Et vous, prêtres dociles à la loi, ne calomniez pas la philosophie ; c’est de ce nom qu’on appelle le plus digne usage de la raison de l’homme ; c’est un nom sacré, ne le prononcez qu’avec respect ; le plus sûr moyen de discréditer vos doctrines religieuses et d’accélerer la chute de vos autels serait de renouveler le scandale de ces déclamations fanatiques devenues si ridicules, depuis un demi-siècle, dans la bouche de vos prédécesseurs. […] On rédigea dix-sept articles dont l’incohérence, l’ambiguïté, l’imprécision, préludèrent à l’injustice et à la faiblesse des lois, aux humiliations constitutionnelles du peuple et à nos longues calamités. » Mais pour atteindre le vrai en fait de déclaration des droits, que faut-il donc, selon Daunou, et de quelle manière procéder ? […] Également opposé aux excès de vengeance et de réaction contre la queue encore menaçante de Robespierre, aux excès de prévention et de rigueur contre les factions nouvelles qui se lèvent au nom de l’ordre, il maintient la doctrine républicaine dans son antique droiture et dans une mesure inaccoutumée ; il contribue au salut de la Convention en vendémiaire, et n’aspire qu’au régime des lois. […] Si c’est trop souvent une erreur, c’est toujours un vœu honorable, et l’on touche en effet de bien près à ce terme, quand une loi fondamentale a déclaré, promis, déterminé toutes les garanties individuelles ; car il suffirait que cette loi fût fidèlement établie, littéralement observée par ceux qui l’ont faite, pour que le renouvellement des troubles devînt tout à fait impossible. » — Santa Rosa, dans une lettre à M. […] Il est vrai que les siècles passés en offrent des exemples ; mais on prendrait à présent une idée plus juste d’un tel anathème : on n’y verrait qu’un libelle séditieux, qu’une provocation publique à la révolte, qu’un outrage à la majesté du prince et des lois, qu’un attentat punissable, quoique impuissant. » (Édition de 1810, page 333).
Poirier). — Vous avez amassé une grosse fortune par des moyens que d’ailleurs la loi tolère. […] L’amour n’existe qu’autant qu’il est autorisé par la loi, et qu’il aboutit à la paternité légitime dans les justes noces. […] L’honneur, dans son caractère indéfini, est quelque chose de supérieur à la loi et à la morale ; on ne le raisonne pas, on le sent. […] Mais il se pourrait que les règles de la syntaxe correspondissent à des lois de l’esprit français, et qu’elles fussent fondées en nature. […] L’hérédité a ses lois comme la pesanteur.
Mallarmé résume l’admirable poème panthéiste de Hugo en dehors des lois de la grammaire ? […] Mais l’Académie ne fait plus loi, elle perd même toute autorité sur la langue. […] La lutte pour l’évolution de l’être, c’est la loi dure ; il l’adoucit par la loi compensatrice du secours à la faiblesse. […] Ils ont beau promulguer des dogmes et des lois, personne ne les écoute. […] Avant de nous instruire de la théodicée, des lois d’eurythmie et de la pesanteur, apprenons celles de notre état.
Parce que le moi est la réalité la plus immédiatement saisissable, la plus nettement déterminée (en apparence du moins), non par vanité seulement, elle s’y attache, elle s’y replie, et dans ce qui frappe ses sens, comme dans ce qu’atteint sa pensée, elle tend naturellement à chercher surtout les relations et les manifestations du moi : n’excédant guère la portée des sens ou du raisonnement, cherchant une évidence pour avoir une certitude absolue, dogmatique et pratique à la fois, objectivant ses conceptions, et les érigeant en lois pour les traduire en faits : sans imagination que celle qui convient à ce caractère, celle qui forme des enchaînements possibles ou nécessaires, l’imagination du dessin abstrait de la vie, et des vérités universelles de la science.
Comment ont appris leur Langue M. de Voltaire, le propagateur de ce paradoxe, & M. d’Alembert qui semble se faire une loi de ne penser que d’après ce Poëte ?
Le drame, comme l’auteur de cet ouvrage le voudrait faire, et comme le pourrait faire un homme de génie, doit donner à la foule une philosophie, aux idées une explication désintéressée, aux âmes altérées un breuvage, aux plaies secrètes un baume, à chacun un conseil, à tous une loi.
Telle fut la comédie dite ancienne, dont le trop fameux Aristophane, poète grec, vivant vers l’an du monde 3680, est regardé comme le fondateur, ne respectant ni les mœurs, ni les lois, ni les vertus, ni la société.
