/ 1792
1649. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Sans avoir le souffle poétique que le xixe  siècle a su ajouter à ces grandes vérités, Système, j’en suis sûr, vit très haut et très loin.

1650. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

Il n’y a pas grand abus d’hypothèse à supposer qu’un fondateur religieux commence par se rattacher aux aphorismes moraux qui sont déjà en circulation de son temps et aux pratiques qui ont de la vogue ; que, plus mûr et entré en pleine possession de sa pensée, il se complaît dans un genre d’éloquence calme, poétique, éloigné de toute controverse, suave et libre comme le sentiment pur ; qu’il s’exalte peu à peu, s’anime devant l’opposition, finit par les polémiques et les fortes invectives.

1651. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre quatrième. Les émotions proprement dites. L’appétit comme origine des émotions et de leurs signes expressifs. »

Lavater, qui attendait un portrait de Herder, se figura que ce profil était celui du philosophe allemand, s’extasia sur les qualités intellectuelles et poétiques de l’homme.

1652. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

Je ne trouvais dans cette indigente nature aucune des couleurs poétiques que la nudité de la terre et l’éraillement de mes roches décrépites me refusaient.

1653. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre V. Des orateurs anciens et Modernes. » pp. 223-293

La plûpart sont pleins de traits d’histoire, de pensées de philosophes, d’imaginations poétiques & fabuleuses.

1654. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

Que penser après cela des données poétiques des anciens, qui le faisaient traîner par quatre chevaux3 ? 

1655. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

Chose curieuse et qui a l’air d’un paradoxe, cette apothéose du succès, cette philosophie du droit de la force tant goûtée de la noble et poétique Allemagne, n’a jamais pu s’acclimater en France, ce pays des plus grands triomphes de la force.

1656. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre III. La Révolution. »

Ils traitent les figures poétiques des Écritures, les audaces de style, les à-peu-près de l’improvisation, les émotions hébraïques et mystiques, les subtilités et les abstractions de la métaphysique alexandrine, avec une précision de juristes et de psychologues. […] Une hauteur d’orgueil qui ne fut surpassée que par celle de son fils, une arrogance qui réduisait ses collègues à l’état de subalternes, un patriotisme romain qui réclamait pour l’Angleterre la tyrannie universelle, une ambition qui prodiguait l’argent et les hommes, communiquait à la nation sa rapacité et sa fougue, et n’apercevait de repos que dans les perspectives lointaines de la gloire éblouissante et de la puissance illimitée, une imagination qui transportait dans le Parlement la véhémence de la déclamation théâtrale, les éclats de l’inspiration saccadée, la témérité des images poétiques, voilà les sources de son éloquence : Hier encore l’Angleterre eût pu se tenir debout contre le monde ; aujourd’hui, « personne si pauvre qui lui rende hommage !

1657. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Bossuet y trouvait plus en relief les deux genres de beautés où il excelle lui-même : la vérité des peintures et la hardiesse de l’expression qui est le privilège de la langue poétique. […] Sa vigueur se modère, sa facilité se règle, cette tête puissante se courbe sous les lois dont Boileau rédigeait le code dans l’Art poétique.

1658. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Voici un nouveau dramaturge du Nord, plus âpre, semble-t-il, plus net, plus sec et d’un tour d’esprit moins poétique et moins mystique que ceux dont je vous ai déjà entretenus. […] Je ne sais si à présent, grâce à une poétique plus large, M.  […] Mais Corneille, lié par la poétique de son temps et par sa vergogne naturelle, n’a pu y songer un seul moment. […] Il lui en a fait de si poétiques descriptions ! […] Relisez son œuvre poétique : vous y verrez que lorsqu’il imite Hugo, Leconte de Lisle ou Henri Heine, c’est un peu de la façon dont Amaryllis se plie à Tityre, ou Lycoris à Varius.

1659. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Cette mort fut douce, poétique, amoureuse et sainte comme sa vie.

1660. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (2e partie) » pp. 177-248

Il inaugurait pompeusement le culte d’État, il caressait M. de Chateaubriand, dont le livre poétique, le Génie du Christianisme, devançait ou servait si bien ses desseins de restauration catholique sous un second Charlemagne, ligué, non de foi, mais de politique, avec la papauté.

