Spirituel, quoique très sensé ; très délié et très souple dans les mouvements de son esprit, quoique ses convictions soient très immobiles ; coloré parfois à la moderne comme dans son Manifeste contre la littérature facile, mais plus souvent sobre et concentré comme les modernes ne savent plus l’être ; ingénieux enfin, c’est là son génie, M.
La grâce, la grâce, qu’on aime peut-être mieux dans la laideur que dans la beauté, parce qu’étant toute seule, on l’y voit mieux, Joseph Delorme l’a dans ce contraste suprême, comme il a l’ardeur de la passion dans l’impuissance, et rappelle-t-il parfois, cet énervé du rêve moderne, l’eunuque des Lettres persanes, dont l’indigence avive le désir. […] Jamais le mal moderne n’a eu, pour le peindre, une expression de ce hâve, de ce fiévreux — de cette transe !
Il écrit la Rome nouvelle, où il prêche l’alliance du pape et de la démocratie, le salut des peuples modernes dans un retour à l’évangélisme primitif, à la religion des humbles, élargie et devenue la religion nouvelle. […] Dans notre conception moderne, tout ce qui est sans base réelle ne peut s’élever, tout ce qui s’efforce contre les lois de nature est sans force ; le sur-humain n’est que l’humain à la suprême puissance, le divin n’est que l’« âme » du naturel.
Trop au-dessous de ces grands intérêts, on voulait cependant les égaler ; on voulait mettre de petites choses modernes au niveau de ces grandes choses antiques qui nous étonnent par leur hauteur, et dont la distance augmente encore le respect qu’elles nous inspirent. […] Dans la plupart des constitutions modernes, un orateur n’est rien, ne peut rien.
Jetons les yeux autour de nous, dans l’appartement moderne, où son art se donne librement carrière. […] Les anciens nous ont représenté la beauté antique : à nous de trouver la beauté moderne. […] Dans l’art moderne, tel semble bien avoir été l’idéal de Raphaël et des peintres formés à son école. […] L’artiste moderne use largement de cette convention. […] André Michel, Notes sur l’art moderne, Armand Colin, 1896, p. 17.
Louis Ratisbonne, exécuteur testamentaire et légataire de M. de Vigny pour les choses littéraires et poétiques, m’a fait savoir que mon article sur son ami lui avait déplu ; il me l’a témoigné autant qu’il a pu en faisant imprimer dans la Revue moderne du 1er avril 1866 une note de M. de Vigny à mon égard, trouvée dans ses papiers, non destinée assurément à la publicité, et de laquelle il résulte que le poète n’était pas absolument satisfait du premier Portrait de lui que j’avais tracé dans la Revue des Deux Mondes en 1835 : « S.
il serait permis d’en douter, si, comme l’a dit un Ancien, et comme un ingénieux moderne l’a rappelé en l’interprétant par l’exemple, elle n’était rien qu’une narration pure et simple dans laquelle aucun raisonnement ne dût s’introduire.
Tout amoureux qu’ils étaient cependant des âges chevaleresques et monarchiques, des légendes et des prouesses, le spectacle de nos exploits et de nos désastres récents, les grandes révolutions contemporaines, surtout la merveilleuse destinée de Napoléon et sa double chute, les avaient fortement remués : champions du vieux temps, et remplis d’affections modernes, ils étaient novateurs, même en évoquant le passé.
La perfection du genre consiste donc à atteindre ce degré extrême de l’approximation, à ôter ainsi aux traducteurs à venir l’espoir raisonnable d’aller au-delà, et à donner dans une langue moderne le dernier mot sur un grand écrivain de l’antiquité.
L’apostasie de nos gouvernants, l’impudente palinodie de certains hommes qui se retournent aujourd’hui contre les idées dont ils sont issus ; l’hésitation de la société à se reconnaître et à reprendre son train progressif au milieu du désappointement qui a suivi la dernière secousse ; toutes ces circonstances ont favorisé chez quelques esprits élevés, mais trop absolus, trop prompts, le dénigrement inconsidéré des principes et des garanties qui sont pourtant devenus plus que jamais l’indispensable condition de la société moderne.
Ce trait surpasse certainement tout ce que l’histoire moderne a jamais raconté d’intrépide en fait de bassesse.
