qui nous laisse voir de plus petits que nous, mais qui nous en montre aussi de bien plus grands, supérieurs sans doute à plus d’un autre titre encore que le poids et le volume.

1004. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre »

On a rarement plus d’esprit et plus de toutes sortes d’esprit, plus d’art et de souplesse à accommoder le sien à celui des autres, et à leur persuader, quand cela lui est bon, qu’il est pressé des mêmes désirs et des mêmes affections dont ils le sont eux-mêmes, et pour le moins aussi fortement qu’eux, et qu’il en est supérieurement occupé. […] Les projets les plus extraordinaires, tels que celui de faire de Paris une place forte, d’expulser les Jésuites, de transporter par lambeaux Versailles à Saint-Germain, l’avaient sérieusement occupé.

1005. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE DURAS » pp. 62-80

Mme de Duras fut ramenée en 1813 et comme fixée davantage à Paris par le mariage de sa fille aînée, mariage qui l’occupait beaucoup ; car elle portait l’entraînement jusque dans les maternelles tendresses. […] ne put-elle pas éprouver quelque temps avec souffrance cette impression de n’être pas à sa place, ce désaccord qui, sous différentes formes, paraît l’avoir occupée beaucoup, et qu’elle traduisit plus tard dans ses touchants écrits en un autre genre d’inégalité ?

1006. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre I. La tragédie de Jodelle à Corneille »

L’école de Ronsard a été si totalement dépourvue du sens dramatique, qu’elle ne s’est pas aperçue que pour faire une révolution au théâtre, il fallait en premier lieu occuper le théâtre. […] Le pis fut pour Corneille, que parmi les jaloux se rencontra le cardinal de Richelieu qui occupait ses loisirs à concevoir de méchantes pièces, et avait toutes les passionsmesquines d’un raté.

1007. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre III. Comédie et drame »

Chaque personnage est une formule abstraite, et ne semble occupé que de manifester sa définition ; l’ingrat dit à son valet : « Écoute, et tu verras ce que c’est qu’un ingrat ». […] Voyez ces indications scéniques d’une parodie de Vadé : « Le théâtre change et représente une veillée ou encreigne ; une vieille est occupée à filer au rouet, et s’endort de temps en temps, pendant lequel (sic) deux jeunes personnes quittent leur ouvrage pour jouer au pied de bœuf, et le reprennent quand la vieille s’éveille… Une petite fileuse se détache du groupe, et danse une fileuse, tandis que les autres exécutent tout ce qui se pratique dans une veillée de village493. » Cette mise en scène de la vie rustique n’est-elle pas caractéristique en sa minutie ?

1008. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

Il a raconté lui-même comment, dans les premiers temps de cette entreprise, occupé de rechercher les traditions déjà en partie recueillies, il se tourmentait d’une tristesse jalouse, craignant que sa vie ne fût trop courte pour une telle œuvre et que son trésor ne lui échappât. […] Roustem, déguisé en Turc, s’introduit dans un château qu’occupe l’ennemi, pour juger de tout par lui-même.

1009. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

Giraud sur Étienne Pasquier, et quelques pages aussi élevées que judicieuses de M. le chancelier, accompagnèrent cette publication, qui offre un intérêt sérieux pour ceux même qui ne s’occupent point particulièrement du droit. […] Au retour, il débuta comme avocat au barreau de Paris (1549), et en même temps, pour occuper ses loisirs, il se livra à la poésie, à la composition littéraire, caractère qui distingue sa génération d’avocats, et Pasquier entre tous les autres : « Lorsque j’arrivai au Palais, dit-il, ne trouvant qui me mît en besogne, et n’étant né pour être oiseux, je me mis à faire des livres, mais livres conformes à mon âge et à l’honnête liberté que je portois sur le front : ce furent des Dialogues de l’amour… » Les dialogues galants et amoureux, les sonnets qu’Étienne Pasquier publia dans ces années de jeunesse, et auxquels il se reportait avec complaisance et sourire en vieillissant, ne prouvent rien autre chose que de l’esprit, de la facilité, de la subtilité ingénieuse, et on n’y trouve d’ailleurs aucun trait original qui puisse assigner rang à leur auteur parmi les vrais poètes.