1661. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (1re partie) » pp. 337-416

Mille fois plus éloquent que Platon, mille fois plus passionné que Fénelon, aussi poétique que le sophiste grec, aussi religieux que l’archevêque français, né à une époque où le vieux monde féodal mourait, où la France sentait déjà remuer dans ses flancs l’embryon d’une révolution radicale, l’enfant de Genève, J.

1662. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

C’était un homme doué du sentiment religieux et poétique, et qui par ses récits éveillait en moi l’instinct qui l’animait lui-même.

1663. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

S’il était besoin de le démontrer, je renverrais à ce cri de colère où éclate la rancune de Lamartine vieillissant75 : « Tout était organisé contre la résurrection du sentiment moral et poétique ; c’était une ligue universelle des études mathématiques contre la pensée et la poésie.

1664. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 mai 1885. »

Dujardin propose ici une version « en prose poétique ».

1665. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1884 » pp. 286-347

Et quand je disais que le japonisme était en train de révolutionner l’optique des peuples occidentaux, j’affirmais que le japonisme apportait une coloration nouvelle, un système décoratoire nouveau. enfin si l’on veut une fantaisie poétique dans la création de l’objet d’art, qui n’exista jamais dans les bibelots les plus parfaits du moyen âge et de la renaissance.

1666. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1886 » pp. 101-162

L’atelier de la rue de Vaugirard renferme une humanité toute réelle, l’atelier de l’Île des Cygnes est comme le domicile d’une humanité poétique, tirée du Dante, d’Hugo.

1667. (1840) Kant et sa philosophie. Revue des Deux Mondes

Pendant cette première époque, le Nord est païen, guerrier, libre et poétique ; cette première forme de la civilisation germanique commence à s’altérer avec la conquête.

1668. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Michelet est un poète, son mot ne sera rien de plus qu’un lieu commun poétique.

1669. (1739) Vie de Molière

Si Molière avait donné la farce des Fourberies de Scapin pour une vraie comédie, Despréaux aurait eu raison de dire dans son Art poétique : C’est par là que Molière, illustrant ses écrits, Peut-être de son art eût remporté le prix, Si moins ami du peuple en ses doctes peintures, Il n’eût point fait souvent grimacer ses figures, Quitté pour le bouffon l’agréable et le fin, Et sans honte à Térence allié Tabarin.

1670. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Elle se mit à rêver sur cet insondable mystère, se jetant brusquement en des convictions poétiques que d’autres hypothèses non moins vagues renversaient immédiatement. […] je doute de cette ombrelle cruelle de 1871, me souvenant que l’inoffensif parasol a déjà servi à une indignation poétique de 1859 dans le « crapaud » des Châtiments : Puis une femme avec une fleur au corset Vint à lui crever l’œil du bout de son ombrelle. […] Mais il n’y a pas que cette lutte, il y a encore une étude de caractère, celle de la fille de ce parvenu (il était veuf) qui fournit le prétexte d’un récit des plus émouvants et des plus dramatiques, de pages doucement poignantes ou poétiques qui toucheront certainement tous les lecteurs. […] Le fils et la bru ne s’inquiètent guère des fureurs de la brave dame, et leur amour, qui a pris une forêt pour cadre, s’y écoule de la façon la plus poétique et la plus charmante.

