Ce sentiment instinctif et universel qui fait que pour tout mortel, même malheureux, la vie peut se dire douce et chère, qui fait aimer, regretter à tous les êtres, une fois nés, la douce lumière du jour, il l’appelle une manie. […] Je voudrais n’être pas né, ou être à jamais oublié. […] Ce sentiment de volupté et d’abandon suprême, qui, chez les anciens, chez Homère, chez les Patriarches, chez la bonne Cérès ou chez Booz, comme chez le bon Jupiter aux bras de Junon, est si simple, si facile, qui coûte si peu à la nature, qui est si doux, qui fait naître des fleurs à l’entour, et qui voudrait dans sa propre félicité féconder la terre entière, se raffine avec les âges ; il devient plus senti, plus délicat, plus sophistiqué aussi, chez les épicuriens des siècles plus avancés. […] Ma vie n’est qu’un accident ; je sens que je ne devais pas naître.
Rousseau parut : le jour où il se découvrit tout entier à lui-même, il révéla du même coup à son siècle l’écrivain le plus fait pour exprimer avec nouveauté, avec vigueur, avec une logique mêlée de flamme, les idées confuses qui s’agitaient et qui voulaient naître. […] qu’a-t-elle pleuré en quittant le foyer où elle est née, où elle a été nourrie ? […] ce qu’on appelle un enfant bien né ; il a un penchant au vice et à des vices bas ; il a des convoitises honteuses et cachées qui ne sentent pas le gentilhomme ; il a de ces longues timidités qui se retournent tout d’un coup en effronteries de polisson et de vaurien comme il s’appelle ; en un mot, il n’a pas cette sauvegarde de l’honneur, que M. de Chateaubriand eut, dès l’enfance, comme une sentinelle vigilante à côté de ses défauts. […] Je distingue chez lui deux sortes d’altération dans la langue : une qui tient seulement à ce qu’il est de provinceb, et qu’il parle un français né hors de France.
Le marquis de Vauvenargues, né en 1715 et mort en 1747, issu d’une noble famille de Provence, entra de bonne heure au service et devint capitaine dans le régiment du Roi. […] Dès qu’il le connaîtra mieux, le mot de génie va se mêler à tout moment et revenir sous sa plume à côté du nom de Vauvenargues, et c’est le seul terme en effet qui rende avec vérité l’idée qu’imprime ce talent simple, élevé, original, né de lui-même, et si peu atteint des influences d’alentour. […] » Il aime à parler, en toute rencontre, de l’homme bien né, de la beauté du naturel, qui nous porte au bien. […] Ceux qui sont nés éloquents, dit encore Vauvenargues, parlent quelquefois avec tant de clarté et de brièveté des grandes choses, que la plupart des hommes n’imaginent pas qu’ils en parlent avec profondeur.
Ainsi, il parut né pour tout ce qu’il eut à faire comme roi ; il fut à la hauteur de sa tâche. « La force des États, pensait-il, consiste dans les grands hommes que la nature y fait naître à propos. » Il voulut être et il fut un de ces grands hommes ; il remplit dignement sa fonction de héros. […] « Je compte pour un des plus grands bonheurs de ma vie d’être né contemporain d’un homme d’un mérite aussi distingué que le vôtre… » Ce sentiment éclate dans toute cette phase de la correspondance. […] … Il se dira encore : « Quiconque n’est pas poète à vingt ans ne le deviendra de sa vie… Tout homme qui n’est pas né français, ou habitué depuis longtemps à Paris, ne saurait posséder la langue au degré de perfection si nécessaire pour faire de bons vers ou de la prose élégante. » Il se comparera aux vignes « qui se ressentent toujours du terroir où elles sont plantées ».
