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1514. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « De la tragédie chez les Anciens. » pp. 2-20

L’intrigue, en un mot, est un dédale, un labyrinthe qui va et revient toujours sur lui-même, où l’on aime à se perdre, d’où l’on cherche pourtant à sortir, mais où l’on rentre avec plaisir quand une fausse issue nous y rejette.

1515. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre II. Des livres de géographie. » pp. 5-31

Le parallèle des anciens peuples avec les Amériquains suppose une grande connoissance de l’antiquité ; mais il est plus ingénieux que sensé ; & s’il y a dans ce livre beaucoup de choses intéressantes, il y a aussi un grand nombre d’idées fausses.

1516. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre VI : Règles relatives à l’administration de la preuve »

Au cours de ces comparaisons étendues, se commet souvent une erreur qui en fausse les résultats.

1517. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

Et voilà pourtant ce qu’a fait la sœur Emmerich, et avec une telle certitude, une telle sûreté d’elle-même, qu’elle a réussi de manière à ce que les théologiens l’absolvent, tout au moins, quand ils ne la glorifient pas, et que nous, critiques littéraires, nous admirons au nom de la beauté, telle que l’art la conçoit, l’intuition, quelle qu’elle fût, qui fut en elle et qui nous a donné ces trois livres, comme on n’en avait pas vu encore dans la littérature sacrée, — ces trois livres d’histoire qui, en définitive, sont trois poëmes ; car l’histoire se puise à des sources, et ici il n’y a pas d’autre source qu’une âme en extase, — ces trois livres enfin dont on peut dire : « théologiquement, il n’est pas de rigueur d’y croire », mais dont on n’oserait dire cependant : « théologiquement, ils sont faux ! 

1518. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Jules Janin » pp. 137-154

Il n’était nullement nécessaire de jouer de tant de flûtes qui ont joué faux.

1519. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame Paul de Molènes »

Il est vrai que Marivaux est un second Watteau, au xviiie , et que, s’il n’est pas faux, il est idéal comme Watteau, et tellement idéal que la société de son temps, enchantée, ne se reconnaissait plus dans ses tableaux.

1520. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — Se connaître »

Rien n’est plus faux. » Lisez pendant une semaine le Standard, la Tribuna et le Berliner Tagblatt, vous trouverez plus d’une fois la preuve de ce que je dis là… Sur le point des relations avec l’étranger, ne croyez donc point les décourageurs. » C’est donc à l’intérieur uniquement que réside le mal. « Le péril est chez nous.

1521. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre II. La relativité complète »

Jetant alors un coup d’œil rétrospectif sur le premier point de vue, on reconnaîtra qu’il fallait s’y placer d’abord, on jugera naturelle la tentation d’y revenir lors même qu’on a adopté le second ; mais on verra aussi comment les faux problèmes surgissent du seul fait que des images sont empruntées à l’un pour soutenir les abstractions correspondant à l’autre.

1522. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

Tâchons d’écarter, s’il se peut, l’éloge et la satire ; et sans un faux enthousiasme, comme sans injustice, cherchons la vérité.

1523. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Le bruit courait que son armée était de douze cent mille hommes ; qu’il avait soixante mille cavaliers et douze cents chars armés de faux. […] Devant eux étaient des chars armés de faux, assez éloignés les uns des autres. […] Elles sont incomplètes, fausses ; qu’importe ? […] Quand enfin il s’aperçoit qu’il faut donner une définition commune à toutes les vertus, il tombe de faux pas en faux pas « dans tous les trous et dans tous les puits », et dit, entre autres sottises, que la vertu est le talent de gouverner les hommes. […] Un jour Scipion Émilien, qu’ils interrompaient, osa leur dire : « Silence, faux fils de l’Italie !

1524. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

Telle a été, on le sait, l’influence du protestantisme ; l’Église n’a pas été vaincue, elle n’a pas accepté la fausse réforme des mains de l’erreur, mais elle a réformé elle-même ce qui devait être réformé. […] À cette époque, toutes les fausses doctrines en philosophie, en morale, en politique, en littérature, longtemps proclamées, régnaient audacieusement sur les esprits ignorants ou subjugués. […] L’idée qu’un philosophe s’est formée du fait de la perception est vraie, si elle représente exactement les éléments réels de ce fait ; fausse, si elle ne les représente pas exactement. Comment juger si une théorie philosophique de la perception est vraie ou fausse, en quoi elle est vraie ou fausse ? […] Mais de combien de manières une théorie philosophique de la perception peut-elle être fausse ?

1525. (1886) Le roman russe pp. -351

Le temps fausse les mesures au détriment du présent, il rend vénérable tout ce qu’il recule. […] Et l’esprit de pitié, nous le verrons tout à l’heure, avorte et fait fausse route dans la littérature, aussitôt qu’il s’éloigne de sa source unique. […] La seconde période embrasse le dernier siècle, depuis le Réformateur jusqu’à Alexandre Ier ; c’est la plus stérile, malgré son faux air de progrès sur la précédente ; elle est caractérisée par l’imitation servile de l’Occident. […] On trouvera dans la seconde partie une scène identique avec celle de la comédie, le faux testament signé par une femme, grimée et costumée à la ressemblance d’une riche défunte. […] Ce bonheur des deux amants dure une heure ; la nouvelle était fausse, le lendemain la femme de Lavretzky surgit à l’improviste.

1526. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

À mon sens, il y en a trop, et parmi tant de diamants, on rencontre quelques pierres fausses. […] Mais ce proverbe est aussi faux dans la vie des nations que dans celle des individus. […] Des géomètres récents ont construit une géométrie en supposant que le Postulatum d’Euclide est faux, et ils sont arrivés à des théorèmes non seulement nouveaux, mais utiles. […] Celui-ci mettait son lorgnon, et, dans la belle statue, démêlait le manque d’aplomb, la restauration fausse et spécieuse, l’attitude de mode : il se dégoûtait et s’en allait, non sans motifs. […] Don Pèdre, les Cosaques, le Faux Démétrius, la Guerre sociale, la Conjuration de Catilina, études solides, complètes, bien appuyées, bien exposées, mais dont les personnages ne vivent pas ; très probablement, c’est qu’il n’a pas voulu les faire vivre.

1527. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Il porte sur la biographie d’une fausse Jeanne d’Arc, la dame des Armoises. […] Ils sont plus amusants que les historiens et ils ne sont pas beaucoup plus faux. […] Une faiblesse, un faux pas et c’en était fait. […] Mais cette fausse terreur fut passagère, les boulevards se remplirent de nouveau. […] On l’avait déjà averti qu’il tombait dans le chimérique et dans le faux.

1528. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

On en vint à comprendre que les résurrections tentées sont toujours imparfaites, que toute imitation est un pastiche, que l’accent moderne perce infailliblement dans les paroles que nous prêtons aux personnages antiques, que toute peinture de mœurs doit être indigène et contemporaine, et que la littérature archéologique est un genre faux. […] Thomas Moore, le plus gai et le plus français de tous, moqueur spirituel1199, trop gracieux et recherché, et qui fit des odes descriptives sur les Bermudes, des mélodies sentimentales sur l’Irlande, un roman poétique sur l’Égypte1200, un poëme romanesque sur la Perse et l’Inde1201 ; Lamb, le restaurateur du vieux drame ; Coleridge, penseur et rêveur, poëte et critique, qui, dans sa Christabel et dans son Vieux Marinier, retrouva le surnaturel et le fantastique ; Campbell, qui, ayant commencé par un poëme didactique sur les plaisirs de l’Espérance, entra dans la nouvelle école tout en gardant son style noble et demi-classique, et composa des poëmes américains et celtes, médiocrement celtes et américains ; au premier rang Southey, habile homme qui, après quelques faux pas de jeunesse, devint le défenseur attitré de l’aristocratie et du cant, lecteur infatigable, écrivain inépuisable, chargé d’érudition, doué d’imagination, célèbre comme Victor Hugo par la nouveauté de ses innovations, par le ton guerrier de ses préfaces, par les magnificences de sa curiosité pittoresque, ayant promené sur l’univers et l’histoire ses cavalcades poétiques, et enveloppé dans le réseau infini de ses vers Jeanne d’Arc, Wat Tyler, Roderick le Goth, Madoc, Thalaba, Kehama, les traditions celtiques et mexicaines, les légendes des Arabes et des Indiens, tour à tour catholique, musulman, brahmane, mais seulement en poésie, en somme protestant prudent et patenté. […] Toutes ses peintures d’un passé lointain sont fausses. […] An honest man may like a glass, An honest man may like a lass, But mean revenge and malice fausse He’ll still disdain ; And then cry zeal for Gospel laws Like some we ken… … I rather would be An atheist clean, Than under Gospel colours hid be Just for a screen.

1529. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Conduite de l’action dramatique. » pp. 110-232

Les prétentions déplacées et les faux airs font l’objet principal du comique bourgeois ; les progrès de la politesse et du luxe l’ont approché du comique noble, mais ne les ont point confondus. […] Rien ne serait plus faux, que de les voir discuter en chantant, ou dialoguer par couplets, en sorte qu’un couplet devint la réponse de l’autre. […] Il eût été faux de chanter durant l’entretien de la scène ; il n’y a point d’air propre à peser les raisons de la nécessité d’un départ : mais quelque simple et touchant que soit l’adieu de Mandane, quelque tendresse qu’une habile actrice mette dans la manière de déclamer ces quatre vers, ils ne seraient que froids et insipides, si on se bornait à les réciter. […] Il serait également faux de faire alternativement parler et chanter les personnages du drame lyrique.

1530. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

Donc il ne dira rien, ou presque rien : il agira ; il péchera à la ligne la perruque du prince de Mantoue : c’est bien simple. — Et quant à Elsbeth, elle éprouvera (après un instant de dépit) un commencement léger de sympathie pour Fantasio, parce qu’il est après tout le seul homme du royaume qui ait deviné son secret et que cela crée, entre elle et le faux bouffon, une manière de muette complicité. […] La bougie de l’Etoile est comme une « fausse note », une regrettable disparate dans le marmiteux de toute cette mise en scène. […] Nous allons voir des brutes avares, amoureuses de la terre jusqu’au crime, des gars qui se flanqueront des coups de faux, quelque vieux paysan que ses enfants aideront à crever, probablement un notaire de campagne, presque sûrement un sorcier, une fille engrossée, une vache empoisonnée, un viol dans une meule de foin… » Et nous nous armions de patience. […] Une folie s’empare de Jan ; il empoigne la jeune femme… Antibel paraît avec sa faux… Et Jan se laisse tomber dans le précipice… « La Fabiane s’est vengée !  […] Il était facile d’expliquer cette condamnation par la défiance du jury à qui, sur quelque fausse apparence, les sentiments du Père Vignal pour Rose Morgan eussent semblé suspects, — et par cette considération, qu’il est vraiment trop commode à un prêtre de faire acquitter un accusé à qui il s’intéresse, tout en se retranchant derrière le secret professionnel pour taire le nom du coupable.

1531. (1906) L’anticléricalisme pp. 2-381

Tout n’était pas faux dans cette arrière-pensée du gouvernement ; mais ceci est caractéristique d’une autre manie, très analogue du reste à la précédente, des gouvernements despotiques. […] Il était persuadé sans doute que la France, parce qu’elle détestait les révolutionnaires de 1848, ce qui était vrai, était cléricale, ce qui était faux. […] Sans doute, cette thèse est fausse. […] La thèse est donc fausse, et quelques-uns pourraient aller jusqu’à la trouver ridicule. […] Ç’a pu être vrai, mais c’est faux actuellement plus qu’à moitié, plus qu’aux trois quarts.

1532. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Ce droit était faux, tyrannique, purement usurpé et contraire à tous les droits de la nature4. » — « Il n’y a aucune relation de maître, de serviteur, de père, d’enfant, de mari, de femme, qui ne soit établie sur un pacte mutuel et sur des obligations mutuelles ; en sorte que, quand une partie anéantit ces obligations, elles sont anéanties de l’autre5. » Si l’on veut lire le Contrat social en style clair, il n’y a qu’à lire les Lettres du ministre Jurieu contre l’Histoire des variations et la Politique tirée des propres paroles de l’Ecriture sainte, de Bossuet. […] Comme la mer, qui semble vouloir couvrir toute la terre, est arrêtée par les herbes et les moindres graviers qui se trouvent sur le rivage, ainsi les monarques, dont le pouvoir paraît sans bornes, s’arrêtent par les plus petits obstacles et soumettent leur fierté naturelle à la plainte et à la prière.  » La comparaison est radicalement fausse ; mais l’idée est juste. […] Ce seraient des citoyens infiniment éclairés sur leurs devoirs et qui auraient un très grand zèle pour les remplir… Les principes du christianisme bien gravés dans les cœurs seraient infiniment plus forts que ce faux honneur des monarchies, ces vertus humaines des républiques et cette crainte servile des états monarchiques. » — Reprenant l’idée de Bayle, Rousseau, en visant directement Montesquieu, écrit : « On nous dit qu’un peuple de vrais chrétiens formerait la société la plus parfaite que l’on puisse imaginer. […] Le premier est faux, je ne sais pourquoi, et dans le chapitre XIII, Voltaire ne parle que de ceci que les Juifs ne croyaient pas à l’immortalité de l’âme. […] Dans l’Emile, Rousseau suppose un père de famille du XVIIIe siècle, qui, convaincu que la société dont il fait partie est complètement gangrenée, que lui-même ne pourrait donner à son fils que des défauts, des vices, des sentiments faux et des idées fauses, confie son fils à un-ange, non pas pour l’instruire, car il ne faut pas enseigner, mais pour surveiller et guider très légèrement dans cet enfant le développement naturel du cœur et de l’esprit.

1533. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

Hugues Le Roux, et l’analyse express que je viens d’en décrire ne saurait, si on s’y tenait, qu’en donner une fausse idée. […] Et le sang jaillit de la carotide, souffletant les soldats au visage, et, passant par-dessus leurs têtes, alla rougir la fausse petite porte, tout nouvellement rebadigeonnée. […] Sully-Prudhomme a, comme nous, été séduit par cette poésie sans prétention, sans recherche ni faux éclat, ne demandant aux mots qu’un moyen d’exprimer exactement la pensée. […] » En effet, le faux polyglotte s’était contenté d’écrire, en retournant les mots, deux vers de Racine. […] On le voyait se renfermer en lui-même, s’efforçant de se convaincre que la nécessité politique l’absolvait ; que, à l’exception des formes, au fond tout le reste était de son côté ; ce qui était faux.

1534. (1901) Figures et caractères

Il y a de fausses routes en histoire. […] Il reste bien toujours sincère et savant, préoccupé de donner à son histoire « la solide pierre où elle s’assoit », mais la vue de l’historien se fausse et s’exaspère. […] La pensée bourdonne de tant de voix discordantes, rauques ou fausses, avinées ou doucereuses, éloquentes et criardes, qui proposent une loi ou demandent une tête. […] De là sa bizarrerie et sa fausse extravagance. […] La vie au sortir d’ici va vous persuader de toutes ses voix fausses qu’elle seule vaut qu’on vive.

1535. (1894) Critique de combat

Opposition banale, stérile et fausse ! […] Il veut obtenir la même rançon de madame de Trémeur ; mais, attiré à un faux rendez-vous, il est forcé de rendre le papier compromettant à M.  […] Mabilleau se contente de nous dire : « Toutes les théories politiques et sociales de Victor Hugo sont une conséquence de son système littéraire ou, pour mieux dire, de son imagination. » — C’est vague, probablement faux, et peu compromettant. […] Trop de perles fausses ! […] » Entre ces deux extrêmes, aussi faux, aussi périlleux l’un que l’autre, le déterminisme est au point juste ; car il dit à l’homme : « Telle cause donnée, tel effet suit nécessairement, Mais ôte la cause et l’effet disparaîtra.

1536. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Puis c’est l’effondrement de la gloire académique et littéraire, la supercherie des faux manuscrits dévoilée en séance publique. — M.  […] Alors les démarches, les intrigues, les faux espoirs et les promesses décevantes qu’on accueille, puis les déceptions et les déboires. […] S’il y en a, parmi nous, qui cherchent à s’étourdir en chantant, écoutez bien : leur chanson, comme leur gaieté, sonne faux. […] Ici tous les personnages sont faux. […] Dumas n’est pas dans le faux, et le public n’a pas tout à fait tort.

1537. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

À cette époque, une fausse philosophie avait tellement usé l’erreur, que, pour être neuf, il ne restait plus à dire que la vérité, aussi vieille que le monde, qui donna tant de charmes aux méditations de M. de Saint-Pierre. […] Vous l’avez perdue ; et ce n’est ni votre imprudence, ni votre avarice, ni votre fausse sagesse qui vous l’ont fait perdre ; mais Dieu même, qui a employé les passions d’autrui pour vous ôter l’objet de votre amour ; Dieu, de qui vous tenez tout, qui voit tout ce qui vous convient, et dont la sagesse ne vous laisse aucun lieu au repentir et au désespoir qui marchent à la suite des maux dont nous avons été la cause. […] Examinez les hommes qui paraissent les plus heureux, vous verrez qu’ils ont acheté leur prétendu bonheur bien chèrement: la considération publique, par des maux domestiques ; la fortune, par la perte de la santé ; le plaisir si rare d’être aimé, par des sacrifices continuels: et souvent, à la fin d’une vie sacrifiée aux intérêts d’autrui, ils ne voient autour d’eux que des amis faux et des parents ingrats.

1538. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1867 » pp. 99-182

Un vieille courtisane peinte et plâtrée, l’aspect d’une actrice de province, avec un sourire et des cheveux faux. […] Là-dedans, une conversation de gens gênés comme dans du faux monde et qui se traîne. […] À l’hôtel, une chambre aux rideaux de fenêtres couleur de pâte d’abricot, au canapé de fausse moquette suspecte, aux descentes de lit pouilleuses ; — et le matin sur tout le corps des ampoules semblables à des boîtes de montres.

1539. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Cependant lorsqu’on a dit pour la première fois que le soleil était immobile et que la terre tournait, le sens commun de l’humanité déclara de même la théorie fausse. […] Il est bien certainement faux que de nouveaux organes apparaissent soudainement en une classe d’êtres quelconques, comme s’ils étaient créés à dessein pour quelque emploi spécial. […] Si l’étonnante finesse d’odorat à l’aide de laquelle les mâles de beaucoup d’insectes trouvent leurs femelles mérite à juste titre notre admiration, pouvons-nous admirer de même la création de milliers de faux bourdons, entièrement inutiles à la communauté des Abeilles, et qui ne semblent nés en dernière fin que pour être massacrés par leurs laborieuses mais stériles sueurs, puisqu’un seul d’entre eux ou quelques-uns tout au plus sont nécessaires à la fécondation des jeunes reines nées dans la même communauté ?

1540. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

Il ne sait ce qui est vraiment beau ou laid, bon ou mauvais, vrai ou faux, mais il sait ce qu’il veut dire tout aussi bien que moi. […] Quelle notion précise peut-on avoir du bien et du mal, du beau et du laid, du bon et du mauvais, du vrai et du faux, sans une notion préliminaire de l’homme ? […] C’est la thèse des deux grains de sable de Leibnitz. — Et quel rapport, s’il vous plaît, entre cette bouffée de métaphysique, vraie ou fausse, et l’effet de l’esprit philosophique sur la poésie ?

1541. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Elle apparaît vers 1130 dans un poème allemand qui contient une curieuse version de la guerre de Charles en Espagne, puis, quelque dix ans plus tard, dans le faux Turpin et dans le Guide des Pèlerins. […] Le récit du faux Turpin, quoiqu’il présente des confusions, est encore celui qui conserve le plus de traits qu’on peut regarder comme appartenant à la réalité. […] Le rédacteur du faux Turpin, qui avait, lui, du pays une connaissance personnelle, a corrigé la faute, assez peu heureusement, en racontant que Dieu arrêta le soleil pendant trois jours ! […] C’est le diable qui a mis cette fable en crédit « pour décevoir les simples gens » ; tout bon chrétien doit se garder de se laisser prendre à cette fausse croyance et surtout d’aller se « mettre en ce péril ». […] Quand les perfides Juifs emmenèrent Dieu à la mort, cet homme leur dit : Attendez-moi, j’y vais aussi, voir mettre en croix le faux prophète.

1542. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Poète froid et faux dans la haute poésie lyrique, quelquefois gracieux dans l’ode anacréontique, fabuliste sans naïveté, mais parfois ingénieux, il fut plus heureux dans la carrière dramatique. […] Les ridicules, les travers, les vices, n’ont pas été de son ressort ; quand il a essayé de les peindre, il a employé des couleurs fausses. […] Nous aurions pu observer la différence des rangs devenant de plus en plus pesante, parce qu’elle n’avait plus de fondements réels, et qu’elle semblait porter à faux. […] Toujours il s’était rencontré dans une position fausse, où ses sentiments étaient déplacés ; aussi accusa-t-il de ses malheurs les institutions humaines. […] Le panégyrique, ainsi conçu, est, comme on l’a souvent remarqué, un genre essentiellement froid et faux.

1543. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Au lieu de ce vers : Et chaque année il avait un enfant, il lui propose celui-ci : Et chaque année lui donnait un enfant, sans s’apercevoir qu’il lait un vers faux. […] Le petit blanc sera ouvrier, travaillera du matin au soir, mènera la dure vie du prolétaire dans une civilisation industrielle, lira de mauvais journaux, aura des idées fausses et incomplètes …. […] On se promène entre les hauts châssis comme dans des défilés de montagnes, sur un plancher peu sûr, abondant en trappes, dans une lumière blafarde, fausse, indéfinissable, qui vient on ne sait d’où. […] Un seul faux pas pourrait les perdre. […] Édouard Grenier est encore jeune ; mais il serait également faux de dire qu’il ne l’est plus.

1544. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Bon, tu es mauvais ; vrai, tu parles faux ; pur, tu rauques en conduite. […] Je ne pense désormais Qu’à ta voix orientale, Aux fleurs fausses que tu mets Sur ta poitrine fatale. […] Beaucoup d’anecdotes sur des gens célèbres qu’il avait connus : Béranger, avec qui il n’avait rien de commun en dépit de leur fausse ressemblance physique ; Lamennais, Vigny, ses vrais pairs ; Flaubert, George Sand et Louise Collet. […] J’eusse, c’était la parole témérairement peut-être donnée par moi-même à moi-même de ne plus souffler un traître mot de moi-même, plaisanté de mon mieux à propos des fausses nouvelles d’un tour au moins original. […] Malgré les objurgations du président, elle s’entêta dans ses dires, sur quoi le substitut Castaing (sévère et juste comme Petdeloup) se leva requérant la condamnation de Louise Mouranvale, pour faux témoignage.

1545. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon » pp. 423-461

On se rappelle, dès les premiers chapitres des Mémoires, ce portrait presque effrayant du magistrat pharisien, du faux Caton, de ce premier président de Harlay, dont sous des dehors austères il nous fait le type achevé du profond hypocrite. […] Reste la bourgeoisie qui fait la tête de ce peuple et qu’il voit déjà ambitieuse, habile, insolente, égoïste et repue, gouvernant le royaume par la personne des commis et secrétaires d’État, ou usurpant et singeant par les légistes une fausse autorité souveraine dans les parlements.

1546. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

Ce fut alors seulement qu’il distribua ses pièces avec gradation et selon l’ordre où elles se présentent aujourd’hui : dans le premier livre, la jouissance pure et simple ; dans le second, une fausse alarme d’infidélité ; dans le troisième, le bonheur ressaisi, d’autant plus vif et plus doux ; dans le quatrième, l’infidélité trop réelle et le désespoir amer qu’elle entraîne. […] Au reste, il m’a dit que les sites décrits par Saint-Pierre dans Paul et Virginie étaient faux ; mais Parny enviait Bernardin.

1547. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Conclusion. Le passé et le présent. » pp. 424-475

À mesure que le wagon avance, vous apercevez, parmi les fermes et les cultures, le long mur d’un parc, la façade d’un château, plus souvent quelque vaste maison ornée, sorte d’hôtel campagnard, de médiocre architecture, avec des prétentions gothiques ou italiennes, mais entouré de belles pelouses, de grands arbres soigneusement conservés ; là vivent les bourgeois riches ; je me trompe, le mot est faux, c’est gentlemen qu’il faut dire ; bourgeois est un mot français et désigne ces enrichis oisifs qui s’occupent à se reposer et ne prennent point part à la vie publique ; ici, c’est tout le contraire ; les cent ou cent vingt mille familles qui dépensent par an mille livres sterling et davantage gouvernent effectivement le pays. […] Figurez-vous un opéra où il n’y a que des fausses notes.

1548. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

Vous ne pourriez pas déplacer un mot ni mettre une mesure longue ou brève dans la strophe sans produire un faux ton dans cette musique de l’oreille et de l’âme. […] « Puis le vulgaire, dit-il, et la parjure courtisane (la Fortune) se retirent en arrière de celui qu’elle a abandonné ; et, quand les tonneaux sont vidés avec la lie, les faux amis s’enfuient, bien décidés à ne pas s’associer au joug du malheur pour en partager le poids !

1549. (1860) Cours familier de littérature. IX « Le entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier (2e partie) » pp. 81-159

C’est ce sentiment qu’on voit percer à son insu dans la naïve correspondance de Mathieu de Montmorency avec sa Juliette ; il n’est pas amoureux, et il est jaloux ; on sent que, pour conserver plus sûrement la pureté de celle qu’il conseille, il veut, pour ainsi dire, la confier à Dieu et l’enivrer d’un mysticisme éthéré pour l’empêcher de respirer l’encens de la terre ; c’est ce qui donne aux lettres de Mathieu de Montmorency un ton mixte, moitié d’amant, moitié d’apôtre, que quelques personnes trouvent chrétien et que nous trouvons un peu faux à l’oreille. […] L’éclat de son front lui venait d’en bas et non d’en haut ; le faux jour de sa physionomie était un reflet de lumière inférieure ; son sourire pincé décochait éternellement l’ironie ou l’épigramme dans les salons, dans les journaux, à la tribune ; on ne voyait jamais sur ses lèvres que la joie de la malignité qu’il avait lancée.

1550. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Le parti de ce faux prophète de la populace et de la monacaille, de ce fou imposteur, Savonarola, se déclara irréconciliable avec le grand homme qui avait méprisé ses jongleries soi-disant évangéliques, mais plus réellement démagogiques. […] Machiavel, voulant donner à Laurent de Médicis, prince nouveau, des leçons de la politique du succès (fausse mais séduisante politique), prit son texte dans la vie de César Borgia, auprès de qui il avait résidé si intimement comme ambassadeur de Florence.

1551. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre VI. Bossuet et Bourdaloue »

Il l’appliqua avec modération, sans aucune idée de tolérance, mais par respect pour sa religion, et de crainte des sacrilèges qui pouvaient suivre des conversions forcées et fausses : les évêques du midi, l’intendant Bâville le jugèrent tiède. […] Le Sermon sur les fausses conversions a été appliqué à M. de Tréville.

1552. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Au fond de la plupart de ses raisonnements, il y a cette opinion, fausse sans doute, que la fortune ne s’acquiert qu’en exploitant les autres et en pressurant les pauvres. […] Mais, comme j’avais l’esprit juste, je vis en même temps que l’idéal et la réalité n’ont rien à faire ensemble ; que le monde, jusqu’à nouvel ordre, est voué sans appel à la platitude, à la médiocrité ; que la cause qui plaît aux âmes bien nées est sûre d’être vaincue ; que ce qui est vrai en littérature, en poésie, aux yeux des gens raffinés, est toujours faux dans le monde grossier des faits accomplis.

1553. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

— Eh bien, il est mannequin chez un médecin de fous… Oui il est le faux fou, dont le docteur dit : « Il n’est pas tout à fait guéri, mais il va mieux. » C’est Bourget qui nous raconte cela, ce soir. […] » Jeudi 30 mars Il y des moments, où sous l’action, goutte à goutte, des potins, des cancans, des réticences, de toutes les perfidies ambiantes, dont vous entoure l’envie parisienne, la confiance dans vos plus intimes est ébranlée : telle de vos amies que vous regardez comme la personnification de la sincérité, vous vous demandez vraiment, si elle n’est pas un peu fausse ; telle autre personne à laquelle vous croyez des qualités d’attachement sérieux, vous ne la voyez plus que comme une aimable et banale créature.

1554. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse sociologique »

Le détail et le groupement des spectacles qu’on lui présente doivent être tels qu’ils provoquent des images faiblement analogues à celles que donnerait la réalité et de nature à susciter comme celle-ci des sentiments d’aversion, de sympathie, d’excitation ; si ce charme ne s’opère pas, c’est que le livre est mauvais, mal fait, gâté à quelque endroit par quelque faute de composition qui ôtera l’illusion à tout le public, sans qu’une partie s’obstine à tenir pour ressemblant ce qu’une autre aura jugé faux. […] Or, cela est faux dans une large mesure.

1555. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

Il y raconte que sa mère, grosse de cinq mois, part du fond de l’Allemagne pour Naples, où il lui prend fantaisie de gravir le Vésuve : à la bouche du volcan, elle fait un faux pas et une fausse couche et Kotzebue naît sur un volcan.

1556. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre III. Poëtes françois. » pp. 142-215

Les adages boursouflés sont souvent déplacés, quelquefois faux, rarement neufs. […] S’il offre quelquefois du bas & du trivial, si quelques-uns de ses rôles sont insipides ou maussadement plaisans comme la Baronne de Croupillac dans l’Enfant Prodigue ; enfin, si parmi d’excellentes plaisanteries, il y en a plusieurs de fausses, il faut excuser ces défauts dans un homme qui a plus cultivé l’art de Sophocle, que celui d’Aristophane.

1557. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

Nous n’avons plus à nous émerveiller de voir l’aiguillon de l’Abeille causer sa propre mort ; de ce que de faux Bourdons soient produits en si grand nombre pour accomplir un seul acte générateur et pour que la plupart d’entre eux soient tués par leurs sœurs stériles ; de la haine instinctive de la reine pour ses propres filles fécondes ; de l’énorme quantité de pollen perdue par nos Pins ; de ce que l’Ichneumon se nourrisse du corps vivant de la Chenille, et de tant d’autres cas semblables. […] Je ne puis croire qu’une fausse théorie puisse expliquer, comme le fait la loi de sélection naturelle, les diverses grandes séries de faits dont j’ai parlé.

1558. (1870) La science et la conscience « Chapitre I : La physiologie »

Où trouver un meilleur langage que celui-ci sur le libre arbitre : « c’est pour avoir confondu les désirs, les velléités, les penchants, avec la véritable volonté qu’on a cru trouver des difficultés insolubles relativement à la liberté morale ; on avait raison de nier la liberté relativement à l’existence et au mouvement des désirs, et par une fausse conséquence on a cru que la volonté et les actions manquaient également de liberté. » Entre les mains de Broussais, polémiste violent et vigoureux qui n’était pas précisément doué de ce que Pascal appelle l’esprit de finesse, la doctrine de Gall dégénéra en un matérialisme tranchant. […] Cette erreur capitale touchant la cause et le sujet des phénomènes psychiques fausse toutes les explications données par les physiologistes sur le principe de certains états moraux extraordinaires qui ont frappé l’attention des observateurs de la nature humaine, tels que la folie, l’enthousiasme, la fureur, la monomanie du meurtre, l’excentrique originalité du génie, etc.

1559. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Il est évident qu’il y a ici un faux respect humain qui tient en échec et qui arrête l’instinct naturel de Vicq d’Azyr.

1560. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

Ce que Bossuet désire et réclame, c’est qu’on renouvelle les condamnations contre la morale relâchée et les casuistes, déjà si flétris mais non découragés, contre le quiétisme et aussi contre le jansénisme, frappant ainsi les extrêmes à droite et à gauche, et les raffinés en fausse sublimité, épargnant d’ailleurs les personnes, et sans désigner aucun nom ; car il n’en veut qu’aux choses, à ce qui lui semble l’erreur.

1561. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Appendice » pp. 453-463

Je ne veux pas dire que ce premier jugement soit toujours mauvais et faux, mais il est hasardeux, et il court risque fort souvent de ressembler à de la prévention.

1562. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

C’était, sans contredit, le plus intrépide, le plus habile et le plus estimable des lieutenants de Bonaparte ; il avait favorisé, depuis la paix de Campio-Formio, la cause populaire en Hollande ; il venait en Italie, résolu, malgré la fausse politique du Directoire, de suivre son inclination et de satisfaire au vœu des peuples qui voulaient la liberté.

1563. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 44-63

Saint-Simon se cache ; il fabrique sa prétendue histoire en secret, comme on fabrique la fausse monnaie… Il a tout son génie, toute sa vengeance dans un tiroir bien fermé. » Le tiroir ne s’ouvrira, le baril de poudre ne sautera que quand il n’y sera plus.

1564. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Campagnes de la Révolution Française. Dans les Pyrénées-Orientales (1793-1795) »

Il écrivait à la fin d’un de ses rapports au ministre : « Les généraux sont malades ou absents, les canons me font faux bond, mais Ça ira !

1565. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

Les premières fois que j’eus l’honneur de causer avec lui, je crus m’apercevoir que, si on le laissait faire, il aimait assez la méthode de Socrate, c’est-à-dire à vous supposer quelque idée fausse que souvent vous n’aviez pas, et à se donner le plaisir de la réfuter en se faisant naturellement la belle part, — un peu comme Béranger.