Quand un artiste introduit dans une composition un saint embrasé de l’amour de Dieu et prêchant sa loi à des peuples et qu’il lui met un bonnet carré à la main, comme à un homme qui entre dans une compagnie et qui la salue poliment, je lui dirais volontiers, Vous vous mêlez d’un métier de génie et vous n’êtes qu’un butor.
Renvoyons le moraliste à la maturité d’Alcide Dusolier, qui est très jeune, et qui, comme tout ce qui est distingué dans ce triste monde, accomplira la loi d’être un misanthrope à trente ans ; mais le romancier, je ne veux pas l’attendre !
Lex per satyram signifiait une loi qui comprenait des matières diverses.
Il satisfait en nous ce désir de liberté, d’indépendance à l’égard des choses, de suprématie sur ce qui est soumis aux lois du hasard et de la force brutale. […] L’esprit, au début, s’accommode aux parcelles de réalité qu’il a pu saisir ; mais, dès qu’il s’agit d’une réalité plus étendue, et de toute la réalité, c’est elle que nous accommodons à notre esprit ; c’est notre esprit qui complète les faits, et qui les pétrit, et qui suppose entre eux des relations afin de justifier des lois. […] Entre les ouvrages écrits, envisagés comme des faits dont il faut chercher la loi de succession, la grande joie de M. […] Dans Mademoiselle Jaufre, qui est peut-être son meilleur ouvrage, il développe une sorte de corollaire du mot de saint Paul sur la « loi » qui « fait le péché », et, nous contant l’histoire d’une fille élevée selon la nature par un père à théories, il montre comment, à cette âme primitive, c’est le péché qui révèle la loi. — L’inspiration de la Confession d’un amant est plus chrétienne encore, et il s’y ajoute le tolstoïsme filtré de MM. de Vogüé et Desjardins.
Les Réformés, d’abord surpris, mais comprenant enfin que tout désormais les menace, qu’ils seront les éternelles victimes de la mauvaise foi et de la trahison, s’organisèrent et tinrent à La Rochelle une solennelle assemblée de résistance, où leur conscience politique s’éveilla. « Les lois fondamentales de la république des Réformés » furent le fruit de leurs délibérations. […] Le premier chapitre de l’ouvrage remarquable de Weiss70 nous renseigne à cet égard. « La bourgeoisie protestante des villes, écrit-il, se livra à l’industrie et au commerce, et déploya une activité, une intelligence, et, en même temps, une intégrité qui n’ont peut être jamais été surpassées dans aucun pays… Perdus, pour ainsi dire, au milieu d’un peuple qui les observait avec défiance, sans cesse en but à la calomnie, soumis à des lois sévères qui leur commandaient impérieusement une perpétuelle attention sur eux-mêmes, ils forçaient l’estime publique par l’austérité de leurs mœurs et par leur irréprochable loyauté. » Énergiques et obstinés, robustes et endurants, nos Réformés de France, depuis la paix d’Alais jusqu’aux premières années du règne de Louis XIV, firent preuve de la plus extraordinaire, de la plus féconde activité. […] À peine lui apprit-on à lire et à écrire, et il demeura tellement ignorant que les choses les plus connues d’histoire, d’événements, de fortune, de conduites, de naissance, de lois, il n’en sut jamais un mot. […] Le savant… S’il faut entendre par science l’investigation en tous sens de la nature et la fixation progressive de ses lois, personne n’essayera de nous contredire, si nous affirmons que Bossuet professa toujours pour un aussi vain et insolent savoir le plus orgueilleux mépris qu’il soit possible à un catholique de concevoir pour tout ce qu’enfantent la terre et l’homme. […] Il faut connaître, pour comprendre l’attentat, la haine furieuse du clergé français craignant la diminution de ses revenus et de son autorité, contre les protestants et contre l’Édit de Nantes ; par cette mesure, en effet, et « pour la première fois, comme l’a fait observer Weiss84, le pouvoir civil en France s’élevait hardiment au-dessus des partis religieux, et posait les limites qu’il ne leur était permis de franchir, sans violer la loi de l’État. » L’Édit de Nantes, c’est-à-dire la naissante liberté de conscience, c’était, pour le clergé, la Bastille qu’il fallait, à tout prix, emporter.
Une loi austère régit le gynécée vagabond. […] Cérès se résigne aux lois du Destin. […] Sous son influence, la dure loi romaine s’attendrit ; elle s’imprègne de la douceur grecque. […] Ce qui est conforme aux lois n’est inique pour personne. […] On diroit qu’il y a quelque loi qui l’oblige à ne jamais manquer à ce qu’il a accoustumé.