Étienne Pasquier, né à Paris en 1529, d’une famille honorablement établie, mais qu’il devait le premier illustrer, se trouva, par la date de sa naissance, en mesure de profiter de toute la science et de l’érudition qui sont propres au xvie siècle. Quand il naquit, le premier défrichement était fait, et il ne s’agissait plus que de moissonner et de recueillir. […] Au retour, il débuta comme avocat au barreau de Paris (1549), et en même temps, pour occuper ses loisirs, il se livra à la poésie, à la composition littéraire, caractère qui distingue sa génération d’avocats, et Pasquier entre tous les autres : « Lorsque j’arrivai au Palais, dit-il, ne trouvant qui me mît en besogne, et n’étant né pour être oiseux, je me mis à faire des livres, mais livres conformes à mon âge et à l’honnête liberté que je portois sur le front : ce furent des Dialogues de l’amour… » Les dialogues galants et amoureux, les sonnets qu’Étienne Pasquier publia dans ces années de jeunesse, et auxquels il se reportait avec complaisance et sourire en vieillissant, ne prouvent rien autre chose que de l’esprit, de la facilité, de la subtilité ingénieuse, et on n’y trouve d’ailleurs aucun trait original qui puisse assigner rang à leur auteur parmi les vrais poètes. Mais ce qui est remarquable et ce qui constitue en quelque sorte la partie judicieuse de ces compositions badines, c’est cette pensée qui lui était commune avec les meilleurs et les plus vaillants esprits de cette seconde génération du xvie siècle, qu’il fallait, étant né Français, écrire en français.
Armand Carrel, né à Rouen, le 8 mai 1800, d’une famille de marchands, apporta en naissant l’instinct militaire et je ne sais quoi du gentilhomme. […] Un jour le général d’Albignac, commandant de l’École, fit sortir des rangs Carrel sur lequel il avait reçu plus d’un rapport défavorable, et lui dit, ou à peu près : Monsieur Carrel, on connaît votre conduite et vos sentiments ; c’est dommage que vous ne soyez pas né vingt-cinq ans plus tôt, vous auriez pu jouer un grand rôle dans la Révolution. […] Cette aune, reprochée ainsi publiquement, lui resta longtemps sur le cœur ; pourtant la phrase de début du général d’Albignac : « C’est dommage que vous ne soyez pas né vingt-cinq ans plus tôt », réparait un peu l’impression en lui ; l’à-propos de sa propre réponse était fait aussi pour le réconcilier avec ce souvenir, et il aimait plus tard à raconter l’anecdote à ses heures de bonne humeur et de gaieté, en imitant le ton de voix et les gestes du général11. […] Une fenêtre légèrement entrouverte près de son lit a montré qu’après avoir éteint sa lumière et s’être plongé dans l’obscurité, il avait fait effort pour apercevoir un peu du jour qui naissait et qui ne devait plus éclairer que son cadavre… Enfin, il a senti qu’il était seul, bien seul, abandonné de tout sur la terre ; qu’il n’y avait plus autour de lui que les fantômes créés par ses derniers souvenirs.
Au cas présent, et pour expliquer combien notre oreille est dissemblable de celle de nos plus proches aînés, notons que la plupart des romantiques et des parnassiens fréquentaient surtout comme art voisin, la peinture ; et la peinture où l’impressionnisme naissait à peine (Turner leur était inconnu) les gardait accoutumés aux contours stricts, et délimités, découpés, presque sculptés. […] L’alexandrin est donc un vers qui, en une forme bien différente de celle qu’il affectait antérieurement, comptait, quand naquit le vers libre, un peu plus de soixante ans d’existence. […] En ce temps de centralisation, quand les derniers rameaux de pouvoir féodal qui gênaient les belles allées du pouvoir royal furent ébranchés, en ce temps de Le Nôtre, il fallut, pour toutes choses, un jardinier aux plans rectilignes ; on ne s’occupa nullement, pour donner l’apparat et la noblesse au vers français (cette noblesse, chape de plomb, manteau lourd et sans forme aux épaules de la Muse) que la règle fût juste ; on la rechercha suffisante mais surtout uniforme et majestueuse ; il y eut une flexion sur un jarret pendant un pas majestueux : l’hémistiche ; et cette règle de Boileau est antipoétique, parce qu’elle ne naît pas des besoins du poème, qu’elle découle, fausse, d’une visée sociale. […] Ce fut du contact de ses idées et d’idées proches d’écrivains plus jeunes que naquit le mot symbolisme.
Planche, sec comme son nom, adorait la sécheresse de Mérimée qui lui rappelait la sienne ; car Mérimée, né de Stendhal, était un Stendhal maigre. […] Il n’était pas plus né pour l’amour de la femme qu’il n’était né pour l’amour de Dieu (c’était un athée), qu’il n’était né pour l’enthousiasme, pour tout ce qui demandait de l’élan, de la chaleur, de l’abondance de cœur, de la tendresse, de la rêverie… L’homme est en lui, allez !
