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1218. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 44-63

Mais il a beau faire, il en tient, lui, à son corps défendant et jusqu’aux moelles ; il est bien du fonds gaulois, du plus gras et du plus dru ; quoique, sous l’influence combinée de Bossuet et de M. de Maistre et sous le coup des événements, il ait eu ses inspirations éloquentes, il n’est complètement original que quand il coupe en pleindans sa première veine. — Car des pages même comme celle que je viens d’indiquer sur Saint-Simon, si vertes, si amères d’accent et où la verve, après tout, ne demande qu’à s’étaler insolemment au soleil, cela n’a rien d’épiscopal : c’est du mâle gaulois, c’est du bon Régnier en prose, c’est d’un rude et vaillant compère.

1219. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Lettres de Madame de Sévigné »

Le résultat final des soins et des peines infinies qu’auront pris, cette fois, tant d’hommes de mérite autour d’elle et autour de ses Lettres, sera donc de nous offrir non seulement un écrivain plus naturel, mais une personne plus originale et plus semblable à la vraie, une Sévigné plus Sévigné qu’elle ne l’avait jamais été jusqu’ici.

1220. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

Mais il importe de discerner pour chaque auteur célèbre son vrai public naturel, et de séparer ce noyau original qui porte la marque du maître, d’avec le public banal et la foule des admirateurs vulgaires qui vont répétant ce que dit le voisin.

1221. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

Son diable est issu de mon Méphistophélès, mais ce n’est pas une imitation ; tout est entièrement original, nouveau, et tout est serré, solide et spirituel.

1222. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

M. de Senfft veut bien convenir que dans l’entretien mémorable tel qu’il fut publié, si l’on s’écarta plus d’une fois des paroles originales qu’il avait transmises, on resta assez en accord avec la vérité pour le fond.

1223. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

Singulier mélange, en effet, que cet abbé de Pradt, instruit de tant de choses et qui croyait s’entendre à toutes ; homme d’Église qui l’était si peu, qui savait à fond la théologie, et qui avait à apprendre son catéchisme ; publiciste fécond, fertile en idées, en vues politiques d’avenir, ayant par moments des airs de prophète ; écrivain né des circonstances, romantique et pittoresque s’il en fut ; le roi des brochuriers, toujours le nez au vent, à l’affût de l’à-propos dans les deux mondes, le premier à fulminer contre tout congrès de la vieille Europe ou à préconiser les jeunes républiques à la Bolivar ; alliant bien des feux follets à de vraies lumières ; d’un talent qui n’allait jamais jusqu’au livre, mais qui avait partout des pages ; habile à rendre le jeu des scènes dans les tragi-comédies historiques où il avait assisté, à reproduire l’accent et la physionomie des acteurs, les entretiens rapides, originaux, à saisir au vol les paroles animées sans les amortir, à en trouver lui-même, à créer des alliances de mots qui couraient désormais le monde et qui ne se perdaient plus ; et avec cela oublieux, inconséquent, disparate, et semblant par moments sans mémoire ; sans tact certainement et sans goût ; orateur de salon, jaseur infatigable, abusant de sa verve jusqu’à l’ennui ; s’emparant des gens et ne les lâchant plus, les endoctrinant sur ce qu’ils savaient le mieux ; homme à entreprendre Ouvrard sur les finances, Jomini sur la stratégie, tenant tout un soir, chez Mme de Staël, le duc de Wellington sur la tactique militaire et la lui enseignant ; dérogeant à tout instant à sa dignité, à son caractère ecclésiastique, avec lequel la plupart de ses défauts ou, si l’on aime mieux, de ses qualités se trouvaient dans un désaccord criant ; un vrai Mirabeau-Scapin, pour parler comme lui, un archevêque Turpin et Turlupin.

1224. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

Lui, Bossuet, il n’était pas versé pour son compte dans les textes hébreux originaux, et il ne savait ces choses que de seconde main et par les Pères.

1225. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Duveyrier, qui est un auteur dramatique des plus distingués, qui connaît la mise en scène et l’art du dialogue, qui a excellé à faire parler des personnages naïfs et originaux, ait su donnera ce qu’il lisait l’accent, le ton, la physionomie, et que dans un seul monologue il ait diversifié les rôles.

1226. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires du comte Beugnot »

J’en dirai plus ou moins de même des autres portraits dont les originaux sont peu flattés, — et du portrait de l’abbé Louis qui y paraît dans tout le bourru de son humeur sans y gagner du côté de la franchise, — et des esquisses si bien ménagées de M. de Talleyrand, de qui M. 

1227. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite.) »

Cependant, comme le comte de Clermont a été de l’Académie française, il n’est pas indifférent de mettre, ne fût-ce qu’en note, un échantillon de son orthographe ; ainsi le billet qu’on vient de lire est orthographié dans l’original de la façon suivante : « A Cedan le 7 avrille 1747.

1228. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. BRIZEUX (Les Ternaires, livre lyrique.) » pp. 256-275

Le trait vraiment original du recueil me paraît être (qu’on me passe le terme) au point d’intersection, dans l’âme du poëte, de ses souvenirs de Bretagne et d’Italie.

1229. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Léonard »

L’imitation qu’il a donnée du Village détruit, de Goldsmith, a de l’agrément, de l’aisance ; et offre même une sorte de relief, si on évite de la comparer de trop près avec l’original.

1230. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Gaston Paris et la poésie française au moyen âge »

on ne le saura jamais) notre développement original.

1231. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre III. Grands poètes : Verlaine et Mallarmé, Heredia et Leconte de Lisle » pp. 27-48

Il est aussi quelques autres, avertis combien la forme de Mallarmé le traduit fidèlement, simplement, qu’il est modèle de pensée libre, hardie, harmonieuse, d’expression originale, non professeur d’un procédé.

1232. (1890) L’avenir de la science « XII »

Non ; car ils ont fait figure ; sans eux les lignes auraient été maigres et mesquines ; ils ont servi à ce que la chose se fit d’une façon luxuriante ; ce qui est plus original et plus grand.

1233. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 janvier 1887. »

Ses inspirations lui appartiennent : sa mélodie, toujours abondante, expressive, originale, atteint souvent à une ampleur extraordinaire.

1234. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre XI. Quelques philosophes »

Les plus grands et les plus originaux des philosophes allemands furent professeurs en quelque université ; en France, connaissez-vous un professeur qui ait la puissance de penser ou le courage de ne point répéter ?

1235. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Poésies nouvelles de M. Alfred de Musset. (Bibliothèque Charpentier, 1850.) » pp. 294-310

Je suis certain que, doué comme il l’était d’une force originale et d’un génie propre, même en débutant plus simplement et sans viser tant à se singulariser, il fût bientôt arrivé à se distinguer manifestement des poètes dont il repoussait le voisinage, et dont le caractère sentimental et mélancolique, solennel et grave, était si différent du sien.

1236. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

On le conçoit sans peine, même lorsqu’on n’en aurait pas la preuve d’après les originaux.

1237. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Parlant, il y a quelque temps, d’Horace Walpole dans la Revue des deux mondes, et jugeant le roman et la tragédie que s’avisait de composer à un certain jour cet esprit distingué, M. de Rémusat y reconnaît bien quelques mérites d’idée et d’intention, mais il n’y trouve pas le vrai cachet original, et il ajoute avec je ne sais quel retour sur lui-même : « Le mot du prédicateur : Faites ce que je vous dis, ne faites pas ce que je fais, est l’éternelle devise des esprits critiques qui se sont mêlés d’inventer. » Si M. de Rémusat a, en effet, pensé à lui-même et à ses essais de drames en écrivant ce jugement, il a été trop sévère ; je suis persuadé que, pour être artiste, c’est-à-dire producteur d’ouvrages d’imagination, pleins d’intérêt, il ne lui a manqué que d’être un peu moins nourri dès son enfance dans le luxe fin de l’esprit, et d’être aiguillonné par la nécessité, cette mère des talents.

1238. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Les romans de M. Edm. de Goncourt » pp. 158-183

Dans ce livre, M. de Goncourt a de nouveau consigné toutes les originales beautés de son art, l’acuité de sa vision, la délicatesse de son émotion et la science de sa méthode, la sorte particulière de style qui procède de cette sorte particulière de tempérament.

1239. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre I : Rapports de cette science avec l’histoire »

Sans doute les événements extérieurs ont un éclat qui frappe tous les yeux ; mais pour ceux qui aiment la pensée, quel plus grand événement qu’une grande idée, une vue originale sur la nature des choses ?

1240. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre douzième. »

Si ces principes, connus ensuite de Louis XIV, plus de quinze ans après, occasionnèrent la disgrâce de Fénélon, on peut juger de la manière dont La Fontaine aurait été reçu, s’il se fût avisé d’imiter jusqu’au bout l’original italien.

1241. (1876) Du patriotisme littéraire pp. 1-25

De notre temps si la Prose s’altère sur quelques points, c’est pour s’enrichir par tant de conquêtes : rappelons-nous la comédie élargissant son domaine, le roman agrandi suscitant ses véritables chefs-d’œuvre, l’histoire faisant de son champ jadis étroit tout un monde d’explorations et de découvertes, la critique vraiment fondée et promue à la dignité d’un genre original où cinq à six hommes supérieurs ont véritablement créé, l’érudition réconciliée avec le beau style et devenue l’une des provinces de la haute littérature, la politique rendant parfois de mauvais services à la pureté de la langue, mais produisant aussi dans la presse et à la tribune d’admirables écrits de polémique et de non moins admirables discours, la philosophie et la religion enfin pour de nouveaux besoins et avec de nouveaux interprètes se créant aussi une langue nouvelle.

1242. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 13, qu’il est des sujets propres specialement pour la poësie, et d’autres specialement propres pour la peinture. Moïens de les reconnoître » pp. 81-107

Tout le monde connoît le tableau de Raphaël, où Jesus-Christ confirme à saint Pierre le pouvoir des clefs en présence des autres apôtres : c’est une des pieces de tapisseries de la tenture des actes des apôtres que le pape Leon X fit faire pour la chapelle de Sixte IV et dont les cartons originaux se conservent dans la galerie du palais que Marie Stuard princesse d’Orange fit bâtir à Hamptoncourt.

1243. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 16, des pantomimes ou des acteurs qui joüoient sans parler » pp. 265-295

La copie est toujours moins animée que son original.

1244. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

Nous ne savons pas à quel point l’Angleterre, dupe de Chatterton une première fois et de Macpherson une seconde, croit à la réalité de l’œuvre posthume attribuée au plus original de ses conteurs ; et que nous importe !

1245. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre III. Les explications anthropologique, idéologique, sociologique »

Et en effet, il est impossible de fournir de la race une définition précise, et de lui assigner une action originale, — si on ne la tient pour un ensemble de qualités fondées dans le corps, comme telles relativement immuables et transmissibles héréditairement.

1246. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre III. Contre-épreuve fournie par l’examen de la littérature italienne » pp. 155-182

La Révolution française, la pensée allemande, et surtout le travail original de nombreux savants, critiques et patriotes italiens ont transformé l’esprit général ; il y a maintenant en Italie une grande espérance, héroïque et joyeuse chez les uns, douloureuse chez les autres par contraste avec la réalité de la domination étrangère.

1247. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Les livres Mallarmé est un poète français, avec le degré de spontanéité, d’ignorance originale qu’implique une nature de poète. […] Il y a chez lui, comme chez Verlaine ou Rimbaud, une sensibilité d’enfant, originale, un jour lavé de création. […] C’est de façon un peu arbitraire que l’on peut rattacher à l’impressionnisme la peinture originale de Manet. […] De sorte que dans cet art, et généralement dans l’ensemble du ballet, Mallarmé goûte comme la refusion toujours neuve, vierge, imprévisible, de la durée selon des rapports originaux. […] Mallarmé tenue sur son passé cette porte d’or, et de rares sonnets épars, la Prose pour des Esseintes, ramèneront intacte et fidèle la forme originale d’images devant laquelle, peut-être, après son Faune, il avait un moment paru hésiter.

1248. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

En effet, en quel genre ces abregés n’ont-ils pas fait disparoître une infinité d’originaux ? […] Il faut pourtant dire en faveur des abregés, qu’ils sont commodes pour certaines personnes qui n’ont ni le loisir de consulter les originaux, ni les facilités de se les procurer, ni le talent de les approfondir, ou d’y démêler ce qu’un compilateur habile & exact leur présente tout digéré. […] Tableau original. […] Dans la plûpart des Auteurs modernes qui ont écrit en Grec ou en Latin, on trouve des phrases qui sont analogues au tour de leur langue naturelle, mais qui ne sont pas conformes au tour propre à la langue originale qu’ils ont voulu imiter. […] c’est-à-dire, que Raphaël avoit fait l’original auparavant.

1249. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

Dans la préface de Delphine, il est dit un mot du Génie du Christianisme, comme d’un ouvrage dont ses adversaires mêmes doivent admirer l’imagination originale, eclatante, extraordinaire. […] On a cru reconnaître chez M. de Lebensei, dans ce gentilhomme protestant aux manières anglaises, dans cet homme le plus remarquable par l’esprit qu’il soit possible de rencontrer, un rapport frappant de physionomie avec Benjamin Constant : mais il n’y aurait en ce cas qu’une partie du portrait qui serait vraie, la partie brillante ; et une moitié, pour le moins, des louanges accordées aux qualités solides de M. de Lebensei ne pouvait s’adresser à l’original présumé qu’à titre de regrets ou de conseils54. […] Zacharias Werner, l’un des originaux de cette cour, et dont on jouait l’Attila et les autres drames avec grand renfort de dames allemandes, Werner écrivait vers ce temps (1809) au conseiller Schneffer (nous atténuons pourtant deux ou trois traits, auxquels l’imagination, malgré lui sensuelle et voluptueuse, du mystique poëte, s’est trop complu) : « Mme de Staël est une reine, et tous les hommes d’intelligence qui vivent dans son cercle ne peuvent en sortir, car elle les y retient par une sorte de magie. […] L’original d’Ellénore était Mme Lindsay, celle que M. de Chateaubriand, dans ses Mémoires, appelle la dernière des Ninons. — Ce qui pourtant ne veut pas dire qu’il ne s’y soit glissé plus d’un trait applicable à la liaison de l’auteur et de Mme de Staël.

1250. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre III. La Révolution. »

Ni verve, ni véhémence, point d’esprit, point d’imagination, nulle idée originale et brillante, nulle philosophie, des citations d’érudit vulgaire, des énumérations de manuel. […] C’est dans ce domaine que Shaftesbury, Hutcheson, Price, Smith, Ferguson et Hume lui-même travaillent de préférence ; c’est là qu’ils ont trouvé leurs idées les plus originales et les plus durables. […] We are far from thinking you capable of a direct deliberate purpose to invade those original rights of your subjects on which all their civil and political liberties depend. […] As to the share of power, authority, direction, which each individual ought to have in the management of the state, that I must deny to be amongst the direct original rights of man in civil society.

1251. (1923) Critique et conférences (Œuvres posthumes II)

Barbey d’Aurevilly, ainsi que ses œuvres de critique et de polémique, se plaisent à lui reconnaître un style, une vraiment manière à lui, style de race, certes, et manière originale ! […] Ainsi Roger Marx, le fin et subtil critique que des ouvrages suggestifs (tels son Henri Regnault, son Chéret, telles ses études sur l’Estampe originale et la Gravure en médailles), et tant d’articles du Voltaire faisant autorité ont placé si haut dans l’élite, a profité de la splendide occasion offerte pour, dans une conférence donnée au Congrès de la Société centrale des architectes français, et tout récemment éditée en un séduisant volume, glorifier l’activité humaine déployée en ces circonstances périodiques, et se féliciter tout particulièrement pour notre pays des progrès accomplis depuis 1878 dans la décoration et l’art industriel. […] Il fut d’abord tout romantisme, sans nuance aucune que pût revendiquer le « Parnasse contemporain », puis s’empara tellement du symbolisme dont il reconnut d’ailleurs plus tard, l’un peu vide, l’un peu creuse définition, et qu’il remplaça par l’École romane à laquelle il eut la chance méritée de recruter de beaux talents originaux dans la discipline acceptée, dont Reynaud, Duplessys, et plus récemment Raymond de la Tailhède. […] The brochure Tue-la, however, brought me back to my original ideas concerning the febrility of this man, that the apparent serenity of the numerous gifts spread through them in the form of genius and subtlety of mind, was to me up till then sacred, impassable, and it, the brochure, brought back to my memory the cruel pamphlet written with a good motive, so brutal in its frankness, full of insupportable hypocrisy, respecting the very sensitive and good man necessarily irritable, somestimes imprudent when it was a matter of esteem or love.

1252. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

Il devra enseigner encore le culte du progrès, et c’est ici que la morale de Saint-Simon prend jusqu’à un certain point un caractère original. […] Mais ses lectures étaient originales. […] Suivons-le maintenant dans le développement successif, très incertain, mais finalement assez original et assez intéressant de son esprit. […] Ce n’est pas encore un livre très original. […] Nous arrivons au temps où, sans jamais être arrivé à la clarté d’esprit, à la maîtrise de sa pensée, il est pourtant un philosophe original et devient enfin quelqu’un.

1253. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

Que l’on se représente, au contraire, un Schopenhauer qui n’aurait pas été l’auteur de livres étonnants, et l’on n’aurait devant soi qu’un original repoussant que ses mœurs devaient exclure de toute société honnête et que son délire de la persécution désignait pour l’asile d’aliénés. […] Habiles à s’approprier les extériorités, plagiaires et pasticheurs déterminés, ils s’empressent autour de chaque manifestation originale, qu’elle soit maladive ou saine, et se mettent sans perdre de temps à en fabriquer des contrefaçons. […] Tous les observateurs établissent que le dégénéré supérieur est fréquemment « original, brillant, spirituel », qu’il est incapable, il est vrai, d’activités qui réclament de l’attention et la discipline de soi-même, mais qu’il a de forts penchants artistiques. […] Le Dr Sollier cite quelques exemples caractéristiques du mode d’expression « original » d’imbéciles82. […] Lombroso cite des « originaux » qui, « comme Wigman, faisaient confectionner pour l’impression de leurs œuvres du papier orné de plusieurs couleurs sur la même page… Filon enduisit d’une couleur différente chaque page du livre composé par lui138 ».

1254. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Ou plutôt, leur rhétorique à eux, s’ils en ont une, nous paraît originale et savoureuse. […] Victor Derély nous montre bien, dans sa préface, en quoi le théâtre de Pisemsky est original. […] Stanislas Rzewuski est d’une politesse caressante et d’une humeur originale. […] Très vivant, ce premier acte, très prenant, et par des moyens d’une simplicité originale. […] L’acte suivant est d’une beauté tout à fait originale, et comme d’un tragique souriant.

1255. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Mais qu’il est original et singulier ! […] Il répète, sans nul accent personnel, les antiques banalités de la théorie individualiste : aussi peu original dans la révolte qu’il l’eût été dans la soumission, car il est né écolier. « Hélène ! […] On a dit, — et je l’ai rappelé en commençant, — que c’était déjà de l’Ibsen, et cela plusieurs années avant les œuvres vraiment originales du dramaturge de Bergen. […] C’est d’être, à un degré qui rend la chose originale en ce temps de septentriomanie, — peut-être, il est vrai, finissante, — un beau drame français, écrit en français, avec une ingénuité, une générosité, une chaleur et une clarté toutes françaises, par un Parisien de Paris. […] Et c’est là, assurément, ce qu’il y a de meilleur et de plus original dans la pièce.

1256. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

*** Et maintenant, un poète du vingtième siècle, qui n’est pas original non plus, mais qui connaît le théâtre et qui a le goût qui règne en son temps, qu’est-ce qu’il fera de la pièce d’Euripide ? […] Et, d’autre part, sur la foi de M. de la Villemarqué et de bien d’autres, on croyait généralement qu’il existait tout un théâtre breton, très original, très national, qu’il ne s’agissait que de tirer de la poudre des bibliothèques et des archives particulières. […] Et si le mot « tous les drames bretons », dont je me servais tout à l’heure, n’est pas littéralement, n’est pas mathématiquement exact, si deux ou trois drames ou comédies bretonnes n’ont pas d’originaux connus dans la vieille littérature dramatique française, on conviendra qu’il est — malheureusement, si l’on veut — très légitime de conclure que de ces deux ou trois pièces les originaux français existaient, mais ont été perdus. Il n’y a pas de théâtre breton original, voilà la découverte de M.  […] Agamemnon, Ulysse et Achille sont des caractères, et très différents et très originaux ; Iphigénie, Clytemnestre et Eriphile sont des caractères, et très différents et très intéressants tous les trois.

1257. (1907) Propos de théâtre. Quatrième série

Dieu merci, il a pris, et avec raison du reste, Claudie pour une œuvre absolument originale ; mais il n’en a pas senti la grandeur, et c’est certainement ce rare caractère qui, en elle, me frappe le plus. […] Henry Mayer a composé d’une façon très savante et très originale le rôle du docteur Kervil. […] Et de tout le théâtre qui ressortit à ce genre, la Massière est certainement la pièce la plus originale, la plus doucement gaie, la plus fine, la mieux écrite et, si je me laissais aller, j’ajouterais la mieux faite — mais je ne me laisse pas aller — que je connaisse. […] Calmettes, qui ne fait que passer, mais qui est juif — juif élégant et galant homme — des pieds à la tête ; avec Mme Simone Le Bargy, très énergique et très originale et sentant la race, sentant tout l’Orient, aventureux à la fois et têtu, dans le rôle, écrasant du reste, de « la juive » ; avec Mme Mégard enfin, d’une admirable justesse de ton dans tous ses propos et dans toutes ses attitudes. […] Cette pièce, qui, encore une fois, est toute pleine de « petits coins délicieux » et toute pétillante d’esprit, avec des mots amusants, toujours originaux, à défrayer de Nouvelles à la main un journal humoristique pendant un mois, n’en est pas moins dénuée de véritable intérêt et laisse le spectateur sur une impression incertaine et plutôt triste.

1258. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

Il produit les originaux qu’on a défigurés. […] Ces pseaumes, qui firent tant de bruit dans le temps, & qu’on comparoit à l’original, étoient bien loin d’y atteindre. […] Original en tout, il se fit des routes inconnues au Parnasse. […] Celui-ci fut obligé de lui donner un acte par lequel il reconnoissoit qu’il étoit faux que l’évêque de Juliopolis eut apposé son seing sur la pièce originale de l’oraison funèbre. […] On ne trouve pas un seul endroit à sa louange dans tous les mémoires & dans toutes les lettres en original que l’ordre séraphique voulut bien livrer aux jésuites.

1259. (1920) Action, n° 2, mars 1920

L’art de lire ne s’est pas longtemps satisfait de la simple transcription des œuvres originales. […] Le texte est daté de 1907, mais l’édition originale, parue en 1918, ne porte ni date, ni nom d’éditeur, seulement un nom d’imprimeur : Levé (Paris, rue de Rennes). […] L’édition originale, publiée aux éditions du Sablier (voir note suivante) à Genève en 1919, comprend douze bois gravés de Frans Masereel.

1260. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Cette remarque est si juste, que j’abandonne au lecteur le soin de voir combien elle concorde avec tout ce que j’ai dit déjà sur la genèse d’une œuvre originale dans un milieu qui ne lui est point favorable. […] Ce xviie  siècle, si riche en œuvres et en hommes, nous montre mieux que toute autre époque l’action combinée de trois forces souvent contraires : l’esprit général de la période (qui est épique), la tradition savante (qui enseigne le culte de la tragédie, de l’épopée, et qui donne les règles précises de ces « formes »), l’individualité (qui tend à la liberté) ; de là les résultats les plus variés, dans les œuvres de valeur relative comme dans celles de valeur absolue ; par exemple : le moule rigide étouffant l’esprit (épopée) ; la forme nouvelle et vivante (roman) ; la forme vidée (lyrisme) ; la forme en conflit avec le contenu (tragédie romanesque), mais galvanisée par le génie héroïque (Corneille) ; l’art suprême, original, s’harmonisant avec la tradition savante, méconnu du public (Racine) ; ou se créant une forme personnelle (La Fontaine) ; l’individualité du précurseur, arrêtée à mi-chemin, révélant un monde en fait, et un autre en puissance (Molière). […] Il n’a fait œuvre d’art vraiment originale et durable que dans ses Lettres et surtout dans ses Contes.

1261. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Il a profité pourtant des écrits originaux de ce philosophe qui aurait pu se passer d’être charlatan ; l’idée d’Adam, l’homme universel, et d’Ève qui est la faculté volitive d’Adam, lui a probablement été suggérée par Fabre. […] Ses lettres sont un miroir fidèle de sa singulière nature, et, avec celles de Mathieu de Montmorency, elles font la partie la plus originale du livre18 ; mais elles ont surtout de la valeur par l’ensemble, et plutôt comme expression du beau naturel dont elles sont le témoignage que par le détail des anecdotes et des événements.

1262. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DE LA MÉDÉE D’APOLLONIUS. » pp. 359-406

On dit souvent qu’il y a dans Virgile beaucoup de traits du génie moderne, et qu’il demeure par là original entre les Anciens. […] Nous avons tâché de remettre en lumière quelques traits du vieil Alexandrin, essentiels, originaux, passionnés avec grâce, et qui auraient dû, ce semble, maintenir son nom avec plus d’honneur dans le voisinage de ces deux beaux noms.

1263. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre premier. Les caractères généraux et les idées générales. » pp. 249-295

. — Jusqu’ici, rien d’original ni de supérieur ; tout cerveau de mammifère est capable d’associations pareilles ; un renard qui saisit un lapin, a certainement imaginé d’avance le cri aigu et sec que pousse le lapin ; un chien de chasse qui entend le rappel d’une perdrix, imagine certainement la forme visuelle de la perdrix dans l’air, et, quant à la reproduction instinctive du son entendu, on connaît les perroquets et plusieurs autres espèces d’animaux imitateurs. […] Mais le type original se manifeste par des rapports fixes, par des retours subits, par mille traits incontestables, et l’idée de la feuille, dégagée de toutes les impressions sensibles, épurée, portée par l’abstraction énergique bien loin au-dessus de l’expérience vulgaire, n’est plus que l’idée presque géométrique d’un cycle d’éléments végétaux qui, à travers toutes les formes et tous les emplois imaginables, gardent leur ordre primordial. — Pareillement, chez les animaux, à travers toutes les diversités de structure et d’office, on trouve dans toute la classe des mammifères un même plan de squelette, dans toute la classe des crustacés, comme dans toute celle des insectes, un même plan des segments, de la bouche et des membres ; et ce plan est si tenace que, chez plusieurs espèces, on voit subsister ou apparaître, pour témoigner de sa présence, des dispositions ou des pièces inutiles ; une suture, une dentition, un ongle, un bourrelet osseux, des organes passagers ou rudimentaires le rendent visible en présentant son mémorial transitoire ou son reliquat survivant.

1264. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIIe entretien. Littérature américaine. Une page unique d’histoire naturelle, par Audubon (1re partie) » pp. 81-159

XXI Il est bien vrai que la littérature des États-Unis avait eu, avant Audubon, quelques essais d’histoire d’un mérite relatif réel, un germe de poète dans un homme distingué mais non original, enfin deux romanciers dans Washington Irving et dans Cooper, dont les ouvrages, imités heureusement de Walter Scott, l’Homère écossais, ont fait sensation il y a vingt-cinq ans en Europe. […] Plus mes oiseaux étaient mal dessinés et mal peints, plus les originaux me semblaient admirables.

1265. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre II. L’antinomie psychologique l’antinomie dans la vie intellectuelle » pp. 5-69

Avec les idées sociales discordantes chaque esprit ne se compose-t-il pas une unité mentale originale qui diffère de celle du voisin ? […] Tarde a eu raison de dire quelle est faite en grande partie d’imitation et que même dans les intelligences les plus originales la part de l’imitation l’emporte infiniment encore sur celle de l’invention.

1266. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

Lors même qu’il serait prouvé que le monde officiel est définitivement impuissant, qu’il ne peut rien créer d’original et de fort, il ne faudrait pas désespérer de l’humanité ; car l’humanité a des sources inconnues, où elle va sans cesse puiser la jeunesse. […] Voir l’admirable peinture de la réaction dévote du commencement du XVIIe siècle, dans Michelet, Du prêtre, de la femme, de la famille, chap. 1, et en général tout ce livre, peinture si vive et si originale des faits les plus délicats et les plus indescriptibles.

1267. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

L’œuvre d’art originale n’est autre chose que le contre-coup de ce qu’il y a de nouveau dans le présent, sur une organisation particulièrement délicate. […] Ce serait assurément la seule forme artistique répondant à ce génie allemand si fortement individualisé en notre grand Beethoven, ce créateur d’une si générale humanité, et cependant si original ; ce serait cette forme nouvelle de l’art qu’avait, jadis, le monde ancien, et qui manque, jusque maintenant, au Monde nouveau.

1268. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre premier. La sensation, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre premier. La sensation »

Les sciences de la nature transcrivent tous les phénomènes en termes de mouvement ; mais les mouvements eux-mêmes ne sont encore qu’une langue dérivée, une algèbre propre à exprimer des rapports : le fond même de la vie, l’original de l’existence échappe à toutes ces translations mécaniques et ne se saisit qu’en termes de l’ordre mental. […] Si les partisans de la chimie mentale n’ont point le droit d’admettre une entière identité de composition entre l’excitation physiologique et la sensation psychologique, les adversaires de la chimie mentale, eux, n’ont pas le droit d’admettre qu’à des conditions complexes d’excitation réponde une sensation simple, sous prétexte que cette sensation est particulière et spécifique, car il n’y a rien de plus original et de plus spécifique qu’un composé très complexe.