Homme d’une époque tardive et raffinée où s’amalgamaient en une civilisation hybride et Rome et la Grèce et l’Orient, moraliste plus attentif au fonds humain qu’à la particularité historique, et, quand il cherche la variation et la singularité, plus curieux de l’individu que des sociétés, Plutarque offrait déjà les temps anciens dans l’image la plus capable de ressembler aux temps modernes.
S’il y a dans le style de nos modernes d’évidentes fautes de goût, cela tient surtout à leur mauvaise manière d’envisager le monde, et fort peu au mépris qu’ils ont eu pour les préceptes de Boileau-Despréaux.
Sur quoi il écrit un nouveau chapitre, extrêmement féroce, de sa Physiologie de l’amour moderne.
Vielé-Griffin me semble, à cette heure, l’un des trois poètes qui ont acquis la maîtrise du vers libre, sans même les traditions fontainiennes ou Molièresques, du vers libre moderne et décidément démailloté.
Le progrès dans les sociétés modernes se fait par la raison réfléchie.
Bain190, — une substance matérielle unie à une substance immatérielle par un certain rapport vaguement défini — subit maintenant une certaine transformation due à l’influence de la physiologie moderne.
Mais le salariat moderne a donné à la prostituée des maîtres nombreux, exigeants et avares.
D’autres enfin Newton lui-même, Hartley et Bonnet, ont combiné les deux hypothèses en substituant aux esprits animaux un fluide plus général, qui obtient chaque jour plus de crédit dans la science moderne l’éther.
À Bruxelles : L’Art Moderne, Le Thyrse, Durendal, le Jeune Effort, L’Idée Libre, La Belgique Artistique et Littéraire, Jadis, L’Essor Littéraire, etc… À Liège : Vallonia, etc… Sans compter les revues disparues, La Jeune Belgique, Le Coq Rouge, Comme il vous plaira, etc… 66.
Après une préface où les principes sont exposés, viennent les détails du livre qui sont comme il convient à un ouvrage élémentaire, bien présentés, dégagés de toute discussion trop savante, & fondés, sur ce qu’on a dit de meilleur en faveur de la Physique moderne.
Enfin quelques peintres des plus modernes se sont avisez de placer dans les compositions destinées à être vûës de loin, des parties de figures de ronde bosse qui entrent dans l’ordonnance et qui sont coloriées comme les autres figures peintes entre lesquelles ils les mettent.
On voit par les livres du Boccalin, qu’il sçavoit tout ce que les anciens et les modernes ont écrit de plus ingénieux sur le grand art de gouverner les peuples.
Mais je me contenterai de renvoïer aux modernes qui ont traité à fonds de la musique harmonique des anciens, afin de passer plûtôt à ce que j’ai à dire concernant leurs arts musicaux, qui sont l’objet principal de ma dissertation.
S’il n’y avait pas une littérature en Italie, Leopardi ne la commencerait pas… C’est un lettré de la Renaissance attardé dans l’époque moderne, rêvant pour l’Italie des réveils comme on en rêvait dans ce temps-là, païen, mythologue, athée, comme on l’était alors.
Enivré qu’il ait été par la Renaissance et cette poésie moderne qui s’efforce depuis plus de vingt ans d’en réverbérer les rayons, le noble auteur des Chants du Passé (nous l’avons déjà dit) revient, vers la fin de son recueil, à cette simplicité mâle que la vérité chrétienne, embrassée définitivement par notre âme, communique non seulement aux œuvres du cœur, mais aux productions de l’esprit.
A part toute opinion politique, et pour qui ne veut voir que les grands effets et la beauté des choses telle que les artistes et les poètes la comprennent, nulle période dans le monde moderne ne fut poétiquement supérieure à cette période de l’Empire dont nous, prosaïque et pacifique génération, sommes si rapprochés et si séparés en même temps, — car il est des moments dans l’Histoire où la longueur d’une lame d’épée semble quelque chose d’infini.
car, sous son fouet, son fouet fécondant comme la verge de Moïse, coula, avec le sang de l’amour-propre irrité, un flot de poésie qui ne s’arrêta plus, la plus belle poésie du monde moderne !
Mais il se conserve encore de lui le début d’un hymne à Diane, moins gracieux que les vers d’Euripide, mais d’un ton chaste et noble : « Je suis à tes genoux, puissante chasseresse, blonde fille de Jupiter, Artémis, reine des hôtes sauvages des forêts, soit que maintenant, près des flots tourbillonnants du Léthé, tu regardes avec joie la ville habitée par des hommes aux cœurs courageux ; car tu n’es pas la bergère d’un peuple féroce, soit que… » Le goût peut se plaire à recueillir ces moulures tombées des fresques antiques du véritable Anacréon, et à les comparer aux ornements et aux grâces du recueil moderne.