Quelle est-elle cette civilisation qui s’impose ainsi à l’Europe, d’où part toute science et toute élégance, qui fait loi dans toutes les cours, où Surrey, Sidney, Spenser, Shakspeare vont chercher leurs exemples et leurs matériaux ? […] Comme chez Rubens, l’allégorie chez lui enfle les proportions hors de toute règle, et soustrait la fantaisie à toute loi, excepté au besoin d’accorder les formes et les couleurs. […] Alors paraîtront non les axiomes universels inutiles, mais « les axiomes moyens efficaces », véritables lois d’où l’on pourra tirer des œuvres, et qui sont des sources de puissance au même degré que des sources de lumière361. […] Il a indiqué la route et ne l’a point parcourue ; il a enseigné à découvrir les lois naturelles, et n’a découvert aucune loi naturelle. […] Au fond de cette supposition hasardeuse gît une grande vérité certaine : c’est qu’il y a une échelle de faits, les uns au sommet, très-compliqués, les autres au bas, très-simples, ceux d’en haut ayant leur cause dans ceux d’en bas ; en sorte que les inférieurs expliquent les supérieurs, et que c’est dans les lois du mouvement qu’il faut chercher les premières lois des choses.
Macbeth tue le sommeil, l’innocent sommeil, le sommeil qui remet en ordre l’écheveau confus de nos soucis ; le sommeil, mort tranquille de la vie de chaque jour, bain accordé à l’âpre travail, baume de l’âme malade, loi tutélaire de la nature, l’aliment principal du tutélaire festin de la vie. » LADY MACBETH. […] Dans les anciens temps, avant que des lois humaines eussent purgé de crimes les sociétés adoucies, oui vraiment, et même depuis, il s’est commis des meurtres trop terribles pour que l’oreille en supporte le récit ; et l’on a vu des temps où, lorsqu’un homme avait la cervelle enlevée, il mourait, et tout finissait là. […] Rébellion, ne lève point la tête jusqu’à ce que je voie se lever la forêt de Birnam ; et Macbeth, au faîte de la grandeur vivra tout le bail de la nature, et son dernier soupir sera le tribut payé à la vieillesse et à la loi de mort. — Cependant mon cœur palpite encore du désir de savoir une chose : dites-moi (si votre art va jusqu’à me l’apprendre), la race de Banquo régnera-t-elle un jour dans ce royaume ? […] Si nous étions au temps de Caton d’Utique, j’y aurais depuis longtemps échappé par la même voie moi-même ; mais nous vivons sous une loi plus patiente et qui nous commande d’attendre avec résignation la justice des hommes et le pardon de Dieu !
Cette ressemblance entre deux hommes de génie, d’ailleurs si différents, tirant de la rigueur de l’esprit géométrique une règle pour la recherche et la démonstration de tous les ordres de vérités, a fait de la méthode de Descartes une loi de l’esprit français. […] Aimerait-on mieux la découverte de quelque loi des corps, ou l’invention de quelque nouvelle preuve métaphysique de l’existence de Dieu, laquelle n’a pas besoin de preuves ? […] Si je regarde celles des Pensées qui touchent à la société, aux gouvernements, à la justice, aux grands, Pascal voit plus loin que Descartes, dont la politique est de s’accommoder de ce qui est établi ; plus loin que Bossuet, qui bornait ses vues à la monarchie absolue tempérée par des lois fondamentales. […] Il cherchait sa foi après avoir cherché les lois du monde physique ; il cherchait l’homme ; il était curieux de la vie et de la mort ; son dernier jour le trouvera cherchant encore.
Il lui fit offrir de se changer en une académie, et de préparer la forme et les lois qu’il serait bon qu’elle reçût à l’avenir52. » Ils y résistèrent d’abord, par l’esprit d’indépendance propre aux gens de lettres, et par crainte de se mettre en servitude en s’agrandissant. […] Son Remercîment à l’Académie française, après son élection, parut si excellent, qu’on fit une loi à tous les académiciens futurs de remercier la compagnie ; de là l’usage des discours de réception. […] Les langues ont été comparées dans leurs ressemblances plutôt que dans le détail de leurs différences, et l’on nous fait voir les lois du langage dans la raison même, qui est commune à tous les hommes, quels que soient les diversités des signes et les caprices de l’usage dans chaque pays. De même, c’est dans la raison que la Logique va chercher les lois de l’art de penser, ou plutôt c’est la raison elle-même qu’elle cherche à ses sources les plus profondes.