Vous rencontrerez des Parisiens qui se plaindront de Paris, mais vous n’en trouverez pas qui se plaindront d’en être, ou mieux d’y être, car la plupart des habitants de Paris sont nés en province. […] Lorsqu’un jeune écrivain, né en quelque coin de province, arrive à Paris, son premier soin est de décrier son petit pays, pour bien montrer qu’il n’en est plus ; il renie ces humbles braves gens parmi lesquels il a vécu ; il se moque d’eux qui l’ont servi ou supporté ; il croit, par cette ingratitude, augmenter ses chances de naturalisation. […] Elles flattent un goût de notre époque, ces affiches, elles sont nées d’une observation psychologique, et le succès de leur propagande est dû à un reste de romantisme encore vivant dans les masses. […] Certaines gens naissent et grandissent avec une cervelle si pauvre, qu’ils ne peuvent vivre sans tapage et bavardage, sans poussière à respirer, sans un théâtre ou un salon pour passer la soirée.
Les voyages615 se multipliaient en Italie, en Grèce, dans le Levant ; et les relations des voyageurs rendaient un intérêt aux œuvres de la poésie antique, en faisant connaître tous ces pays où étaient nés les chefs-d’œuvre qui en étaient le cadre ou la matière, en décrivant les ruines de ces monuments dont l’antiquité avait parlé, ou dans lesquels elle s’était survécu. […] Il avait un avantage sur tous ceux qui étudiaient ou imitaient l’antiquité : il était né à Constantinople, et par sa mère, une Santi l’Homaca, il était demi-Grec. […] Né en 1762 à Constantinople, Chénier fut amené tout jeune en France (1765) ; il se lia au collège de Navarre avec les frères Trudaine.
Ici Sainte-Beuve revient à son ambiguïté du début, et dit tout d’une haleine : « Chaque ouvrage d’un auteur, vu, examiné de la sorte, à son point, après qu’on l’a replacé dans son cadre, et entouré de toutes les circonstances qui font vu naître, acquiert tout son sens, son sens historique, son sens littéraire… Être en histoire littéraire et en critique, un disciple de Bacon, me paraît le besoin du temps et une excellente condition première pour juger et goûter ensuite avec plus de sûreté. » Sainte-Beuve développe plus loin l’idée exprimée dans ce second membre de phrase, et conseille, pour apprécier un auteur, de le comparer à ses antagonistes et à ses disciples, de distinguer les diverses manières de son talent, de déterminer ses opinions sur certains sujets d’ordre général, enfin de résumer sa nature morale dans une formule exacte et concise. […] Partant du principe que les choses morales ont, comme les choses physiques, des dépendances et des conditions, il esquisse la vie de chacun des écrivains qu’il veut étudier, montre le pays où il est né, le lieu où il a vécu, puis, analysant son œuvre et en dégageant les principaux caractères, il exprime fame qu’ils révèlent, en une formule à plusieurs termes. […] Gabriel Sarrazin, écrivain et journaliste né en 1853, fut un des collaborateurs de la Nouvelle Revue.
C’est de cette double numération, sériée régulièrement ou irrégulièrement par la rime et ses rappels, que doit naître le chant du poème, implication première du rythme. […] Et nous répondrons incontinent que, dans cet ordre d’idées, il n’est pas non plus indispensable pour vivre, boire, manger, dormir, et, par surcroît, se distraire et voyager, au siècle d’Edison, de Pasteur, de Tolstoï, de Nietzsche, et de tant d’autres génies, de savoir comment on naît et comment on meurt, pourquoi l’on souffre et pourquoi l’on espère, mais que nous ne sommes pas fâchés d’être un peu plus fixés à ce sujet chaque jour, et que c’est peut-être là ce qui constitue notre supériorité sur le Malgache ou le Huron rencontré sur nos boulevards, ou sur le chimpanzé Consul — cependant de mœurs fort civiles, dit-on. […] Que le rythme intervienne, et l’œuvre est née.
II Nés, d’appellation, en Angleterre, les Bas-bleus sont de tous les pays. Pour qu’il en naisse un quelque part, il ne faut qu’une plume, une écritoire et un faux orgueil. […] Elles l’en récompensèrent, en la prenant pour une preuve éclatante des idées qu’elle avait exprimées ou fait naître, et en disant aux hommes, à qui elles montrèrent ce qu’elles croyaient des chefs-d’œuvre, les pauvres diablesses : « Vous voyez bien que nous valons autant que vous !