1269. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1884 » pp. 286-347

Ils ne veulent pas, ces bons critiques, — et cela avec une colère enfantine, ils ne veulent pas de génies, d’esprits originaux. […] Dans cette originale pose, elle conte au petit Jacques, assis à côté d’elle, dans un fauteuil de paille, elle conte une de ces histoires merveilleuses, qu’elle imagine si joliment.

1270. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Richepin, il n’y a de personnel et d’original que le degré de grossièreté auquel il a poussé le sentiment matérialiste252. […] ) Coppeé est bien l’original, en effet, de ce « fin poète » Olivier ; et frappât-il, comme lui,                  … sur l’épaule, ma foi !

1271. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — I. Faculté des arts. Premier cours d’études. » pp. 453-488

Ses Synonymes 57 sont un petit chef-d’œuvre original de finesse, de bon goût et de morale. […] Rendre cette page traduite dans la langue de l’auteur, et comparer sa traduction avec le texte original.

1272. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

Aussi cette version des psaumes hébreux en hexamètres grecs, plus originale que les créations factices d’Alexandrie, a-t-elle survécu à travers les temps et la barbarie. […] Sous cette forme, Grégoire de Nazianze a été poëte original ; et, dans le volumineux recueil de ses vers, y a quelques méditations élégiaques d’un charme impérissable.

1273. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Nouveaux voyages en zigzag, par Töpffer. (1853.) » pp. 413-430

Au xviie  siècle donc, il y eut la grande et originale école de paysagistes qui rendirent tour à tour la beauté italienne dans ses splendeurs et son élégante majesté, et la nature rustique du Nord dans ses tranquilles verdures, ses rangées d’arbres le long d’un canal, ses chaumines à l’entrée d’un bois, en un mot dans la variété de ses grâces paisibles, agrestes et touchantes.

1274. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

[NdA] Cette lettre de l’abbé Prévost à M. de Maurepas se trouve incluse dans une autre lettre de lui, également datée de Francfort, et adressée à Bachaumont, l’auteur des Mémoires secrets, les originaux font partie de la riche collection de M. 

1275. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Elle débute par une scène de raillerie et de satire du monde, où elle drape à ravir cinq ou six originaux qu’elle vient de quitter.

1276. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — III » pp. 476-491

Elle fut dame du palais de la reine, extrêmement à la mode, et resta toute sa vie volontaire, impétueuse, irascible, mais avec tout cela si bonne, si généreuse, si dévouée à ses amis et aux plus nobles sentiments, et puis si spirituelle, et, par suite de son extrême naturel, si parfaitement originale, qu’elle excitait constamment l’affection, l’admiration, et en même temps la gaieté.

1277. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — I » pp. 39-56

Il faut un intervalle pour s’en remettre et pour qu’il soit possible de se figurer l’original sous d’autres couleurs.

1278. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

Mais ce qu’il eut de particulier et de vraiment original entre tant de personnages ses contemporains, qui eurent également une longue vie et qui furent ainsi que lui à cheval sur deux siècles, ce fut d’être plus jeune dans la seconde moitié de sa vie que dans la première.

1279. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

Guérin avait déjà eu le temps d’être imité par d’autres poètes, qui semblaient tout originaux de cette imitation, et lui-même il n’était pas publié et mis en lumière.

1280. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance diplomatique du comte Joseph de Maistre, recueillie et publiée par M. Albert Blanc » pp. 67-83

Il donne aux moindres choses un tour original.

1281. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

S’imagine-t-on bien le caractère original et tout moderne de ce nouvel Empire, qui, sincèrement, ne repousse pas la liberté, qui possède la gloire, et en qui la tradition, dans sa chaîne auguste, se renoue déjà ?

1282. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Essai sur l’Histoire générale des sciences pendant la Révolution française. »

Saussure, dans ses ascensions alpestres, aux rares instants où il s’arrête pour décrire, et où il quitte le baromètre ou le marteau du géologue pour le crayon, est bien autrement original dans sa sobriété ; Ramond, le peintre observateur des Pyrénées, avec moins de pureté sans doute, est bien autrement ému et coloré !

1283. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’Impératrice Catherine II. Écrits par elle-même. »

Il s’est imprimé depuis quelques années à Londres une série d’ouvrages originaux et confidentiels sur la Cour de Russie au xviiie  siècle ; on en doit la publication à M. 

1284. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Etienne-Jean Delécluze »

Delécluze, qui a beaucoup écrit, n’est pourtant pas, à proprement parler, un écrivain ; mais c’est un des originaux de ce temps-ci.

1285. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Je me lasse insensiblement de cette analyse, et sans doute le lecteur aussi, d’autant plus que je n’y peux mettre les traits de talent et d’érudition originale ou bizarre que l’auteur y sème à chaque pas ; car tout ce livre est pavé, non-seulement de belles intentions, mais de cailloux de toute couleur et de pierres précieuses.

1286. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Daphnis et Chloé. Traduction d’Amyot et de courier »

C’est peut être la seule traduction dont on ait le droit de déclarer sans flatterie qu’elle est mieux que l’original et qu’elle le supplée avantageusement sans rien lui dérober.

1287. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Pourvue d’un triste mari, et n’ayant pu enlever Raoul à Sibylle, elle a pris pour amant Gandrax, le savant, l’homme de mérite, athée, il est vrai (à propos, je ne croyais pas que ce personnage d’athée proprement dit existât encore sous cette forme, à la Wolmar), — mais, à part cela, le caractère le plus droit, le plus probe, une personnalité marquante et originale, tout à fait distinguée.

1288. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite.) »

Les personnages mis en scène sont si bien venus et si vivants, ils sont nés sous une si heureuse étoile, ils sont d’une physionomie si originale et ont un caractère si marqué (y compris leurs deux montures, inséparables des deux maîtres), qu’on s’attache et qu’on s’affectionne à eux tout d’abord, indépendamment de la moralité finale que l’auteur prétend tirer de leurs actions.

1289. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite et fin.) »

C’est certainement un gentil motif d’idylle, charmant peut-être dans l’original, que celui qui se présente à nous, ainsi traduit : Mona Sur le bord de la rivière, les pieds dans l’eau, assise sur le gazon frais, un soir Mòna Daoulas était dans la prairie, sous les aulnes verts.

1290. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine. (suite et fin.) »

Ce terme de grand revient naturellement sons la plume des auteurs originaux de Port-Royal quand ils parlent de lui.

1291. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Préface »

Sainte-Beuve ne s’est détaché de la feuille officielle qu’après avoir vu de près et su d’original toutes les fautes, les légèretés et les inexpériences qui ont présidé à la dislocation de l’ancien Moniteur et à l’enfantement du nouveau Journal officiel, la vérité est que, dans aucun état de cause, il ne consentirait à rentrer à ce journal tel qu’il est constitué.

1292. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « APPENDICE. — CASIMIR DELAVIGNE, page 192. » pp. 470-486

Là où d’autres ne sont que plats copistes, il saura être original, comme il l’a déjà été ; peut-être même il le deviendrait difficilement dans tout autre genre que celui-là.

1293. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Jean-Baptiste Rousseau »

Les deux derniers vers ne seraient pas mauvais, si on ne lisait dans le texte : « Je criais vers vous comme les petits de l’hirondelle, et je gémissais comme la colombe. » On voit que Rousseau a précisément laissé de côté ce qu’il y a de plus neuf et de plus marqué dans l’original.

1294. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

Elle vous prend et vous classe sans façon pour votre part originale et neuve, si petite que vous l’ayez apportée157.

1295. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre II »

Dans ses yeux, une expression de souffrance et de misère indicible… Créer un être comme celui-ci, si intelligent, si personnel, si original, et le briser à trente-neuf ans !

1296. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre 2. La littérature militante »

À côté d’eux se range un des plus originaux et hardis esprits de ce temps, Jean Bodin226, qui, député aux États de Blois de 1576, fit refuser par le tiers les subsides réclamés pour la guerre civile.

1297. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

Mais il y a des laideurs expressives, originales, et qui ne déplaisent pas à toutes les femmes.

1298. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

L’article du Mercure où il est louangé et qui s’intitulait d’original « D’un avenir possible pour cette chère littérature française », cet article et la préface du nouveau recueil notifient la dernière pensée de M. 

1299. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre onzième. »

Les Maximes, en face de la Fronde, c’est le portrait en face de l’original ; mais si l’on regarde au-delà de ce « mélange d’écharpes bleues, de dames, de cuirasses, de violons98 », que de traits communs à toutes les époques d’agitation politique !

1300. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Peu originale en elle-même, si l’on veut dire par là qu’on pourrait avec des maximes plus anciennes la recomposer presque tout entière, la morale évangélique n’en reste pas moins la plus haute création qui soit sortie de la conscience humaine, le plus beau code de la vie parfaite qu’aucun moraliste ait tracé.

1301. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

Mon idée de Périclès ou d’une personne existante que je n’ai jamais vue, correspond à un objet réel existant ou ayant été existant dans le monde de la sensation : cependant, comme mon idée est dérivée non de l’objet, mais des paroles d’une autre personne, mon idée n’est pas une copie de l’original, mais une copie de la copie d’un autre : c’est une idée d’idée.

1302. (1785) De la vie et des poëmes de Dante pp. 19-42

L’effet qu’il produisit fut tel, que, lorsque son langage rude et original ne fut presque plus entendu, et qu’on eut perdu la clef des allusions, sa grande réputation ne laissa pas de s’étendre dans un espace de cinq cents ans, comme ces fortes commotions dont l’ébranlement se propage à d’immenses distances.

1303. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « La Religieuse de Toulouse, par M. Jules Janin. (2 vol. in-8º.) » pp. 103-120

Entre tous ces feuilletons qu’il écrit depuis tant d’années et qui lui assurent une physionomie originale dans l’histoire des journaux de ce temps-ci, on ferait un choix très agréable, très intéressant à relire et à consulter.

1304. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

s’écriait-il, allons, madame, écrivez qu’on vous renvoie l’original et les copies. » La pauvre femme ne comprenait pas bien et ne savait que répondre. — « Eh !

1305. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Souvent aussi, il avait des pensées originales et nées de lui seul.

1306. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame, duchesse d’Orléans. (D’après les Mémoires de Cosnac.) » pp. 305-321

Pour ce je ne sais quoi tant rebattu, donné si souvent en pur don à tant de personnes indignes, ce je ne sais quoi qui descendait d’abord jusqu’au fond des cœurs, les délicats convenaient que chez les autres il était copie, qu’il n’était original qu’en Madame.

1307. (1903) Zola pp. 3-31

. — L’objet matériel animé d’une vie mystérieuse, qui est peut-être l’invention la plus originale des romantiques et d’où est venue toute la poésie symbolique, est devenu chez Zola, souvent, du moins, une véritable caricature lourde, grossière et puérile et la « solennité de l’escalier » d’une maison de la rue de Choiseul a défrayé avec raison la verve facile des petits journaux satiriques. — La simplification de l’homme, réduit à une passion unique et dépouillé de sa richesse sentimentale et de sa variété sensationnelle, est devenue, chez Zola, une simplification plus indigente encore et plus brutale ; chaque homme n’étant plus chez lui qu’un instinct et l’homme descendant, en son œuvre, on a dit jusqu’à la brute et il faut dire beaucoup plus bas, tant s’en fallant que l’animal soit une brute et que chaque animal n’ait qu’un instinct.

1308. (1913) Le bovarysme « Troisième partie : Le Bovarysme, loi de l’évolution — Chapitre I. Le Bovarysme de l’individu et des collectivités »

Aussi importe-t-il de confesser ici que si l’on a pu montrer, dans la première partie de cette étude les quelques déviations subies, du fait de ce formidable phénomène de suggestion, par quelques activités originales, on ne saurait mettre ce dommage en ligne de compte avec l’extraordinaire enrichissement qui fut réalisé par la Renaissance au bénéfice de l’humanité tout entière Si le pouvoir de se concevoir autre, de s’appliquer les bienfaits de notions et d’une culture que l’on n’a pas soi-même inventées, s’exerce en cette circonstance au détriment de quelques variétés humaines particulières, il faut proclamer qu’il se montre ici, avant tout, le moyen même du phénomène humain, sans lequel ces variétés n’existeraient point.

1309. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre I : De la méthode en général »

Il est inutile de mentionner les livres si connus de Descartes16, de Pascal17, de Newton18; mais je rappellerai quelques ouvrages du xviiie  siècle, peu lus aujourd’hui, et où nos logiciens pourront trouver des détails intéressants : par exemple, la Logique 19 de Mariotte, le célèbre et ingénieux physicien, le premier ouvrage français de ce genre où la méthode expérimentale ait pris la place qui lui appartient (encore n’y est-elle pas très-nettement distinguée de la méthode géométrique) ; le Traité de l’expérience, du docteur Zimmermann, célèbre médecin du xviiie  siècle, né en Suisse et connu surtout par son beau livre sur la Solitude ; l’Essai sur l’art d’observer, de Jean Sénebier, ministre protestant de Genève, traducteur de Spallanzani, et lui-même naturaliste distingué de cette grande école de Genève qui a produit les Réaumur, les Trembley, les Bonnet, les de Saussure, les de Gandolle et tant d’autres hommes supérieurs ; les Fragments de Lesage, de Genève20, personnage original, doué d’un esprit méditatif et profond, connu surtout comme l’auteur d’une hypothèse sur la cause mécanique de la gravitation ; enfin le Discours sur l’étude de la philosophie naturelle, de W.

1310. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre I : Principe de la métaphysique spiritualiste »

Quant au caractère original et propre du spiritualisme de notre siècle, il est absolument ignoré.

1311. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre V : M. Cousin historien et biographe »

On ne peut imaginer, avant d’avoir lu les mémoires originaux, dans quel abîme de petitesses cet orgueil a précipité la noblesse.

1312. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Et, en effet, ce sonnet, s’il n’est pas très original ni très fin, est pour le moins joli. […] Je n’ai donc qu’à contredire ces deux appréciations pour paraître excessivement original. […] Lahirel est un mari jaloux, mais d’une espèce originale. […] Et c’est pourquoi il a eu, en présence du monstre, des impressions originales. […] Cette opinion est radicalement antichrétienne, mais elle n’est pas prodigieusement originale.

1313. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

Elle s’y est montrée intéressante, originale par endroits, zélée chercheuse de naturel et de vérité. […] pas des choses originales, non ! […] En réalité, l’impression produite par la représentation de cette pièce, que quelques-uns nous donnaient pour un des ouvrages les plus originaux de M.  […] Daudet eût pu être une variation fort touchante, — et assez originale, — sur le thème de la « courtisane amoureuse ». […] Ses idées ne sont pas originales ; sa parole non plus : mais ses idées sont nobles, et ses discours ont de la majesté.

1314. (1910) Propos littéraires. Cinquième série

Luchaire a voulu faire éclater vivement, à nos yeux, cette figure originale du plus grand fondateur de la papauté après Grégoire VII. […] Cette Eugénie de Guérin est une figure bien originale et infiniment sympathique. […] Elle ne se trouva en présence que de son père, excellent homme, qui me paraît n’avoir eu rien de très saillant ; de son frère, homme de génie, marqué pour une mort prématurée ; et de Barbey d’Aurevilly, homme original et étrange en apparence, qui lui lit quelque temps l’effet de Satan. […] En tout cas, il était original. […] Rien n’est plus intéressant, dans tout Nietzsche, ni plus original, que sa théorie de la nécessité des déchéances.

1315. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

En effet, ce n’est plus assez qu’un portrait soit ressemblant, ou vivant ; on veut qu’il agisse, pour ainsi dire ; et qu’avec les traits de l’original il en rappelle les occupations, les habitudes, les entours, — la page héroïque ou mémorable de sa biographie. […] Défauts et qualités, mêlés et compensés, je ne sache pas dans l’histoire de notre littérature, je n’y trouve point de modèle plus complet, plus original et plus ressemblant de l’esprit bourgeois. […] Elle fondait ainsi en nature, puisqu’elle les fondait sur ce qu’il y a de plus intime dans le génie germanique ou anglo-saxon, les caractères originaux du drame anglais ou du roman allemand. […] Les rédacteurs du Globe n’ont pas joué de rôle original dans l’histoire de la critique moderne : il nous suffira donc de les avoir salués, et nous pouvons passer. […] Quels furent-ils, c’est-à-dire, qu’y eut-il en eux de différent de Ieurs contemporains, d’original, d’unique ?

1316. (1889) Ægri somnia : pensées et caractères

Mais je le garde parce que je n’en sais pas qui convienne mieux au livre, et que bon nombre de morceaux étant des portraits ou des esquisses de personnes, il y a de la charité à laisser aux originaux, qui d’aventure s’y reconnaîtraient, le droit de dire que j’ai en effet rêvé, et qu’ils n’ont rien de commun avec les fantômes d’un malade. […] * Avec des airs imposants d’observateur, de penseur et d’écrivain, et plus d’un bonheur dans ce triple emploi de son esprit, Tocqueville eût mieux observé, pensé avec plus de justesse, écrit d’un style plus original, s’il n’avait pas cru faire du Montesquieu. […] Mais vous n’évitez rien avec plus de soin que ce qui fait l’écrivain original. […] Un comité électoral où l’on s’occupe de former une liste de conciliation — c’est le rêve de tous les politiques des temps d’anarchie — amène sur la scène des originaux d’une autre catégorie. […] D..., qui, pendant une demi-heure, fait un discours sans idées, sans qu’il en ait conscience, « quelque chose qui fait du bruit à côté de lui », et cet autre ; « homme de fer-blanc chez qui tout sonne dur et faux », on voit passer devant soi un choix d’originaux, tels que les engendre le travers politique, cette maladie dont meurt notre pays.

1317. (1894) Études littéraires : seizième siècle

C’est une première épreuve de La Fontaine, manquée, si l’on veut, par comparaison avec l’épreuve définitive, mais déjà intéressante et singulièrement originale. […] En ce genre il est inventeur, créateur, absolument original. […] Rabelais rit de l’invention trop facile, il l’imite pour en rire, et il l’imite d’une façon un peu trop originale. […] Cette philosophie est la philosophie du bon sens, et certes ce n’est pas un méprisable mérite que d’avoir du bon sens au xvie  siècle ; mais elle n’a rien d’original, ni de profond, ni même de très utile. […] Un siècle encore sera nécessaire et l’organisation d’une école toute pareille en son fond à la Pléiade, mais plus mûre, plus avisée et plus discrète, pour que la véritable doctrine et la vraie pratiquede l’imitation originale soient établies.

1318. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Mais il le fait sans lyrisme, et c’est le trait le plus original, sans déclamation. […] En relisant ces pages, il a dû les condamner, non point seulement parce qu’il les trouvait peu originales et trop intimes, mais surtout parce qu’elles répugnaient au principe fondamental de son esthétique, celui sur lequel je ne l’ai jamais vu varier : l’objectivité absolue du récit. […] Peut-être une des époques les plus originales de son génie de poète est-elle celle-là, entre 1836 et 1840, où l’élégiaque du premier recueil apprend à se cacher, à se voiler. […] Vous venez, toujours original, de procéder autrement. […] Depuis le Passant, ses œuvres se succédaient, toutes originales, toutes bien accueillies d’un public pour lequel il était mieux qu’un auteur, un ami.

1319. (1901) Figures et caractères

C’est une situation de grand conteur qu’il occupera ici quand on nous aura traduit son œuvre et que nous pourrons en admirer à l’aise les surprenantes qualités de mouvement, de couleur et de relief qui font de lui un écrivain singulièrement original. […] La conséquence du jugement est fort importante, car, selon l’issue du procès, le duc de Portland restera au rang des infortunés illustres ou passera au nombre des originaux célèbres. […] C’est encore du métal-romantique que le merveilleux, souple et subtil Baudelaire signe de son fleuron original et distinctif ; c’est du métal romantique aussi que le sonore, savant et harmonieux José Maria de Heredia poinçonne de sa marque ineffaçable et magistrale. […] Y ajouterais-je Paul Fort ou André Gide queje n’aurais pas encore fini de nommer tous ceux à qui la Poésie récente doit sa continuelle vitalité, car le Symbolisme fut, durant ces quinze années, la seule tentative d’art intéressante et originale. […] Les éditeurs modernes qui sont revenus aux manuscrits originaux ont eu tout lieu de relever les défauts des textes édités par Athénaïs Michelet (voir par exemple Jules Michelet, Journal.

1320. (1940) Quatre études pp. -154

. — Les caractères originaux du lyrisme romantique français ; Solitude de Baudelaire ; Sur un cycle poétique, sont, à l’origine, des fragments de ce cours. […] La plus fameuse de toutes, Lenore, n’est pas, je crois, traduite en français, ou du moins il serait bien difficile qu’on pût en exprimer tous les détails, ni par notre prose, ni par nos vers… Bürger a fait une autre romance moins célèbre, mais aussi très originale, intitulée Le féroce chasseur 14… Il avait fallu l’émigration ; et les grandes guerres napoléoniennes, mettant certains officiers français en contact direct avec les productions allemandes : comme Stendhal, qui trouve la romance de Bürger « très touchante », et admire qu’on y ose dire qu’un cheval fait trop, trop, trop, et que les tambours font tam, tam ; comme le baron de Mortemart-Boisse. […] J’ai trouvé le dénouement de Lenore très moral : son amant même la punit du crime dont il est la cause ; cette pensée est terrible, on peut la méditer avec fruit. — On dira que je n’ai pas imité assez scrupuleusement l’original ; j’avoue que je n’ai pas eu le courage de faire danser les morts ni de détailler les dernières scènes de Lenore ; le goût français s’y oppose. […] S’ils assimilent cette nourriture étrangère, nos génies créateurs n’en tirent que plus de vigueur originale ; ils gardent leur qualité spécifique, en vertu de leur individualité propre ; et, comme nous l’avons montré, en vertu des caractères ineffaçables de leur nation, qui vit en eux. […] Plus la saveur était originale et plus la réaction, chaque fois, fut vive.

1321. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

Les premiers vers qu’on a de Delille à cette époque, son ode à la Bienfaisance, qui concourut pour le prix de l’Académie française, son épître sur les Voyages, couronnée par l’Académie de Marseille, ses autres épîtres de collège, ne sont remarquables que par la facilité, l’abondance, une certaine pureté ; mais nulle idée neuve, nulle couleur originale. […] Le grand Frédéric déclara cette traduction une œuvre originale.

1322. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre premier. Nature et réducteurs de l’image » pp. 75-128

Abercrombie cite un peintre11 qui, de souvenir et sans l’aide d’aucune gravure, copia un martyre de saint Pierre par Rubens, avec une imitation si parfaite que, les deux tableaux étant placés l’un près de l’autre, il fallait quelque attention pour distinguer la copie de l’original. […] Je regardais de temps en temps la figure imaginaire et je me mettais à peindre ; je suspendais mon travail pour examiner la pose, absolument comme si l’original eût été devant moi.

1323. (1858) Cours familier de littérature. V « XXXe entretien. La musique de Mozart (2e partie) » pp. 361-440

Mais un homme consommé dans l’art de Mozart et Hayden, commentateur original et éloquent du drame de Don Juan, M.  […] Quand nous disons l’écho, nous ne prétendons pas dégrader le génie original de Rossini au rôle de répercussion du génie de Mozart ; Rossini c’est Mozart heureux, Mozart c’est Rossini grave.

1324. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

Le lecteur va juger, sur une traduction toujours atténuante de l’œuvre originale, combien Schiller dépassa Pindare et Horace dans ce dithyrambe didactique du poète qui se souvenait d’avoir été chrétien. […] Cependant cette décentralisation, fatale jusqu’ici à l’Italie, nuisible à l’Allemagne, n’empêche pas le génie germanique d’influer puissamment depuis quelques années sur la littérature nouvelle de l’Europe dans ce que l’on appelle romantisme, c’est-à-dire dans cette tendance heureusement novatrice du génie français, italien, britannique, à sortir de la servile imitation des anciens ; à émanciper nos langues en tutelle, et à les rendre enfin originales et libres comme la pensée spontanée du monde moderne ; dans le romantisme il y a une propension évidente à germaniser la littérature moderne.

1325. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

Un écrivain remarquable, original, téméraire de vérité et de paradoxe, surgit dans un coin du monde. […] Je vous ferai son portrait physique comme s’il était là sous ma plume, mais laissez-moi vous transcrire avant le cadre de ce portrait, aussi original et aussi pittoresque que la figure.

1326. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

Quant à ce Basile qui vit de ses complaisances pour les vices d’autrui, c’est un original dont les copies se renouvellent aussi souvent que ceux qui ont besoin de leurs services. […] C’est Molière que médite surtout Collin, le bon Collin, comme on l’appelait de son temps, aimable auteur, et plus original par cette bonté que par l’invention dramatique et le style.

1327. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VIII »

Ils ont servi l’artiste, en lui donnant la claire connaissance de son but, et ils ont servi à préparer le public à l’acceptation d’une œuvre aussi originale. […] Le texte original, allemand, de cette préface est contenu dans le volume VII des écrits de Wagner, sous le titre de « Zukunftstausik ».

1328. (1909) De la poésie scientifique

Cette action, d’autres maladroitement ont voulu la céler  qui l’ont subie, ou en elle ont recherché quelques éléments à être originaux sans s’apercevoir qu’ils en devenaient incohérents. […] Ghil est un créateur, il est original essentiellement… Glorieuse ou peu répandue, son œuvre est, et sera.

1329. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1869 » pp. 253-317

Très souvent, ce personnage original a avec lui, un garçonnet délicat, élégant, frêle et frileux, suspendu à son bras, et se faisant traîner paresseusement, à la façon d’un pâle enfant fatigué, un garçonnet auquel il parle brusquement, et qu’il fait volter, à tout moment, sous la secousse et la tempête de son agitation nerveuse. […] Malgré les années et l’immense travail, le vieillard chenu est toujours jeune, vivace d’esprit, et encore tout jaillissant de paroles colorées, d’idées originales, de paradoxes de génie.

1330. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre onzième. La littérature des décadents et des déséquilibrés ; son caractère généralement insociable. Rôle moral et social de l’art. »

Richepin, qui a certainement étudié de près la littérature des fripons et des « gueux », a pastiché avec beaucoup d’art les chansons d’orgie des criminels ; voici un remarquable original de ces chansons. […] Mais, si les œuvres géniales sont les plus suggestives et les plus capables de susciter des œuvres originales comme elles, ce sont aussi, celles qui s’analysent et s’imitent le plus difficilement, parce que le procédé s’y dérobe ; elles se rapprochent de la vie, qu’on ne peut artificiellement reproduire.

1331. (1894) Textes critiques

La liberté n’étant pas encore acquise au théâtre de violemment expulser celui qui ne comprend pas, et d’évacuer la salle à chaque entr’acte avant le bris et les cris, on peut se contenter de cette vérité démontrée qu’on se battra (si l’on se bat) dans la salle pour une œuvre de vulgarisation, donc, point originale et par cela antérieurement à l’originale accessible, et que celle-ci bénéficiera au moins le premier jour d’un public reste stupide, muet par conséquent.

1332. (1926) L’esprit contre la raison

André Gide, Les Caves du Vatican, 1914 [prépublication dans La Nouvelle revue française en janvier, février, mars et avril 1914, édition originale en deux volumes, mai 1914, édition courante fin mai 1914]. […] Car, tandis que les modes littéraires passent, Aragon possède ce qui dure au-delà de toutes les vicissitudes de l’opinion à travers les générations: un tempérament original, le charme, la fantaisie et un style d’une élégance tranchante […] ».)

1333. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre IV. De la délimitation, et de la fixation des images. Perception et matière. Âme et corps. »

L’association d’un souvenir à une perception présente peut compliquer cette perception en l’enrichissant d’un élément connu, mais non pas créer un nouveau genre d’impression, une nouvelle qualité de perception : or la perception visuelle de relief présente un caractère absolument original. […] Mais les objections que nous élevons n’en acquièrent alors que plus de force, puisqu’on ne comprend pas comment se créerait par une simple association de souvenirs ce qu’il y a d’original dans nos perceptions visuelles de la ligne, de la surface et du volume, perceptions si nettes que le mathématicien s’en contente, et raisonne d’ordinaire sur un espace exclusivement visuel.

1334. (1903) La renaissance classique pp. -

Outre les qualités originales que l’artiste doit y apporter de lui-même, cela suppose une grande somme d’expérience, puis une grande somme de culture, non pas cette science indiscrète et chaotique des Allemands, mais une science à la fois étendue et précise, toujours guidée par un goût délicat, qui permet à l’écrivain, comme l’instinct permet à l’animal, de discerner sa pâture parmi les choses indifférentes et nuisibles. […] Je ne sais plus quel romancier disait qu’on n’était fait que pour écrire un seul livre et que tous ceux qui venaient ensuite n’étaient en quelque sorte que des « retirages » de ce premier original.

1335. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gabrielle d’Estrées. Portraits des personnages français les plus illustres du XVIe siècle, recueil publié avec notices par M. Niel. » pp. 394-412

Niel s’est attaché dans sa collection à ne reproduire que ce qu’il y a de plus authentique et de tout à fait original, et il s’en est tenu à une seule espèce d’images, à celles qui sont dessinées aux crayons de diverses couleurs par les artistes du xvie  siècle : « On désignait alors par le nom de crayons, dit-il, certains portraits sur papier exécutés à la sanguine, à la pierre noire et au crayon blanc ; teintés et touchés de manière à produire l’effet de la peinture elle-même. » Ces dessins fidèlement reproduits, et où la teinte rouge domine, sont dus primitivement la plupart à des artistes inconnus, mais qui semblent être de la pure lignée française.