1566. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

Ces sortes de petits jugements mesquins et faux, glissés au bas d’un texte, font tache dans un livre ; ils font injure au grand esprit qu’on a l’honneur d’introduire à l’étranger.

1567. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Ce livre, l’un des plus récréatifs et des plus substantiels qui existent, commencé d’abord presque au hasard, ne visant qu’à être une moquerie des romans de chevalerie et d’un faux genre littéraire à bout de vogue est devenu vite en avançant, sous cette plume fertile, au gré de cette intelligence égayée, un miroir complet de la vie humaine et tout un monde.

1568. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

Il aura nécessairement à souffrir des interprétations diverses données à sa conduite, des fausses appréciations répandues dans le public, et il sentira qu’il a besoin d’apologie.

1569. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

« Ce rapport, nous dit M. de Senfft peu suspect de sévérité envers l’abbé de Pradt, était l’ouvrage de M. l’archevêque de Malines qui y avait mis beaucoup de déclamation et de faux brillant.

1570. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

A l’entendre nous développer le secret de ce peuple-roi dans sa discipline, dans son ordre et sa tactique, dans son courage exempt du faux point d’honneur, comparer ensemble la phalange macédonienne et la légion romaine, puis pénétrer dans les conseils de son Sénat, dans cette conduite si forte au dehors, si ferme au dedans, Bossuet se montre historien philosophe, comme auparavant il était historien prophète.

1571. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand »

Sur quoi Talleyrand sans marchander se rend chez l’évêque de Babylone, et lui fait une fausse confidence : il lui dit que leur confrère Gobel est lui-même sur le point de les abandonner, que pour lui il sait trop à quoi cela les expose ; que sa résolution est prise, et qu’au lieu de risquer d’être lapidé par la populace, il aime encore mieux se tuer lui-même si l’un des deux vient à le lâcher.

1572. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

« J’y ajoute des remarques pour éviter de certaines erreurs biographiques, telles que, par exemple, cette supposition entièrement fausse que j’ai été mal avec mon père. » Par malheur, le dossier ne renfermait aucune des notes indiquées, mais seulement quelques pensées ou remarques étrangères à l’intérêt biographique.

1573. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVII. De la littérature allemande » pp. 339-365

Cette distinction est d’un esprit faux et d’un cœur étroit ; et si nous périssions, ce serait pour l’avoir adoptée.

1574. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Préface » pp. 1-22

Si la première n’était pas remplie, la plus haute loi mécanique serait fausse.

1575. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort »

Comme elle est toujours également outrée, on la soupçonne volontiers d’indifférence au vrai et au faux, au juste et à l’injuste.

1576. (1900) L’état actuel de la critique littéraire française (article de La Nouvelle Revue) pp. 349-362

Ils se souviennent de l’immense série de jugements faux portés par leurs prédécesseurs contre d’admirables artistes qu’ils saluent aujourd’hui avec respect, et devant toute tentative nouvelle, même s’ils n’y comprennent rien, ils sont saisis du scrupule très honorable de ne pas se préparer des mea culpa pour l’avenir.

1577. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VII. L’antinomie pédagogique » pp. 135-157

Cette objection porterait à faux.

1578. (1890) L’avenir de la science « XII »

On se fait souvent des conceptions très fausses sur la vraie manière de vivre dans l’avenir ; on s’imagine que l’immortalité en littérature consiste à se faire lire des générations futures.

1579. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre XI. Quelques philosophes »

La réputation et la gloire, qu’on peut voler à l’écrivain, sont de faux biens qui ne sauraient s’additionner avec les vrais biens : la pensée et la beauté.

1580. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Raphaël, pages de la vingtième année, par M. de Lamartine. » pp. 63-78

À travers le factice et le faux que je crois avoir assez indiqués, on noterait (gardons-nous de l’oublier), dans presque tous les chapitres ou couplets dont se compose le récit, des accents vrais, des touches heureuses et fines, inexplicable mélange qui déconcerte, et qui est plus fait pour attrister le lecteur déjà mûr que pour le consoler.

1581. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

Mais, en admettant ce doute universel des philosophes, il ne s’effraie pas de cet état ; il le décrit avec lenteur, presque avec complaisance ; il n’est ni pressé, ni impatient, ni souffrant comme Pascal ; il n’est pas ce que Pascal dans sa recherche nous paraît tout d’abord, ce voyageur égaré qui aspire au gîte, qui, perdu sans guide dans une forêt obscure, fait mainte fois fausse route, va, revient sur ses pas, se décourage, s’assied au carrefour de la forêt, pousse des cris sans que nul lui réponde, se remet en marche avec frénésie et douleur, s’égare encore, se jette à terre et veut mourir, et n’arrive enfin qu’après avoir passé par toutes les transes et avoir poussé sa sueur de sang.

1582. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Walckenaer. » pp. 165-181

Car de dire qu’il lui a manqué, au milieu de cette éducation si solide et si diverse, un bon maître de rhétorique qui réprimât en lui toute velléité de fausse rhétorique, ce n’est pas toucher le point juste.

1583. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Les romans de M. Edm. de Goncourt » pp. 158-183

Il s’est contenté d’observer, de noter et de résumer, sans conclure, sans se rallier à l’une des deux moitiés de la conception de la vie, sans que sa sagacité ou son coup d’œil soient altérés par une théorie préconçue nécessairement fausse parce que partielle.

1584. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Despréaux, avec le plus grand nombre des écrivains de son temps. » pp. 307-333

Il fatigua, tout ce temps-là, Louis XIV, par des lettres fréquentes qui décélent, si ce n’est une ame fausse, une ame au moins petite & foible : mais le roi fut inflexible.

1585. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

Pourquoi d’ailleurs se mettre à la torture pour rendre avec élégance une pensée fausse, avec finesse une idée commune ?

1586. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

À la même époque les juristes de Charles-Quint, ayant rédigé un Code contre les malfaiteurs qui frappent de la fausse monnaie et les sorciers accusés de sortilège, l’appelèrent Nemesis Carolina.

1587. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

Cette biographie, qui pouvait ne pas être du tout, — car l’histoire des hommes célèbres par leurs ouvrages n’est souvent que dans leurs ouvrages, et Voltaire même a fait une loi (fausse, il est vrai, parfois), de ne la chercher que là, — cette biographie s’est trouvée, par hasard (cette étoile de Sterne !)

1588. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Les deux cathédrales »

… J’entends par œuvre forte, une œuvre qui vit ; j’appelle matériaux avariés, des sentiments faux et des idées abolies.

1589. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre III. Les explications anthropologique, idéologique, sociologique »

Prouvant que le soi-disant progrès de la civilisation a pour résultat l’amalgame des races, Gobineau reconnaît qu’on fait fausse route si l’on cherche dans les qualités d’une race la cause du développement de l’esprit démocratique ; mais il regarde cet esprit comme résultant de cet amalgame lui-même.

1590. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre III. Contre-épreuve fournie par l’examen de la littérature italienne » pp. 155-182

Quant à D’Annunzio, tempérament essentiellement lyrique, il violente et fausse son génie : dans une recherche effrénée du succès, il suit la mode, du roman d’abord, du théâtre ensuite, et aboutit, lui le grand artiste, à des œuvres informes31.

1591. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVI. »

Le faux enthousiasme dont Horace les avait flattés l’un et l’autre serait devenu bien froid pour l’avenir, sans le charme philosophique mêlé par le poëte à ses flatteries mêmes.

1592. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Alceste ne va jamais au-delà de l’émotion ; mais il s’émeut à sa manière : les mouvements de son cœur, comprimés par une fausse honte, ne sont ni moins profonds, ni moins tumultueux que chez les autres hommes qu’il dédaigne, et qu’il croit dépasser de toute la tête. […] Enfin, vers la fin du troisième acte, Arthur, parti pour la campagne avec son beau-père et Amélie, à cheval près de la voiture qui les emmène, prétexte un faux pas de sa monture et revient à Paris. […] Mais se faire du passé un bouclier pour le présent, emprunter au seizième siècle l’apologie d’une rime ou d’un enjambement, et faire de ces questions, toutes secondaires, des questions vitales et premières, c’est un grand malheur à coup sûr, une décadence déplorable, une voie fausse et périlleuse. […] Cette donnée, on le voit, n’est pas fausse à son point de départ ; mais elle ne tarde pas à s’altérer. […] Au temps des Fausses Confidences, on pouvait dire que l’art se maniérait.

1593. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

L’air joue un si grand rôle dans la théorie de la couleur que, si un paysagiste peignait les feuilles des arbres telles qu’il les voit, il obtiendrait un ton faux ; attendu qu’il y a un espace d’air bien moindre entre le spectateur et le tableau qu’entre le spectateur et la nature. […] Une chose heureusement trouvée est la simple conséquence d’un bon raisonnement, dont on a quelquefois sauté les déductions intermédiaires, comme une faute est la conséquence d’un faux principe. […] Mais il attendit longtemps la réciprocité ; car Pierre de Cornélius ne le félicita qu’une seule fois pendant toute l’entrevue, — sur la quantité de champagne qu’il pouvait absorber sans en être incommodé. — Vraie ou fausse, l’histoire a toute la vraisemblance poétique. […] Est-il raisonnable de permettre à quelques citoyens de s’abrutir et de contracter des idées fausses ?

1594. (1890) Le réalisme et le naturalisme dans la littérature et dans l’art pp. -399

Mon autre frère fut bouilli Pour ouvrer de fausse monnaie. […] La mort, chez Holbein et chez lui, tient, outre sa faux, un sablier : elle tranchera les jours de l’homme, mais non sans l’avoir averti que le temps passe et qu’il en fallait bien user. […] L’art leur paraît avoir fait fausse route en s’engageant dans la voie de l’analyse qui l’éloigne de la nature. […] Laissant donc à d’autres la gloire de rapprocher le sublime du grotesque, il déclare que cette alliance ne peut donner naissance qu’à un genre faux, « parce qu’on y confond deux genres éloignés et séparés par une barrière naturelle. […] À supposer qu’il en jouisse, peut-il prévoir les accidents, les surprises, les fausses manœuvres ?

1595. (1911) L’attitude du lyrisme contemporain pp. 5-466

Fauche la faux, et fane la fourche ! […] Il a hâte de classer ses idées selon les commodités de l’action et fausse ainsi le réel. […] J’ai dit, au début de cette étude, combien, une fois pour toutes, cette accusation était fausse. […] L’harmonie de cette musique se dégage toute seule sans fausses notes. […] Toute vérité qu’on pousse trop loin se fausse, disait M. 

1596. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

Il arrive parfois que le poète ou l’artiste met un sentiment vrai dans un genre faux, choisi pour réveiller un public fatigué. […] Que d’idées fausses dans l’ensemble et dans les détails ! […] Les Anglais, surtout les Anglaises, en musique comme en morale, chantent faux naturellement. […] il y a en effet aussi, en France, nombre de gens qui parlent faux. […] Ensuite il le jette dans une fausse route, en tâchant de le transformer.

1597. (1888) Études sur le XIXe siècle

Que les monarchies, comme les prêtres, prouvent chaque jour que rien de bon n’en peut sortir, c’est un fait patent ; mais qu’il fallait proclamer la république de Palerme à Naples en 1860, c’est faux ! […] La distance paraît doublée ; on croirait regarder avec une longue-vue renversée : le contraire de ce qui arrive en hiver ou au printemps quand la limpidité excessive de l’air fausse la perspective et montre les objets l’un sur l’autre… Regardez : cette immense voûte cristalline a quelque chose de terriblement dur, qui pèse sur l’âme et n’éveille plus le sentiment de l’infini. […] Verga, Histoire d’une fauvette, Eva, ceux même de sa seconde manière, Tigre royal et Eros, semblaient promettre un peintre distingué de la vie mondaine : l’auteur y révélait une connaissance approfondie d’un monde que les romanciers, en général, ignorent qu’ils abordent rarement et ne décrivent presque jamais que sous un jour faux et conventionnel. […] Après avoir lu les Souvenirs de Paris, qui sont divisés en grands chapitres, et où M. de Amicis semble avoir imité les procédés de nos romanciers contemporains, on n’a de la ville qu’une impression vague et même fausse en bien des endroits. […] Ma tante Victoire appuya beaucoup sur cette excellente explication de mon libéralisme, puis elle ajouta : Il s’occupe avec ardeur de l’économie politique, de cette science erronée qui fausse l’esprit, et n’est d’aucune utilité. » Il était mieux compris par son oncle, le comte Jean-Jacques de Sellon, homme distingué, mais un peu idéologue.

1598. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

On démasque de faux apôtres ; on publie leurs manœuvres, leurs intrigues, leur négoce, leurs foiblesses. […] Sorbière ajoute que chaque médecin se croit un être important, & vante beaucoup sa méthode & sa pratique particulière, mais que la pratique d’eux tous peut être définie « l’impudence de dire de sottes raisons d’un mal, comme si elles étoient véritables ; la témérité d’ordonner des remèdes incertains, comme s’ils étoient infaillibles ; la vanité de tirer de la gloire des heureux succès, & l’adresse d’excuser les mauvais événemens ou les fausses prédictions ». […] Le libèle étoit un tissu d’anecdotes fausses & scandaleuses : il ne fit tort qu’au calomniateur. […] Furetiere répondit : Dangereux inventeur de cent vilaines fables, Sçachez que, pour livrer de médisans assauts, Si vous ne voulez pas que le coup porte à faux, Il doit être fondé sur des coups véritables. […] Celui-ci fut obligé de lui donner un acte par lequel il reconnoissoit qu’il étoit faux que l’évêque de Juliopolis eut apposé son seing sur la pièce originale de l’oraison funèbre.

1599. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1888 » pp. 231-328

Quant aux marchands qui sont morts ou qui ont déserté ces boulevards, ils sont remplacés par des vendeurs de meubles modernes, aux expositions se composant de mobiliers de salon en bois de chêne pour dentistes, de pendules de cabinet en marbre noir, de baromètres en noyer, de coffres-forts Huret et Fichet, entremêlés de vieux anges coloriés d’églises et de fausses poteries étrusques. […] Ils ne voient pas sur une tête de faux cheveux, dans une bouche, de fausses dents, n’aperçoivent pas même une légère déviation de l’épine dorsale, chez une femme bien habillée, mais perçoivent les moindres mouvements moraux de la physionomie, percent sur une figure, — ce qui se passe dans sa cervelle ou son cœur.

1600. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Dans le théâtre moderne, toutes passions sont fausses ou ridiculement outrées. […] Nier Moréas, c’est sacrifier au culte le plus faux, le plus absurde. C’est afficher la foi la plus hurone en la fausse nouveauté.

1601. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

J’avais même fait dans le Globe 7 un article sévère sur le Cinq-Mars de M. de Vigny, dont le côté historique si faux m’avait choqué. […] Je suis allé là comme on va partout quand on est jeune, à tout spectacle qui intéresse ; et voilà tout. — Je suis comme celui qui disait : « J’ai pu m’approcher du lard, mais je ne me suis pas pris à la ratière. » On a écrit que j’étais allé en Belgique avec Pierre Leroux pour prêcher le saint-simonisme : c’est faux.

1602. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier »

Ce fut sans doute un malheur de Nodier au début, que de Se prendre de ce côté, et de se trouver engagé par je ne sais quelle fascination irrésistible vers ces faux et troublants modèles. […] Mais ce qui sauva surtout Nodier et le lira hors de pair d’entre tous ces faux modèles secondaires auxquels il faisait trop d’honneur en s’y attachant, et qui ne devaient bientôt plus vivre que par lui, c’est tout simplement le talent, le don, le jeu d’écrire, la faculté et le bonheur d’exprimer et de peindre, une plume riche, facile, gracieuse et vraiment charmante, et le plaisir qu’il y a, quand on en est maître, à laisser courir tout cela.

1603. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Évadé de Rome, comme on l’a vu dans notre récit, il s’était fait ermite, sous le faux nom du Père Ange, au mont Maïella, dans le royaume de Naples. […] Matière délicate, vous le savez, sur laquelle souvent un faux bruit fait autant d’effet que la vérité même.

1604. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

Il attribue ces maladies de l’âme à la mauvaise éducation qui nous nourrit de préjugés et de superstitions avec le lait de nos nourrices ; il les attribue aux fausses idées du grand nombre (le vulgaire), imbu lui-même d’idées fausses sur la gloire et sur le bonheur, et qui nous fait vivre ainsi dans une atmosphère de mensonge, d’erreur et de corruption.

1605. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

Il termina en disant que tous leurs soins et tous leurs efforts devaient tendre à découvrir un expédient pour réussir auprès de ce chef, afin de ne pas faire un faux pas dans une matière aussi délicate. […] Peut-être même ne fut-ce qu’un faux bruit qui augmenta en passant de bouche en bouche, ainsi que cela se pratique ordinairement.

1606. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

C’est un modèle de fausse humilité. […] Ils ont étudié curieusement les lois, les actes publics, les formules judiciaires, les contrats privés ; ils ont discuté, classé, analysé les textes, fait dans les actes le partage du vrai et du faux avec une étonnante sagacité ; mais le sens politique de tout cela, mais ce qu’il y a de vivant pour l’imagination sous cette écriture morte, mais la vue de la société elle-même et de ses éléments divers, soit jeunes, soit vieux, soit barbares, soit civilisés, leur échappe, et de là résultent les vides et l’insuffisance de leurs travaux.

1607. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juin 1885. »

Donc, si nous vivions dans un temps moins soucieux des chronologies et plus amoureux du rêve, — dans un temps tel que le temps où les historiens unissaient à la mort de Lucrèce la naissance de Virgile, — cette vraie légende eût pu être dite, et les hommes, plus tard, sous la différence, apparente et fausse, des années, auraient vu la coïncidence, seule réelle, des jours : Richard Wagner naissant en l’heure même où mourait Victor Hugo, en cette date authentique, deux fois glorieuse, du vingt-deux mai. […] Fantin a tourné vers lui ces visages ; comprenant, encore, combien stupide est ce réalisme prétendu, qui oblige le peintre à représenter les hommes dans leurs poses accoutumées, et l’oblige à percevoir, ainsi, inexactement, leurs traits, que la nécessité de feindre un faux travail déforme, inévitablement.

1608. (1856) Cours familier de littérature. I « IVe entretien. [Philosophie et littérature de l’Inde primitive (suite)]. I » pp. 241-320

Ils touchent la corde fausse et courte, au lieu de la corde vraie et éternelle. […] Des scènes de mœurs orientales se déroulent pendant des chants intarissables, tantôt dans le palais de Damayanti, tantôt dans celui où Nala gémit inconnu sous le déguisement qui le cache et sous le faux nom de Wacouba.

1609. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

Après avoir été longtemps la Gaule semi-barbare sous ses druides, caste sanguinaire dont un système historique faux veut faire aujourd’hui une académie de platoniciens ; après avoir succombé sous les Romains, le flot des races orientales et des émigrations du Nord l’envahit, et la mélange d’un sang plus pur et plus raffiné que le sang gaulois. […] On dit qu’il les fait, cela est faux ; ce sont les peuples qui font les langues, ce sont les hommes de génie qui les consacrent en les faisant parler.

1610. (1857) Cours familier de littérature. III « XIIIe entretien. Racine. — Athalie » pp. 5-80

La faux de Tarquin dans la main de Richelieu, cruel par goût autant au moins que par politique, avait abattu toutes les têtes qui tendaient à se relever à la cour ou dans les provinces. […] Rien n’était plus faux ; Nicole s’adressait au poète Saint-Sorlin, espèce de fou qui se donnait pour prophète.

1611. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

N’y mettez point de fausse discrétion ; venez souvent, venez à toute heure : Brunoy sera toujours ouvert pour vous. […] Il affecte pour vous une fausse douceur, Et par là, de son fiel colorant la noirceur, Tantôt à cette peine il vous peint redoutable, Tantôt, voyant pour l’or sa soif insatiable, Il lui feint qu’en un lieu, que vous seul connaissez, Vous cachez des trésors par David amassés.

1612. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre premier. Le Moyen Âge (842-1498) » pp. 1-39

Où la stérilité de l’époque n’est pas moins attristante que dans les rapsodies des « grands rhétoricqueurs », c’est dans la fausse abondance des Mystères, si toutefois les Mystères appartiennent à l’histoire de la littérature, et que le texte en ait plus de valeur que celui d’un moderne livret d’opéra. […]   On voit par ces détails sommaires l’importance de la littérature « allégorique » au Moyen Âge ; — il resterait à rapprocher ces « personnifications » des « Entités » ou des « Quiddités » de la scolastique ; — et les unes et les autres de ce que l’on appellera plus tard « la réduction à l’universel » ; — ou, en d’autres termes, les idées générales. — Que, malheureusement, si les intentions étaient bonnes, le moyen était faux ; — car, à mesure qu’on allégorisait davantage, l’idée n’en devenait pas plus claire ; — et on s’éloignait à mesure du naturel et de la vérité. — C’est ce que voulait dire Pétrarque, dans la lettre citée plus haut, quand il reprochait aux auteurs du Roman de la Rose que leur « Muse dormait » ; — et quand il opposait à leur froideur l’ardeur de passion qui respire dans les vers de « ces chantres divins de l’amour : Virgile, Catulle, Properce et Ovide ».

1613. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Nous verrons, en nous arrêtant à cette œuvre singulière, jusqu’où va le talent inné d’Edgar Poe et où il se brise, se fausse et cesse d’être, sous les influences du milieu social le plus positif et le plus raisonnable dans le sens que Locke et Bentham donneraient à ce mot. […] Et moi-même, trompé par la distance, les faux renseignements et les calomnies de la Haine, je l’avais appelé avec un somptueux mépris : « le Roi des Bohèmes », et, pour épouvanter les bohèmes comme lui de sa destinée, j’avais fait une tête de Méduse de la tête souillée, morte et ramassée au ruisseau, de ce bohème de génie suicidé par ses vices, et coupable même envers son génie d’une immoralité qui l’avait atteint et faussé jusqu’au plus profond de son essence.

1614. (1868) Curiosités esthétiques « I. Salon de 1845 » pp. 1-76

. — Par exemple, dans le Martyre de saint Sébastien, que fait cette grosse figure de vieille avec son urne, qui occupe le bas du tableau et lui donne un faux air d’ex-voto de village ? […] David, dont les ouvrages nous font toujours penser à Ribéra. — Et encore, il y a ceci de faux dans notre comparaison, que Ribéra n’est homme de métier que par-dessus le marché — qu’il est en outre plein de fougue, d’originalité, de colère et d’ironie.

1615. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — II. (Fin.) » pp. 427-443

Louis Boulanger, ne pouvait donner à Léopold Robert qu’une très médiocre et très fausse idée de ce qui se tentait à Paris vers le même temps.

1616. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

C’est même un faux sens dans l’esprit de la pièce ; car il n’est pas précisément agréable à un vieillard de se souvenir qu’il a couru là où maintenant il marche à peine ; mais il peut aimer à se dire qu’il s’est traîné tout petit enfant là où il se traîne encore.

1617. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. (Tome XII) » pp. 157-172

Thiers a songé à faire la critique de tant de fausses manières historiques du jour, de tant de figures d’historiens à nous connues ; mais en les voyant de toutes parts, à droite et à gauche de la rive, se réfléchir dans sa parole limpide comme dans un ruisseau, elles ne m’ont jamais paru plus contournées ni plus grimaçantes.

1618. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Tallemant et Bussy ou le médisant bourgeois et le médisant de qualité » pp. 172-188

Faux goût de pointe, d’épigramme, de galanterie froide, venu des derniers troubadours, et le plus contraire à l’imagination vraie et au génie de la poésie.

1619. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

Il a exprimé, dans une page heureuse et que je veux citer, l’idéal de l’éducation libre comme il l’entendait et comme il avait commencé de la recevoir : On croit la jeunesse indomptable, parce qu’on se fait une fausse idée de l’autorité.

1620. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance diplomatique du comte Joseph de Maistre, recueillie et publiée par M. Albert Blanc » pp. 67-83

s’écrie-t-il quelque part : une grande maison de plaisance, pas plus et même moins russe que parisienne, où tous les vices dansent sur les genoux de la frivolité. » — Il dira comme un boyard de vieille roche : « J’en veux toujours à Pierre Ier qui a jeté cette nation dans une fausse route. » La convenance, le sentiment patriotique interdisent de détacher, dans les pages toutes palpitantes où il les faut chercher et où il les sème à poignées, les mots perçants qui, sous une autre plume que la sienne, seraient outrageux et cruels.

1621. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir a l’histoire de mon temps. Par M. Guizot »

J’aimerais qu’il nous en parlât davantage et avec détail, sans fausse modestie, et comme l’a fait à sa manière Cicéron.

1622. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

J’avais écrit sur Tocqueville dans le Moniteur et en le faisant j’avais eu en vue deux choses : témoigner d’abord, dans le journal même du Gouvernement, de mon respect et de mon estime pour un adversaire de haut mérite ; et, en second lieu, à la veille d’une grande solennité littéraire, au moment où l’on allait peut-être essayer de nous donner un faux Tocqueville, j’avais tenu a en présenter un vrai et à prendre, autant que je le pouvais, la mesure de l’homme, avant qu’il passât à l’état de demi-dieu ou de pur génie par le fait de l’apothéose académique.

1623. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’Impératrice Catherine II. Écrits par elle-même. »

Méchancetés, indiscrétions, mensonges, faux rapports, tracasseries, toutes les bêtises de la malice humaine rassemblées dans un cercle étroit et redoublées par l’étiquette, elle éprouve tout cela dans ses relations avec sa mère, avec l’Impératrice, avec son fiancé, avec les femmes qu’on lui donne pour argus ; elle est obligée de garder des mesures avec chacun, et, malgré sa grande jeunesse et son goût vif d’amusement et de plaisir, elle s’en fait une loi : comme chez tous les grands ambitieux (Sixte-Quint, Richelieu), sa passion dominante est assez forte pour se plier à tout et s’imposer d’abord la souplesse ; son orgueil fait le mort et rampe pour mieux s’élever ; seulement, femme et charmante femme qu’elle est, elle a ses moyens à elle, et elle y met de la grâce : « Au reste, je traitais le mieux que je pouvais tout le monde, et me faisais une étude de gagner l’amitié, ou du moins de diminuer l’inimitié de ceux que je pouvais seulement soupçonner d’être mal disposés en ma faveur.

1624. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poème des champs, par M. Calemard de Lafayette (suite et fin) »

Ce n’est pas tant d’avoir évité de nommer les oiseaux qu’il décrit, d’avoir dit : L’oiseau sur qui Junon sema les yeux d’Argus, pour le paon, ou L’aquatique animal, sauveur du Capitole, pour l’oie ; ce n’est pas tant de n’avoir osé nommer la cage que comme un toit d’osier où pénètre le jour , et de ne s’être point résigné à appeler un chat un chat, mais L’animal traître et doux, des souris destructeur ; ce n’est pas tant de ces travers de détail et de tous ces méfaits de fausse élégance que je le blâme ; c’est surtout d’avoir mal observé et connu son sujet.

1625. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « M. de Pontmartin. Les Jeudis de Madame Charbonneau » pp. 35-55

Il n’y a d’un peu engageant vraiment que le début ; il y montre avec esprit (ce n’est pas ce qui y manque), et en se faisant plus neuf, plus ingénu qu’il ne l’a jamais été, ses étonnements, ses premiers faux pas dès son entrée dans la vie parisienne sous les auspices de M. 

1626. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Tout cela est faux et injuste.

1627. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

On s’est depuis longtemps raillé de ces romans ou tragi-comédies d’autrefois, où l’on montrait Alexandre amoureux, Porus amoureux, Cyrus amoureux, Genseric amoureux ; mais Mâtho amoureux, ce Goliath africain faisant toutes ces folies et ces enfantillages en vue de Salammbô, ne me paraît pas moins faux ; il est aussi hors de la nature que de l’histoire.

1628. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Je sais qu’il y a en tout ceci bien du jeu, que l’art est une chose fort différente de la nature, que ce qui s’appelle roman en particulier est fait pour plaire et amuser à tout prix, et le plus souvent moyennant illusion : je ne voudrais pourtant pas qu’on y mentît par trop, qu’on y donnât des idées par trop fausses et chimériques. et j’ai présent à l’esprit en ce moment la boutade d’un moraliste un peu misanthrope, qui écrivait pour lui seul après la lecture de quelqu’un de ces romans à la Sibylle ou à la Scudéry : « Quand je me reporte en idée aux débuts de l’espèce humaine sur cette terre, à cette longue vie sauvage dans les forêts, à ces siècles de misère et de dureté de l’âge de pierre qui précéda l’âge de bronze et l’âge même de fer ; quand je vois, avant l’arrivée même des Celtes, les habitants des Gaules, nos ancêtres les plus anciens, rabougris, affamés et anthropophages à leurs jours de fête le long des fleuves, dans le creux des rochers ou dans les rares clairières ; — puis, quand je me transporte à l’autre extrémité de la civilisation raffinée, dans le salon de l’hôtel de Rambouillet ou des précieuses spiritualistes de nos jours, chez Mme de Longneville ou chez Mme de…, où l’on parle comme si l’on était descendu de la race des anges, je me dis : L’humanité n’est qu’une parvenue qui rougit de ses origines et qui les renie.

1629. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

Autant le faux et fade inédit est méprisable, autant l’inédit qui en vaut la peine est curieux et amusant ; c’est un voyage dans un pays neuf : l’esprit ennuyé et fatigué de croupir sur les mêmes objets s’y renouvelle et s’y rafraîchit.

1630. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

Je comprends très-bien le mouvement équitable et généreux qui porte un homme du métier, et qui en sait les épines, ennuyé à la fin de n’entendre parler de Fréron chez Voltaire que comme d’un âne, d’un ivrogne et de pis encore, à s’enquérir du vrai et du faux, et à vouloir vérifier une bonne fois l’exactitude de ces accusations infamantes.

1631. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine. (suite et fin.) »

C’est un bon cœur d’homme, plein de candeur, de sincérité, d’amour du vrai, de haine du faux.

1632. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [I] »

Un Français, Guibert, parla de lui aux Français avec feu, avec savoir, avec éloquence ; mais, dans ses laborieux traités, il fit presque aussitôt fausse route, s’enfonça dans les détails de tactique et d’ordonnance, dans l’école de bataillon, et laissa de côté les grandes vues.

1633. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Jean-Baptiste Rousseau »

Dès le début, il voudrait nous faire croire qu’il est en lutte avec le génie comme avec Protée ; mais tout cet attirail convenu de regard furieux, de ministre terrible, de souffle invincible, de tête échevelée, de sainte manie, d’assaut victorieux, de joug impérieux, ne trompe pas le lecteur, et le soi-disant inspiré ressemble trop à ces faux braves qui, après s’être frotté le visage et ébouriffé la perruque, se prétendent échappés avec honneur d’une rencontre périlleuse.

1634. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

C’était le temps de la mode d’Ossian et d’un Charlemagne enjolivé, le temps de la fausse Gaule poétique bien avant Thierry, des Scandinaves bien avant les cours d’Ampère, de la ballade avant Victor Hugo ; c’était le style de 1813 ou de la reine Hortense, le beau Dunois de M. 

1635. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre X. De la littérature italienne et espagnole » pp. 228-255

Dans quelque genre que ce soit, tous les mots qui ont servi à des idées fausses, à de froides exagérations, sont pendant longtemps frappés d’aridité ; et telle langue même peut perdre entièrement la puissance d’émouvoir sur tel sujet, si elle a été trop souvent prodiguée à ce sujet même.

1636. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre II. Rapports des fonctions des centres nerveux et des événements moraux » pp. 317-336

L’hétérogénéité apparente serait moins alors dans la nature même de l’agent physique que dans les fonctions de l’instrument physiologique qui forme les sensations ; de sorte qu’en transportant, par une fausse attribution, les dissemblances de l’effet à la cause, on aurait en réalité classé les phénomènes médiateurs par lesquels nous avons conscience des modifications de la matière, plutôt que l’essence même de ces modifications… Tous les phénomènes physiques, quelle que soit leur nature, semblent n’être au fond que les manifestations d’un seul et même agent primordial ».

1637. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre III. La personne humaine et l’individu physiologique » pp. 337-356

Trompés par le langage et par l’habitude, nous admettons qu’il y a là une chose réelle, et, réfléchissant à faux, nous agrandissons à chaque pas notre erreur. — En premier lieu, l’être en question étant un pur néant, nous ne pouvons rien y trouver que le vide ; c’est pourquoi, par une illusion dont nous avons déjà vu des exemples163, nous en faisons une pure essence, inétendue, incorporelle, bref spirituelle164

1638. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre I. La lutte philosophique »

C’est le cas de Dalembert mathématicien illustre, esprit indépendant, au-dessus de l’ambition et de l’intérêt, ami de son repos jusqu’à l’égoïsme, et jusqu’à renoncer à l’expression publique de ses idées, excitant les autres sous main à se compromettre, et gardant lui-même un silence prudent : critique étroit, fermé à l’art, à la poésie, philosophe intolérant, affolé de haine contre la religion et les prêtres ; écrivain lourd et pâteux, sans tact, d’une inélégance innée, et d’une sécheresse qui se dissimule mal par l’emphase et la fausse noblesse.

