/ 2115
1013. (1888) La critique scientifique « La critique et l’histoire »

Dans chacun de ces couples, les deux éléments sont importants, nécessaires absolument tous deux à accomplissement ; ils sont unis et indissolubles en vertu d’un lien qui va du premier au second et qui constitue l’énergie même de ce couple dont les éléments séparés resteraient impuissants, dont le premier seul a une existence autonome mais inactive. […] Le principe de l’art pour l’art fondé en raison à juste et utile, tant qu’on ne considère que les œuvres en soi, tant qu’on n’a souci que de la liberté et de l’orgueil nécessaires à l’artiste, — peut sembler absurde et dangereux quand on songe que les livres, les statues, les tableaux et les musiques n’existent pas seuls dans un monde vide.

1014. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre I. La critique » pp. 45-80

Le critique qui, par définition doit être un esprit clair, méthodique, ami des dissociations d’idées, partisan de la différenciation, oublie, tout comme les autres, les limites propres au genre qu’il a choisi : 2º Accablé par la quantité d’œuvres qu’il doit examiner, il n’a plus la lucidité nécessaire, le temps et la place de développer ses idées, d’examiner l’ensemble d’un roman ou d’une comédie. […] Pour arriver à comprendre ainsi les œuvres et en jouir, une patiente et complète éducation artistique était nécessaire.

1015. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

La succession du temps lui était moins nécessaire, parce que chaque expression avait un sens plus vaste et plus profond. […] Non, sans doute ; ainsi que nous l’avons déjà dit, ils furent guidés par un plus noble sentiment, celui de commander le respect pour la loi ; d’en interdire l’examen indiscret ; de la transmettre par la parole parlée, sainte et mystérieuse ; d’en confier le dépôt directement à l’âme ; de ne point en enfermer le vaste sens dans les limites d’une expression matérielle : ils voulurent se réserver de celer au profane vulgaire les choses qu’il doit ignorer, et de mesurer l’instruction selon les castes et les tribus ; car les castes et les tribus, conservatrices des traditions, furent une institution nécessaire des premiers âges des sociétés humaines.

1016. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution française »

Et d’abord, pour procéder régulièrement à l’immolation définitive du préjugé révolutionnaire, Cassagnac commence son histoire par se demander si la Révolution a été la conséquence nécessaire de principes existant bien longtemps avant elle dans la pensée de l’humanité. […] Après ses causes, il dit ses hommes, c’est-à-dire ses causes encore, puisqu’elle n’est plus nécessaire, providentielle, inévitable.

1017. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « X. M. Nettement » pp. 239-265

Travail nécessaire, qui aurait été curieux, attendu que, jusqu’ici, il n’a été fait encore par personne appartenant à l’opinion religieuse de M.  […] Au lieu de se préoccuper de cette théorie nécessaire, seule introduction qui convenait à son histoire, M. 

1018. (1902) La formation du style par l’assimilation des auteurs

Mais, s’il est nécessaire à priori, n’oublions pas qu’à son tour la lecture le crée, l’augmente, le transforme. […] Il est nécessaire de connaître l’art sous tous ses aspects, pour échapper aux théories exclusives et aux préjugés d’école. […] En tout cas, il est toujours nécessaire de relire. […] L’expérience de la vie est nécessaire pour les goûter. […] faut-il abdiquer mon autorité lorsqu’elle m’est le plus nécessaire ?

1019. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Réception du père Lacordaire » pp. 122-129

Guizot dans les différences naturelles et nécessaires qu’il a reconnues entre la société américaine et la nôtre. — Un piquant parallèle, et tout à fait académique, entre M. de Tocqueville et son successeur, et l’accord, l’harmonie finale de leurs deux esprits, résultant du contraste même de leurs vocations et de leurs destinées, cette vue ingénieuse semblait terminer à souhait un discours constamment applaudi.