1336. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — II. (Fin.) » pp. 62-79

Elle a du cœur ; ne lui demandez pas l’agrément, mais dites : Il manquerait à cette cour une figure et une parole des plus originales si elle n’y était pas.

1337. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

C’est ce qui a lieu pour le duc de Bourgogne, et l’on ne saurait, en traversant les dernières années de Louis XIV, rencontrer cette figure originale, singulière et assez difficile de l’élève de Fénelon, sans se demander : « Que serait-il arrivé de tout différent dans l’histoire, et quel tour auraient pris les choses de la France s’il avait vécu ? 

1338. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Chateaubriand. Anniversaire du Génie du christianisme. » pp. 74-90

Quoi qu’il en soit, la sincérité de l’émotion dans laquelle Chateaubriand conçut la première idée du Génie du christianisme est démontrée par la lettre suivante écrite à Fontanes, lettre que j’ai trouvée autrefois dans les papiers de celui-ci ; dont Mme la comtesse Christine de Fontanes, fille du poète, possède l’original ; et qui, n’étant destinée qu’à la seule amitié, en dit plus que toutes les phrases écrites ensuite en présence et en vue du public.

1339. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — III. (Fin.) » pp. 479-496

On sent tout ce qu’a d’original ce double sentiment, exprimé ici, du peintre et du savant, de l’observateur et de l’amant de la nature.

1340. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

Voiture a cela d’original comme poète, qu’il rompt la lignée majestueuse de Malherbe et s’en revient au xvie  siècle, au premier xvie  siècle, à celui des Marot, des Brodeau.

1341. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — II » pp. 414-431

Contentons-nous de reconnaître et de saluer dans la margrave une des femmes originales du xviiie  siècle, un esprit piquant, une rare fierté d’âme, un caractère et un profil qui a sa place, marquée non seulement dans l’anecdote, mais dans l’histoire de son temps, et qui, à meilleur droit encore que le prince Henri et à un degré plus rapproché, se distinguera toujours au fond du tableau à côté du roi son frère.

1342. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

On n’a pas à craindre cet inconvénient avec Mme Elliott ; M. de Bâillon s’est borné à la traduire, et il l’a fait en homme d’esprit sans doute et en homme de goût, mais en la laissant d’autant plus elle-même, d’autant plus naturelle, tellement que ce livre a l’air d’avoir été écrit et raconté sous sa forme originale en français.

1343. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres publiées par M. de Falloux. »

Tantôt enfin (et c’est ici le cas qui n’est pas le moins original en son genre), nous avons vu la Théologie elle-même tout armée, la dialectique serrée et savante, sachant les points, les textes décisifs, les comment et les pourquoi de l’orthodoxie, sachant aussi les raisons du cœur et les plus fins arguments de la spiritualité ; nous l’avons vue venir du Nord sous la figure de Mme Swetchine, s’installer, prendre pied chez nous et y devenir conquérante à sa manière.

1344. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Une monarchie en décadence, déboires de la cour d’Espagne sous le règne de Charles II, Par le marquis de Villars »

On ferait de tout cela un volume neuf, original, rassemblant mille anecdotes singulières, spirituellement contées et dans la meilleure langue.

1345. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poëme des champs par M. Calemard de Lafayette. »

« Prenez, me dit l’humble vicaire, qui me rappelle la douce lignée des vicaires anglais poëtes et à qui j’avais conseillé, en effet, de les lire dans l’original, ainsi que les poètes lakists, prenez que c’est un panier de fruits, — des fruits du petit jardin que vous avez créé dans ce maigre terrain de nos montagnes, qui ne sont pas, il s’en faut, celles du Westmoreland.

1346. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Renan voudrait avoir en main, ces matériaux primitifs et originaux, ce fût pour les publier tels quels, en les interprétant : non, s’il les avait en sa possession, et après sa première soif de curiosité apaisée, sa seconde ambition, j’imagine, serait de refaire lui-même un monument historique, un monument cimenté à neuf et supérieur de qualité et de construction à l’ancien.

1347. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

Tout cet imprévu-ci est forcé, cherché, travaillé, fouillé, pioché, beaucoup plus étrange et bizarre qu’original.

1348. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

Renan, pour la poésie de l’industrie à propos de l’Exposition universelle, et qui maintiendra de ce côté tout ce que l’avenir laisse entrevoir de neuf, d’original et de possible en effet.

1349. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite) »

Aucun grand homme, aucun grand esprit ou talent, si singulier ou original qu’il semble, n’est seul de son espèce.

1350. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis du Belloy (suite et fin.) »

Mais ici M. de Belloy prend la parole et supplée à l’original dans un couplet soutenu et de la meilleure veine.

1351. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Il y avait, au XVIIe siècle, un terrible et savant docteur de la maison de Navarre, Launoi : bon chrétien, mais singulier, mordant, original, paradoxal, il était un ennemi déclaré de la légende, et il faisait la guerre à quantité de saints qu’il estimait suspects.

1352. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

Elle a semblé accueillir et reconnaître à son tour cette vérité, que les grands poètes ont chacun une langue à part, une langue originale qui, en même temps qu’elle est ou qu’elle devient celle de tous, est la leur aussi en particulier.

1353. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Ce qu’il proposait lui-même de spécifique et d’original, ce qu’il aurait voulu voir adopter, la mesure du désarmement, l’idée de faire passer l’État du rang de percepteur à celui d’assureur, la suppression des octrois, le rachat par l’État de tous les monopoles…, ces fragments d’un plan général qu’il avait conçu, je n’en dirai rien, parce que de tels projets radicaux se perdaient alors dans tous ceux que chacun proposait à l’envi et qui couvraient les murailles comme une éruption universelle.

1354. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. »

Michel Nicolas, je me suis adressé à lui-même pour avoir les moyens, à mon tour, de remonter directement aux sources ; j’ai questionné par lettres des membres de la famille de Jean-Bon qui avaient gardé des récits de tradition orale ; j’ai reçu, de Montauban, la communication de pièces originales et rares, difficiles à retrouver29.

1355. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. (Suite et fin.) »

Aussi ne trouve-t-on réellement à Rome, dès le principe, « qu’un seul art grand et original, l’architecture, parce qu’il est le plus utile. » De même « un seul des dons de l’esprit y naît naturellement, y atteint de soi-même tout son développement, et étend son influence sur tous les autres, l’éloquence. » Ici encore, une de ces pages concises et pleines, qui résument toute une perspective et une suite de vues : « Par leur caractère, par leurs institutions, les Romains sont naturellement un peuple, je ne dirai pas éloquent, mais oratoire.

1356. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

Son mérite original est d’avoir toujours eu présent dans le cours de son étude et d’avoir toujours montré un Napoléon fidèle à lui-même, constant, et dont le caractère se soutient du commencement jusqu’à la fin.

1357. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

J’ai dit dans mon dernier article que je regrettais qu’il n’eût point substitué le texte français original à la traduction de l’anglais, pour certains passages cités de Talleyrand.

1358. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

La plus manifeste, la plus originale et la plus glorieuse apparition individuelle qui se soit dessinée depuis dix ans, est assurément George Sand, et tout ce qui se rattache à ce nom.

1359. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

A titre de romancier, d’écrivain original de nouvelles et de petits drames, M.

1360. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

Rien donc de plus piquant et de plus instructif que d’étudier dans leurs rapports ces deux figures originales, à physionomie presque contraire, qui se tiennent debout en sens inverse, chacune à un isthme de notre littérature centrale, et, comblant l’espace et la durée qui les séparent, de les adosser l’une à l’autre, de les joindre ensemble par la pensée, comme le Janus de notre poésie.

1361. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Pierre Loti »

Combien d’hommes ont eu des impressions rares et des visions originales, dont nous ne saurons jamais rien, parce qu’ils étaient impuissants à les traduire par des mots !

1362. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

Les autres idées générales ne sont que les développements de cette idée première, par la même raison que tous les hommes en particulier ne sont que des copies très-diverses du même original, de l’humanité.

1363. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « La génération symboliste » pp. 34-56

Pourquoi citer celui-ci ou celle-là, quand, au fond de tous les écrits contemporains originaux et de bonne foi, respire le fiel d’une aurore contristée ?

1364. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Stéphane Mallarmé » pp. 146-168

Ce qu’il en dit montre que le principe de cette œuvre n’est nullement original et qu’elle ne doit se développer que comme très ingénieuse et intéressante compilation recréée par un esprit poétique, délicat et éminemment subtil, des conceptions idéales à priori.

1365. (1890) L’avenir de la science « V »

Je suis persuadé que, si cette école célèbre fût restée dans la ligne de Saint-Simon, qui, bien que superficiel par défaut d’éducation première, avait réellement l’esprit scientifique, et sous la direction de Bazard, qui était bien certainement un philosophe dans la plus belle acception du mot, elle fût devenue la philosophie originale de la France au XIXe siècle.

1366. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre V. La littérature et le milieu terrestre et cosmique » pp. 139-154

Comment, par exemple, n’être pas frappé de ce fait, qu’au temps de saint Louis et dans la première moitié du règne de Louis XIV, c’est-à-dire aux époques où la langue et la littérature françaises ont eu leur plus grande force d’expansion sur le monde, l’activité intellectuelle de la France s’est concentrée autour de sa capitale, comme si le génie national poussait ses fleurs les plus originales, les plus vivaces et partant les plus capables de séduire les étrangers, en ce coin de terre qui est, en quelque sorte, la France de la France ?

1367. (1886) De la littérature comparée

La Grèce avait tiré sa littérature et ses arts de ce sens spécial que les Grecs désignaient par le mot mélodieux d’eurythmie ; Rome avait construit sur le civisme sa robuste civilisation, si pauvre d’ailleurs en œuvres originales ; l’Europe du Moyen-Âge, ces États hétérogènes formés comme par hasard par des mélanges et des heurts de nations, cette Europe informe et désordonnée comme une chanson de geste, que la diplomatie de plusieurs siècles n’a pas encore réussi à partager équitablement, cette Europe marchait et travaillait pourtant sous l’impulsion d’un sentiment tout aussi grand que l’eurythmie et le civisme : la foi religieuse.

1368. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Éloges académiques de M. Pariset, publiés par M. Dubois (d’Amiens). (2 vol. — 1850.) » pp. 392-411

On a fort apprécié surtout, dans ce dernier éloge, le talent consciencieux avec lequel le biographe a su rendre le caractère, non seulement du maître et du praticien, mais de l’homme, et ce soin curieux de recomposer par une foule de traits une figure originale.

1369. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Pline le Naturaliste. Histoire naturelle, traduite par M. E. Littré. » pp. 44-62

Pline n’est pas le moins du monde un Aristote, c’est-à-dire un génie directement observateur et original, critiquant l’objet de ses expériences ou de ses lectures, et aspirant à découvrir les vraies lois.

1370. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Mme de Genlis. (Collection Didier.) » pp. 19-37

Un autre inconvénient encore, c’est de ne pas laisser aux jeunes esprits qui en sont le sujet un seul quart d’heure pour rêver, pour se développer en liberté, pour donner jour à une idée originale ou à une fleur naturelle qui voudrait naître.

1371. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « De la retraite de MM. Villemain et Cousin. » pp. 146-164

Pourquoi lui ou quelqu’un de ses autres collègues n’a-t-il pas réalisé ce vœu si noble et si simple, si original, et si supérieur à tout ce qu’une demi-politique pouvait y opposer ?

1372. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — I. » pp. 201-219

Il n’y a pas plus de xviiie  siècle complet sans Beaumarchais que sans Diderot, Voltaire ou Mirabeau ; il en est un des personnages les plus originaux, les plus caractéristiques, les plus révolutionnaires.

1373. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

À côté de ces vers, qui ne se trouvent pas dans les volumes de Rome chrétienne, et qui ne sont qu’un premier accent, il faut placer comme tableau original et profond, ce qui est dit de la destruction graduelle et lente des corps humains dans les Catacombes.

1374. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Tel qu’il est, Regnard reste original et sans comparaison.

1375. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

Mérimée a de même été très original dans son Essai sur la guerre sociale ; il a été moins heureux, selon moi, pour son Catilina.

1376. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1853 » pp. 31-55

« Votre très dévouée, « *** » Et ces vers de Tahureau, nous ne les avions pas pris dans Tahureau, dont les éditions originales sont de la plus grande rareté, nous les avions pris dans le Tableau historique et critique de la poésie française et du théâtre français au xvie  siècle de Sainte-Beuve, — oui, dans ce livre couronné par l’Académie.

1377. (1912) Le vers libre pp. 5-41

L’importance de cette technique nouvelle, en dehors de la mise en valeur d’harmonies forcément négligées, sera de permettre à tout poète de concevoir en lui son vers ou plutôt sa strophe originale, et d’écrire son rythme propre et individuel au lieu d’endosser un uniforme taillé d’avance et qui le réduit à n’être que l’élève de tel glorieux prédécesseur.

1378. (1912) L’art de lire « Chapitre III. Les livres de sentiment »

» dit-on ordinairement aux idéalistes, ce qui fait très grand honneur aux poètes ; on peut dire aussi : « Il est distingué, surtout il veut l’être ; volontiers original, un peu dédaigneux ; il a le goût des sentiments nobles ; c’est un lecteur de poètes ».

1379. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — La banqueroute du préraphaélisme »

En un mot Watts a fait de Carlyle un « vaincu », au lieu de voir en lui le vivant original et âpre qu’il est réellement.

1380. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Ils inventent tout ce qu’ils pensent, et ils créent tout ce qu’ils sont ; ils sont originaux comme le vulgaire est imitateur, par nature ; ils aiment l’indépendance comme le vulgaire aime l’autorité, par instinct.

1381. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Dans cette exposition et dans cette critique de la philosophie régnante, je ne pense point avoir oublié une seule doctrine originale ou importante.

1382. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIII : De la méthode »

Beaucoup d’espace, beaucoup de jour, peu de meubles ; en fait de livres, une bibliothèque toujours ouverte où sont les quatre-vingt-quatre volumes de Voltaire, et les trente-deux volumes de Condillac ; une autre, énorme, comblée d’ouvrages de fonds, mémoires des académies, journal des savants, recueils des mémoires et des historiens originaux, catalogues de faits de toute espèce et de toute forme ; dans un cabinet, quelques herbiers, deux ou trois squelettes, des cartons de portraits ou d’estampes, bref un choix de spécimens.

1383. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIV : De la méthode (Suite) »

. — Portez-la dans la science : la science, privée de l’esprit scientifique et philosophique, réduite à des imitations, à des traductions, à des applications, n’est populaire que par la morale, corps de règles pratiques, étudiées pour un but pratique, avec les Grecs pour guides ; et sa seule invention originale est la jurisprudence, compilation de lois, qui reste un manuel de juges, tant que la philosophie grecque n’est pas venue l’organiser et le rapprocher du droit naturel.

1384. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre V. La philosophie. Stuart Mill. »

Qu’avez-vous d’original ? […] Je vous ai dit qu’il est original. —  Est-il hégélien ? […] Voilà sans doute une conception originale et haute.

1385. (1928) Les droits de l’écrivain dans la société contemporaine

L’écrivain, ont-elles dit, dont les lettres sont l’objet d’un commerce, n’a-t-il pas de ce fait la possibilité de vendre très cher ses manuscrits originaux ? […] Or, justement depuis la multiplication des éditions de luxe et de demi-luxe, des éditions originales, des grands papiers, des livres réimposés, numérotés, publiés spécialement pour des groupes d’amis, des sociétés de médecins, de femmes bibliophiles, depuis le développement immense qu’a pris le commerce du livre rare, les publications « hors commerce » ne sont pas du tout dénuées d’intérêt pour l’éditeur. […] N’aurait-on pas dû lui soumettre l’original, qui l’eût éclairé ?

1386. (1864) Le positivisme anglais. Étude sur Stuart Mill

Qu’avez-vous d’original ? […] Je vous ai dit qu’il est original. — Est-il hégélien ? […] Voilà sans doute une conception originale et haute.

1387. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Dans l’article que cette Revue a publié, si l’on s’en souvient, sur Mme de Charrière99, sur cette Hollandaise si originale et si libre de pensée, qui a passé sa vie en Suisse et a écrit une foule d’ouvrages d’un français excellent, il a été dit qu’elle connut Benjamin Constant sortant de l’enfance, qu’elle fut la première marraine de ce Chérubin déjà quelque peu émancipé, qu’elle contribua plus que personne à aiguiser ce jeune esprit naturellement si enhardi, que tous deux s’écrivaient beaucoup, même quand il habitait chez elle à Colombier, et que les messages ne cessaient pas d’une chambre à l’autre ; mais ce n’était là qu’un aperçu, et le degré d’influence de Mme de Charrière sur Benjamin Constant, la confiance que celui-ci mettait en elle durant ces années préparatoires, ne sauraient se soupçonner en vérité, si les preuves n’en étaient là devant nos yeux, amoncelées, authentiques, et toutes prêtes à convaincre les plus incrédules. […] Ma délicate sagesse n’aime pas cette indécence ex professo, et je me dis : « Voilà un fou bien dégoûtant qu’on devrait enfermer avec les fous de Bicêtre. » Et quand on me dira : « L’original Rétif de La Bretonne, le bouillant Rétif, etc. », je penserai : C’est un siècle bien malheureux que celui où on prend la saleté pour du génie, la crapule pour de l’originalité, et des excréments pour des fleurs. […] On n’a excepté que : 1º tous les régents, membres et administrateurs de la justice qui ont séduit par des promesses ou effrayé par des menaces ; 2° ceux qui ont eu des correspondances non permises, unerlaubte ; 3° ceux qui ont attiré des troupes étrangères ou abusé du nom du souverain ; 4° ceux qui ont effrayé la nation par la fausse nouvelle d’une attaque de la part du roi de Prusse ; 5° ceux qui ont eu part au traité de 1786 ; 6° ceux qui ont guidé les mécontents et eu part à l’assemblée de 1787 ; 7° ceux qui, tant régents que bourgeois, ont participé à l’expulsion des magistrats ; 8° les chefs, commandants et secrétaires des corps francs ; 9° ceux qui ont menacé indécemment les magistrats ; 10° ceux qui ont voulu rompre les digues nonobstant l’ordre du magistrat ; 11º ceux qui ont résisté aux magistrats ; 12°ceux qui se sont emparés des portes ; 13°tous les ministres et ecclésiastiques qui ont suivi les corps francs ou participé à l’opposition des soi-disant, patriotes (pflichtvergessene Prediger) ; 14° les directeurs et écrivains des gazettes historiques, patriotiques, etc., etc., etc. ; 15° tous ceux qui se sont rendus coupables de meurtres, de violences ouvertes ou d’autres excès graves. » « J’ai retranché toutes les épithètes, et la pièce a perdu dans ma traduction beaucoup de beautés originales. […] Gaullieur, l’original écrit sur une carte (un valet de cœur), et dûment signé.

1388. (1869) Philosophie de l’art en Grèce par H. Taine, leçons professées à l’école des beaux-arts

Bailly-Baillière, plaza de Topete 16 1869 Messieurs, Dans les années précédentes, je vous ai présenté l’histoire des deux grandes écoles originales qui, dans les temps modernes, ont figuré aux yeux le corps humain : celle d’Italie et celle des Pays-Bas. Il me reste pour achever ce cours à vous faire connaître la plus grande et la plus originale de toutes, l’ancienne école grecque. […] C’est qu’il a été obligé de sonder et d’approfondir dix ou douze mille mots et expressions diverses, d’en noter les origines, la filiation, les alliances, et de rebâtir à neuf et sur un plan original toutes ses idées et tout son esprit. […] Au sentiment profond de la perfection corporelle et athlétique s’ajoutait chez le public et chez les maîtres un sentiment religieux original, une idée du monde aujourd’hui perdue, une façon propre de concevoir, de vénérer et d’adorer les puissances naturelles et divines.

1389. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome I pp. 5-537

Elle ne peint point les mœurs des originaux d’une ville, ni tels ou tels personnages de la société : c’est la cité même qu’elle personnifie sous des emblèmes bouffons ; c’est le masque d’Athènes toute entière : son gouvernement, sa politique, ses abus, ses sophismes, s’y caractérisent par la licence, en des portraits effrontés. […] Cette sorte de pièce amuse par la ressemblance des figures passagères avec les originaux du monde. […] Le passage successif d’acteurs qu’on ne revoit plus, me ferait ranger dans la même espèce la comédie du Festin de Pierre, où tous les personnages incidents ne sont amenés que pour le déploiement et l’action du seul rôle de Dom Juan ; mais la gaîté sinistre de cet athée original rapproche ce drame de la comédie à caractère. […] Voltaire se trompa, dans sa jeunesse, sur les justes proportions de l’Œdipe-Roi, dont l’action, quoique unique et simple, se compose de situations continuellement diversifiées par l’attitude du héros principal, et qui, sans autres éléments que ceux de l’ouvrage original, réussirait admirablement aujourd’hui dans une imitation scrupuleuse. […] Si j’eusse manqué cette scène originale, je n’aurais eu nulle confiance de mes certitudes en mon art ; et je prise le seul acte où cet effet se produit, plus que tous les essais que j’ai tentés : la moindre faute commise l’eût rendue bizarre et ridicule, de vraisemblable et extraordinaire qu’elle parut.

1390. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Son théâtre est excessivement original ; il est tout plein, à la fois, de pédanterie, d’ironie et de larmes. […] Je ne m’étais pas trompé : cette œuvre d’adolescent est tout à fait originale. […] Mais la Jeunesse pensive est étrangement originale par la délicatesse, la beauté et la bravoure naïve du sentiment. […] Je ne vous donne point cette opinion pour originale : je vous la donne pour très banale au contraire, — et pour officielle, ou à peu près. […] Fleur-de-Noblesse est une personne originale, qui n’est pas fière et qui ala passion de la menuiserie.

1391. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — I. » pp. 431-451

Cette Académie des inscriptions et belles-lettres est proprement la patrie intellectuelle de Gibbon ; il y habite en idée, il en étudie les travaux originaux ou solides rendus avec justesse et parfois avec agrément ; il en apprécie les découvertes, « et surtout ce qui ne cède qu’à peine aux découvertes, dit-il en véritable Attique, une ignorance modeste et savante ».

1392. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

Non seulement il ne fut point écrasé par la comparaison, mais cette oraison funèbre originale et neuve se soutient à la lecture en regard du chef-d’œuvre du grand évêque.

1393. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

» Des deux portraits originaux qu’on a de Bourdaloue, il en est un qui, plus répandu et reproduit en tête des Œuvres, pourrait, ce me semble, à première vue, induire en erreur ; de ce que, dans ce portrait fait après la mort, Bourdaloue est représenté les yeux exactement fermés et les mains jointes, « dans la posture d’un homme qui médite », on en a trop conclu que c’était là son attitude et sa tenue habituelle ou constante en prêchant.

1394. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

[NdA] L’anecdote qu’on va lire est authentique, et je la tiens d’original : On sait que Balzac admirait Beyle à la folie pour sa Chartreuse de Parme et qu’il l’a loué à mort dans sa Revue parisienne.

1395. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

Sur Vardes si mêlé aux intrigues de la cour de Madame, et qui n’était plus de la première jeunesse, « mais plus aimable encore par son esprit, par ses manières insinuantes, et même par sa figure, que tous les jeunes gens » ; — sur Lauzun, « le plus insolent petit homme qu’on eût vu depuis un siècle », excellent comédien, non reconnu tout d’abord ; — sur Bellefonds qui était creux et faux en tout, « faux sur le courage, sur l’honneur et sur la dévotion » ; — sur La Feuillade « fou de beaucoup d’esprit, continuellement occupé à faire sa cour, et l’homme le plus pénétrant qui y fût, mais qui souvent passait le but » ; — sur Marcillac, fils de La Rochefoucauld, c’est-à-dire de l’homme de son temps le plus délié et le plus poli, et qui lui-même réussit dans la faveur, « étant homme de mérite, poli, et sage de bonne heure, caractère que le roi a toujours aimé » ; — sur le chevalier de Rohan, au contraire, qui fut décapité pour crime de lèse-majesté, « l’homme de son temps le mieux fait, de la plus grande mine, et qui avait les plus belles jambes » (car il ne faut pas mépriser les dons de la nature, pour petits qu’ils soient, quand on les a dans leur perfection)75 ; — sur tous ces originaux et bien d’autres le témoignage de La Fare est précieux, de même que son expression est parfaite.

1396. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

Chapelle, en cette rencontre, est l’original que Boileau a imité, comme il a imité en tant d’autres endroits Horace et les anciens. — Il est dommage cependant que le tout se termine par cette histoire désagréable et indécente de d’Assoucy, sur laquelle l’auteur revient encore plus loin et insiste avant de finir ; ici Boileau retrouverait toute sa supériorité de bon goût et de bonnes mœurs.

1397. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

Si inventeur que soit un esprit, il n’invente guère ; ses idées sont celles de son temps, et ce que son génie original y change ou ajoute est peu de chose.

1398. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — II » pp. 18-34

Le Centaure n’est nullement un pastiche de Ballanche ; c’est une conception originale et propre à Guérin.

1399. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

C’est sous le nom de Lucius, qui était celui d’un précédent narrateur, qu’Apulée commence son récit, et il confondra plus d’une fois, en avançant, son propre personnage avec l’original qu’il revêt.

1400. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

Les uns, les croyants et les militants, espéraient arracher de Rome des réponses précises, des oracles encore inouïs, dans le sens de l’avenir : ils voyaient déjà devant eux une carrière originale et neuve, ouverte en plein soleil au développement catholique de leurs talents.

1401. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet »

Il n’a pas contracté l’obligation ou de déployer des nus, ou d’imaginer certaines formes de draperies, ou d’observer certaines règles de genre : il prend les choses telles qu’il les voit, il leur laisse leur réalité ; et il en résulte que, sans avoir prétendu faire ni de l’histoire ni du genre, il a fait de l’un ou de l’autre ; il a été touchant, noble, terrible, ou bien spirituel, comique et original.

1402. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Battre l’estrade, courir la campagne, comme fit Molière pendant douze années, c’était fourrager parmi les originaux ; Molière put en recueillir une rare et abondante collection.

1403. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

Je n’ai point donné de ces batailles générales qui mettent le royaume en peine ; mais j’espère, avec l’aide de Dieu, que le roi retirera de grands avantages de celle-ci. » Et, en effet, si l’idée originale de Denain n’est pas de Villars, il se l’appropria tout à fait par la manière brillante et rapide dont il sut profiter de ce premier succès ; à la façon soudaine dont il en tira les conséquences, on aurait pu l’en croire le seul auteur et le père, et l’on peut dire que, par l’usage qu’il en fit, il éleva ce coup de main heureux à la hauteur d’une grande victoire.

1404. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite et fin.) »

Jeune, il a aimé à la passion l’époque de Louis XIII ; il l’a fort étudiée, et son volume des Grotesques (1844) renferme une suite de portraits originaux et singuliers de ce temps-là.

1405. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat. »

La figure du maréchal de Catinat, même en la dégageant de l’espèce de légende philosophique dont on l’avait un peu obscurcie, en ne se gardant pas moins de l’admiration routinière qui arrondit les traits et ôte à la physionomie son accent, est et restera une des plus belles, des plus pures et des plus originales du xviie  siècle.

1406. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre »

Sa vie publique, fort bien digérée, fort judicieusement présentée par l’abbé Millot, et avec accompagnement de pièces originales, a rempli des volumes dits Mémoires de Noailles, qui se lisent avec instruction et ne sont pas sans intérêt.

1407. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

les pièces originales sont là, telles quelles ; elles parlent, ou elles se taisent ; elles font loi.

1408. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Idées et sensations : par MM. Edmond et Jules de Goncourt. »

Venise également, la Venise de la fin plus que tout, celle des Tiepolo et des Longhi ; les attire et les fascine ; l’une de leurs compositions les plus originales, dans le présent volume, est cet enterrement fantastique de Watteau imaginé par eux et placé en plein carnaval de Venise : c’est le triomphe de tous leurs goûts et de tous leurs caprices qu’ils ont mené avec une pompe folâtre dans cette suite de pages qu’il appartient au seul Théophile Gautier de bien analyser116, et qui à nous, simples littérateurs, nous donnent un peu le vertige.

1409. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. »

On a (excepté peut-être pour la partie militaire) les éléments et tous les traits originaux d’un portrait ; ou plutôt, rien qu’à feuilleter du doigt ces deux jolis volumes et à les parcourir en tous sens, le portrait se crayonne et s’achève de lui-même en nous, non sans avoir amené, chemin faisant, toutes sortes de réflexions et de remarques plus ou moins morales et philosophiques.

1410. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Le problème moral que soulève le personnage de Talleyrand, en ce qu’il a d’extraordinaire et d’original, consiste tout entier dans l’assemblage, assurément singulier et unique à ce degré, d’un esprit supérieur, d’un bon sens net, d’un goût exquis et d’une corruption consommée, recouverte de dédain, de laisser-aller et de nonchalance.

1411. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « HISTOIRE de SAINTE ÉLISABETH DE HONGRIE par m. de montalembert  » pp. 423-443

A travers toute la bagarre de fabrique littéraire qui, par moments, rompt la vue ; au milieu de toute cette boue fréquente, hideuse, qui nous éclabousse les pieds, et que l’avenir, j’espère, ne verra pas, voilà des signes originaux qui distingueront peut-être assez noblement ce siècle, si préoccupé entre tous de son ambitieuse destinée.

1412. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « JASMIN. » pp. 64-86

Si on recherche avec curiosité les traditions locales, les vieux noëls en patois, les vestiges d’une culture ou d’une inspiration ancienne, il faut noter aussi ce qui est vivant, le poëte plein de vigueur qui, dans le moindre rang social où il se tient, enrichit tout d’un coup de compositions franches, originales, suivies, son patois harmonieux encore, débris d’une langue illustre, mais enfin un patois qu’on croyait déshérité désormais de toute littérature.