1639. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

Ce moment s’est marqué dans Madame Bovary, dans les Faux bonshommes, le Demi-Monde, le Fils naturel, les écrits philosophiques et historiques de M. 

1640. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

Desjardins rédige en style de séminariste bilieux ; il est ignorant (jusqu’à prendre les philosophes grecs comme types d’altruistes alors qu’aucun n’a envisagé la morale autrement que comme une éthique) ; il est naïf (jusqu’à se féliciter des séances politiques où la droite et la gauche s’entr’applaudissent, citant comme telles l’incident où la loyauté de M. de Cazenove de Pradines fut saluée par tous ses collègues, — ce qui est faux, car il fut nargué par la droite, — et l’intervention de l’évêque d’Angers dans la politique d’Extrême-Orient — ce qui ne provoquait l’admiration d’aucun député informé, attendu que Mgr Freppel, chacun le savait, n’agissait que pour défendre ses missionnaires) ; il est encore obséquieux avec les gens en place (jusqu’à cette platitude : « Nous avons par bonheur un ministre de l’instruction publique à tendances idéalistes »). — Mais un autre que M. 

1641. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Oscar Wilde à Paris » pp. 125-145

Il vitupéra le faux simplisme de Paul Fort et ce qu’il appelait l’esthétique belge.

1642. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

L’hypocrisie des pharisiens, qui en priant tournaient la tête pour voir si on les regardait, qui faisaient leurs aumônes avec fracas, et mettaient sur leurs habits des signes qui les faisaient reconnaître pour personnes pieuses, toutes ces simagrées de la fausse dévotion le révoltaient. « Ils ont reçu leur récompense, disait-il ; pour toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta droite, afin que ton aumône reste dans le secret, et alors ton Père, qui voit dans le secret, te la rendra 252.

1643. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

Ne sentez-vous pas déjà comme le bon sens se substitue au faux point d’honneur, et comme ce Rabelais, qui ne fait rien par gloriole et par crânerie, va corriger désormais les derniers des Bayards ?

1644. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Les Gaietés champêtres, par M. Jules Janin. » pp. 23-39

Mais un ami, un homme amoureux des lettres, du fin style, un connaisseur sans faux scrupule, qui sait son Horace et son Apulée, a devant lui, je suppose, la masse de ces feuilletons que nous donne Janin depuis vingt ans comme l’arbre pousse ses feuilles.

1645. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Il est donc inexact et faux de dire qu’il ait vécu à l’étranger d’une pension du gouvernement autrichien : il continua de recevoir une indemnité régulièrement garantie et stipulée par des traités internationaux7.

1646. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Ducis. » pp. 456-473

Au milieu d’accents très naturels, il y paraît tout à coup de faux oripeaux ou des trivialités bourgeoises.

1647. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

Il n’a pas ce sentiment vif de la vérité, cette ardeur parfois sèche et plus souvent féconde qui ne s’attache qu’à elle et rejette les faux ornements.

1648. (1903) Zola pp. 3-31

Richepin : « La pornographie cesse où le talent commence », dangereuse parce qu’elle n’est pas tout à fait fausse et parce qu’elle est enveloppée d’une jolie formule, sert de couverture à beaucoup de plaisirs secrets et peu avouables.

1649. (1913) Le bovarysme « Troisième partie : Le Bovarysme, loi de l’évolution — Chapitre I. Le Bovarysme de l’individu et des collectivités »

Cette fausse conception d’elles-mêmes, leur a donc été utile à se former en nations ; mais on voit s’inscrire la réaction de ces jeunes énergies aux différences qu’elles imposent jusqu’à la Réforme, au gré de leurs convenances et de nécessités particulières, à la règle identique à laquelle elles avaient fait appel pour prendre forme sociale.

1650. (1889) Méthode évolutive-instrumentiste d’une poésie rationnelle

Mais une idée de vérité le domine, du Symbole : quoique dans les poèmes détachés, les quelques sonnets surtout dernièrement parus et faits spécialement pour l’évidence de cette idée, elle n’apparaisse que comme jeu singulier et un peu puéril et faux (rappelons-nous tels sonnets descriptifs d’une console, d’un lit, etc., où tout l’effort du poète tendit à décrire sans les nommer ces meubles !)

1651. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « J. K. Huysmans » pp. 186-212

Les fleurs rares et étranges dont le duc Jean garnit son vestibule, ne lui présentent que des images de charnier et d’hôpital : « Elles, affectaient cette fois une apparence de peau factice sillonnée de fausses veines ; et la plupart comme rongées par des syphilis et des lèpres, tendaient des chairs livides, marbrées de roséoles, damassées de dartres ; d’autres avaient le teint rose vif des cicatrices qui se ferment, ou la teinte brune des croûtes qui se forment ; d’autres étaient bouillonnées par des cautères, soulevées par des brûlures ; d’autres encore montraient des épidermes poilus, creusés par des ulcères et repoussés par des chancres ; quelques-unes enfin paraissaient couvertes de pansements, plaquées d’axonge noire mercurielle, d’onguents verts de belladone, piquées de grains de poussière, par les micas jaunes de la poudre d’iodoforme.

1652. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre I : De la méthode en général »

Si l’hypothèse précède l’observation, celle-ci risque d’être fausse et infidèle ; si elle ne la suit pas, elle est stérile.

1653. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre I : Principe de la métaphysique spiritualiste »

On ne cesse de la représenter sous les couleurs les plus fausses, tantôt comme une simple philosophie du sens commun, tantôt comme la restauration surannée de la métaphysique d’un autre siècle, tantôt comme la théologie des séminaires moins les miracles.

1654. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Paragraphe sur la composition ou j’espère que j’en parlerai » pp. 54-69

Ce contraste d’étude, d’académie, d’école, de technique, est faux.

1655. (1912) L’art de lire « Chapitre IV. Les pièces de théâtre »

C’est à la lecture que l’on ne peut plus prendre la fausse monnaie pour la bonne, et des sonorités plus ou moins savantes pour une idée ou un sentiment. « Certains poètes sont sujets, dans le dramatique, à de longues suites de vers pompeux qui semblent fort élevés et remplis de grands sentiments.

1656. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Maurice Rollinat »

Ceux qui avaient applaudi avec le plus d’enthousiasme l’étrange poète à trois voix, ont mieux aimé se déclarer dupes d’un faux artiste que de reconnaître la force réelle d’un talent vrai.

1657. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Hippolyte Babou »

Cette sensibilité ondoyante, dont parfois les impressions sont justes et vraies, et d’autres fois injustes et fausses, cette sensibilité qui, dans les Lettres satiriques, tourne si brusquement de la haine à l’amour et de l’amour à la haine, tient évidemment trop la place de l’étude attentive d’une conscience sévère, et Babou en a donné une preuve particulièrement malheureuse, et que je me permettrai de citer, parce que je le dois.

1658. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VIII : M. Cousin érudit et philologue »

Cousin en tire un instant après contre la Renaissance sont assez fausses.

1659. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXII. »

En dehors de cette poésie unique et sublime comme ce qu’elle a décrit, tout était faux, subtil, emphatique et faible dans ce courant de vibrations pindariques.

1660. (1927) Approximations. Deuxième série

Beaucoup ont l’œil faux ou inerte ; ils voient littéralement les objets, mais l’exquis, nonu. […] Manquer de goût à force d’en avoir, — le cas des Goncourt nous apprend que pareille anomalie peut se produire : lorsqu’il est tout entier jouissance, le goût en matière d’art fausse parfois le tact en matière de style. […] C’est par là que La Fin d’un beau jour rivalise vraiment avec la vie : le sujet central y est investi avec la lenteur détournée, les faux pas, les retours en arrière, les interruptions à travers lesquelles dans la réalité l’on arrive à la connaissance d’une histoire vécue. […] Sur combien de fausses pistes l’effort vers la sincérité ne nous engage-t-il pas, et à quels dangers il nous expose ! […] Comme un faux ami, oui ; car à la vie lui jamais ne manqua. « Mais moi je n’estime rien au-dessus de vivre et ce dont d’abord je ne veux rien laisser échapper, c’est de vivreid ».

1661. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Elle est surchargée de faux ornements et d’élégances laborieusement acquises. […] De là, ces réminiscences lourdement plaquées, ces maladroites afféteries, cette abondance de mots inharmonieux, d’épithètes inexpressives, de déplorables chevilles qui gâtent ses pièces les mieux venues et donnent l’impression d’une fausse note dans un morceau de musique. […] Il s’est abusé d’abord sur la portée de cette fausse affection paternelle. […] Il s’en tire à l’aide d’une fausse lettre de Cobourg, qu’il fabrique de toutes pièces, y compris la signature. […] Ce faux sceptique était un faux ambitieux et un faux courtisan.

1662. (1730) Des Tropes ou des Diférens sens dans lesquels on peut prendre un même mot dans une même langue. Traité des tropes pp. 1-286

Selon cette traduction, la pensée est fausse ; car Despautère savoit fort bien décliner (…). […] La traduction est l’écueil de ces sortes de pensées : quand une pensée est solide, tout ce qu’elle a de réalité se conserve dans la traduction ; mais quand toute sa valeur ne consiste que dans un jeu de mots, ce faux brillant se dissipe par la traduction. […] Il y a bien des propositions qui sont vraies dans un sens étendu (…), et fausses lorsque les mots en sont pris à la rigueur, (…) : nous en donerons des exemples en parlant du sens litéral. […] Distributif vient de (…), qui veut dire distribuer, partager. la femme aime à parler : cela est vrai en parlant des femmes en général ; ainsi le mot de femme est pris là dans un sens collectif ; mais la proposition est fausse dans le sens distributif, c’est-à-dire, que cela n’est point vrai de chaque femme en particulier. […] Il est vrai en général que les citations et les aplications doivent être justes autant qu’il est possible ; puisqu’autrement elles ne prouvent rien, et ne servent qu’à montrer une fausse érudition : mais il y auroit bien du rigorisme à condâner tout sens adapté.

1663. (1929) Les livres du Temps. Deuxième série pp. 2-509

Barrès lui donnait gratuitement une posture tout à fait fausse et humiliante. […] Faguet s’inscrive en faux contre cette filiation de Kant à Rousseau, enregistrée par M.  […] Mais en fait, c’est absolument faux. […] Rien de plus faux qu’une semblable comparaison, si l’on en croit Vogüé, que MM.  […] François Mauriac étaient faux ou boiteux.)

1664. (1924) Souvenirs de la vie littéraire. Nouvelle édition augmentée d’une préface-réponse

Les faux esthètes, pour qui le poète est un vaticinateur dédaigneusement debout sur son trépied, apprenaient à son école les nécessités de l’effort et les délices du travail. […] Il ne cherchait pas ce genre d’esprit qui se fausse à vouloir briller et qui croit triompher de la raison quand il ne triomphe qu’avec des mots. […] Je connaissais de vue, l’ayant aperçu quelquefois sur le boulevard, le légendaire Catulle, tanguant du ventre, le menton bien assis sur sa poitrine romantique de faux Christ digérant et repu. […] On prétendait qu’il s’était tué à force de travail et par l’abus des anesthésiques. « Rien n’est plus faux, me dit-elle. […] Rien n’est plus faux.

1665. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

Les faits présents sont si souvent contradictoires aux principes, que l’on aboutirait aux lois les plus fausses si l’on se contentait de les chercher dans les données de l’observation. […] De ce faux principe découlent toutes les théories vicieuses en fait d’art. […] L’Antigone, à son tour, nous laisse apercevoir quelques légères traces de cette fausse manière inventée à la fin du dix-huitième siècle et perfectionnée sous l’Empire et qu’on nommait alors la prose poétique. […] Il faut l’avouer, notre admirable dix-septième siècle, malgré toute sa noblesse de langage, son ferme et lucide bon sens et toutes ses délicatesses morales, avait conduit la poésie à l’entrée d’une fausse voie ; on devait s’y précipiter après lui. […] L’ennemi de la poésie en France, ce n’est pas la fausse imagination, c’est le faux bel esprit ; c’est, par-dessus tout, l’intolérance de la raison vulgaire qui se révolte contre tout ce qui la dépasse, contre tout ce qui dérive de la haute et véritable raison ; c’est la jalousie hargneuse qu’inspire toute distinction à ce sens matérialiste qui, pour être le plus commun, n’est pas pour cela le bon sens.

1666. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

Bref, on y savoure, dans une fausse sécurité, cette « douceur de vivre », qui est souvent le signe avant-coureur des révolutions. […] Un faux pas, un geste maladroit, et tout est perdu. […] Le conseiller d’État Réal est connu pour l’habileté avec laquelle il s’efforçait d’obtenir les aveux d’un innocent ou de susciter, au bon moment, un faux témoin. […] « Cette assertion, dit-il, est absolument fausse. […] Il est faux que les Français soient toujours — comme on dit en Amérique — excitables et gesticulatoires.

1667. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1870 » pp. 3-176

C’est terrible pour le détraquage de la machine, ces hauts et ces bas de l’espérance ; c’est mortel, ces illusions que les plus sceptiques acceptent au contact de la foule, à toutes les fausses bonnes nouvelles volant sur toutes les bouches, à la contagion du gobage des multitudes crédules : — illusions que détruit tout d’un coup la rédaction sèche du rapport officiel. […] Les poules picorent en pleine rue, les chèvres se promènent sur le trottoir, et l’on se croirait dans le Paris d’hier, si un futur prix de Rome n’esquissait pas dans un faux œil-de-bœuf une grande tête de la République, coiffée du bonnet phrygien, et si, de temps en temps, un tape-cul rapide ne montrait, à côté du garçon boucher qui le mène, un mobile regagnant son poste. […] Non, non, il n’y a plus, derrière ce mot République, une religion, un sentiment faux, si vous voulez, mais un sentiment idéal qui transporte l’humanité au-dessus d’elle et la fait capable de grandeur et de dévouement. […] Nous le trouvons dans une pièce d’hôtel, à la destination vague, meublée d’un buffet de bois jaune de salle à manger, et qui a pour décoration de cheminée deux lampes en fausse porcelaine de Chine, et pour milieu une bouteille d’eau-de-vie oubliée. […] Elle était restée presque effrayée de l’air chenapan qu’il avait pris là, et me donnait ce curieux détail, qu’ils avaient tous des sondes pour sonder les faux murs et les cachettes faites à l’encontre des Prussiens.

1668. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

Une notion fausse est souvent d’aussi bon usage qu’une notion vraie : il sera sans doute utile à certains de croire que le libre examen est le fondement du catholicisme ; ceux qui choisiront la thèse contraire n’auront pas un point d’appui moins sérieux ; enfin, ceux qui refuseront d’admettre la parenté de l’acte de foi et de l’acte de liberté et qui, au contraire, opposeront l’une à l’autre ces deux idées, auront acquis pareillement une base excellente pour l’évolution future de leurs déductions. […] Ghil jouera faux pour mon imagination visuelle, et l’r et l’o, au lieu de sonner comme des cuivres glorieux, me donneront, si on les joint, l’ingénuité des petites flûtes. […] L’art appartient en grande partie au domaine de l’inconscient, de cette intelligence obscure et magnifique qui rêve en certains cerveaux privilégiés ; l’intelligence ordinaire, active et visible, ne doit avoir en art que le rôle de prudente et timide conseillère ; si elle veut dominer et diriger, l’oeuvre se fausse, se brise, éclate comme sous de maladroits marteaux. […] Dans ses orbites creux, d’épouvantes remplis, J’ai fait coller deux très beaux lapis-lazulis ; J’ai mis artistement sur l’os blanc de sa nuque, Poli comme un ivoire, une vieille perruque ; J’ai, dans ce faux chignon, répandu ses parfums Préférés (souvenir de mes amours défunts) ; J’ai placé, pour cacher son rictus trop morose, A ses troublantes dents ma cigarette rose, Puis j’ai posé le tout (à la place d’un saint) Dans une niche, sur les velours d’un coussin. […] Oui, quand la perfection de la forme n’est que le résultat d’un pénible limage, d’une quête aveugle des raretés éparses dans les dictionnaires, d’un effort naïf à tirer, sur le vide d’une œuvre, un rideau constellé de fausses émeraudes et de rubis inanes. 

1669. (1891) Lettres de Marie Bashkirtseff

À mes félicitations, elle répondit d’une voix loyale et bien timbrée, sans fausse modestie, avouant ses belles ambitions et — pauvre être marqué déjà pour la mort !  […] Ou bien elles sont méchantes et alors on doit faire bien attention à ses écrits sous peine d’être mangée, Dieu sait par quelles dents plombées, écornées, fausses ; rien que d’y songer… fi. […] En outre, elle n’est pas bonne, et avec toutes les apparences d’une brutale franchise, elle sait être fausse au besoin. […] Quant à vos raisonnements ils sont bons, mais partis à faux. […] Si non… tant pis, je trouve qu’en voilà beaucoup en échange de vos fausses confidences.

1670. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

Si M. de Vigny altère et fausse l’histoire, ce n’est jamais par frivolité, c’est par trop de réflexion : c’est qu’il cherche comme l’alchimiste à transmuer les métaux, à faire de l’or avec de la terre, du diamant avec du charbon. […] Molé et de ses amis, tant il est faux de dire qu’il y ait eu de ce côté hostilité d’école ou de principes littéraires contre lui et contre la nature de son talent.

1671. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

Guessard, contradicteur net, armé, incisif, excellent redresseur du faux, et guide sur tous les points auxquels il a touché. […] Il a parlé de Fallot comme d’un homme qui s’égare et fait fausse route ; il a raillé cette classification par patois, par dialectes.

1672. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

Jacques Colonna osa se rendre à Rome et y afficher la bulle d’excommunication, sous les yeux des Allemands et du faux pontife. […] « Solitaire et pensif, les lieux les plus déserts je vais mesurant à pas lourds et lents, et je promène attentivement mes regards autour de moi pour éviter la trace de tout être humain sur le sable ; je n’ai pas de plus grande crainte que de rencontrer des personnes qui me connaissent, parce que, sous la fausse sérénité de mon visage et de mes paroles, on peut découvrir trop facilement du dehors la flamme intérieure qui me consume ; en sorte qu’il me semble désormais que les montagnes, les plaines, les rives des fleuves, les fleuves eux-mêmes et les forêts savent ce qui s’agite dans mon âme, fermée aux regards des hommes.

1673. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

Son Contrat social porte tout entier à faux sur un sophisme qu’un souffle d’enfant ferait évanouir. […] Il construit sur ce rêve une pyramide d’autres rêves qui, partant tous d’un principe faux, arrivent aux derniers sommets de l’absurde et de l’impossible en application.

1674. (1860) Cours familier de littérature. X « LVe entretien. L’Arioste (1re partie) » pp. 5-80

« Car l’un, ajouta-t-il, croit combattre pour la vertu, et combat pour la calomnie ; l’autre ignore s’il est dans le vrai ou dans le faux, et combat, par une magnanime générosité, pour arracher à la flétrissure et à la mort une si parfaite beauté. […] Une fille de roi, aimée d’un paladin de la cour de son père ; une amitié tendre entre cette princesse et sa suivante, devenue en grandissant avec elle son amie ; la séduction de cette Olinde par un débauché qui abuse de son innocence, cette ruse infernale de l’échange des vêtements sur le balcon, qui donne l’apparence du crime à l’innocence endormie ; le désespoir de ce fidèle amant, témoin de la fausse infidélité de celle qu’il respecte et qu’il adore, le silence qu’il s’impose, et la mort qu’il essaye de se donner pour ne pas flétrir celle qui lui perce le cœur ; ce Renaud, étranger à tous ces intérêts d’innocence, d’amour ou de crime, qui vient, par le pieux culte de la femme et de la justice, se jeter l’épée à la main dans cette mêlée comme la Providence ; ce vieux roi, qui pleure sa fille et qui la livre à sa condamnation à mort par respect pour les mœurs féroces de son peuple ; cet Ariodant, qui se revêt chez l’ermite de son armure de deuil, et qui va combattre masqué contre son propre frère pour le salut de celle dont le crime apparent le fait mourir deux fois ; ce repentir et cette confidence de la suivante Olinde dans la forêt, retrouvée comme la vérité au fond du sépulcre ; ce Renaud, qui interrompt heureusement le combat fratricide entre Ariodant et Lurcin, qui tue Polinesso et qui lui arrache la confession de l’amour de Ginevra ; ces deux amants qui se retrouvent, l’une dans son innocence, l’autre dans son dévouement, et qui s’unissent dans les bras du vieux roi aux acclamations du peuple !

1675. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

Canova, manquant de souffle, de force et de grâce cette fois, lui avait prêté son ciseau, mais non son génie ; un socle, gros comme la terre, pour offrir un champ assez vaste à la longueur des épitaphes, porte une statue colossale de l’Italie drapée, qui se penche et qui pleure sur le médaillon exigu de son faux grand homme. […] Ce prétexte était faux, car le despotisme italien-piémontais de la maison de Savoie à Turin était bien paternel et bien doux, en comparaison du despotisme autrichien d’un archiduc Léopold, régnant absolu à Florence, sous le nom et avec les armes d’un proconsul allemand.

1676. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

De cet excès de confiance dans la vue de l’esprit est résulté ce mélange de systèmes faux et de théories vraies, de rêveries brillantes et de divinations fécondes, qui se heurtent dans ses œuvres. […] Gil Blas est Français par ce genre d’esprit finement moqueur dont nous jugeons tout ce qui n’est que fausse apparence et mérite d’enseigne.

1677. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

On a pu dire qu’elle est elle-même une musique, ce qui est vrai en un sens, faux en un autre. […] Si leurrer quelqu’un signifie le tromper par l’appât d’une fausse espérance, c’est que le leurre était primitivement un morceau de cuir rouge, en forme d’oiseau, qui servait à rappeler le faucon, quand il ne revenait pas droit sur le poing de son maître.

1678. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1868 » pp. 185-249

Donc il me déplaisait déjà, quand il m’est devenu odieux, en disant d’une fausse peinture de Rubens qu’il a chez lui : « C’est si honnête !  […] L’autre jour il mettait notre vin en bouteilles, aidé d’un gandin à l’air humilié, et rinçant les bouteilles avec un faux diamant au doigt.

1679. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

Samedi 6 janvier Je suis à la première d’Aïssé ; j’ai devant moi le décor ridicule du salon de Ferriol — et ce salon, du moins le vrai, l’authentique, je le connais bien, car je l’ai découvert et fait acheter à mon cousin Alphonse de Courmont, ses boiseries 3 000 francs, — qu’il eût payées 30 000 chez Vidalenc — eh bien, parole d’honneur, les personnages de Bouilhet sont plus faux que ce décor. […] Il y a des chapeaux et des queues de grosse paille, qu’on faisait porter aux ribaudes ; des manteaux de punition, des sortes de tonneaux, sur le bois desquels était peint, d’une manière galante, par des Watteau de village, le crime qui y faisait enfermer le séducteur ; des cages pour immerger, pendant un temps fixé réglementairement, les boulangers, qui vendaient à faux poids ; des bonnets d’âne aux oreilles de fer, etc. — enfin, tout un magasin d’accessoires diaboliques, pour terrifier le prévenu, lorsque sa chair avait résisté à la torture.

1680. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

Bien au contraire, l’Événement du 9 septembre 1848 prenait la défense du « luxe que calomniait la fausse philanthropie de nos jours » et démontrait triomphalement la nécessité de la misère pour arriver à l’équilibre social. — « L’opulence oisive est la meilleure amie de l’indigence laborieuse, développe le journal hugoïste. […] Rien de plus faux.

1681. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIe entretien » pp. 5-85

Quant à nous, nous restons tristement au pied de l’échelle, bien convaincu qu’elle porte à faux, et que son sommet n’est qu’un vertige. […] Je suis l’instrument, bon ou mauvais, qui a reçu le premier souffle du siècle à travers ses cordes, et qui rend le son juste ou faux, mais sincère, et qui le rend, non pour que les autres s’accordent à sa note, mais pour qu’ils la jugent et la rectifient s’ils ont un autre diapason dans leur âme.

1682. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Il est glorieux sans doute pour l’Italie comme pour l’Angleterre que les deux plus grands prosateurs français de ce siècle n’aient pas jugé au-dessous de leur talent de copier ces deux modèles étrangers et d’écrire leurs noms sur les piédestaux éternels de Milton et de Dante ; mais le système de traduction qu’ils ont adopté l’un et l’autre est, selon nous, un faux système, un jeu de plume plutôt qu’une fidélité de traducteur. […] Il y a dans ceci du vrai et du faux, mais le vrai domine.

1683. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

C’est une débauche de verve écumante, c’est une gaze sur laquelle étincellent déjà çà et là des paillettes de faux clinquant et quelques diamants, mais le tissu de gaze est trop clair. […] Il est blessé à mort, il s’affaisse entre les bras de ses témoins ; une tache de sang suinte à travers son habit blanc de Pierrot ; les traits de son visage décoloré voudraient rire encore, mais ils agonisent malgré lui, et sous ce faux rire on sent que la pointe de l’épée a touché le cœur.

1684. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — I. » pp. 195-212

Je suis de ceux auxquels il suffit de ne point faire de faux pas en courant.

1685. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — I. » pp. 1-19

s’écrie-t-il, vous qui vîtes dans leur naissance les dérèglements des pécheurs qui m’écoutent et qui, depuis, en avez remarqué tous les progrès, vous savez que la honte de cette fille chrétienne n’a commencé que par de légères complaisances et de vains projets d’une honnête amitié : que les infidélités de cette personne engagée dans un lien honorable n’étaient d’abord que de petits empressements pour plaire, et une secrète joie d’y avoir réussi : vous savez qu’une vaine démangeaison de tout savoir et de décider sur tout, des lectures pernicieuses à la foi, pas assez redoutées, et une secrète envie de se distinguer du côté de l’esprit, ont conduit peu à peu cet incrédule au libertinage et à l’irréligion : vous savez que cet homme n’est dans le fond de la débauche et de l’endurcissement que pour avoir étouffé d’abord mille remords sur certaines actions douteuses, et s’être fait de fausses maximes pour se calmer : vous savez enfin que cette âme infidèle, après une conversion d’éclat, etc.

1686. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

Il est fâcheux, qu’il n’écrive pas plus simplement et qu’il sacrifie, pour son compte, à une fausse élégance.

1687. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Devenu à vingt-trois ans veuf de sa première femme, il songea à faire un mariage d’amour, et crut pourvoir au bonheur de toute sa vie en épousant une personne accomplie, mais qui était restée dans une position fausse, duchesse de Lorraine durant quelques heures, et puis bourgeoise après comme devant.

1688. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

Geoffroy Saint-Hilaire, sortant de la question de science et entrant dans celle de la littérature, croit voir dans Buffon une preuve écrite, une conception première à l’appui de sa théorie, et si, heureux de se retrouver dans Buffon, il le tire aussitôt à lui, et, en l’embrassant, le façonne ensuite à son image, j’interviens humblement et je commence à avoir un avis, non pas sur le fond même et sur le vrai ou le faux de la théorie, mais sur la question plus claire et ouverte à tous de savoir si cette théorie est ou si elle n’est pas dans Buffon.

1689. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Chateaubriand. Anniversaire du Génie du christianisme. » pp. 74-90

C’est dans la 7e partie où, après avoir passé en revue les tombeaux chez tous les peuples anciens et modernes, j’arrive aux tombeaux chrétiens ; je parle de cette fausse sagesse qui fit transporter les cendres de nos pères hors de l’enceinte des villes, sous je ne sais quel prétexte de santé.

1690. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — II. (Fin.) » pp. 198-216

c’est elle qui nous séduit, elle qui n’est que trouble et qu’agitation, qui ne tient à rien, qui fait autant de pas à sa fin qu’elle ajoute de moments à sa durée, et qui nous manquera tout à coup comme un faux ami, lorsqu’elle semblera nous promettre plus de repos.

1691. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — I. » pp. 312-329

Vous soupirez à Dieu pour l’absence de vos amis et fidèles serviteurs, et en même temps ils sont ensemble soupirant pour la vôtre et travaillant à votre liberté ; mais vous n’avez que des larmes aux yeux, et eux les armes aux mains ; ils combattent vos ennemis et vous les servez ; ils les remplissent de craintes véritables, et vous les courtisez pour des espérances fausses ; ils ne craignent que Dieu, vous une femme, devant laquelle vous joignez les mains quand vos amis ont le poing fermé ; ils sont à cheval, et vous à genoux ; ils se font demander la paix à coudes et à mains jointes ; n’ayant point de part en leur guerre, vous n’en avez point en leur paix.

1692. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — I. » pp. 409-426

Les femmes manquent toujours leur vocation quand elles veulent sortir des soins du ménage, de l’aiguille et du fuseau. » Dans ces dispositions si naturelles et si sincères, on conçoit l’embarras de Léopold Robert pour mettre un éclair au front de sa Corinne idéale ; de guerre lasse, il s’en était tenu à copier, en l’arrangeant pour ce rôle, une des belles brigandes de Sonnino, lorsqu’il se décida enfin, pour plus de sécurité, à effacer de sa toile la fausse muse, et il y substitua selon son cœur un Improvisateur populaire, qu’il avait vu et bien vu de ses yeux (1822).

1693. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — I » pp. 236-253

Dans tous leurs sermons, on les entendait parler contre les huguenots, et reprendre ceux qui les maintenaient et supportaient : Que c’étaient faux catholiques, et qu’il ne fallait obéir à un roi hérétique et qui était chef des huguenots, qui serait cause de la perdition de la religion catholique, apostolique et romaine au royaume de France, et que les huguenots abattraient toutes les églises.

1694. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — II » pp. 369-387

On s’y guérissait du moins du faux et fade Henri.

1695. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

L’abbé de Rancé, qui ne se payait pas de faux fuyants, lui répondait (octobre 1868) : Vous dites que la régularité s’est maintenue dans votre communauté plus qu’en aucune autre : en vérité, ce n’est pas l’opinion du monde ; elle est dans un décri universel, et il n’y a guère de chose plus connue que sa décadence.

1696. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

Il n’y eût pas eu de position plus fausse que la sienne entre Mme de Longueville qui était sa divinité, M. le prince qui était son héros, et le cardinal Mazarin qu’il appelait son Jules César.

1697. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — I » pp. 356-374

Un peu d’application et d’étude suffit pourtant bientôt pour dissiper ou pour réduire la plupart de ces fausses vues et de ces objections exagérées à distance : à le considérer de près, dans ses actes et dans ses Œuvres, on reconnaît qu’avec ses défauts et ses taches Frédéric est de la race des plus grands hommes, héroïque par le caractère, par la volonté, supérieur au sort, infatigable de travail, donnant à chaque chose sa proportion, ferme, pratique, sensé, ardent jusqu’à sa dernière heure, et sachant entremêler à son soin jaloux pour les intérêts de l’État un véritable et très sincère esprit de philosophie, des intervalles charmants de conversation, de culture grave et d’humanité ornée.

1698. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — II » pp. 414-431

On sait les circonstances imprévues de la bataille de Rosbach : une marche fausse, prolongée, devant un ennemi bien posté, qui avait eu le temps de se ranger en bataille, amena une défaite facile et prompte, mais dont l’effet moral fut immense. « C’était une bataille en douceur, dit Frédéric en l’annonçant à la margrave (5 novembre).

1699. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Journal d’Olivier Lefèvre d’Ormesson, publié par M. Chéruel » pp. 35-52

Un jour qu’il était commis pour interroger un prisonnier dans une affaire de faux, il dut le présenter à la question, faire faire tous les apprêts et même le faire déchausser : « Je souffris beaucoup en mon humeur, nous dit-il, d’être obligé d’user de sévérité et de voir les apprêts de la question, quoique je susse qu’elle ne serait pas donnée. » — Tel était l’homme de bien et du plus honorable caractère, auquel sa conduite depuis, dans le procès de Fouquet et la louange de Mme de Sévigné ont donné du lustre.

1700. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

Jusqu’à ce moment, je m’étais toujours flatté que le duc d’Orléans s’était laissé séduire, et je voyais les choses sous un faux jour ; maintenant, toute illusion était dissipée.

1701. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Lammenais » pp. 22-43

Si pour lui, dans l’ordre intellectuel, le vrai est tout entier d’un côté et le faux de l’autre, dans l’ordre moral le bien absolu, à ses yeux, est également tout d’un côté, et le mal du côté opposé ; à droite les bons, à gauche les méchants ; les agneaux séparés des boucs, pas de mélange !

1702. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Caractères de La Bruyère. Par M. Adrien Destailleur. »

Avant de montrer et de caractériser la vraie, il avait commencé par flétrir courageusement la fausse dans le chapitre de la Mode.

1703. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

L’Académie demeure comme l’unique vestige de l’ancienne société détruite. » C’était gentil à dire et flatteur à entendre ; les applaudissements éclatèrent : le malheur est que c’est parfaitement inexact et faux.

1704. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Une monarchie en décadence, déboires de la cour d’Espagne sous le règne de Charles II, Par le marquis de Villars »

C’était la banqueroute en permanence. il y avait de la fausse monnaie en circulation, et, pour y remédier, on avait à la légère démonétisé la bonne.