1020. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Mignet : Histoire de la Révolution française, depuis 1789 jusqu’en 1814. 3e édition. »

En multipliant suffisamment de pareils accidents, et j’en ai le droit, puisqu’ils n’impliquent contradiction ni avec les causes qui ont amené la Révolution ni avec les passions qu’elle a soulevées, seules forces dont vous semblez tenir compte, il ne me serait pas difficile de concevoir une issue tout opposée à celle que vous présentez comme nécessaire.

1021. (1874) Premiers lundis. Tome II « La Revue encyclopédique. Publiée par MM. H. Carnot et P. Leroux »

Nous n’avons rien ici à objecter à ces doctrines inégalement évidentes pour nous, sinon cette inégalité même et les rapports peu nécessaires, à ce qu’il semble, qu’elles ont réciproquement entre elles : on s’en aperçoit à l’espèce de fatigue qu’éprouvent par moments les écrivains à les préciser et à les lier.

1022. (1874) Premiers lundis. Tome II « Charles de Bernard. Le nœud Gordien. — Gerfaut. »

Dans la Femme de quarante ans, par exemple, il est peu nécessaire, pour nous égayer, de comparer une grosse dame, en robe blanche et en cachemire vert, qui exhale force odeurs, à une espèce de botte d’asperges au musc.

1023. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre IX. De l’esprit général de la littérature chez les modernes » pp. 215-227

Les anciens savaient animer les arguments nécessaires à chaque circonstance ; mais de nos jours les esprits sont tellement blasés, par la succession des siècles, sur les intérêts individuels des hommes, et peut-être même sur les intérêts instantanés des nations, que l’écrivain éloquent a besoin de remonter toujours plus haut, pour atteindre à la source des affections communes à tous les mortels.

1024. (1897) La crise littéraire et le naturisme (article de La Plume) pp. 206-208

Je présume qu’il serait nécessaire de s’expliquer.

1025. (1887) Discours et conférences « Discours lors de la distribution des prix du lycée Louis-le-Grand »

Le sens de cette fête annuelle des bonnes études vient d’ailleurs de vous être indiqué d’une façon si judicieuse, qu’à peine est-il nécessaire d’ajouter quelques mots.

1026. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre V : Rapports du physique et du moral. »

De là il déduit le nombre probable des éléments nerveux — cellules et fibres — nécessaires pour acquérir et conserver tel ou tel ordre de connaissance (mathématiques, musique, langues, etc.), et il montre comment ces diverses acquisitions se limitent réciproquement.

1027. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Han d’Islande » (1823-1833) — Préface d’avril 1823 »

On a affirmé à l’auteur de cet ouvrage qu’il était absolument nécessaire de consacrer spécialement quelques lignes d’avertissement, de préface, ou d’introduction à cette seconde édition.

1028. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préfaces de « Marion de Lorme » (1831-1873) »

Il serait facile de démontrer que cette grande secousse d’affranchissement et d’émancipation n’a pas été nuisible à l’art, mais qu’elle lui a été utile ; qu’elle ne lui a pas été utile, mais qu’elle lui a été nécessaire.

1029. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Tout ce que j’ai compris de ma vie du clair-obscur » pp. 26-33

Qui est-ce qui observe, qui est-ce qui connaît, qui est-ce qui exécute, qui est-ce qui fond tous ces effets ensemble, qui est-ce qui en connaît le résultat nécessaire ?

1030. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre XI. Première partie. Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère des idées religieuses » pp. 315-325

Je ne sais si je me trompe, mais il me semblé qu’il était bien nécessaire qu’il restât un dernier asile à la parole, pour que sa force vivifiante renouvelât continuellement la génération des idées.

1031. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Jules Vallès » pp. 259-268

Pour cela, il est nécessaire de connaître la vie de Paris, les bouges de Paris, et surtout la littérature de Paris ; car, ne vous y trompez pas !