1413. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SÉVIGNÉ » pp. 2-21

A la cour, quelques salons, quelques ruelles de beaux-esprits étaient déjà de mode ; mais rien n’y germait encore de grand et d’original, et l’on y vivait à satiété sur les romans espagnols, sur les sonnets et les pastorales d’Italie.

1414. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

Alors elles seront fraîches, sincères, originales, bien que vieilles comme le monde.

1415. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre I. Le théâtre avant le quinzième siècle »

L’imagination éveillée des poètes picards, ou peut-être la fantaisie originale du seul Adam de la Halle147, saisit la variété et la puissance des effets qui étaient contenus dans la forme de ces « jeux » sacrés.

1416. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre I. La tragédie de Jodelle à Corneille »

Les choses se passent en France à peu près comme en Italie : les humanistes tournent en élégant latin les œuvres les plus fameuses du théâtre grec ; ils s’exercent à les imiter dans des compositions originales.

1417. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

Car ils lui empruntaient sa fragile apologétique sans le grand souffle qui la soutenait (en l’air), ses bizarreries de style sans sa prestigieuse imagination, toute sa manière enfin sans s’apercevoir qu’ils n’avaient ni ses dons originaux ni surtout son public.

1418. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XI. L’antinomie sociologique » pp. 223-252

La division du travail, avec sa spécialisation à outrance, avec sa canalisation des activités dans certaines directions, n’assure nullement aux individus une vie intérieure plus riche, plus intense, plus profonde, ni plus originale.

1419. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre V »

Au lieu d’une création originale et nouvelle, l’auteur ne nous donne qu’une copie affaiblie de Lady Tartufe.

1420. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Pensées, essais, maximes, et correspondance de M. Joubert. (2 vol.) » pp. 159-178

Joubert fut en son temps le type le plus délicat et le plus original de cette classe d’honnêtes gens, comme l’ancienne société seule en produisait, spectateurs, écouteurs sans ambition, sans envie, curieux, vacants, attentifs, désintéressés et prenant intérêt à tout, le véritable amateur des belles choses.

1421. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

Sa vie, vers la fin, était celle d’un original et d’un sage qui veut pourvoir, avant tout, à son indépendance.

1422. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres de la marquise Du Deffand. » pp. 412-431

Le plan qu’elle imaginait était sérieux et beau, mais l’éducation qu’elle se donna, ou plutôt qu’elle ne dut qu’à la nature et à l’expérience, fit d’elle une personne plus originale et plus à part.

1423. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

Dès qu’il le connaîtra mieux, le mot de génie va se mêler à tout moment et revenir sous sa plume à côté du nom de Vauvenargues, et c’est le seul terme en effet qui rende avec vérité l’idée qu’imprime ce talent simple, élevé, original, né de lui-même, et si peu atteint des influences d’alentour.

1424. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand. (Berlin, 1846-1850.) » pp. 144-164

Écrivain en prose, Frédéric est un disciple de nos bons auteurs, et, en histoire, c’est un élève, et certes un élève original et unique, et par endroits passé maître, de l’historien du Siècle de Louis XIV.

1425. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

En art, il a le goût riche et fin, libre à la fois et compliqué, antique tout ensemble et moderne, tout à fait particulier et original.

1426. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. » pp. 103-122

[NdA] Ceux qui prendront la peine de lire l’original de cette lettre à la Bibliothèque nayionale, trouveront ici un autre mot (pousse-c…) que j’ai remplacé par un équivalent.

1427. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « De la poésie et des poètes en 1852. » pp. 380-400

Je pourrais en détacher des tableaux pleins de suavité et d’éblouissement, les amours de Léda et du Cygne sur l’Eurotas, le Jugement de Pâris sur l’Ida entre les trois déesses ; mais j’aime mieux, comme indication originale, donner ici la pièce intitulée Midi.

1428. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — I. » pp. 401-420

C’est, en effet, un trait original et des plus distinctifs du caractère de Mme des Ursins que d’avoir su être une personne aussi tranquille au fond, sous une forme aussi active et dans une destinée si agitée ; et c’est à cela qu’elle dut, après une chute si rude à soixante-douze ans, de s’en être allée mourir en paix et de vieillesse à quatre-vingts.

1429. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — I. » pp. 84-104

Il s’y élevait à des vues générales qui embrassaient toute la politique et la civilisation de ce pays ; mais surtout il y exposait la campagne de Mina en Catalogne, et les aventures de la Légion libérale étrangère, avec feu, avec une netteté originale et une véritable éloquence ; on sentait qu’il ne manquait à ce style un peu grave et un peu sombre, pour s’éclairer et pour s’animer, que d’exprimer ce que l’auteur avait vu et senti.

1430. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — I. » pp. 322-340

J’étais alors substitut à Tours ; on vint me chercher de Véretz au milieu de la nuit ; j’arrivai à l’aube… » Et j’entendis alors un récit vrai, simple, attachant, dramatique, qui me remit en mémoire cette singulière et originale figure, et qui me tente aujourd’hui de la retracer.

1431. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

Voici une anecdote que je sais d’original et qui doit être d’une date un peu postérieure ; on y voit comme les belles dames cherchaient l’auteur de tant de pages charmantes et ne le trouvaient pas.

1432. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Le mérite original de Nicolas Boileau, étant de cette famille gaie, moqueuse et satirique, fut de joindre à la malice héréditaire le coin du bon sens, de manière à faire dire à ceux qui sortaient d’auprès de lui ce que disait l’avocat Mathieu Marais : « Il y a plaisir à entendre cet homme-là, c’est la raison incarnée. » Le dirai-je ?

1433. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Lui-même il a, comme homme, un caractère à part et modestement original dans sa nuance, entre tous les écrivains célèbres du xviiie  siècle.

1434. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Saint François de Sales. Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. Sayous. 1853. » pp. 266-286

Dans tous les conseils qui suivent, on peut vérifier à quel point ce charmant esprit si élevé était en même temps net et positif ; il donne la règle à suivre même pour les bons désirs, qu’il ne faut point perdre, mais « qu’il faut savoir serrer en quelque coin du cœur jusqu’à ce que leur temps soit venu. » Dans ses avis aux gens mariés, aux femmes, dans ses prescriptions sur l’honnêteté du lit nuptial, il est hardi, original et pur.

1435. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Marguerite, reine de Navarre. Ses Nouvelles publiées par M. Le Roux de Lincy, 1853. » pp. 434-454

C’est un document essentiel à joindre à tout ce qu’on savait déjà d’original sur son compte.

1436. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — II. (Fin.) » pp. 476-495

Milord Maréchal était à la fois un caractère original, un cœur d’or et un esprit fin ; il avait le fonds d’esprit écossais, quelque chose de ce tour que Franklin a également porté dans le conte moral et dans l’apologue.

1437. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Il s’arrête un moment, et avec un petit rire sarcastique, qui a l’air de moquer tout ce qui sort d’original de sa bouche, il s’écrie : « Oui cela, je veux le dire dans un livre, qui, sur la constitution des sociétés, serait, toute distance gardée, ce qu’est le livre de Laplace, sur la constitution du ciel ! 

1438. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers libre  »

On établirait aussi que telles suites de vers libres ne sont que des alexandrins décomposés ; on donnerait comme exemples, sinon comme preuves : Car vois | les marbres d’or aux cannelures fines | Sont riches du soleil qui décline, | versant Avec sa joie la soif des vins | qu’elle mûrit ; |  fragment qui dans l’original forme cinq vers de 2, 10, 9, 10, 4 syllabes ; Oui c’est l’orfroi, | ce sont les pourpres constellées | Des rêves orgueilleux comme des nefs | s’inclinent | Ma gloire, à moi, | c’est d’embrasser tes deux genoux | Ramenant vers leur cou | leur tunique défaite, | Protégeant de leurs mains leurs regards aveuglés | Baissent la tête | autour de nous, | silencieux | Tu ris ! 

1439. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

L’importance de cette technique nouvelle, en dehors de la mise en valeur d’harmonies forcément négligées, sera de permettre à tout poète de concevoir en lui son vers ou plutôt sa strophe originale, et d’écrire son rythme propre et individuel au lieu d’endosser un uniforme taillé d’avance et qui le réduit à n’être que l’élève de tel glorieux prédécesseur.

1440. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

Elle ne trouvera pas flattés des portraits dont elle n’aura pas vu les originaux.

1441. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 38, que les peintres du temps de Raphaël n’avoient point d’avantage sur ceux d’aujourd’hui. Des peintres de l’antiquité » pp. 351-386

Colbert et pour le cardinal Massimi, et les estampes gravées par Pietro Santi Bartoli, qui font avec les explications du Bellori un volume in folio imprimé à Rome. à peine demeuroit-il il y a déja trente ans quelques vestiges des peintures originales, quoiqu’on eut eu l’attention de passer dessus une teinture d’ail, qui est si propre à conserver les fresques.

1442. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 33, que la veneration pour les bons auteurs de l’antiquité durera toujours. S’il est vrai que nous raisonnions mieux que les anciens » pp. 453-488

On peut montrer que ces inventions et ces découvertes originales, pour ainsi dire, ne sont dûës qu’au hazard, et que nous n’en avons profité qu’en qualité de derniers venus.

1443. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

Mais il a d’étranges façons de comprendre l’art de M. d’Houdetot : plus d’une fois, lorsqu’un lapin lui est parti entre les jambes, Murger a retenu son doigt sur la détente du fusil, et la bête de s’enfuir sous le regard souriant de ce Nemrod original.

1444. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Dégoûtés eux-mêmes de leurs froides et lourdes imitations, ils s’en prirent à leurs modèles ; n’ayant pu égaler nos écrivains, ils se mirent à les dédaigner ; et ils résolurent de se faire originaux.

1445. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Xavier Aubryet » pp. 117-145

Il ne s’est pas inquiété de passer pour un original (la peur des pleutres !)

1446. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

Voilà quels furent, et tout de suite saillants, les caractères primitifs de cet esprit bien né et bien portant, si succulent, si frais et si robuste, d’un sang très pur, sans humour ni humeur, sans enfin une seule des maladies intellectuelles qui font si souvent des esprits anglais, et même des plus grands, ou des maniaques sublimes ou tout au moins des excentriques et des originaux.

1447. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

… C’est cela qui serait original… et même trop !

1448. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre IV. L’unification des sociétés »

L’égalitarisme demande les réglementations nombreuses que le libéralisme repousse ; le premier compte sur le pouvoir central dont l’autre se défie ; l’un se complaît à l’uniformité comme l’autre aux diversités originales.

1449. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XV. »

C’est une étude de grand peintre, plutôt qu’une œuvre originale et librement conçue.

1450. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

Gaberel, il faut avoir lu l’original de cette lettre envoyée aux syndics de Genève, pour croire qu’un homme puisse être capable de se couvrir lui-même d’aussi violentes injures. » — « Vos bontés et celles du magnifique Conseil m’ayant déterminé à m’établir ici sous votre protection, je désire assurer mon repos en ayant recours à votre prudence et à la justice du Conseil. […] On conçoit aisément qu’un esprit supérieur, habitué à ne se contenter ni des vulgarités ni des surfaces, épris de ce travail attrayant et difficile qui consiste à extraire d’une masse de faits une essence d’idées, se soit passionné pour cette analyse et l’ait poursuivie, pendant vingt années, avec une patience infatigable, dans les cahiers des États, dans les archives des administrations publiques, dans les Mémoires inédits des intendances de province, dans les pièces originales, partout où il retrouvait ces mille fils plus ou moins visibles qui lient la Révolution à l’ancien régime. […] L’idée mère, l’inspiration originale, l’opportunité de ce morceau, avons-nous besoin d’y insister encore ? […] C’est, nous le répétons, l’inspiration originale et féconde de cet ouvrage. […] ce Charles IV de Lorraine, dont la vie accidentée remplit et anime tout ce second volume ; ce Charles IV qui ne fut qu’un contraste, une contradiction permanente : catholique et bigame, populaire dans un pays où il avait attiré tous les désastres, habile et intrépide homme de guerre n’aboutissant qu’à de brillants coups de main et à de stériles victoires, négociateur plein d’astuce, se prenant dans ses propres filets et réussissant beaucoup plus mal que s’il avait été sincère ; condottiere chevalier, mi-parti de héros et de soudard, raillant l’adversité, abusant du succès, toujours prêt à servir ceux qu’il combat et à combattre ceux qu’il sert, tour à tour allié de la France qui commence par le dépouiller, et de l’Espagne qui finit par le mettre en prison ; au milieu de ces diverses fortunes, gardant les bizarreries de son humeur, sa verve originale et caustique, sa galanterie plus vive que délicate, son amour pour les magnificences, les tournois et les fêtes, demandant aux femmes de le consoler de ses malheurs, et assez souvent malheureux pour être rarement inconsolable ?

1451. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

Interrogeons donc cet étranger, questionnons cet anachronisme, cet homme qui était comme forcé d’être original, et qui, en effet, l’a été, malgré l’effort continuel qu’il faisait pour l’être. […] Tout cela ne fait pas un penseur très original. […] Mais il est original, il est bien lui-même. […] Et il a ceci aussi d’original, le scepticisme de Sainte-Beuve, qu’il se contredit, comme tout bon scepticisme doit faire, qu’il sent assez la vanité de toutes choses pour sentir aussi la sienne. […] « A mesure qu’on a plus d’esprit, a dit Pascal, on voit plus d’hommes originaux. » Ce n’est pas d’une vérité absolue.

1452. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

Je ne vous promets pas d’être complet ; je ne vous promets pas d’être original : je ne puis vous assurer que ma sincérité. […] En somme, dans cette deuxième et troisième parties, sans être, je crois, aussi profondément original que l’explique Faguet, il élargit et élève la critique littéraire par cela seul qu’il y introduit une vue générale, qui est une vue passionnée, et qui est une vue historique. […] » Il trouve cela très bien, très original. […] C’est égal, il est vraiment désobligeant de voir un homme d’un si grand génie si constamment préoccupé de ce qu’il paraît aux yeux des autres hommes, si entêté d’être toujours le plus beau, le plus original, le plus fort, le plus élu par le destin. […] Cet inspecteur général de l’Université, grand, sec, avec un nez pointu, était un vieil « original », plein de tics délicats et de manies angéliques.

1453. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

Cohen, ancien censeur royal, a été moins prodigue de mutilations ; mais il déclare lui-même qu’il a traduit librement, c’est-à-dire qu’il a passé à côté de l’original toutes les fois que les propriétés du style gênaient le galop de sa plume. […] Il ne faut pas déduire de là un blâme sévère pour le traducteur, mais seulement l’éloge de l’inviolabilité originale. […] À ces deux sources d’information on pouvait facilement se convaincre, quand bien même on n’eût pas eu le loisir d’étudier les originaux ou les copies que nous en avions, de la différence qui séparait Clara de ses devanciers prétendus. […] Les pièces de ce recueil, données par l’auteur comme traduites d’originaux illyriens, sont inventées avec une grande habileté, et soutiennent glorieusement la comparaison avec les chants klephtiques que M.  […] Le voyage d’Égypte est presque inintelligible pour ceux, qui ne connaissent pas l’original.

1454. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Nous ne devons pas, avant de terminer, oublier la tragi-comédie du Courtisan Parfait (1668), pièce originale qui en renferme deux, la seconde commençant au troisième acte. […] Ce qu’il y a de plus original dans cette singulière condamnation, c’est que les juges allaient chaque soir applaudir leur victime dans ses plus gracieuses compositions, lui donnant ainsi gain de cause contre eux-mêmes. […] Racine, qui ne pardonnait pas l’innocente plaisanterie dont son Andromaque avait été l’objet, fut entraîné lui-même, en 1668, à composer une comédie qui est restée au théâtre comme type de comique de bon aloi, les Plaideurs, et qu’on peut considérer comme la parodie de tous les talents et de tous les originaux du parquet et du barreau de cette époque. […] L’exorde est un ridicule donné à une célébrité du barreau qui avait employé le même pour la cause d’un boulanger de ses clients ; la scène de Chicaneau et de la comtesse eut lieu en original chez le greffier Boileau, frère aîné de Despréaux. Un président, neveu de Boileau, et la comtesse de Crissée, vieille et enragée plaideuse, étaient les deux originaux d’après lesquels la scène avait été imaginée.

1455. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Voilà pourquoi ce cérébral préfère aux exaltations du cœur et aux spasmes passagers des sens les lucides bonheurs de la curiosité : « Votre maison est originale », dit-il à Mme Leverdet ; « je suis fâché de ne pas y être venu plus tôt. […] Qu’il reproduise sur le papier, et par le moyen de mots adaptés, ces mœurs et ce décor, consciencieusement, exactement, n’aura-t-il pas exécuté le programme d’un art tout contemporain, par suite aussi vivant qu’original ? […] Si originaux soient-ils, et quelque outrance qu’ils aient mise dans le déploiement de leur individualité, ils n’en appartiennent pas moins à une tradition. […] Il suffit de constater que toute créature humaine est, par quelques côtés, le produit d’un milieu et d’une classe qu’elle représente, — par d’autres, une personne solitaire dans cette classe, originale dans ce milieu. […] Mais il est bon que l’observation interne, celle qui se préoccupe du détail singulier, des caractères originaux, de la psychologie et, par suite, des problèmes moraux reprenne sa place à côté de l’autre, de cette observation qui s’attache uniquement aux effets, à la couleur de la vie sans chercher les causes.

1456. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

Ce sont des développements musicaux, des recherches de syllabes : les rythmes, peu originaux ; les sujets, banals, empruntés peut-être au lexique de Baudelaire. […] Dans le premier volume, seul publié, de son roman Isis, en 1863, il énonçait déjà une conception très originale de la vie moderne. […] C’est que ce mot, s’il a une signification propre, signifie un esprit absolument original, naturellement différent des esprits qui l’entourent. […] On en est venu à croire sérieusement que c’était une nécessité pour l’artiste d’être original, c’est-à-dire de fournir au public une œuvre tout à fait différente de celles qui lui avaient plu auparavant. […] Stead, qui est, tel qu’il est, une des personnalités les plus originales de l’Angleterre contemporaine, et la plus populaire à coup sûr après M. 

1457. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Son style est un fouillis de choses heurtées, contradictoires, jolies et laides, tragiques et bouffonnes, à travers quoi perce un tempérament intéressant et original. […] Peut-être y touche-t-il, du bout des doigts, pour comparer la copie à l’original, mais il sait d’avance que cette fois encore l’original n’aura pas été rendu dans ses extrêmes délicatesses et ses infinies nuances, et il a plaisir à se sentir si impénétrable toujours. […] Richepin, Péladan, Villiers de l’Isle-Adam, celui-ci zingari, celui-là mage, cet autre chevalier de l’Ordre de Malte, nous entrons dans un romantisme plus honnête et quelquefois aussi plus original. […] Son roman de début, La Première Passion, bien accueilli de la critique, accuse une langue originale, un sentiment très vif des choses de l’amour et une très réelle connaissance des dessous parisiens. — Enfin et pour être fidèle à ma conscience d’annotateur, il me faudrait citer tout au moins ici, avec les romans et nouvelles (quelques-unes sont exquises) de M. 

1458. (1922) Le stupide XIXe siècle, exposé des insanités meurtrières qui se sont abattues sur la France depuis 130 ans, 1789-1919

Mais qu’est-ce que Comte à côté de Descartes, du solide Descartes du Discours de la méthode et du poète si original des tourbillons ! […] Il a alimenté la bourgeoisie, versé en elle, à chaque génération, des éléments physiquement et moralement sains, laborieux, parfois généreux, toujours originaux et puissants. […] La pensée, développée plus tard par René Quinton (cet esprit puissant et original) d’axes permanents et fixes, au milieu des lignes et tourbillons du changement, fût apparue alors comme un blasphème scientifique, si quelqu’un eût osé la formuler. […] Car le premier Empire a caporalisé les Facultés et les Sciences et gravement amoindri, sinon tué, le goût des recherches originales, hors des sentiers battus. […] Aux époques fortes, où abondent les talents originaux, vigoureux et sages, ce sont les hommes qui mènent les idées, lesquelles composent l’ambiance.

1459. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

Il me semble qu’on aurait pu s’exprimer plus décemment sur un aussi grand penseur, sur un aussi grand écrivain, sur un auteur original qui a passé pour le bréviaire des honnêtes gens, qui n’est pas encore tombé de leurs mains, et qui pourrait bien y rester à jamais. […] Ce texte laconique fournit à Sénèque une abondance incroyable d’idées neuves, originales, ingénieuses, fortes, délicates, souvent grandes, quelquefois sublimes. […] La conformité de nos mœurs et de celles de son temps est quelquefois si singulière, qu’on revient de la traduction à l’original pour s’en assurer. « Je voudrais bien, dit-il, Lettre LXXXVII, que Caton rencontrât un de nos élégants, précédé de ses coureurs, de ses postillons, de ses nègres, tous enveloppés dans le même tourbillon de poussière… » On se croirait presque sur la route de Versailles. […] Je crois qu’on peut s’en épargner la lecture et dans la traduction et dans l’original. […] On sera tenté de me prendre pour une espèce d’original ; mais qu’est-ce que cela fait ?

1460. (1864) Le roman contemporain

La figure de Hadji-Hacros, le roi de la montagne, qui tient les livres de ses opérations en partie double, fait élever sa fille à l’Hétairie, — c’est la maison de Saint-Denis des demoiselles athéniennes, — et place en bonnes valeurs sur les fonds publics les produits de son brigandage, est originale et bien dessinée. […] Flaubert a tenté une aventure bizarre : il a voulu faire une copie sans original. […] Loin de moi la pensée de réhabiliter le fâcheux usage que Henry Mürger a fait d’un talent dont le vol ne s’élève pas très haut, mais qui est naturel, original et primesautier. […] Champfleury n’est plus sur son terrain, et qu’il fait des portraits pour lesquels les originaux n’ont pas posé.

1461. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

Elle est, à l’égard de l’original, d’une fidélité qu’on ne retrouve en aucune autre traduction en vers dans notre littérature, et pourtant cette fidélité n’est point celle d’un pédant en face de son texte  : c’est plutôt la magnanime loyauté de poète à poète. […] Il n’y a certes rien de bien original dans le livre de Miss Stokes. […] L’ouvrier donne aussi au dessin original une très parfaite richesse de détail, et les fils, avec leur couleur variée et leurs délicats reflets, ajoutent à l’œuvre une nouvelle source de plaisir. […] L’adolescence est rarement originale. […] La seule proposition originale que M. 

1462. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

Si vouloir traduire littéralement et rhythmiquement est chimérique, les curieux ce l’original s’efforceront à entendre l’original ; qu’ils y soient aidés, certes, par une version non musicale enseignant la puissance des mots et reflétant la couleur des phrases : et ils avanceront, plus grandement, dans l’intelligence du poème.

1463. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre I. De l’intensité des états psychologiques »

Nous éprouvons quelque chose d’analogue dans certains rêves, ou nous n’imaginons rien que de très ordinaire, et au travers desquels résonne pourtant je ne sais quelle note originale. […] Comprendrait-on le pouvoir expressif ou plutôt suggestif de la musique, si l’on n’admettait pas que nous répétons intérieurement les sons entendus, de manière à nous replacer dans l’état psychologique d’où ils sont sortis, état original, qu’on ne saurait exprimer, mais que les mouvements adoptés par l’ensemble de notre corps nous suggèrent ?

1464. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Il ferma les commentateurs et les critiques, et se mit à étudier les originaux, comme on l’avait fait à la renaissance des lettres. […] Ces divers morceaux sont ce que nous avons de plus original et de plus profond sur la philosophie de l’histoire.

1465. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Où est l’esprit vrai, le jugement original et neuf ?

1466. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — I. » pp. 134-154

On peut regretter en ce style incommode, dans lequel on s’adresse continuellement à lui à la seconde personne, de ne pas trouver l’agrément ni la rapidité des mémoires ordinaires, et de n’y reconnaître qu’à peine le trait d’expression et la marque originale du narrateur ou de l’inspirateur même : mais n’est-ce pas aussi un premier caractère d’originalité, et plus significatif que tous les autres, qu’une telle forme ainsi adoptée et imposée durant une narration si longue ; et n’y voit-on pas déjà le ton et l’étiquette rigoureuse qui régnait dans ce château de Sully quand on s’adressait au maître ?

1467. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Lavallée a été naturellement amené à rechercher les origines et les fortunes diverses de cette maison ; il a trouvé à Versailles, soit dans la bibliothèque du séminaire, soit aux archives de la préfecture, un grand nombre de recueils et de pièces originales qui permettent d’établir le récit le plus détaillé avec certitude.

1468. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — I » pp. 139-158

La vie de ce poète original, à la fois grave et charmant, est des plus singulières, toute simple au-dehors et semée au-dedans d’écueils et de précipices ; il est arrivé à composer ses œuvres si morales et si attachantes par un chemin très détourné, très éloigné des voies communes, et qu’il n’eût conseillé à personne.

1469. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

Lorsqu’on a annoncé ses Mémoires, j’ai eu aussitôt une extrême envie de les lire, persuadé que nul n’était aussi à même que lui de nous introduire dans cette société du commencement du xviiie  siècle, sur laquelle on a jusqu’ici assez peu de témoignages détaillés et de confidences originales.

1470. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — II » pp. 316-336

Et il eut l’idée, très hardie et originale, de se servir pour cela du secours des alliés, de ceux-mêmes qui étaient de la religion des rebelles : car la France alors n’avait pas de marine, elle n’avait pas un seul vaisseau à opposer à Soubise triomphant sur les mers depuis sa capture.

1471. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — II » pp. 375-394

Cette lettre du prince Henri est suivie de six lettres philosophiques de Frédéric où, sans le combattre directement, il dit à côté, et du ton particulier, mordant et original qui lui est propre, bien des choses faites pour provoquer les réponses du prince.

1472. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de l’Académie française, par Pellisson et d’Olivet, avec introduction et notes, par Ch.-L. Livet. » pp. 195-217

Livet croit devoir ajouter en note, par manière de restriction : « La Bruyère est moins original qu’on ne le dit ici.

1473. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Je l’ai promis cependant, et je dois dire ici comment la personne que l’on commence, ce me semble, à entrevoir par bien des traits originaux, et qui nous arriva de Russie toute mure, toute formée, et douée d’une autorité précoce qui s’accrut considérablement avec les années, m’inspira, lorsque j’eus l’honneur de la connaître, plus de respect et de vénération que d’attrait.

1474. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Sur la plupart des sujets qui s’éloignent de ce temps-ci, il n’a pas d’études antérieures, originales, personnelles, et il part des données que lui fournit le livre même qu’il a à juger : il ne les contrôle pas.

1475. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Celle-ci, durant son séjour en Angleterre, ne vit pas seulement les gens du monde et de la haute société, elle voulut connaître les savants, et l’on a le récit de sa visite au grand critique d’alors, à la fois homme de goût et roi des cuistres, à cet original de Samuel Johnson ; je donne l’historiette telle qu’on la lit dans la Vie du célèbre docteur par son fidèle Boswell ; il la tenait lui-même de la bouche de M. 

1476. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

Je citerai à l’appui une anecdote que voici d’original ; je la tire d’une lettre particulière écrite de Paris à M. de Pontchâteau et insérée dans un Journal manuscrit de ce dernier, à la date du 16 janvier 1679 : « M. 

1477. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Quand il lui aurait prêté plus de choses encore que Platon n’en prêta à Socrate, il résulte au moins de cette Conversation que Fabre était un causeur spirituel, original et volontiers paradoxal.

1478. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Nous y verrons un à un tous les fils dont se compose la trame la plus solide de l’histoire, le dessous et l’envers de la tapisserie ; nous apprendrons à y connaître au naturel quelques figures de diplomates guerriers, d’hommes d’État, gens d’esprit ou même écrivains originaux, que les récits du dehors et le spectacle de l’avant-scène laissaient à peine soupçonner43.

1479. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Collé. »

Un de ces critiques qu’on méprise aujourd’hui et qu’on se flatte d’avoir enterrés, La Harpe, a dit à ce sujet excellemment : « Il est bien vrai que la gaîté qui tient à la licence est plus facile qu’aucune autre ; mais celle de Collé est si originale et si franche, qu’on pourrait croire qu’elle n’avait pas besoin de si mauvaises mœurs pour trouver où se placer. » Nous allons plus loin que La Harpe, et nous disons que ces mœurs mêmes, prises sur le fait et rendues avec cette touche facile et hardie, ajoutent, du point de vue où nous sommes, un prix tout particulier au tableau : elles y mettent la signature d’une époque.

1480. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

Catinat était encore à Casal en janvier 1687, et lorsque Louvois lui annonça, comme à tous les gouverneurs de place, la guérison du roi après la grande opération, il reçut de lui cette lettre d’un tour original et franc : « J’en ai, de bon cœur, célébré la joie à souper avec bonne compagnie de notre garnison.

1481. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite et fin.) »

On possède peu de détails originaux et de renseignements écrits sur ces dix années de sa fin : la tradition presque seule a parlé.

1482. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Toutes ces premières impressions, celles du toit domestique, de la maison du pasteur auquel d’abord on l’avait confié, la mort d’une mère, puis la première communion, et le sentiment pénible qu’éprouva le jeune garçon en passant de son Alsace riante et champêtre aux murs froids d’un collège, ces premières descriptions ne peuvent nous toucher que médiocrement : il y a du vrai, de la sincérité ; mais ces peintures de l’enfance, recommencées sans cesse, n’ont de prix que lorsqu’elles ouvrent la vie d’un auteur original, d’un poète célèbre. « Les souvenirs de ma première enfance sont bien vagues, nous dit M. 