1671. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Biré, c’est sur cette complaisance d’Hugo pour les « idées communes » que j’aurais d’abord insisté, comme formant l’un des traits à la fois de son caractère et de son génie poétique. […] ce n’est pas contre les idées romanesques qu’il faut mettre en garde la génération présente… le danger n’est pas là pour le moment… Et puis, je ne comprends pas cette manie qu’on a d’opposer toujours la passion au devoir, — la passion par-ci, le devoir par-là, — comme si l’un était nécessairement le contraire de l’autre… Mais on peut mettre la passion dans le devoir… et non seulement on le peut, mais on le doit… car le devoir tout seul est bien sec, je vous assure… Vous dites qu’il n’est pas poétique ?.. […] les Romains n’étaient pas des anges plus que nous ; mais quand ils avaient des fantaisies d’amour poétiques et dramatiques, ils n’y mêlaient pas leurs femmes, il y avait de belles esclaves grecques élevées pour cela ; quant à leurs femmes, ils les traitaient comme des saintes, et il en résultait qu’elles étaient en effet des saintes. […] Et comme il faut enfin tâcher de tout prévoir, quand on lui disputerait d’avoir ainsi donné à la description poétique, — en la rendant d’énumérative, pittoresque, et de didactique, vraiment lyrique, — une valeur qu’elle ne possédait pas avant lui dans notre langue, il faudrait du moins saluer encore dans l’auteur de Qaïn et de la Mort de l’homme l’un des poètes qui sans doute ont traduit le plus éloquemment ce que le pessimisme a de plus universel, de plus douloureux, et de plus tragique. […] La Bible est formée d’un certain nombre de livres, — historiques, prophétiques, poétiques, etc., — et ces livres, assignés par la tradition à de certains auteurs, sont classés dans un certain ordre : le seul droit que M. 

1672. (1911) Psychologie de l’invention (2e éd.) pp. 1-184

J’imaginai d’écrire pour l’orchestre une suite de scènes auxquelles l’alto solo se trouverait mêlé comme un personnage plus ou moins actif conservant toujours son caractère propre ; je voulus faire de l’alto, en le plaçant au milieu des poétiques souvenirs que m’avaient laissés mes pérégrinations dans les Abruzzes, une sorte de rêveur mélancolique dans le genre du Childe-Harold de Byron. […] Tel est le fait dont la tendance littéraire s’empare et dont elle va faire sortir, par une série d’associations, de combinaisons, d’inventions de détail, une œuvre poétique. […] C’est ce qu’on peut observer dans les premiers recueils poétiques de Victor Hugo.

1673. (1914) Une année de critique

De la poétique de Racine, rien ne pouvait sortir et rien n’est sorti. […] De l’imparfaite poétique de Victor Hugo, tout pouvait naître et tout est né : Hugo, c’est de la matière vivante, c’est la fécondité indéfinie… Nous indignerons-nous ? […] Remy de Gourmont : de l’imparfaite poétique d’un Hugo, rien n’a pu naître et rien ne naquit en effet.

1674. (1730) Des Tropes ou des Diférens sens dans lesquels on peut prendre un même mot dans une même langue. Traité des tropes pp. 1-286

C’est en ce sens que l’on dit, le stile sublime, le stile simple, le stile médiocre, le stile soutenu, le stile grave, le stile comique, le stile historique, le stile poétique, le stile de la conversation, etc. […] On en trouve quelques exemples dans le stile satirique et badin, et quelquefois même dans le stile sublime et poétique : des ruisseaux de larmes coulérent des yeux de tous les habitans. […] Il faut aussi avoir égard aux convenances des diférens stiles, il y a des métaphores qui conviènent au stile poétique, qui seroient déplacées dans le stile oratoire : Boileau a dit : acourez etc.

1675. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

L’Art poétique couronne l’œuvre de la génération classique et ne la précède pas, et la forme même du vers, l’obéissance aux lois du poème didactique, empêchent l’esprit critique de s’y manifester librement. […] * * * Rien ne nous empêche cependant d’attendre, d’espérer, d’imaginer une puissante critique philosophique et poétique retrouvant un mouvement de ce genre. […] Le Génie du Christianisme a donné au romantisme une partie de son atmosphère poétique et historique, mais il a donné aussi à la littérature son atmosphère critique, sa capacité de large, belle, souple et vivante critique.

1676. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

Dans maint cas douteux, pour cette branche de l’épopée, il a mis l’invention trop absolument du côté de ses troubadours, qui ont déjà pour eux la palme lyrique ; et, comme l’a dit Guillaume Schlegel, « il veut que la France méridionale, féconde en créations poétiques, ait toujours donné à ses voisins et qu’elle n’en ait jamais rien reçu. » Mais que de sagesse d’ailleurs !