Berlin avait vu naître une secte qui s’appela plus tard la secte d’Avignon et qui fut suivie de la grande société des « Éclaireurs » (Aufklærer), laquelle se répandit dans l’Allemagne entière et jusque sur les pics de la Suisse. […] Doué d’une âme qui fut son génie, on aurait pu dire de lui le mot charmant du vieux Mirabeau : « Qu’il était fait de la rognure des anges. » Mais, puisque des anges sont tombés, une telle rognure ne garantit pas les hommes ; et Saint-Martin, si chrétiennement né, se perdit. […] Caro, qu’il faut lire, si l’on veut connaître cet hérésiarque au petit pied, qui se croyait et se disait « né avec dispense », et qui peut-être, hélas !
« La plante humaine y naît plus forte qu’ailleurs. » On y aime véhémentement, et on y tue par amour cordialement. […] Il est né au bruit des armes ; il a eu pour premier entretien de sa pensée la conquête du monde. […] Les classes, en divisant une nation, développent la solidarité de chacune dans son sein, et l’empêchent de naître dans la nation tout entière. […] Les chefs sont nés parmi les nations de ce besoin-là, ou du moins ce besoin a très puissamment aidé les chefs à naître et à faire accepter leur domination, parfaitement illégitime. […] Ainsi naissent les psychologues.
Elle est née une lyre harmonieuse, mais une lyre brisée : qu’est-ce donc qui la pourrait briser davantage ? […] Qu’on lise la pièce qui porte ce titre, et celle encore qu’elle a adressée, après la guerre civile, à Adolphe Nourrit à Lyon, à ce généreux talent dont la voix, née du cœur aussi, répond si bien à la sienne : cela s’élève tout à fait au-dessus des inspirations personnelles de l’élégie.
Grâce à cet anachronisme qui eût glacé tant d’autres, les Poésies d’André Chénier, nées comme à part de leur siècle, ne pouvaient tomber plus à propos, et elles se firent bien vite des admirateurs d’élite qui les poussèrent au premier rang dans l’estime. […] Hors de là, vers les rives, aux endroits plus calmes et sur une surface assez immobile ou animée de contre-courants peu rapides, il y avait des raisonneurs qui expliquaient aux autres le spectacle, et pourquoi cela était ainsi de toute nécessité, et pourquoi cela devait être toujours ; il y avait, rangés derrière deux ou trois grands noms, sur les traces de Lamartine, harmonieusement ravi en ses tendresses sublimes, sur les pas de Victor Hugo, de plus en plus occupé à ses chauds horizons, et à portée de voix de quelques autres, il y avait des peintres de vieilles ruines, qui étudiaient les débris gothiques le long des bords, des psychologues qui se miraient au sein des eaux, des nacelles de rêveurs dont le front regardait perpétuellement le ciel, des essais de colonie littéraire et d’abri poétique autour d’agréables îles et dans les Délos nées d’hier.
En Allemagne, Goethe meurt le dernier de son siècle, après avoir vu passer presque tous les poètes nés avec lui ou de lui ; une ère différente, une ère de politique et de pratique sociale s’inaugure, et elle cherche encore ses hommes. […] Né à Édimbourg, le 15 août 1771, d’un père, homme de loi (writer of the signet), et d’une mère un peu poëte, à laquelle surtout il paraît avoir dû ses brillantes qualités, qualités naturelles, le jeune Scott fut destiné de bonne heure à l’étude du droit et au barreau.
Ce discours, prononcé le 29 août dernier, à la séance d’inauguration solennelle d’une Société historique locale et accueilli avec une sympathie si marquée par toute la population d’un département et d’une province, est de nature à faire naître plusieurs réflexions. […] Une idée utile et toute pratique, une chaleureuse et patriotique étincelle, c’est ce que nous nous sommes plu à relever dans un discours, spirituel assurément, mais qui n’aurait pas été remarqué à ce degré s’il n’avait été l’expression de convictions senties, et s’il n’était venu à la suite et en compagnie d’actions nées du cœur.
Il faut, pour bien écrire, des habitudes autant que des réflexions ; et si les idées naissent dans la solitude, les formes propres à ces idées, les images dont on se sert pour les rendre sensibles, appartiennent presque toujours aux souvenirs de l’éducation, et de la société avec laquelle on a vécu. […] Les guerres religieuses avaient fait naître un esprit de parti qui change plusieurs histoires en plaidoyers théologiques ; l’esprit de corps, différent encore de l’esprit de parti, mais non moins éloigné de la vérité, dénature également les faits.
Les Fedeli Nous avons dit qu’Isabelle Andreini laissait un fils né en 1579, ayant vingt-cinq ans, par conséquent, à la mort de sa mère. […] Elle devait être bien jeune au commencement du siècle, si Riccoboni, né vers 1674, put encore la connaître.