1483. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

C’étaient, pour peu qu’on y songe, deux profils des plus originaux et chez qui tout semblait en relief et en opposition : M. 

1484. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — M. de Sénancour, en 1832 »

C’est un don fortifié d’étude, une peinture originale et grave, qui ne se rapporte à aucun maître, quelque chose d’intermédiaire entre les prés verdoyants de Ruysdaël et les blanchâtres escarpements de Salvator Rosa.

1485. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

Ces deux romans m’avaient été signalés comme écrits par une jeune femme qui venait assez souvent dans un cabinet de lecture de la place de l’Odéon et qui vivait d’une vie originale, d’une vie de garçon et d’étudiant.

1486. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « QUELQUES VÉRITÉS SUR LA SITUATION EN LITTÉRATURE. » pp. 415-441

A prendre en effet les trois derniers siècles à leur année 43, on n’aurait guère pu deviner, en littérature (pour ne parler que de cela), tout ce qu’ils ont enfanté de plus original et de plus grand.

1487. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Boileau »

Toutefois, en attendant que cette grande et longue décadence du moyen-âge fût menée à terme, ce qui n’arriva qu’à la fin du xviiie  siècle, en attendant que l’ère véritablement moderne commençât pour la société et pour l’art en particulier, la France, à peine reposée des agitations de la Ligue et de la Fronde, se créait lentement une littérature, une poésie, tardive sans doute et quelque peu artificielle, mais d’un mélange habilement fondu, originale dans son imitation, et belle encore au déclin de la société dont elle décorait la ruine.

1488. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre III. Montesquieu »

Bossuet n’avait presque rien dit de la décadence de l’empire romain : ici Montesquieu marche seul ; et c’est une partie très neuve, très étudiée, et très originale.

1489. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

Duruy est surtout original en ceci, qu’à la scrupuleuse critique d’un savant moderne il joint constamment le souci moral d’un historien antique.

1490. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

Dans la poésie lyrique la verve originale de M. 

1491. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

Le duc de Saint-Simon, pour prendre un exemple moderne, à force de saisir au vif ses originaux, et de les faire saillir aux yeux, en a pu malmener et outrager quelques-uns.

1492. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mlle de Lespinasse. » pp. 121-142

[NdA] Voici une anecdote que je tiens d’original.

1493. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

Sa bienfaisance avait, comme toutes ses autres qualités, quelque chose de singulier et d’original qui ne se voyait qu’en elle.

1494. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Procès de Jeanne d’arc, publiés pour la première fois par M. J. Quicherat. (6 vol. in-8º.) » pp. 399-420

En général, l’impression qui résulte de cette lecture des originaux, quand on la fait avec suite, est beaucoup plus grave, plus naïve et plus simple.

1495. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Je ne pousserai pas plus loin la citation de ce portrait des plus frappants, et qui est d’original.

1496. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Les avis d’une amie aimable persuadent toujours plus que ceux d’une sœur sévère. » Les lettres de Ninon, d’un tour simple, original, et pareil au ton de sa conversation, sont très peu nombreuses ; je n’en connais qu’une douzaine d’authentiques, et elles sont adressées à Saint-Évremond.

1497. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Mémoires du cardinal de Retz. (Collection Michaud et Poujoulat, édition Champollion.) 1837 » pp. 40-61

Cette langue de Retz est neuve et originale avec propriété.

1498. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

Ce poète original et incomplet n’est pas indigne d’un souvenir.

1499. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame de Motteville. » pp. 168-188

Mais la partie originale de ces Mémoires est celle qui prend à partir de là, et qui traite de ce qui s’est passé à portée de vue de l’auteur.

1500. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « M. Fiévée. Correspondance et relations avec Bonaparte. (3 vol. in-8º. — 1837.) » pp. 217-237

Doué d’une taille avantageuse et de qualités physiques auxquelles il mit toujours du prix, il sut, dès ses premiers pas, se faire compter dans le monde par sa tenue, son calme, par une manière d’être qui annonçait déjà un caractère arrêté, par beaucoup d’aperçus dans l’esprit, « d’autant plus originaux que la plupart étaient sans solution » ; il les faisait valoir encore par une tournure d’expression précise et neuve.

1501. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Michaud, de l’Académie française. » pp. 20-40

Michaud revient cet autre honneur solide d’avoir eu, le premier chez nous, l’instinct du document original en histoire, d’en avoir de plus en plus apprécié l’importance en écrivant, d’avoir eu l’idée de l’enquête historique au complet, faite sur des pièces non seulement nationales, mais contradictoires et de source étrangère.

1502. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

. — Et qui n’aimerait, écrivait le chevalier d’Aydie à Mme Du Deffand, qui n’aimerait pas cet homme, ce bonhomme, ce grand homme, original dans ses ouvrages, dans son caractère, dans ses manières, et toujours ou digne d’admiration ou adorable ?

1503. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Son œil brun, vif, spirituel, et quelquefois d’une douceur charmante ou d’une mélancolie profonde, était surmonté d’un arc de sourcil fort élevé, qui donnait à sa physionomie une expression très originale.

1504. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

Quelqu’un, ces jours passés, m’a sommé de lui en donner un extrait ; je me suis fort excusé sur ce que l’original n’était pas entre mes mains, ce qui fit une scène semblable à celle qui se trouve dans Le Joueur, où M. 

1505. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Cette pièce des Vénitiens, et surtout le cinquième acte, sont ce qu’Arnault a fait de mieux et de plus original au théâtre.

1506. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre I. Shakespeare — Sa vie »

Racan disait à mademoiselle de Gournay : « J’ai vu « ce matin M. de Malherbe coudre lui-même avec du gros fil gris une « liasse blanche où il y aura bientôt des sonnets. » Chaque drame de Shakespeare, composé pour les besoins de sa troupe, était, selon toute apparence, appris et répété à la hâte par les acteurs sur l’original même, qu’on ne prenait pas le temps de copier ; de là, pour lui comme pour Molière, le dépècement et la perte des manuscrits.

1507. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Henri Heine »

Heine s’y reconnaît à toute ligne, avec cette originale et moqueuse manière qui est la sienne.

1508. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ernest Hello » pp. 207-235

Il s’agit de Saints dans ce livre, tout aussi original de christianisme que de talent ; car, dans ce temps de mœurs incrédules et superficielles, le Christianisme entendu à cette profondeur semble une prodigieuse originalité.

1509. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre v »

Je lui fais tort si je ne vous dis pas son amour de son foyer, sa vigoureuse curiosité intellectuelle qui s’exerce de la manière la plus originale au cours même de la guerre, sa pleine satisfaction dans cette discipline militaire où il satisfait ce qu’il appelle sa « nostalgie de la cathédrale absente », enfin sa volonté indomptable et bien réfléchie d’aller « jusqu’au bout ».

1510. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre III. “ Fantômes de vivants ” et “ recherche psychique ” »

On parle indifféremment de la pensée ou du cerveau, soit qu’on fasse du mental un « épiphénomène » du cérébral, comme le veut le matérialisme, soit qu’on mette le mental et le cérébral sur la même ligne en les considérant comme deux traductions, en langues différentes, du même original.

1511. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre X. »

« J’ai sous le bras, dans mon carquois », dit-il avec sa forme originale, « bien des traits qui parlent aux intelligences, mais qui, pour la foule, ont besoin d’interprètes. — 111 Tends ton arc vers le but, ô mon âme !

1512. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

Ghil est jeune, et, de tous les poètes qui font du bruit en cette époque, il nous paraît, sans conteste, le plus doué, le plus original, et, certainement celui que l’avenir peut s’apprêter à irradier. […] cependant qu’au n° du 19 Mars du « Chat Noir » nous relevons une spirituelle, originale — et compréhensive — parodie signée de Pierre Mille46, à ses débuts. […] Une matinée originale ! […] Schumann se donne une peine infinie pour paraître original et profond. […] Par une plaquette, Eurythmies, parue en 1904, il se révéla lui-même poète original, pénétrant, d’un rythme étrangement musical et nouveau… Les « Ecrits pour l’Art » reparurent en mars 1905, et M. 

1513. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Il n’est pas une de ses phrases qui ne soit originale et belle, qui ne donne l’impression d’une musique savamment combinée. […] Le grand malheur, pour la poésie de Whitman, est que, si belle et si originale qu’elle soit, elle ne peut, en vérité, être appréciée de personne à la façon qu’il faudrait. […] Romancier, dramaturge, aussi longtemps qu’il produit des œuvres originales, M.  […] Que l’on serre le texte de très près, ou qu’on le transcrive de très loin, on peut être assuré de mal traduire, et que la traduction, en tout cas, sera toute différente de l’original. […] Elle est au contraire très originale ou, pour mieux dire, très locale ; et c’est sans doute ce qui l’aura empêchée de se répandre hors de son pays.

1514. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Pareillement, que le lecteur aille lui-même lire dans les originaux la bestialité de Pierre Luigi Farnèse, le fils du pape, comment le jeune et honnête évêque de Fano mourut de son attentat, et comment le pape, traitant ce crime « de légèreté juvénile », lui donna par cette bulle secrète l’absolution « la plus ample de toutes les peines que, par incontinence humaine, en quelque façon ou pour quelque cause que ce fût, il eût pu encourir. » Pour ce qui est de la sécurité civile, Bentivoglio fait tuer tous les Marescotti ; Hippolyte d’Est fait crever les yeux à son frère, en sa présence ; César Borgia tue son frère ; le meurtre est dans les mœurs et n’excite plus d’étonnement ; on demande au pêcheur qui a vu lancer le corps à l’eau, pourquoi il n’avait pas averti le gouverneur de la ville ; « il répond qu’il a vu en sa vie jeter une centaine de corps au même endroit, et que jamais personne ne s’en est inquiété. » « Dans notre ville, dit un vieil historien, il se faisait quantité de meurtres et de pillages le jour et la nuit, et il se passait à peine un jour que quelqu’un ne fût tué. » César, un jour, tua Peroso, favori du pape, entre ses bras et sous son manteau, tellement que le sang en jaillit au visage du pape. […] Lui aussi, comme Raphaël et Titien, il a son idée de l’homme, idée inépuisable de laquelle sortent par centaines les figures vivantes et les scènes de mœurs, mais combien nationales et originales ! […] On voit alors se former une littérature nouvelle, élevée et originale, éloquente et mesurée, armée à la fois contre les puritains qui sacrifient à la tyrannie du texte la liberté de l’intelligence, et contre les catholiques qui sacrifient à la tyrannie de la tradition l’indépendance de l’examen, également opposée à la servilité de l’interprétation littérale et à la servilité de l’interprétation imposée. […] The interpreter answered : This parlour is the heart of a man that was never sanctified by the sweet grace of the Gospel — the dust is his original sin, and inward corruptions, that have defiled the whole man.

1515. (1929) Amiel ou la part du rêve

Mais ce que j’ai recueilli avec le plus d’intérêt, c’est la tradition orale conservée à Genève sur ce professeur de figure originale, mort il y a moins d’un demi-siècle. […] Ce qui est original a seul une raison suffisante de vivre. […] Les beaux rêves que faisait Amiel à Berlin et dans sa thèse de 1849, ceux d’une culture originale et active en Suisse romande, sont empêchés ou mutilés par deux forces : l’antagonisme, rançon du particularisme cantonal, antagonisme de Vaud contre Genève, de Genève contre Genève, du Genevois contre lui-même, et l’appel d’air, l’écrémage de Paris. […] C’est original et charmant.

1516. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Il ne peut décider qu’à tâtons, par improvisation téméraire, ou sur l’avis des autres ; si son jugement est original, il ne peut être accrédité ; s’il est accrédité, il ne peut être original. […] Michelet ressemble souvent au grand comique par l’audace originale de ses inventions, par la familiarité de ses allégories, par la légèreté et l’aisance avec laquelle il bat ses adversaires. […] Fontainebleau est surtout un paysage d’automne, le plus original, le plus sauvage et le plus doux, le plus recueilli. […] Il faut que l’histoire soit respectueuse et que l’art soit original. […] L’élan intérieur de l’invention originale s’est dirigé et accéléré sous l’élan extérieur de l’intervention étrangère.

1517. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

Et ce ne sont point là des caricatures sans originaux. […] C’est un moliériste sans fanatisme, ce qui est tout à fait original. […] Il me semble que c’est une pièce originale, ou, si vous aimez mieux, très particulière. […] Ce don, à ce degré, est même très original. […] La pièce est connue ; mais elle est, je crois, de celles qui gagnent en vieillissant, et il m’a semblé que je saisissais mieux, l’autre jour, en quoi elle est originale et forte.

1518. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Dans un avant-propos (juillet 1831) où il se déclare convaincu que « si l’art est une fable, il doit être une fable philosophique », — idée qui depuis Marion de Lorme, et d’ailleurs bien avant ce drame, avait cessé d’être originale ou neuve, — Alfred de Vigny dit qu’au centre du cercle décrit par sa composition, « un regard sûr peut entrevoir la destinée contre laquelle nous luttons toujours, mais qui l’emporte sur nous dès que le caractère s’affaiblit ou s’altère, et qui d’un pas très sûr nous mène à ses fins mystérieuses, et souvent à l’expiation par des voies impossibles à prévoir ». […] C’est un poète qui sans doute est un homme distinct de tous les autres par de spéciales facultés d’éprouver, de penser, d’exprimer ; il est, oui, original ; mais en même temps, cet homme, cet individu absorbe et restitue toute une humanité — toute l’humanité moderne ; l’incessant effort, à travers tant de sommeils pleins de jolis rêves, et à travers tant de gloires, qui n’avaient pas été tout à fait nationales, de notre immémorial instinct poétique, aboutit enfin, non sans s’être accru des adultérations classiques et étrangères, en la toute-puissance, si diversement une et si formidablement harmonieuse, de son œuvre. […] Est-ce que les trois nouveaux esprits auxquels je pense étaient, chacun dans son inspiration, si étrangement originaux, si révolutionnaires eux-mêmes à leur tour, qu’ils ne pouvaient admettre ce qui fut avant eux, ce qui durerait après eux, et avaient-ils en effet besoin de nier pour être crus ? […] Désireux avant tout de passer pour originaux, ils se distinguaient, d’abord par la malpropreté voulue de leurs vêtements, et ensuite parleur absence de talent poétique. […] Mais, elles-mêmes, ni son ironie ni sa brutalité ne sont originales.

1519. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Béranger n’a étudié ni les langues anciennes, ni les langues de l’Europe moderne ; il ne connaît que la langue dont il se sert, et cette condition, assez rare parmi les écrivains de tous les temps, en limitant nécessairement le nombre de ses lectures, en les renfermant dans un cercle particulier, a donné à son esprit une direction originale. […] Sismondi même, qui, le premier, a écrit l’histoire des temps mérovingiens en consultant exclusivement les textes originaux, n’avait pas encore entrepris les annales de notre pays. […] Cette réserve obstinée, qui semble si facile, et qui pourtant est si rarement pratiquée, donne à ses œuvres une physionomie originale. […] Le lecteur sent à chaque ligne qu’il se trouve en présence d’un génie original. […] Si j’avais besoin de prouver que les strophes du poète français, malgré les souvenirs qu’elles réveillent, sont vraiment originales, il me suffirait d’insister sur le caractère exclusivement sensuel du cantique hébreu.

1520. (1896) Les idées en marche pp. 1-385

Il s’agit d’apprendre à lire des individualités à travers leurs œuvres, de dégager la part originale qu’elles ont apportée au lot commun. […] Son œuvre n’est point la fille d’un esprit qui se développe suivant une norme unique ou caractéristique ; elle est le résumé d’une multitude de tournures qu’a prises un tempérament souple et distingué, une sorte de parure cosmopolite, originale certes et brillante, mais pouvant paraître clinquant à qui n’y regarderait pas de très près. […] D’abord des petites remarques juxtaposées au bonheur des mots, un grouillement de documents et de notes toujours caractérisées, originales, surprenantes. […] Dans l’histoire de la métaphysique, ces paroles de Monelle auront leur place à part, demeureront comme un des témoignages les plus savoureux d’une pensée originale et primesautière. […] Cette fougue est ornée quand elle veut, malicieuse ou brutale suivant un rythme original et rare.

1521. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome I

Chaque esprit de savant a donc son allure originale, même dans l’ordre des connaissances les plus dégagées de la complexité de la vie. […] L’élément de l’imagination primitive et originale une fois donné, le reste suit nécessairement. […] De menus détails de mœurs la révèlent, mieux encore les noms des personnages originaux qui furent les chefs de file des grandes besognes. […] Mais un tour d’esprit très original et rendu plus original par une éducation très personnelle voulut que ce soldat de Napoléon traversât son époque littéraire comme on traverse un pays étranger dont on ne sait pas la langue, — sans être compris. […] Une architecture originale fait de chaque ville une occasion nouvelle de rêves, comme un foisonnement prodigieux de toiles et de fresques en fait un paradis nouveau de plaisirs esthétiques.

1522. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

Dans ses productions les plus originales on trouverait des réminiscences d’œuvres étrangères, un apport de l’expérience, des rappels de la réalité. […] En s’abandonnant à son inspiration, le poète trouvera des combinaisons d’idées originales, que la réflexion ne lui fournirait pas29. […] Pourquoi Edgar Poe, se proposant d’écrire un poème de l’effet poétique le plus intense, c’est-à-dire court, original, d’un caractère mélancolique, avec refrains, est-il justement tombé sur son poème du Corbeau ? […] Il faudra donc nous ingénier, essayer de combinaisons inédites et, par un effort d’invention verbale, briser les clichés du langage courant pour trouver à nos idées une forme satisfaisante ; et cet effort doit être d’autant plus grand que la pensée à exprimer est plus originale. […] V. à ce sujet des remarques originales, exposées en une terminologie un peu étrange, dans la Phonologie esthétique de la langue française, par J.

1523. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre I. La Renaissance païenne. » pp. 239-403

Vers 1490260, on a recommencé à lire les classiques ; coup sur coup on les traduit ; bientôt c’est une mode que de les lire dans l’original. […] « À la fin du règne de Henri VIII, dit le vieux Puttenham, s’éleva une compagnie nouvelle de poëtes de cour, dont sir Thomas Wyatt l’aîné, et Henri, comte de Surrey, furent les deux capitaines, lesquels, ayant voyagé en Italie et goûté le doux style et les nobles rhythmes de la poésie italienne, ainsi que des novices nouvellement sortis des écoles de Dante, Pétrarque, Arioste, polirent grandement notre poésie vulgaire qui était rude et villageoise268, et pour cette cause peuvent être justement appelés les premiers réformateurs du style et du mètre anglais. » Non que leur idée soit bien originale ou manifeste franchement l’esprit nouveau. […] Car la science et la philosophie ne font que traduire par des formules précises la conception originale que l’art et la poésie rendent sensibles par des figures imaginaires ; une fois que l’idée d’un siècle s’est manifestée en vers par des créations idéales, elle arrive naturellement à s’exprimer en prose par des raisonnements positifs. […] Deux écrivains surtout manifestent cet état d’esprit, le premier, Robert Burton, ecclésiastique et solitaire d’Université, qui passa sa vie dans les bibliothèques et feuilleta toutes les sciences, aussi érudit que Rabelais, d’une mémoire inépuisable et débordante ; inégal d’ailleurs, doué de verve et gai par saccades, mais le plus souvent triste et morose, jusqu’à confesser dans son épitaphe que la mélancolie a fait sa vie et sa mort ; avant tout original, amateur de son propre sens et l’un des premiers modèles de ce singulier tempérament anglais qui, retirant l’homme en lui-même, développe en lui tantôt l’imagination, tantôt le scrupule, tantôt la bizarrerie, et fait de lui, selon les circonstances, un poëte, un excentrique, un humoriste, un fou ou un puritain. […] Nul n’a produit au jour, par des expressions plus éclatantes et plus originales, la séve poétique qui coule dans tous les esprits du siècle. « L’injuste oubli, dit-il, secoue à l’aveugle ses pavots, et traite la mémoire des hommes sans distinguer, entre leurs droits à l’immortalité.

1524. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Mettons aussi que l’on procure à tel autre lecteur, très versé dans la langue de l’original, la docte jouissance d’une comparaison curieuse ! […] C’est qu’il fut original et contemporain sans arrière-pensée par la seule force de ses dons naturels. […] Il en rapporta des impressions originales et colorées. […] — Quel est cet original ? […] Les drames originaux de Chatterton et de la Maréchale l’Ancre se soutiennent avec noblesse.

1525. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Et le bilinguisme de la Belgique ne l’empêche pas d’être une nation, individuelle et originale. […] Caractères généraux « Aujourd’hui, leur littérature est presque nulle », écrit Hippolyte Taine, dans un chapitre de la Philosophie de l’art consacré aux Belges5, et plus loin : « Ils ne peuvent citer de ces esprits créateurs qui ouvrent sur le monde de grandes vues originales, ou enchâssent leurs conceptions dans de belles formes capables d’un ascendant universel6. » L’essai sur l’art dans les Pays-Bas date de 1868 ; un tel jugement était alors très juste. […] * * * Georges Rodenbach connut tôt la gloire parisienne : elle ne lui survécut guère… Pour réelle qu’ait été sur lui l’influence de Baudelaire et de François Coppée, gardons-nous de l’exagérer : son émotion porte une marque originale et nous rencontrerons dans cette étude peu de natures aussi affinées que la sienne. […] Sous une forme dédaigneuse de toutes les conventions dramatiques et assez déroutante souvent, la pensée ardente et originale de Picard se tourmente des problèmes de l’Au-delà et envisage la mort comme un soulagement à ces vains efforts que nous tentons ici-bas pour n’arriver qu’a une science fragile et incertaine. […] Ni ses conférences, ni ses innombrables articles n’ont pu toujours être recueillis, mais plusieurs volumes permettent d’apprécier la sûreté de sa science et le caractère original d’idées que l’on respecte, même s’il arrive de ne les point partager.

1526. (1914) Une année de critique

« Je fus, écrit-elle, comme la seule personne de goûts artistiques ou originaux au sein d’une brave famille bourgeoise. […] Il convient de le louer avant tout de ne se point attacher à paraître original. […] Son style, c’est un vocabulaire très personnel, c’est une économie originale des phrases, et puis encore une cadence inimitable dont s’enchantent les dévots du poète. […] Je trouvais peu nette la figure du héros du roman : l’image se brouille davantage si on la regarde tour à tour dans le livre et dans la pièce ; en réalité, l’original n’est plus le même, et tous les autres acteurs semblent exprimer pour une moitié leurs propres sentiments, et pour une autre ceux de l’auteur. […] À cette influence près, ses pages sur la pitié que l’on prend de l’être que l’on fait souffrir, sur le courage qu’il faut pour n’y pas succomber, sont les plus originales du livre : Il allait haletant, dément de compassion, no pensant qu’à cette femme, ne sentant que par elle, se substituant à elle, dans un vrai état d’altruisme, d’altération du moi, d’altérité du moi.

1527. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

Il faut regarder de plus près ce monde, et, sous les idées qui se développent, chercher les hommes qui vivent ; c’est le théâtre qui, par excellence, est le fruit original de la Renaissance anglaise, et c’est le théâtre qui, par excellence, rendra visibles les hommes de la Renaissance anglaise. […] Pour eux, ils gesticulent, ils jurent en italien, en français, en anglais2 ; ils plaisantent tout haut avec des mots recherchés, composites, colorés ; bref, ils ont les manières énergiques, originales et gaies des artistes, la même verve, le même sans-gêne, et, pour achever la ressemblance, la même envie de se singulariser, les mêmes besoins d’imagination, les mêmes inventions saugrenues et pittoresques, la barbe taillée en éventail, en pointe, en bêche, en T, les habits voyants et riches, empruntés aux cinq ou six nations voisines, brodés, dorés, bariolés, incessamment exagérés et remplacés par d’autres ; il y a un carnaval dans leur tête comme sur leur dos. […] Quand un drame original et national s’élève, les poëtes qui l’établissent portent en eux-mêmes les sentiments qu’il représente.

1528. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Aujourd’hui, il se révèle un romancier original, plein d’avenir. […] Il semble que le poète y est plus original et plus intense. […] Mallarmé n’apporta pas une conception originale du monde, il n’apporta qu’un entendement nouveau de la littérature et des arts.

1529. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Il est, si j’en ose parler d’après ceux qui le connaissent, de ces natures élevées, originales, qui ont besoin d’admirer, d’aimer, et qui, même dans l’ordre intellectuel, n’ont de satisfaction réelle que de se dévouer exclusivement à ce qu’ils aiment, à la mémoire illustre en qui leur sentiment de vénération et d’idéal s’est une fois logé.

1530. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Telles sont quelques-unes des idées vraiment originales et à la Fontenelle, que Marivaux énonce avec autant de netteté que de hardiesse : à quoi il faut ajouter cette remarque très fine qu’il n’omettait pas, et qu’il aurait pu s’appliquer à lui-même et à ses amis, à savoir que le goût d’une époque n’est pas toujours en raison du nombre des idées qui y circulent ou qui y fermentent, et qu’il y a des temps où la critique et le goût peuvent s’altérer ou disparaître, « pendant que le fonds de l’esprit humain va toujours croissant parmi les hommes ».

1531. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — I. » pp. 235-256

Voyons-le donc dans le monde où il vivait alors et comme un des témoins les plus discrets et les plus originaux de la société de ce temps.

1532. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « François Villon, sa vie et ses œuvres, par M. Antoine Campaux » pp. 279-302

Réduit souvent par sa faute à de tristes extrémités et amené, bien que jeune, à songer à sa dernière heure, Villon suppose qu’il fait son testament (il y en a deux de lui, le grand et le petit, sans compter un codicille), et dans cette supposition il lègue à ses amis tout ce qu’un pauvre diable qui n’a pas un sou vaillant peut donner ; parmi ses legs, il y a bon nombre de lays ou de ballades, et il a dû penser au jeu de mots : C’est à un poète une idée singulièrement originale et touchante, nous dit d’abord M. 

1533. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

Œuvres du chanoine Loys Papon, seigneur de Marcilly, poète forésien du xvie siècle, imprimées pour la première fois sur les manuscrits originaux par les soins et aux frais de M. 

1534. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier. »

Sans doute il serait aisé de signaler dans ces premiers essais plus d’une réminiscence : le Gautier original ne s’y prononce pas encore.

1535. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

Dans l’épigramme originale, le villageois ne prend pas ce détour de traire la brebis dans un vase d’argile pour en arroser ensuite la tombe : il amène directement la brebis mère sur le tertre funéraire, et soulevant la mamelle [texte grec]; tenant haut le pis (expression d’un pittoresque rustique), il fait jaillir le lait sur la terre même.

1536. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. (suite et fin.) »

Aucune analyse ne supplée aux originaux.

1537. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

Rousseau est le plus grand original et qui ne se modèle sur personne, qui ne s’inspire que de lui : aussi deviendra-t-il vite un modèle, et il mordra d’autant plus au vif sur la fibre humaine moderne qu’il est un pur moderne lui-même.

1538. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.) »

« L’Empereur, parlant de Catinat, disait l’avoir trouvé fort au-dessous de sa réputation, à l’inspection des lieux où il avait opéré en Italie et à la lecture de sa Correspondance avec Louvois. » Napoléon ne le trouvait nullement comparable à Vendôme ; il eût dit de Catinat, servant sous ses ordres, ce qu’il disait de Saint-Cyr : « Saint-Cyr, général très-prudent. » Toute la manière de voir et d’agir de Catinat a été exposée au long par lui-même dans ses lettres confidentielles à son frère Croisilles ; il le fait dans une langue naïve et forte, un peu enveloppée, médiocrement polie, grosse de raisons, et qui sent son fonds d’esprit solide ; il faut en passer par là, si on veut le comprendre, et bien posséder son Catinat, nature originale et compliquée, un peu difficile à déchiffrer, et qui ne se laisse pas lire couramment : « Si je t’entretenais au coin du feu de notre campagne, disait-il à ce frère qui était un autre lui-même (31 octobre 1691), j’aurais bien du plaisir à te faire toucher au doigt et à l’œil ma conduite et les prévoyances que j’ai eues sur ce qui pouvait arriver, et comme il a fallu charrier droit pour faire aller la campagne aussi loin qu’elle a été, sans exposer tout le gros des affaires.

1539. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Essai de critique naturelle, par M. Émile Deschanel. »

et que rien n’y ressemble moins que d’être toujours sur les épines comme aujourd’hui en lisant, que de prendre garde à chaque pas, de se questionner sans cesse, de se demander si c’est le bon texte, s’il n’y a pas altération, si l’auteur qu’on goûte n’a pas pris cela ailleurs, s’il a copié la réalité ou s’il a inventé, s’il est bien original et comment, s’il a été fidèle à sa nature, à sa race… et mille autres questions qui gâtent le plaisir, engendrent le doute, vous font gratter votre front, vous obligent à monter à votre bibliothèque, à grimper aux plus hauts rayons, à remuer tous vos livres, à consulter, à compulser, à redevenir un travailleur et un ouvrier enfin, au lieu d’un voluptueux et d’un délicat qui respirait l’esprit des choses et n’en prenait que ce qu’il en faut pour s’y délecter et s’y complaire !

1540. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. »

Tous les maîtres y échouèrent : « Je l’ai appris depuis tout seul, ajoute-t-il, et, pour ainsi dire, du jour au lendemain. » Quant à écrire, il ne le sut jamais : l’orthographe de ses lettres originales est inimaginable ; mais, quand on a une fois rétabli ce détail de manière que l’œil ne soit plus déconcerté, la langue en est courante, simple, franche, corsée, semée ou lardée de traits gais, gaillards, et même parfois grandioses.