Et cette histoire est bien celle de deux malheureux très modernes, très contemporains. […] C’est cette qualité qui l’a rendu particulièrement odieux à nos modernes « esthètes ». […] Voilà, s’est-il dit, le rôle du Catholicisme moderne, voilà le « Néo-Catholicisme ». […] Ces corps intermédiaires, l’ancien régime les a connus ; la France moderne ne les connaît pas. […] Tous ils sont modernes, très modernes, tout à fait de leur siècle.
Mais ne laissez donc pas dire que c’est le roman moderne qui a perdu la France, et que c’est Lugarto, Trenmor et Rose-Pompon qui ont fait la révolution de Février. […] Cuvillier-Fleury, en dénonçant l’importance du roman moderne et l’influence funeste qu’il a eue sur la destinée de la société. […] Sera-ce le général Cavaignac, qui représente un service récent rendu à la société, sera-ce l’héritier du nom le plus grand des temps modernes, éclatant souvenir qui devient une espérance ? […] L’homme tel que le conçoivent la plupart des romanciers modernes est au-dessous de l’homme réel ; l’homme tel que le conçoivent les romans de chevalerie est au-dessus, c’est un homme surfait. […] Cet Œdipe de la civilisation moderne a eu les yeux crevés, non par sa propre main, mais par celle de la société.
Il est hors de doute qu’il faut les estimer et les lire ; il s’agit seulement de sçavoir s’il ne les faut pas peser au même poids que les modernes. […] C’est à eux sans doute qu’il appartient de juger les ouvrages anciens et modernes ; mais il seroit bon, ce me semble, d’établir là-dessus une différence entre les auteurs des siécles passez et les auteurs vivants. […] Parmi les modernes, érasme ne trouve pas assez de gravité dans les poëmes d’Homere. […] On me demande sans doute un éxemple plus antique ; car les modernes ne font pas preuve. […] Un homme qui sans grec et sans latin, auroit mis à profit tout ce qui s’est fait d’excellent dans nôtre langue, l’emporteroit sans doute sur le sçavant, qui par un amour déréglé des anciens, auroit dédaigné les ouvrages modernes.
Ou bien, si je parle, par exemple, de l’art du Moyen-Âge et du Christianisme, et que l’on m’objecte la Renaissance, l’école de Ronsard, ou celle de Racine et de Boileau, il faudra bien que je montre comment ces écoles se détachent du Moyen-Âge, et perdent à la fois le sens moderne et l’originalité pour l’imitation. […] En l’absence des éléments, décomposés à jamais, de l’organisation théologique-féodale, ils ont rêvé possible la restauration de la monarchie et du papisme ; en présence de la science moderne, ils ont rêvé la restauration d’une foi fondée sur la science du passé. […] On voudrait faire tenir le monde agrandi des modernes dans l’étroit horizon d’une religion faite il y a deux mille ans, ou bien on agrandit le cadre de cette religion pour que tout puisse y entrer.
Chez les modernes, il suffit de rappeler les noms de Leibniz, Locke, Condillac et leurs disciples. […] Le cartésianisme réservé et peu subversif au fond, chez qui, suivant la remarque de Ritter (Histoire de la phil. moderne, t. […] Mais les naturalistes modernes ont su retrouver les fonctions fondamentales jusque chez les derniers mollusques et protozoaires.
C’est peut-être ce fonds de culture qui lui a permis de s’adapter si bien à la vie moderne, quelles qu’en aient été pour elle les surprises. […] À partir de là, Paris fut progressivement envahi par le cosmopolitisme de l’argent, et la physionomie du Paris moderne commença à apparaître. […] L’individu qui n’est pas face à la vie moderne est d’avance un vaincu.
Néanmoins, si l’on embrasse une longue série d’âges à venir, il ne saurait être douteux que toutes nos formations marines les plus récentes, c’est-à-dire les terrains Pliocènes supérieurs et Pléistocènes, ainsi que les couches complétement modernes d’Europe, des deux Amériques et de l’Australie, pourront être, avec raison, considérées comme simultanées, dans le sens géologique du mot, par ce fait qu’elles contiendront des débris fossiles plus ou moins alliés, et qu’elles n’offriront aucune des formes propres aux dépôts inférieurs plus anciens. […] De sorte qu’en vertu de ce jugement de la victoire dans la lutte vitale universelle, aussi bien qu’au point de vue de la spécialisation plus ou moins parfaite des organes, les formes modernes, d’après la théorie de sélection naturelle, doivent être plus élevées que les formes anciennes. […] Une certaine perfection de détail semble avoir remplacé les lignes amples et majestueuses des végétations tropicales modernes ou des flores tertiaires.
