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798. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Erckmann-Chatrian » pp. 95-105

Quand l’invention est une outrance qui fait craquer le monde créé sous son absurdité puissante, et qui cherche l’émotion à tout prix, par toute voie, il faut la trouver, ou, soi-même, ou est perdu si on ne la trouve pas, cette émotion qui est le but, mais qu’il faut profonde et non pas vulgaire !

799. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

On y trouvera omises, et cela volontairement, des parties entières de leur œuvre, qui pourtant ne sont pas négligeables, mais ne nous eussent été d’aucune aide pour le but que nous poursuivons… Elle apparaît toujours un peu délicate, fausse en quelque façon, l’attitude du sexe fort en face de la femme-auteur. […] Mon but serait atteint si l’image que je propose avait pu rencontrer ici son application, si les intentions et les limites du livre s’étaient dégagées du seul accent de ces pages. […] Depuis les époques lointaines où ce leur était l’unique moyen d’échapper à la mort en écartant, par l’éveil du désir, les brutalités du mâle primitif, jusqu’aux temps d’extrême civilisation où ce devint leur meilleur gage de domination sur le citoyen policé, elles ne poursuivent pas d’autre but ; tous leurs efforts vont à préparer les armes qui assureront leur pouvoir. […] Ainsi s’affirme, par des indices certains, s’esquissant au premier âge, la parfaite unité de constitution mentale chez celle dont la vie a ce double but : créer, conserver. […] J’admire à quel point nous restons, suivant la féconde pensée du philosophe de Franckfort, les instruments aveugles d’une force qui poursuit son but en nous pliant à ses lois, car, de quelque nom qu’on l’appelle : Dieu, Nature, Fatalité, on ne fait que marquer par là une prédilection métaphysique, et elle n’en demeure pas moins l’unique régulatrice de nos destinées.

800. (1888) Poètes et romanciers

Il a bien mérité de toucher le but sacré de son voyage, la blanche Tour. […] — L’amour n’arrive au but qu’en traversant la mort ! […] Ici, tout a son effet prévu, tout va au but. […] Bans cette lutte ardente des ambitions armées, le dévouement pur aurait-il pu parvenir au but ? […] Pour atteindre le but, le moyen leur manque.

801. (1769) Les deux âges du goût et du génie français sous Louis XIV et sous Louis XV pp. -532

Ils atteignirent le but presque en entrant dans la carriere. […] Lemoine eût atteint le but de l’Epopée. […] Ils sentent l’art ; mais cet art atteint quelquefois le but de la nature. […] Du reste, ne négligeons aucun des ressorts de l’art pour atteindre à son but. […] On l’accuse d’avoir quelquefois passé le but.

802. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

C’est à pareil jour qu’il revint l’année dernière de ses voyages sans but à travers le monde, dont il ne rapporte jamais, dans sa valise, que des pierres cassées, des dessins à la plume ou des écritures à lignes inégales qui font chanter ou pleurer ceux qui les lisent. […] et passe ainsi tes jours dans les extases d’une passion pétrifiée et toute divine, et ne te mêle ni à la politique, ni à l’ambition, ni à rien de ce qui passe ; enrichis ton âme et la nôtre des seuls biens qui ne passent pas, la contemplation de ce qui est éternellement beau dans les lieux, dans les formes, dans la pensée, dans la poésie, sans en tirer ni salaire, ni orgueil, ni gloire vaine, mais en en tirant le bonheur de vivre et d’entrevoir ainsi avec certitude le but de la vie et de la mort, le grand et le beau. […] « Or la sculpture est, parmi les beaux-arts, celui qui a pour but spécial de reproduire la figure de l’homme dans sa perfection idéale, abstraction faite des difformités accidentelles et des émotions passagères qui peuvent en altérer la majestueuse harmonie.

803. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Edmond et Jules de Goncourt »

L’observation de la réalité fut toujours pour lui un moyen, non un but. […] Zola), soit par la passion du moderne (comme MM. de Goncourt)  On dit que ces écrivains se sont trompés, qu’ils ont plié l’art à nous donner une impression des choses fort différente de celle qu’on avait coutume de lui demander, qu’ils ont ainsi dépensé un art infini à aller contre le but même de l’art. […] Sans doute leurs chapitres ne se suivent pas tout à fait au hasard : outre qu’ils se tiennent par l’unité du but, qui est la description de tel ou tel monde, on devine le plus souvent dans quelle intention délicate, pour quel effet de symétrie, de redoublement du d’opposition ils ont été disposés comme on les voit : leur désordre, est lui aussi, « un beau désordre ».

804. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

Le détour est si court pour arriver au but, et l’opération, pour rétablir l’ordre, si aisée et si rapide, qu’on sent bien que l’inversion ne tardera pas à disparaître ainsi, même aux époques où notre langue l’a subie, elle a su l’accommoder à ce besoin de clarté qui est le trait distinctif de l’esprit français. […] Ses mémoires sont le récit de cette expédition si extraordinaire, dont le but était la délivrance de la terre sainte, et qui eut pour résultat la prise de Constantinople et l’établissement d’un empire français en Orient. […] Esprit pratique, allant droit au but, si Villehardouin n’a pas la profondeur de vues que nous demanderons à l’historien d’une société plus avancée, il n’a pas non plus les illusions qu’on ne s’étonnerait pas de trouver dans un historien de son époque.

805. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Ainsi font-ils tous… J’ai écrit, selon quelques-unes des règles que tu aimes, ô Théonoé, la vie du jeune dieu que servis dans mon enfance ; ils me traitent comme un Évhémère ; ils m’écrivent pour me demander quel but je me suis proposé ; ils n’estiment que ce qui sert à faire fructifier leurs tables de trapézites. […] Les cités, tu les gardes, ô Promachos ; tu as ce qu’il faut de Mars, ô Aréa ; la paix est ton but, ô Pacifique. […] Tirant profit de la vertu, il a intérêt à ce qu’il y en ait ; ainsi, au prix de l’abandon de sa partie matérielle, le sage atteint son but unique, qui est de jouir en paix de l’idéal.

806. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre V. Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance »

Mais plus la conscience se développe, plus elle éclaire l’opération de la mémoire et plus aussi elle laisse transparaître l’association par ressemblance, qui est le moyen, derrière l’association par contiguïté, qui est le but. […] Ce but lui-même n’est d’ailleurs aperçu que comme un but provisoire ; nous savons qu’il y a autre chose derrière ; dans l’élan que nous prenons pour franchir le premier obstacle nous nous préparons déjà à en sauter un second, en attendant les autres qui se succéderont indéfiniment.

807. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Est-ce l’obtention de certains buts abstraits, objectifs, comme l’on dit, exigeant des hécatombes d’individus sacrifiés ? […] L’univers, qui ne nous dit jamais son dernier mot, atteint son but par la variété infinie des germes. […] La science ou l’art, par exemple, la recherche de la vérité ou la réalisation de la beauté, sont-ils de ces « buts objectifs ou abstraits » ? […] « L’histoire et le présent, dit-il, nous offrent l’image de guerres presque ininterrompues entre les tribus, entre les peuples, entre les États, entre les nations » ; et il ajoute : « Le but de toutes ces guerres est toujours le même, quelles que soient les formes différentes sous lesquelles ce but est visé ou atteint, et ce but, c’est de se servir de l’ennemi comme d’un moyen de satisfaire ses propres besoins ». […] La race étant en voie de formation, quels accidents, de quelle nature, l’ont peut-être un moment détournée de son but ?

808. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Il est lancé dans une carrière qui l’éloigne du but de ses vœux ; dans cette carrière même, il s’égare plutôt qu’il n’avance, dénué qu’il est de ressources et de soutien. […] Cela fait, incapable de rien poursuivre, renonçant à tout but, s’enveloppant de sa pauvreté comme d’un manteau, il ne pensa qu’à vivre chaque jour en condamné de la veille qui doit mourir le lendemain, et à se bercer de chants monotones pour endormir la mort. […] Mais indiquer ce but supérieur et divin de l’amitié, c’est assez reconnaître que sa loi suprême est d’y tendre sans cesse, et qu’au lieu de se méprendre à ses propres douceurs, au lieu de s’endormir en de vaines et molles complaisances, elle doit cheminer, jour et nuit, comme un guide céleste, entre les deux compagnons qui vont aux mêmes lieux. […] Si, à l’ouverture du volume nouveau, ces personnes pouvaient croire que j’ai voulu quitter ma première route, je leur ferai observer par avance que tel n’a pas été mon dessein ; qu’ici encore c’est presque toujours de la vie privée, c’est-à-dire, d’un incident domestique, d’une conversation, d’une promenade, d’une lecture, que je pars, et que, si je ne me tiens pas à ces détails comme par le passé, si même je ne me borne pas à en dégager les sentiments moyens de cœur et d’amour humain qu’ils recèlent, et si je passe outre, aspirant d’ordinaire à plus de sublimité dans les conclusions, je ne fais que mener à fin mon procédé sans en changer le moins du monde ; que je ne cesse pas d’agir sur le fond de la réalité la plus vulgaire, et qu’en supposant le but atteint (ce qu’on jugera), j’aurai seulement élevé cette réalité à une plus haute puissance de poésie.

809. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

Il ne sait pas composer, faire un plan, tracer un chemin, mener l’auditeur au but par des raisons qui se fortifient en s’enchaînant. […] Sa critique littéraire va au même but que sa conduite : plaire au public, dans les écrits, par la simplicité, l’amour du vrai, comme on doit lui plaire, dans la conduite, par la vertu. […] Pour l’estimer à son prix, il serait besoin de se rappeler en le lisant, quel but s’y est proposé Fénelon et pour quel lecteur il l’a écrit. […] Par l’intérêt des détails, la grâce des descriptions, la variété des aventures, il le ramenait à son insu, et comme par mille chemins agréables, au même but, à cet idéal sévère de la royauté juste, pacifique, bienfaisante, maîtresse de ses passions et dévouée au bien des peuples.

810. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIII : Affinités mutuelles des êtres organisés »

En ce cas, il aurait pour but de nous permettre de renfermer sous une seule proposition les caractères communs à tous les mammifères, par exemple, et, sous une autre, tous ceux qui, dans les mammifères, sont communs au genre Chien ; et enfin, en en ajoutant une seule proposition de plus, d’arriver à donner une description complète de chaque espèce de Chiens. […] Fort probablement nous ne parviendrons jamais à démêler l’inextricable réseau d’affinités qui unit entre eux les membres de chaque classe ; mais, du moment que nous connaissons le but vers lequel il faut tendre, et que nous ne nous égarons plus à la recherche de quelque plan de création inconnu, nous pouvons espérer de faire des progrès lents, mais certains. […] Il n’est pas de tentative plus vaine que de vouloir expliquer cette identité de plan chez tous les membres de la même classe, par un but quelconque d’utilité ou par la doctrine des causes finales. […] Ainsi, dans les plantes, le pistil a pour but de permettre aux tubes polliniques d’atteindre les ovules, placés à sa base et protégés par l’ovaire.

811. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

Cet effort n’aurait jamais atteint le but ; mais chaque fois, au moment de s’épuiser, il aurait confié à la dialectique ce qui restait de lui-même plutôt que de disparaître tout entier ; et ainsi, avec la même dépense de force, une nouvelle tentative pouvait ne s’arrêter que plus loin, l’intelligence se trouvant rejointe en un point plus avancé d’un développement philosophique qui avait, dans l’intervalle, acquis plus d’élasticité et comportait plus de mysticité. […] C’est la conviction, graduellement gagnée et subitement obtenue, que le but est atteint : finie la souffrance, qui est tout ce qu’il y a de déterminé, et par conséquent de proprement existant, dans l’existence. […] Le but ne serait atteint que s’il y avait finalement ce qui aurait dû théoriquement exister à l’origine, une humanité divine. […] Elle eût constaté que si, pour simplifier le travail et aussi pour faciliter la coopération, on commence par réduire les choses à un petit nombre de catégories ou d’idées traduisibles en mots, chacune de ces idées représente une propriété ou un état stable cueilli le long d’un devenir : le réel est mouvant, ou plutôt mouvement, et nous ne percevons que des continuités de changement ; mais pour agir sur le réel, et en particulier pour mener à bien le travail de fabrication qui est l’objet propre de l’intelligence humaine, nous devons fixer par la pensée des stations, de même que nous attendons quelques instants de ralentissement ou d’arrêt relatif pour tirer sur un but mobile.

812. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVIII » pp. 266-276

est-ce pénétrer le sens intime et le but de la religion ?

813. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Poésies d’André Chénier »

Pour reconnaître, sans en laisser échapper aucune, toutes les imitations d’André Chénier, il a dû commencer par lire tous les poëtes grecs et la plupart des poëtes latins : savez-vous que le chemin vaut bien le but ?

814. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « La poésie »

Paul Albert, le premier qui nous permette de lire ce qui se professait hier encore dans une salle de la Sorbonne, est le plus propre aussi à donner l’idée de cet enseignement judicieux et vivant, proportionné à son but et de tout point irréprochable.

815. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

Je crois peut-être expliqué de quelle manière ce morceau se rattache au but général de l’auteur.

816. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre II. Recherche des vérités générales » pp. 113-119

La paresse est la reine de la terre, pourrait-on dire ; même quand l’homme est sollicité à agir par le désir ou le besoin, il agit de façon à atteindre son but avec le moins de peine possible.

817. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre IV » pp. 38-47

Enfin, il ne but point et s’en plaignît à la reine.

818. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIX » pp. 319-329

La lettre du 15 novembre, en réponse, est ironique dans quelques expressions, sévère dans d’autres ; mais elle tend surtout au but que se proposait madame Scarron : c’était de faire croire que l’année qu’elle allait passer dans une solitude forcée, avec les enfants dont il fallait cacher l’existence, serait consacrée à une retraite pieuse et à une réforme dirigée par un savant théologien.

819. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 23-38

Approche-t-il du but ?

820. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 239-252

Qui ne comprendra, par exemple, que dans la Description énergique du Tableau du Jugement dernier, par Michel-Ange, le Poëte a eu pour but principal, de faire sentir aux Peintres combien il est essentiel de ne pas négliger, dans leurs Ouvrages, les bienséances, les mœurs & le costume ?

821. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Balzac, et le père Goulu, général des feuillans. » pp. 184-196

Celui de Balzac le portoit au grand, au sublime ; mais, à force d’y vouloir atteindre, même dans les plus petites choses, il passa le but, & ne donna que dans l’emphase & le gigantesque.

822. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre sixième. »

Cette fable écrite purement et où le fait est bien raconté, a, ce me semble, le défaut de n’avoir qu’un but vague, incertain, et qu’on a de la peine à saisir.

823. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre III. Paradis perdu. »

Car si le fils de Pélée atteint le but de ses désirs, toutefois la conclusion du poème laisse un sentiment profond de tristesse1 : on vient de voir les funérailles de Patrocle, Priam rachetant le corps d’Hector, la douleur d’Hécube et d’Andromaque, et l’on aperçoit dans le lointain la mort d’Achille et la chute de Troie.

824. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIII. Éloges donnés aux empereurs, depuis Auguste jusqu’à Trajan. »

Si quelqu’un veut éprouver toute l’indignation que la flatterie inspire ; s’il veut apprendre comment on ne laisse échapper aucune occasion de louer un homme puissant ; comment on s’extasie sur ses bonnes qualités, quand il en a ; comment on dissimule les mauvaises ; comment on exagère ce qui est commun ; comment on donne des motifs honnêtes à ce qui est vicieux ; comment on rabaisse avec art, ou sans art, les ennemis ou les rivaux ; comment on interrompt son récit par des exclamations qu’on veut rendre passionnées ; comment on se hâte de louer en abrégé, en annonçant que dans un autre ouvrage on louera plus en détail ; comment, et toujours dans le même but, on mêle à de grands événements, de petites anecdotes ; comment on érige son avilissement en culte ; comment on espère qu’un homme si utile et si grand, voudra bien avoir longtemps pitié de l’univers ; comment, enfin, dans un court espace, on trouve l’art d’épuiser toutes les formules, et tous les tours de la bassesse, il n’y a qu’à lire ces soixante pages, et surtout les vingt dernières.

825. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre V. Du gouvernement de la famille, ou économie, dans les âges poétiques » pp. 174-185

Cette société dont l’utilité était le but, fut d’une nature servile.

826. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DAUNOU (Cours d’Études historiques.) » pp. 273-362

Son discours, qui est moins un éloge qu’une discussion historique, remporta le prix et fut publié en 1787 ; il a reparu plus tard corrigé, augmenté, ou plutôt totalement refondu, en tête de l’édition de Boileau (1809), et de nouveau modifié en 1825 ; mais, dans sa première formé, il donne mieux idée des principes et du but de l’auteur. […] Juger l’ouvrage en disant qu’abstraction faite des doctrines latentes et du but, il offre un résumé substantiel, un narré pressant, du meilleur style et d’une modération très-suffisante à la surface, ce serait aussi prouver de soi-même trop de complaisance ou de simplicité. […] Fidèle à sa méthode, l’auteur y adopte trois grandes divisions : 1° l’examen et le choix des faits, premier travail préalablement nécessaire à l’historien, et qui comprend la question de la certitude et des sources, celle des usages et du but de l’histoire ; 2° la classification des faits, quant aux lieux, quant au temps, c’est-à-dire géographie et chronologie ; 3° l’exposition des faits, ce qui aboutit à l’histoire proprement dite, telle qu’elle se dessine aux lecteurs ; les deux autres branches sont plutôt un travail de cabinet pour l’historien. […] On a conçu une idée plus juste du caractère et du but de l’histoire ; on a voulu qu’elle devînt un tableau des mœurs et de la destinée des nations. […] Rossi) divise tous les esprits en deux classes, quels que soient d’ailleurs leur qualité et leur degré : 1° ceux qui apprennent, qui sont en train d’apprendre, jusqu’au dernier jour ; 2° ceux (non pas moins distingués souvent) qui s’arrêtent à une certaine heure de la vie, qui disent non au but d’avenir, et se fixent à ce qu’ils croient la chose trouvée.

827. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Quoi qu’il en soit, le but qu’il s’était proposé en écrivant cet ouvrage, Gœthe l’atteignit. […] Dans son activité toujours inassouvie, il poursuit un but qui le fuit sans cesse. « Je le sens, hélas ! […] C’est le but de Volupté (1834). […] N’a-t-il pas eu précisément pour but de donner à nos opinions flottantes une base désormais inébranlable ? […] Il essaie enfin d’écrire un ouvrage, mais sans but précis, sans volonté arrêtée ; aussi ne tarde-t-il pas à l’abandonner.

828. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

Mais, en même temps, c’est pour le véritable roman naturel, pour l’analyse et la mise en jeu des passions humaines, que Mme de Staël se prononce entre toutes les fictions ; elle les veut sans mythologie, sans allégorie, sans surnaturel fantastique ou féerique, sans but philosophique trop à découvert. […] » Mais, sans nous hasarder à prétendre que Mme de Vernon soit en tout point un portrait légèrement travesti, sans trop vouloir identifier avec le modèle en question cette femme adroite dont l’amabilité séduisante ne laisse après elle que sécheresse et mécontentement de soi, cette femme à la conduite si compliquée et à la conversation si simple, qui a de la douceur dans le discours et un air de rêverie dans le silence, qui n’a d’esprit que pour causer et non pas pour lire ni pour réfléchir, et qui se sauve de l’ennui par le jeu, etc., etc., sans aller si loin, il nous a été impossible de ne pas saisir du moins l’application d’un trait plus innocent : « Personne ne sait mieux que moi, dit en un endroit Mme de Vernon (lettre xxviii, 1re partie), faire usage de l’indolence ; elle me sert à déjouer naturellement l’activité des autres… Je ne me suis pas donné la peine de vouloir quatre fois en ma vie, mais quand j’ai tant fait que de prendre cette fatigue, rien ne me détourne de mon but, et je l’atteins ; comptez-y. » Je voyais naturellement dans cette phrase un trait applicable à l’indolence habile du personnage tant prôné, lorsqu’un soir j’entendis un diplomate spirituel, à qui l’on demandait s’il se rendait bientôt à son poste, répondre qu’il ne se pressait pas, qu’il attendait : « J’étais bien jeune encore, ajouta-t-il, quand M. de Talleyrand m’a dit, comme instruction essentielle de conduite : N’ayez pas de zèle !  […] Le mécontentement du souverain contre l’ouvrage70, probablement parce que cet enthousiasme idéal n’était pas quelque chose qui allât à son but, suffit à paralyser les éloges imprimés. […] De même qu’on a remarqué que les tempéraments, à mesure qu’on vieillit, reviennent au type primitif qu’ils marquaient dans l’enfance, se dépouillant ainsi par degrés des formes et des variations contractées dans l’intervalle ; de même que les révolutions, après leur élan, reviennent à un moindre but que celui qu’elles croyaient d’abord atteindre ou qu’elles avaient dépassé, de même nous voyons Mme de Staël, vers la fin de sa vie, se réfugier dans un système plus mixte, plus tempéré, mais pour elle presque domestique : c’était, pour la fille de M. […] But mighty Nature bounds as from her birth, etc.

829. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre I. De l’évolution de la vie. Mécanisme et finalité »

Or, pour agir, nous commençons par nous proposer un but ; nous faisons un plan, puis nous passons au détail du mécanisme qui le réalisera. […] C’est en vain qu’on voudrait assigner à la vie un but, au sens humain du mot. Parier d’un but est penser à un modèle préexistant qui n’a plus qu’à se réaliser. […] Elle dit que les parties ont été assemblées sur un plan préconçu, en vue d’un but. […] Il en serait ainsi, sans aucun doute, si cette marche exigeait la représentation, consciente ou inconsciente, d’un but à atteindre.

830. (1886) Le naturalisme

Prêcher, enseigner, réformer l’univers, tel est son but. […] De ce but même, que le poète s’était choisi plus que le romancier, il résulta que les romans de Chateaubriand furent plutôt des poèmes qu’autre chose. […] Valentine, Lélia, Indiana ne nous persuadent rien du tout ; leur but doctrinaire ou révolutionnaire demeure inoffensif. […] Son but est tout différent. […] Son style égal et plan, est en réalité très travaillé, savamment disposé, prémédité à l’extrême, et certaines phrases qui semblent écrites à la grâce de Dieu et sans autre but que celui d’appeler les choses par leur nom, sont le produit de calculs esthétiques que l’habileté de l’auteur ne parvient pas toujours à dissimuler.

831. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

L’Être universel vit sa vie, élabore sa conscience, emporte les mondes à travers son infini mouvant, sans autre but que de se prouver à lui-même qu’il existe. […] Puis dans quel but tant de cabrioles ? […] Si fait, puisque tes pratiques, tu l’avoues, ont pour but de t’assurer, avant tout, une place en paradis. […] Rien ne m’effraye. — Confiant en moi-même, je marche les yeux fixés sur le but à atteindre. […] Notre but est d’attirer à nous le plus grand nombre possible d’intelligences.

832. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

Et pourtant lorsque Nisard en avait, ici, aux poètes romantiques, nous croyons qu’il se trompait et que ses traits érudits, barbelés de latin, tombaient à côté du but. […] Raisonnable et traditionnel, Fromentin voit comme but et limite de l’orientalisme une idée de l’Orient ainsi que Cabat devant la Seine rêvait à une idée du fleuve. […] Il faut comprendre que son élément, c’est la lumière ; que son moyen d’exaltation, c’est sa palette ; son but la clarté et l’évidence des choses. » Le but de la Montée au Calvaire, de l’Élévation sur la Croix, c’est la clarté et l’évidence du dogme et du sentiment chrétiens. […] Cela même serait un but qui le ferait déchoir de l’inutilité parfaite où il s’est spécialisé. […] Il importait peu que ce fut tantôt avec désespoir et tantôt avec extase qu’Amiel sentît couler en lui une vie qui ne servait à rien, se connaître en lui une âme qui existait sans but.

833. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

Et voilà ce qui fait ressembler son œuvre au but que nous poursuivons. […] Il va droit comme la flèche ; tout ce qui la fait dévier lui fait manquer son but. […] Vers quel but ? […] Dans quel but ? […] L’art doit concourir à ce but.

834. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

L’unité de direction, le but, un but précis, graduel, c’est encore ce qui mène le plus loin et le plus haut dans les arts. […] Saint-Arnaud, dès les premiers mois de son installation, nous le montre à l’œuvre, positif, effectif, infatigable, allant en tout au résultat sans charlatanisme : Passionné pour la guerre et les combats, il préfère, aux bulletins qu’il pourrait rechercher, la poursuite d’un but utile au pays.

835. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIe entretien. L’Arioste (2e partie) » pp. 81-160

« Je ne saurais trop insister pour vous faire bien comprendre que votre mission n’a et ne peut avoir pour le moment d’autre but que d’assurer la sécurité personnelle du saint-père, et, dans un cas extrême, sa retraite momentanée sur le territoire de la République. […] « Si le pape s’est embarqué, votre mission étant évidemment terminée, je n’ai pas besoin de vous dire que vous aurez à contremander l’expédition qui avait pour but de l’appuyer. […] J’ajoute que cette brigade, placée dans un tout autre but, et depuis longtemps sous la direction du général Mollière, ne quitta pas la France, et que pas un soldat ne fut embarqué.

836. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

Et, puisque ces sortes d’études ont pour but de nous rendre sages, il me paraît que je ne les ai point démenties par ma conduite, soit dans mes fonctions publiques, soit dans mes propres affaires. […] le but sera atteint si mes projets s’exécutent. […] C’est donc une folie que de vouloir gouverner les hommes, puisqu’on ne peut dompter les emportements aveugles et terribles de la multitude ; c’est se dégrader que de descendre dans l’arène avec des adversaires sortis de la fange, qui n’ont pour toutes armes que les injures et tout cet arsenal d’outrages qu’un sage ne doit pas supporter : comme si les hommes de bien, ceux qui ont un beau caractère et un grand cœur, pouvaient jamais ambitionner le pouvoir dans un but plus légitime que de secouer le joug des méchants, et ne point souffrir qu’ils mettent en pièces la république, qu’un jour les honnêtes gens voudraient enfin, mais vainement, relever de ses ruines ! 

837. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juin 1885. »

N’auriez-vous pas, parlons franchement, quelque but moins avouable ? […] L’esprit français, c’est l’esprit clair, précis, rapide au but ; soyez puissant, hautain, sublime — et net. […] Le thème, étrangement simple, du morceau final, utilisé ailleurs encore par Beethoven, lui paraissait pouvoir servir à ce but comme une forme fondamentale ; mais ce qu’il construit sur ce thème, dans la suite du développement mélodique, appartient encore trop à ce genre (si particulièrement élargi et développé par Beethoven) du cantabile sentimental de Mozart, pour que le morceau entier puisse déjà nous paraître comme un résultat acquis dans la voie que nous considérons.

838. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre premier. La sensation, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre premier. La sensation »

Tous les organes des sens sont des moyens de faire accomplir les mouvements de fuite ou de poursuite, qui eux-mêmes ont pour but dernier la fuite de la douleur et la poursuite du plaisir, c’est-à-dire l’appétition. […] Si, de plus, n’avaient pas été faites quelques observations fortuites, comme celle de la force attractive ou répulsive développée par le frottement de la résine, nous n’aurions eu aucun pressentiment de l’électricité, « de cette force qui, dit Nægeli, joue un si grand rôle dans la nature inorganique et organique, qui provoque les affinités chimiques, qui, dans tous les mouvements moléculaires des êtres organisés, a probablement une action plus décisive qu’aucune autre force, de laquelle enfin nous attendons les plus importants éclaircissements pour expliquer les faits physiologiques et chimiques encore à l’état d’énigmes. » Nos sens n’ont donc eu nullement pour « but » de nous procurer la connaissance des phénomènes naturels, ni de nous éclairer sur ce que Platon appelait leur « essence » intime. […] Enfin, si les réactions motrices sont plus énergiques encore et plus émotionnelles, elles intéressent alors assez la volonté générale de l’être organisé pour provoquer des mouvements musculaires déterminés, avec le but, conscient ou inconscient, d’écarter ou de rapprocher l’organisme de l’objet senti.

839. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre deuxième. L’idée de l’espace. Son origine et son action »

Bain, à son tour, dit que la caractéristique même de l’espace est d’être « un but pour le mouvement » ; d’où il conclut, entre autres choses, que la distance et même la grandeur ne peuvent être « des attributs originels de la sensibilité des yeux ». […] Le but dans l’espace, en effet, est un but pour la volonté.

840. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Cette description, savante et précise dans ses moindres détails, semble d’abord n’avoir d’autre but qu’elle-même ; vous la croiriez faite uniquement pour montrer le talent du peintre, qui, certainement, s’y oublie. […] Pour lui, c’est le hasard qui est le véritable auteur du monde ; du hasard naissent des combinaisons plus ou moins passagères, qui sont des habitudes ; ces habitudes, nous les prenons pour des lois ; mais il n’y a point de lois véritables, et, de même qu’il n’y a point de fins ou de buts, il n’y a point de causes : Nature, tu n’es rien qu’un mélange sans art : Car celui qui te crée a pour nom le hasard. […] Ses caprices n’ont point de but et point de cause.

841. (1856) Cours familier de littérature. I « IIIe entretien. Philosophie et littérature de l’Inde primitive » pp. 161-239

VI Singulier système qui, pour appuyer une théorie de perfectibilité sans limites, commence la créature qu’elle veut anoblir par la brute ; qui déshérite Dieu de son œuvre la plus divine ; qui prend pour créateur, à la place de Dieu, une pelletée de boue dans un marécage, un peu de chaleur putride dans un rayon de soleil, un peu de mouvement sans but emprunté aux vents et aux vagues, puis un instinct emprunté à une sourde puissance végétative, puis une intelligence empruntée au temps qui développe et qui détruit tout ! […] Nous croyons que cet instinct a été en effet donné à l’homme par son auteur pour une double fin : d’abord comme une impulsion divine à travailler, pendant qu’il vit, à son perfectionnement individuel, perfectionnement dont le but sera atteint par lui dans un autre monde, et non dans celui-ci. […] XIV Il en est de cet instinct du progrès et du bonheur indéfinis de l’humanité sur la terre, comme il en est d’un autre instinct que Dieu a donné invinciblement à l’homme ; instinct que l’homme sait parfaitement illusoire ici-bas, et qui cependant le pousse invinciblement aussi à tendre toujours vers un but dont il ne se rapproche jamais : nous voulons parler de l’aspiration au bonheur complet et permanent sur la terre.

842. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIIe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset » pp. 409-488

L’amitié solide, l’amour respectueux, la liberté d’esprit, la grâce de l’entretien, l’oisiveté d’habitude, le travail par amusement, la plaisanterie sans malice, la poésie sans prétention, la recherche du plaisir décent comme but d’une vie où rien n’est certain que la mort, le doute nonchalant sur les vérités morales, la philosophie des sens en un mot assaisonnée seulement des délicatesses du bon goût, prolongèrent jusqu’à quatre-vingt-dix ans les années toujours saines et l’esprit toujours productif du philosophe français. […] Charmante plaisanterie, triste symbole d’une foi absente qui ne donne aucune unité, aucune spiritualité, aucun but grandiose, aucune tendance même perceptible au génie ; ces mœurs délicieuses, mais toujours légères, sont des osselets avec lesquels un enfant joue sur les deux seuils de la vie. […] Mais si l’on entend par caractère cette solidité de membres, cet aplomb de stature, cette énergie de pose qui font qu’un homme se tient debout contre les vents de la vie et qu’il marche droit à pas réguliers dans les sentiers difficiles, vers un but humain ou divin placé au bout de notre courte carrière humaine ; non, Alfred de Musset ne reçut pas de la nature et ne conquit pas par l’éducation ce caractère, seul lest qui empêche le navire de chavirer dans le roulis des vagues.

843. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Taillé dans un marbre plus dur, Edgar Poe but son calice de feu avec une frénésie plus froide. […] et en supposant qu’on puisse l’employer heureusement dans un but de littérature, l’emploi de cette faculté ne tombe-t-il pas dans la rouerie ? […] A nos yeux, à nous qui ne croyons pas que l’Art soit le but principal de la vie et que l’esthétique doive un jour gouverner le monde, ce n’est pas là une si grande perte qu’un homme de génie ; mais nul n’est dispensé d’être une créature morale et bienfaisante, un homme du devoir social.

844. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — II. (Suite.) » pp. 346-370

Son but, par cette quantité d’idées et de vues qu’il essayait chaque jour, son vœu du moins bien évident était de clore la Révolution le plus tôt possible, d’arriver à un gouvernement régulier, à l’ordre ; mais les hommes manquaient encore aux choses, et il est souvent infligé aux sociétés en détresse de les désirer longtemps. […] Vous aviez grande raison en principe, mais vous étiez en erreur de fait ; car je faisais ce que vous demandiez que je fisse. » — L’article auquel Bonaparte faisait allusion, et qui était dans le Journal de Paris du 25 juillet 1796, avait pour but de signaler le grand changement survenu dans les rapports du gouvernement et des généraux.

845. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — II. (Fin.) » pp. 180-203

Il lui fallut, pour arriver au but de ses désirs, vaincre l’incertitude et les tergiversations du prince de Condé, le plus insaisissable et le plus maniaque des hommes. […] Quand sa fureur l’agite, ceux qui ne le connaissent point et qui l’entendent parler croient qu’il va tout renverser, mais ceux qui le connaissent savent que ses menaces n’ont point de suite, et que l’on n’a à appréhender que les premiers mouvements de cette fureur ; ce n’est pas qu’il ne soit assez méchant pour faire beaucoup de mal de sang-froid, mais c’est qu’il est trop faible et trop timide, et on ne doit craindre que le mal qu’il peut espérer de faire par des voies détournées, et jamais celui qui se fait à force ouverte… Il est avare, injuste, défiant au-dessus de tout ce qu’on peut dire ; sa plus grande dépense a toujours été en espions ; il ne peut pas souffrir que deux personnes parlent bas ensemble, il s’imagine que c’est de lui et contre lui qu’on parle… Dans les affaires qu’il a, il se sert tantôt de discours captieux et tantôt de discours embarrassés pour cacher le but où il veut aller, croyant être bien fin… Jamais il ne va au bien de l’affaire, soit qu’il soit question de l’État, de sa famille ou d’autres gens ; il est toujours conduit par quelque sorte d’intérêt prochain ou éloigné, et, au défaut de l’intérêt, par la haine, par l’envie ou par une basse politique.

846. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

Rien de plus bête que l’homme qui vit sans but. […] Quand le génie frappe, il touche au but comme la foudre, tandis que l’ignorance tombe en tous lieux comme une grêle malfaisante.

847. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE BALZAC (La Recherche de l’Absolu.) » pp. 327-357

Au reste, malgré les trente ouvrages promis et donnés par l’auteur du Vicaire, aucune œuvre suivie n’entrait alors dans sa pensée ; il écrivait au hasard, à foison, sans but ni souci littéraire. […] Au milieu de toutes ces merveilles qu’il gaspille, de ces trésors qu’il dissipe en fumée, Balthazar Claës, qui croit se mettre au courant de la science moderne en poursuivant le but mystérieux des Nicolas Flamel et des Arnauld de Villeneuve, est proclamé à tout instant homme de génie, et ses actes déréglés ou même cruels envers sa famille nous sont donnés comme la conséquence inévitable d’une intelligence supérieure en désaccord avec ce qui l’entoure.

848. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

Vinet, dans sa modestie, n’a voulu et n’a cru faire que cela, et il semble craindre même de n’avoir pas atteint son but : il l’a, selon nous, dépassé de beaucoup, ou mieux, surpassé. […] L’impression (et je ne parle d’abord que de l’impression humaine, philosophique et littéraire) qu’on en retire est celle de quelque chose d’aimable, de modéré, de sensé et d’accessible ; tout y est simple, sans un ornement ni une digression de luxe, et allant droit au but.

849. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — I »

Ils montent par degrés, parcourent les intervalles et ne s’élancent pas au but du premier bond ; leur génie grandit avec le temps et s’édifie comme un palais auquel on ajouterait chaque année une assise ; ils ont de longues heures de réflexion et de silence durant lesquelles ils s’arrêtent pour réviser leur plan et délibérer : aussi l’édifice, si jamais il se termine, est-il d’une conception savante, noble, lucide, admirable, d’une harmonie qui d’abord saisit l’œil, et d’une exécution achevée. […] Quoi qu’il en soit, le but moral de Phèdre est hors de doute ; le grand Arnauld ne put s’empêcher lui-même de le reconnaître, et ainsi fut presque vérifié le mot de l’auteur « qui espéroit, au moyen de cette pièce, réconcilier la tragédie avec quantité de personnes célèbres par leur piété et par leur doctrine. » Toutefois, en s’enfonçant davantage dans ses réflexions de réforme, Racine jugea qu’il était plus prudent et plus conséquent de renoncer au théâtre, et il en sortit avec courage, mais sans trop d’efforts.

/ 1848