1705. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier »

L’opinion de Schiller sur Mme de Staël est la plus équitable, et les signes éclatants en même temps que les lacunes et les limites de cette nature extraordinaire sont relevés par lui et marqués de main de maître : « Mme de Staël, écrivait-il de Weimar à Goethe, resté d’abord à Iéna (21 décembre 1803), Mme de Staël justifiera pleinement l’idée que vous avez prise d’elle a priori ; elle est tout d’un jet ; point de mélange, rien de faux ni de pénible en elle.

1706. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Connaissait-on mieux la nature humaine au XVIIe siècle après la Fronde qu’au XVIIIe avant et après 89 ? »

La pensée de Bossuet est fausse, parce que, tout singulier que cela puisse paraître, ce grand orateur ne l’a obtenue que moyennant un escamotage.

1707. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Leur démolition engagea les ministres de sortir de la province, et, par leur désertion, ces faux pasteurs me laissèrent le champ libre aux conversions. » Qu’en dites-vous ?

1708. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

Le seul genre de création possible à cette distance, le roman-poème, est toujours lui-même douteux, un peu bâtard : il mène aisément au faux ; beaucoup de talent et le génie même de l’expression n’y sauvent pas de la raideur, du guindé, ou du pastiche, et, partant, d’un certain ennui.

1709. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

« L’histoire, me disait mon ami, qui n’est pas inconséquent et qui tient fort de Hume et de Fontenelle, n’est le plus souvent, et surtout à cette distance, qu’une fable convenue, un quiproquo arrangé après coup et accepté, une superfétation réelle portant sur une base creuse et fausse.

1710. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset. »

La plaisanterie, d’ailleurs, portait à faux, Louvois n’ayant pas couché dans la place ce soir-là.

1711. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

Ces jugements des étrangers qui nous choquent et nous scandalisent, la première condition pour les réfuter en ce qu’ils ont d’injuste et de faux, c’est de les connaître, de ne pas se boucher les oreilles de peur de les entendre.

1712. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. »

La mesure qu’on voudrait leur appliquer serait fausse autant qu’injuste.

1713. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. (Suite et fin.) »

L’esprit de parti fausse ainsi les vues et mène à des conclusions révoltantes.

1714. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

Chacun, dès que le grand homme paraît et se déclare, après l’avoir admis volontiers au premier degré, s’empresse aussitôt de le continuer à sa guise, de l’achever à sa manière et selon ses goûts, de lui dicter son rôle de demain ; et si le personnage ne répond pas à cette idée qu’on s’en fait et ne suit pas le programme, on est bien près de le renier, de s’écrier qu’il fait fausse route et qu’il se perd, ce qui arrive quelquefois, mais par d’autres raisons le plus souvent que celles dont on se payait d’abord assez à la légère.

1715. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. (Suite) »

J’espère que même alors, sous ce régime d’exception et dans ce monde des ordres privilégiés, c’était en partie faux.

1716. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Observations sur l’orthographe française, par M. Ambroise »

Il possédait au plus haut degré le genre d’éloquence ou plutôt d’élocution propre au Conseil d’État, le langage des affaires avec facilité, élégance, et même une nuance d’agrément, mais sans rien de la fausse rhétorique.

1717. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

Pourtant, je ne crains pas de le dire, chez aucun peut-être des écrivains de ce temps-ci, la faculté impersonnelle, dramatique, narrative, cette qualité que nous avons appris à goûter et à révérer dans Shakspeare, dans Walter Scott, comme dans ses représentants suprêmes, et de laquelle, à l’origine du mouvement romantique, on se promettait ici tant de miracles encore à naître, — nulle part, je le crois, chez nous, cette qualité-là ne s’est produite par des échantillons plus complets et plus purs, plus exempts de faux mélange, que chez l’écrivain réputé si sobre.

1718. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. le Cte Alfred de Vigny à l’Académie française. M. Étienne. »

C’est qu’en effet il est de ces choses qu’on ne peut entendre sans laisser échapper un mot de rappel : elles sont comme une fausse note pour une oreille juste.

1719. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre V. De la littérature latine, pendant que la république romaine durait encore » pp. 135-163

Si l’on veut toujours appeler la philosophie l’art des sophismes, l’on pourra dire avec raison que, pendant toute la durée de la république, les Romains repoussèrent ce faux esprit des Grecs, mais si l’on veut rendre à la philosophie l’honorable acception qu’elle a toujours eue dans l’antiquité, l’on verra que les Romains n’ont pu être de grands hommes d’état, de profonds législateurs et d’habiles orateurs politiques, sans être philosophes.

1720. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre II. L’éloquence politique »

Un faux goût d’antiquité décore les discours de toute sorte d’ornements mythologiques, grecs, romains ; on n’entend plus retentir que les noms de Catilina, de Marius, de Lysandre, de Thémistocle.

1721. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

Et il serait faux d’estimer son œuvre abstraite.

1722. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre premier. La contradiction de l’homme » pp. 1-27

Ceci est manifestement faux.

1723. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre XI. La Science et la Réalité. »

Encore en ce qui concerne l’avenir, ses éphémérides pourront être un jour contrôlées et nos descendants reconnaîtront peut-être qu’elles étaient fausses.

1724. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Stéphane Mallarmé » pp. 146-168

Mais une idée de vérité le domine : le Symbole, quoique dans les poèmes détachés, les quelques sonnets surtout dernièrement parus et faits spécialement pour l’évidence de cette idée, elle n’apparaisse que comme jeu singulier et un peu puéril et faux.

1725. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

Son analyse psychologique, vantée de quelques myopes, révèle indifféremment du vrai banal ou du faux, ne vise en réalité qu’à multiplier les lignes.

1726. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres inédites de la duchesse de Bourgogne, précédées d’une notice sur sa vie. (1850.) » pp. 85-102

Elle avait donc suivi son grand-père à Marly, et le roi se promenait après la messe auprès du bassin des Carpes, quand arriva une dame de la duchesse, tout empressée, et qui annonça au roi que, par suite du voyage, la jeune femme était en danger d’une fausse couche.

1727. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. de Lamartine. (Les deux premiers volumes. — Pagnerre.) » pp. 389-408

Le portrait de la duchesse d’Angoulême m’a surtout choqué par une fausse expression de charmes et par une prodigalité de coloris qui fait contresens avec le caractère élevé, sévère et presque austère d’une figure si propre à inspirer uniquement le respect.

1728. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — I. » pp. 441-459

Rien ne serait plus faux qu’une telle vue.

1729. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — III. (Suite et fin.) » pp. 128-145

Disons-le donc en concluant, et sans craindre d’offenser ses mânes, il a fait fausse route à un certain moment ; il s’est trompé, non pas tant en manquant le succès, ce qui peut arriver à tout homme noble et sensé, mais en s’obstinant dans une voie sans issue et dans une cause pleine de pièges et de ténèbres.

1730. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « De la retraite de MM. Villemain et Cousin. » pp. 146-164

Ils auraient montré à cette jeunesse, que de faux déclamateurs enivraient, ce que c’est que le vrai talent littéraire et historique quand il s’est encore aguerri dans la pratique, même incomplète, des affaires, et dans l’expérience de la vie.

1731. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

Elle empruntait à la fausse poésie du jour tous ses oripeaux, pour se persuader que son caprice du moment était un culte éternel.

1732. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

Ce système de M. de Lamennais, mais qui est surtout attrayant quand il se développe historiquement sous la plume de l’abbé Gerbet, n’a pas été reconnu depuis par l’Église : il a paru sinon faux, du moins trompeur, et il n’y a à lui reprocher peut-être, du point de vue même de l’orthodoxie, que d’avoir voulu s’établir à titre de méthode unique, à l’exclusion de toutes les autres : combiné avec les autres preuves et présenté simplement comme une puissante considération accessoire, il n’a jamais, je crois, été rejeté.

1733. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Regnard en a souvent de tel ; ainsi, dans Les Ménechmes, quand celui des deux jumeaux, fraîchement débarqué de Picardie, a affaire à un marchand fripier, syndic et marguillier, de plus créancier de son frère, et qui lui défile tous ses titres en le prenant pour son débiteur, le franc Picard s’irrite, il s’emporte contre ce faux créancier qu’il ne connaît pas et qu’il prend pour un imposteur : « Laissez-moi lui couper le nez !

1734. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

Tout ce qu’il dit à ce sujet dans ses lettres (et il y revient à plusieurs reprises) est de pur bon sens, d’un ton plus digne encore que moqueur, et sans fausse modestie.

1735. (1912) Le vers libre pp. 5-41

Il en résulte que les libertés romantiques, dont l’exagération (plaisante) se trouverait dans des vers comme ceux-ci les demoiselles chez Ozy menées ne doivent plus songer aux hy- ménées sont fausses dans leur intention, parce qu’ils comportent un arrêt pour l’oreille que ne motive aucun arrêt du sens.

1736. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

Puis, ce furent aussi de petits livres de fausse morale, comme la Femme et l’Amour, alternant avec d’autres livres d’histoire naturelle, comme l’Oiseau et l’Insecte, — et aujourd’hui la Mer !

1737. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Philosophiquement, la donnée de l’ouvrage est, sinon radicalement fausse, au moins excessivement risquée.

1738. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Il y a des philosophes qui croiraient se discréditer en avouant que leur science a des obscurités et que leur vue a des bornes ; ils auraient honte de fléchir sous un doute, ou de rester courts devant une objection ; ils goûtent l’admiration aussi vivement que les coquettes ; pour la garder entière, ils simulent des explications, comme elles achètent de fausses dents.

1739. (1888) Portraits de maîtres

Ce n’est plus le faux Quintilien, tel que La Harpe ou Geoffroy, peseur de mots et de diphtongues, pointilleux, inquisiteur d’une syntaxe factice, gardien jaloux de la poétique de Batteux et de la tragédie de Campistron. […] Cette fausse manière de voir a prévalu de nos jours. […] Aussi bien ce dédain protecteur témoigné par le poète à ses aïeux, cette affirmation si hautaine de sa supériorité sur les aînés de sa race, trahissent une vanité qui n’a rien de la fierté cornélienne et de l’orgueil byronien cette fausse note compromet la beauté de l’ensemble. […] Pourquoi faut-il que ses coups aient porté parfois à faux, atteint les plus dignes et de meilleurs que lui. […] Tout le siècle défile dans ces satires, depuis les faux dévots, que le poète n’épargnait pas, jusqu’aux faux démocrates, qu’il démasquait si vertement dans leur opposition officieuse : Passez, tribuns d’hier, orateurs des banquets, Passez la bouche close en habits de laquais.

1740. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

Ce sont des lettres et billets intimes, adressés par Mme de Staël à Camille Jordan, à cette âme affectueuse et sympathique, à cette âme chaleureusement oratoire qui s’était annoncée et révélée dans le Conseil des Cinq-Cents, et qui s’exhala en 1821 dans des accents d’éloquence déjà prophétiques, à l’heure où cette Restauration qu’il aimait, mais qu’il avertissait, fit pour jamais fausse route et s’égara. […] Dans une lettre à Mme d’Albany, du 16 août 1811, Sismondi, à propos de la mort d’Esménard, a dit : « Esménard, qui s’est tué à Fondi, est bien en effet et le poète et le censeur, et celui des fausses lettres de change, et celui qui a fait supprimer l’ouvrage de Mme de Staël, parce que le libraire s’est refusé à le gagner à prix d’argent139… » Esménard en effet dut beaucoup agir sur l’esprit de son ministre, le duc de Rovigo, et il put lui communiquer une première impression défavorable ; mais en telle matière la responsabilité ne descend pas, et il est juste qu’elle remonte aussi haut que possible, et qu’elle incombe à qui de droit. […] « Je désapprouve entièrement cette fausse direction donnée à la censure : c’est par là se rendre responsable de ce qu’on imprime.

1741. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Mémoires du général La Fayette (1838.) »

On trouve, en les considérant dans leur entier, bien des inconséquences et de fausses voies, mais aussi des sillons lumineux, des saillies franches, des traces sincères : moins honorables que les précédents, ils sont plus intéressants et touchants ; l’imagination les aime ; je les vois surtout romanesques et poétiques. […] L’accusation dont on a voulu souiller Sieyès est inique ; elle est fausse, et néanmoins il a mérité qu’on la fit. […] La Fayette, qui raconte ce détail et qui rappelle les chevaleresques paroles sur ce sang fidèle d’où la monarchie renaîtrait un jour, ne peut s’empêcher d’ajouter : « Constant (Benjamin Constant qui était de la conférence) se mit à rire du dédommagement qu’on m’offrait. » Et, en effet, la position de La Fayette en ce moment, au pied du trône des Bourbons, paraît bien fausse, surtout lorsqu’on a lu le jugement qu’il portait d’eux pendant 1814.

1742. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

Addison, en amateur délicat des curiosités morales, suit complaisamment les bizarreries aimables de son cher sir Roger de Coverley, sourit, et d’une main discrète conduit l’excellent chevalier dans tous les faux pas qui peuvent mettre en lumière ses préjugés campagnards et sa générosité native, pendant qu’à côté de lui le malheureux Swift, dégradant l’homme jusqu’aux instincts de la bête de proie et de la bête de somme, supplicie la nature humaine en la forçant à se reconnaître dans l’exécrable portrait du Yahou. […] » Il est grand, il est généreux, il est délicat, il est pieux, il est irréprochable ; il n’a jamais fait une vilaine action ni un geste faux. […] Ce n’est point l’orgueil ni la haine concentrée qui le roidissent. « Je n’ai point de ressentiment à présent, dit-il ; quoiqu’il m’ait pris ce que je tenais plus cher que toutes les richesses, quoiqu’il ait déchiré mon cœur (car je suis malade, très-malade, presque jusqu’à défaillir), pourtant cela ne m’inspirera jamais un désir de vengeance… Si ma soumission peut lui faire plaisir, qu’il sache que, si je lui ai fait quelque injure, j’en suis fâché… Comme il a été autrefois mon paroissien, j’espère un jour pouvoir présenter son âme purifiée au tribunal éternel1091. » Rien ne sert ; le misérable repousse hautainement cette prière si noble, par surcroît fait enlever la seconde fille et jeter le fils en prison sous une fausse accusation de meurtre.

1743. (1904) Zangwill pp. 7-90

Volontiers il citerait Platon et remonterait au déluge pour expliquer les faits et les gestes d’une belette, et, si l’on juge par l’issue »,… Il n’a pas bien vu toute la malice du bonhomme remontant exprès aux sources, aux citations, aux causes bizarrement éloignées ; il n’a pas bien vu tout ce qu’il y a de Molière comique dans La Fontaine, et cette fausse ou amusante érudition, qui n’est qu’une parodie amusée de l’érudition cuistre ; il enrégimente un peu vite son auteur parmi les historiens modernes. […] L’influence vraie est l’influence cachée ; non que l’opinion définitive de l’histoire soit en somme très fausse ; mais elle pèche tout à fait par la proportion. […] En fait de vertu, chacun trouve la certitude en consultant son propre cœur. » On ne me pardonnera pas une aussi longue citation ; mais on m’en louera ; et on la portera sans doute à mon actif ; car c’est un plaisir toujours nouveau que de retrouver ces vieux textes pleins, et perpétuellement inquiétants de nouveauté ; et quand dans un cahier on met d’aussi importantes citations de Renan, on est toujours sûr au moins qu’il y aura des bons morceaux dans le cahier ; — je ne dis point cela pour Zangwill, qui supporte toute comparaison ; — je sais tous les reproches que l’on peut faire au texte que je viens de citer ; il est perpétuellement nouveau ; et il est vieux déjà ; il est dépassé ; phénomène particulièrement intéressant, il est surtout dépassé justement par les sciences sur lesquelles Renan croyait trouver son plus solide appui, par les sciences physiques, chimiques, particulièrement par les sciences naturelles ; — mais ici que dirions-nous de Taine qui faisait aux sciences mathématiques, physiques, chimiques, naturelles, une incessante référence ; — c’est justement par le progrès des sciences naturelles que nous sommes aujourd’hui reconduits à des conceptions plus humaines, et, le mot le dit, plus naturelles ; je n’ignore pas toutes les précautions qu’il y aurait à prendre si l’on voulait saisir, commenter et critiquer tout ce texte ; mais telle n’est pas aujourd’hui la tâche que nous nous sommes assignée ; je n’ignore pas qu’il y a dans cet énorme texte religieux des morceaux entiers qui aujourd’hui nous soulèvent d’indignation ; et des morceaux entiers qui aujourd’hui nous paraissent extraordinairement faibles ; je n’ignore pas qu’il y a dans ce monument énorme des corps de bâtiments entiers qu’un mot, un seul mot de Pascal, par la simple confrontation, anéantirait ; je connais les proportions  à garder ; je sais mesurer un Pascal et un Renan ; et je n’offenserai personne en disant que je ne confonds point avec un grand historien celui qui est le penseur même ; si j’avais à saisir et à commenter et à critiquer le texte que nous avons reproduit, je sais qu’il faudrait commencer par distinguer dans le texte premièrement la pensée de Renan ; deuxièmement l’arrière-pensée de Renan ; troisièmement, et ceci est particulièrement regrettable à trouver, à constater, des fausses fenêtres, des fragments, à peine habillés, d’un cours de philosophie de l’enseignement secondaire, comme était l’enseignement secondaire de la philosophie au temps où Renan le recevait, des morceaux de cours, digérés à peine, sur Kant et les antinomies, sur le moi et le non-moi, tant d’autres morceaux qui surviennent inattendus pour faire l’appoint, pour jointurer, pour boucher un trou ; combien ces plates reproductions de vieux enseignements universitaires, ces morceaux de concours, de l’ancien concours, du concours de ce temps-là, combien ces réminiscences pédagogiques, survenant tout à coup, et au moment même que l’on s’y attendait le moins, au point culminant du dialogue, détonnent auprès du véritable Renan, auprès de sa pensée propre, et surtout de son arrière-pensée ; comme elles sont inférieures au véritable texte ; et dans le véritable texte comme la pensée même est inférieure à l’arrière-pensée, ou, si l’on veut, comme l’arrière-pensée est supérieure à la pensée, à la pensée de premier abord ; quel travail que de commencer par discerner ces trois plans ; mais comme on en serait récompensé ; comme la partie qui reste est pleine et lourde ; comme la domination de l’arrière-pensée est impérieuse.

1744. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

A l’exception de trois ou quatre grands modernes qui appartiennent encore à demi au siècle dernier, vous verrez que Racine, Corneille, La Fontaine, Boileau, Molière, Pascal, Fénelon, La Bruyère et Bossuet, ont répandu plus d’idées justes et véritablement profondes que ces écrivains à qui on a donné l’orgueilleuse dénomination de penseurs, comme si on n’avait pas su penser avant eux avec moins de faste et de recherche. » La théorie littéraire de Fontanes est là ; son originalité, comme critique, consiste, sur cette fin du xviiie  siècle, à déclarer fausse l’opinion accréditée, « si agréable, disait-il, aux sophistes et aux rhéteurs, par laquelle on voudrait se persuader que les siècles du goût n’ont pas été ceux de la philosophie et de la raison. » C’était proclamer, au nom des Écoles centrales, précisément le contraire de ce que Garat venait de prêcher aux Écoles normales. […] « On a voulu que cette tête opposât une force d’inertie et de résistance aux fausses doctrines et aux systèmes dangereux. […] Quels faux plaisirs t’ont flatté ! […] « Quant à l’individu qui se présente, la seule question à examiner consiste à, savoir s’il a le talent nécessaire, s’il a un bon esprit, et si l’on peut compter sur les sentiments qui guideraient ses recherches et conduiraient sa plume. » Tout ce qu’il y a de profondément vrai et de radicalement faux dans cette Note mémorable serait matière à longue méditation.

1745. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

On n’a excepté que : 1º tous les régents, membres et administrateurs de la justice qui ont séduit par des promesses ou effrayé par des menaces ; 2° ceux qui ont eu des correspondances non permises, unerlaubte ; 3° ceux qui ont attiré des troupes étrangères ou abusé du nom du souverain ; 4° ceux qui ont effrayé la nation par la fausse nouvelle d’une attaque de la part du roi de Prusse ; 5° ceux qui ont eu part au traité de 1786 ; 6° ceux qui ont guidé les mécontents et eu part à l’assemblée de 1787 ; 7° ceux qui, tant régents que bourgeois, ont participé à l’expulsion des magistrats ; 8° les chefs, commandants et secrétaires des corps francs ; 9° ceux qui ont menacé indécemment les magistrats ; 10° ceux qui ont voulu rompre les digues nonobstant l’ordre du magistrat ; 11º ceux qui ont résisté aux magistrats ; 12°ceux qui se sont emparés des portes ; 13°tous les ministres et ecclésiastiques qui ont suivi les corps francs ou participé à l’opposition des soi-disant, patriotes (pflichtvergessene Prediger) ; 14° les directeurs et écrivains des gazettes historiques, patriotiques, etc., etc., etc. ; 15° tous ceux qui se sont rendus coupables de meurtres, de violences ouvertes ou d’autres excès graves. » « J’ai retranché toutes les épithètes, et la pièce a perdu dans ma traduction beaucoup de beautés originales. […] Cette idée, toute cruelle qu’elle est, donne du prix à tous les instants ; chacun de ceux dont nous jouissons est autant d’arraché au sort, et on éprouve une sorte de frémissement et d’agitation physique et morale qu’il serait également faux d’appeler un plaisir sans peine ou une peine sans plaisir. […] Je conviendrai de tout ce qu’il y aura de vrai, et je ne vous fatiguerai pas d’une longue justification sur ce qu’il y aura de faux. […] Il est inutile de remarquer qu’il se trompe au moins pour quelques-uns de ces noms ; il subit l’influence des fausses informations dont on se repaissait à Brunswick ; il va tout à l’heure se rétracter.

1746. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre IV. Le mécanisme cinématographique de la pensée  et l’illusion mécanistique. »

Le devenir réel et le faux évolutionnisme. […] Il faut que nous la regardions bien en face, en elle-même, dans la conception radicalement fausse qu’elle implique de la négation, du vide, et du néant 96. […] Nous avons essayé de démêler ce qu’il y a de vrai et ce qu’il y a de faux dans cette idée, en ce qui concerne la spatialité (voir notre chapitre III). Elle nous paraît radicalement fausse en ce qui concerne la durée.

1747. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Les autres sont fausses et le christianisme est véritable ; les autres sont naturelles et le christianisme est surnaturel. […] Je trouve entièrement faux ce mot de J. […] Une fausse note et le concert qui nous enlevait nous fait rire. […] C’est beau une révolution, cette grande faux qui passe, un matin de soleil. […] Pour être vrai, un roman doit être faux.

1748. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Quant aux autres enfants, s’il n’y en a nulle trace dans les registres, c’est peut-être que la déposante ou l’administration leur avait donné, comme cela se faisait, un faux nom de famille. — Je ne sais rien, vous ne savez rien, nous ne savons rien. […] Il distingue les faux savants ou philosophes et les vrais, et souhaite que les vrais dirigent les États : mais à quoi les reconnaîtra-t-on ? […] Notre faux Huron ne pouvait s’empêcher ni de la désirer, ni de l’abdiquer en des mains aristocratiques. […] Je passe quelques épisodes. — Puis Julie est enceinte, puis elle fait une fausse couche, tout cela secrètement. — Puis, mylord Édouard, l’ami de Saint-Preux, ayant conseillé au père de Julie de la marier avec son maître d’étude, le baron fait une scène terrible à sa femme et à sa fille ; et la subtile Claire parvient à faire filer Saint-Preux, qui se rend à Paris. […] La plus sage et la plus chérie des femmes vient d’ouvrir son cœur à son heureux époux (c’est-à-dire de lui raconter, je pense, qu’elle a reçu Saint-Preux dans sa chambre et dans son lit de jeune fille, qu’elle a été enceinte de lui et qu’elle a fait une fausse couche).

1749. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — III. (Fin.) » pp. 175-194

C’est cette indignation généreuse qui donna naissance à ses Mémoires, et qui lui inspira la pensée de les faire entreprendre sous ses yeux pour rectifier tant de fausses et mensongères notions qu’on était en train d’accréditer.

1750. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

L’esprit n’est jamais faux que parce qu’il n’est pas assez étendu, au moins sur le sujet dont il s’agit.

1751. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

La foi avec tous ses motifs n’y ferait plus rien : dégagés que nous serions de ce souvenir de la mort, qui, comme un maître sévère, nous retient dans l’ordre, nous nous ferions un point de sagesse de vivre au gré de nos désirs, nous compterions pour réel et pour vrai tout ce que le monde a de faux et de brillant ; et notre raison, prenant parti contre nous-même, commencerait à s’accorder et à être d’intelligence avec la passion.

1752. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

Ce grand orateur, le premier qui ait réduit parmi nous l’éloquence à n’être que ce qu’elle doit être, je veux dire à être l’organe de la raison et l’école de la vertu, n’avait pas seulement banni de la chaire les concetti, productions d’un esprit faux, mais encore les matières vagues et de pure spéculation, amusements d’un esprit oisif.

1753. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

La prompte introduction de ce jeune homme timide et honteux dans ce monde pour lequel il n’avait pas été élevé, mais qu’il convoitait de loin ; ce tour de vanité qui fausse en lui tous les sentiments, et qui lui fait voir, jusque dans la tendresse touchante d’une faible femme, bien moins cette tendresse même qu’une occasion offerte pour la prise de possession des élégances et des jouissances d’une caste supérieure ; cette tyrannie méprisante à laquelle il arrive si vite envers celle qu’il devrait servir et honorer ; l’illusion prolongée de cette fragile et intéressante victime, Mme de Rênal : tout cela est bien rendu ou du moins le serait, si l’auteur avait un peu moins d’inquiétude et d’épigramme dans la manière de raconter.

1754. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — II. (Suite.) » pp. 434-453

Daru alors en Allemagne, en Westphalie (août 1808), et lui apprenant que « les bons Parisiens sont menacés de quatre grandes, comédies en vers », d’Andrieux (Les Deux Vieillards), de Picard (Les Capitulations), de Lemercier (Le Faux Bonhomme), et de lui-même Duval qui se met à lui citer des vers de son Aventurière, et qui regrette de ne le pouvoir consulter plus en détail : « Je me rappelle vos observations sur Le Tyran domestique, ajoute-t-il ; elles m’ont contrarié sans doute, mais j’en ai profité. » D’un caractère à part dans ce groupe des amis d’alors ; ombrageux, jaloux, très sensible à la critique, mais doué d’une certaine force de conception dramatique et de la faculté d’intéresser, Alexandre Duval, Breton de naissance, se pliait malaisément au ton de la petite société des dimanches ; il dépassait un peu par sa chaleur et sa poussée d’imagination l’ordre de critiques de style et d’observations de détail si goûtées d’Andrieux et de ses dociles émules.

1755. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Une Réception Académique en 1694, d’après Dangeau (tome V) » pp. 333-350

[NdA] Ici j’avais tranché à faux : en effet, dans une lettre de Voltaire à d’Argental du 1er février 1762, on lit : « Je reçois le paquet avec ma romancine.

1756. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « II » pp. 21-38

Ce sont là de détestables sentiments, en même temps qu’un détestable système et une fausse vue des véritables intérêts qui importent le plus aux hommes réunis en société.

1757. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance inédite de Mme du Deffand, précédée d’une notice, par M. le marquis de Sainte-Aulaire. » pp. 218-237

C’est la raison qui a inventé le calcul, et, par conséquent, les soupçons, les craintes, les fausses interprétations.

1758. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

Cette affaire que Henri IV avait tant à cœur n’était pas la plus agréable pour Casaubon à son début en Cour : il s’agissait d’assister, en qualité de juge commissaire, à la fameuse conférence qui était appointée par-devant le roi et le chancelier, entre le cardinal du Perron et Duplessis-Mornay, au sujet de nombreux passages allégués par celui-ci dans son traité De l’Eucharistie, et que du Perron arguait de faux : c’était un défi, un vrai cartel théologique qui devait le vider en champ clos.

1759. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. »

Il voudrait faire mentir ceux qui disent « que les Français commencent tout et n’achèvent jamais rien. » Il voudrait les désabuser de ce faux point d’honneur qui, dans les sièges, quand il est tout préoccupé, par ses inventions savantes, de ménager la vie des hommes, leur fait prodiguer la leur, sans utilité, sans aucune raison et par pure bravade ; « Mais ceci, disait-il, est un péché originel dont les Français ne se corrigeront jamais, si Dieu, qui est tout-puissant, n’en réforme toute l’espèce. » Hormis ce pur et irréprochable Vauban, tous ceux qui figurent dans cette histoire, y paraissent avec leurs qualités et leurs défauts ou avec leurs vices : Condé, avec ses réveils d’ardeur, ses lumières d’esprit, mais aussi avec des lenteurs imprévues, des indécisions de volonté (premier signe d’affaiblissement), et avec ses obséquiosités de courtisan envers le maître et même envers les ministres ; Turenne, avec son expérience, sa prudence moins accrue qu’enhardie en vieillissant, et son habileté consommée, mais avec ses sécheresses d’humeur et ses obscurités de discours ; Luxembourg, avec ses talents, ses ardeurs à la Condé, sa verve railleuse, mais avec sa corruption flagrante et son absence de tout scrupule ; Louvois, avec sa dureté et sa hauteur qui font comme partie de son génie et qui sont des instruments de sa capacité même, avec plus de modération toutefois et d’empire sur ses passions qu’on ne s’attendait à lui en trouver.

1760. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

On ne relit pas assez cette charmante fable chez Apulée, qui est le seul et unique auteur de l’Antiquité qui nous l’ait transmise ; et c’est parce qu’on ne la relit pas chez lui, c’est parce qu’on la prend à des sources de seconde et de troisième main, que l’on s’en fait une fausse idée et qu’on s’en exagère la portée, le sens, en même temps qu’on s’en gâte le plaisir et que l’on en corrompt l’amusement.

1761. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

Elle a trop souvent manqué depuis à des écrivains énervés par le désir d’entrer un jour à l’Académie française. » Beyle ne savait pas très exactement l’histoire littéraire, et il n’appréciait pas la qualité essentielle, solide et grave, de la langue sous Louis XIV ; mais là où il ne se trompait pas, c’était sur l’abus qu’on avait fait depuis lors des fausses imitations et des prétendues conformités avec cette langue et surtout avec la poésie racinienne.

1762. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Maurice et Eugénie de Guérin. Frère et sœur »

Aujourd’hui c’est une seconde édition plus complète qui se publie et qui, se joignant au Journal et aux Lettres de Mme Eugènie de Guérin, sœur aînée du poète et morte elle-même peu de temps après lui, vient montrer quel couple poétique distingué c’était que ce frère et cette sœur : — lui, le noble jeune homme « d’une nature si élevée, rare et exquise, d’un idéal si beau qu’il ne hantait rien que par la poésie » ; — elle la noble fille au cœur pur ; à l’imagination délicate et charmante, à la croyance vaillante et ferme ; toute dévouée à ce frère qu’elle adorait, qu’elle admirait : et que, sans le savoir ; elle surpassait peut-être ; qu’elle craignait sans cesse devoir s’égarer aux idées et aux fausses lumières du monde ; qu’elle fût heureuse de ramener au bercail dans les heures dernières ; qu’elle passa plusieurs années à pleurer, à vouloir rejoindre, et dont elle aurait aimé cependant, avant de partir, à dresser elle-même de ses mains le terrestre monument.

1763. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

je laisse maintenant ces trouvailles à d’autres ; mais ce qui ne sera jamais démenti, c’est qu’ils étaient pleins de compassion pour les pauvres, qu’ils aimaient mieux les peindre que les puissants, qu’ils avaient pour les champs et les campagnards les aspirations de La Bruyère, qu’ils croyaient en leur art, qu’ils l’ont pratiqué avec conviction, qu’ils n’ont pas craint la bassesse du sujet, qu’ils ont trouvé l’homme en guenilles plus intéressant que les gens de cour avec leurs broderies, qu’ils ont obéi au sentiment intérieur qui les poussait, qu’ils ont fui l’enseignement académique pour mieux faire passer sur la toile leurs sensations : enfin, parce qu’ils ont été simples et naturels, après deux siècles ils sont restés et seront toujours trois grands peintres, les frères Le Nain. » J’honore le critique qui trouve de tels accents, et quand il aurait excédé un peu, comme c’est ici le cas, dans ses conjectures ou dans son admiration pour les trois frères indistinctement, il n’aurait fait que réparer envers ces bons et dignes peintres un long arriéré d’oubli et d’injustice, leur rendre avec usure ce que près de deux siècles leur avaient ôté ; il n’aurait pas fait d’eux un portrait faux, car il reconnaît et relève en toute rencontre leurs inégalités et leurs défectuosités originaires, il n’aurait donné en définitive qu’un portrait un peu idéal, ou du moins un portrait un peu plus grand que nature, un peu plus accusé et accentué de physionomie, mais toujours dans les lignes de la ressemblance et de l’individualité.

1764. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

C’est ainsi que Rivarol, blâmant les forfanteries de l’impiété dans la jeunesse, disait : « L’impiété est la plus grande des indiscrétions. » Mais ce n’était pas seulement en ce sens trop fin et malin que la France du XIXe siècle entendait blâmer les licences de ses pères ; elle les réprouvait en elles-mêmes comme fausses et funestes, et contraires au bon régime des sociétés humaines ; elle comptait bien, d’ailleurs, emprunter au XVIIIe siècle tout ce qui était progrès, résultat utile, lui prendre ses méthodes, mais pour les perfectionner ou les rectifier, à la lumière des grands événements historiques qui avaient éclairé son berceau : elle entendait le continuer en le corrigeant, en se garantissant avec soin surtout de ses conclusions tranchantes et précipitées.