Naïf comme ces pâtres de Norvège qui se plaisaient jadis à entendre autour de la flamme du pin résineux le récit des Scaldes inspirés, il laisse aux histoires primitives leur charme d’enfance ingénue ; mais, penseur et critique, il sait, sans nuire à sa propre émotion ni à celle des autres, montrer la loi nécessaire des événements dans la suite en apparence désordonnée des circonstances, et il contraint l’humanité vieillie à s’aimer, à se haïr, à se plaindre, à se reconnaître en un mot, dans les contes qui l’ont bercée. […] Le premier veillait à la pureté de la langue, pour laquelle la Bible de Luther servait de règle et de modèle, le deuxième examinait si le chanteur observait les lois de la tablature, le troisième inscrivait les rimes, pour constater qu’elles se succédaient conformément aux principes de l’école et le quatrième était chargé d’exercer sa critique sur la mélodie du chant proposé. Wagner a réuni toutes ces fonctions sur la tête de Sixtus Beckmesser dont le type fortement accusé symbolise ainsi le pédantisme intransigeant, en opposition avec son rival, le chevalier Walther de Stolzing, le poète inspiré, ne connaissant d’autre loi que l’élan spontané de sa libre fantaisie. […] Mais l’emprunt le plus curieux que Wagner ait fait à Wagenseil, est celui des lois de la tablature, dont Kothner donne lecture avec une solennité si comique, au moment où Walther se présente devant la corporation, pour briguer le rang et le titre de maître.
Aussi disoit-on communément de lui, qu’il dévinoit la loi, & qu’il dévinoit juste. […] L’usage est insensiblement établi que tout Académicien répéteroit ces éloges à sa réception : Ç’a été une espêce de loi d’ennuyer le public. […] “Au lieu que c’est une loi dans l’Académie Françoise, de faire imprimer tous ces discours par lesquels seuls elle est connue, ce devroit être une loi de ne les imprimer pas.”
Sur ce refus, j’alléguai la loi de l’empereur Théodose, qui, après avoir commandé par colère et trop précipitamment la mort d’un grand nombre de chrétiens, fut rejeté de la communion par saint Ambroise, qui le contraignit de venir à pénitence, et, pour une entière satisfaction, faire une loi par laquelle défense était faite aux gouverneurs en l’administration de la justice qui présidaient dans les provinces, de ne faire à l’avenir exécuter tels mandements extraordinaires qui étaient contre l’ordre et la forme de la justice, sans attendre trente jours, pendant lesquels ils enverraient à l’empereur pour avoir nouveau commandement en bonne et due forme ; ainsi qu’il fallait envoyer promptement au roi… Grâce à cet avis d’une ferme et respectueuse résistance qui prévalut et fut adopté, avant même qu’on eût envoyé vers le roi, le contrordre eut le temps d’arriver de Paris : la Bourgogne fut garantie du crime et du malheur commun, et le nom du comte de Charny est inscrit dans l’histoire à côté de ceux du comte de Tendes, de MM. de Saint-Hérem, d’Orthez et d’un petit nombre d’autres, comme étant resté pur de sang dans l’immense massacre.
parce qu’un homme de bon esprit, étudiant les sciences, méditant sur les faits naturels, sur les lois qui les régissent, sur les origines mystérieuses et les transformations qui s’y opèrent, ne peut arriver à concevoir l’idée de Création proprement dite, et qu’il accepte plus volontiers l’idée d’une succession continue, avant comme après, pendant un temps infini, — cet homme qui, en raison de cette conception qui lui paraît la plus probable, ne peut avoir les mêmes idées que vous sur la Genèse et l’origine du monde ; — vous qui n’avez nulle idée des sciences proprement dites ni de leurs méthodes, ni de leurs résultats, ni de leur progrès continuel et croissant, vous l’insulterez pour ce fait seul, — lui qui est d’ailleurs un savant de mérite, un honnête homme, un sage ! Ou bien encore : — C’est un autre homme, un philosophe, cette fois, plutôt qu’un naturaliste, c’est un homme qui a médité plus abstraitement sur les causes et les effets, sur les lois de l’esprit humain.
Avant d’être lui-même et de dégager son talent original, Cervantes subit la loi commune ; il adopta les modes des temps et des lieux où il vivait. […] Je trouvai d’autres occupations, je laissai la plume et les comédies, et parut alors le prodige de nature, le grand Lope de Yega, qui s’éleva à la monarchie de la comédie, rangeant sous ses lois tous les acteurs… » Cervantès est d’une bienveillante et libérale nature et il ne marchande pas l’éloge à ses rivaux, ni même, comme on le voit ici, à son vainqueur.