1032. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Proudhon et Couture »

Comme la révolution sociale, dont Proudhon s’est fait le prophète, elle est, par un de ses côtés, humanitaire, métaphysique et inutile ; mais, par l’autre, elle est politique, nationale, nécessaire.

1033. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Belmontet »

Qu’il nous permette de le lui dire : quand on n’est pas le vieux Michel-Ange, qui attaquait le marbre avec cette furie de génie tout-puissant qui s’arrêtait, comme par un charme, dans la plus moelleuse et la plus délicate justesse, il faut savoir revenir plusieurs fois sur la forme extérieure de sa pensée pour lui donner ce fondu et cette harmonie nécessaires autant à la poésie qui s’écrit qu’à la poésie qui se sculpte.

1034. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VII. D’Isocrate et de ses éloges. »

Sans cesse il y compare Lacédémone et sa patrie ; il n’est pas nécessaire de dire à qui il donne la préférence : l’âme de l’orateur n’était pas susceptible d’enthousiasme pour Sparte.

1035. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Je ne l’ai point signée ; mais si vous jugiez nécessaire que M.  […] Autant la connaissance de soi-même est le point d’appui nécessaire de toute régénération, autant peut-être cette minutieuse observation rend cette même œuvre difficile. […] Il faut protester, cela est bon et nécessaire, mais il ne faut pas protester indistinctement contre tout ; il faut se séparer du mal, mais il ne faut pas se séparer du bien. […] Un peu de préparation est peut-être nécessaire. […] Il n’est composé que de parties nécessaires ; tout ce qu’il enseigne lui est essentiel ; un de ses éléments n’existe point sans l’autre, un seul ne périt point sans que tous les autres ne suivent sa fortune ; la vie est tout entière partout, comme en un corps qui serait tout cœur ; et quelque part aussi que ce corps soit blessé, la mort s’ensuit.

1036. (1903) Propos de théâtre. Première série

D’Homère à nous il n’y a pas le temps nécessaire pour une évolution considérable. […] Jusserand a évidemment envie d’écrire ce second volume suffisant et nécessaire. […] Et, dans le second, la plus belle et nécessaire partie de la tragédie pourra suivre le fait. […] Et elle arrive enfin cette entrevue redoutée et nécessaire. […] Le rôle du général d’Athalie séduit par Joad était nécessaire.

1037. (1932) Les idées politiques de la France

Ajoutons une mystique de l’opposition naturelle et nécessaire des gros et des petits (on a dit d’abord les blancs, puis les réactionnaires, on dit plutôt aujourd’hui les gros). […] Or il semble qu’aujourd’hui cette vieille césure soit devenue accessoire, mécanique, ronronnante, et que la vraie césure, l’intérieure, l’organique, soit celle qui sépare le national et l’international, l’intérêt français et l’intérêt humain, la préparation à une guerre possible ou la préparation d’une paix nécessaire. […] L’école unique, grande pensée d’en haut, il semble qu’elle soit plus nécessaire à la vie normale du parti radical qu’à la vie normale du pays radical. […] Contrepoids d’autant plus nécessaire que la France est le seul pays où (sauf Allemane) les chefs socialistes parlementaires ne se soient recrutés que parmi les professeurs, les hommes de lettres et les avocats. […] Tandis que chacune de ces idées se dresse de l’intérieur dans son exigence et son monopole, l’esprit libéral, nécessaire au critique politique, la prend et la comprend du dehors dans la société réelle qu’elle forme avec les autres.

1038. (1860) Cours familier de littérature. IX « Le entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier (2e partie) » pp. 81-159

Elle ne sauve que le nécessaire le plus strict à une obscure existence. […] Il était un de ces hommes qu’on ne pouvait voir que vêtus ; la toilette était nécessaire à son génie ; aussi la draperie est-elle le défaut de son style, jamais le nu. […] Le fer de la liberté n’est pas un poignard, c’est une épée ; les vertus militaires qui oppriment souvent la liberté sont pourtant nécessaires pour la défendre, et il n’y a qu’unbéat comme Benjamin Constant et un fou comme le noble pair qui ouvre votre porte (le marquis de Catellan) qui auraient pu compter sur les exploits du polichinelle lacédémonien… etc.