1765. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame, secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. »

Ils espéraient lui faire faire un faux pas et le prendre au piège.

1766. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. (suite) »

» Malheureuse Marie, belle, spirituelle, aimée, qui a eu trop d’esprit seulement, qui a trop craint la vulgarité, qui n’a pas compris que l’imagination ne consiste pas à rêver l’impossible, et que son plus sublime effort est de trouver « la poésie de la réalité » ; âme malade des préjugés de l’éducation et du faux idéal qui flottait dans l’air à cette époque ; une de ces femmes qui, avec toutes leurs délicatesses, ont des sécheresses soudaines qui froissent les cœurs délicats, et à laquelle enfin, pour tout reproche, Michel, en se séparant, a pu dire : « Marie, vous manquez de simplicité ! 

1767. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

Un bouillant esprit, et qui exagérait tout37, a dit avec emphase : « Comprendre, c’est égaler. » C’est là, sous air d’axiome, une pensée fausse.

1768. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite et fin.) »

Cela lui imposait tout un langage et un style continu, une sorte de gamme et d’échelle harmonique où, la clé une fois donnée, rien ne fît fausse note et ne détonnât.

1769. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Tous ses premiers sentiments, ses premières pensées se ressentent nécessairement de cette position fausse ; les deux Émile, celui du roman et celui de la réalité, se confondent sans qu’on les puisse distinguer, si ce n’est par la conclusion.

1770. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

Si je provoque le scandale, je hais le mensonge ; jamais, pour triompher d’une résistance, je n’ai eu recours à la comédie de l’amitié ; jamais je n’ai prodigué les feintes promesses ni les faux serments d’une éternelle flamme ; jamais je n’ai séduit, jamais je n’ai trompé… » Morale facile, morale commode, mais qui va devenir rare encore en ce siècle, s’il continue dans la voie où il est depuis quelque temps engagé, — et où il semble faire des progrès chaque jour, celle du faux-semblant convenu et de l’hypocrisie utile.

1771. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

La Décade, organe des plus purs amis de Mme Roland, s’exprimait en ces termes par la plume de Ginguené : « Dans les portraits, il y a quelquefois de la justesse, quelquefois des peintures hasardées et même fausses, et souvent une exagération soit en bien, soit en mal, qui peut mécontenter les amis de ceux que l’auteur loue, presque autant que les amis de ceux qu’elle censure.

1772. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Leckzinska (suite et fin.) »

Il nous la montre « aimable dans ses reparties, ingénieuse dans le détail de ses réponses et de ses propos ; ayant le cœur droit, excellent », très aimée, populaire même ; digne fille d’un vertueux père « qui avait répandu en elle toute la bonté et la candeur d’un monarque honnête homme ; ennemie de la dépense, souffrant des tourments réels et des supplices quand elle apprenait quelque calamité publique » ; une vraie mère des Français ; adoptant et admirant tout des grandeurs de la nation ; ne se considérant d’ailleurs que comme la première sujette de son époux : « Véridique avec le cardinal Fleury, hardie même auprès de lui plutôt que fausse, elle sortait, mais rarement, de cet état d’indifférence où elle s’était mise, et lui reprochait avec esprit et doucement les petites tracasseries qu’il lui faisait auprès du roi ; elle souriait un peu malignement, le déconcertait quelquefois et prenait alors le ton de reine de France ; elle lui disait que c’était à lui qu’elle était redevable d’une telle parole du roi.

1773. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite.) »

Mais ne croyez pas que je me laisse aller à rien d’indigne de moi ; j’ai déclaré que je ne me vengerais jamais qu’en redoublant le bien que j’ai fait… » On reconnut trop tard alors qu’on avait fait fausse route et qu’au lieu de déférer au conseil de M. de Breteuil qui avait voulu un procès et un éclat, on aurait mieux fait d’étouffer l’affaire, selon l’avis prudent de M. de Vergennes.

1774. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Mlle Eugénie de Guérin et madame de Gasparin, (Suite et fin.) »

Ici je m’insurge : c’est décidément une fausse note tirée de trop loin : car si l’on est de Paris pour se rappeler la Joconde du Louvre, on est aussi de Paris pour bien d’autres choses.

1775. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Saint-Simon considéré comme historien de Louis XIV, par M. A. Chéruel »

Saint-Simon est outré ou incomplet, je l’accorde, mais non pas faux dans ses peintures.

1776. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Idées et sensations : par MM. Edmond et Jules de Goncourt. »

Hommes d’observation, de sincérité et de hardiesse, ils se sont fait une doctrine à leur usage : ils se sont dit de ne pas répéter ce qui a été dit et fait par d’autres ; ils vont au vif dans leurs tableaux, ils pénètrent jusqu’au fond et aux bas-fonds ; ils veulent noter la réalité jusqu’à un degré où on ne l’avait pas fait encore ; ils tiennent, par exemple, à copier et à reproduire la conversation du jour et du moment, les manières de dire et de parler si différentes de la façon d’écrire, et que les auteurs, d’ordinaire, ne traduisent jamais qu’incomplètement, artificiellement ; ils ne reculent pas au besoin devant la bassesse des mots, fussent-ils dans une jolie bouche et du jargon tout pur, confinant à l’argot ; ils imitent, sans rien effacer, sans faire grâce de rien ; ils haïssent la convention avant tout ; pas d’école : « Aussitôt qu’il y a l’école de quelque chose, ce quelque chose n’est plus vivant. » Ils haïssent la fausse image et le ponsif du beau : « Il y a un beau, disent-ils, un beau ennuyeux, qui ressemble à un pensum du beau. » Très-bien : Je les comprends, je les approuve, je les suis volontiers, ou à très-peu près, jusque-là.

1777. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La comédie de J. de La Bruyère : par M. Édouard Fournier. »

Il devra surtout, dans la Notice qu’on attend de son savoir et de sa fermeté d’esprit, tenir compte de tous les travaux antérieurs, profiter des vues justes, faire justice des fausses, accueillir et rejeter avec choix dans ce qu’on propose, être un rapporteur enfin et même un juge en dernier ressort.

1778. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

ai-je dit quelque chose de faux ? 

1779. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « HISTOIRE de SAINTE ÉLISABETH DE HONGRIE par m. de montalembert  » pp. 423-443

Il est faux que je me sois réfugié en Belgique ; ce qui est vrai, c’est que sans fortune, ayant donné ma démission d’une place de bibliothécaire, je suis allé, au mois d’octobre 1848, c’est-à-dire sept ou huit mois après le 24 février, professer à l’Université de Liege et y vivre de ma littérature, puisque pour le moment cette littérature n’avait plus cours en France.

1780. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « THÉOPHILE GAUTIER (Les Grotesques.) » pp. 119-143

Il y a un beau mot de M. de Bonald : « Une vie déréglée aiguise l’esprit et fausse le jugement. » Je ne pousserai pas M.

1781. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SÉVIGNÉ » pp. 2-21

Cela est faux ; le temps de Voiture et de Balzac était déjà loin.

1782. (1892) Boileau « Chapitre VI. La critique de Boileau (Fin). La querelle des anciens et des modernes » pp. 156-181

Il était dans une situation fausse, et toute sa colère venait d’un embarras dont il avait le sentiment plus ou moins obscur.

1783. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

Virgile avait dit : « Des faux recourbées on forge de dures épées » ; et les mots propres, par leur force d’attraction, nous mettaient sous les yeux le paysan qui fauche et le soldat qui tue.

1784. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre I. Le théâtre avant le quinzième siècle »

Autrement on tirerait peut-être une fausse conséquence du grand nombre des Miracles que nous avons du xiv° siècle, et de l’absence totale de pièces sacrées d’un autre genre. — Je dis 42 miracles, et non 45, comme M. 

1785. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre III. La poésie : V. Hugo et le Parnasse »

Moins artiste que Gautier, sans être plus penseur, il avait débuté par des mièvreries sentimentales, dont les formes travaillées ont je ne sais quel aspect de bijouterie fausse.

1786. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

Ils ont l’enfance du cœur qui permet de s’amuser à des riens  Quelquefois aussi (et alors elle est moins aimable et sonne un peu faux aux oreilles des profanes), cette gaieté laisse entrevoir une arrière-pensée d’édification ; elle paraît commandée et voulue ; elle s’étale comme un argument en faveur de la foi, comme un défi à la tristesse ou aux rires mauvais des pécheurs.

1787. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IV. Précieuses et pédantes »

Malheureusement une épithète est d’ordre physique, l’autre d’ordre moral et Pascal trouverait que tes fenêtres, fausses toutes deux, sont, ridicule inattendu !

1788. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Lacordaire est trop expérimenté pour ne pas comprendre qu’il y a danger, même dans l’apparence, même dans les fausses interprétations auxquelles prêteraient ses paroles.

1789. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

À voir l’intention directe qui ressort du tableau et qui se traduit formellement dans les conclusions, il est clair qu’aux yeux de l’éminent historien, toutes les leçons que peut nous fournir cette révolution d’Angleterre, déjà si fertile en analogies réelles ou fausses, ne sont pas épuisées.

1790. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Frédéric le Grand littérateur. » pp. 185-205

Les plus spirituels de ces plats courtisans et de ces faux amis, tels que l’abbé Bastiani, se vengeaient sous main du roi en le dénigrant auprès des étrangers.

1791. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

il est le premier à les avertir qu’ils font fausse route, s’ils n’y prennent garde ; que ce qui a été d’abord un noble essor et une entreprise généreuse de quelques-uns, devient une fureur d’imitation pour la foule des écoliers ; que la race en pullule ; que tout devient vite une mode en France, et que cette manie singeresse se donne surtout carrière dans les choses qui concernent l’esprit.

1792. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Histoire du chancelier d’Aguesseau, par M. Boullée. (1848.) » pp. 407-427

Les dix Méditations sur les vraies ou les fausses idées de la justice sont une belle lecture.

1793. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

Considérant l’espèce d’état de fausse paix et de trêve précaire, le régime de sourde et profonde corruption qui avait précédé les derniers troubles, il se félicitait presque aussi de le voir cesser ; car « c’étoit, dit-il de ce régime de Henri III, une jointure universelle de membres gâtés en particulier, à l’envi les uns des autres, et, la plupart, d’ulcères envieillis, qui ne recevoient plus ni ne demandoient guérison.

1794. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

En le lisant, à chaque page, le vrai, le faux et l’incomplet se mêlent.

1795. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — I. » pp. 401-420

Dans ces paroles si fermes et si royales, on saisit bien les vraies causes du mécontentement de Louis XIV, et l’apostille, vraie ou fausse, de la dépêche, n’est plus qu’un accident secondaire.

1796. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — II. (Suite et fin.) » pp. 421-440

Ce sont de ces mots qui peignent, qui sont pris à la source même, et qui sont agréables par un certain faux air de double sens, mais qui ne nuit pas à la clarté.

1797. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — I. » pp. 84-104

De là, selon l’historien, une position fausse, une lutte prolongée dans laquelle aucun des adversaires ne part du même principe, et qui n’a de solution possible que dans l’expulsion de la branche légitime.

1798. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

On racontait alors de Beaumarchais et de sa vie intérieure mille singularités vraies ou fausses, mais qui visaient au scandale ou au ridicule : celle-ci, par exemple, qui est assez piquante, et que je donne pour ce qu’elle vaut : Beaumarchais a une pantoufle en or clouée sur son bureau, c’est celle de sa maîtresse ; avant de travailler, il la baise, et cela l’inspire. — Il embrasse tout et se croit propre à tout.

1799. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — I. » pp. 322-340

Chlewaski qui lui avait demandé ce que c’était que le livre des Voyages d’Anténor, Courier répond que c’est une sotte imitation d’Anacharsis, c’est-à-dire d’un ouvrage médiocrement écrit et médiocrement savant, soit dit entre nous : Je crois, ajoute-t-il, que tous les livres de ce genre, moitié histoire et moitié roman, où les mœurs modernes se trouvent mêlées avec les anciennes, font tort aux unes et aux autres, donnent de tout des idées fausses, et choquent également le goût et l’érudition.

1800. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

Il s’en prend à la surabondance des bourgeois oisifs dans les villes, à la grande propriété dans les campagnes, à la plaie du concubinage, du célibat, aux tourments des enfants dans les collèges ; le vrai et le faux, pêle-mêle, et surtout le vague, se font sentir dans ces pages trop empreintes et comme noyées d’une sensibilité monotone.

1801. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Saint François de Sales. Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. Sayous. 1853. » pp. 266-286

Franklin, lui aussi, est riant, il est aimable, il est badin dans son bon sens ; il a bien de l’esprit et de l’imagination dans son expression ; mais, au milieu de toutes ses lumières physiques et positives supérieures, il y a une lumière qui lui manque ou qui semble presque absente, non pas celle qui brille et qui serait fausse, mais celle qui échauffe en rayonnant, une fleur d’éclat qui ne vient pas de la surface, mais du foyer même, une douce, légère et divine ivresse mêlée à la pratique bien entendue des choses, et qui communique son ravissement.

1802. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — II. (Fin.) » pp. 476-495

Je sais que, tout en donnant, comme il dit, « ce métier à tous les diables », il convient cependant qu’il le fait volontiers ; mais, d’un autre côté, il est sincère, il n’est pas dans le faux quand il ajoute : « Si j’avais le choix, j’avoue que je préférerais d’être le spectateur de ces scènes dont je suis acteur bien malgré moi. » Pendant ces premières guerres de Silésie, ce n’est pas malgré lui qu’il est acteur, il ne l’est que parce qu’il l’a voulu.

1803. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1873 » pp. 74-101

Ce bureau de La Vie parisienne a le clair-obscur de l’appartement d’une vieille femme galante retirée du commerce des tableaux, un appartement où rutilent les chaleurs de faux chefs-d’œuvre.

1804. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Alors Lafontaine a eu l’idée de montrer à Chelles, comment elle devait être jouée, cette déclaration marchée, — et rien qu’avec une hésitation, un faux départ de la marche, et pour ainsi dire, des balbutiements de pieds, accompagnant le balbutiement amoureux des paroles, cette déclaration a pris tout à coup un très grand effet.

1805. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre III. L’art et la science »

On étonnerait fort Solon, fils d’Exécestidas, Zenon le Stoïcien, Antipater, Eudoxe, Lysis de Tarente, Cébès, Ménédème, Platon, Épicure, Aristote et Epiménide, si l’on disait à Solon que Ce n’est pas la lune qui règle l’année ; à Zenon, qu’il n’est point prouvé que l’âme soit divisée en huit parties ; à Antipater, que le ciel n’est point formé de cinq cercles ; à Eudoxe, qu’il n’est pas certain qu’entre les Égyptiens embaumant les morts, les Romains les brûlant et les Pæoniens les jetant dans les étangs, ce soient les Pæoniens qui aient raison ; à Lysis de Tarente, qu’il n’est pas exact que la vue soit une vapeur chaude ; à Cébès, qu’il est faux que le principe des éléments soit le triangle oblong et le triangle isocèle ; à Ménédème, qu’il n’est point vrai que, pour connaître les mauvaises intentions secrètes des hommes, il suffise d’avoir sur la tête un chapeau arcadien portant les douze signes du zodiaque ; à Platon, que l’eau de mer ne guérit pas toutes les maladies ; à Épicure, que la matière est divisible à l’infini ; à Aristote, que le cinquième élément n’a pas de mouvement orbiculaire, par la raison qu’il n’y a pas de cinquième élément ; à Epiménide, qu’on ne détruit pas infailliblement la peste en laissant des brebis noires et blanches aller à l’aventure, et en sacrifiant aux dieux inconnus cachés dans les endroits où elles s’arrêtent.

1806. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

Sa lanterne, qui lui servait à chercher un homme, avait de faux airs de lustre ou de candélabre.

1807. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 33, que la veneration pour les bons auteurs de l’antiquité durera toujours. S’il est vrai que nous raisonnions mieux que les anciens » pp. 453-488

Il a mis en évidence plusieurs faits que les anciens ignoroient, et ausquels ils substituoient des opinions fausses qui leur faisoient faire cent mauvais raisonnemens.

1808. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre V. Séductions pour la compréhension de la psychologie indigène. — Conclusion »

Peut-être la gloriole des uns joue-t-elle de la fausse honte des autres pour les amener à ne rien conserver pour soi.

1809. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Xavier Aubryet » pp. 117-145

Enfin, je l’ai déjà comparé à madame de Staël, mais c’est une madame de Staël changée en un Roméo littéraire qui serait très bien monté au balcon de l’autre, et que l’autre madame de Staël — la non transformée — aurait préféré pour la vitalité, la verve et toutes les diableries de l’expression, à ce sceptique blond de Benjamin, ce nom fade et faux qui sent le benjoin, tandis qu’il y a comme un coup de cymbale dans le nom tintant et frémissant de Xavier, qui sonne, pour Aubryet, comme un écho de son esprit !

1810. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

Il y aurait une contrepartie à faire, et, après avoir établi que le Parisien a souvent une opinion fausse du provincial, on pourrait aisément démontrer que celui-ci méconnaît à son tour le Parisien.

1811. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

Son penchant inné lui faisait une doctrine préconçue ; et toujours une doctrine préconçue fausse, invente ou omet les faits.

1812. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Au milieu de la fausse sensibilité et de la passion bâtarde des romans ordinaires, un tel accent de nature devait produire un grand effet, et Sous les Tilleuls obtint un des plus beaux succès que puisse désirer un amour-propre, si difficile qu’il soit. […] Canalis est un esprit sec, froid, stérile, plein de petitesses, un adroit arrangeur de mots, un joaillier en faux, qui sertit du strass dans de l’argent doré, et compose des colliers en perles de verre. […] La pythonisse demeurait à Auteuil, nous ne savons plus dans quelle rue ; cela importe peu à notre histoire, car l’adresse donnée était fausse. […] Ce n’était pas à développer quelque lieu commun de bon sens que Léon Gozlan employait cet esprit, mais bien à soutenir quelque incroyable paradoxe, auquel il finissait par donner toutes les apparences du vrai par la subtilité des déductions et l’appropriation de détails confirmatifs de la donnée primitivement fausse. […] Nous en sommes très-heureux pour notre part, car c’est une victoire et un triomphe dont les frères du Lundi ont le droit de s’enorgueillir. « Du Doucher, n’en fait pas qui veut », disait David, le peintre sévère, en entendant dénigrer ce peintre facile par de faux dédaigneux.

1813. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

Autant la fausse modestie est ridicule et banale, autant l’aveu public et sincère de ses défauts est digne d’éloges et de sympathie. […] Mais sa pensée est aujourd’hui arrivée à un tel point de satiété, que le faux et le vrai n’existent plus pour lui ! […] Je me résigne difficilement à prendre pour l’expression d’une fausse modestie les très humbles salutations de M. de Lamartine. […] Ici, je le sens, il ne faut pas se prononcer à la légère ; il faut mesurer ses coups, pour ne pas frapper à faux. […] Ce n’est pas moi qui lui conseillerai jamais, non plus qu’aux hommes de sa trempe, une fausse modestie.

1814. (1923) Nouvelles études et autres figures

Les deux amoureux se sauvèrent jusqu’à Édimbourg où ils se marièrent grâce aux fausses déclarations de deux témoins complaisants. […] Ce qui est faux, ce que démentent chaque jour la connaissance de l’homme et les événements, ne peut être profond. […] Rien n’est plus faux qu’Angelo et Lucrèce Borgia ; mais toutes ces faussetés baignent dans une atmosphère italienne. […] Il y a des romans autobiographiques ou personnels qui sont aussi ennuyeux que s’ils étaient très impersonnels et très faux. […] Ils semblent possédés du désir d’humilier leur patrie devant cette fausse aïeule.

1815. (1875) Revue des deux mondes : articles pp. 326-349

Quand des philosophes tels que Bacon, ou d’autres plus modernes, ont voulu donner une systématisation de préceptes pour la recherche scientifique, ils ont pu paraître séduisants aux personnes qui ne voient les sciences que de loin ; mais en réalité de pareils ouvrages ne sont d’aucune utilité aux savants faits, et pour ceux qui veulent se livrer à la culture des sciences, ils les égarent par une fausse simplicité des choses ; bien plus, ils les gênent en chargeant l’esprit d’une foule de règles vagues ou inapplicables, qu’il faut se hâter d’oublier, si l’on veut entrer dans la science et devenir un véritable expérimentateur. […] La production de la chaleur dans les êtres vivants est un fait constaté dès la plus haute antiquité ; mais les anciens eurent des idées fausses sur l’origine de la chaleur : ils l’attribuèrent à une puissance organique innée ayant son siège dans le cœur, foyer où bouillonnent le sang et les passions. […] Il y a plus, la doctrine vitaliste ne repose pas seulement sur des hypothèses fausses, sur des faits erronés ; elle est par sa nature contraire à l’esprit scientifique. […] Or voilà un principe faux ; donc toutes les conséquences doivent être marquées au même coin. » Si maintenant nous demandons quels sont les caractères propres à cette science des êtres vivants, Bichat nous répond : « C’est une science dont les lois sont, comme les fonctions vitales elles-mêmes, susceptibles d’une foule de variétés, qui échappe à toute espèce de calcul, dans laquelle on ne peut rien prévoir ou prédire, dans laquelle nous n’avons que des approximations le plus souvent incertaines. » Ce sont là des hérésies scientifiques d’une énormité telle qu’on aurait de la peine à les comprendre, si l’on ne voyait comment la logique d’un système a dû fatalement y conduire. […] En un mot, la spontanéité de la matière vivante n’est qu’une fausse apparence.

1816. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Tel qu’il est cependant, ce moment de repos ne nous effraie pas, nous sommes loin de conclure avec quelques esprits moroses, que toute création sérieuse est devenue impossible et, ce qui nous persuade davantage, c’est le dédain profond mêlé partout à la curiosité pour les œuvres sans valeur que chaque matin fait éclore : on ne saurait méconnaître, suivant nous, que dans une époque où le public résiste tant bien que mal aux fausses amorces, il y a place pour une production vraie. […] Une petite mendiante chantait près de lui dans la rue ; sa voix était fausse, mais touchante. […] Quel malheur de se mettre à un faux point de vue !

1817. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre VI. La parole intérieure et la pensée. — Second problème leurs différences aux points de vue de l’essence et de l’intensité »

C’est ainsi que les dictionnaires, et non seulement les écrits littéraires, sont pleins de fausses onomatopées269, qui ont trompé les auteurs des premiers traités sur le langage ; « nous entendons les bruits de la nature, dit très justement M.  […] L’esprit faux est celui qui invente par lui-même avant d’avoir compris la pensée d’autrui ; bien souvent, il comprend mal sa propre pensée, faute d’avoir analysé le sens des mots par lesquels il l’exprime ; si son langage est brillant, on dit de lui qu’il est dupe de sa phrase et qu’il prend pour des idées nouvelles soit des antithèses verbales, soit des métaphores vides de sens. […] Puis de ceux, qui, ayant assez de raison, ou de modestie, pour juger qu’ils sont moins capables de distinguer le vrai d’avec le faux, que quelques autres par lesquels ils peuvent être instruits, doivent bien plutôt se contenter de suivre les opinions de ces autres, qu’en chercher eux-mêmes de meilleures. »] 38.

1818. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

Quant à l’héroïsme, un des héros de ce jour-là, que, dans les fausses et mensongères histoires de la Révolution, on appelle le magnanime Hullin, abandonna la République, se livra à Napoléon et présida le prétendu conseil de guerre qui assassina le duc d’Enghien. […] Au loin, une longue file de faucheurs, vêtus de blanc, faisaient mouvoir avec régularité leurs longues faux étincelantes ; leur voix, en chœur, arrivaient par bouffées jusqu’à la grande route où, assis sur un talus gazonné, j’attendais patiemment le relais de chevaux qui tardait à paraître. […] Et nous, nous dirons à beaucoup de jeunes peintres qui, par horreur des ombres fausses, tombent dans les pâleurs d’une anémie blafarde pire que la sauce bolonaise ; nous leur dirons : Faites de l’ombre que le bourgeois ne voie pas. […] Très bravement, Coquelin ne recule pas devant la personnalité et, à l’appui de son plaidoyer, il fait comparaître Bressant, Félix, Mounet-Sully, Lesueur, Samson, et lui-même, critiquant et rendant justice à chacun, sans orgueil, sans fausse modestie. […] Bien que reconnaissant la haute intelligence du maréchal Valée, sous les ordres duquel le Roi l’avait placé, le duc d’Orléans a souvent maille à partir avec lui, autant que le permet la discipline militaire à laquelle il obéit toujours, comme un simple soldat ; le maréchal a des idées et les impose, mais le Prince écrit et proteste : Les désagréments recommencent avec le maréchal ; il veut mettre dans son rapport un faux chiffre de tués et de blessés.

1819. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

Et j’ai voulu montrer enfin que rien n’était plus faux que de se représenter Bossuet, comme on le fait trop souvent encore, sur l’autorité de Voltaire, de Sainte-Beuve, et de M.  […] … Peut-on se faire une idée plus fausse d’une Providence générale ? […] Mais, de là à conclure qu’il vaut mieux, ou autant, n’avoir point du tout de religion que d’en avoir une fausse, et, selon l’expression de Bayle « être athée qu’idolâtre », il y a loin ; et Bayle semble avoir franchi trop aisément la distance. […] … N’importe le motif, mais, à ses yeux, les opinions communes ont contre elles, en principe et par définition, toutes les chances d’être les plus fausses. […] Mais Montesquieu, que dit-il autre chose, quand il essaie de nous expliquer « comment les lois civiles corrigent quelquefois les fausses religions » ?

1820. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

À propos d’un barbarisme, d’un solécisme, d’un faux sens ou de la plus naïve incongruité, il évoquait son spectre favori. […] Voudrait maintenant dorer son faux blason et réparer les brèches de son héritage en épousant (secrètement, s’il le faut) la marquise Andriana Bonnacorsi, noble Vénitienne, qui descend des doges et possède un sac. […] Plus tard, un référendaire du Saint-Siège fut pris en flagrant délit de faux ; le roi Louis XI le fit venir et le nomma maître des requêtes. Vers le même temps, un notaire apostolique, un clerc du registre et un procureur de la pénitencerie, qui tenaient boutique de fausses bulles, furent condamnés à mort et exécutés. […] Le premier venu peut se servir de leurs moules et y fabriquer à la douzaine des faux émaux et camées en toc.

1821. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

L’écrivain s’y demande, avec une évidente anxiété, s’il ne fait pas fausse route depuis des années. […] Je m’inscris pourtant en faux contre le jugement que j’ai rapporté. […] Condamnons la littérature à thèse, genre essentiellement faux ; distinguons-en la littérature à idées, genre légitime, genre nécessaire. […] Et pourtant si l’attitude morale de Balzac vis-à-vis de Mme Hanska ne fut pas complètement vraie, s’ensuit-il que cette attitude ait été complètement fausse ? […] Dix légendes courent à ce sujet, vraies ou fausses.

1822. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

— Il est faux, ma chère Julie, qu’une grande intelligence doive se passer de synthèse, car hier vous avez poussé l’esprit de révolte jusqu’à dire cela ; mais il n’est pas vrai, mon cher Théodore, que le poète des Contemplations manque de synthèse, vous le reconnaîtrez en lisant son livre d’un bout à l’autre. […] Ce qui prouve bien que la laideur est notre ouvrage, c’est qu’un chardonneret qui vit en liberté n’est pas moins beau que tout autre chardonneret de son espèce, c’est qu’aucun reptile ne louche, c’est qu’aucun pinson n’a la voix fausse, c’est qu’il n’y a point de gazelle bossue. […] La fin du règne de Satan, c’est-à-dire la vraie lumière du progrès chassant les ténèbres de la fausse science ? […] Il a donc, et il le savait mieux que tous ceux qui l’ont dit, des défauts essentiels : un style tourmenté et pénible, des expressions d’un goût faux, un manque sensible de proportion dans la composition de ses œuvres. […] La preuve, c’est qu’il se livrait à tout le monde avec fort peu de prudence, qu’il a été toute sa vie dupe de mille gens qui l’ont exploité, et qu’il était charmé quand, sans amertume et sans injure, on l’appelait en face faux bonhomme.

1823. (1813) Réflexions sur le suicide

La mère envoie sa fille au spectacle la veille du jour où elle veut se tuer, comme si la mort d’une mère devait être considérée comme une fête pour son enfant et qu’il fallût déjà faire entrer dans ce jeune cœur les plus fausses idées de l’imagination égarée. […] N’est-elle pas toujours armée de la même faux ?

1824. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

Altérez ou brisez une partie de ce miroir, l’intelligence verra juste dans la partie invulnérée du miroir ; elle verra faux ou elle ne verra rien que ténèbres dans la partie lésée de la glace. […] Mais le Tasse est presque toujours faux quand il fait parler le cœur ; et, comme les traits de l’âme sont les véritables beautés, il demeure nécessairement au-dessous de Virgile.

1825. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

. — Gardons-nous de dire de ce dieu antique de l’Honneur que c’est un faux dieu, car la pierre de son autel est peut-être celle du Dieu inconnu. […] Il a dû se repentir bien des fois avant sa mort de ce mauvais coup de langue à deux tranchants envers un homme d’honneur d’autant plus facile à asphyxier de faux éloges qu’il était incapable de comprendre deux sens dans une parole.

1826. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXXXIXe entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

Kriemhilt, la belle, alla, suivie de ses compagnes, recevoir les Nibelungen avec une âme fausse. […] Est-ce faux, est-ce vrai ?

1827. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

Trois grands faits dominent dans ses peintures éparses : l’avènement de l’argent, le déclin moral de la noblesse, le discrédit jeté sur le clergé et sur l’Église par la « fausse dévotion ». […] En vers modestes et familiers, dont toute l’élégance consistait dans leur souple exactitude, dont le prosaïsme n’était sauvé que par la grâce du rythme, en vers nus, tout nus, il façonnait de petits poèmes gris, tout gris, où s’exprimait, sans fausse honte, une sensibilité et parfois presque une sentimentalité de peuple.

1828. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre quatrième. L’idée du temps, sa genèse et son action »

Au lieu de tableaux fixes, ce sont des échos changeants de changements internes ; il y a quelque chose de vivant et de mouvant sous toutes les représentations, et c’est par une fausse métaphore que nous substituons des cadres immobiles à ces représentations qui sont toujours des processus, qui reparaissent toujours dans la mémoire avec le caractère actif du mouvement. […] Si donc il est vrai de dire que la succession des représentations n’est pas la représentation de la succession, il est également faux de croire que cette représentation tardive de la succession soit la descente d’une intuition pure dans la conscience, comme celle du Saint-Esprit chez les apôtres ; elle est un perfectionnement de l’intelligence, qui, de représentations d’abord isolées, s’élève par degrés à la représentation d’une série intensive, extensive et protensive.

1829. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

Corrélations de croissance ; fausses corrélations. — V.  […] Corrélations de croissance ; fausses corrélations.

1830. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

J’ai essayé d’indiquer ce qu’il est, en réservant ce qu’il pouvait être… En mon âme et conscience, je le crois, dénaturé, un romancier qui pourrait être grand, mais un romancier qui s’est compromis dans un genre non pas faux (entendez-moi bien !) […] Il était temps d’opposer enfin le Jésuite vrai au Jésuite faux.

1831. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Croce a dit lui-même comment D’Annunzio s’est lancé dans des idées absolument étrangères à son tempérament, aboutissant ainsi à une « fausse profondeur ». […] Pour reprendre l’image de Flaubert : le fil, ténu et fait de bouts raccordés, casse à chaque instant ; les perles, dont quelques-unes sont fausses et d’autres volées, s’égrènent tristement.

1832. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — I. » pp. 134-154

Pendant une peste ou maladie contagieuse qui avait régné dans le pays de Rosny en 1586, il était venu la visiter, la tranquilliser ; il l’avait trouvée enfuie du château, réfugiée dans celui d’une tante, avec trois ou quatre de ses gens ; et là, s’étant enfermé avec elle, et n’ayant lui-même pour tout monde avec lui qu’un de ses gentilshommes, un secrétaire, un page et un valet de chambre, il demeura tout un mois en compagnie de sa douce moitié, sans être visité de créature vivante, tant chacun fuyait la maison comme pestiférée : Et néanmoins, écrivent les secrétaires, à ce que nous vous avons souvent ouï dire depuis, vous n’avez jamais fait une vie si douce ni moins ennuyeuse que cette solitude, où vous passiez le temps à tracer des plans des maisons et cartes du pays ; à faire des extraits de livres ; à labourer, planter et greffer en un jardin qu’il y avait léans ; à faire la pipée dans le parc, à tirer de l’arquebuse à quantité d’oiseaux, lièvres et lapins qu’il y avait en icelui, à cueillir vos salades, les herbes de vos potages, et des champignons, columelles et diablettes que vous accommodiez vous-même, mettant d’ordinaire la main à la cuisine, faute de cuisiniers ; à jouer aux cartes, aux dames, aux échecs et aux quilles… Et n’allons pas oublier le dernier trait que notre fausse délicatesse supprimerait et qui sent son vieux temps : « à caresser madame votre femme, qui était très belle et avait un des plus gentils esprits qu’il était possible de voir ».