Des esprits nés sans doute pour créer de belles œuvres sont incités par contagion à produire ces articles méprisables, mais d’une bonne vente courante. […] Le « gensdelettres » est né de nos jours.
La lie se compose de ceux qui, nés avec un instinct de bassesse, sont toujours courtisans par nécessité, le sont en tout, toujours, à tout prix. […] La Fontaine était courtisan quand il disait d’un bâtard né d’un double adultère : Le fils de Jupiter devait, par sa naissance, Avoir un autre esprit et d’autres dons des cieux Que les enfants des autres dieux.
Alembert,[Jean le Rond d’] Secrétaire perpétuel de l’Académie Françoise, Membre de celle des Sciences, de la Société Royale de Londres, de l’Académie de Berlin, de Russie, de Suede, &c. né à Paris en 1717. […] d’Alembert n’auroit pas eu la douleur d’avoir contribué, par un bel Ouvrage, à faire naître de fausses espérances.
Ce poëte naquit à Cordoue en Espagne, l’an 39 de Jésus-Christ. […] Perse mourut à l’âge de trente ans : il étoit né à Volterre en Toscane.
Pierre Ronsard, né dans le Vendomois en 1525, passa pour le plus grand poëte de son temps. […] Il étoit né la même année de la défaite de François I, devant Pavie ; comme si le ciel, disoit-il, avoit voulu par-là dédommager la France de ses pertes.
Ce sont ces excès qui ont donné tant d’avantages aux ennemis des sciences, et qui ont fait naître les éloquentes déclamations de Rousseau et de ses sectateurs. […] Mais quand des congrégations de savants se formèrent ; quand les philosophes, cherchant la réputation et non la nature, voulurent parler des œuvres de Dieu, sans les avoir aimées, l’incrédulité naquit avec l’amour-propre, et la science ne fut plus que le petit instrument d’une petite renommée.
C’est une operation que l’oeil apprend à faire par le secours de l’art, et qui n’est pas accompagnée d’aucun sentiment agréable, comme est celui qui naît de l’application des yeux sur les objets que nous offrent des tableaux. […] Tous les orateurs et tous les comédiens que nous avons vû réussir éminemment dans leurs professions, étoient des personnes nées avec la sensibilité dont je viens de parler.
Parce que la sociologie est née des grandes doctrines philosophiques, elle a gardé l’habitude de s’appuyer sur quelque système dont elle se trouve ainsi solidaire. […] Sans doute, quand une science est en train de naître, on est bien obligé, pour la faire, de se référer aux seuls modèles qui existent, c’est-à-dire aux sciences déjà formées.
Dix mille Adams, ni plus ni moins, nés où ? […] Ces messieurs étaient nus, sans vivres, sans logements, sans ménage, sans femmes (étaient-elles nées, et comment ?)
Catholique d’intelligence, de sentiment, et nous dirons même de préoccupation, voyant tout à travers le catholicisme parce que le catholicisme c’est tout, même pour ses ennemis, depuis qu’il est né dans le monde et dans l’histoire, écrivain de discussion et d’apologie, Nicolas a dévoué sa pensée à l’avancement incessant, mais combattu, de l’Éternelle Vérité. […] Ils avaient reconnu, avec le tact des hommes qui savent la place que tient la sensibilité dans les décisions de l’esprit et de la conscience, qu’il naissait à l’Église un bon serviteur de plus, un missionnaire de parole écrite, dont le talent agirait sur les âmes peut-être avec une force plus efficace et plus pratique qu’un talent beaucoup plus élevé, car il serait toujours à la hauteur de cœur, à ce niveau où, qui que nous soyons, forts ou faibles, il faut un jour se rencontrer.
Nous ne sommes pas maîtres des pensées qui naissent en nous. […] Elles ne naissent pas de notre intelligence.
L’esprit nouveau était né ; et les entrailles de l’humanité ressentent encore la douleur de cet enfantement. […] Des centaines de millions d’hommes, d’êtres vivant, sentant et pensant, nés sur une terre identique à la nôtre, possédant les mêmes désirs que nous, pétris de la même substance, participant à la même vie, riches des mêmes énergies, se crurent, par la plus surprenante des aberrations, des condamnés à une peine irrémissible, la peine de vivre.