1039. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

C’est le meilleur parti qu’elle puisse prendre, car elle vivra plus aisément sans moi, qui lui suis à charge, attendu que j’ai été accoutumé toute ma vie à l’aisance, et que je ne puis m’astreindre aussi rigoureusement qu’il le faudrait à la parcimonie nécessaire. » XI N’est-ce pas un jeu bien ironique du destin que de voir le premier homme d’État et le premier écrivain de l’univers aspirer, pour gagner son pain, à apprendre à lire aux enfants des paysans dans un village privé de maître d’école ! […] » XV Dans un chapitre qui semble écrit par Bossuet, Machiavel démontre, par les exemples de Moïse, de Cyrus, de Romulus, de Thésée et d’autres fondateurs de dynastie, que plus ils sont partis d’en bas, plus ils ont dû tout à leur mérite, plus ils ont pu s’affermir dans leur élévation ; mais que sans la fortune, qui n’est que la prédisposition du peuple, et sans l’occasion, qui est la condition nécessaire et divine de toute grandeur, ils n’auraient pu que rêver leur ambition, jamais l’accomplir. […] Quiconque, dans une souveraineté nouvelle, jugera qu’il lui est nécessaire de se garantir de ses ennemis, de se faire des amis, de réussir par force ou par ruse, de se faire aimer ou craindre des peuples, suivre et respecter par les soldats, de détruire ceux qui peuvent lui nuire, de remplacer les anciennes institutions par de nouvelles, d’être à la fois sévère et gracieux, magnanime et libéral ; celui-là, dis-je, ne peut trouver des exemples plus récents que ceux de César Borgia. » Était-ce là, aux yeux de Machiavel, de l’histoire ou des principes ?

1040. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

« Ce que je sais, c’est que le concours le plus extraordinaire de circonstances favorables, et, en quelque sorte, la plus admirable conjonction d’étoiles propices, était nécessaire pour créer, sous sa constellation passagère, la fécondité merveilleuse et la prodigieuse beauté de ces grands siècles de l’art. […] Ce n’est plus ainsi ; voilà pourquoi la démocratie, nécessaire en droit, semble impossible encore en fait dans les grandes populations modernes. […] LIX À mesure que l’homme vieillit, il perd la sève, la verve, le désintéressement nécessaire pour les arts.

1041. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIe entretien. Le Lépreux de la cité d’Aoste, par M. Xavier de Maistre » pp. 5-79

Dans le même temps on m’en tendit un d’une espèce plus dangereuse, auquel j’échappai, mais qui lui fit sentir que les dangers qui me menaçaient sans cesse rendaient nécessaires tous les préservatifs qu’elle y pouvait apporter. […] L’hôpital de Saint-Maurice fut chargé de pourvoir à sa subsistance, et on lui fournit quelques meubles, ainsi que les instruments nécessaires pour cultiver un jardin. […] Je vais partir ; nous ne nous reverrons peut-être pas de bien longtemps : ne pourrions-nous pas, avec les précautions nécessaires, nous écrire quelquefois ?

1042. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

Il définit ainsi la loi : « Les lois, dans la signification la plus étendue, sont les rapports nécessaires qui dérivent de la nature des choses ; et dans ce sens, tous les êtres ont leurs lois. […] Considérés comme habitants d’une si grande planète qu’il est nécessaire qu’il y ait différents peuples, ils ont des lois dans le rapport que ces peuples ont entre eux ; et c’est le droit des gens. […] Pour lors, l’abattement passera à l’esprit même ; aucune curiosité, aucune noble entreprise, aucun sentiment généreux ; les inclinations y seront toutes passives ; la paresse y fera le bonheur ; la plupart des châtiments y seront moins difficiles à soutenir que l’action de l’âme, et la servitude moins insupportable que la force d’esprit, qui est nécessaire pour se conduire soi-même.