1833. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — I. » pp. 325-345

En écrivant cela, il prévoyait déjà ce que de faux esprits et de prestigieux talents devaient en faire.

1834. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

Il était près, assure-t-il, de lui répondre ; il s’est ressouvenu aussitôt de son Histoire, de cette Histoire élégante et froide, où il est tracé « un tableau si odieusement faux de la félicité du monde », à cette écrasante époque de l’établissement romain : Je n’ai jamais pu lire son livre, ajoute-t-il, sans m’étonner qu’il fût écrit en anglais ; à chaque instant j’étais tenté de m’adresser à M. 

1835. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Elle voulait que les Dames parlaient hardiment à leurs élèves de l’état de mariage, et leur montrassent le monde et ses conditions diverses telles qu’elles sont : « La plupart des religieuses, disait-elle, n’osent pas prononcer le nom de mariage ; saint Paul n’avait pas cette fausse délicatesse, car il en parle très ouvertement. » Et elle était la première à en parler comme d’un état honnête, nécessaire, hasardeux : Quand vos demoiselles auront passé par le mariage, elles verront qu’il n’y a pas de quoi rire.

1836. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

Tombée au milieu d’une cour brillante et fausse, toute pleine alors de galanterie et de plaisirs qui cachaient bien des rivalités et des ambitions, elle démêla, avec un instinct de bon sens et une certaine fierté de race, à qui elle pouvait s’attacher parmi tout ce monde, et elle s’adressa avec droiture au plus honnête homme encore de tous, c’est-à-dire à Louis XIV lui-même.

1837. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « I » pp. 1-20

Chacun de ses rayons dans sa substance pure Porte en soi les couleurs dont se peint la nature ; Et, confondus ensemble, ils éclairent nos yeux, Ils animent le monde, ils emplissent les cieux… Ainsi cette excursion fort inutile de Voltaire dans les mathématiques, et qui allait devenir une fausse route, ne fut pas tout à fait perdue : elle lui servit du moins à composer cette belle épître2. — « Je suis bien malade, écrivait-il à Thieriot en août 1738, Newton et Mérope m’ont tué. » Ni l’un ni l’autre ne le tuèrent.

1838. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Je commence à m’apercevoir que la plupart ne savent que ce que les autres ont pensé ; qu’ils ne sentent point, qu’ils n’ont point d’âme ; qu’ils ne jugent qu’en reflétant le goût du siècle, ou les autorités, car ils ne percent point la profondeur des choses ; ils n’ont point de principes à eux, ou s’ils en ont, c’est encore pis ; ils opposent à des préjugés commodes des connaissances fausses, des connaissances ennuyeuses ou des connaissances inutiles, et un esprit éteint par le travail ; et, sur cela, je me figure que ce n’est pas leur génie qui les a tournés vers les sciences, mais leur incapacité pour les affaires, les dégoûts qu’ils ont eus dans le monde, la jalousie, l’ambition, l’éducation, le hasard.

1839. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

Même en rabattant beaucoup de ces pompeux éloges, on a peine à se figurer d’abord qu’ils portent tout à fait à faux ; lorsqu’on jette un coup d’œil rapide sur les traductions en prose de Marolles, comme elles ne paraissent pas plus mauvaises absolument que d’autres de la même date, on se dit qu’elles ont pu être utiles en effet aux gens du monde, aux dames, et que Marolles a continué en cela de remplir sa fonction de latiniste de société.

1840. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

Un d’eux proposait la question et l’agitait longtemps avant que de la résoudre ; un autre proposait les difficultés ; un troisième y répondait ; un quatrième examinait les objections et les réponses ; ensuite M. l’archevêque reprenait ce qu’on avait dit, et après avoir discuté avec autant de précision que de netteté ce qu’il y avait de douteux, de certain, de faux et de vrai dans le pour et le contre, il appuyait la résolution du cas avec une surabondance de preuves toutes neuves tirées de l’Écriture, des Conciles, des Pères et de Tite-Live.

1841. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Je suis de ceux qui ont fait l’apologie du livre de Mme de Staël, qui en ont de leur mieux démontré et mis en lumière les bonnes parties, et cependant je ne puis trouver si faux en somme le jugement résumé de Mme d’Albany ; j’y vois plus de sévérité que d’erreur.

1842. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

À quelque chose malheur est bon : les événements politiques et l’insurrection révolutionnaire le délivrèrent de sa chaîne et le rejetèrent à temps hors de cette fausse carrière.

1843. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin »

La vallée du Chéliff, ou plutôt la plaine inégale et caillouteuse ravinée par le Chéliff, s’offre à nous avec son caractère d’aridité surprenante ; le peintre ici se montre tout à nu et nous rend le terrain dans sa crudité géologique, comme le ferait un Saussure qui saurait colorer aussi bien que dessiner : « Imagine (il s’adresse toujours à son ami) un pays tout de terre et de pierres vives, battu par des vents arides et brûlé jusqu’aux entrailles ; une terre marneuse, polie comme de la terre à poterie, presque luisante à l’œil, tant elle est nue ; et qui semble, tant elle est sèche, avoir subi l’action du feu ; sans la moindre trace de culture, sans une herbe, sans un chardon ; — des collines horizontales qu’on dirait aplaties avec la main ou découpées par une fantaisie étrange en dentelures aiguës, formant crochet, comme des cornes tranchantes ou des fers de faux ; au centre, d’étroites vallées, aussi propres, aussi nues qu’une aire à battre le grain ; quelquefois, un morne bizarre, encore plus désolé, si c’est possible, avec un bloc informe posé sans adhérence au sommet, comme un aérolithe tombé là sur un amas de silex en fusion ; — et tout cela, d’un bout à l’autre ; aussi loin que la vue peut s’étendre, ni rouge, ni tout à fait jaune, ni bistré, mais exactement couleur de peau de lion. » Après de telles pages, on n’a plus rien à demander au peintre pour le technique de son art : il s’est traduit en prose avec un ton égal à son objet.

1844. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

Muston, quand on a par-devers soi de vrais et précieux textes, s’aviser de les arranger ainsi à la moderne par une fausse idée d’élégance ?

1845. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [III] »

La guerre avec la Russie, qui éclata en 1812, mettait Jomini dans une position un peu fausse vis-à-vis d’un souverain dont il avait recherché le service, et de qui il avait secrètement à se louer.

1846. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — M. de Sénancour, en 1832 »

Vieillard austère qui, après un chef-d’œuvre de ta jeunesse, t’es arrêté on ne sait pourquoi, qui t’es heurté à faux depuis ce temps sur d’ingrats labeurs, et qui, sans rien perdre assurément de ta valeur  intrinsèque, n’as plus su aboutir d’une manière récréante, fructueuse et féconde !

1847. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

Cela est peut-être ridicule à vous dire, mais quand on se sent dans le vrai, on ne recule pas devant la crainte des fausses interprétations.

1848. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 177-201

Le procédé d’exécution répond tout à fait à ce qu’on peut attendre : une simplicité parfaite, une force continue ; point de pomposo ni de bavardage ; point de réflexions ni de digressions ; quelque chose de droit qui va au but, qui ne se détourne ni d’un côté ni de l’autre, et pousse devant, en marquant chaque pas, comme un bélier sombre ; point de vapeurs à l’horizon ni de demi-teintes, mais des lignes nettes, des couleurs fortes dans leur sobriété, des ciels un peu crus, des tons graves et bruns ; chaque circonstance essentielle décrite, chaque réalité serrée de près et rendue avec une exactitude sévère ; chaque personnage conséquent à lui-même de tout point ; vrai de geste, de costume, de visage ; concentré et viril dans sa passion, même les femmes ; et derrière ces personnages et ces scènes, l’auteur qui s’efface, qu’on n’entend ni ne voit, dont la sympathie ni l’amour n’éclatent jamais dans le cours du récit par quelque cri irrésistible, et qui n’intervient au plus que tout à la fin, sous un faux air d’insouciance et avec un demi-sourire d’ironie.

1849. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « QUELQUES VÉRITÉS SUR LA SITUATION EN LITTÉRATURE. » pp. 415-441

Le vrai y est sans cesse à côté et à la merci du faux ; à un très-petit nombre d’exceptions près, l’éloge s’y achète, l’insulte y court le trottoir, l’industrie y trône en souveraine.

1850. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — II. » pp. 195-213

Je l’estime au-dessus du commun des hommes, et surtout de ceux de son âge ; mais ce n’est plus une idole de perfection, ce n’est plus le premier de l’espèce, enfin ce n’est plus mon amant : c’est tout dire. » Ces quelques passages des lettres, mis en regard de certaines pages des Mémoires, sont une leçon piquante sur le faux jour des perspectives du cœur.

1851. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Aloïsius Bertrand »

Après une espèce de fausse convalescence, il retomba de nouveau très-malade, et dut entrer à l’hospice Necker vers la mi-mars 1841.

1852. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

Ils touchent la corde fausse et courte au lieu de la corde vraie et éternelle.

1853. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre III. Montesquieu »

Une autre est devenue fausse, démentie par les faits.

1854. (1890) La fin d’un art. Conclusions esthétiques sur le théâtre pp. 7-26

  D’ailleurs la définition ci-dessus démasquée n’eût-elle pas été fausse, elle serait vaine : au plus elle énoncerait un effet du théâtre, non sa cause qui seule importe.

1855. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XX. La fin du théâtre » pp. 241-268

II D’ailleurs la définition ci-dessus démasquée n’eût-elle pas été fausse, elle serait vaine : au plus elle énoncerait un effet du théâtre, non sa cause qui seule importe.

1856. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IX, les mythes de Prométhée »

Des sillons ondoyants d’épis, des navires glissant sur les flots, un tourbillon de guerres déchaînées, des trophées de lances et d’épées, de faux et de mors, des armures et des statues vaguement modelées, des vases de toute forme et de toute matière. — Il aurait pu y voir encore des familles entrelacées autour du foyer, des cités sortant de terre, avec leurs remparts et leurs tours, des cortèges de prêtres enveloppés du nuage d’encens des sanctuaires. — Et tout en haut, des groupes de dieux, de plus en plus vrais, de plus en plus justes, montant et se succédant dans l’éther.

1857. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

À combien de déclamations et de fausses vues une histoire ainsi faite va couper court dès l’origine !

1858. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mlle de Lespinasse. » pp. 121-142

quarante ans ; elle regrettait amèrement le départ de M. de Mora, ce véritable homme délicat et sensible, ce véritable homme supérieur, quand elle s’engagea à aimer M. de Guibert, ce faux grand homme, mais qui était présent et séduisant.

1859. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

Je n’ai jamais vu, depuis que j’existe, personne qui atteigne si au vif les défauts, les vanités, les faux airs d’un chacun, qui vous les développe avec tant de netteté, et qui vous en convainque si aisément.

1860. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur Bazin. » pp. 464-485

Bazin n’eût, rien assurément de ce sympathique vrai ou faux qui enlève les hommes, je crois qu’il aurait encore méprisé dans tous les cas leur faveur.

1861. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon. » pp. 270-292

À propos d’une de ces querelles d’étiquette et de prérogative que Saint-Simon souleva, Louis XIV ne put s’empêcher de remarquer « que c’était une chose étrange que, depuis qu’il avait quitté le service, M. de Saint-Simon ne songeât qu’à étudier les rangs et à faire des procès à tout le monde », Saint-Simon était possédé sans doute de cette manie de classer les rangs, mais, surtout et avant tout, de la passion d’observer, de creuser les caractères, de lire sur les physionomies, de démêler le vrai et le faux des intrigues et des divers manèges, et de coucher tout cela par écrit, dans un style vif, ardent, inventé, d’un incroyable jet, et d’un relief que jamais la langue n’avait atteint jusque-là.

1862. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Flourens nous a offert, tout éclairci, tout épuré de son faux goût, et dont il a comme inauguré le buste.

1863. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Saint-Évremond, pris en faute et un peu honteux sans doute de sa raillerie à faux, s’empresse de réparer, et il écrit à Ninon une lettre où il la loue comme elle le mérite, et où il nous la représente au naturel dans ce moment de transition et de métamorphose.

1864. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

Nul poète n’a reçu autant d’éloges que lui, et nul ne se gêne moins à paraître les aimer, mais il a cela de particulier que ces éloges ne lui ont fait faire aucune folie : il a porté son ivresse de poète avec un rare bon sens : « Je ne sais aucun faux pas de lui », me disait quelqu’un qui le connaît bien.

1865. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Notice historique sur M. Raynouard, par M. Walckenaer. » pp. 1-22

Trois fois et en trois rencontres, je surprends chez Raynouard la même faute de raisonnement, le même faux pli : une première fois, par rapport à la prétendue innocence absolue des Templiers ; une seconde fois, par rapport à la prétendue universalité de la langue romane primitive ; une troisième fois, par rapport à la prétendue permanence ininterrompue des institutions municipales.

1866. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « M. Fiévée. Correspondance et relations avec Bonaparte. (3 vol. in-8º. — 1837.) » pp. 217-237

Fiévée insiste pour que, malgré l’influence de ces hommes et les ménagements qu’on leur doit, le gouvernement en vienne le plus tôt possible à condamner hautement les faux principes.

1867. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Œuvres de Louis XIV. (6 vol. in-8º. — 1808.) » pp. 313-333

Mais c’est en matière de traités surtout qu’il ne croit pas qu’il faille se piquer de diligence : Celui qui veut y aller trop vite, dit-il, est sujet à faire bien des faux pas.

1868. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — II. (Suite et fin.) » pp. 341-361

il n’y en a point de plus glorieuse ; c’est de cela qu’on flatte les rois. » On croit entendre l’éclat de voix du vieux Quatremère tonnant contre ces fausses et flagorneuses banalités.

1869. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Il écrivit d’abord sur l’administration et sur la politique ; mais bientôt, cherchant dans ses instincts méditatifs une diversion plus haute et plus vaste aux ennuis de l’inaction, il fit son livre De l’importance des idées religieuses et combattit les fausses doctrines répandues autour de lui.

1870. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — II. (Fin.) » pp. 350-370

Pendant le régime de la Terreur, il écrivait des Réflexions philosophiques sur la fausse idée d’égalité ; il exprimait en quel sens, selon lui, on devait entendre que les hommes sont égaux devant Dieu ; et, là encore, on retrouve les traces de cette aristocratie d’esprit dont le chrétien même, en M. 

1871. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

» Il désire être instruit sur tous ces points à fond, en détail : « Vous aurez soin d’écarter toutes les nouvelles fausses ou incertaines, et de ne donner place qu’aux seules vérités que vous apprendrez. » De telles réponses précises sont difficiles partout, et en Russie plus qu’ailleurs.

1872. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre quatrième. L’expression de la vie individuelle et sociale dans l’art. »

Ainsi s’explique la vogue de certains personnages et de certains romans qui, après avoir paru de purs chefs-d’œuvre aux contemporains, — dont ils représentaient, en les outrant peutêtre, les tendances, qualités ou défauts, — semblent par la suite froids, faux même et dépourvus de vie.

1873. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse esthétique »

Les causes de l’émotion esthétique sont, contrairement aux causes de l’émotion réelle, une hallucination que l’on sait inconsciemment être fausse, que l’on sent n’avoir rien de menaçant, une hallucination émouvante, dont les images sans cesse combattues en vertu de leur caractère factice, réprimées et modifiées par tout le cours ambiant de la vie, par la conscience générale qu’à leur sujet sur sa sécurité, de sa non souffrance, — cessent d’agir comme des images réelles, demeurent sans cohésion avec le reste du cours mental, ne s’associent pas à des prévisions positives de peine ou de plaisir personnels, et restent ainsi seulement excitantes, comme on n’éprouve d’un assaut avec des épées mouchetées, que l’exhilaration d’un exercice7.

1874. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre I. Shakespeare — Sa vie »

Le faux goût de Louis XIV avait envahi l’Angleterre.

1875. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Innocent III et ses contemporains »

Elle a gagné des intelligences dignes de la vérité et qu’elle fausse.

1876. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Si quelquefois, dans ses derniers écrits, le désir de se montrer moderne, l’effort pour faire comprendre le passé par des comparaisons avec les choses actuelles lui a fait commettre quelques fautes de goût, ces fausses notes sont rares, et la justesse du ton égale chez lui la délicate correction du style et l’art consommé de la composition. […] Mais je crois qu’ils finiront par s’y mettre, et les raisons de mon espérance sont celles-ci : on peut considérer la Révolution française comme la première application des sciences morales aux affaires humaines ; ces sciences, en 1785, étaient à peine ébauchées ; leur méthode était mauvaise ; elles procédaient a priori ; leurs solutions étaient bornées, précipitées, fausses. […] À mes yeux, ce sont ceux du Contrat social, par conséquent ils sont faux et malfaisants… Rien de plus beau que les formules Liberté, Égalité ou, comme le dit Michelet, en un seul mot, Justice. […] Il s’était mis à sa tâche avec une conscience et une énergie que rien ne pouvait ébranler, ni les défaillances de sa santé, ni les fausses appréciations de la critique et du public. […] Il y avait beaucoup d’engouement, de mode passagère dans ce mouvement ; beaucoup de mauvais goût et de fausses couleurs dans la manière dont on peignait le passé.

1877. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

L’épopée classique ne pouvait vivre sans le merveilleux ; le merveilleux se réduit à quelque chose d’impossible et de faux en soi ; même au point de vue purement esthétique, est-il probable que l’épopée constitue le « genre » suprême de beauté ? […] D’ailleurs, les beautés fardées et fausses sont les seules dont la poésie s’évanouisse au grand jour. […] De là, comme double conséquence, chez les parnassiens les périphrases ingénieuses « à la Delille », et chez les romantiques des métaphores souvent superbes, quelquefois fausses, comme celles qu’on trouve chez Victor Hugo lui-même. […] Le poète supplée alors à sa pauvreté par de la fausse monnaie. — Quant à ceux qui veulent rester vrais et sincères, ils se trouvent réduits à l’impuissance ; on voit de beaux talents pleins d’espérance s’épuiser, se tarir, et la faute en est pour une certaine part à l’épuisement même de leur langue ; la source la plus féconde a encore besoin de trouver un lit qui lui convienne pour ne pas être absorbée et disparaître. […] Il ne faut pas introduire dans la poésie ces fausses symétries et ces règles sans but que Pascal comparait aux « fausses fenêtres » dans l’architecture.

1878. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Quant à dire, comme on le fait si souvent, que c’est un tour de force, je m’en garderai bien, la louange serait fausse. […] En art tout est faux qui n’est pas beau. […] Sous de faux noms, ils n’ont montré qu’eux-mêmes. […] Nous disons que l’image que nous en recevons est vraie et que celles qu’ils en reçoivent est fausse. En réalité, aucune n’est absolument fausse et aucune n’est absolument vraie.

1879. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Elle s’approcha tout en larmes d’Elsa et soupira avec une fausse douceur : — Elsa, que t’ai-je fait, que t’ai-je fait, quand je pleurais dans la forêt, au bord de l’étang, ma race anéantie ? […] Quelques citations altérées ou tronquées, quelque fausses références, comme celle qui se rapporte l’absurde histoire du coup de pied dans le ventre de Volney, ne sauraient constituer des preuves de mauvaise foi. […] J’enfonce le chausseur de souliers d’un faux mort de La Fontaine, je dégote son vendeur de peau d’ours et j’aplatis cet excellent curé Jean Chouart ; je ne chausse même pas les souliers d’un mort pour de vrai, fi donc ! […] Mais il n’en est pas moins vrai qu’il donne à un verset de l’Évangile de saint Matthieu un sens faux. […] Il dit que ce sont de faux lettrés.

1880. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Comme Stendhal, il aimait à dissimuler sa personnalité sous différents pseudonymes ; quand il se sentait reconnu sous son faux nez, il le jetait et prenait un autre masque et un autre domino. […] Il descendait par la fenêtre, se hissait par le tuyau de la cheminée, ou fabriquait une fausse clef avec un clou. […] Aucun des dieux que nous avons adorés n’est un faux dieu, et nous pouvons continuer à brûler devant eux un encens légitime. […] Rien de plus faux : les novateurs ont tous possédé une science technique profonde. […] À l’apparition d’André Chénier, toute la fausse poésie se décolora, se fana et tomba en poussière.

1881. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Dans un drame presque inconnu : Sophie, ou les sentiments secrets, œuvre de ses débuts, toute empreinte de la fausse sensibilité du temps, on voyait, au milieu d’un jardin anglais (c’en était alors la mode), près d’une urne entourée de cyprès, une jeune fille souffrant d’une tristesse précoce. […] L’ennui revient, il surmonte tout ; il renouvelle de faux besoins, et je me sens inondé d’amertume. […] Je ne m’arrêterai pas à l’assertion de l’auteur qui déclare n’avoir eu d’autre prétention que de convaincre « deux ou trois amis réunis à la campagne de la possibilité de donner une sorte d’intérêt à un roman dont les personnages se réduiraient à deux, et dont la situation serait toujours la même. » Fausse modestie, coquetterie d’écrivain qu’il est facile de démasquer. […] La jeunesse a été en proie à des tristesses extraordinaires, aux fausses douceurs d’une imagination bizarre et emportée, au mépris superbe de la vie, à l’indifférence qui naît du désespoir ; une grande maladie s’est manifestée sous mille formes diverses.

1882. (1903) La pensée et le mouvant

. — Les vrais et les faux problèmes. — Le criticisme kantien et les théories de la connaissance. — L’illusion « intellectualiste ». — Méthodes d’enseignement. — L’homo loquax. […] Impossible, parce qu’une certaine expérience, confuse peut-être mais décisive, te parle par ma voix, qu’elle est incompatible avec les faits qu’on allègue et les raisons qu’on donne, et que dès lors ces faits doivent être mal observés, ces raisonnements faux. […] On pourrait le contester, si la conscience s’était surajoutée à la matière comme un accident ; mais nous croyons avoir montré qu’une pareille hypothèse, selon le côté par où on la prend, est absurde ou fausse, contradictoire avec elle-même ou contredite par les faits. […] Rien de plus faux que cette conception du travail de synthèse, rien de plus dangereux pour la science et pour la philosophie. […] Soyons donc prêts à l’abandonner pour une autre, qui serrera l’expérience de plus près encore. « Nos idées, disait Claude Bernard, ne sont que des instruments intellectuels qui nous servent à pénétrer dans les phénomènes ; il faut les changer quand elles ont rempli leur rôle, comme on change un bistouri émoussé quand il a servi assez longtemps. » Et il ajoutait : « Cette foi trop grande dans le raisonnement, qui conduit un physiologiste à une fausse simplification des choses, tient à l’absence du sentiment de la complexité des phénomènes naturels. » Il disait encore : « Quand nous faisons une théorie générale dans nos sciences, la seule chose dont nous soyons certains c’est que toutes ces théories sont fausses, absolument parlant.

1883. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Krantz, logiquement irréprochables, sont historiquement fausses. […] Nous ne sommes pas de son avis, et encore moins de celui de Nodier, — l’un des esprits les plus faux et des plus légers que l’on sache, — mais, pour ceux qui le partageraient, et nous en connaissons plus d’un, c’est la discussion des titres scientifiques de Pascal qui seule établira sa force d’invention. […] Marivaux, au rebours : c’est aux Fausses Confidences, c’est au Legs, c’est à l’Épreuve, c’est au Jeu de l’amour et du hasard que ses romans doivent de vivre ou, pour parler plus exactement, de n’être pas tombés tout à fait dans l’oubli. […] L’a-t-on mis dans quelque Bastille Pour faux billets au libraire déçu ? […] Autre formule encore, et formule non moins fausse.

1884. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

Ils sont à l’abri du dégoût que la profession d’auteur entraîne quelquefois, des querelles que la rivalité fait naître, des animosités de parti et des faux jugements ; ils jouissent plus de la société, ils sont juges et les autres sont jugés. […] Sa vision littéraire a ses partis pris, mais il n’y a pas plus de critique que d’art sans des partis pris, les partis pris d’un critique rectifient ceux d’un autre critique, et la critique de Brunetière (toujours dans ces limites de Malherbe à Lamartine) est généralement vraie en ce qu’elle affirme et fausse en ce qu’elle nie. […] * * * Cette critique des maîtres, elle n’est pas une imagination de classificateur, une fausse fenêtre que nous supposions pour faire pendant à la critique professionnelle. […] Psychologiquement rien n’est plus faux que la phrase de Cicéron. […] Beaucoup de rêverie inconsistante et de fatras oublié, je le sais, et des théories fausses qu’il nous faut reviser aujourd’hui, mais aussi et surtout un mouvement dont nous vivons encore, un grand flux qui est venu prendre la critique à sec sur le rivage, l’emporter vers la haute mer, lui donner le goût du large, des pays et des routes.

1885. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Sainte-Beuve a voulu échapper à cette facilité, à ce naturel ; il a voulu sortir du langage convenu, et il s’est donné un mal infini pour être faux, étrange, inintelligible : « Nous quittâmes Paris après beaucoup d’adieux à madame de Cursy. […] De loin, ce style est tout or, tout bruit, tout azur, toute lumière ; de près, cet or paraît faux, cette vive lumière fatigue les yeux, ce grand fracas fait saigner les oreilles. […] La princesse de Cavalcanti, avec toutes ses fausses perfections, ressemble à ces géantes informes et contrefaites que les charlatans montrent dans les foires.

1886. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Le public à Paris a marqué de la joie ; les faiseurs d’horoscopes ont fait à ce sujet cent almanachs plus extravagants les uns que les autres ; pour moi, qui ai appris depuis longtemps à supporter la disgrâce et la fortune, je me suis dérobé aux compliments vrais et faux, et j’ai regagné mon habitation d’hiver, d’où j’irai de temps en temps rendre mes devoirs à Versailles, et voir mes amis à Paris.

1887. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — II. (Fin.) » pp. 109-130

Cela le conduit à imputer au faux et insuffisant pilote qui s’est rencontré, à M. 

1888. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — II » pp. 454-475

Mais si M. de Meilhan n’était autre que le président de Longueil, et lui seul purement et simplement, il serait trop beau, il serait trop grave, il serait trop sage ; il aurait un faux air de génie ; il n’aurait pas assez ce qu’a remarqué en lui M. 

1889. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

Tout cela est ingénieux, neuf à sa date, mais incomplet et faux par un côté.

1890. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Benjamin Constant. Son cours de politique constitutionnelle, ou collection de ses divers écrits et brochures avec une introduction et des notes, par M. Laboulaye »

Lorsque ce talent à la fois jeune et en pleine maturité s’est annoncé ici avec un si grand éclat, on a cherché à l’écarter en disant que c’était un étranger : le fait est faux ; c’est un Français rendu à la France par le décret philosophique qui réintègre les descendants des protestants réfugiés.

1891. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La femme au XVIIIe siècle, par MM. Edmond et Jules de Goncourt. » pp. 2-30

Saint-Lambert, dans des vers à elle adressés pour accompagner un Capucin en parfilage que Mme du Deffand envoyait pour étrennes à Mme de Boufflers, devenue la maréchale de Luxembourg, lui disait : Du Ciel vous eûtes en partage Un esprit doux, brillant et sage… Cet esprit doux, selon la remarque du prince de Ligne, est un trait faux ; elle l’avait, avant tout, piquant, des plus mordants ; on la redoutait.

1892. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. »

» — et dans la série de Clichy, entre tant de fausses gaietés et de misères, cette admirable scène du détenu visité le premier jour par sa femme et son petit enfant qu’il couvre de baisers, et la femme dont on ne voit pas le visage sans doute mouillé de larmes, et qui lui dit d’un ton gai, tout en vidant son panier : « Petit homme, nous t’apportons ta casquette, ta pipe d’écume et ton Montaigne.

1893. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

Léonidas le nie spirituellement et s’inscrit en faux dans ce petit dialogue : « Un jour l’Eurotas dit à Cypris : « Ou prends des armes, ou sors de Sparte : la ville a la fureur des armes. » Et elle, souriant mollement : « Et je serai toujours sans armes, dit-elle, et j’habiterai Lacédémone. » Et Cypris est restée sans armes, et après cela il y a encore d’effrontés témoins qui viendront nous conter que chez eux la déesse est armée. » Comme variété de ton, je noterai une piquante épigramme dans un sens ironique et de parodie : il s’agit d’un philosophe rébarbatif, d’un laid cynique, Posocharès, qui s’est laissé prendre aux filets d’un jeune objet charmant ; et celui-ci, comme on fait d’un trophée après une victoire, se complaît à suspendre dans le temple de Vénus toute la défroque du cynique, son bâton, ses sandales, « et cette burette crasseuse, et ce reste d’une besace aux mille trous, toute pleine de l’antique sagesse. » Ceux qui savent leur Moyen-Age peuvent rapprocher cette épigramme du fabliau connu sous le titre du Lai d’Aristote.

1894. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Essai de critique naturelle, par M. Émile Deschanel. »

À mesure qu’on s’est éloigné d’Homère, on l’a pris tout à faux ; on a vu chez lui un auteur, un homme qui a composé un poème d’après un plan régulier, et là-dessus on s’est mis à raisonner, à inventer des beautés qui n’en sont pas, des explications subtiles dont on a fait des lois.

1895. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [II] »

Les vieux généraux de la guerre de Sept Ans, exhumés après tant d’années et pris pour guides, se trouvèrent à court ; ils n’avaient rien appris depuis : « l’âge avait glacé chez eux les qualités qui leur avaient valu du renom, et ne leur avait pas donné le génie, car le génie n’est jamais le fruit de l’âge ni de l’expérience. » Les jeunes, « le prince de Hohenlohe, et Massenbach, son bras droit, avaient tout juste assez d’esprit et de science pour prendre de la guerre ce qu’il y avait de plus faux. » Les manœuvres leur cachaient les vrais mouvements.

1896. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

Selon l’opinion de Jomini, quoique Napoléon, à partir de 1806, eût commis de grandes fautes militaires, « sa chute néanmoins avait été plutôt le résultat de ses fautes politiques et de ses erreurs comme homme d’État. » En passant condamnation sur le cadre, disons vite que dans un genre faux Jomini a montré un talent véritable, même parfois un talent d’écrivain.

1897. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

Malgré l’épuration sensible qui s’était faite dans notre poésie depuis Marot et l’aisance aimable qu’il y avait introduite, on n’était point décidément sorti de la fausse voie qui avait ramené notre langue poétique à une sorte d’enfance et qui semblait confiner notre invention dans un cercle de puérilités pédantesques : pour remettre les choses de l’esprit en digne et haute posture, il était besoin d’une entreprise, d’un coup de main vaillant dont Marot et ses amis n’étaient pas capables, de ce que j’appelle un coup de collier vigoureux ; car c’est ainsi que j’envisage cette poétique de Du Bellay et de Ronsard, poétique toute de circonstance, mais qui fut d’une extrême utilité.

1898. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Ces vrais poëtes gagnèrent aux réunions intimes dont ils étaient l’âme, d’avoir dès lors un public, faux public il est vrai, provisoire du moins, artificiel et par trop complaisant, mais délicat, sensible aux beautés, et frémissant aux moindres touches.

1899. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

ces doux jardins, cette retraite heureuse, Qui des plus chers désirs de mon âme amoureuse Enferme les derniers ; Beaux lieux dont je n’ai vu que l’enceinte, bordée De mélèzes en pleurs et d’arbres de Judée Et de faux ébéniers ; Bosquets voilés au jour, secrètes avenues, Dont je n’ai respiré les odeurs inconnues Que par la haie en fleur ; Au bord desquels poussant mon alezan rapide, J’ai souvent en chemin cueilli la feuille humide Pour la mettre à mon cœur ; Quoi !

1900. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

J’avoue même que ce mauvais succès me laissa quelques doutes sur la vérité de mon système. » — Si faux que soit le système, il ne s’appliquerait pas mal à plus d’un soi-disant poëte, et tel auteur de grande épopée, comme Parseval, nous en pourrait dire quelque chose.

1901. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

Ce sont de petites pierres fausses dont, à part, on ne donnerait pas un denier, mais ici bien montées et qui font jeu.

1902. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

non pas ; tout cela est de la fausse rhétorique et de la pure phrase.

1903. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

Mais quand il s’attaquait au faux classique, aux vieilleries modernes, à ces usurpations de succès qui tranchaient du légitime, oh !

1904. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

cesse de me reprocher les aimables dons de Vénus ; les dons brillants des immortels ne sont jamais à dédaigner ; eux seuls les donnent, et ne les a pas qui veut. » Je ne voudrais décidément rabattre dans la manière de l’auteur que ce qui semblerait trahir le voisinage d’une fausse école dont son excellent esprit n’est pas.

1905. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Sa mort suivit de près son triomphe. « Je l’ai pleuré devant Dieu, et j’ai prié pour cet ancien maître de ma jeunesse, écrit alors Fénelon ; mais il est faux que j’aie fait célébrer ses obsèques dans ma cathédrale, et que j’aie prononcé son oraison funèbre.

1906. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Un beau jour circulèrent des dialogues « traduits de l’anglais552 », qui démontraient que l’Esprit des Lois est un « labyrinthe sans fil, un recueil de saillies », un livre plein de fausses citations, où l’auteur prenait « presque toujours son imagination pour sa mémoire ».