. — « Nous aussi, nous sommes modernes. […] Il s’est rencontré alors avec les athées et les immoralistes modernes dont il a semblé être le précurseur et dont, au fait, il avait prévu et devancé les idées et les démarches générales. […] Dans le monde moderne c’est la solution vraie, c’est la vérité. […] Une société démocratique, telle que l’entendent les démocrates modernes, est une société où toute force individuelle est supprimée. […] C’est le recours des Césars modernes.
Si l’antique liberté était rendue à la comédie moderne, les meilleurs poètes d’Allemagne ou de France ne ressusciteraient pas la comédie d’Aristophane, en produisant sur la scène le peuple et ses conducteurs, Cléon ou Socrate, et en agitant, sous les yeux des citoyens, les grandes questions du jour. […] Le répertoire presque tout entier du théâtre moderne est prosaïque. […] Dans le monologue d’Harpagon, après le vol, l’auteur moderne n’a fait qu’amplifier et broder l’original. […] Voyez là-dedans si j’y suis115 Le Roi de Cocagne, messieurs, prouve d’une manière éclatante qu’il serait possible d’introduire sur notre scène moderne, en évitant les indécences et les allusions personnelles, le genre d’Aristophane116.
J’y vois, pour mon compte, les titres du monde moderne, les privilèges particuliers de l’esprit français, et les droits mêmes de la raison. […] Aucun moderne n’a mieux senti les grâces du paganisme que cet archevêque chrétien. […] Une mémoire heureuse qui mêle à propos les citations décisives aux raisonnements sur l’art ; l’amour des anciens, qui n’empêche pas l’estime pour les modernes ; cette même liberté ingénue, dont j’ai parlé tout à l’heure, qui inspire à un prélat de judicieuses remarques sur la comédie ; une littérature aussi variée que profonde, telles sont les séductions de ce charmant ouvrage, fruit de la vieillesse de Fénelon, dans un siècle où la vieillesse n’était que l’âge mûr de la raison. […] La mythologie grecque est restée la religion de l’imagination chez les peuples modernes.
Il nous confie le grand désir qu’il a eu, désir auquel il n’a pas renoncé, d’écrire un livre sur l’Orient moderne, sur l’Orient en habit noir. […] J’ai cru voir l’esclave qui recevait au Cirque les corps des gladiateurs, — et lui aussi reçoit les tués de ce grand Cirque : la société moderne. […] On cause de l’histoire moderne, de sa supériorité sur l’ancienne, qui ne voyait jamais ni le cadre ni le milieu des événements, et Sainte-Beuve déclare que Villemain ne sait absolument des événements que ce qu’il y a dans les livres, et que la connaissance de l’art d’un temps manquait jusqu’ici aux historiens. […] Ce salon est le vrai salon du xixe siècle, avec une maîtresse de maison qui est le type parfait de la femme moderne.
La philosophie moderne a bien de la peine à ne pas oublier naturellement cette charité qui est le cœur du christianisme en son sens divin.
Les lecteurs curieux de ces sortes de cas particulier trouveront, pages 209 et 319, un petit roman métaphysique où toutes les finesses de l’amour-propre et de la coquetterie, toutes les jalousies et les délicatesses de l’amitié, sont en jeu et luttent pour ou contre un sentiment profond sincère et désespéré, c’est presque un pendant à l’histoire d’une Jeune grecque moderne, par l’abbé Prévost ; c’est une rareté précieuse, comme M. de Stendhal en a réuni plus d’une dans son livre de l’Amour.
Le mariage de Julie de Rambouillet avec le duc de Montausier est un fait de si peu d’importance historique, qu’il ne mériterait pas qu’on en recherchât les circonstances, s’il ne concourait d’abord à marquer l’époque où la société de l’hôtel Rambouillet commença à se dissoudre, et ensuite à faire tomber les applications que nos biographes modernes lui ont faites, des traits lancés par Molière en 1650 contre Les Précieuses ridicules.