1043. (1856) Cours familier de littérature. II « XIe entretien. Job lu dans le désert » pp. 329-408

dans quel état de frissonnement, de terreur et d’horreur, reviendra-t-elle se réfugier dans le sein d’où elle sera partie, après ce voyage à travers le doute sur la première des certitudes nécessaires à l’homme, la certitude de son Dieu ? […] J’ai toujours été convaincu que changer d’air c’était changer d’âme ; que changer de point de vue, du moins, c’était changer d’aspect dans la contemplation et dans l’appréciation des choses ; que l’espace était nécessaire à la pensée comme aux yeux. […] Le mouvement, dans une certaine proportion, est aussi nécessaire à l’intelligence que l’air.

1044. (1914) Boulevard et coulisses

Je ne vous donne pas un rapport entre le Chat Noir et Claude Bernard comme absolument nécessaire. […] C’est Octave Mirbeau qui avait trouvé la petite somme d’argent nécessaire à cette entreprise. […] Observons immédiatement que la formule « art dramatique » ne nous est pas nécessaire pour poursuivre l’entretien.

1045. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre X : De la succession géologique des êtres organisés »

Chacun de ces faits s’accorde parfaitement avec ma théorie ; car je n’admets l’existence d’aucune loi fixe et nécessaire, obligeant tous les habitants d’une contrée à se transformer à la fois, également et brusquement. […] Il ne faudrait cependant pas considérer le principe général de la divergence des caractères comme une loi nécessaire ; il n’a de valeur qu’autant que les descendants modifiés d’une espèce deviennent ainsi plus capables de s’emparer de stations plus différentes et plus nombreuses dans l’économie de la nature. […] Ils sont, par ce fait, et autant qu’il a été nécessaire à leur victoire, plus élevés dans l’échelle de la nature, et généralement d’une organisation plus spécialisée.

1046. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

Rappelons d’abord la fable, cela est nécessaire. […] Elle enflamme le génie, elle élève le cœur, elle est nécessaire à l’ami des Muses comme l’air qu’il respire. […] Il se croyait l’homme nécessaire. […] La Restauration était nécessaire, mais elle n’avait pas été souhaitée. […] Il fait très bien tout le nécessaire pour entretenir sa popularité.

1047. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

J’aimais mieux être seul et attristé sur mon banc désert, que de m’enrôler sous ce drapeau bigarré de jacobinisme menaçant et de légitimité mécontente pour harceler un gouvernement antipathique mais nécessaire. […] J’avais le pressentiment que l’heure si lente à couler sonnerait enfin, et que les vices d’origine de la monarchie d’Orléans amèneraient tôt ou tard une de ces crises où les hommes de réserve qui ne sont rien la veille deviennent les hommes nécessaires du lendemain. […] Ce qu’il suffit de savoir, c’est qu’elle fut pressante jusqu’au pathétique du côté du roi ; loyale, respectueuse, mais inflexible de mon côté ; qu’il me déroula pendant trois heures les circonstances atténuantes de son acceptation de la couronne en 1830 ; les concessions nécessaires à l’opinion qui l’avaient forcé de se jeter entre les mains de tels ou tels ministres, nécessités désagréables pour l’homme, indispensables pour la couronne ; les divisions d’amour-propre qui décomposaient ses ministères, la pression contraire de ces ministres ambitieux sur son gouvernement, l’inconciliabilité de leurs prétentions dans les conseils, le danger de leurs brigues dans les chambres, le danger aussi grand de décréditer la couronne en la confiant à des ministères subalternes que ne couvrait rien, pas même leur insuffisance, aux yeux du pays ; enfin sa résolution de se rejeter tout entier sur les hommes de patriotisme, de gouvernement et de talent, qui avaient appartenu au royalisme d’avant 1830, de faire de la monarchie avec des monarchistes, et de la conservation avec des conservateurs ; à ce titre, il me conjura d’abdiquer mes répugnances à servir la monarchie sous un nouveau monarque, à me rallier hautement à sa maison et à sa cause, devenue la cause de l’ordre en Europe, et à servir de noyau à un ministère dans cet esprit de rapatriement des royalistes par sa dynastie. […] Si elle résiste, elle sera conduite à des dissolutions incessantes ou à des coups d’État nécessaires ; les dissolutions l’useront, les coups d’État l’engloutiront, la lutte entre la nation et la couronne commencera ; vous en savez les suites.