1010. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

Ô vous tous qui vous occupez si méritoirement de lui, mais qui ne prétendez point vous l’approprier, je pense, au nom de celui que vous aimez et que nous aimons tous aussi à plus ou moins de titres, n’ayez jamais, je vous prie, de ces mots-là, qui sentent la confrérie et la secte, l’érudition pédantesque et le caquet scolastique, les choses qui lui répugnaient le plus. […] Quelque temps conseiller au parlement de Bordeaux, Montaigne se retira avant quarante ans du train des affaires et de l’ambition pour vivre chez lui, dans sa tour de Montaigne, jouissant de lui-même et de son esprit, adonné à ses observations, à ses pensées et à cette paresse occupée dont nous savons jusqu’aux moindres jeux et aux fantaisies.

1011. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — I. » pp. 401-420

Trouvant de la résistance à son rappel dans l’esprit de son petit-fils et de la jeune reine, il leur écrivit en père et en roi : Vous me demandez mes conseils, disait-il à Philippe V (20 août 1704), je vous écris ce que je pense ; mais les meilleurs deviennent inutiles, lorsqu’on attend à les demander et à les suivre que le mal soit arrivé… Vous avez donné jusqu’à présent votre confiance à des gens incapables ou intéressés… (Et parlant du rappel d’Orry et d’un autre agent :) Il semble cependant que l’intérêt de ces particuliers vous occupe tout entier, et, dans le temps que vous ne le devriez être que de grandes vues, vous le rabaissez aux cabales de la princesse des Ursins, dont on ne cesse de me fatiguer. […] À propos d’une prétention élevée par les grands contre les capitaines des gardes, elle veut qu’on achève de briser cette cabale des grands qui profitent de la faiblesse d’un nouveau régime pour se créer des titres et des prérogatives : autrement ce serait le moyen de retomber en Espagne dans les mêmes embarras où l’on était sous la Fronde, « du temps que les Français n’étaient occupés qu’à se contrarier ».

1012. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

Mais que l’on ne puisse jamais espérer de plaire et de mériter la moindre part dans l’amitié de quelqu’un à qui vous êtes attaché uniquement, que vous servez avec dévouement, auprès duquel vous passez votre vie entière dans un abandon total de vous-même, et occupé jour et nuit de ce qui peut lui être plus agréable ; en vérité, c’est un état trop douloureux pour les gens qui ont le malheur d’avoir le cœur sensible. […] En suis-je devenu plus sage et plus occupé des choses permanentes, exemptes de vicissitudes ?

1013. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

« Le public a beaucoup ri de cet esclandre, nous dit un témoin judicieux : on s’en est plus occupé que d’une bataille ou d’un traité de paix. » Pourtant, quand on vit le prisonnier sortir après cinq ou six jours sans qu’on articulât aucune cause précise à cet acte de rigueur qui touchait à l’ignominie, on se retourna sur ceux qui l’avaient ordonné. […] « Ce qui m’anime en tout objet, dit Beaumarchais, c’est l’utilité générale. » — « À chaque événement important, disait-il encore, la première idée qui m’occupe est de chercher sous quel rapport on pourrait le tourner au plus grand bien de mon pays. » Dans le courant de la guerre d’Amérique, il conçut plus d’une fois de telles idées et les mit en circulation avec bonheur ; comme, par exemple, le jour (1779) où, pour relever le courage des négociants et armateurs, il proposa au ministre de déclarer les protestants désormais admissibles dans les chambres de commerce, d’où ils étaient jusqu’alors exclus ; ou comme ce jour encore où, après la défaite navale de M. de Grasse (1782), il eut l’idée que chaque grande ville offrît au roi un vaisseau de ligne, portant le nom de la cité qui lui en ferait hommage.

1014. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

Il épousa, en 1792, âgé déjà de cinquante-cinq ans, une jeune personne de vingt-deux, Mlle Félicité Didot, et, dans sa correspondance avec elle, on ne le voit occupé que de réaliser, comme toujours, son idée d’une île champêtre et d’une chaumière. […] Trois réponses à faire à trois candidats, des regrets à donner à ceux dont ils occupaient les places, lui fournissaient des idées nombreuses et variées, des images brillantes ou aimables comme les talents qu’il avait à célébrer… Il a loué les trois récipiendaires et leurs trois prédécesseurs, mais il ne s’est pas assez arrêté sur leur éloge, et l’on peut dire qu’il les a traités comme Pindare (lisez Simonide) traitait les héros des jeux Olympiques, dont sa muse se contentait de dire un mot, pour parler ensuite de Castor et Pollux.