Y a-t-il, soit parmi les Anciens, soit parmi les Modernes, un Poëte qui offre autant d’exemples du sublime de sentiment & du sublime d’expression ?
Celui de Racine étoit assez riche pour plaire, & intéresser, sans le secours de ce ressort, qui n’a point été employé dans Athalie, le chef-d’œuvre des Théatres anciens & modernes : rien en effet de plus simple, de plus sublime, de mieux conduit, que cette Piece, & cependant point de sujet plus difficile à traiter.
Ce vieux monarque, dont le seul crime est d’aimer trop un fils coupable ; ce généreux Hector, qui connaît la faute de son frère, et qui cependant défend son frère ; cette Andromaque, cet Astyanax, cette Hécube, attendrissent le cœur, tandis que le camp des Grecs n’offre qu’avarice, perfidie et férocité : peut-être aussi le souvenir de l’Énéide agit-il secrètement sur le lecteur moderne, et l’on se range sans le vouloir du côté des héros chantés par Virgile.
Mais lorsque, sous les rapports chrétiens, on vient à penser que l’histoire des Israélites est non seulement l’histoire réelle des anciens jours, mais encore la figure des temps modernes ; que chaque fait est double, et contient en lui-même une vérité historique et un mystère ; que le peuple juif est un abrégé symbolique de la race humaine, représentant, dans ses aventures, tout ce qui est arrivé et tout ce qui doit arriver dans l’univers ; que Jérusalem doit être toujours prise pour une autre cité, Sion pour une autre montagne, la Terre Promise pour une autre terre, et la vocation d’Abraham pour une autre vocation ; lorsqu’on fait réflexion que l’homme moral est aussi caché sous l’homme physique dans cette histoire ; que la chute d’Adam, le sang d’Abel, la nudité violée de Noé, et la malédiction de ce père sur un fils, se manifestent encore aujourd’hui dans l’enfantement douloureux de la femme, dans la misère et l’orgueil de l’homme, dans les flots de sang qui inondent le globe depuis le fratricide de Caïn, dans les races maudites descendues de Cham, qui habitent une des plus belles parties de la terre91 ; enfin, quand on voit le Fils promis à David venir à point nommé rétablir la vraie morale et la vraie religion, réunir les peuples, substituer le sacrifice de l’homme intérieur aux holocaustes sanglants, alors on manque de paroles, ou l’on est prêt à s’écrier avec le prophète : « Dieu est notre roi avant tous les temps. » Deus autem rex noster ante sæcula.
On voit des tableaux modernes perdre leur accord en très peu de temps ; on en voit d’anciens qui se sont conservés frais, harmonieux et vigoureux, malgré le laps du temps.
Voilà ce qui arrive tous les jours sur les théatres modernes, où des comediens dont quelques-uns n’ont jamais étudié même leur métier, composent à leur fantaisie la déclamation d’un rolle dont souvent ils n’entendent pas plusieurs vers.
Mais elle a beau me parler de l’héroïque sincérité de l’âme ardente et forte dont elle recommande le volume présent au public ; elle a beau m’exalter cette âme indépendante et fidèle, qui n’oublie aucun de ses amours en les variant et qui ne combat rien dans son âme par la très morale raison que le temps qu’on perd à combattre contre soi, on ne fait pas Corinne, si on fait Mme de Staël, je me connais trop en logomachie pour ne pas reconnaître les idées, les façons de dire, les affectations du bas-bleu moderne, cette espèce à part et déjà si commune et pour être infiniment touché du spectacle que me donnent, à la fin de cette préface sur laquelle on a compté, ces deux antiques Mormones du bas-bleuisme contemporain dont l’une couronne l’autre de roses à feuilles de chêne, avec un geste tout à la fois si solennel et si bouffon !
, ni Guizot, qui a vu les mélanges du bien et du mal, mais qui n’a pu les expliquer, ni personne, enfin, parmi les gloires modernes, n’a porté la lumière et la main sur le nœud gordien de ce temps et son implication formidable, tandis que quelques vers de Shakespeare, quelques pages de Walter Scott, en font du moins passer l’âme dans nos esprits, comme une vision trop tôt évanouie !
C’est sur le nez coupé dans le front de Condillac, par le procédé rhinoplastique, appliqué à la philosophie, que Taine porte, comme les équilibristes portent leur perche ou leur échelle, la masse des faits scientifiques qu’il a ramassés dans tous les bouquins de la science moderne sans exception.