La Cour de Sceaux, même en son meilleur temps, fut toujours un peu arriérée sans doute, cantonnée dans son vallon, fermée aux lumières et au souffle du dehors, obstinément cartésienne par M. de Malezieu ; mais ce Malezieu était un homme de savoir, nourri de premières études très fortes, qui lisait Sophocle dans le texte, et chaque jour il passait là, dans ce cercle de la princesse, des personnes du premier ordre par l’esprit : Voltaire, Mme du Châtelet, Mme du Defland ; Mlle de Launay, ce témoin exquis qui fait loi devant la postérité, y était en permanence. […] Il subit la loi du temps : il devint dévot avec les années.
La puissance guerrière est une puissance toute d’impulsion, et il n’y a que de la guerre dans l’esprit de parti ; car tous ces principes constitués pour l’attaque, ces lois servant d’arme offensive, finissent avec la paix, et la victoire la plus complète d’un parti, détruit nécessairement toute l’influence de son fanatisme ; rien n’est, rien ne peut rester comme il le veut. […] Mais quand la fluctuation des idées ramène les affaires au point juste et possible, la puissance, la considération de l’esprit de parti est finie, le monde se rassoit sur ses bases ; l’opinion publique honore la raison et la vertu ; et cette époque inévitable peut se calculer comme les lois de la nature ; il n’y a point de guerre éternelle, et point de paix cependant sous la dictée des passions, point de repos sans accord, point de calme sans tolérance, point de parti donc qui, lorsqu’il a détruit ses ennemis, puisse satisfaire ses enthousiastes.
Chaque fable déroule ses rythmes particuliers, insaisissables, instables, sans loi apparente ni périodicité définie : on compterait les pièces où le mètre est fixe et uniforme, et il est rare qu’elles soient parmi les chefs-d’œuvre. […] Ils y ont vu des préceptes, quand ce sont ordinairement des observations : ils ont cru que le poète réglait, quand il constatait ; ils ont pris des lois expérimentales pour des commandements catégoriques.
C’est aux pédagogues de créer les réalités mentales et les lois psychologiques encore inexistantes. […] Elslander65 définissent cette éducation en fonction des intérêts sociaux et des destinées sociales telles qu’ils les conçoivent ; ils la subordonnent à quelques grandes lois directrices de l’évolution sociale qu’il convient de favoriser et dont le tenue semble être un eudémonisme collectif où l’individu s’absorberait passivement dans l’uniformité et la médiocrité générales.
Le roi est un homme sorti du milieu de la multitude, par le jeu incertain des circonstances, pour maintenir un ordre voulu par tous, pour faire exécuter des lois auxquelles tous ont participé. […] Sachons que l’on trouve dans tous les partis, non seulement des honnêtes gens, ce qui est incontestable ; mais des hommes éclairés et généreux, dont les opinions et la conduite, dictées par les lois les plus rigoureuses d’une conscience austère, sont indépendantes des positions diverses où ils peuvent être placés.
Un sujet ancien doit, sans doute, admettre les croyances du temps où sa fable est placée ; car on ne peut pas être infidèle à la première de toutes les lois, celle qui oblige à peindre un âge de l’esprit humain ; mais il faut s’abstenir de faire intervenir comme agents visibles les êtres surnaturels dont la croyance n’existe plus. […] Le génie romantique et le génie pittoresque sont deux frères qui viennent succéder au génie statuaire et au génie classique, vieux monarques dont nous devons encore honorer les cendres augustes quoique nous ne vivions plus sous leurs lois.
Et à commencer par son roman intitulé Lui, ce scandale, imité d’un autre scandale, dont les personnages, aux noms seulement défigurés pour qu’on les reconnaisse tous, ne vivent plus maintenant, à l’exception d’un seul… Ce qui prouve la radicale nullité des femmes, en fait d’invention, c’est qu’elles n’ont dans la tête qu’un roman et c’est le leur, celui de leur vie : Mme Golet n’a pas fait exception à cette loi. […] La communiante avec Lamennais, qui communiait aussi avec Garibaldi, le Christ moderne, et qui prend la Révolution italienne pour une hostie, ne pouvait pas la juger… Le livre de l’Italie des Italiens est un acte d’adoration perpétuelle, dans lequel, pour la première fois, et contrairement à la loi de l’amour, celle qui adore ne s’efface pas, ne s’enfonce pas dans l’être aimé.