1048. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

En quelque discrédit que soit tombé le mot drame par la manière abusive et tortionnaire dont il a été prodigué dans ces temps de douloureuse littérature, il est nécessaire de l’employer ici ; non que cette histoire soit dramatique dans le sens vrai du mot, mais, l’œuvre accomplie, peut-être aura-t-on versé quelques larmes intra muros et extra. […] Il écrit à sa mère et à ses sœurs pour leur demander une somme nécessaire pour son avancement dans le monde. — Il apprend en détail la Vie du père Goriot. […] Ainsi, ne pouvant acheter ni les échasses, ni les cordes, ni aucune des choses nécessaires aux amusements du collège, j’étais banni des jeux ; pour y être admis, j’aurais dû flagorner les riches ou flatter les forts de ma division. […] Nous traversâmes une première cour entourée des bâtiments nécessaires aux exploitations rurales, une grange, un pressoir, des étables, des écuries.

1049. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLIXe Entretien. L’histoire, ou Hérodote »

Une même contrée ne produit pas toutes les choses nécessaires ; elle en donne une, il lui en manque une autre ; seulement, celle qui en fournit le plus est regardée comme la meilleure : il en est ainsi de l’homme. […] Mais je ferai partir une troupe choisie de chasseurs, avec tout ce qui leur sera nécessaire, et je leur prescrirai de se réunir à vous pour délivrer votre pays du sanglier qui le dévaste. » « Telle fut la réponse de Crésus. […] Cependant, il rassembla les troupeaux de bœufs, de chèvres et de moutons appartenant à son père, et en fit tuer la quantité nécessaire pour nourrir cette troupe. […] Quant à nous, qui sommes de simples serviteurs, il nous convient de nous mesurer avec d’autres du même rang que nous, et avec un cheval même quand il est nécessaire.

1050. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la société des visiteurs des pauvres. » pp. 230-304

C’est enfin la préoccupation de ne point laisser décroître, par notre faute, la somme de vertus indispensable à la vie de l’humanité, et de sauver de ce trésor fragile et nécessaire tout ce qui peut encore en être sauvé ; c’est le désir de rechercher s’il ne subsiste pas, chez ces êtres accablés, humiliés et ulcérés par leur triste destinée, quelques germes de noblesse et de dignité morale, de préserver ces germes et de les faire fructifier ; bref, d’« élever » les malheureux par la manière dont on leur tend la main. […] Je les ai entrevus, et cela m’a peu réussi… Et mon seul vœu, c’est, après quelques années d’exil nécessaire, de reprendre ici cette vie pâle et douce, où j’avais la lâcheté de me croire malheureuse. » Bref, elle s’est ressaisie ; la foi, le courage et la paix lui sont revenus ; et elle a définitivement compris que ce fameux « droit au bonheur », dont de bouillants Norvégiens lui ont peut-être parlé, est un mot dépourvu de sens pour une chrétienne. […] Je n’ignore pas, d’autre part, qu’une des façons de renouveler, si c’est possible, « l’histoire de la courtisane amoureuse » (en supposant qu’il soit absolument nécessaire de la renouveler), c’est d’en changer le « milieu ». […] — Aujourd’hui qu’il n’y a plus de guerre, les épidémies sont des écoles, de nécessaires et admirables écoles d’héroïsme », etc.