Nous n’avons vu cette expression à personne ; le croire Français, né dans ce siècle, eût été difficile. […] Il ne semblait pas né dans nos pâles climats, mais au bord de l’Indus ou du Gange, tant il était basané et fauve de ton. […] Élias aurait dû naître en 1460. […] Il était bien le poète d’Éloa, cette vierge née d’une larme du Christ et descendant par pitié consoler Lucifer. […] Né en 1796, il entra dans l’art par la porte de l’industrie.
Cette haine, qui se forme de mille détails honteux, n’est pas moins implacable que la haine qui naît d’une plus noble cause. […] Du travail naît la santé ; de la santé la paix, source de toute joie. […] M. de Bonald commence par poser en principe que l’homme naît ignorant et faible, mais capable d’apprendre ; « bien différent de la brute, l’homme naît, dit-il, perfectible, et l’animal naît parfait ». […] Quand nous n’aurions fait naître qu’un doute sur cette importante question littéraire ? […] À la première apparition de cette race puissante, les Romains déclarèrent qu’elle était née pour la ruine des villes et la destruction du genre humain.
Paul Fort est né malin, et c’est sa seule vertu. […] J’avais dix-huit ans, je naissais à la vie des idées. […] Quant à ses poèmes, ils ne sont pas des fruits spontanés, harmonieux et naturellement nés de son tempérament. […] Cependant, Joos ne tarde pas à s’apercevoir que Neele n’est plus la même avec lui ; elle lui semble glacée et lointaine, et des soupçons naissent dans son cœur. […] D’où naîtra-t-il l’enfant divin, l’homme nouveau, d’où sortiront les futures races ?
Je suis née sur la terre d’Allemagne ; mon étoile est au ciel de l’Italie. […] Il naît sous la constellation des Gémeaux. […] Elle ne naquit point belle et en pâtit. […] Ne serait-il pas né, comme le dira Gall, orateur populaire ? […] Il est issu de ce peuple romain qui se sentait né pour dominer le monde.
Sa seule faute est d’être né dupe comme tant d’autres naissent fripons. […] Molière, selon lui, était né dans la friperie, dans la juiverie. […] — Parisienne, née en 1618 et morte en 1672, un an avant Molière. […] Née en 1624, elle survécut à Molière (morte en 1675). […] Son troisième enfant fut une fille, Esprit-Madeleine, née le 4 août 1665.
Laissons donc l’envie et la médiocrité se consoler de leur impuissance en mutilant les puissantes natures : elles seront toujours écrasées toutes les fois qu’il naîtra un vrai grand homme, et qu’il naîtra une vraie postérité pour le juger. […] Emmène avec toi tous les scélérats qui te ressemblent ; purge cette ville de la contagion que tu y répands ; délivre-la des craintes que ta présence y fait naître ; qu’il y ait des murs entre nous et toi. […] le moment où je les ai vus naître m’a causé moins de joie qu’aujourd’hui qu’ils me sont rendus. […] Je vous dois plus qu’aux auteurs de mes jours : ils m’ont fait naître enfant, et par vous je renais consulaire. […] Dieu, l’âme du monde, la providence ou la fortune (appelée ainsi parce qu’elle fait naître mille événements imprévus dont les causes existent, mais dont nous ne pouvons apercevoir de si bas ni prévoir ces causes) gouverne l’univers.
Là où le soleil est plein de force naissent les pierres vertes ou noires, et dans les lieux sombres, les rouges. […] Ils étaient nés, tous les trois, dans l’antique ville de Chartres. […] C’est dans cette ville que le poète naquit. […] Il naquit vers l’année 1530, probablement. […] Marmontel, qui s’y essaya sans succès, n’était pas né poète.
. — Après les idées des choses individuelles naissent les idées des choses générales. […] En d’autres termes, des sensations de son qui, si elles naissent, seront miennes, sont possibles. […] Un seul d’entre eux naîtra à chaque moment ; les autres, en nombre illimité, ne naîtront pas. […] À présent, supposez que la sensation cesse, qu’il n’en subsiste que l’image avec les appendices, c’est-à-dire une représentation de la bille, et admettez qu’une sensation différente naisse en même temps avec son cortège propre. […] Je prévois, avant de les constater, les changements que telle modification de tel corps ordinaire provoquera dans tel autre corps ordinaire, et, cent mille fois contre une, ces changements naissent tels que je les ai prévus.