1677. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre II. La vie de salon. »

Lauwrence, Qu’en dit l’abbé   Watteau, le premier en date et en talent, transpose ces mœurs, et les peint d’autant mieux qu’il les rend plus poétiques. — Relire entre autres : Marianne, par Marivaux ; la Vérité dans le vin, par Collé ; le Coin du feu, la Nuit et le Moment, par Crébillon fils, et, dans la Correspondance inédite de Mme du Deffand, deux lettres charmantes, l’une de l’abbé Barthélemy, l’autre du chevalier de Boufflers (I, 258, 341).

1678. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVe entretien » pp. 317-396

La grandeur d’un peuple, c’est de se personnifier tout entier dans quelques colossales mémoires, en sorte que, quand on nomme ce peuple, sur-le-champ le personnage national se présente à la pensée et dit : « C’est moi. » Aussi rendez-vous bien compte de vos impressions quand vous lisez l’histoire universelle ; toute la scène du monde est remplie pour vous par une centaine d’acteurs immortels, héroïques, politiques, poétiques ou littéraires, qui figurent à eux seuls l’humanité.

1679. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

Je l’ai célébrée dans mes premiers vers par une épître familière insérée sous le titre de Méditation poétique, et adressée au colonel de Maistre, propriétaire de cet ermitage.

1680. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIIe entretien. Littérature politique. Machiavel (2e partie) » pp. 321-414

Deux princesses saxonnes, deux sœurs, l’une duchesse douairière, l’autre grande-duchesse régnante, rappelaient par leurs grâces et par leur amour des lettres ces princesses italiennes de la maison d’Este à Ferrare, parmi lesquelles le Tasse et l’Arioste trouvaient des modèles poétiques ou des protectrices adorées.

1681. (1922) Enquête : Le XIXe siècle est-il un grand siècle ? (Les Marges)

Baudelaire, sur les bancs du collège, répondait à son professeur qui attaquait devant lui le romantisme : « Le romantisme est la dernière création poétique, donc la seule belle. » Voilà l’évidence et si notre tradition à nous, commence à Baudelaire, c’est parce que la poésie que son art a créée est la seule actuelle, la seule qui vive encore, tandis que Victor Hugo et Racine ont rejoint Homère dans les Musées que sont les classes.

1682. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

Art poétique, ch. 

1683. (1890) L’avenir de la science « XVII » p. 357

Nul intérêt pratique, nulle institution officielle n’étaient nécessaires pour exciter le zèle de la recherche ou la production poétique.

1684. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VII, seconde guerre médique. »

Sophocle et Euripide, transportés peut-être dans les plaines de Babylone, et si l’esprit poétique avait survécu en eux à la mort de la patrie grecque, auraient suspendu leur lyre aux saules de l’Euphrate, comme les psalmistes de la captivité hébraïque.

1685. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1864 » pp. 173-235

Il a ajouté que dans l’Asie Mineure, pays de hautes montagnes et de plaines inondées une partie de l’année, il existe un brouillard opalisé, dans lequel les couleurs baignent et scintillent comme dans une évaporation d’eau de perle, leur donnant l’harmonie la plus chatoyante… Bref, une poétique palette des Mille et Un Jours.

1686. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

Pour cela, il irait s’établir, toute une année, dans la ville poétique, et Venise lui fournit le thème de paroles toujours peintes, de paroles toujours originales, mais un peu lentes à se formuler.

1687. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1874 » pp. 106-168

Elles flottent et sourient en votre pensée rêveuse, ces effigies vagues et noyées dans la demi-teinte, ainsi que des types poétiques, des incarnations idéales de la femme du Directoire, de l’Empire, de la Restauration.

1688. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre II. Les génies »

Le rieur est fin, acéré, poli, délicat, presque galant, et courrait même le risque quelquefois de se rapetisser dans toutes ces coquetteries s’il n’avait le profond sens poétique de la renaissance.

1689. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Et pourtant je ne sais quel accent plus grave, plus sincère, plus ému, nous avertit chez ces poètes, les deux derniers surtout, que l’idée de progrès est plus près de leur cœur : celle de décadence n’est guère pour eux qu’un thème obligé, un lieu-commun poétique.

1690. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IX : Insuffisance des documents géologiques »

Pour ma part, d’après une expression poétique de Lyell, je regarde les archives naturelles de la géologie comme des mémoires tenus avec négligence pour servir à l’histoire du monde et rédigés dans un idiome altéré et presque perdu.