1907. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

Si l’anecdote était authentique, nous craindrions bien que, dans cette circonstance, Molière n’eût encore été qu’imitateur : ces fausses lettres, faisant succéder rapidement les impressions de chagrin et de joie, fournissaient un trop excellent prétexte à la pantomime, pour n’avoir pas été exploitées par les artistes italiens.

1908. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7761-7767

Les anciens n’avoient pas bien demêlé ceci ; ils regardoient comme des qualités positives toutes les qualités relatives de notre ame ; ce qui fait que ces dialogues où Platon fait raisonner Socrate, ces dialogues si admires des anciens, sont aujourd’hui insoûtenables, parce qu’ils sont fondés sur une philosophie fausse : car tous ces raisonnemens tirés sur le bon, le beau, le parfait, le sage, le fou, le dur, le mou, le sec, l’humide, traités comme des choses positives, ne signifient plus rien.

1909. (1890) L’avenir de la science « II »

Qu’il me suffise de dire que je crois à une raison vivante de toute chose et que j’admets la liberté et la personnalité humaine comme des faits évidents ; que par conséquent toute doctrine qui serait amenée logiquement à les nier serait fausse à mes yeux.

1910. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

Un terme grossier choquerait comme une fausse note, et il y eut des puristes pour reprocher à Racine d’avoir hasardé dans Athalie les mots bouc et pavé.

1911. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

C’est une fausse vue de considérer le mariage de Louis XIV avec madame de Maintenon comme l’ouvrage de la religion ou des prêtres.

1912. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Gil Blas, par Lesage. (Collection Lefèvre.) » pp. 353-375

Dans sa haine du solennel et du faux, il se serait rejeté plutôt du côté du vulgaire et du commun.

1913. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Faut-il peindre Mlle de Fontanges avec sa beauté et son genre de sottise romanesque, et faire sentir comment le roi, même quand elle aurait vécu, ne pouvait l’aimer longtemps, tout cela est dit en deux mots : On s’accoutume à la beauté, mais on ne s’accoutume point à la sottise tournée du côté du faux, surtout lorsqu’on vit en même temps avec des gens de l’esprit et du caractère de Mme de Montespan, à qui les moindres ridicules n’échappaient pas, et qui savait si bien les faire sentir aux autres par ce tour unique à la maison de Mortemart.

1914. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Si Mme Angebert tient plus à la vérité qu’à la fausse exaltation, elle peut aisément s’informer à son tour auprès des personnes de Provins qui nous ont le mieux initié à la connaissance de ce touchant mais trop faible caractère ; elle peut, par exemple, demander à Mme Guérard communication des lettres de Moreau écrites en janvier 1834, et elle verra qu’il faut se résoudre, quand on a le sens juste et bienveillant, à ne voir dans le chantre de la Voulzie qu’un poète.

1915. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Lambert et madame Necker. » pp. 217-239

De même ailleurs, conseillant à sa fille une méthode dans le chagrin, et qui consiste à l’analyser, à le décomposer : « Examinez ce qui fait votre peine, écartez tout le faux qui l’entoure et tous les ajoutés de l’imagination, et vous verrez souvent que ce n’est rien. » Les ajoutés de l’imagination !

1916. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « L’abbé Maury. Essai sur l’éloquence de la chaire. (Collection Lefèvre.) » pp. 263-286

Une des meilleures épigrammes du poète Le Brun est contre l’abbé Maury ; elle a cela de piquant, qu’elle a, d’un bout à l’autre, un faux air d’éloge ou d’apologie, et que c’est le lecteur seul qui, en contredisant à chaque vers, est comme forcé de faire lui-même l’épigramme ; le satirique, dans ce cas, a besoin de compter sur la complicité de tout le monde : L’abbé Maury n’a point l’air impudent ; L’abbé Maury n’a point le ton pédant ; L’abbé Maury n’est point homme d’intrigue ; L’abbé Maury n’aime l’or ni la brigue ; L’abbé Maury n’est point un envieux ; L’abbé Maury n’est point un ennuyeux ; L’abbé Maury n’est cauteleux ni traître ; L’abbé Maury n’est point un mauvais prêtre ; L’abbé Maury du mal n’a jamais ri : Dieu soit en aide au bon abbé Maury !

1917. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. Anecdotes. » pp. 123-144

Jamais, par exemple, à son propos on n’oubliera ces vers de l’Apologie de Gilbert, lorsque ce poète de verve et d’avenir, se justifiant de nommer les masques par leur nom, s’écriait : Si j’évoque jamais du fond de son journal Des sophistes du temps l’adulateur banal ; Lorsque son nom suffit pour exciter le rire, Dois-je, au lieu de La Harpe, obscurément écrire : C’est ce petit rimeur de tant de prix enflé, Qui sifflé pour ses vers, pour sa prose sifflé, Tout meurtri des faux pas de sa muse tragique, Tomba de chute en chute au trône académique ?

1918. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — II. (Suite.) » pp. 23-46

— Sa position fausse commençait déjà2.

1919. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

Son livre sur la contre-révolution d’Angleterre en 1827 avait été un mouvement dans ce sens : la manœuvre fut interrompue pendant le ministère Martignac, qu’il n’avait jugé que comme une fausse trêve.

1920. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

La jeunesse a été en proie à des tristesses extraordinaires, aux fausses douceurs d’une imagination bizarre et emportée, au mépris superbe de la vie, à l’indifférence qui naît du désespoir : une grande maladie s’est manifestée sous mille formes diverses.

1921. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — I. » pp. 414-435

Dans ce voyage de Russie, toutefois, il trouva moyen encore de rendre sa position fausse en se faisant appeler le Chevalier de Saint-Pierre et en se donnant des armoiries de sa façon : bien souvent, quand il était présenté à quelque personnage de marque, on lui demandait s’il appartenait à la noble famille de Saint-Pierre qui était alors très en vue à Versailles ; il était obligé de répondre non, et il en souffrait.

1922. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — I. » pp. 389-410

Sans entrer le moins du monde dans la question astronomique et théologique, à ne prendre le livre que par le côté littéraire et moral, nous en saisirons aisément le faux, et cela en vaut la peine.

1923. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Histoire » pp. 179-240

En effet, ils ne donnent pas pour le portrait de la Reine, la figure de convention, l’espèce de fausse duchesse d’Angoulême, fabriquée par la Restauration.

1924. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1881 » pp. 132-169

La Céline Montaland joue très bien son rôle de grue, mais un incident : elle a perdu les faux cils, que seule sa mère sait lui poser.

1925. (1694) Des ouvrages de l’esprit

Elle est plus grande dans un ris immodéré que dans la plus amère douleur, et l’on détourne son visage pour rire comme pour pleurer en la présence des grands, et de tous ceux que l’on respecte : Est-ce une peine que l’on sent à laisser voir que l’on est tendre, et à marquer quelque faiblesse, surtout en un sujet faux, et dont il semble que l’on soit la dupe ?

1926. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre X. Des Livres nécessaires pour l’étude de la Langue Françoise. » pp. 270-314

On convient généralement que Ménage a trouvé la véritable source d’une multitude de mots ; mais on ne peut nier aussi qu’il ne donne trop souvent des conjectures foibles, hazardées, & en quelques endroits visiblement fausses.

1927. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution française »

Il montre également l’impossibilité de cet esprit principe, l’excrément des philosophes panthéistes qui souille, sous prétexte de les expliquer, toutes les histoires de notre temps, et l’inanité de cette autre théorie, moins ambitieuse, mais non moins fausse, à savoir : que la Révolution est sortie des salons du xviiie  siècle et des écrits des philosophes.

1928. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Sainte-Beuve. Les Poésies de Joseph Delorme, Les Consolations, les Pensées d’août. »

Sainte-Beuve puisse publier, sans retouche, cette œuvre, fausse à force de recherche, des Pensées d’août !

1929. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIV. »

« Dieu de vérité, dit-il, sous d’autres climats j’ai vu de faux sages, osant fouiller tes mystères, insulter ta providence et pousser à l’impiété les malheureux humains.

1930. (1900) La culture des idées

Il n’y a pas des idées vraies et des idées fausses. […] C’est un état d’esprit que l’on est convenu d’appeler inférieur ; et c’est juste, quoique la notion d’une loi rigide soit aussi fausse et aussi dangereuse que sa négation même. […] J’ai vu la vente d’un roman sans aucun style coupée net par un article où un journaliste affirmait : « … livre très beau et d’une « écriture » neuve et hardie… » Rien n’était plus faux, mais ce romancier avait publié dans sa jeunesse un premier livre qui autorisait jusqu’à un certain point de telles plaisanteries. […] D’autre part les Français de France ne lisent qu’en eux-mêmes ; ce livre unique et quelques fausses nouvelles, voilà tout l’aliment que se permet leur génie égoïste et national. […] Secondement, cette hypothèse peut être créée a priori : fausses sensations ou hallucinations.

1931. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

Puis, Satan va trouver la Renommée et la prie de répandre de faux bruits et de semer les mensonges et les calomnies afin de brouiller davantage les Peaux-Rouges et les blancs. […] Ils me répondirent : « C’est faux », et ils s’assirent à terre, les jambes croisées. […] Le démon de la fausse sagesse propose l’athéisme et la diffusion des principes « qui dissolvent les liens de la société et menacent les fondements des empires ». […] nous poursuivions nos faux plaisirs. […] On peut croire que, par suite des immenses coups de faux du premier Empire à travers les générations jeunes et vigoureuses, la France ressent, aujourd’hui encore, une diminution de force.

1932. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Ne voir dans les paysans que des bêtes en rut, c’est tout aussi enfantin, aussi faux et aussi maladif, que de faire de la femme un être désexué, livré au vertige du bleu. […] C’est faux. […] À l’heure actuelle, Flaubert, Barbey d’Aurevilly, Villiers de l’Isle-Adam, étant morts sans postérité, il nous reste Goncourt, Zola, et, dans les vers, Verlaine, Mallarmé qui demeure isolé, avec une fausse école derrière lui, une queue lamentable qui n’a d’ailleurs aucun rapport avec lui. […] Il a créé la paléontologie et n’en reste pas moins un fort grand homme, quoiqu’il soit démontré par les savants de l’heure présente que ses prémisses étaient erronées et ses déductions fausses. […] Ils mêlent arbitrairement les rimes féminines et les rimes masculines, ils font rimer des mots à cinq ou six vers de distance, ils emploient des rimes fausses, ils ne riment pas du tout, ils font des assonnances… Bast !

1933. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Toujours et partout on a plus ou moins à compter avec elles, avec les entêtements ou avec les rêves, avec un faux imprévu qui déjoue. […] Une chanson de lui, pleine de sentiment, intitulée le Retour ou le mois de juin 1820, nous le montrerait abandonnant, abjurant à cette heure une querelle qu’il jugeait désespérée, et se retournant vers des dieux plus indulgents : Je le sens trop, les jours de mon jeune âge A de faux dieux étaient sacrifiés ; Deux ans d’erreur m’ont enfin rendu sage, Et la raison me ramène à tes pieds.

1934. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIIe entretien. Cicéron (2e partie) » pp. 161-256

Si vous suivez la doctrine du plaisir ou de l’égoïsme, bien des choses périssent, et d’abord ces beaux rapports qui nous unissent à nos semblables, l’amour des hommes, l’amitié, la justice et les autres vertus ; car, sans le désintéressement, ce ne sont plus que des chimères ; lorsque nous sommes portés à remplir nos devoirs par l’attrait du plaisir et par l’appât des récompenses, ce n’est pas la vertu, c’est le faux semblant et comme un plagiat de la vertu ». […] « Car l’homme, ajoute-t-il, doit se souvenir qu’il n’est pas seulement pour lui seul, mais pour les siens, pour sa patrie, et que c’est de la moindre partie de lui-même qu’il lui est permis de s’occuper ; et, comme la nature nous a doués d’un invincible attrait pour la vérité, inspirés que nous sommes par ce noble instinct, nous aimons forcément tout ce qui est vrai et réel, comme la bonne foi, la fidélité, la candeur, la constance, et nous haïssons tout ce qui est faux et trompeur, comme la fraude, le parjure, la méchanceté, l’injustice.

1935. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre dixième. Le style, comme moyen d’expression et instrument de sympathie. »

La vie nous manquera, comme un faux ami au milieu de nos entreprises. […] J’ai pu supposer vrai ce que je savais avoir pu l’être, jamais ce que je savais être faux.

1936. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre III. Variétés vives de la parole intérieure »

On le voit, ramené à ses proportions véritables, le phénomène socratique est beaucoup moins anormal que celui de Jeanne d’Arc : 1° Les conceptions de Socrate sur le surnaturel et sur les manifestations de la Providence étaient moins précises, et, comme l’hallucination est une fausse interprétation d’un fait réel, les idées préconçues ont sur ce phénomène une influence décisive. […] Le faux aparté traduit en langage extérieur une parole qui devrait rester intérieure ; le véritable consiste d’ordinaire à dire à mi-voix, par peur, ce qu’on voudrait, par amour-propre, crier à très haute voix.

1937. (1902) Les poètes et leur poète. L’Ermitage pp. 81-146

On se fera donc, à propos de lui et de son œuvre, des idées de plus en plus fausses, ou plutôt, il y aura de plus en plus de malentendus, à propos de ce génie surhumain et monstrueux, entre les gens qui parleront avec une exactitude stricte et ceux qui parleront avec une foi illuminée. […] Si celui qui répond le plus souvent au plus grand nombre de nos aspirations individuelles et de nos états d’âme doit être l’élu, à « l’inlassable bourdon de cathédrale » que fut Hugo, à la cloche de génie que fut Baudelaire, cloche « où des images de péché furent coulées dans le métal » je préférerais pour mon propre compte, la petite cloche de cristal de Verlaine, « impatiente du ciel », vibrant éperdumente à tous les sons sans sonorités fausses ou assourdies, en dépit des dires impudiques et calomniateurs dont on s’est plu ces derniers temps à outrager ce poète.

1938. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

Remarquons d’abord que les mystiques laissent de côté ce que nous appelions les « faux problèmes ». On dira peut-être qu’ils ne se posent aucun problème, vrai ou faux, et l’on aura raison.

1939. (1896) Psychologie de l’attention (3e éd.)

Vicq d’Azyr prétendait que les singes ne sont pas éducables parce qu’on ne peut pas les rendre attentifs (ce qui est faux d’ailleurs). […] Prenons un état quelconque d’attention spontanée ; supposons que, par des procédés artificiels, on puisse le renforcer et surtout le rendre permanent, la métamorphose en idée fixe sera consommée ; tout cet ensemble de conceptions déraisonnables qui lui font cortège et qui ont un faux air de folie, s’y ajoutera nécessairement, par le seul effet du mécanisme logique de l’esprit. […] L’histoire tant citée d’Archimède, pendant la prise de Syracuse, vraie ou fausse en fait, est vraie psychologiquement.

1940. (1842) Discours sur l’esprit positif

Mais cette aveugle disposition ne résulte que d’une manière fausse et étroite de concevoir la grande relation de la science, à l’art, faute d’avoir assez profondément apprécié l’une et l’autre. […] Cette voie est même la seule qui puisse, de nos jours, constituer graduellement, en dehors de la classe spéculative, proprement dite, un vaste tribunal spontané, aussi impartial qu’irrécusable, formé de la masse des hommes sensés, devant lequel viendront s’éteindre irrévocablement beaucoup de fausses opinions scientifiques, que les vues propres à l’élaboration préliminaire des deux derniers siècles ont dû mêler profondément aux doctrines vraiment positives, qu’elles altéreront nécessairement tant que ces discussions ne seront pas enfin directement soumises au bon sens universel. […] L’inaptitude à la vie réelle, le dédain des professions vulgaires, l’impuissance d’apprécier convenablement aucune conception positive, et l’antipathie qui en résulte bientôt, les disposent trop souvent aujourd’hui à seconder une stérile agitation métaphysique, que d’inquiètes prétentions personnelles, développées par cette désastreuse éducation, ne tardent pas à rendre politiquement perturbatrice, sous l’influence directe d’une vicieuse érudition historique, qui, en faisant prévaloir une fausse notion du type social propre à l’antiquité, empêche communément de comprendre la sociabilité moderne ; En considérant que presque tous ceux qui, à divers égards, dirigent maintenant les affaires humaines, y ont été ainsi préparés, on ne saurait être surpris de la honteuse ignorance qu’ils manifestent trop souvent sur les moindres sujets, même matériels, ni de leur fréquente disposition à négliger le fond pour la forme, en plaçant au-dessus de tout l’art de bien dire, quelque contradictoire ou pernicieuse qu’en devienne l’application, ni enfin de la tendance spéciale de nos classes lettrées à accueillir avidement toutes les aberrations qui surgissent journellement de notre anarchie mentale.

1941. (1923) Paul Valéry

Valéry écrit, dans l’Introduction, contre Pascal une page qui tombe un peu à faux, car Pascal, en discernant ces deux esprits, n’a jamais entendu sacrifier l’un à l’autre. […] Sauf peut-être les onze vers de la Fausse Morte, il n’y a pas dans son œuvre de vers d’amour. […] Les vers d’amour de la Fausse Morte prendraient peut-être place au-dessous de cette Dormeuse.

1942. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

Je suis toujours plus à plaindre que je ne suis malheureux 63 ; mais cela doit consoler l’ami qui voit plus loin, car, sachant une fois pour toutes que je mesure tout avec une aune essentiellement fausse, il doit se défier de mon calcul. […] Combien de fois, vers cet été de 1806 ou de quelques-unes des années qui suivirent, soit dans le jardin de la Maisonnette, soit au dehors, le long du coteau de Sainte-Avoie, au bord de cette crête d’où l’on voit si bien le cours de la Seine, avec son île couverte de saules et de peupliers, et d’où l’œil embrasse avec bonheur cette fraîche et tranquille vallée, les deux amis allaient discourant entre eux du but suprême de toute poésie, des fausses images qu’il importait avant tout de dépouiller, et du bel art simple qu’il s’agissait de faire revivre ! Non, Descartes ne prescrivit jamais plus instamment à son philosophe de se débarrasser des idées apprises et des préjugés de l’éducation, que Fauriel ne recommandait au poëte de s’affranchir de ces fausses images qui ne sont réputées poétiques qu’en vertu de l’habitude. […] Il excelle, en général, à profiter de Grégoire de Tours, comme précédemment il avait fait de Sidoine ; il cherche à rajuster, à rétablir la vérité historique à travers les lacunes, les crédulités ou les réticences partiales de l’un, comme il la dégageait de dessous la fausse rhétorique de l’autre.

1943. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

Nul bruit, sauf celui que font au loin des moissonneurs aiguisant leurs faux et le grésillement des grillons dans l’herbe ardente. […] « Ordonnons à nos Chérubins, Trônes, Dominations, Archanges et simples Anges d’avoir à laisser circuler librement, en notre jardin d’Éden, le démon Grymalkin mandé auprès de nous et porteur de la présente. » Et en suscription : « À Grymalkin, salamandre en mission sur terre. » Tu es en règle si, toutefois, ce passeport n’est point faux. […] Un ange, en s’enfuyant, fait un faux pas et s’étale. […] La lucide seigneuriale aigrette de vertige au front invisible scintille puis ombrage une stature mignonne ténébreuse debout en sa torsion de sirène le temps de souffleter par d’impatientes squames ultimes bifurquées un mystère faux roc évaporé en brume qui imposa une borne à l’infini.

1944. (1940) Quatre études pp. -154

Il a pris de multiples initiatives pour lutter contre les faux dieux du jour ; et il a voulu, notamment, que Bryn Mawr College pût affirmer son caractère de haute culture, en ajoutant à ses cours un enseignement qui ne correspondît à aucun programme et qui ne servît à rien — à rien qu’à faire réfléchir, qu’à provoquer des curiosités intellectuelles, qu’à ouvrir des horizons nouveaux. […] Dans une de ses lettres à Thomson, parlant d’une chanson, Les rives de la Dee, il écrit : La chanson est assez bien, mais elle contient des images fausses, par exemple : Et doucement le rossignol chanta sur l’arbre. […] On sait qu’il ne comprit la vie des choses, et la chère vallée d’Aix, et le lac, et les grands chênes de ses bords, que lorsqu’il eut pour la première fois vu Julie ; que la fausse exaltation de son esprit disparut, et qu’il ne chercha plus à imiter qui que ce fût, à partir du moment où la passion l’envahit tout entier. […] Cela veut dire que quand on se met à lire un poème, il faut se dire qu’il est l’ouvrage d’un menteur, qui nous veut entretenir de chimères, ou au moins de vérités si gâtées qu’on a bien de la peine à distinguer le vrai du faux 33… » On trouverait aisément chez Fontenelle, sous une forme plus aimable et plus fine, bien des déclarations qui valent celle de Jean Le Clerc, puisqu’ayant commencé par donner de l’églogue la plus étrange idée, il ne s’est pas arrêté en chemin, et a donné de la poésie en général une idée non moins étrange ; du moins elle nous paraît telle, avec le recul du temps, et quoiqu’en vérité elle semblât toute juste aux Cartésiens, ses amis et ses admirateurs.

1945. (1884) La légende du Parnasse contemporain

Mais pour la faire triompher il fallait vaincre tous les faux élégiaques, tous les faux humanitaires, tous les débraillés, tous les mauvais poètes. […] « Malheureusement, il n’y a rien de plus absolument faux que cette affirmation. […] Il y a dans cette légende un peu de vrai et beaucoup de faux. […] Foulons ces ruines et même entassons des ruines encore, puisque telle est la loi fatale de ce siècle ; ne laissons debout aucune fausse grandeur.

1946. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Il part en guerre contre « la fausse Eglise des jansénistes. » Il déclare avoir la clef de l’Apocalypse et annonce une armée de 144,000 hommes qui, sous la conduite de Louis XIV, rétablira la vraie religion. […] Le cabaret, c’est l’oubli et c’est le rêve… Et je ne nie pas que ce ne soit aussi l’abrutissement, l’ivrognerie et souvent, dans la vapeur des alcools empoisonnés, la fermentation contagieuse des idées fausses et violentes, des révoltes meurtrières — et inutiles… Mais, n’est-ce pas ? […] C’est candide, c’est gentil, c’est inoffensif, c’est modestement et humblement humain ; ça n’est pas cruel, ni amer, ni pervers, ni orgueilleux, ni malfaisant, et ça n’est pas plus faux qu’autre chose. […] Valentine est une fille mal élevée, qui souffre de sa position fausse et qui a un très bon cœur. […] Mais le maçon qui fait l’ouvrage est un faux maçon.

1947. (1908) Jean Racine pp. 1-325

En attendant il part en guerre contre la « fausse Église des jansénistes ». […]   Car Racine (et cela ne nous étonne plus, mais cela fut neuf et extraordinaire à son heure), Racine, ami de Molière qui faisait rentrer la vérité dans la comédie, ami de La Fontaine qui la mettait dans ses Fables, ami de Furetière, qui essayait de la mettre dans le roman, ami de Boileau qui, dès ses premières satires, s’insurgeait contre le romanesque et le faux, — Racine, pour la première fois dans Andromaque, choisit et veut une action simple et des personnages vrais ; fait sortir les faits des caractères et des sentiments ; nous montre des passionnés qui ne sont nullement vertueux, mais qui aussi ne prétendent point à la vertu ni ne la déforment ; ramène au théâtre — par opposition à la morale fantaisiste et romanesque — la morale commune, universelle, et cela, sans aucunement moraliser ni prêcher, et par le seul effet de la vérité de ses peintures. […] Voici le passage de Virgile : Nous côtoyons, dit Énée, le rivage d’Épire ; nous entrons dans un port de Chaonie, et nous montons jusqu’à la haute ville de Buthrote… Il se trouva qu’en ce moment, aux portes de la ville, dans un bois sacré et sur les bords d’un faux Simoïs, Andromaque portait aux cendres d’Hector les libations solennelles et les tristes offrandes. […] Bajazet, c’est l’honnête homme engagé dans une situation fausse, contraint de s’abaisser moralement à ses propres yeux pour faire ce qu’il croit être son devoir, — et de revêtir des apparences équivoques au moment même où il est en réalité le plus héroïque. […] Aux Cornélie, aux Viriathe, aux Sophonisbe, aux Pulchérie, aux orgueilleuses et aux déclamatrices, il oppose les pudiques : Andromaque déjà, et Junie, et Bérénice, et Atalide, — mais surtout Monime : Monime, qui nous offre, pour ainsi dire, le sublime de la décence, et à la fois de la fierté intérieure et de la modestie et de la « tenue » ; Monime, fine Grecque parmi ces demi-barbares ; aimée de Mithridate et son épouse de nom en attendant qu’il ait le loisir de célébrer et de consommer le mariage ; aimée en même temps des deux fils du vieux roi et aimant secrètement l’un d’eux ; et qui, — les choses se compliquant encore par la fausse mort et la résurrection du vieux tyran, — se trouve, d’un bout à l’autre du drame, dans la situation la plus difficile, la plus comprimée, la plus délicate, — la plus fausse, — et qui semble la porter légèrement à force de franchise et de grâce, et de respect de soi, et d’héroïsme sans gestes : admirable de « tenue » (il faut répéter le mot, qui implique dignité et silencieux empire sur soi-même) depuis son exquise entrée au premier acte et sa douce requête à Xipharès : Seigneur, je viens à vous : car enfin aujourd’hui Si vous m’abandonnez, quel sera mon appui ?

1948. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

Ils y tiennent école de sagesse, nous enseignant, avec une grâce renouvelée d’Aristophane, à mépriser la fausse vertu et le faux génie des heureux de ce monde et à sourire des sots, des méchants, des hypocrites. […] On me l’exposait ainsi tout récemment : « D’ordinaire, les étrangers quittent Paris sous le coup d’une fausse impression. […] Et le sermon que le monde, se fondant sur ces grandes lois morales, ne manquera pas de lui faire aura toujours pour base une fausse opinion sur ce qui se passe au fond de son cœur. […] La moindre apparence de chantonnement y sonne faux. […] Ou bien pendant le travail je l’oubliais complètement, ou bien, en m’y tenant je faisais fausse route.

1949. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

C’est là, sans doute, une impression vague, formée du dehors et du lointain, qui n’est ni tout à fait juste, ni tout à fait fausse. […] Ils se sont débarrassés de la fausse césure que les romantiques, dans le vers brisé, et les parnassiens gardaient encore. […] Vous vous êtes trompés, mes frères ; faites-moi le but de vos injures et de vos pierres, et tirez sur moi vos épées. » Après avoir dit ces paroles avec une fausse douceur, il s’alla jeter avec un zèle encore plus faux aux pieds de son ennemi, et, les lui baisant, non seulement il lui demanda pardon, mais aussi, il alla ramasser son épée, son manteau et son chapeau, qui s’étaient perdus dans la confusion. […] Mais on se ferait une idée bien fausse de ce jeune homme en voyant en lui un désespéré qui veut à toutes forces mourir. […] M. le duc de Broglie a voulu faire de Julien un persécuteur ; mais l’embarras qu’il y éprouve est l’indice, chez un historien si habile, d’une situation fausse.

1950. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

De là des perplexités ; s’il se livre, c’est le déshonneur sur son nom rejaillissant sur des innocents, sa mère et sa sœur, c’est sa vie écroulée sur un faux raisonnement ; sinon c’est un second crime indéniable ; et, quelque exemple de facilité à vivre avec le remords que lui donnent les comparses du roman, il est irréparablement troublé. […] Henry Fouquier, qui s’est ému aussi de Crime et Châtiment, déplore : « Voilà la question du droit au crime posée. » Ce qui est faux, car Dostoiewski résout au contraire cette question, en prouvant qu’il ne faut pas se poser la question du droit au crime, parce que la conscience humaine n’y résiste pas ; pour parler vulgairement, un homme même bien trempé manque d’estomac pour le crime. […] Partant d’une loi, que Tolstoï considère comme fausse, de la division du travail, tout art et toute science sont combinés de façon à légitimer le mauvais ordre qui règne dans le monde. […] sont faux dans leur intention de liberté parce qu’ils comprennent un arrêt pour l’oreille que ne motive aucun arrêt du sens. […] Rimbaud essaya de noter quelques correspondances possibles, sur ce terrain de l’harmonie verbale ; il fit peut-être fausse route, en tout cas il ne se servit point de sa méthode.

1951. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

« La chimie, dit-il, est la fausse monnaie de notre métier. » Il poursuit donc les faux monnayeurs ; il veut décharlataniser la médecine.

1952. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

Le despote sut tirer parti des lumières d’un siècle nouveau, et comme il était lui-même une lumière, il épargna à ses subordonnés les fausses mesures et les vues étroites de la médiocrité, qui, en faisant le mal du temps présent, préparent encore des maux à la postérité.

1953. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure  »

Impuissante et fausse à l’égard de Rabelais, elle a trop raison sur tous les autres.

1954. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

Je ne voudrais pas faire de fausse sensibilité, mais je défie des personnes, fussent-elles d’opinion, de point de départ et de doctrines les plus opposées, qui se sont rencontrées une fois dans une même œuvre de charité active, au lit d’un malade, d’un mourant, de se haïr, de se dédaigner, de se rejeter.

1955. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville »

Mais vous savez que la véracité consiste à ne pas dire ce qui est faux, et non à dire ce qui est vrai.

1956. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville (suite et fin.) »

. ; et cependant, jusqu’à présent, du moins à mon avis, elle a été reproduite avec de fausses ou de vulgaires couleurs.

1957. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Ces âmes-là, une fois prises, n’ont que faire d’un doux et faux bonheur, au sein duquel elles se sentiraient éternellement désolées. 

1958. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

Sans parler des poésies publiées et connues, comme le recueil des Deux Voix 7, il y a bien de jeunes espérances, et qui ne se gâtent pas jusqu’ici de fausses ambitions.

1959. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « PENSÉES FRAGMENTS ET LETTRES DE BLAISE PASCAL, Publiés pour la première fois conformément aux manuscrits, par M. Prosper Faugère. (1844). » pp. 193-224

Cette manière d’envisager Pascal n’est pas fausse, elle est au point de la perspective, approximative à distance, légèrement figurative.

1960. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

Par l’effet d’une intrigue qu’il avait ignorée jusqu’au dernier moment, le bref ne fut pas fulminé, et sa position de déserteur devint tellement fausse qu’il n’y vit d’autre issue qu’une fuite en Hollande.

1961. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Toujours en haleine, aux écoutes, faisant de fausses pointes et revenant sur sa trace, sans système autre que son instinct et l’expérience, il a fait la guerre au jour le jour, selon le pays, la guerre à l’œil, ainsi que s’exprime Bayle lui-même, qui est le génie personnifié de cette critique.

1962. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

Nous vivons à une époque fort mêlée en tout genre, où les opinions les plus sincères peuvent être diamétralement opposées sur les questions les plus importantes ; où le vrai, dans tout ce qui n’est pas matière de science, se distingue malaisément du faux, et où, même en se bornant à ce qui est de l’utilité politique, on peut hésiter entre différentes voies et différents moyens.

1963. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Le véritable esprit n’est autre chose que la faculté de bien voir ; le sens commun est beaucoup plutôt de l’esprit que les idées fausses.

1964. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre II. Les romans bretons »

L’un fit une chanson de geste de la vie d’Alexandre, telle que le faux Callisthène l’avait racontée, et la chevauchée du roi macédonien à travers l’immense Asie et l’Inde prodigieuse, le caractère du héros, type accompli de vaillance et de largesse chevaleresques, eurent le succès le plus populaire.

1965. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre II. La jeunesse de Voltaire, (1694-1755) »

Avec un peu de sympathie, il aurait fait un chef-d’œuvre et une œuvre définitive : il n’a fait, malgré sa conscience de travailleur et son génie lucide d’écrivain, qu’une œuvre de parti, fausse et dure.

1966. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Je doute fort qu’en fait de peines proportionnées aux délits, on aille jusqu’à condamner l’incendiaire, « qu’on brûlait, dit Voltaire, en cérémonie », à rebâtir la grange incendiée, puis « à veiller toute sa vie, chargé de chaînes et de coups de fouet, à la sûreté de toutes les granges du voisinage. » Je doute qu’on imagine jamais de punir le faux monnayeur, en le forçant de fabriquer toute sa vie en prison la monnaie de l’État ; le faussaire, en le contraignant à copier de bons ouvrages, ou à transcrire sa sentence sur les registres des juges.

1967. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre douzième »

L’école encyclopédique avait essayé de l’ôter à l’homme, soit en lui prouvant qu’il est sans prises pour le saisir, soit par une affectation de faux respect, en niant la Providence divine, sous prétexte de ne pas la commettre avec les désordres du monde physique et les misères du monde moral.

1968. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre IV. L’espace et ses trois dimensions. »

Je ne puis comprendre non plus qu’on dise que l’idée de temps est postérieure logiquement à l’espace, parce que nous ne pouvons nous le représenter que sous la forme d’une droite ; autant dire que le temps est postérieur logiquement à la culture des prairies, parce qu’on se le représente généralement armé d’une faux.

1969. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre X. La littérature et la vie de famille » pp. 251-271

La fausse suivante.

1970. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre II : La Psychologie. »

C’est une proposition dont la négation est non-seulement fausse, mais encore inconcevable.

1971. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XIV, l’Orestie. — Agamemnon. »

Sa harangue hardiment perfide encense la victime ; c’est avec une sorte d’effronterie grandiose que le faux amour y grimace : la tête de Méduse sourirait ainsi.