Cette biographie, qui pouvait ne pas être du tout, — car l’histoire des hommes célèbres par leurs ouvrages n’est souvent que dans leurs ouvrages, et Voltaire même a fait une loi (fausse, il est vrai, parfois), de ne la chercher que là, — cette biographie s’est trouvée, par hasard (cette étoile de Sterne !) […] Or, s’il est un nom significatif et qui précise dans l’esprit l’image d’une civilisation tout entière, n’est-ce pas ce nom si singulièrement choisi de Koran, que Mahomet — l’un des quatre hommes de l’Histoire qui ont le plus laissé leur empreinte dans les choses humaines — a consacré en l’écrivant, avec la pointe d’un cimeterre, sur le frontispice de sa Loi ?
C’est qu’en effet ce qui est faux n’est jamais utile, et qu’au fond il y a quelque chose d’immoral et de pervers dans cette falsification de l’histoire qui ment sans pudeur à la vérité des traditions, et dans cette falsification bien autrement coupable de la nature humaine, qui la représente dégradée par d’indéfinissables passions, poussée au crime par je ne sais quel vertige sans objet, qui la calomnie en lui prêtant des désordres qui ne sont pas les siens, et qui n’est qu’une insulte, un attentat perpétuel aux lois éternelles et sacrées de la raison.
car le tien et le mien, c’est la première loi de l’art.
Ne disons donc pas que Shakespeare a su se passer de goût, et se montrer supérieur à ses lois.
. — Dire de la Loi.
Arthur Rimbaud prend tous les tons, pince toutes les cordes de la harpe, gratte toutes celles de la guitare et caresse le rebec d’un archet agile s’il en fût… Bien des exemples de grâce exquisément perverse ou chaste à vous ravir en extase nous tentent, mais les limites normales de ce second essai déjà long nous font une loi de passer outre à tant de délicats miracles, et nous entrerons sans plus de retard dans l’empire de la Force splendide où nous convie le magicien avec son Bateau ivre.
Quand elle commença à lui sourire, le stoïcien eut des scrupules ; il crut qu’il allait perdre de sa noblesse en acceptant le prix qu’il avait si bien mérité ; il sembla se dérober, se soustraire… On ne se console de ces dures leçons infligées à notre orgueil qu’en songeant que la science est éternelle, qu’elle n’est point assujettie aux lois fatales de notre fragilité.
Ce seroit avilir le Cothurne, ce seroit manquer à la fois l’objet de la Tragédie & de la Comédie ; ce seroit une espece bâtarde, un monstre né de l’impuissance de faire une Comédie & une Tragédie véritable. » Quoique M. de Voltaire ne fasse pas loi dans le genre comique, par le peu de succès de toutes ses Comédies, il grossit donc la foule de tous nos bons Littérateurs qui se sont élevés contre ces esprits médiocres, qui s’efforcent de rembrunir la Scène, ne pouvant l’égayer.
III Cette réalité psychologique que l’on vient de montrer conditionnée par la loi d’un Bovarysme essentielest, ainsi qu’on l’a dit, la source de laquelle s’élèvent toutes les autres formes du réel.
Je fais et je défais les lois, sans qu’ils aient à s’en inquiéter.
Chose naturelle et logique d’ailleurs, loi d’équilibre qui ne trompe jamais !
Chose naturelle et logique, d’ailleurs, loi d’équilibre qui ne trompe jamais !
Il mêle l’Ancienne et la Nouvelle Loi. […] Montez, flottez, roulez, accomplissez vos lois ! […] Mais Spinoza lui-même a bien de la peine à en tirer une loi morale qui oblige… Et puis, au fond, on n’est pas bien sûr de comprendre. Sully-Prudhomme confesse un « scrupule » dans un sonnet des Épreuves Vous êtes ignorants comme moi, plus encore, dit il aux astres ; la raison de vos lois vous échappe. […] C’est ce Dieu-là dont Lamartine suppose la loi enfin obéie par tous les hommes dans l’idéale cité d’Utopie.
Par exemple, leurs recherches sur les propriétés des sections coniques n’ont trouvé d’emploi que dix-sept siècles plus tard, quand Képler chercha les lois qui règlent le mouvement des planètes. […] Nos sciences les admettent aujourd’hui, et l’idée grecque de la destinée n’est rien déplus que notre idée moderne des lois. […] Plus tard, les stoïciens le compareront à une grande cité gouvernée par les meilleures lois. […] Un peu plus âgé, il écoutait sur l’Agora des discours d’orateurs, des décrets, des mentions de lois. […] De plus, la loi fixe l’âge des mariages et choisit le moment et les circonstances les plus favorables pour bien engendrer.