1051. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

Mais vous n’y trouverez aucune flatterie pour les peuples, et Bossuet ne se prononce pas sur le droit redoutable et mystérieux des révolutions, aimant mieux croire que les gouvernements n’oublieront pas toute modération et toute raison jusqu’à rendre nécessaire l’exercice de ce droit. […] Le trait le plus saillant, c’est un blâme violent de toutes les conquêtes de ce prince. « Le bien d’autrui, dit Fénelon, ne nous est jamais nécessaire. » Il nie qu’on ait le droit de retenir certaines places, sous prétexte qu’elles servent à la sûreté des frontières. […] Écrivant le Télémaque dans le temps qu’il était le plus comblé par le roi : « Il eût été, écrit-il au Père le Tellier, non seulement l’homme le plus ingrat, mais encore le plus insensé, d’y vouloir faire des portraits satiriques et insolents. — Il est vrai, ajoute-t-il, que j’ai mis dans ces aventures toutes les vérités nécessaires pour le gouvernement, et tous les défauts qu’on peut avoir dans la puissance souveraine ; mais je n’en ai marqué aucun avec une affectation qui tende à aucun portrait ni caractère. » Nul n’a le droit de ne pas croire Fénelon sur parole. […] Quel dessein plus élevé, plus religieux, que de montrer dans l’élève de Mentor, quoique si bien doué par les dieux, fils d’une telle mère et d’un tel père, si accoutumé aux grands exemples, combien le secours des dieux lui est nécessaire pour ne point manquer à sa naissance ni à ses devoirs, et quel peu de mérite nous avons dans les actions qui nous honorent le plus aux yeux des hommes ?

1052. (1802) Études sur Molière pp. -355

Les coups de bâton sont nécessaires aux intérêts de Lélie, on le lui persuade du moins, et le coup de pied ne peut être excusé. […] Sa femme réunissait les agréments qui peuvent engager un galant homme, à l’esprit nécessaire pour le fixer, et à la coquetterie la plus propre à le désespérer. […] n’aurait-il pas dû s’assurer d’abord qu’il ne recelait aucun fâcheux, et ne fermer la porte de l’appartement qu’après une certitude si nécessaire à son repos ? […] Il avait en même temps la dignité, le sérieux et l’air d’ironie nécessaires pour représenter un grand personnage, pour en imposer à un sot, et pour rappeler sans cesse au public qu’il était témoin d’une mystification. […] Enfin, parmi les dénouements à citer, et qui sont très rares, l’on distingue ceux qui, aux deux qualités dont nous venons de parler, réunissent la plus nécessaire, la vraisemblance.

1053. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Poésie — I. Hymnes sacrées par Édouard Turquety. »

« Voici, dit-il dans la préface de son nouveau recueil, le complément nécessaire de mes deux ouvrages antérieurs, voici quelques pas de plus dans la route où j’ose dire être entré le premier, où plusieurs ont marché depuis et où bien d’autres s’élanceront plus tard… » Et encore : « Un critique illustre a bien voulu déclarer qu’Amour et Foi était le premier mot d’une poésie toute nouvelle, la poésie du dogme pur… » Il y a ici, ce me semble, quelque illusion dans le poète, et il y a eu de la part du critique illustre, qu’on ne nomme pas, quelque complaisance.

1054. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VI. De la littérature latine sous le règne d’Auguste » pp. 164-175

Les anciens, qui se complaisaient dans l’admiration, qui ne cherchaient point à diminuer l’odieux du vice, ni le mérite de la vertu, avaient une qualité presque aussi nécessaire à l’intérêt de la vérité qu’à celui de la fiction ; ils étaient fidèles à l’enthousiasme comme au mépris, et souvent même les caractères étaient plus soutenus dans leurs tableaux historiques que dans leurs ouvrages d’imagination.