1541. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

Le Dépôt de la Guerre possède sur lui le dossier le plus complet, d’où l’on tirerait une notice d’un caractère tout à fait neuf et original.

1542. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

Scribe me paraît consister dans la combinaison et l’agencement des scènes ; là est sa forme originale, le ressort vraiment distingué de son succès ; là il a mis de l’art, de l’étude, une habileté singulière, et son invention porte surtout là-dessus.

1543. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

Labinsky, on l’oublie complétement ; mais, en parlant si bien la langue d’alentour, ont-ils la leur propre, comme il sied aux poëtes et à tous écrivains originaux ?

1544. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

C’est là son trait original.

1545. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

Thierry, la pensée originale avait de quoi s’exciter dans son entrain naturel et ne pouvait qu’acquérir vite tout son ressort.

1546. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

Une littérature religieuse ainsi se forma, en partie traduite, en partie originale, correspondant à la littérature profane, moins riche, mais aussi variée, et couvrant en quelque sorte la même étendue, de l’épopée au fabliau, et du roman à la chronique : récits bibliques ou évangéliques, vies de saints et de saintes, miracles de la Vierge, légendes et traditions de toute sorte et de toute forme, toute une littérature enfin qui, se développant comme la poésie laïque, eut ainsi son âge romanesque, où s’épanouissent à profusion les plus fantastiques miracles, où le merveilleux continu se joue des lois de la nature et parfois des lois de la morale.

1547. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes décadents » pp. 63-99

« Quoique profondément originale, l’œuvre eut peu de succès.

1548. (1890) L’avenir de la science « XIX » p. 421

Nos Mérovingiens, entre autres, embrassèrent la vie romaine avec une naïveté tout à fait aimable, et quant aux deux civilisations ostrogothe et visigothe, elles sont si bien la prolongation immédiate de la civilisation romaine qu’elles ajoutèrent un chapitre important, quoique peu original, à l’histoire des littératures classiques.

1549. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVIII. Formule générale et tableau d’une époque » pp. 463-482

La Fontaine, si original dans sa manière, met ses fables sous la protection d’Esope et de Phèdre ; on dirait, à l’entendre, qu’il se borne à les traduire, à les interpréter.

1550. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

Madame nous apprend dans ses lettres originales que « le roi, malgré ses intrigues, couchait régulièrement toutes les nuits avec la reine.

1551. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre II »

Il a une grâce originale, ce gentilhomme parfumé de politesse et froid comme une perce-neige.

1552. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Huet, évêque d’Avranches, par M. Christian Bartholmèss. (1850.) » pp. 163-186

Je n’ai pu que l’effleurer en passant, mais j’ai tâché de ne hasarder aucun trait qui ne fut exact et vrai sur un personnage si considérable en son temps et de loin si original.

1553. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chansons de Béranger. (Édition nouvelle.) » pp. 286-308

Mais, à une époque d’effort, de lutte et de calcul, il a su trouver sa veine, il a fait jaillir sa poésie, une poésie savante et vive, sensible, élevée, malicieuse, originale, et il a excellé assez pour être sûr de vivre, lors même que quelques-unes des passions qu’il a servies, et qui ne sont pas immortelles, seront expirées.

1554. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Elle y vécut à demi retirée du monde, voyant ses amis et le duc de Villeroi jusqu’à la fin ; ayant souvent auprès d’elle son fils le comte de Caylus, original et philosophe, donnant à souper à des gens du monde et à des savants, et mêlant ensemble la dévotion, les bienséances, la liberté d’esprit et les grâces de la société, dans cette parfaite et un peu confuse mesure qui était celle du siècle précédent.

1555. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

. — Pour nous résumer sans trop de frivolité, la duchesse du Maine étudiait le cartésianisme avec M. de Malezieu ; elle lisait avec lui et par lui Virgile, Térence, Sophocle, Euripide, et bientôt elle put lire une partie de ces auteurs, les latins au moins, dans l’original.

1556. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

Turgot, c’est Condorcet plus idéal et plus original, c’est Condorcet resté moral et innocent.

1557. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La Grande Mademoiselle. » pp. 503-525

Une des figures les plus originales, les plus singulières et à la fois les plus naturelles du xviie  siècle, est certainement la Grande Mademoiselle, fille de Gaston, nièce de Louis XIII et cousine germaine de Louis XIV.

1558. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. Anecdotes. » pp. 123-144

C’était Cazotte, homme aimable et original, mais malheureusement infatué des rêveries des Illuminés.

1559. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le comte-pacha de Bonneval. » pp. 499-522

Il noua des intrigues avec l’Espagne ; puis, craignant d’être pris et enlevé par ordre de l’empereur, et à bout de finances, ne sachant exactement où donner de la tête, il se dirigea vers la frontière de Bosnie, sans dessein bien arrêté : « Quand je quittai Venise, disait-il plus tard en conversation et de ce ton original qui était le sien, la soupe avait mangé la vaisselle ; et, si la nation juive m’eût offert le commandement de cinquante mille hommes, j’aurais été faire le siège de Jérusalem. » C’est à cette frontière de Bosnie qu’il se trouve arrêté pendant quatorze mois dans une ville où l’empereur le réclamait, en danger d’être livré, et qu’il n’échappe finalement à l’extradition qu’en prenant le turban et faisant profession de mahométisme.

1560. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Voltaire et le président de Brosses, ou Une intrigue académique au XVIIIe siècle. » pp. 105-126

C’est un original unique, qui produit un grand nombre de faibles copistes ».

1561. (1889) L’art au point de vue sociologique « Introduction »

Vie intense, en effet, sera celle de l’artiste, car « on ne donne après tout la vie qu’en empruntant à son propre fonds… Produire par le don de sa seule vie personnelle une vie autre et originale, tel est le problème que doit résoudre tout créateur5. » La caractéristique du génie est donc, pour Guyau, « une sorte de vision intérieure des formes possibles de la vie », vision qui fera reculer au rang d’accident la vie réelle.

1562. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Introduction »

Grote, qui l’a développée très-subtilement dans un livre récent et original sur Platon et les disciples de Socrate, Londres, 1865.

1563. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Loutherbourg » pp. 258-274

Mais on le compare malheureusement avec un Vernet qui en alourdit le ciel, qui fait sortir l’embarras et le travail de la fabrique, qui accuse les eaux de fausseté, et qui rend sensible aux moins connaisseurs la différence d’une figure faite avec grâce, facilité, légèreté, esprit, mollesse, et d’une figure qui a du dessin et de la couleur, mais qui n’a que cela ; la différence d’un pinceau vigoureux, mais âpre et dur et d’une harmonie de nature ; d’un original et d’une belle imitation ; de Virgile et de Lucain.

1564. (1860) Ceci n’est pas un livre « Hors barrières » pp. 241-298

Église très originale — et très pittoresque… Je me borne forcément à ces qualificatifs un peu vagues, n’ayant jamais fait mes études d’archéologie.

1565. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

Et telles sont, en quelques mots, les nouvelles idées de cet homme, qui passa toute sa vie pour un talent aristocratique et original et qui meurt dans les idées communes, pires, pour un esprit de sa trempe, que le choléra qui l’a tué !

1566. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’art et la sexualité »

Et je dirai même plus : si une œuvre d’art quelconque a pour origine la pauvreté sensuelle d’une vie sans positifs contacts extérieur, quelqu’en soit la conception, l’étendue, la forme, la portée, le raffinement, l’origine et le succès, j’en suspecte, toujours, partout, et a priori, la valeur originale et géniale.

1567. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre IV. Le rêve »

Dans un curieux essai intitulé A chapter on dreams, Stevenson nous apprend que ses contes les plus originaux ont été composés ou tout au moins esquissés en rêve.

1568. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre II. Réalité des idées égalitaires »

Toutefois, sous l’empreinte originale des personnalités, il sera possible de retrouver, dans les œuvres d’un pays et d’un temps, les traces d’un même esprit ; ces notions communes qui, malgré les divergences des pensées personnelles, se seront imposées aux unes comme aux autres, on dira légitimement qu’elles « règnent ».

1569. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

On était habitué à des formes de style consacrées par de grands succès ; il n’était plus possible de disposer aussi librement du langage, et de lui donner un caractère individuel et original. […] Lorsque, pendant quelques années, la littérature eut suivi les traces du siècle de Louis XIV, sans avoir produit rien de marquant ni d’original, quelques hommes de talent montrèrent qu’il n’appartient qu’à la médiocrité d’imiter servilement, et que pour acquérir une réputation durable, s’il faut suivre des guides, il est plus essentiel encore de se livrer à sa propre impulsion. […] Un style pur et facile, des situations attachantes, maintiendront longtemps au théâtre Le Glorieux et Le Philosophe marié, où se trouvent cependant des caractères complètement hors de nature, La Chaussée, contre lequel s’élèvent quelques préjugés, montra peut-être un talent plus original. […] Maintenant on parle du style comme de la musique d’un opéra ; et l’on entend dire qu’avec de certains artifices de style, avec des procédés bien entendus, on peut rendre neuves et originales des pensées communes. […] Quelques-uns de ses ouvrages sont parvenus à se maintenir sur la scène, bien qu’ils ne portent pas un caractère original ; il a eu quelquefois de la grâce dans ses poésies légères ; mais sa renommée repose presque uniquement sur les succès qu’il a obtenus dans la critique.

1570. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

L’auteur se tortille désespérément, il vire sa plume en tire-bouchon, il accomplit des tours d’acrobate pour donner une allure originale à des pensées qui ne le sont pas toujours. […] Qu’y a-t-il, dans ses œuvres, de vraiment original ? […] Puis, à mesure que vous fixez la toile, vous vous sentez envahi par un trouble particulier, et, peu à peu, attaché, captivé, par la ressemblance morale de ces portraits, dont les originaux vous sont inconnus. […] On cita le mot d’un critique qui, désirant affirmer sa compétence, avait écrit : la traduction n’est pas mal, mais qu’est-ce que vous diriez si vous connaissiez l’original ! […] De tous les portraits qui composent cette galerie, le plus original, celui que M. 

1571. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Je ne sais plus en quelle année exacte de ce siècle, autour de 1820, je crois, il parut un petit livre de poésie extrêmement original, intitulé : les Poésies de Joseph Delorme. […] Mais une pièce étrange, et cependant au fond très originale, très belle et très triste, intitulée les Rayons jaunes, attira sur ce remarquable volume les regards et les moqueries des critiques du temps.

1572. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

en la pendant… Mais c’est désagréable, la Reine, au dernier moment, a fait grâce. » Donc aujourd’hui Saint-Victor m’introduit chez ce terrible original. […] Quelles figures fantasques, quels originaux, quelles silhouettes grotesques ou bizarres, puissantes ou tranchées, s’accusant dans les souvenirs, les légendes de famille, avec une verdeur, une saveur du cru, une turgescence de comique, qu’on ne trouve pas dans les bonshommes parisiens.

1573. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

Voici, par exemple, l’original de l’interminable promenade de Gervaise sur le trottoir des boulevards dans la neige : Vers les premiers jours de janvier 1823, un soir qu’il avait neigé, une créature rôdait en robe de bal et toute décolletée avec des fleurs sur la tète devant la vitre du café des officiers… Chaque fois que cette femme passait (devant un des élégants de l’endroit), il lui jetait, avec une bouffée de la fumée de son cigare, quelque apostrophe qu’il croyait spirituelle et gaie, comme : — Que tu es laide ! […] Le jardin de la rue Plumet combiné avec des souvenirs d’enfance est l’original du jardin du Paradou.

1574. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre III. Variétés vives de la parole intérieure »

Il est impossible de ne pas voir dans le phénomène démonique habituel à Socrate une manifestation originale et particulièrement vive de la parole intérieure morale, ou, tout au moins, un phénomène analogue. […] Rien de plus inexact qu’une pareille définition, contredite aussi bien par le témoignage d’Aristophane que par celui des disciples ; sans doute Socrate était ce que nous appellerions aujourd’hui un original ; mais son caractère était fait de fierté, d’optimisme et d’enthousiasme ; les sottises ou les fautes d’autrui ne paraissent jamais avoir altéré la sérénité de son âme ; l’ironie socratique est à l’opposé de la mélancolie.

1575. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

Le Discours à madame la marquise de Costa nous le rend avec des défauts de jeunesse et presque de rhétorique encore, qui tiennent au genre ; mais en même temps on ne perd pas longtemps de vue l’écrivain nouveau, le penseur original et hardi qui se décèle, qui se dresse par endroits et va décidément triompher. […] Ce fut là sa grande inspiration originale et vraie. […] et, quelle qu’ait été votre vie avec ses torts et ses infortunes, soyez salué à jamais un des auteurs originaux les plus à consulter, un des moralistes les plus relus, un des bienfaiteurs, en un mot, de l’humaine culture ! 

1576. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

Il est même impossible de méconnaître dans Tourgueneff une certaine ressemblance avec l’auteur du Lépreux de la vallée d’Aoste, le plus jeune et le plus original des deux de Maistre, surtout dans la touchante histoire de Mou-Mou et du Sourd-Muet. […] Son talent, neuf, original et délicat, quoique précis, répand sur ses descriptions et sur ses récits des formes et des couleurs qu’aucun artifice de composition n’aurait pu inventer. […] Boris voulait préparer son aveu par plusieurs circonlocutions ; mais en regardant cette originale figure animée par le sourire qui le charmait tant, en voyant ces beaux yeux si purs et si doux, il n’eut pas la force de se maîtriser, et dit simplement : « Viéra, voulez-vous m’épouser ?

1577. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

Le « dessin au crayon noir » d’après Sophocle que nous présente Jean Cocteau en dépouillant le drame original de son vêtement lyrique ne transpose pas davantage. […] Si Ménandre et Térence dans le domaine de la comédie, comme Euripide dans celui de la tragédie, tendent déjà vers un art plus fermé, plus spécialement destiné aux délicats, le fait est qu’ils donneront au drame original le coup de grâce : il a cessé d’être après eux. […] À la fois mystique et sanglant, si différent que soit son caractère original de celui de nos vieux mystères, il est bâti sur les mêmes principes, inséparable de sa terre et de sa foi.

1578. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

L’école nouvelle, victorieuse (elle le croyait du moins) de la philosophie du xviiie  siècle, aspire évidemment à donner elle-même une philosophie originale, à faire des découvertes dans le domaine de la conscience et de la pensée. […] Quant à son système philosophique (si l’on peut appeler système une esquisse où l’imagination a plus de part qu’une sévère raison), il l’a résumé d’une manière brillante et originale dans sa lettre à M.  […] L’intériorité à soi-même (s’il est permis de définir ainsi la conscience) est un fait si extraordinaire, si original, si inattendu dans cette série graduée qu’on appelle la nature, il tranche tellement sur le reste, qu’il faut un étrange parti-pris philosophique pour avancer avec le dogmatisme de nos critiques que la conscience est un produit, C’est précisément ce qu’il faut démontrer.

1579. (1923) Paul Valéry

La question qu’avait posée Mallarmé n’était pas une question vaine, puisque la voici reprise par un génie original, par une autre voix et sur un autre registre spirituel. […] Si, comme c’était possible, et peut-être souhaitable, il eût fait dans la philosophie sa carrière au moins spirituelle, je l’imagine placé à mi-chemin entre Hamelin et Bergson, et oscillant d’une façon originale entre la relation du premier et le schème dynamique du second. […] La rougeur est bien un état original et unique, dédoublé par l’intelligence, par le discours, mais réuni à nouveau et fondu dans la chair sensuelle du vers comme il l’était dans la chair sensible de la jeune fille.

1580. (1925) Feux tournants. Nouveaux portraits contemporains

Sa naïveté est si vive alors que le jour de la signature du contrat, quand Bernard Grasset lui dit, comme à une danseuse qu’on lance : « Je vais vous donner encore quelque chose : l’édition originale des Provinciales », ce n’est plus à Giraudoux qu’il pense, et il s’attend à recevoir un Pascal magnifique ; il envoie de l’argent à sa famille, il achète une valise d’un cuir splendide à caresser, des gants blancs : il va partir, il prend de l’assurance. […] Mais si son objet ne varie point, l’art de la critique a toujours évolué ; les canons de la critique moderne ne sont point encore établis, cependant, ils ne sont pas loin de l’être et l’on distingue en ce moment les recherches qui aboutiront à son adaptation aux œuvres originales sur lesquelles il faut qu’elle se prononce et qui impliquent une intelligence particulière que ni la critique classique ni la critique romantique ne peuvent lui fournir. […] Crémieux une attention plus originale et pour les analyser, le secours d’une théorie pour le moins aussi moderne. […] Succession d’images sentimentales, d’analogies inattendues que tisse entre elles une logique secrète. « De grandes ressemblances balafrent le monde et le marquent… Elles assortissent ce qui est petit et ce qui est immense… D’elles seules peut naître toute nostalgie, tout esprit, toute émotion », dit l’auteur, révélant ainsi la partie la plus originale de son art poétique qui mêle les choses, les gens, la nature dans une atmosphère de sympathie et de délicatesse.

1581. (1803) Littérature et critique pp. 133-288

Je crois avoir vu dans une des lettres originales d’Héloïse, qu’elle lisait quelquefois avec Abailard les vers d’Anacréon et de Tibulle, et que cette lecture augmentait son amour. […] Quand un talent original paraît pour la première fois, il jette toujours un grand éclat. […] Il ne m’appartient point de marquer le rang de cet ouvrage ; mais des hommes dont je respecte l’autorité pensent que le Génie du Christianisme est une production d’un caractère original, que ses beautés feront vivre, un monument à jamais honorable pour la main qui l’éleva et pour le commencement du xixe  siècle qui l’a vu naître. […] Mais on y chercherait en vain quelque chose de cet esprit original qui, loin des hommes et des livres, peut s’élever seul jusqu’à des conceptions nouvelles.

1582. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Le monde qu’il parcourt n’a plus assez d’originaux, qui soient dignes de son application et de son étude. […] Tel est ce petit chef-d’œuvre de Molière que Beaumarchais gaspilla, sans qu’une voix s’élevât pour prendre la défense de l’œuvre originale. […] Comme il était un maître en fait de style, c’est-à-dire comme il avait trouvé un style à lui, vif, ingénieux, subtil, un langage qui n’était imité de personne, naturellement il avait contre lui les prétendants aux rares honneurs d’un style original. […] Toutes les fois qu’un écrivain donnera son nom à une manière, à un style, tenez-vous pour assuré que c’est un écrivain original.

1583. (1891) Lettres de Marie Bashkirtseff

En une heure, je vis là vingt toiles commencées, cent projets : des dessins, des études peintes, l’ébauche d’une statue, des portraits qui me firent murmurer le nom de Frans Hals, des scènes vues et prises en pleine rue, en pleine vie, une grande esquisse de paysage notamment, — la brume d’octobre au bord de l’eau, les arbres à demi dépouillés, les grandes feuilles jaunes jonchant le sol ; — enfin, toute une œuvre, où se cherchait sans cesse, où s’affirmait presque toujours le sentiment d’art le plus original et le plus sincère, le talent le plus personnel. […] Ils étaient tous là, dans leur langue originale, les français, les italiens, les anglais, les allemands, et les latins aussi, et les grecs eux-mêmes ; et ce n’étaient point des « livres de bibliothèque », comme disent les Philistins, des livres de parade, mais de vrais bouquins d’étude fatigués, usés, lus et relus. […] Le livre original comporte le plan à la page 139. […] Les mots en italique sont en français dans le texte anglais original.

1584. (1903) Le problème de l’avenir latin

Durant le moyen âge « la race germaine, écrit Chasles, restait malgré son sommeil apparent, forte et originale… Le sang germain garde sa force et sa pureté. » L’Allemand, l’Anglais, le Néerlandais, le Scandinave, le Suisse modernes, fils d’hommes qui ont pu ou su préserver leur individualité, leur originalité ethnique, ont conservé, par-delà les innombrables vicissitudes historiques, les nécessaires liens intimes avec le Germain, le Saxon, le Batave, le Goth, l’Helvète primitifs, ces liens qui constituent la ressource d’énergie d’une nation, la force intime d’un peuple, sa possibilité de subsister et de progresser. […] Il est absolument normal que ceux-ci, demeurés sains et originaux sous le vernis romain, aient brisé leurs entraves spirituelles alors que ceux-là, appauvris et adultérés à fond, s’épuisaient de siècle en siècle en efforts vains.‌ […] Oui, certes, les chrétiens du Nord étaient demeurés en quelque sorte des barbares, en dépit de leur tardive et partielle acceptation de la civilisation à base romaine, c’est à dire des êtres naïfs et entiers, primitifs et originaux, proches de la nature, aux épaules libres du poids des siècles de culture et de raffinement, l’esprit et le cœur a l’abri du sophisme et de la corruption, soustraits par leur persistante rusticité aux périls du contact méridional.‌ […] Le spectacle de la Réforme allemande fait clairement saisir l’avantage essentiel pour un peuple de s’être conservé moralement pur et original. […] Lasse jusqu’à la nausée de tout ce qui porte la marque exclusive de l’esprit méridional, de l’obsédante routine, de tout ce qui est factice, vieux, étroit, aspirant profondément vers l’original, le vivant, l’authentique, vers ce qui est rude, barbare, savoureux et fort — fût-ce le désordonné, le chaotique et l’étrange, — elle s’est abreuvée aux sources anglaises, allemandes, nord-américaines, Scandinaves, fuyant le sentimentalisme, recherchant surtout l’intelligence et la force.

1585. (1908) Jean Racine pp. 1-325

On le trouvait original et rafraîchissant. […] (À propos de Tallemant des Réaux, si vous lisez ses Historiettes, — et il faut les lire pour connaître la réalité d’alors, particulièrement de 1640 à 1669, époque où Tallemant a pu raconter de visu, — vous y remarquerez diverses choses : l’abondance des individus originaux, et que les gens d’aujourd’hui semblent bien plus effacés ; le grand nombre des esprits libres ; la douceur, la bonhomie, la cordialité des mœurs bourgeoises à Paris ; enfin la multiplicité et la familiarité des relations entre la bourgeoisie et la noblesse, et l’absence totale de morgue, la morgue datant du jour où les rangs ont été légalement confondus.) […] En réalité, cet exercice d’écolier, qui n’est pas éclatant, est déjà secrètement original. […] Encore un individu très particulier, ce Desmarets ; encore un bon original. […] « Les Plaideurs ». — « Britannicus » Je crains de ne vous avoir pas encore assez dit à quel point Andromaque fut une chose originale et nouvelle.

1586. (1910) Rousseau contre Molière

Ils sont forcés, quand ils ont conçu un personnage délicat, distingué, original, de combattre fortement dans l’esprit du lecteur la tendance que le lecteur a toujours de ramener ce personnage à un des types consacrés, courants, communs et grossiers qu’il connaît ; ils sont forcés d’écarter le lecteur de l’idée du type traditionnel que ce personnage lui rappellera certainement. […] Mais Racine sait parfaitement que le public n’y verra qu’une femme qui veut se faire épouser et qui y réussit et cataloguera immédiatement Andromaque : grande coquette ; ramènera immédiatement le personnage original et imprévu à l’un des types grossiers auxquels il est habitué. […] Je dis seulement que son public de Paris et les nécessités de son métier de directeur l’ont ramené, et vivement, aux idées générales qu’il avait puisées dans la boutique paternelle et détourné de quelques idées indépendantes, originales et légèrement excentriques, qu’antérieurement à son retour à Paris, ou dans les premiers temps de ce retour, il avait eues ou accueillies.

1587. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

Durantin un sujet vrai et original, mais qui, dans la réalité, n’avait pas eu la solution définitive qu’on exige au théâtre, après une situation aussi tendue que celle-là. […] On le trouverait là, peint de sa propre main, avec la plus fine plume de prosateur, et de ce volume ainsi composé, sortirait une des figures de poète les plus originales et les plus attachantes de notre siècle. […] Toujours simple, presque négligée, mais toujours incisive et originale, elle pénétrait et enveloppait à la fois. Sa prodigieuse mémoire lui permettait sur tous les sujets d’apporter des faits nouveaux, des idées originales ; et en même temps sa riche imagination mêlait à sa conversation, avec un tour souvent paradoxal, des élans de poésie, des rapprochements inattendus, parfois même des vues prophétiques vers l’avenir. […] L’un d’eux lisait des poésies norvégiennes dans les textes originaux.

1588. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — II. (Suite.) » pp. 346-370

Pour qui ne l’approchait pas et n’était pas à même d’apprécier son activité originale et sa gaieté naturelle, il semblait que son enveloppe un peu âpre, son profil accentué, sa figure maigre, anguleuse, d’une coupe tranchante, exprimassent d’autres passions que celles qui animaient son esprit fertile et son cœur honnête.

1589. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure »

Rollin, quoique bien critiqué en plusieurs endroits, mais qui est composé de grâces et de choses qui plaisent, l’emportera toujours sur la critique de son adversaire qui tient du collège et qui a un peu trop orgueilleusement raison. » Mais surtout les auteurs favoris de Marais sont les grands écrivains du siècle précédent ; il ne s’en tient pas à Boileau, son oracle ; à ses moments perdus, il se complaît et s’adonne à La Fontaine, dont le premier il s’avisa de composer une sorte de Vie puisée aux originaux et dans les ouvrages mêmes du poète, devançant ainsi le genre et la méthode des Walckenaer, pour la biographie littéraire.

1590. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville »

Mais si son expression n’est pas simple, elle est toujours grande, originale et unique ; il ne dit rien comme un autre : « (31 juillet 1837.)… Dans un temps d’instabilité, il n’est pas bon d’entrer très-jeune dans les affaires publiques ; si j’avais eu ce malheur, j’aurais été incapable de la conduite que j’ai eue sous la Restauration, et tout ce que j’ai de vie publique est là.

1591. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville (suite et fin.) »

Vieillard, l’ancien précepteur du fils aîné de la reine Hortense, l’ami particulier et le correspondant, en tout temps, du prince Louis-Napoléon, l’homme dévoué à l’Empereur bien avant l’Empire, le libre et original penseur dont la fin, tout sénateur qu’il était, ne démentit point les convictions.

1592. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE BALZAC (La Recherche de l’Absolu.) » pp. 327-357

Quoi qu’il en soit, ce que M. de Balzac confesse à l’article du souvenir de Lambert est vrai en général de tous les heureux souvenirs dont se nourrit et s’empare son imagination d’aujourd’hui : il lui fallut arriver à plus de trente ans pour découvrir, pour exploiter la mine fertile que son esprit enfermait à son insu, ses impressions d’enfance en Touraine, ses originaux de province, ses chanoines célibataires, son malin teinturier de Vouvray dans Gaudissart ; tout cela dormait je ne sais où auparavant.

1593. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Dans le discours qu’il adressait à Léon X sur la réforme du gouvernement de Florence, ce grand homme (Machiavel) disait : « Les hommes qui, par les lois et les institutions, ont formé les républiques et les royaumes, sont placés le plus haut, sont le plus loués après les dieux. » En étudiant d’original cette variété de personnages qui viennent comme témoigner sur eux-mêmes dans le Recueil de M.Mignet, on en rencontre un pourtant, une seule figure à joindre à celles des grands politiques intègres et dignes d’entrer, à la suite des meilleurs et des plus illustres de l’antiquité, dans cette liste moderne si peu nombreuse des Charlemagne, des saint Louis, des Washington : c’est Jean de Witt, lequel à son tour a fini par être mis en pièces et dilacéré au profit de cet autre grand politique moins scrupuleux, Guillaume d’Orange ; car ce sont ces derniers habituellement qui ont le triomphe définitif dans l’histoire.

1594. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

Antérieur par sa manière au règne de l’analyse et de la philosophie, il ne copie pourtant pas, en l’affaiblissant, quelque genre illustré par un formidable prédécesseur ; son genre est une invention aussi originale que naturelle, et dans cet entre-deux des groupes imposants de l’un et de l’autre siècle, la gloire qu’il se développe ne rappelle que lui.

1595. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

Extraire ce qu’il y a de bon dans le socialisme pour le soustraire à la Révolution et pour le faire entrer dans l’ordre régulier de la société, m’a toujours paru une partie essentielle et originale de la tâche dévolue au second Empire.

1596. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

Chez lui la forme est plus belle que le fonds n’est riche, et l’impression originale, qui est la source vive, perd, dans les canaux réguliers où on l’enferme, sa force, sa profondeur et ses bouillonnements.

1597. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre premier. Mécanisme général de la connaissance — Chapitre premier. De l’illusion » pp. 3-31

. — Voilà un second groupe de sensations, si semblables aux premières qu’on peut les appeler sensations réviviscentes, et qui répètent les premières, comme une copie répète un original ou comme un écho répète un son.

1598. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Partout s’échappe sa franche et personnelle sensibilité, atténuant les saillies de haut style par le laisser-aller du langage domestique et quotidien, relevant la négligence du parler populaire par la chaude sincérité de l’accent, d’une façon tout originale et inimitable.

1599. (1895) La musique et les lettres pp. 1-84

[NdE] affecfecter dans l’édition originale.

1600. (1894) Propos de littérature « Chapitre V » pp. 111-140

Carrière, — mais ce n’est pas elle qui les grandit ; le plus souvent, comme pour les musiciens que j’ai cités, elle indique dans les idées une certaine inquiétude impuissante, en s’unissant pourtant chez Chopin à une distinction mièvre et anémiée, maladive, passionnée par intermittences, — chez Grieg à une compréhension originale et vive du génie populaire et de la légende, à de claires et juvéniles visions, à des trouvailles de cantilènes peu profondes mais douces et qui donnent à songer, — chez Schumann à une organisation musicale brillante et riche, à une sentimentalité très vulgaire mais intense et à un instinct des naïvetés qui, au bout d’une longue avenue de mélancolie laisse entrevoir un merveilleux jardin où sourient des enfants espiègles.