1972. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Malesherbes. » pp. 512-538

L’éclat que produisit cette affaire du livre De l’esprit, la position fausse où elle plaça tant de personnes considérables, et le conflit des juridictions qui s’y produisit ouvertement, suggérèrent un moment l’idée de dresser une loi qui régirait la matière, loi qu’il valait mieux que le roi fît que de la laisser faire au Parlement ; et c’est à cette occasion que M. de Malesherbes se mit à rédiger ses intéressants Mémoires sur la librairie.

1973. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Bussy-Rabutin. » pp. 360-383

Qu’on se rappelle cette première scène délicieuse où le spirituel valet, en exposant ses misères, ne fait que décrire la servitude et les attaches du courtisan d’alors auprès des Grands :        Cependant notre âme insensée S’acharne au vain honneur de demeurer près d’eux, Et s’y veut contenter de la fausse pensée Qu’ont tous les autres gens, que nous sommes heureux.

1974. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « André Chénier, homme politique. » pp. 144-169

Se séparant, pour le mieux flétrir, du faux bon ton qui n’avait jamais été le sien, et revendiquant le vrai bon ton éternel et naturel, celui qui est tel pour toute âme bien née, et qu’aucune révolution n’est en droit d’abolir : Tout homme qui a une âme bonne et franche, s’écriait-il, n’a-t-il pas en soi une justesse de sentiment et de pensées, une dignité d’expressions, une gaieté facile et décente, un respect pour les vraies bienséances, qui est en effet le bon ton, puisque l’honnêteté n’en aura jamais d’autre ?

1975. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1879 » pp. 55-96

et je n’y comprends rien, mais c’était comme ça… Il y a un moment dans le galop, où le pied gauche ne laissait plus de trace, ne laissait que cette petite marque presque invisible. » Et voilà l’original garçon, qui se met à parler du galop du cheval, avec une grande science, des aperçus nouveaux, des divagations amusantes, tout en me faisant passer sous les yeux des croquetons, où il s’est essayé à saisir la réalité du galop : « C’est le diable, vois-tu, cette jambe est vraie, et elle paraît bête, c’est juste et ça semble faux.

1976. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préface des « Derniers Jours d’un condamné » (1832) »

Mais, indépendamment des abolitions partielles pour le cas de fausse monnaie, d’incendie, de vols qualifiés, etc., nous demandons que dès à présent, dans toutes les affaires capitales, le président soit tenu de poser au jury cette question : L’accusé a-t-il agi par passion ou par intérêt ?

1977. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre III. L’histoire réelle — Chacun remis à sa place »

La qualité de roi ne sera plus un faux poids moral.

1978. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre III : Examen de la doctrine de Tocqueville »

Les sociétés qui sont sur cette pente ne sont donc pas dans le faux : elles peuvent dépasser le but, aller trop vite, s’égarer même.

1979. (1856) Les lettres et l’homme de lettres au XIXe siècle pp. -30

Nous ne sommes pas même trop contrarié de notre faux air de ressemblance avec le xviiie  siècle.

1980. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre V. La parole intérieure et la pensée. — Premier problème : leurs positions respectives dans la durée. »

. — Quintilien (X, 1) est plus pénétrant que Boileau ; il comprend que l’expression peut être en retard sur la pensée ; mais, si les nombreuses analyses psychologiques de cet auteur sont très fines, elles sont aussi très vagues ; nulle part il ne distingue dans la mémoire verbale la puissance (conservation) et l’acte (reproduction, parole intérieure) ; puis la parole est pour lui le but, et la pensée le moyen : ce faux point de vue est l’erreur fondamentale de son livre.

1981. (1913) La Fontaine « IV. Les contes »

Il a analysé, lui, le sentiment de curiosité et montré à quel point il est vrai, à quel point il est faux, et à quel point il est vain.

1982. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vi »

Ce qui manquait à ces esprits intuitifs et bien intentionnés, c’est cette discipline intellectuelle que donne une culture plus forte et mieux équilibrée que leur éducation incomplète de primaires ; c’est encore cette discipline morale de la foi religieuse qu’ils n’avaient pas et que même ils combattaient comme attentatoire à l’idée fausse qu’ils se faisaient de la liberté humaine.

1983. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre x »

Quelle existence mène-t-on dans le secteur atroce de la Tête de Faux ?‌

1984. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — La solidarité des élites »

Mais la fausse et faible parole chrétienne s’efface à mesure que grandit la réelle et forte parole humaine.

1985. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

La foule allait d’elle-même, déjà tout habituée, au marchand de nouvelles fausses et d’idéal frelaté.

1986. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre III. De la nature du temps »

Mais il en est d’autres auxquels la théorie défend, en quelque sorte, d’être perçus ou de devenir perceptibles : s’ils le devenaient, ils changeraient de grandeur, — de telle sorte que la mesure, exacte si elle porte sur ce qu’on n’aperçoit pas, serait fausse aussitôt qu’on apercevrait.

1987. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Résumé et conclusion »

Ou bien donc notre conception de la matière est fausse, ou le souvenir se distingue radicalement de la perception.

1988. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

Quand les relations entre membres de groupes autrefois nettement séparés se multiplient, les respects ou les dédains collectifs ne survivent pas longtemps : le système des hiérarchies consacrées se disloque et porte à faux, car les classes sont brouillées.

1989. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

A l’imitation de cette façon de parler latine, nos adjectifs sont souvent pris adverbialement ; parler haut, parler bas, sentir mauvais, voir clair, chanter faux, chanter juste, &c. on peut en ces occasions sousentendre une préposition & un nom substantif : parler d’un ton haut, sentir un mauvais goût, voir d’un oeil clair, chanter d’un ton faux : mais quand il seroit vrai qu’on ne pourroit point trouver de nom substantif convenable & usité, la façon de parler n’en seroit pas moins elliptique ; on y sousentendroit l’idée de chose ou d’ètre, dans un sens neutre.

1990. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Il peut arriver que la foule applaudisse et ne s’aperçoive pas de la méprise ; mais elle se ravise bientôt, et le poète qui s’est trompé au point de substituer le plaisir des yeux à l’enseignement, à l’émotion, qui a oublié le cœur et l’intelligence, reconnaît qu’il a fait fausse voie. […] Souvent elles reposent sur des idées fausses. […] Que le sang tache les mains, qu’il rougisse les sillons, c’est une idée toute simple ; que le sang tache le cœur, c’est une idée parfaitement fausse, et, pour me servir d’une expression que les géomètres emploient sans impolitesse, une idée parfaitement absurde. […] S’il est surpris dans cette enceinte sacrée, il sera puni de mort ; mais qu’il entre par la porte ou qu’il escalade le mur, qu’il se procure une fausse clé ou qu’il mette ses mains en lambeaux, le châtiment sera le même ; il s’expose donc inutilement à un double danger. […] Par une fausse sortie très adroitement conçue, il dérobe l’épée de son adversaire, qui a la bonhomie de ne pas se tenir sur ses gardes, comme s’il venait d’accomplir une action inoffensive et toute naturelle, et don Salluste désarmé trouve enfin le châtiment qu’il aurait dû recevoir au troisième acte.

1991. (1892) Essais sur la littérature contemporaine

Et qu’y a-t-il, aux yeux des jeunes gens, qui soit plus démodé, plus artificiel, et plus faux qu’une Chaîne par exemple, si ce n’est Bertrand et Raton ? […] Elle a d’ailleurs autre chose à faire, et si les romanciers s’imaginent, s’ils étaient assez naïfs, assez « romantiques » pour s’imaginer que sans eux, sans leurs Termite ou sans leurs Sébastien Roch, la critique, embarrassée de son rôle, serait obligée de chômer, c’est l’occasion de leur dire qu’on ne saurait s’en faire une idée plus étroite et plus fausse. […] Dans le roman comme ailleurs, être idéaliste, c’est d’abord avoir des idées ; — n’importe qu’elles soient justes ou fausses, bonnes ou mauvaises, heureuses ou saugrenues, n’importe même qu’on les accepte ou qu’on les repousse ; — et ensuite c’est faire servir les moyens de l’art à l’expression et à la communication de ces idées. […] sinon qu’il a enseigné la manière de se procurer, à défaut de la vraie, dont on manque, l’air au moins et les apparences de la fausse originalité ? […] Ce n’est plus que sur la scène du Palais-Royal ou des Variétés que l’on prend encore un accordeur de pianos pour un ministre plénipotentiaire, ou la fausse madame Toupinel pour la vraie.

1992. (1866) Nouveaux essais de critique et d’histoire (2e éd.)

Un ouvrage qui a quelque succès par sa singularité, et dont les fausses, je dis les fausses, et malignes applications pourraient me nuire auprès de personnes moins éclairées et moins équitables que vous, a été toute la médiation que j’ai employée et que vous avez reçue ». […] Un dernier malheur, c’est que la description trop longue fausse l’impression. […] Quand Balzac veut peindre la vertu, la religion et l’amour, il rencontre l’enflure pénible d’une sublimité fausse, la banalité fardée d’une phraséologie officielle, la concupiscence d’une imagination dévergondée et d’un tempérament échauffé ; ses beaux portraits de femmes sont ailleurs. […] Sa mère était toute mystique, se crut miraculeusement guérie d’une maladie mortelle, interprétait la Bible à sa guise, avait des apparitions et en même temps disait que toutes les religions faisaient fausse route. […] La tristesse et le dégoût n’étaient que de fausses vues de l’esprit, préoccupé d’un détail, oubliant de considérer l’ensemble.

1993. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

Au moindre faux pas, de bons amis se trouveront là pour achever sa chute. […] Ils mettaient un siècle religieux en garde contre la religion fausse ; on ne fabrique la mauvaise monnaie qu’à l’imitation de la bonne, et toute vertu a sa contrefaçon.

1994. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

Il arriva, au mois d’octobre, que, dans une audience d’ambassadeurs, Janikan trouvant le roi chagrin contre le premier ministre, sur un sujet qu’on raconte diversement, il commença à l’accuser de plusieurs choses, les unes vraies et les autres fausses, que le prince écouta assez aigrement. […] » Surtout le reproche d’empoisonnement les mettait à la gêne ; car, bien que peut-être ils en fussent innocents, le soupçon en était si plausible, que cette accusation, toute fausse qu’elle était à leur égard, ne leur présentait pas une image de mort moins horrible que si elle eût été véritable, lorsque le prince qui succéderait à l’empire voudrait l’appuyer ; qu’au contraire, si l’on élisait le puîné, ils se maintiendraient sans peine dans le poste glorieux que leurs charges leur donnaient ; qu’ils auraient le loisir d’élever leurs familles et de faire des créatures ; qu’ils gouverneraient avec un pouvoir presque absolu, sous un enfant, un des plus grands empires de l’univers.

1995. (1898) Émile Zola devant les jeunes (articles de La Plume) pp. 106-203

« Manger, boire et le reste, a-t-on dit, il ne se passe pas autre chose dans la Terre ou dans l’Assommoir. » Mais les personnes qui se permirent cette constatation, d’ailleurs fausse, semblent trop oublier l’objectif principal et les intentions premières du romancier. […] Nous vous dirons très nettement ce que nous pensons, sans égards pour un talent qui s’est abaissé à une pareille besogne, sans indulgence même pour une erreur qui, excusable au début peut-être, est devenue criminelle par l’acharnement mis à la soutenir, sans pitié pour l’homme qui ne veut pas confesser avoir fait fausse route et qui ose se déclarer tout prêt, si on ne l’acquitte, à marcher de l’avant, dût-il déchaîner sur le pays les pires catastrophes.

1996. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

On ne sait pas assez combien meurt vite une civilisation littéraire sous la hache d’une assemblée ou sous la faux d’un Attila. […] Elle me parla de ma mère, qu’elle avait connue à la cour dans son enfance ; de mes vers, qui révélaient, disait-elle, une fibre malade dans un cœur sain ; du danger de la solitude absolue à mon âge, qui fausse ou qui aigrit les impressions, ces sens du génie ; du bonheur qu’elle aurait à remplacer pour moi ma famille éloignée et à m’introduire dans la sienne comme un enfant de plus parmi les charmants enfants dont la Providence avait orné son foyer et consolé ses vieux jours.

1997. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIe entretien. Sur le caractère et les œuvres de Béranger » pp. 253-364

« Des astres faux conjurez l’influence ; « Effroi d’un jour, ils pâliront demain. […] Ces chimères, excusables quand elles sont les cauchemars de la faim, sont déplorables quand elles sont les aberrations de l’esprit, criminelles quand elles sont la solde en fausse monnaie du radicalisme.

1998. (1899) Arabesques pp. 1-223

Je me suis inscrit en faux contre de telles extravagances. […] Entre parenthèses, s’il est une chose constante, c’est bien mon aversion à l’égard de ce pleurnicheur sentimental, un des esprits les plus faux qui aient jamais existé. […] Jean Amade dit : « Apprête ta vigueur pour la grande journée que le monde attend avec impatience ; secoue la robe de poussière dont ton immobilité se laissa revêtir ; prends dans ta main la faux ; puis entre, serein, dans le champ blond et accomplis ta part de labeur courageusement. […] Un autre exemple : Voici le dilettante qui a coutume d’opposer les idées les unes aux autres, de les disséquer et de jongler avec les notions contradictoires qu’elles lui livrent comme avec des boules de couleur. « Tout est vrai, tout est faux, dit-il, et je me garde de conclure parce que je ne sais jamais si je me trompe, ou si je vois juste. » Il est si content de sa virtuosité qu’il se croit un être d’essence supérieure.

1999. (1898) Essai sur Goethe

Cependant, ici, la « poésie » ne s’est pas contentée d’embellir la « vérité » dans des proportions légitimes : elle a fait toute la légende à force de la pénétrer ; elle nous a donné, de Goethe et de ses amies, une idée entièrement fausse à force d’être corrigée ; et quand on remonte à des sources plus sûres que les Mémoires, c’est-à-dire aux correspondances que les fanatiques de Goethe ont si imprudemment publiées, on reste stupéfait de la part de comédie et de vulgarité qu’on découvre soudain. — Ici, dans des lettres adressées à Behrisch — un ami sardonique et malicieux, qui ressemble un peu à Méphistophélès, et dut sourire des confidences —, nous pouvons suivre toute l’histoire d’Annette et démêler le fil embrouillé du sentiment qu’elle inspira : sentiment médiocre, qui naît faiblement de la reconnaissance de l’étudiant pour la jeune fille qui soigne son linge, et paraît d’abord insignifiant, presque dédaigneux. […] S’il paraît inconséquent ou coupable en se laissant entraîner dans les rangs de fanatiques sanguinaires, ce n’est qu’une fausse apparence : il s’est sacrifié dans un noble dessein, pour arrêter la révolte, pour en changer les caractères, pour éviter les cruautés inutiles. […] Et puis, sans compter les faux frères que nous connaissons, vint la série interminable des imitations, dans toutes les langues : une armée de sous-Werther, plus ou moins exactement calqués sur le modèle, s’exprimant comme lui, agissant comme lui, battant la menue monnaie de ses propos, de ses pensées, de ses sensations : Jacopo Ortis, Saint-Alme, Le Peintre de Salzbourg, Werthério Stellino, le Nouveau Werther (comme on avait écrit le Nouveau Robinson), et combien d’autres ! […] Jamais l’amour n’a parlé pire rhétorique, plus fade, plus pleurarde, plus fausse : qu’on en juge par ce seul monologue de Guillaume : Ange ! […] Mais le fâcheux esprit dont elles témoignent s’infiltre plus profond : il pénètre parfois les personnages, il les arrache mal à propos à leur préoccupation dominante, ou même il la dénature jusqu’à la rendre fausse ou invraisemblable.

2000. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

Puis Chopin, le seul vrai poitrinaire : tel de ses cris funèbres sonne aujourd’hui un peu faux : combien pourtant il a profondément éprouvé les languides désespérances qu’il a dites ! […] J’ai cru très longtemps que c’était un faux grand homme. […] Avait-on encore perpétré un quiproquo, admis de fausses lois ? […] Évidemment, cette pauvre science, acharnée à expliquer l’impossibilité éternelle de faits maintenant constatés, elle était l’erreur d’une fausse piste : on allait liquider ses restes et procéder à l’installation d’un nouveau reflet de l’immuable nature. […] Seulement la science européenne était fausse, mal engagée.

2001. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance. »

Je ne dis pas que ce soit faux ; mais je crois bien que, sous Louis XIV, du temps de la vieillesse de Mme de Maintenon, on disait la même chose.

2002. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. (Suite et fin.) »

C’est le premier éclat simple (nitor), la lumière même de la pensée dans la parole, et que les grands esprits droits préfèrent à toute fausse couleur.

2003. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre II. Lois de la renaissance et de l’effacement des images » pp. 129-161

Combes mentionne le cas d’un Irlandais, porteur commissionnaire d’une maison de commerce, qui, étant ivre, laissa un paquet à une fausse adresse, et, revenu à lui, ne put se rappeler ce qu’il en avait fait.

2004. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

De tels mots, sciemment faux dans la pensée de celui qui les écrit, donnent la mesure de sa conscience.

2005. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVe entretien. Chateaubriand, (suite) »

Il eut l’idée juste et la conduite fausse.

2006. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Elle se rattache alors à la fausse impassibilité que j’ai étudiée dans Les Mensonges du caractère (Paris, F. 

2007. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 janvier 1886. »

Non seulement dans les parties instrumentales, mais encore dans les parties vocales où la sévérité, comme il convient, est plus de mise, il faut renoncer à relever les quintes de suite, les fausses relations, les doublures de notes à résolution obligée, les mouvements fantaisistes qui forcent à monter les notes qui doivent descendre et à descendre celles qui doivent monter, etc., tous péchés qui déchaînaient jadis la colère des puristes comme Cherubini.

2008. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1856 » pp. 121-159

Il habite, rue Fontaine-Saint-Georges, une maison toute fleurie de fausses sculptures du xvie  siècle, avec des chouettes de pierres dans les niches des dessus de fenêtres.

2009. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

La distinction des génies objectifs et des génies subjectifs revient à la distinction de l’imagination et de la sensibilité ; chez les uns l’imagination, domine, chez les autres la sensibilité, nous ne le nions pas ; mais nous maintenons que la caractéristique du vrai génie, c’est précisément la pénétration de l’imagination par la sensibilité, et par la sensibilité aimante, expansive, féconde ; les talents de pure imagination sont faux, la couleur ou la forme sans le sentiment est une chimère.

2010. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

Il est purgé de toutes les fables, de tous les faux miracles & des histoires supposées, dont la crédulité de nos ancêtres avoit déshonoré les légendes des Saints.

2011. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre III : Règles relatives à la distinction du normal et du pathologique »

Enfin et surtout, s’il est vrai que tout ce qui est normal est utile, à moins d’être nécessaire, il est faux que tout ce qui est utile soit normal.

2012. (1773) Discours sur l’origine, les progrès et le genre des romans pp. -

Voilà où nous emporte un faux enthousiasme.

2013. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Mais vis-à-vis des « gros » officiels, cet électeur censitaire prend le masque du vigneron de la Chavonnière, c’est-à-dire d’un faux « petit », et même du vigneron de la vigne de Naboth. […] Et pourtant c’est par ces rimes plates, ce faux distique, cette naïveté apparente, qu’est introduit le moyen de faire coïncider le ton du récit ordinaire avec la stance imposée par le génie lyrique de la ballade. […] Rien de plus raisonnable, de plus sage, que son idée de l’ode, et son ambition, qui est d’un grand disciple : « Il a pensé que si l’on plaçait le mouvement de l’ode dans les idées plutôt que dans les mots, si, de plus, on en asseyait la composition sur une idée fondamentale quelconque qui fût appropriée au sujet, et dont le développement s’appuyât dans toutes ses parties sur le développement de l’événement qu’elle raconterait, en substituant aux couleurs usées et fausses de la mythologie païenne les couleurs neuves et vraies de la théogonie chrétienne, on pourrait jeter dans l’ode quelque chose de l’intérêt du drame, et lui faire parler en outre ce langage austère, consolant et religieux dont a besoin une vieille société qui sort encore toute chancelante des saturnales de l’athéisme et de l’anarchie. » Ces lignes de la préface de 1822 sont parfaitement lucides.

2014. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Molière »

De l’autre qu’on connoît la traitable méthode Aux foiblesses d’un peintre aisément s’accommode : La paresse de l’huile, allant avec lenteur, Du plus tardif génie attend la pesanteur ; Elle sait secourir, par le temps qu’elle donne, Les faux pas que peut faire un pinceau qui tâtonne ; Et sur cette peinture on peut, pour faire mieux, Revenir, quand on veut, avec de nouveaux yeux. […] Auger, ne s’apercevant pas que ithos n’est autre que êthos, plus correctement prononcé, se mit en de faux frais d’étymologie.

2015. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1885 » pp. 3-97

Ce n’est ni une étude vraie de la vie moderne, ni un recueil de belle écriture, et il n’y a là dedans qu’un travail d’écureuil, et une dépense de fausse imagination autour d’une situation, tirée par les cheveux. […] Lundi 2 mars Avant de me lever, au petit jour, je réfléchissais dans mon lit, au sujet d’Henriette Maréchal, que si je continuais à faire du théâtre, je voudrais le balayer de tout le faux lyrisme des anciennes écoles, et remplacer ce lyrisme par la langue nature de la passion.

2016. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Il veut d’abord sous le titre du Cousin Tintin, faire une nouvelle, puis une pièce pour Baron, de l’histoire d’un faux testament fabriqué par la sœur d’un défunt. […] Et vraiment on serait tenté de lui dire : « Est-ce que vous fabriquez de la fausse monnaie ? 

2017. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Je puis, par un faux cercle, avec un faux compas, Le mettre hors du ciel, mais hors de moi, non pas.

2018. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Toutes les reconstructions systématiques d’épopées disparues (comme celle de Kurth, pour ne citer qu’un nom) pèchent par une accumulation de subtilités ; très ingénieuses dans le détail, elles sont fausses dans l’ensemble. […] On a dit, je le sais, que la France se ferme aux idées étrangères ; cela est exact, ou faux, selon les époques ; quand elle a tout donné, qu’elle paraît épuisée, elle s’ouvre à l’étranger ; puis elle semble s’isoler ; c’est que, mère toujours féconde, elle voue ses soins au fils qu’elle enverra, tel Yvain ou Lancelot, à travers la forêt magique des préjugés, à la recherche du vrai idéal. — L’exclusivisme est à de certains moments une nécessité de la concentration.

2019. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

Vraie ou fausse, cette hypothèse met, dans le roman enfantin, l’auteur de plain-pied avec son sujet. […] Bourget, et les auteurs de romans à thèse, croient n’avoir fait que du roman d’idées, parce qu’ils ne représentent pas nécessairement comme de malhonnêtes gens ceux qui, d’après eux, pensent faux, et que le professeur Monneron est un aussi brave homme que le professeur Ferrand. […] S’il peut sembler avoir réussi dans La Recherche de l’Absolu, c’est d’abord parce que le titre en est faux et que les recherches de Balthazar Claës ne font que symboliser dans le relatif la recherche de l’absolu. […] Loin de moi la pensée de trouver dangereuses et fausses les idées religieuses et morales qui nous mettent en garde contre l’amour du plaisir et qui contribuent à nous placer dans la divine mesure. […] Les prétendues règles de la composition épique, telles que les reproduit Horace, sont de fausses fenêtres, tentées par les critiques ; elles ont été vite discréditées.

2020. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

Il s’agit, chaque fois que l’imagination part sur de fausses pistes, de couper court à ces digressions, de la remettre sur la voie. […] L’usage même de la métaphore incite les poètes à faire porter à faux leurs expressions ; et ce qui est le plus dangereux, c’est qu’il couvre toutes les négligences ; quand le poète a pris un mot pour l’autre, il en est quitte pour dire que c’est une métaphore. […] En posant franchement et de parti pris tous les mots à faux, on abaisse leur vertu suggestive à l’extrême limite, passée laquelle ils ne signifieraient plus rien du tout. […] Mais l’on se fait une idée fausse de l’état mental du poète, si l’on s’imagine que parce qu’il s’applique à rythmer ses vers, il est incapable d’éprouver en même temps une émotion sincère.

2021. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Tout ceci est le résultat d’une situation fausse prolongée, attaché que je suis au centre de Paris, en butte à toutes les obsessions du monde ou autres et envahi à la longue sans plus de défense. […] Songez donc que le premier pas de M. de Fontenelle dans le chemin de la Philosophie a été de se défaire d’une fausse prévention contre les chats ; et il ne tarda point à les chérir. […] chez ce poète dont la hardiesse s’échappe toujours des surprises du faux goût. […] Ses entrées en scène, ses fausses sorties, ses larges sourires à pleines dents, ses regards torves, ses lippes s’avançant pour un baiser, ses colères, ses câlineries, ses grondements, ses gloussements, ses accablements, ses suffocations, ses détentes, je suivais tout cela avec attention.

2022. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

Collombet, le sérieux traducteur de Salvien et de saint Jérôme, a fait preuve de patriotisme et de bon esprit ; il n’a pas eu plus de faux scrupule que n’en eurent en de telles matières ces érudits du bon temps, l’abbé Goujet, Niceron et autres ; les vrais catholiques, à bien des égards, sont les plus tolérants.

2023. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

Le style de Valérie a, comme les scènes mêmes qu’il retrace, quelques fausses couleurs de la mode sentimentale du temps : je ne saurais aimer que le Comte envoie, pour le tombeau de son fils, une belle table de marbre de Carrare, rose (dit-il) comme la jeunesse, et veinée de noir comme la vie.

2024. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

— Oui, tout est vain sans doute, et cette manie, cette inquiétude, cette fausse philosophie, venue malgré toi lorsque tu ne peux plus remuer, est plus vaine encore que tout le reste. » « La terre est éternellement en mouvement.

2025. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

« Mais son cœur lui échappe et s’attache à une fausse image de l’amour.

2026. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

De fausses déclarations, des baux simulés, des traitements trop favorables accordés à presque tous les riches propriétaires, avaient entraîné des inégalités et des erreurs infinies… La vérification de 4 902 paroisses a démontré que le produit des deux vingtièmes, qui est de 54 millions, devrait monter à 81. » Tel domaine seigneurial qui, d’après son revenu avéré, devrait payer 2 400 livres, n’en paye que 1 216.

2027. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

Les vents sont pour l’Italie ; ne faites pas fausse route, et vous surgirez à pleines voiles à votre horizon, l’indépendance !

2028. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXIXe entretien. Tacite (2e partie) » pp. 105-184

» XXXII « Les deux complices, dit Tacite, également frappés, supportaient les opprobres avec une physionomie différente : Marcellus, la menace dans les yeux ; Crispus, un faux sourire sur les lèvres.

2029. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 5-64

Je cherchai à me souvenir juste de l’air qu’Hyeronimo et moi nous avions composé ensemble, et petit à petit, note après note, dans nos soirées d’été du dimanche sous la grotte, et qui imitait tantôt le roucoulement des ramiers au printemps sur les branches, tantôt les gazouillements argentins des gouttes d’eau tombant de la rigole dans le bassin du rocher, tantôt les fines haleines du vent de nuit qui se tamise, en se coupant sur les lames des joncs de la fontaine, aiguisées comme le tranchant de la faux de mon père ; tantôt le bruit des envolées subites des couples de merles bleus, quand ils se lèvent tout à coup du fourré, avec des cris vifs et précipités, moitié peur, moitié joie, pour aller s’abattre sur le nid où ils s’aiment et où ils se taisent pour qu’on ne puisse plus les découvrir sous la feuille.

2030. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 septembre 1886. »

Puis Chopin, le seul vrai poitrinaire : il sonne aujourd’hui funèbrement faux : combien pourtant il a voulu éprouver les languides désespérances qu’il a dites !

2031. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

Autour de tous ceux dont la sincérité ou la force vous humilie, vous resserrez cette fameuse « conspiration du silence » qui vous fait rire si haut et si faux dès qu’on la dénonce au public.

2032. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre deuxième. Le développement de la volonté »

On peut, d’après ce qui précède, apprécier le vrai et le faux dans la classique opposition du désir et de la volition. — Nous sentons le désir se produire en nous, dit-on, et s’imposer à nous ; nous ne nous sentons pas le produire ; au contraire, quand nous voulons, nous sentons que c’est nous-mêmes qui produisons la volition, que c’est nous qui la faisons arriver à l’existence160. — Sans doute, mais c’est que le désir naît, d’une part, de profondeurs étrangères à notre pensée et à notre conscience claire, d’autre part, d’idées objectives qui s’imposent à nous par les lois de l’association ; quand nous voulons, au contraire, c’est l’idée même de notre moi et de notre indépendance subjective qui devient le motif directeur de l’acte : la conscience du moi se voit donc produire elle-même la volition, au moins dans ce qu’elle a de raisonné et d’intelligent.

2033. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1855 » pp. 77-117

» * * * — Le rire est le son de l’esprit : de certains rires sonnent bête comme une pièce sonne faux.

2034. (1857) Cours familier de littérature. III « XVe entretien. Épisode » pp. 161-239

père Dutemps », lui ai-je répondu, il y a du vrai et du faux dans tous ces bruits de nos agitations lointaines qui sont montés jusqu’à ces déserts, comme le bruit du canon de Lyon y monte quand c’est le vent du midi, sans que l’on puisse savoir d’ici si c’est le canon d’alarme ou le canon de fête.

2035. (1902) La métaphysique positiviste. Revue des Deux Mondes

Encore aujourd’hui, pour beaucoup de gens, le positivisme est la négation de l’au-delà, la philosophie de la matière, le faux nom du matérialisme.

2036. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

Bien des gens sont encore charmés des stances de Polieucte : tant il est vrai que nous ne sommes pas si délicats sur les convenances, et que la coutume donne souvent autant de force aux fausses beautés, que la nature en peut donner aux véritables !

2037. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

de ce livre faux et guindé, froid, quoique frénétique, et, quoique immoral, ennuyeux !

2038. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

Pourtant je ne tentai pas de m’en délivrer par un au revoir cordial, gaiement jeté en me retournant ; il eût sonné trop faux et m’eût fait encore plus mal.‌

2039. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre III. De la logique poétique » pp. 125-167

Ici nous apparaît un grand principe qui confirme notre découverte de l’origine de la poésie ; c’est que les premiers hommes des nations païennes ayant eu la simplicité, l’ingénuité de l’enfance, les premières fables ne purent contenir rien de faux, et furent nécessairement, comme elles ont été définies, des récits véritables.

2040. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Ces plaisanteries ont ce faux air de bon sens si puissant en France, et qui y règle trop souvent l’opinion publique. […] Il soudoie des mercenaires étrangers, des Philistins, des archers de Crète, surtout des Cariens venus des montagnes de Mylasa et de Labranda, adorateurs d’un fétiche guerrier, armés de la lance et de la double hache ; véritables épouvantails de guerre avec leur attirail compliqué de couteaux, de piques, de faux, et leur casque ombragé d’un éventail de plumes. […] La forteresse de Rabath-Ammon ayant été prise, il accabla d’insultes le roi vaincu, dont le père l’avait autrefois protégé contre les intrigues de Saül ; parmi les habitants, les uns furent sciés, les autres couchés sous des herses de fer ou des faux de fer qu’on promena sur eux ; d’autres furent jetés dans des fours à briques, tout cela en l’honneur de Iahveh. […] Certes, tout n’est pas faux dans ces réquisitoires passionnés contre les méfaits de la raison démonstrative. […] Il est faux de dire que les livres de M. 

2041. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Aussi leurs blasphèmes sont affreux…, et dans les vengeances leur cruauté est atroce ; quand ils ne peuvent se défaire de leurs ennemis d’une autre façon, ils leur dressent des guet-apens dans les églises, tellement que l’un fendit la tête à son ennemi devant l’autel… Souvent, dans les funérailles, il y a des meurtres à propos des héritages… Ils célèbrent le carnaval avec une inconvenance et une folie extrêmes, pendant plusieurs semaines, et ils y ont institué beaucoup de péchés et d’extravagances, car ce sont des hommes sans conscience qui vivent en des péchés publics et méprisent le mariage… Nous Allemands, et les autres nations simples, nous sommes comme une toile nue ; mais les Italiens sont peints et bariolés de toutes sortes d’opinions fausses, et encore plus disposés à en embrasser de pires… Leurs jeûnes sont plus splendides que nos plus somptueux festins. […] Comme les civilisations antiques de la Grèce et de Rome323, comme les civilisations modernes de la Provence et d’Espagne, comme toutes les civilisations du Midi, elle porte en soi un vice irrémédiable, une mauvaise et fausse conception de l’homme ; les Allemands du seizième siècle, comme les Germains du quatrième siècle, en ont bien jugé ; avec leur simple bon sens, avec leur, honnêteté foncière, ils ont mis le doigt sur la plaie secrète. […] En 1648, après de fausses manœuvres, ils se trouvèrent en danger, placés entre le roi et le Parlement ; là-dessus ils s’assemblèrent plusieurs jours de suite à Windsor pour se confesser devant Dieu et lui demander son aide, et découvrirent que tout le mal venait des conférences qu’ils avaient eu la faiblesse de proposer au roi. « Et dans ce sentier, dit l’adjudant général Allen, le Seigneur nous mena pour nous montrer non-seulement notre péché, mais notre devoir.

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