1015. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

S’il m’est permis de parler pour moi-même, Boileau est un des hommes qui m’ont le plus occupé depuis que je fais de la critique, et avec qui j’ai le plus vécu en idée. […] On peut distinguer trois périodes dans la carrière poétique de Boileau : la première, qui s’étend jusqu’en 1667 à peu près, est celle du satirique pur, du jeune homme audacieux, chagrin, un peu étroit de vues, échappé du greffe et encore voisin de la basoche, occupé à rimer et à railler les sots rimeurs, à leur faire des niches dans ses hémistiches, et aussi à peindre avec relief et précision les ridicules extérieurs du quartier, à nommer bien haut les masques de sa connaissance : J’appelle un chat un chat, et Rolet un fripon.

1016. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Au milieu des changements merveilleux qui s’accomplissent et qui inaugurent de toutes parts une ère de paix et de régularité, la littérature ne saurait souffrir : pour peu qu’elle se ressemble à elle-même et à ce qu’elle a été dans les beaux temps, elle aime l’ordre, le travail, une société plus active qu’orageuse, assise et florissante, et qui n’est plus uniquement occupée chaque jour à s’empêcher de périr. […] Lorsque, arrivé à l’âge de soixante-dix ans, on lui conseilla de ne plus différer de publier son Jeune Anacharsis, l’ouvrage de toute sa vie, il hésita longtemps, et, lorsqu’il se décida enfin à le laisser paraître, en décembre 1788, c’est-à-dire à la veille des États généraux, son espoir était que l’attention publique, occupée ailleurs, ne se porterait que peu à peu et insensiblement sur le livre, et qu’il n’y aurait lieu ainsi ni à un succès ni à une chute : « Je voulais, dit-il, qu’il se glissât en silence dans le monde. » En tout ce qui précède, je n’ai voulu présenter l’abbé Barthélemy que dans l’ensemble de son existence et dans la distinction tempérée de son caractère : il nous en sera plus facile de parler de l’ouvrage même.

1017. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

En ce temps de centralisation, quand les derniers rameaux de pouvoir féodal qui gênaient les belles allées du pouvoir royal furent ébranchés, en ce temps de Le Nôtre, il fallut, pour toutes choses, un jardinier aux plans rectilignes ; on ne s’occupa nullement, pour donner l’apparat et la noblesse au vers français (cette noblesse, chape de plomb, manteau lourd et sans forme aux épaules de la Muse) que la règle fût juste ; on la rechercha suffisante mais surtout uniforme et majestueuse ; il y eut une flexion sur un jarret pendant un pas majestueux : l’hémistiche ; et cette règle de Boileau est antipoétique, parce qu’elle ne naît pas des besoins du poème, qu’elle découle, fausse, d’une visée sociale. […] De très habiles dissonances sur la métrique ancienne donnaient l’apparence qu’un instrument nouveau chantait, mais apparence illusoire ; c’était, avec bien du charme et de la ductilité en plus, avec un sens très critique, l’ancienne rythmique : je dis bien rythmique et non poésie, car je m’occupe ici de la forme et non de la gamme toute neuve d’idées qui frissonnait en ces deux poètes.

1018. (1767) Salon de 1767 « Adressé à mon ami Mr Grimm » pp. 52-65

Voici comment raisonnent la plupart des hommes opulents qui occupent les grands artistes : la somme que je vais mettre en dessins de Boucher, en tableaux de Vernet, de Casanove, de Loutherbourg, est placée au plus haut intérêt. […] Convenez qu’il parlait en grand artiste et en homme de sens, ce Vernet, lorsqu’il disait aux élèves de l’école occupés de la caricature oui, ces plis sont grands, larges et beaux ; mais songez que vous ne les reverrez plus.

1019. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Une armée française, ayant à sa tête un prince d’une vertu et d’une bravoure à toute épreuve, franchit les Pyrénées, traverse, occupe, en triomphant, l’Espagne entière, et va briser les fers d’un roi captif d’une faction. […] L’histoire et le jugement de la première doivent précéder l’histoire et l’examen de la seconde, la seule qui nous intéresse véritablement, et dont il soit convenable de nous occuper ici.

1020. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

« Il avait, dit-il lui-même, une pente naturelle vers les choses d’observation intérieure »… Il suivait « une lumière intérieure, un esprit de vérité qui luit dans les profondeurs de l’âme et dirige l’homme méditatif appelé à visiter ces galeries souterraines… Cette lumière n’est pas faite pour le monde, car elle n’est appropriée ni au sens externe ni à l’imagination ; elle s’éclipse ou s’éteint même tout à fait devant cette autre espèce de clarté des sensations et des images ; clarté vive et souvent trompeuse qui s’évanouit à son tour en présence de l’esprit de vérité. » Ainsi occupé, et ses regards concentrés sur lui-même, il avait fini, comme les philosophes indiens, par isoler et constituer à part, du moins à ses propres yeux, son être intérieur et sa volonté active. […] Il a vu la monade spirituelle appliquée sur le muscle et occupée à le contracter.