1601. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

En littérature, les copies décolorent quelquefois un original.

1602. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Études sur Saint-Just, par M. Édouard Fleury. (2 vol. — Didier, 1851.) » pp. 334-358

Comme je ne cherche que l’impartialité, voici pourtant sur Saint Just un témoignage à charge, que je tiens d’original et qui est trop singulier pour être omis : M. 

1603. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre I. Le Bovarysme chez les personnages de Flaubert »

Le même don qui suscite en lui une vision originale et nouvelle le contraint à appliquer sans cesse cette vision unique : comme si le pouvoir d’innover, d’échapper à l’imitation des formes passées, supposait une force si excessive que, s’étant une fois manifestée chez un être, elle dût, par la suite, le dominer toujours.

1604. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1859 » pp. 265-300

., ces originaux complexes qui sont un résumé et un assemblage d’un tas de choses, ces hommes au langage concret, dont la vie, selon la phrase du dessinateur, « se passe à être un objet d’étude et de jouissance pour l’intelligence de ceux qui boivent avec eux, et cela sans qu’il reste rien de cela dans une œuvre écrite ou peinte ».

1605. (1856) Les lettres et l’homme de lettres au XIXe siècle pp. -30

Ces portraits et caractères composés si savamment, mais composés et concertés, auraient pris plus de naturel et de vie ; les originaux vrais auraient apparu, se seraient développés avec ampleur et abandon, et je ne sais quel charme qui leur manque ; je le suppose toujours à l’abri du trop de facilité et de laisser-aller.

1606. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre II. Le fond et la forme dans la littérature indigène. »

Il a dit le nécessaire, à mon sens, pour condamner cette hypothèse et soutenu victorieusement la thèse que la littérature indigène est presque absolument originale.

1607. (1913) La Fontaine « III. Éducation de son esprit. Sa philosophie  Sa morale. »

Maintenant, ceci bien posé, en principe : c’est un épicurien qui admet la notion de la Providence, notion que les épicuriens n’admettaient pas, il y a là une réserve très considérable, très originale aussi, et qui montre la liberté d’esprit de La Fontaine qui n’est jamais celui qui jure sur la foi d’un maître   maintenant il a fait, relativement à la philosophie déjà classique de son temps, déjà en possession de l’admiration et de l’adhésion du public, il a fait une sécession aussi incontestable, qui est celle de la croyance à l’âme des bêtes, j’y reviens, mais à un autre point de vue que tout à l’heure.

1608. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IX. Eugénie de Guérin »

Sans décliner l’impertinence, nous avons trouvé original et piquant de savoir le détail, heure par heure, des jours qu’a passés sur la terre une fille digne d’atteindre à tous les sommets, et voici ce que nous avons à apprendre aux demoiselles les mieux élevées, qui vont effeuiller des camélias aux Italiens : « Elle se levait à six heures du matin lorsqu’elle n’était pas souffrante.

1609. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Résumé et conclusion »

Idéalisme et matérialisme sont donc les deux pôles entre lesquels ce genre de dualisme oscillera toujours ; et lorsque, pour maintenir la dualité des substances, il se décidera à les mettre l’une et l’autre sur le même rang, il sera amené à voir en elles deux traductions d’un même original, deux développements parallèles, réglés à l’avance, d’un seul et même principe, à nier ainsi leur influence réciproque, et, par une conséquence inévitable, à faire le sacrifice de la liberté.

1610. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

Pape, IV, 7), on s’écrie : « Je m’y attendais », Certes, il ne faut pas opposer les Grecs aux Romains comme l’individualisme à l’omnipotence de l’État ; les Grecs ont eu leurs religions d’Etat comme les autres ; ils n’ont point eu l’idée de la liberté individuelle et de la liberté de conscience ; l’individualisme est chose toute moderne ; mais enfin ils ont eu des tendances individualistes, ne fût-ce que parce qu’ils avaient des hommes de génie et de génie original. […] Il était original, et aussi digne d’un penseur austère, et aussi fort à  propos, de restaurer cette doctrine, qui, en effet, est bien la doctrine centrale, non du christianisme primitif, mais du premier christianisme philosophique, retrempé dans la Bible et vigoureusement rattaché à la tradition. […] Son Influence des passions sur le bonheur n’est point d’un moraliste très profond ; mais c’est un livre à la fois très original, d’un admirable accent personnel, et un livre où respire ce qu’il y a dans l’âme du xviiie  siècle de plus pur et de plus tendre. […] Or, en fait de fictions, on a raison d’être original ; mais quand il s’agit d’institutions réelles… » — De là ce caractère abstrait de toutes les imaginations des constituants. […] C’est ici qu’il est original et tout à fait nouveau.

1611. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

Il a lu Fourier, Saint-Simon, et n’est pas loin d’être de leurs disciples : il croit que le Saint-simonisme aurait pu devenir « la philosophie originale de la France au xixe  siècle, s’il n’avait par malheur dévié de la direction que lui avaient imprimée ses fondateurs ». […] Le livre, un des plus originaux et des mieux réussis de la série, dégage une impression bien inattendue d’attendrissement, d’admiration même : il est l’épopée de la bourgeoisie ; les bonnes qualités de la bourgeoisie française, l’amour du travail, la patience, la sagesse, la bonté prudente, ces qualités si souvent injustement raillées parce qu’elles sont plus solides que brillantes, plus honorables que séduisantes, s’y dégagent avec un relief charmant, avec une poésie affectueuse qu’aucun écrivain n’avait jamais songé à leur donner. […] Il passe cependant pour un original, et cela parce que, ayant à un haut degré le goût de la vérité et toujours sincère avec lui-même, il ne s’exprime jamais sur rien qu’avec de prudentes réserves. […] Mais une fois le premier étonnement passé, il importe d’examiner si l’original qui vient d’attirer notre attention n’aurait peut-être pas raison. […] Ils ne sortiront guère de l’empirisme  A côté de ceux-là sont venus se ranger des esprits peut-être moins originaux, moins créateurs, mais plus philosophiques.

1612. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

Sully-Prudhomme, ce poète malheureusement inégal, développe lui aussi dans ses belles pièces, comme les Chaînes, une conception originale du sentiment de l’amour, et, par cela même, il y introduit une poésie nouvelle. […] On ajoute, il est vrai, que cette sensation doit être originale : une sensation originale en présence des choses, tel est, dit lui-même M.  […] Hugo lui-même et ses disciples, les principes de cette métrique originale, et jusqu’à quel point ils peuvent se soutenir. […] Avec cette forme trop pauvre, il devient tellement difficile d’être original en vers, qu’on comprend ceux qui cherchent l’originalité dans la fausseté des idées et des images, comme l’ont fait souvent Baudelaire et ses successeurs ; il y a un moyen suprême de tirer quelque chose de nouveau des vieux mots et des vieilles rimes : c’est de chercher entre eux des alliances impossibles et des rapprochements absurdes. […] Tandis que notre langue vulgaire et même le vers des siècles précédents n’est souvent qu’une traduction diffuse de la pensée intérieure, le vers moderne essaye de rendre celle-ci dans toute sa puissance et sa vie ; c’est une traduction tellement proche du texte qu’elle donne parfois l’illusion de l’original : le poète semble se livrer à nous tout entier, et on croit sentir passer directement en soi l’âme même de nos grands hommes envolée avec leurs chants.

1613. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

Beaux-arts, politique, histoire, voyages, langues, éducation, botanique, géographie, harmonies du globe, l’auteur traite de tout, et toujours il est original. […] C’est ainsi qu’en écrivant sur les sciences naturelles comme Aristote, Pline et Sénèque, Bernardin de Saint-Pierre est resté original.

1614. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre deuxième. Troubles et désagrégations de la conscience. L’hypnotisme et les idées-forces »

Quelque influence que nous venions d’attribuer aux idées et, par conséquent, à la suggestion dans l’hypnotisme, nous n’allons pourtant pas jusqu’à nier, comme le fait l’école de Nancy, ce qu’il y a d’original dans la condition physiologique de l’hypnotisé. […] Les actes accomplis par les hypnotisés constituent une espèce originale de réflexes psychiques qu’il ne faut pas confondre avec les réflexes ordinaires.

1615. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1867 » pp. 99-182

c’est vraiment bien malheureux qu’on n’ait pas de lui, jetée sur le papier, sa pensée de 1852 à 1860, en ces années, où nous avons rencontré chez lui la plus originale cervelle philosophique de ce siècle. […] Mardi, 17 septembre En flânant dans les serres de Saint-Gratien, nous pensions à tout ce que ces plantes originales pourraient apporter d’imagination créatrice à l’industrie, à la mode.

1616. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Il attache autour de la religion mille superstitions originales, autour de la poésie mille imaginations pittoresques. […] Chacune de ces quatre langues, prise en soi, est admirable, parce qu’elle est originale.

1617. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

Aussi, eut-il l’ambition d’être absolument original et de conquérir, de force ou de gré, toute l’attention publique il médita un coup d’éclat. […] Ce qu’il y a par exemple, de particulièrement original, c’est l’introduction de l’affectation, du maniérisme et du lyrisme dans la grossièreté du langage.

1618. (1845) Simples lettres sur l’art dramatique pp. 3-132

En effet, il y a à Paris, nous ne dirons pas un comédien de talent, mais un artiste de génie, capricieux et fantasque comme Garrick, terrible et emporté comme Kean. poétique et sombre comme Macready, un homme qui porte avec la même facilité le manteau royal de Richard III et les haillons du Joueur ; un homme qui attache à toutes ses créations un cachet tellement original, qu’à chaque création nouvelle tout le monde littéraire s’émeut ; un homme qui traîne après lui son public, en quelque lieu qu’il lui plaise de le conduire, soit au théâtre de l’Odéon, soit au théâtre de la Porte-Saint-Marlin, soit au théâtre de la Renaissance, soit au théâtre de l’Ambigu, soit au théâtre des Folies-Dramatiques. […] George Sand imite M. de Balzac aussi bien dans les formules énigmatiques, ampoulées, incorrectes, faussement originales, que dans les expressions triviales du jargon populaire.

1619. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre II. La parole intérieure comparée à la parole interieure »

2° La parole intérieure est plus rapide et plus concise ; elle est souvent plus originale et plus personnelle dans la syntaxe et le vocabulaire [§ 4]. […] […]Comprendrait-on le pouvoir expressif ou plutôt suggestif de la musique, si l’on n’admettait pas que nous répétons intérieurement les sons entendus, de manière à nous replacer dans l’état psychologique d’où ils sont sortis, état original, qu’on ne saurait exprimer, mais que les mouvements adoptés par l’ensemble de notre corps nous suggèrent ? 

1620. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre I. De la sélection des images, pour la représentation. Le rôle du corps »

Une fois cette traduction établie, l’original pâlit, mais elle n’aurait jamais pu se faire si l’original n’avait été posé d’abord, et si la sensation affective n’avait pas été, dès le début, localisée par sa seule force et à sa manière.

1621. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre I. La Restauration. »

Outre cela il regretta la décadence de la musique « qui autrefois enchantait les hommes, les bêtes, les oiseaux, les serpents, au point que leur nature même en était changée610. » Il voulut énumérer les plus grands écrivains modernes et oublia dans son catalogue, « parmi les Italiens611, Dante, Pétrarque, l’Arioste et le Tasse ; parmi les Français, Pascal, Bossuet, Molière, Corneille, Racine et Boileau ; parmi les Espagnols, Lope et Calderon ; parmi les Anglais, Chaucer, Spencer, Shakspeare et Milton » ; en revanche il y inséra Paolo Sarpi, Guevara, sir Philip Sidney, Selden, Voiture et Bussy-Rabutin, « auteur des Amours de Gaul. » Pour tout combler, il déclara authentiques et admirables les fables d’Ésope, cette pesante rédaction byzantine, et les lettres de Phalaris, cette méchante fabrication sophistique ; deux ouvrages, selon lui, « qui, étant les plus anciens dans leur genre, sont aussi les meilleurs dans leur genre. » Enfin, pour s’enferrer lui-même sans remède, il remarqua gravement que « sans doute quelques savants, du moins de ceux qui passent pour tels sous le nom de critiques, n’avaient point estimé ces lettres authentiques ; mais qu’il fallait être un bien médiocre peintre pour ne point y reconnaître une peinture originale. […] Faites-vous décrire les originaux d’après lesquels Molière compose ses médecins. […] As the first has been agreed by all ages since for the greatest master in his kind, and all others of that sort have been but imitations of his original, so I think the Epistles of Phalaris to have more race, more spirit, more force of wit and genius, than any others I have ever seen, either ancient or modern. I know several learned men (or that usually pass for such, under the name of critics) have not esteemed them genuine, and Politian, with some others, have attributed them to Lucian ; but I think he must have little skill in painting, that cannot find out this to be an original ; such diversity of passions, upon such variety of actions and passages of life and government, such freedom of thought, such boldness of expression, such bounty to his friends, such scorn of his enemies, such honour of learned men, such esteem of good, such knowledge of life, such contempt of death, with such fierceness of nature and cruelty of revenge, could never be represented but by him that possessed them ; and I esteem Lucian to have been no more capable of writing than of acting what Phalaris did.

1622. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

En sa petite phrase, quoiqu’elle présentât à la raison une surface obscure, on sentait un contenu si consistant, si explicite auquel elle donnait une force si nouvelle, si originale, que ceux qui l’avaient entendue la conservaient en eux de plain-pied avec les idées de l’intelligence. […] En sa petite phrase, quoiqu’elle présentât à la raison une surface obscure, on sentait un contenu si consistant, si explicite, auquel elle donnait une force si nouvelle, si originale, que ceux qui l’avaient entendue la conservaient en eux de plain-pied avec les idées de l’intelligence. […] Mais d’autre part, dans chacune de ses phrases, comme dans la phrase de Vinteuil, « quoiqu’elle présente parfois à la raison une surface obscure », on sent « un contenu si consistant, si explicite, auquel elle donne une force si nouvelle, si originale, que ceux qui l’ont entendue la conservent en eux de plain-pied avec les idées de l’intelligence ». […] Alors que toute la littérature depuis le Romantisme a tendu vers l’expression aussi directe que possible, sans doute, mais par là-même aussi informe, aussi inassimilable que possible aux idées, de nos émotions et de nos perceptions inconscientes, Proust au contraire, sans d’ailleurs vouloir en faire une révolution, sans menacer personne, sans lancer aucun manifeste, — Proust a travaillé à une fixation, et non plus à une simple expression, de tout ce qui s’ébat d’obscur dans l’homme, jusqu’à lui communiquer « une force si nouvelle, si originale » que nous pouvons le « conserver de plain-pied en nous avec les idées de l’intelligence ».

1623. (1932) Les idées politiques de la France

Ce n’est pas un hasard si le mouvement-type de la Réaction française (qui a laissé pour courir plus vite son préfixe au vestiaire) est un mouvement d’écrivains, s’il n’y a eu de littérature politique originale, vivante, pittoresque qu’à droite et même à l’extrême droite. […] L’école unique porte la marque exclusive et originale de l’esprit radical. […] Un Proudhon, si Français moyen, si impossible en un autre pays que le nôtre, du seul fait qu’il a des idées originales et qu’il ne pense pas en série, est classé par l’opinion parmi les socialistes, qu’il détestait. […] Peut-être faudrait-il faire une exception pour la frange gauche du parti radical, et à coup sûr il faut la faire pour son seul théoricien original, Alain, qui s’est expliqué à ce propos sans équivoque.

1624. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

Il y avait dans la figure du héros de roman, un je ne sais quoi d’original et d’attrayant, qui nous fit prendre, dès cette heure, la résolution d’esquisser, quelque jour, les traits de la physionomie historique que nous retrouvions, sans peine, derrière le voile de la fiction. […] Allemand d’origine, il avait dans son talent un je ne sais quoi d’original. […] Oui, c’est bien là le Michel Servet que nous peint l’histoire, ce sectaire original, cet esprit exalté et têtu, ce polémiste grossier ! […] C’est à ce moment (début du xve  siècle), que la langue des vaincus se trouve soudain la langue des vainqueurs : l’anglo-saxon est devenu l’anglais : Wiclef le réformateur et Chaucer, imitateur des auteurs du Roman de la Rose et conteur original dans ses Tales of Canterbury, l’exploitent en maîtres : un ami du dernier, le poète Gower, l’ennuyeux Gower, comme le qualifie M.  […] Buet n’eût pas écrit le portrait étrangement idéalisé que l’on va lire et dans lequel l’original ne se fût jamais, entendez-vous bien ?

1625. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

Qu’ils se gardent bien de vouloir être originaux, l’originalité est toujours involontaire ; qu’ils s’efforcent d’être sincères ; pour être original on croit qu’il suffit de ne plus penser à faire bien, mais à ne pas faire comme les autres, sans songer que ce n’est pas une originalité que de faire ce qui ne se fait pas, ce qui ne doit pas se faire. […] — Malgré soi on ne prêche que sa propre opinion, et si les auteurs suivaient tous les conseils qui leur sont donnés, ils perdraient sûrement leurs qualités originales pour ne faire que se conformer au sentiment des autres, c’est-à-dire qu’ils ne produiraient rien que de plat et de banal, comme toute œuvre d’art sortie d’un concours. […] Sa personnalité très originale lui a valu non seulement d’être discuté, mais calomnié et injurié ; je trouve dans une revue toute moderne, comme le dit son titre : le Décadent, cette protestation rimée du poète et intitulée : Ballade touchant un point d’histoire : Assez qu’on — sinon plus qu’assez, Déplore avec désinvolture, Les uns mes « désordres » passés, Les autres ma Noce ! […] Cependant, la part du roman n’en est pas moins considérable, comme la part du romancier n’en est pas moins originale ; ce sont elles qui donnent une action véritablement curieuse avec des péripéties encadrées dans des scènes bouffonnes ou cruelles. […] Taine, qui écrivit dans le Journal des débats : « J’éprouve aujourd’hui un plaisir vif et neuf pour un critique : celui de saluer un talent précoce, original et solide, dans un homme que je ne connais pas et que je n’ai jamais vu. » M. 

1626. (1927) Approximations. Deuxième série

Seuls peut-être ceux qui ont confronté la copie à l’original peuvent se rendre pleinement compte de la loyauté du travail qui partout a été fourni : jamais de difficultés éludées, ni même tournées : toujours elles sont abordées bien en face et résolues au moyen d’une langue énergique et sûre. […] Faut-il y voir comme le voudraient certains — et ainsi que cela semble à peu près établi pour Tout est bien qui finit bien — un remaniement partiel d’un original plus ancien ? […] Persuader est le mouvement naturel, l’acte normal de tout son être ; et si mieux que quiconque il en a déduit et pratiqué l’art, c’est qu’il possédait, là aussi, « l’original des préceptes ». […] Rien ne les arrête, ni les incidentes ni les parenthèses que l’auteur leur fait porter ; ainsi que sur certains panneaux Louis XV où il semble que bondisse encore le torrent que l’on vient de capter, incidentes et parenthèses n’ont ici d’autre résultat que de creuser en le compliquant le motif original. […] Selon la profonde observation de Vauvenargues « l’art n’est ici lui-même qu’une nature plus parfaite et l’original des préceptes » [Vauvenargues, « les Orateurs », in Œuvres complètes I, Paris, Brière, 1821, p. 286.

1627. (1923) Nouvelles études et autres figures

Mais c’est ici que l’aventure devient originale. […] Et je commencerai par le féliciter d’être revenu, malgré l’édition ne varietur, à la division originale de ce vaste poème. […] Écrivain et peintre, ou, comme on l’a dit, peintre en deux langues, original dans l’une et dans l’autre, il se fit une place à part au premier rang des artistes de son siècle. […] Madeleine est, sinon plus originale, du moins aussi complexe et, comme elle ne se raconte pas, elle nous le paraît davantage. […] * *    * Nul mieux qu’Estaunié ne nous peindrait les originaux de la bourgeoisie d’autrefois.

1628. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre IV. Le mécanisme cinématographique de la pensée  et l’illusion mécanistique. »

Ce sont donc deux traductions d’un même original ou, comme dit Spinoza, deux attributs d’une même substance, qu’il faut appeler Dieu. Et ces deux traductions, comme aussi une infinité d’autres dans des langues que nous ne connaissons pas, sont appelées et même exigées par l’original, de même que l’essence du cercle se traduit automatiquement, pour ainsi dire, et par une figure et par une équation. Au contraire, pour Leibniz, l’étendue est bien encore une traduction, mais c’est la pensée qui est l’original, et celle-ci pourrait se passer de traduction, la traduction n’étant faite que pour nous.

1629. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Werther. Correspondance de Goethe et de Kestner, traduite par M. L. Poley » pp. 289-315

Poley, anciennement attachée à la légation de Prusse, qui appartient à l’Allemagne par la langue et à la France par un long séjour, à traduit cette correspondance comme il est à souhaiter qu’on fasse toujours pour ces sortes d’ouvrages : ce qui importe en effet, c’est bien moins d’éviter quelques incorrections de style que de conserver la parfaite exactitude et le caractère de l’original : et c’est à quoi M. 

1630. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite et fin.) »

Une fois, devant un tableau de bataille de deux peintres amis, dont l’un avait fait le paysage et l’autre les personnages (c’était une bataille où figuraient les Autrichiens), il remarquait que le ciel était un peu trop pommelé : « Je trouve, disait-il, qu’il y a un peu trop d’Autrichiens dans ce ciel-là. » Il avait des observations originales qu’il exprimait d’un mot.

1631. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

A moins d’avoir quelques traits originaux à ajouter aux siens, comme ont fait Lemontey et divers autres contemporains qui l’avaient vue, on n’a qu’à renvoyer, pour l’essentiel de sa personne, à ses délicieux et indispensables Mémoires.

1632. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Diderot »

Trois ou quatre ans avant la mort de Diderot, Garat, alors à ses débuts, publia dans quelque almanach littéraire le récit d’une visite qu’il avait faite au philosophe, récit piquant, un peu burlesque, où les qualités naïves de l’original sont prises en caricature.

1633. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

Nous voulons parler de son dernier ouvrage, à peine publié, non encore connu, saisi par la mort sur le seuil de sa publicité : les Grecs anciens et les Grecs modernes ; ouvrage très neuf, très original et très philosophique en même temps que très poétique ; trésor véritable découvert par lui dans les littératures presque fabuleuses de l’arrière-Grèce.

1634. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre IV. Racine »

En son genre — un genre brillant, sec et glacé, — Benserade est original, unique.

1635. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre premier »

La science compare laborieusement l’original à ces divers portraits, et donne en détail les raisons du jugement souverain que la France en a porté d’instinct.

1636. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Sa traduction vaut mieux que celle de Marot, et la langue en est moins au-dessous des beautés de l’original ; mais l’ouvrage est médiocre, et, s’il doit être compté à Desportes, c’est moins comme un titre poétique que comme un acte de pénitence.

1637. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

La sécularisation de la morale, c’est peut-être l’œuvre la plus originale du xvie siècle.

1638. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre premier »

C’est cette sagesse elle-même s’exprimant en français ; l’érudition y est si bien fondue dans la pensée originale, que Balzac put croire qu’il inventait ce qu’il s’était approprié.

1639. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 janvier 1886. »

Il était malade, car il consultait un médecin (IV, 352) ; il sentait la nécessité d’un repos intellectuel, car il écrit à un ami, qu’il a l’intention de « faire le paresseux » pendant un an, et il ajoute qu’il est convaincu, que pour qu’une œuvre dramatique soit vraiment forte et originale, il faut « qu’elle soit le résultat d’un pas en avant dans la vie, d’une nouvelle période dans le développement de l’artiste », et que « ceci ne peut être le cas tous les six mois ».

1640. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre I : L’histoire de la philosophie »

Gall nous attribue vingt-sept facultés, parmi lesquelles celles de la vénération, de l’individualité, de la couleur, de l’éventualité, et bien d’autres qui évidemment ne sont point du tout des facultés originales.

1641. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 457-512

Nous conviendrons que Candide & le Huron sont de son invention, & que l’invention, du premier sur-tout, est originale ; mais nous sommes obligés d’ajouter que ces deux Romans, dépourvus de machines & de nœuds, n’offrent qu’une suite d’événemens décousus & le plus souvent invraisemblables ; que la hardiesse & l’obscénité en forment l’intérêt principal ; & que ces défauts ne sauroient être rachetés par l’agrément des détails & les graces du style.

1642. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre troisième. La reconnaissance des souvenirs. Son rapport à l’appétit et au mouvement. »

Le connu, le familier, c’est ordinairement l’habituel ; comment donc distinguons-nous l’habituel de ce qui est pour ainsi dire neuf et original ?

1643. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1877 » pp. 308-348

* * * — Baudelaire est un grand, très grand poète, mais n’est point, je le répète, un prosateur original, il traduit toujours Poë, quand même il n’est plus son traducteur, — et qu’il aspire à faire du Baudelaire.

1644. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre septième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie. »

Voici une des pensées les plus originales et les plus profondes qui résultent de cette vision du Tout éternel et éternellement indifférent : c’est que ce n’est pas ce qui est éternel qu’il faut aimer, mais ce qui passe, parce que c’est ce qui passe qui souffre.

1645. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Enfin, nous avons si peu la tête épique, comme on l’a dit un jour avec justesse, que du temps de Racine, par exemple, et c’est Sainte-Beuve qui en fait la remarque, les esprits choisis qui goûtaient Virgile l’estimaient plus pour ce qu’il avait de poli et de suprêmement élégant que pour sa manière et ses qualités véritablement originales et grandioses.

1646. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

Dans le roman de Feuillet, il n’y a pas la moindre invention, la moindre combinaison, le moindre détail original, le moindre rendu supérieur, la moindre volonté révélée par un effort quelconque de donner de l’accent à cette vulgarité d’un mariage dans le monde, — dans ce monde à la hauteur sociale duquel Octave Feuillet s’est placé.

1647. (1897) Un peintre écrivain : Fromentin pp. 1-37

Il est écrit à la veille de la mort de Fromentin, et il fait beaucoup plus que nous montrer un talent fortifié par douze années de méditation et d’étude : il nous révèle la véritable voie de l’auteur ; il nous apprend que celui qu’on savait être déjà un peintre délicat, un voyageur intéressant, un romancier pénétrant et émouvant, était avant tout un critique d’art original et novateur.

1648. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre II. L’âme et le corps »

La seule hypothèse précise que la métaphysique des trois derniers siècles nous ait léguée sur ce point est justement celle d’un parallélisme rigoureux entre l’âme et le corps, l’âme exprimant certains états du corps, ou le corps exprimant l’âme, ou l’âme et le corps étant deux traductions, en langues différentes, d’un original qui ne serait ni l’un ni l’autre : dans les trois cas, le cérébral équivaudrait exactement au mental.

1649. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

» Il serait assez convenable que le public apprenne enfin qu’il existe une génération plus jeune et aussi originale que celle dont les maîtres furent Baudelaire et Mallarmé. […] Dans ce volume, j’insisterai plus particulièrement sur les pensées de cet écrivain, parce qu’il me semble étrangement original et que son œuvre a eu déjà une grande influence sur la littérature nouvelle.

1650. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Mais, sur le rapport de l’ombre et de la lumière, Hugo a une vue originale : c’est que, dans notre monde, ce qui l’emporte sur le reste, ce qui semble faire le fond, c’est l’ombre, la nuit, tandis que la lumière et le jour semblent des accidents passagers, bornés à un petit nombre de lieux et de moments. […] Tout, dans la poésie, est donc lieu commun ou tout est original selon la façon dont on l’interprète.

1651. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre premier. Aperçu descriptif. — Histoire de la question »

Secrétan ne va pas au-delà quand il définit le langage articulé : « la forme dont nous revêtons naturellement notre pensée, soit pour la communiquer à d’autres au moyen de la parole sonore, soit aussi pour la développer et la préciser en nous-mêmes, sans émission de voix127. » La partie la plus originale de l’ouvrage du docteur Fournie est sa théorie du langage des gestes comparé au langage de la voix ; la compétence particulière de l’auteur donne un grand prix aux pages qu’il consacre à la psychologie du sourd-muet ; il corrige avec beaucoup de pénétration les erreurs des philosophes antérieurs et les premiers éducateurs des sourds-muets sur les signes visibles : pour lui, le geste seul est un langage naturel et peut rendre à la pensé, les mêmes services que la parole ; l’écriture, qui n’est pas, à proprement dire, un langage, mais seulement la traduction soit du langage parlé, soit du langage des gestes, est impropre à fournir les éléments d’un langage intérieur ; le sourd-muet pense et développe son intelligence au moyen d’une mimique intérieure, et, quand il lit, bien loin de comprendre directement les signes écrits, il les traduit comme nous en son langage intérieur habituel128. […] [L’ouvrage original de Domenico Pezzi date de 1869 et comporte une traduction d’un ouvrage de grammaire comparée : Compendio di grammatica comparativa dello antico Indiano, Greco ed Italico, di Augusto Schleicher, e Lessico delle radici indo-italico-greche, di Leone Meyer, recati in italiano e fatti precedere da una introduzione allo studio della scienza del linguaggio da D.