Indépendamment de son fils Jean, né d’une mère inconnue à Avignon, il parle dans ses lettres et dans ses sonnets d’une belle et jeune dame d’Italie dont les charmes rendaient malgré lui à son cœur des sentiments qu’il rougissait de rallumer. […] Je ne suis plus étonné de ce que Camille, ce grand homme que Rome exila, soupirait après sa patrie, quand je pense qu’un homme né sur les rives de l’Arno regrette un séjour au-delà des Alpes. […] Il fut remplacé par Innocent VI, né aussi à Limoges, mais qui portait sur le trône la rigidité d’un théologien au lieu de l’élégance d’esprit d’un gentilhomme français tel qu’était son prédécesseur, Clément VI. […] Une fille nommée Francesca naquit de cet amour. […] « La joie me coupe la parole, lui écrit Pétrarque ; peu importe que vous soyez né en Allemagne, pourvu que vous soyez né pour l’Italie. » Invité par l’empereur à venir conférer avec lui, Pétrarque accourut à Mantoue.
Heureux les enfants nés de parents élevés aux grandes places ! […] Il ajoute : « Nous mourons plus mauvais que nous ne naissons. […] Les grandes passions anéantissent les fantaisies, qui naissent toutes de la frivolité et de l’ennui. […] Né pour tous les hommes, tous les hommes seront nés pour moi. […] « L’homme est né pour méditer, et pour agir.
Le mot fut approuvé, applaudi de tous ceux à qui on le proposa ; on vota pour lui tout d’une voix dans le salon bleu ; mais il n’en fut ni plus ni moins : Débrutaliser est resté un mot factice et artificiel ; il n’était pas né viable. […] Ainsi pour Exactitude : « C’est un mot, dit-il, que j’ai vu naître comme un monstre, contre qui tout le monde s’écriait ; mais enfin on s’y est apprivoisé. […] Pourquoi celui-ci qui semblait né pour vivre et qui était comme formé à souhait n’a-t-il duré qu’une saison et s’est-il vu moissonné dans sa fleur ? […] La Mothe-Le-Vayer, né en 1588 à Paris, avait été d’abord substitut du procureur général : on s’en apercevrait peut-être à son style qui sent quelque peu le Palais et le Parlement. […] Tout cela est bien et irréprochable pour le fond : mais lui-même, on ne saurait en disconvenir, il a une manière de dire bien peu propre à persuader ; il abonde en termes et locutions déjà hors d’usage et dont le français ne veut plus ; il dit translations pour métaphores, allégations grecques et latines pour citations ; il dira encore en style tout latin : « La lecture est l’aliment de l’Oraison », Quoiqu’il contînt, on le voit, de bonnes idées, bien du sens et de la doctrine, ce traité de l’Éloquence de La Mothe-Le-Vayer péchait donc de bien des manières, et surtout en ce qu’il naissait arriéré, sans à-propos, sans rien de vif ni qui pût saisir les esprits.
Au type vague, abstrait, général, qu’une première vue avait embrassé, se mêle et s’incorpore par degrés une réalité individuelle, précise, de plus en plus accentuée et vivement scintillante ; on sent naître, on voit venir la ressemblance ; et le jour, le moment où l’on a saisi le tic familier, le sourire révélateur, la gerçure indéfinissable, la ride intime et douloureuse qui se cache en vain sous les cheveux déjà clair-semés, — à ce moment l’analyse disparaît dans la création, le portrait parle et vit, on a trouvé l’homme. […] elle, la perle limpide et une fois née, se voit fixe au haut de son rocher, sur le rivage, dominant cet océan qui remue et varie sans cesse ; plus humide, plus cristalline, plus radieuse au soleil après chaque tempête. […] Denis Diderot était né à Langres, en octobre 1713, d’un père coutelier. […] Enfin la plus violente admiration qu’il fit naître lui vint de Naigeon, Naigeon adorateur fétichiste de son philosophe, comme Brossette l’était de son poëte, espèce de disciple badaud, de bedeau fanatique de l’athéisme. […] Diderot savait mieux que personne les défauts de son œuvre ; il se les exagérait même, eut égard au temps, et se croyant né pour les arts, pour la géométrie, pour le théâtre, il déplorait mainte fois sa vie engagée et perdue dans une affaire d’un profit si mince et d’une gloire si mêlée.