1021. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XV. »

Quelques siècles auparavant, Pindare avait dit de Pélée : « Il a vu le cercle magnifique180 où s’étaient assis les rois du ciel et de la mer, faisant apparaître les dons et la puissance qu’ils destinaient à sa race. » Depuis lors, cette image des noces de Thétis et de Pélée avait souvent occupé la peinture comme la poésie : c’était un des thèmes favoris de l’art grec, aussi familier que le voyage des Argonautes, la vengeance de Médée, ou l’abandon d’Ariane. […] Concevrait-on autrement que la fable si poétique d’Ariane n’occupe qu’un coin du tableau, et figure dans le récit comme une légende retracée sur les tapisseries qui paraient la salle de noces des deux époux ?

1022. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

mais songez donc à tout ce qu’elle occupe, à tout ce qu’elle produit ! […] À son lit de mort, cette pauvre jeune fille s’occupait encore du vain bruit qu’elle avait pu faire. […] avant que le roi et les ministres de la révolution de Juillet puissent s’occuper de l’œuvre des poètes. […] » Heureuse vie en fin de compte, occupée à des riens qui représentent volontiers de grosses affaires ! […] Il n’est occupé que des siens dans cette biographie, écrite à la fin de sa journée.

1023. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [M. de Latena, Étude de l’homme.] » pp. 523-526

Les premières parties de son livre sont entièrement philosophiques et métaphysiques : l’auteur s’occupe de Dieu, de la Création, de l’immortalité de l’âme, etc.

1024. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « SUR ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 497-504

Hors de là, vers les rives, aux endroits plus calmes et sur une surface assez immobile ou animée de contre-courants peu rapides, il y avait des raisonneurs qui expliquaient aux autres le spectacle, et pourquoi cela était ainsi de toute nécessité, et pourquoi cela devait être toujours ; il y avait, rangés derrière deux ou trois grands noms, sur les traces de Lamartine, harmonieusement ravi en ses tendresses sublimes, sur les pas de Victor Hugo, de plus en plus occupé à ses chauds horizons, et à portée de voix de quelques autres, il y avait des peintres de vieilles ruines, qui étudiaient les débris gothiques le long des bords, des psychologues qui se miraient au sein des eaux, des nacelles de rêveurs dont le front regardait perpétuellement le ciel, des essais de colonie littéraire et d’abri poétique autour d’agréables îles et dans les Délos nées d’hier.

1025. (1874) Premiers lundis. Tome II « Deux préfaces »

— « Mais à quoi bon s’occuper tant des détails, des minuties de l’individu ?

1026. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Une âme en péril »

On ne pensait plus guère à ses maximes limousines ; et si l’on s’occupe encore de lui, vous verrez que ce sera pour lui dire des choses désagréables.

1027. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Rêveries sur un empereur »

Depuis qu’il est sur le trône, nous nous sommes plus passionnément occupés de lui que de nos cabotins les plus illustres.

1028. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Les derniers rois »

Il me plaisait davantage de faire de longs séjours à Paris, dans cette capitale des sciences et des arts, où la vie est si douce et si noblement occupée, et où j’ai des amis excellents.

1029. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Pour encourager les riches. » pp. 168-175

On est tenté de croire que ce prélèvement, ou plutôt cette extraction est moins dure quand elle se pratique sur de l’argent qu’on a reçu sans peiner et sur un superflu énorme, un superflu de cent ou de cent cinquante millions, comme dans le cas qui nous occupe… Eh bien, c’est peut-être une erreur.

1030. (1887) Discours et conférences « Discours à l’Association des étudiants »

Les cases du cerveau occupées par un travail laissent des vides, qui sont avantageusement remplis par un autre travail.

1031. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 439-450

Mais, tourmenté par un amour-propre excessif, inquiet, & jaloux, il s’est malheureusement plus occupé de lui-même que du Public ; & se mettant au dessus de toutes les bienséances, pour jouir de sa philautie, il s’est tout à fait livré à son caractere.

1032. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Addisson, et Pope. » pp. 17-27

Quel homme que celui dont le caractère est une contradiction honteuse, une vile antithèse, animal équivoque, ayant, en même temps, la tête occupée de riens & le cœur rempli de crimes. » Si Pope eût voulu mépriser d’indignes ennemis & leurs cris impuissans, il se fût épargné bien des chagrins.