« Le communisme et la loi agraire croient résoudre le deuxième problème. […] La détresse du peuple, les travailleurs sans pain, le dernier des Condés disparu dans les ténèbres, Bruxelles chassant les Nassau comme Paris les Bourbons, la Belgique s’offrant à un prince français et donnée à un prince anglais, la haine russe de Nicolas, derrière nous deux démons du midi, Ferdinand en Espagne, Miguel en Portugal, la terre tremblant en Italie, Metternich étendant la main sur Bologne, la France brusquant l’Autriche à Ancône, au nord on ne sait quel sinistre bruit de marteau reclouant la Pologne dans son cercueil, dans toute l’Europe des regards irrités guettant la France ; l’Angleterre, alliée suspecte, prête à pousser ce qui pencherait et à se jeter sur ce qui tomberait ; la pairie s’abritant derrière Beccaria pour refuser quatre têtes à la loi, les fleurs de lis raturées sur la voiture du roi, la croix arrachée de Notre-Dame, la Fayette amoindri, Laffitte ruiné, Benjamin Constant mort dans l’indigence, Casimir Périer mort dans l’épuisement du pouvoir ; la maladie politique et la maladie sociale se déclarant à la fois dans les deux capitales du royaume, l’une la ville de la pensée, l’autre la ville du travail ; à Paris la guerre civile, à Lyon la guerre servile ; dans les deux cités la même lueur de fournaise ; une pourpre de cratère au front du peuple ; le midi fanatisé, l’ouest troublé, la duchesse de Berry dans la Vendée, les complots, les conspirations, les soulèvements, le choléra, ajoutaient à la sombre rumeur des idées le sombre tumulte des événements. » VIII Tout cela mène à ce que l’auteur nomme l’Épopée de la rue Saint-Denis, c’est-à-dire aux barricades. […] ne fût-ce que par l’identité de la loi, l’évolution de la comète dans le firmament au tournoiement de l’infusoire dans la goutte d’eau.
Il produit des émotions et des images, non des idées : et il ordonne, il exprime ces émotions et ces images, non pas selon la loi du vrai, mais selon la loi du beau. […] Il y a même dans René un dilettante de la révolte et du crime qui se fait une volupté d’être seul contre toute la société : « Se sentir innocent et être condamné par la loi était dans la nature des idées de René une espèce de triomphe sur l’ordre social ».
Maintenant, en effet, une musique qui n’a de cet art que l’observance des lois très complexes qu’il se dicte, mais exprime d’abord le flottant et l’infus, confond les couleurs et les lignes du personnage avec les timbres et les thèmes en une ambiance plus riche de Rêverie que tout air d’ici-bas, déité costumée aux invisibles plis d’un tissu d’accords ; ou va l’enlever de sa vague de Passion, au déchaînement trop vaste pour un seul, le précipiter, le tordre : et le soustraire à sa notion, perdue devant cet afflux surhumain, pour la lui faire ressaisir quand il domptera tout par le chant, jailli dans un déchirement de la pensée inspiratrice. […] Dans la salle vaguement aperçue, tout à coup l’obscurité tombe, et un grand silence ; alors, en la nuit des yeux et des oreilles et de l’esprit, en la nuit vibrante des quinze cents âmes stupéfiées, un son naît, une résonnance voilée, une sonorité atténuée, emmêlée, dispersée, un mystique résonnement, — inlocalisable, — une intimement chaude mélodie, qui monte, qui s’enfle, et qui dans l’air invisible flotte, portant la pré-sensation des futurs tressaillements du Drame. — Ainsi le Drame se lève : — un rideau s’entrouvre, et, dans le fond, — saillant d’un cadre lointain, noir, obscur, vague, et indistinct, — un paysage apparaît, que nous attendions, et les hommes y sont, dont la vie, en nous inconsciemment vécue déjà, se va en nous revivre évidemment ; — tandis que, parmi l’angoisse des vivantes passions, des désespoirs, des joies, et des extases qui se poussent et s’appellent, parmi l’inéluctable empoignement des très réelles émotions, peu à peu nous descend, insensiblement et nécessairement, l’Explication, l’Idée, la Loi, le prodigieux troublement de l’Unité dernière, comprise. […] Wagner, avec l’art de l’avenir, n’a d’ailleurs pas fait autre chose qu’une application expérimentale de la physiologie intuitive, qui faisait son génie, et d’où l’on pourrait tirer dès à présent les lois fondamentales de l’expérimentation esthétique.