Balzac était né avec une grande délicatesse de tempérament, une santé faible, que ses ennemis disaient ruinée, pour le décrier ; une imagination vive, avec un grand fonds de justesse. […] Tous les deux sont nés gentilshommes, et tous les deux s’attachent au parti royal : Balzac y avait plus de mérite que Malherbe, parce qu’il était plus jeune, qu’il avait vu ce parti avoir le dessous, et qu’il avait rempli des fonctions de confiance auprès du duc d’Epernon et du cardinal de la Valette, deux des chefs les plus marquants du parti des princes. […] Or, le talent de la composition naît du besoin de persuader. […] C’est le lieu de remarquer, en ce qui regarde les Lettres provinciales, ce que font quelques années de plus dans le développement d’une littérature, et comment de sujets analogues naissent, selon les talents, des ouvrages médiocres ou des chefs-d’œuvre. […] Il est né entre 1594 et 1597.
J’ai cru d’abord que je ne saurais pas dire où et quand était né M. de Latouche. […] Il paraît bien qu’il était né au Blanc, petite ville du Berry45, en février 1785 : ce qui le fait mourir à l’âge de soixante-six ans accomplis. […] La Correspondance de Clément XIV et de Carlin, par M. de Latouche, est née d’une idée piquante de l’abbé Galiani. […] M. de Latouche, pendant toute la Restauration, chercha vainement ce grand succès littéraire, né du génie et de l’occasion, et qui fait tomber sur un front la couronne. […] C’est de toute ambition que naît le mal.
Il était né avec assez de talent pour se conquérir ainsi une place parmi ses contemporains et exercer par son exemple une réelle influence. […] Tout au contraire ; il est né sermonnaire et, depuis quelque temps surtout, il ne perd aucune occasion de prêcher. […] Un fils leur est né après quelques années de mariage : ils sont heureux. […] Elle est née pour être exploitée par les hommes plus que pour les exploiter. […] J’accorde que les romanciers nous ont plus d’une fois fatigué avec leurs marquises et leurs comtesses ; il en est que la qualité entête tout simples bourgeois qu’ils soient nés, et qui, comme tel personnage de Molière « ne parlent jamais que duc, prince ou princesse ».
Et certains penseront qu’il en naîtrait un bien. […] Critique parlée, chronique, journal, dialogue, nous avons vu toutes ces idées s’enchaîner et naître les unes des autres parce que ces choses sont nées réellement les unes des autres. […] C’est l’art qui naît de la critique. […] La critique pure naît ici des mêmes sources glacées que la poésie pure. […] Elle est née avec Platon dans les écoles d’Athènes.
De tout cela, le romantisme qui venait sinon de naître il était né avec Jean-Jacques, et, parvenu, avec Chateaubriand, à une magnifique adolescence, se proclamait littérairement révolutionnaire — avait la conscience très forte, quoique obscure. […] La grande industrie, qui vient de naître de l’emploi de la vapeur et de la houille, est encore dans l’enfance. […] Les conflits d’événements qu’ils font naître ou rencontrent permettent le développement du lieu commun le plus large possible. […] Et ce n’est pas pour rien qu’est née cette expression « héros » ou « héroïne » de roman. […] C’est un écrivain né, un artiste né : et il écrit la langue la plus unie, la plus dépouillée d’artifices.
Né à Marseille en 1797, élevé à titre de boursier au lycée de sa ville natale, M. […] L’univers est une vaste action, l’homme est né pour agir. […] Des plébéiens nés dans vos rangs auraient déclaré la guerre à leur patrie ; mais convenez aussi que des nobles nés dans nos rangs auraient pu être dans le Comité de salut public. […] Cette histoire, qui a eu tant de vogue et d’influence, une influence qui n’est pas épuisée encore, fut commencée un peu au hasard, et naquit par occasion. […] » Malheur à qui, jeune et né dans les rangs nouveaux, n’a pas senti un jour, en lisant cette page, un battement de cœur et une larme !
Ainsi la vie mentale sort de la vie physiologique en vertu de cette loi de progrès continu, lentement, pas à pas, par transformations infinitésimales, et sans qu’on puisse dire : voici où elle est née. […] De la coordination des correspondances naît leur intégration, c’est-à-dire que les correspondances les plus simples se fondent l’une dans l’autre et s’unissent intimement, de façon à ne plus devenir séparables que par l’analyse. […] Nous avons vu que, non-seulement la conscience naît en vertu d’un changement, par la production d’un état différent de l’état précédent, mais que la conscience ne peut continuer, qu’autant que les changements continuent, qu’autant qu’il s’établit des rapports de dissemblance. Par suite donc, la conscience ne peut ni naître ni se maintenir, sans qu’il se produise dans son état des différences. […] L’intelligence ne peut naître que par l’organisation, l’arrangement, la classification de ces états.