1033. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Avertissement » pp. -

C’est pourquoi je ne me suis occupé des autres influences qu’autant que la succession des époques ne s’expliquait pas assez clairement par cette influence des œuvres sur les œuvres.

1034. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Léon Feugère ; Ambroise-Firmin Didot »

Henri Estienne et sa famille y occupent la place qui leur est due, et Didot a même poussé le soin du biographe jusqu’à joindre à la notice consacrée à ces célèbres imprimeurs un curieux tableau généalogique de leur race, originaire de Provence, lequel tableau s’ouvre, en 1270, à Pierre Estienne, premier du nom, seigneur de Lambesc, et se ferme, en 1806, à Paul II Étienne, directeur des presses mécaniques chez l’auteur de récrit que nous annonçons.

1035. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Auguste Nicolas »

La publication du livre d’Auguste Nicolas : Du Protestantisme et de toutes les hérésies dans leur rapport avec le Socialisme 7, est bien loin d’avoir épuisé l’attention que la Critique, qui commence à s’en occuper, doit à son livre et à son auteur.

1036. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXII. Des éloges des hommes illustres du dix-septième siècle, par Charles Perrault. »

Quoi qu’il en soit, Charles Perrault était lié avec un parent de Colbert, qui avait occupé plusieurs places importantes, mais dont les places ne faisaient pas tout le mérite : il avait encore celui d’aimer les arts avec passion, de s’intéresser à leurs progrès, comme un courtisan s’intéresse à sa fortune ; et surtout il avait l’enthousiasme de son siècle et de sa nation.

1037. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Cela occupait leurs mâchoires, leur donnait l’illusion qu’ils mangeaient. […] Mais Paulette est trop jolie, trop adulée, trop uniquement occupée de ses succès pour avoir le temps de songer à son intérieur. […] Elle avait des gants noirs montant jusqu’au coude, et occupait une loge de face au théâtre des Variétés. […] Il cueille des bouquets dans le dos, près du cou, autour de la taille, pendant que le général, à genoux, s’occupe délicatement de la jupe. […] La personne qui a eu la plus grande influence sur ma vie, je veux dire ma sœur Henriette, n’y occupe presque aucune place.

1038. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome II

Cette invention appartient cependant au judicieux Racine, qui, uniquement occupé de l’action principale de sa tragédie, aura sans doute négligé ces accessoires. […] Il avait alors onze ou douze ans : on s’occupa de la culture de son esprit, et on lui donna pour précepteur Sénèque, le plus grand philosophe et le plus joli écrivain du siècle. […] Pendant qu’il s’occupait de la cithare et du chant, son affranchi Hélius lui écrivit que les affaires de l’empire demandaient à Rome sa présence. […] un héros qui ne s’occupe pas d’amour et de mariage, au moment où il faut partir pour la guerre ! […] Il n’est que secondaire chez Euripide ; Phèdre se donne la mort vers le troisième acte, et ce n’est plus elle, c’est son cadavre qui occupe la scène et joue un grand rôle dans le reste de la pièce.

1039. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

La terre qui occupait l’espace où s’est creusé l’abîme, est poussée au-dehors, vers l’hémisphère austral, que l’on se figurait alors couvert d’eau ; elle y forme, au sein de la mer du Sud, une montagne isolée. […] Mais, dans le nord, en Lombardie, et même en Toscane, on ne s’en occupait guère. […] Et j’ai peur maintenant d’avoir occupé bien mal cette chaire dantesque, à laquelle votre amitié m’élève. […] Tout récemment, en Italie, on s’entretenait encore de la docte Mme Tambroni, qui, en 1817, à Bologne, occupait la chaire de lettres grecques. […] À toutes les époques de sa carrière, en effet, au plus fort de la dissipation ou d’une activité qui semble uniquement occupée aux choses terrestres, nous verrons Gœthe revenir à la contemplation des choses divines.

1040. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

Un tel acteur, si toutefois un tel acteur a jamais existé, est indigne d’occuper la poésie. […] Dès que la pierre occupe la scène, dès que l’homme n’est plus qu’un point, il s’opère dans la langue un renversement de même nature. […] L’histoire, en effet, qu’elle s’occupe d’Aristophane ou d’Homère, n’est qu’un pur accident, tandis que les théories de M.  […] Qui saura, dans dix ans, le nom de tous ces livres qui meurent sans avoir vécu, dont la mort est juste pourtant, qui ne pouvaient pas vivre, et qui servent à occuper l’ennui et l’oisiveté ? […] La critique n’a pas à s’occuper d’eux, puisque depuis longtemps, ils ont renoncé à s’occuper de littérature.

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