1055. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre II. De l’amitié. »

Les passions causent tant de malheurs par elles-mêmes, qu’il n’est pas nécessaire, pour en détourner, de peindre leurs effets dans les âmes naturellement vicieuses ; nul homme, à l’avance, ne se croyant capable de commettre une mauvaise action, ce genre de danger n’effraye personne, et lorsqu’on le suppose, on se donne seulement pour adversaire l’orgueil de son lecteur.

1056. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De l’étude. »

L’espérance et la curiosité, seuls mobiles nécessaires à l’homme, sont suffisamment excités par l’étude dans le silence des passions.

1057. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre IV. La fin de l’âge classique — Chapitre I. Querelle des Anciens et des Modernes »

Un de ces auteurs, Desmarets de Saint-Sorlin, ayant donné son Clovis en 1657, crut nécessaire, lorsqu’il vit s’élever une école dont les maximes essentielles allaient, dans tous les genres, à suivre les anciens et à reprendre les sujets déjà traités par eux, de justifier le choix qu’il avait fait dans son poème d’un héros moderne et chrétien.

1058. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vigny, Alfred de (1797-1863) »

Mais les cinq poèmes dont je parle sont la portion la plus nécessaire, la plus inévitable de ses ouvrages, et ils suffisent à évoquer en ses maîtresses lignes cette physionomie d’un des plus nobles artistes qui aient vécu parmi nous.

1059. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XIV. Moralistes à succès : Dumas, Bourget, Prévost » pp. 170-180

Rien de moins « nécessaires » que tous les événements qu’on nous raconte, que les conclusions auxquelles s’arrêtent les personnages.

1060. (1898) Le vers libre (préface de L’Archipel en fleurs) pp. 7-20

« Plusieurs viendront et te diront : “Oui, mais Untel a su allier les audaces aujourd’hui nécessaires avec le respect de la Tradition : ses vers libres sont déférents à l’Alexandrin.”

1061. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XI » pp. 89-99

Pour que cette double réaction soit bien comprise, il est nécessaire de bien entendre la fronde.

1062. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 23-38

Cependant, comme un nom accrédité dans la Littérature n’est que trop capable aujourd’hui d’en imposer à la multitude ; comme les Esprits foibles & légers se laissent aisément ébranler par le persiflage ; comme la plupart d’entre eux cessent d’admirer, dès que la mode le commande, ou que le ridicule les effraie : il est nécessaire de défendre la gloire d’un des premiers Poëtes de la Nation.

1063. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 239-252

En méditant, en approfondissant un Modele, on acquerra, non l’habitude d’inventer, de penser, de procéder & de s’exprimer comme lui ; mais la force nécessaire pour inventer, penser, procéder & s’exprimer, à son tour, aussi bien que lui : Les Ouvrages des Grands Maîtres, d’après Longin, sont comme autant de sources sacrées, d’où il s’éleve des vapeurs heureuses qui se répandent dans l’ame de leurs Imitateurs & animent les esprits les moins échauffés *.

1064. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 8-23

Une preuve que l’amour n’est pas nécessaire pour animer l’intérêt d’une Tragédie, c’est que les Grecs n’en ont point fait usage.

1065. (1894) Notules. Joies grises pp. 173-184

Dans l’œuvre où prédomine la Forme, la Rime se présente immanquablement à l’esprit ; elle affirme la clarté du vers, le rend plus net et le fixe en de précises limites ; car ainsi qu’ailleurs je le déclarerai, en certains sujets — tels épiques, plastiques, où l’ampleur et la force sont nécessaires — il faut employer le vers à rhythme binaire, le vers dit d’airain, tour d’ivoire où, sous la porte, sentinelle casquée d’or et gemmée de rubis, veille la Rime.

/ 2115