1691. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

On s’est plu à envisager le seizième siècle comme une époque exceptionnelle ; une illusion poétique lui a donné une grandeur presque unique ; on en a voulu faire une anomalie dans la suite des âges. […] Peu de temps après, nous veismes les larmes decouller de ses œilz, grosses comme œufz d’austruche13. » Sans doute, ce sérieux n’est qu’un sérieux d’imagination, un sérieux poétique, ou si l’on veut intellectuel, qui ne change en rien le caractère du livre, et qui fut pour peu dans son succès. […] Dans le germe caché et fécond contemplé ou conçu par le génie poétique, celui-ci saisit l’individualité riche, puissante, variée, toujours concrète, des êtres qu’il met en scène. […] Telle n’est pas, en général, la méthode de La Bruyère, quoique les facultés poétiques ne lui manquent pas, comme nous le reconnaîtrons plus tard. […] Il est sensible, poétique, un peu romanesque ; il s’attendrit aisément, et son émotion est sincère.

1692. (1837) Lettres sur les écrivains français pp. -167

Ceux des Français qui contestent la valeur poétique de cet écrivain, ont tort à mon avis ; qu’il soit dépassé aujourd’hui, c’est possible ; mais il est ingrat d’oublier que M.  […] Aussi après un léger assoupissement que le charitable Morphée lui envoya vers l’aube, comme pour lui mieux faire sentir le prix du sommeil qu’il n’avait pas goûté, l’infortuné voyageur se mit-il à crier dans la chambre, l’improvisation suivante, que le voisinage poétique de M. 

1693. (1891) Esquisses contemporaines

Il y revient en plusieurs endroits et sait nous les rendre dans un style aussi pénétrant que poétique, où l’émotion déborde les mots comme un fleuve grossi ses berges inondées. […] La mort, ni l’agonie, ne sont objets de spéculations intellectuelles ou d’enthousiasmes poétiques. […] Bourget manque d’un univers poétique, d’un monde où l’âme se joue en liberté.

1694. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

Il sait les deux langues comme pas un ; il a vécu ou voyagé dans les deux pays ; il n’est pas de document historique ou littéraire, d’œuvre plastique ou poétique qu’il ne connaisse et ne juge avec la compétence exercée d’un critique et l’émotion primesautière d’un artiste. […] Les plus hautes figures poétiques, comme les plus hautes formes vivantes, n’arrivent à la lumière que par grâce, et, pour ainsi dire, par accident. […] Il n’insiste pas sur le détail, il l’indique à peine en passant, il évite d’approfondir ; il suit la grande ligne poétique de la passion qu’il plaide ou de la situation qu’il décrit, sans s’arrêter sur les irrégularités qui en rompraient l’harmonie. […] Et pourtant, il imaginait au-delà ; il avait vu la Grèce, il devinait la nudité idéale, la beauté poétique.

1695. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

(Aristote consacre même aux reconnaissances le plus long chapitre de sa Poétique. […] Et c’est pourquoi il se cache d’elle, et elle s’aperçoit bien qu’il a un secret ; elle le voit causer avec Néarque dans les coins ; il sort mystérieusement, sans vouloir lui dire où il va… bref, elle redoute quelque chose, sans savoir quoi… Ce malaise, cette inquiétude, un dramaturge d’aujourd’hui nous la rendrait sensible par une foule de petits détails : Corneille l’exprime, selon la poétique de son temps, par « le songe de Pauline ». […] On nous annonce Monsieur Scapin : mais vous verrez que ce sera quelque fantaisie poétique plus divertissante à lire qu’à entendre, et que les acteurs nous mangeront la moitié des rimes. […] Richepin est éminemment poétique.

1696. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Cependant, encore qu’il n’ait laissé que cinq cents bons vers, le nombre, non plus que le temps, ne faisant rien à l’affaire, Malherbe est un si grand poète dans les cinq cents bons vers qu’il a laissés, si grand poète, qu’un peu plus de commentaire sur son œuvre poétique, que, du reste, M. de Broglie sent si bien, ne m’eût pas été désagréable. […] Je ne crois pas qu’il existe une plus belle et plus forte traduction ou transposition poétique du « maman » ! […] Il était l’homme qui a dit que toutes les œuvres poétiques sont des ouvrages de circonstances, et toutes les siennes l’étaient, à bien peu près, peut-être absolument toutes. […] Elle ne semble avoir rien ni de romanesque, ni de poétique.