On peut, en résumé, poser cette loi : ce que Wagner a écrit à une époque, les drames qu’il a composés dans le même temps, tout cela provient de la même inspiration, et l’on ne peut comprendre les uns sans connaître les autres. […] En la piété de sa fière songerie, il y avait placé le joyau du divin sacrifice, une relique merveilleuse, deux lois sanctifiée : il avait voulu que la coupe où s’épandit le sang invisible du Christ, par l’immolation des paroles prononcées à la Cène, fût aussi le précieux vase où Joseph d’Arimathie recueillit le sang visible du Dieu mort sur la croix. […] Il dit sa mission, son titre ; il dit le Gral environné de splendeurs, et la sévère loi qui oblige tout chevalier du Gral à s’éloigner des lieux où son nom cesse d’être inconnu.
Leur vie est à la fois naïve et sublime ; ils célèbrent les dieux avec une bouche d’or, et sont les plus simples des hommes ; ils causent comme des immortels ou comme de petits enfants ; ils expliquent les lois de l’univers, et ne peuvent comprendre les affaires les plus innocentes de la vie ; ils ont des idées merveilleuses de la mort, et meurent sans s’en apercevoir, comme des nouveau-nés. » Ce qu’il faut exclure, c’est la théorie qui, dans l’art, demeure indifférente au fond. […] C’est la loi humaine. […] Cette pâle et faible étincelle Qui vit en toi, Elle marche, elle est immortelle Et suit sa loi.
Encore peut-on se demander si l’insuffisance pratique de cette dernière ne doit pas aller en diminuant, à mesure que les lois qu’elle établit exprimeront de plus en plus complètement la réalité individuelle. […] Car, comme nombre d’entre elles ont déjà accompli toute leur carrière, la loi de leur évolution normale est ou, du moins, peut être établie. Mais quand il s’agit des sociétés les plus élevées et les plus récentes, cette loi est inconnue par définition, puisqu’elles n’ont pas encore parcouru toute leur histoire.
L’habitude positive est l’habitude parfaite ; par elle et par elle seule, l’âme corrige sa loi fondamentale, qui est la dispersion dans le temps, en introduisant dans son devenir des éléments de permanence, d’unité relative, d’harmonie. […] La loi de causalité, dans le système de Stuart Mill, serait une habitude générale ; elle passe à l’acte sous la forme de lois particulières.
Donnez-lui des « livres et des fêtes, en attendant qu’il ait des lois. » Nous, chrétiens, nous avons eu ces douze hommes, et sans nous, vous ne penseriez pas aux douze vôtres ! Mais ils nous ont donné des lois avant de nous donner des fêtes… Ils ne se sont pas, eux, simplement mis à marcher devant le peuple, qui ne niait point le mouvement, et ce qui aurait été ridicule et probablement inutile. […] Mais le païen qui se mêlait au chrétien, dans Michelet, comme le cancer à la chair qu’il dévore, veut, avant des lois, des fêtes et des spectacles, et ce que furent pour les Apôtres et ce que sont pour nous les langues de feu du Saint-Esprit, c’est, pour Michelet, et ce doit être pour le monde, les langues des comédiennes et des bateleurs !
Il est la grande loi dure de l’humanité. […] Mais si vous admettez qu’un homme puisse s’élever au-dessus de la nature et la dompter au point de faire du sacrifice la loi même de sa vie, l’inexplicable devient clair. […] Et, sans doute, il arrivera que ces croquis auront été faits et multipliés en vue d’une œuvre déterminée, mais le contraire est la loi commune.
La mer paraît devoir engloutir le tronc d’arbre qu’elle reçoit, mais ce tronc d’arbre est creux, et les lois de la pesanteur, au lieu de le couler, le soutiennent. […] Lorsque les objets entrent dans l’ornementation, se soumettent à ses lois, se déforment et se transforment selon ses rapports, nous disons qu’ils sont stylisés. […] Plus de hasard, mais chance, liberté créatrice, et cette autonomie que Kant n’attribuait qu’à la volonté qui se donne sa loi, mais que le Poète attribue au vers qui en lui se donne sa forme. […] Quelle docte et sainte ivresse Aujourd’hui me fait la loi ? […] Ils doivent se soumettre aux lois d’une technique, celle de la recherche en commun.