1697. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

Aller à Sens afin de montrer à quelques écoliers de Bourgogne les beautés de l’Art poétique ?

1698. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

Mme Sylvain (Iphigénie) est véritablement poétique ; et les attitudes et les beaux cris de Mme Tessandier ont fait sensation dans le rôle de Clytemnestre. […] Olivaint, d’abord, a eu là une jolie idée poétique ; car c’est bien ainsi que l’on comprend que deux enfants de quinze ans balbutient le langage d’amour en 1620 ; et, ensuite, il a très agréablement attrapé la note de la pastorale du commencement du dix-septième siècle. […] Il y a des vers vigoureux et solides, point très éclatants, mais d’une bonne et saine langue, et qui, s’ils ne sont pas proprement très poétiques, sont très oratoires. […] Elle n’a pas de noblesse ; mais elle a une dignité touchante ; elle n’a pas de poésie, mais elle indique au moins les parties poétiques du rôle ; elle ne sait pas faire chanter le vers, mais elle le déploie largement et amplement comme une grande voile qui se gonfle au vent ou qui claque. […] Ce n’est que depuis quelques années que les acteurs ont enfin hasardé d’être ce qu’ils doivent être, des peintures vivantes. » — On voit bien maintenant quel était l’idéal même de Voltaire en matière d’art théâtral : une déclamation poétique avec une mimique approchant de celle qui est en usage dans nos mélodrames.

1699. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Car Pierre Corneille, de plus en plus dévot avec l’âge, est devenu grand traducteur d’hymnes et de psaumes ; et c’est dans ces exercices que son génie fatigué cherche encore l’illusion de la production poétique, en même temps que son âme meurtrie y trouve un religieux réconfort. […] ou de ce cocasse échantillon de « désordre » poétique, lorsque Amidor se souvient de sa première rencontre avec sa belle : Le corail de ses yeux et l’azur de sa bouche, L’or bruni de son teint, l’argent de ses cheveux, L’ébène de ses dents digne de mille vœux… La grandeur de ses pieds et sa petite taille Livrèrent à mon cœur une horrible bataille ! […] Remarquez que Louis XI a été écrit en 1827 ou 1828, que Marino Faliero a. été joué en 1829, c’est-à-dire la même année que Hernani, et que Louis XI et Marino Faliero sont conçus suivant une poétique aussi libre que les drames même de Victor Hugo. […] Il s’en est allé, je crois, à Paris, et cette existence « poétique » dont il rêvait a consisté pour lui à se griser, à perdre son argent au jeu ou chez les mauvaises femmes et, finalement, à mendier sur les routes et à crever de faiM. 

1700. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 3665-7857

C’est ainsi que les fables de la Fontaine (cet auteur dont Boileau n’a pas dit un mot dans son Art poétique) sont semées de traits aussi touchans que délicats, de ces traits qui échappent naturellement à l’auteur sans qu’il s’en apperçoive & qu’on s’y attende, & qui sont moins des émanations du sujet, que des saillies de caractere & des élancemens de génie. […] Ceux qui se laissent persuader par un brillant enthousiasme & par une ingénieuse déclamation, goûteront la préface poétique de l’Homere anglois de Pope. […] Ce charme & cet intérêt prennent leur source non-seulement dans le tour naturel & facile des vers, dans le coloris de l’imagination, dans le contraste & la vérité des caracteres, dans la justesse & la précision du dialogue, dans la variété, la force, & la rapidité des peintures, en un mot dans le génie poétique, don précieux & rare, auquel tout l’excellent esprit de la Mothe n’a jamais pû suppléer ; mais encore dans la naïveté du récit & du style, caractere dominant du génie de Lafontaine. […] Nous avons profité de quelques-unes de ses réflexions sur la fable, & nous renvoyons encore le lecteur à son discours, comme à un morceau de poétique excellent à beaucoup d’égards.

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