1652. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

Il faut souvent moins d’esprit pour soutenir par des choses neuves un fonds original qui les indique de lui-même, qu’il n’en faudroit pour déguiser seulement une matiere usée. […] La plûpart des spectateurs connoissent les originaux, et ils veulent les retrouver ; il ne seroit pas même permis au poëte de les embellir aux dépens de ce qui les distingue ; et la perfection de son art est de peindre en beau, sans en ressembler moins. […] Souvent les auteurs, ou faute d’invention, ou d’assez de délicatesse pour la gloire, se contentent de situations déja connuës ; et à quelques différences près, dont celle des noms est quelquefois la plus considérable, ils s’approprient ce que d’autres ont inventé ; semblables à ces peintres sans imagination, qui ne font que copier d’après les grands originaux, les plus beaux airs de tête et les attitudes les mieux choisies. […] Où prendre encore un coup les originaux de semblables discoureurs ?

1653. (1892) Portraits d’écrivains. Première série pp. -328

Aussi ne trouverait-on dans aucun théâtre une collection plus variée d’originaux rappelant les travers qui se sont succédé dans notre société, l’un remplaçant l’autre, ou s’y ajoutant. — Quelques-uns n’appartiennent ni à une époque déterminée ni à un monde spécial. […] Ceux-là se retrouvent partout où il y a un brave homme à duper, une bonne cave à piller et une jolie femme à prendre… Mais, pour la plupart, les originaux de M.  […] À un autre point de vue encore, les Proverbes sont une œuvre trop peu originale. […] Car le tour d’imagination romanesque, c’est justement chez Feuillet la marque originale. […] Ceux qu’il y groupe, ce sont les auteurs du théâtre de second ordre, Favart, Ducis, le Voltaire des Contes, Gresset et Parny, ces deux derniers surtout : Gresset, dont le « divin caquetage est de la poésie et de la plus originale », et qui, en écrivant Vert-Vert, écrivait pour les siècles ; Parny, « l’un des poètes le plus absolument poètes de la littérature européenne », Parny, « ce délice ».

1654. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite et fin.) »

M. de Lancy, que nous avons connu administrateur de la bibliothèque Sainte-Geneviève et qui avait autrefois rempli un poste assez important au ministère de l’intérieur, aimait à raconter des anecdotes qu’il savait d’original, notamment celle-ci : Un jour un des hauts personnages qui avait dû financer avec M. de Talleyrand, et qui tenait à savoir pourtant si son argent n’était pas resté en chemin, et s’il était bien arrivé à son adresse, exigea un signe, une marque qui l’en assurât.

1655. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. VILLEMAIN. » pp. 358-396

Villemain, veulent être originaux et utiles après lui.

1656. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

Je laisse à de plus érudits à rechercher à qui elle en doit l’idée originale, le sujet, à quelle source de moyen âge probablement et de gaye science elle l’a puisé, car je ne saurais lui en attribuer l’invention ; mais elle s’est, à coup sûr, approprié le tout par le par fait développement et le tissu ingénieux des analyses.

1657. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

Charles Eynard, à qui l’on doit déjà une Vie du célèbre médecin Tissot, prépare depuis longtemps une biographie complète de Mme de Krüdner : renseignements intimes, lettres originales, rien ne lui aura manqué, surtout pour la portion religieuse.

1658. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

Nous publions les vers de Farcy, et pourtant, nous le croyons, sa vocation était ailleurs : son goût, ses études, son talent original, les conseils de ses amis les plus influents, le portaient vers la philosophie ; il semblait né pour soutenir et continuer avec indépendance le mouvement spiritualiste émané de l’École normale.

1659. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Dieu le sait, il n’est pas encore dans l’été de sa vie ; mais, si mon jugement ne me trompe pas, il fera ce que nous appelons de notre temps un poète intime, c’est-à-dire un de ces poètes rassasiés de la pompeuse déclamation rimée dont nos oreilles sont obsédées dans nos écoles classiques ou dans nos théâtres redondants et ronflants d’emphase ; il sera un de ces poètes nés d’eux-mêmes, originaux parce qu’ils sont individuels ; un de ces poètes qui n’ont pour lyres (comme on dit) que les cordes émues de leur propre cœur, et qui font, dans la poésie moderne, cette révolution que J.

1660. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (2e partie) » pp. 305-367

J’en découvris une autre bien plus sûre, bien plus précise et bien plus originale dans Souberbielle, vieux et fidèle terroriste, resté jusqu’à quatre-vingts ans fanatique de Robespierre comme au jour de la proclamation de l’Être suprême, et ne cessant pas de déplorer le 9 thermidor et le supplice du tribun-pontife, comme l’holocauste de la vertu.

1661. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIe entretien. La passion désintéressée du beau dans la littérature et dans l’art. Phidias, par Louis de Ronchaud (1re partie) » pp. 177-240

L’âpre bon sens aiguisé d’esprit et rendu tranchant comme l’acier par l’expression originale, était le caractère de style de cet oncle, ami des Christins de Ferney.

1662. (1863) Cours familier de littérature. XV « XCe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (3e partie) » pp. 385-448

D’abord sa mère, puis son père, puis ce frère Maurice, dans l’âme duquel elle se transvase, puis les amis de ce frère, dans lesquels elle voit encore et toujours lui, puis enfin, si l’on en croit des signes non équivoques de sa plume, cet admirateur de son frère, ce jeune homme original, d’un autre temps, ce chevaleresque paladin de style qui confond la plume avec l’épée, et qui aime le combat contre son siècle, parce que le siècle est nombreux comme une foule et que lui est seul comme l’antagonisme courageux, M. d’Aurevilly !

1663. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (3e partie) » pp. 365-427

« Ce qui achève de donner à ces arbres un aspect original, ce sont des projections en forme de contreforts qui croissent tout autour du bas du stipe.

1664. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

Au contraire, un bon nombre de nos grands prosateurs, des originaux, des parfaits, sont du Midi… Certainement ce n’est pas un hasard !

1665. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

La pensée de Nietzsche n’est donc pas originale, et sa forme n’est pas toujours du meilleur goût.

1666. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

Ce livre original, vigoureux parfois, ne forme point un ensemble solide.

1667. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre X »

Le second acte est, à lui seul, toute une piquante et originale comédie.

1668. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1883 » pp. 236-282

On parle de cet original conteur, de ses histoires dont le commencement semblait sortir d’un brouillard, ne promettait dès d’abord pas d’intérêt, et qui devenaient, à la longue, si prenantes, si attachantes, si empoignantes.

1669. (1902) La métaphysique positiviste. Revue des Deux Mondes

Mais ce rapport n’est pas « nécessaire », puisqu’il est souvent autre ; et nous devons nous féliciter qu’il ne soit pas « constant », puisqu’un grand artiste est celui qui nous le présente sous un aspect personnel, original, et imprévu.

1670. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

Où prendre, encore un coup, les originaux de semblables discoureurs ?

1671. (1833) De la littérature dramatique. Lettre à M. Victor Hugo pp. 5-47

Cependant au milieu de cette confusion de genres, de ces actions heurtées et sans suite, de ces personnages grotesques, rodomonts et ampoulés, de ce cliquetis de pensées hardies et tout à la fois neuves, élevées et communes, il est impossible de ne pas reconnaître dans vos productions dramatiques une imagination vive, une verve surabondante, une manière pittoresque d’exprimer une belle pensée, quelques scènes savamment creusées, et enfin, si vous voulez rétrograder vers le simple bon sens, l’espoir d’un talent vif et original.

1672. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

La scène est tout à fait originale et absolument de l’invention de La Fontaine, ce me semble ; je n’en vois d’analogue nulle part dans tout le théâtre, même du seizième siècle, ni dans tout le théâtre du commencement du dix-septième siècle.

1673. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VII. M. Ferrari » pp. 157-193

Ferrari a publié l’histoire de la Raison d’État, et c’est une heureuse idée, — et très originale, — que celle de ce livre.

1674. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Victor Hugo »

Il est aussi érudit qu’un vieux savant et son érudition n’est jamais officielle : elle est curieuse, elle est recherchée, elle est originale, moins historique que légendaire, téméraire, hasardeuse, ce qui convient, d’ailleurs, dans le cas présent.

1675. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

Très peu original au fond, toujours en flagrant délit d’imitation de quelque chose ou de quelqu’un, mais croyant le dissimuler par la violence de son imitation et par l’épouvantable grimace qu’il fait faire à ce qu’il imite, M. 

1676. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

On les trouve ces pages dans le traducteur, mais non dans l’original. […] Il est douteux que Shakspeare ait eu connaissance de ces traductions ; car il n’a pas emprunté le fond de ses pièces d’invention des originaux même traduits en anglais, mais de quelques imitations anglaises de ces originaux. […] « L’Église, dit Bossuet (dans un passage qu’on croirait échappé à la tendresse de Fénelon, s’il n’avait un tour plus original et plus élevé) l’Église est fille du Tout-Puissant : mais son père, qui la soutient au dedans, l’abandonne souvent aux persécuteurs ; et, à l’exemple de Jésus-Christ, elle est obligée de crier, dans son agonie : Mon Dieu !

1677. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Ce personnage était de tradition dans la comédie italienne ; mais celui du Dépit amoureux est original ; il a son trait particulier. […] Il y a une intelligence qui consiste à penser d’une manière originale et du reste forte, et ceux qui sont doués de cette intelligence-là choquent d’ordinaire le public de leur temps et ont de l’influence sur la génération suivante. […] Le grand anarchiste voit en Molière un homme qui n’aime point du tout les penseurs originaux, qui n’aime point les individualistes, qui n’aime point les hérétiques sociaux, et il ; fonce sur Molière comme sur son ennemi personnel, sans se tromper le moins du monde à cet égard. […] Ajoutons, si l’on veut, la Jeune fille ; mais aucune jeune fille de Molière n’a l’ampleur d’un type ; ce sont des silhouettes, très originales à la vérité et sur lesquelles nous aurons à nous expliquer avec un singulier intérêt. […] Il ressemble aussi au portrait de Ménalque dans La Bruyère ; j’entends qu’il est moins un original qu’un sac ou qu’un portefeuille où l’on a accumulé tous les traits, toutes les pièces d’un vice connu ; ce n’est pas un portrait, c’est un dossier.

1678. (1902) La poésie nouvelle

‌ Littérature, Poésie, Théâtre, Musique, Peinture, Sculpture, Philosophie, Histoire, Sociologie, Sciences, Voyages, Bibliophilie, Sciences occultes, Critique, Littératures étrangères, Portraits, Dessins et Vignettes originaux‌ Épilogues (actualité) : Remy de Gourmont.‌ […] Cette métrique récente, et qu’ont adoptée la plupart des poètes originaux d’aujourd’hui, est d’abord constituée par la négation hardie des règles jusqu’à présent admises.‌ […] En effet, au milieu de paysages encore, et souvent des plus beaux par leur puissance d’hallucination, parmi des lieds délicieux et d’une musique persistante, les plus originaux poèmes de ce recueil sont des œuvres d’intime méditation et de pensée inquiète. […] Voilà l’idée originale de Moréas et, pour la mettre en pratique, il fut aidé par la connaissance très exacte qu’il avait de l’ancien français. […] Les Lendemains87 ne sont pas encore une œuvre très originale, mais distinguée, fine, d’une jolie qualité de langue et de pensée.

1679. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

D’où vient cette idée de la femme si originale et si neuve ? […] Un vieux gentilhomme généreux, grognon, qui s’occupe à se croire malade, une vieille fille revêche en quête d’un mari, une femme de chambre naïve et vaniteuse qui estropie vaillamment l’orthographe, une file d’originaux qui tour à tour apportent leurs bizarreries sur la scène, voilà les personnages ; le plaisir du lecteur consiste à reconnaître leur humeur dans leur style, à prévoir leurs sottises, à sentir le fil qui tire chacun de leurs gestes, à vérifier la concordance de leurs idées et de leurs actions.

1680. (1904) Zangwill pp. 7-90

Avons-nous à étudier, nous proposons-nous d’étudier La Fontaine ; au lieu de commencer par la première fable venue, nous commencerons par l’esprit gaulois ; le ciel ; le sol ; le climat ; les aliments ; la race ; la littérature primitive ; puis l’homme ; ses mœurs ; ses goûts ; sa dépendance ; son indépendance ; sa bonté ; ses enfances ; son génie ; puis l’écrivain ; ses tâtonnements classiques ; ses escapades gauloises ; son épopée ; sa morale ; puis l’écrivain, suite ; opposition en France de la culture et de la nature ; conciliation en La Fontaine de la culture et de la nature ; comment la faculté poétique sert d’intermédiaire ; tout cela pour faire la première partie, l’artiste ; pour faire la deuxième partie, les personnages, que nous ne confondons point avec la première, d’abord les hommes ; la société française au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; le roi ; la cour ; la noblesse ; le clergé ; la bourgeoisie ; l’artisan ; le paysan ; des caractères poétiques ; puis les bêtes ; le sentiment de la nature au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; du procédé poétique ; puis les dieux ; le sentiment religieux au dix-septième siècle et dans La Fontaine ; de la faculté poétique ; enfin troisième partie, l’art, qui ne se confond ni avec les deux premières ensemble, ni avec chacune des deux premières séparément ; l’action ; les détails ; comparaison de La Fontaine et de ses originaux, Ésope et Phèdre ; le système ; comparaison de La Fontaine et de ses originaux, Ésope, Rabelais, Pilpay, Cassandre ; l’expression ; du style pittoresque ; les mots propres ; les mots familiers ; les mots risqués ; les mots négligés ; le mètre cassé ; le mètre varié ; le mètre imitatif ; du style lié ; l’unité logique ; l’unité grammaticale ; l’unité musicale ; enfin théorie de la fable poétique ; nature de la poésie ; opposition de la fable philosophique à la fable poétique ; opposition de la fable primitive à la fable poétique ; c’est tout ; je me demande avec effroi où résidera dans tout cela la fable elle-même ; où se cachera, dans tout ce magnifique palais géométrique, la petite fable, où je la trouverai, la fable de La Fontaine ; elle n’y trouvera point asile, car l’auteur, dans tout cet appareil, n’y reconnaîtrait pas ses enfants.

1681. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

Ensuite il a émis cet axiome que, chez les nations, un peu de libertinage adoucit les mœurs, et enfin, à la grande indignation d’une honnête femme qui se trouvait là, il a commencé une audacieuse et originale apologie de la tribaderie, qui, selon lui, raffine la femme, la parfait, l’accomplit. […] Alors, dans la lumière de la lampe, qu’il portait contre lui, nous est apparu, une seconde, ce prodigieux historien de rêve, ce grand somnambule du passé, cet original causeur ; et nous avons vu, croisant sa redingote sur son ventre, dans un geste étroit, et souriant avec de grandes dents de mort et deux yeux clairs, un vieillard criquet, ayant l’air d’un petit rentier rageur, la joue balayée de longs cheveux blancs.

1682. (1891) Esquisses contemporaines

Original, il l’est à coup sûr, tel que nous en connaissons peu de semblables, mais d’une originalité plutôt apparente que réelle, provenant davantage du mode de sa composition et des circonstances spéciales de l’auteur que de son individualité propre. […] Il se pourrait que son auteur, presque inconnu pendant sa vie, ait après sa mort groupé autour de lui toute une famille d’âmes apparentées à la sienne, et que sa pensée, plus suggestive qu’originale, soit devenue celle d’un grand nombre. […] En voici le développement : le Nouveau Testament, par sa nature et par son contenu, est réfractaire à l’interprétation théopneustique, parce que ce recueil est écrit dans une langue morte et que les fidèles n’y ont accès que par des traductions toujours approximatives ; parce que le texte original lui-même n’existe pas d’une manière sûre dans toutes ses parties ; parce que enfin, dans un grand nombre de passages, le sens n’en est pas absolument certain. […] Voyez l’étude originale de M. 

1683. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Cela, certes, est original sous le même parallèle et sur le même trottoir que l’Élysée Montmartre ou la Boule-Noire, les deux choses les plus modernes que je sache. […] Ce fut si original que j’en eus le frisson. […] Il sera démontré surabondamment que ce poète musicien, bien loin d’imiter qui que ce fût, était, au contraire, dans son art, le plus solitaire, le plus hermétique, le plus inaccessible des originaux. […] Rollinat trouve le moyen d’être absolument original avec cette poussière.

1684. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Je ne veux pas dire que Stevenson soit complètement inconnu dans notre pays, mais on n’y a guère lu que ses livres les plus populaires, et c’est peut-être justement par ceux qui ont eu de moindres retentissements qu’on peut mieux goûter le côté si original et si personnel de son talent. […] Dans cet ouvrage d’une forme très personnelle et très originale, je rencontrai des observations qui me parurent commander l’attention et qui, sous une forme fantaisiste, renfermait des opinions fort justes sur la politique, la philosophie, l’art, etc. […] Nous aimons à découvrir l’artiste dans son œuvre ; nous le préférons à son sujet ; et s’il relève véritablement de lui-même, s’il est original, nous lui pardonnons beaucoup. […] La préface, très originale d’allure, l’entrée en matière donnera idée du mouvement du livre et de la fantaisie aisée qui y règne : « À l’heure où tous les poètes sont ivres, c’est-à-dire inspirés — après trois heures du matin, toutes les brasseries étant closes, Amphatisias le Magnanime, dont le génie n’est inconnu que du public, rencontra dans une rue escarpée de Montmartre un grand fantôme haillonneux qui l’arrêta. […] Henri Havard, sous l’impression de toutes les étrangetés produites par ceux croient qu’on peut devenir un artiste original par un effet de la volonté, et inventer un style, répond que la transformation d’un objet mobilier ne dépend pas de l’imagination du créateur de cet objet, mais doit d’abord répondre aux transformations qui se produisent dans nos besoins.

1685. (1774) Correspondance générale

Revenez sur votre pièce ; laissez-la comme elle est ; et soyez sûr, quoi que vous fassiez, que cette tragédie passera toujours pour originale, et dans son sujet, et dans la manière dont il est traité. […] Cette lettre, dont l’original, scellé d’un cachet représentant une fronde, a figuré aux ventes Lajarriette (1860) et Fossé-Darcosse (1862), a été publiée dans l’Intermédiaire (4e année, col. 326), par M.  […] Cette lettre a été écrite à l’occasion du poëme de Voltaire sur le Désastre de Lisbonne, et conservée par Grimm, qui garda copie de ce « chef-d’œuvre » avant d’envoyer l’original au destinataire, Paul Landois, auteur de Sylvie, tragédie bourgeoise en un acte et en prose, et de divers articles de l’Encyclopédie sur la peinture. […] Gabriel Charavay, en imprimant dans l’Amateur d’autographes (n° 44, 16 octobre 1863) la lettre du 20 janvier 1767, dont l’original fut acheté 44 francs à la vente du marquis Raffaeli, par le British Muséum, la fit précéder de l’excellente note que nous reproduisons ici : « L’Honnête Criminel, drame en vers et en cinq actes, de Fenouillot de Falbaire, est une des pièces de théâtre les plus caractéristiques du xviiie  siècle. […] H. de Chateaugiron, qui tenait l’original (sans date ni signature) de Mme Dufour de Villeneuve, sœur de Naigeon.

1686. (1903) Hommes et idées du XIXe siècle

L’homme lui paraît avoir été un vilain personnage, et le moraliste avoir gâté par un mélange d’idées fausses ses aperçus les plus originaux ; mais il rend justice à l’un et à l’autre. […] Chuquet, fut un amateur et un fantaisiste plutôt qu’un artiste, un original plutôt qu’un écrivain original, un écriveur plutôt qu’un écrivain. […] L’idée la plus originale de Beyle, et qui est au centre même du beylisme, c’est le culte qu’il professe pour l’énergie. […] Barzelotti a consisté à mettre en lumière une de ces influences subies par Taine ; il l’a fait saillir aux dépens de toutes les autres ; c’est l’idée dirigeante de son travail, celle qui le rend tout à la fois original et contestable.

1687. (1884) L’art de la mise en scène. Essai d’esthétique théâtrale

Pour être accessible à un pareil sentiment, il faudrait ne pas être convaincu comme je le suis que l’esprit de l’homme doit la majeure et la meilleure partie de ses créations en apparence les plus originales à une collaboration incessante, quoique souvent insaisissable et secrète. […] Labiche, il y a tantôt de l’esprit, et du plus fin, tantôt de la fantaisie, et de la plus originale. […] Les comédiens qui traduisent sur la scène ces combinaisons originales et fantaisistes doivent s’y sentir dégagés du inonde réel, sans quoi ils se trouveraient aussi mal à l’aise sur la scène que nous pourrions nous trouver gênés de nous voir en habit d’Arlequin dans la compagnie de gens graves et sérieux. […] C’est surtout dans les théâtres de genre que ce système tend à prévaloir, et on arrive réellement à produire sur le public des impressions piquantes et originales ; mais le danger est dans la répétition trop souvent renouvelée du même procédé. […] Certes il y fait des trouvailles originales ; et il met en saillie les caractéristiques de tous ces personnages nouveaux dans le monde de l’art et jusqu’à celles même des métiers les moins avouables.

1688. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « L’abbé Fléchier » pp. 383-416

L’abbé Ducreux, éditeur des Œuvres complètes de Fléchier (1682), l’a publié en entier pour la première fois : seulement il avoue qu’il a cru devoir en quelques endroits substituer quelques termes à ceux de l’original : « non qu’ils aient rien de messéant, dit-il, mais nous avons pensé que cette attention était due aux personnes d’une imagination qui se blesse aisément, et qui découvre, sous les expressions les plus innocentes, des sens détournés et peu modestes dont ne se doutaient pas ceux qui les ont employés ».

1689. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. » pp. 124-157

Il semble qu’il y ait plus de facilité pour le coup d’œil, plus de sûreté pour le jugement, dans ces premières éditions originales, dans ces sortes de gravures avant la lettre.

1690. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Charles Labitte »

Qu’il n’ait pas été quelquefois entraîné ainsi au-delà du but et n’ait pas un peu trop disséminé ses recherches, au point d’avoir peine ensuite à les resserrer et à les ressaisir dans son récit, je n’essaierai nullement de le nier ; mais il n’a pas moins poussé sa trace originale et vive, il n’a laissé à la paresse de ses successeurs aucune excuse ; et il ne sera plus permis après lui de faire les notices écourtées et sèches que quand on le voudra bien.

1691. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

Ce qui est certain, c’est qu’il possédait un talent original ; c’est qu’au milieu des polissonneries et des tours pendables où il se gaudissait et où il était maître, il avait l’étincelle sacrée.

1692. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

Tel est le portrait minutieux qu’un contemporain et un ami trace du Tasse ; ce portrait est parfaitement conforme à celui que nous possédons nous-même, copié sur le portrait original, peint sur le Tasse vivant à Florence, et qui nous a été prêté par notre illustre ami, le marquis Gino Caponi, homme digne de vivre dans sa galerie en société avec ces grands hommes de sa patrie.

1693. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

IX M. de Humboldt n’était pas un savant, dans le sens légitime du mot, car il n’avait ni découvert, ni inventé quoi que ce fût au monde ; il n’était pas un écrivain de premier ordre, car il n’avait rien écrit d’original.

1694. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Mais ici, la puissance originale de l’individualité les absorbe, et s’y ajoute, soit pour les transformer, soit pour les agrandir.

1695. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, le 8 décembre 1885. »

I s’agit ici de prendre une scène, un tableau, et d’écrire un texte s’inspirant de la scène originale en la décrivant, la commandant, la discutant… Jules Laforgue, dans ses Morales légendaires, présente ainsi en particulier un Lohengrin réécrit de façon parodique.

1696. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre IV. Shakespeare l’ancien »

Une tradition, contestée, veut qu’Évergète II ait rendu à Athènes, non l’exemplaire original d’Eschyle, mais une copie, en laissant, comme dédommagement, les quinze, talents.

1697. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Baudelaire, on savait qu’il existait quelque part, dans les entrailles fécondes de cette ville qui contiennent tant de germes pour l’avenir, un poète original, un esprit bien trempé, trop poète ou trop artiste selon quelques-uns, mais dont les qualités vivaces et surabondantes devaient faire diversion à l’ennui et à la médiocrité générale.

1698. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Alphonse Daudet »

ce n’est pas toutes ces gaîtés de l’œil, de l’oreille, de l’esprit et du style, mais c’est l’impression profonde qui sort de tous ces autres contes, si tristes au fond : La Cervelle d’or, qu’on dirait de Heine ; Les Deux Auberges, qu’on ne dirait de personne que d’un homme qui sait l’horreur de l’abandon ; La Sémillante, ce récit poignant et sombre, La Sémillante, — qui ne sémille plus, engloutie avec son vieux berger, « encapuchonné et lépreux », qui lève avec sa main sa lèvre, tombant sur sa bouche muette, pour raconter l’affreux naufrage ; — L’Île des Sanguinaires, enfin, le plus original de tous ces contes, non pas le plus terrible, — car ce gracieux Daudet se permet le terrible, comme vous venez de le voir ; — L’Île des Sanguinaires, où se trouve exprimée, toute seule, la mélancolie physique de la solitude.

1699. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Balzac » pp. 17-61

Quel écrivain, quel moraliste, quel observateur, si spirituel et si original qu’il pût être, avait eu l’idée d’un Esprit des Lois de la vie élégante ?

1700. (1898) Essai sur Goethe

Mettre en avant de tels originaux, à la fois grands et petits, dignes d’éloge et de blâme, était réservé à l’éducation chrétienne qui a transformé un si beau besoin physique en une perfection intellectuelle. […] Il prend goût à ce travail, il y consacre beaucoup de temps, il discute avec Schiller les modifications qu’il veut imposer aux textes originaux.

1701. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

L’artiste qui ne sait rien du tout, l’homme d’action qui sait peu de chose, est un homme aussi cultivé, aussi civilisé, souvent beaucoup plus, que le savant : « Tout notre monde moderne est pris dans le filet de la culture alexandrine et a pour idéal l’homme théorique, armé des moyens de connaissance les plus puissants, travaillant au service de la science et dont le prototype et ancêtre original est Socrate. […] Il s’est aperçu que peut-être il n’a, comme quelques autres, que rêvé une morale, une sociologie et même une théodicée, seulement une morale particulière, une sociologie qui lui était propre et une théodicée originale. […] Il n’en a pas fait un système, ni une théorie générale ; mais elles sont très originales, comme il l’est souvent, très pénétrantes, comme le sont presque toutes ses idées, et elles se rattachent toutes, comme il est naturel chez ce grand aristocrate, à la conception ou au rêve d’un art sain, viril, fort et noble. […] Conclusions Nietzsche n’est certainement pas un philosophe très original. […] Pour en revenir à Nietzsche moins son talent et moins ses sottises, il n’est pas très original, mais il est intelligent, aigu, subtil, disloquant et dissolvant avec maîtrise, reconstructeur avec une certaine audace et une certaine ardeur de conviction violente et sombre qui fait penser et qui est efficace et féconde au moins en cela.

1702. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

Anatole France, le critique des faits, l’historien de la vie contemporaine, selon la belle méthode neuve qu’il s’est instaurée et l’écrivain original sont plus importants que le critique littéraire. […] En prose, M. de Banville apporte à son écriture ce caractère qu’on dénommait au xviiie  siècle inimitable ; c’est-à-dire que la série des idées de détail qui composent la façon d’écrire de M. de Banville met en harmonie l’idée générale développée dans les brefs contes auxquels il se complaît d’une façon complète, adéquate et toujours originale. […] La traduction est faite en prose, en calque, d’un vocabulaire qui rend les lignes comme d’horizons nocturnes de l’original, et souple aussi, assez pour noter les quelques passages ironiques d’une idée à l’autre et les points de repère en termes familiers qui s’y trouvent imbriqués ; on entend comme un rappel d’harmonies autres, que l’on pressent distantes et formulées d’un différent syllabaire avec de diverses notations. — La gloire de cette traduction est en somme qu’on la peut lire avec la joie que donnerait un livre original, et qu’on ressent la communication quasi directe avec l’artiste créateur. […] L’importance de cette technique nouvelle (en dehors de la mise en valeur d’harmonies forcément négligées) sera de permettre à tout vrai poète de concevoir en lui son vers, ou plutôt sa strophe originale, et d’écrire son rythme propre et individuel au lieu d’endosser un uniforme taillé d’avance et qui le réduit à n’être que l’élève de tel glorieux prédécesseur. […] La Pauvre Lise donne le gage que Gabriel Vicaire peut prendre rang par la sincérité et l’émotion parmi les petits maîtres, et que s’il n’apporte pas une manière de sentir et de s’exprimer toute neuve, il peut placer, à côté des belles choses du passé, des choses originales, originelles de lui, gravées avec le burin que lui laissèrent des maîtres disparus.

1703. (1888) Poètes et romanciers

C’était dans une de ces maisons amies, où M. de Vigny se plaisait à venir et, comme rassuré sur les affections qui l’entouraient, à se montrer dans le charme original de son naturel. […] Ni la verve la plus hardie, ni l’invention la plus originale ne laissait rien à envier à M.  […] Le contraste des deux Natures et des deux poésies inspire à M. de Laprade un poème d’une beauté originale et d’une inspiration épique, Les Deux Muses. […] En face de l’Orient, se développe la civilisation hellénique avec sa conception originale de la Nature et de l’Art. […] De cette sentence, trop sommaire pour être juste, il faut excepter quelques œuvres que la sincérité du sentiment ou un effort original a mises hors de pair.

1704. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre II. Lord Byron. » pp. 334-423

Il en a employé les ressorts moteurs à sa façon, pour son but propre, de sorte qu’aucun d’eux ne reste le même, et c’est pour cette raison surtout que je ne saurais trop admirer son génie. » En effet, l’œuvre était originale. « Je n’ai jamais lu le Faust de Gœthe, écrivait Byron, car je ne sais pas l’allemand ; mais Matthew Monk Lewis, en 1816, à Coligny, m’en traduisit la plus grande partie de vive voix, et naturellement j’en fus très-frappé. […] Dès l’abord, il les avait vus ; les vrais artistes sont perspicaces ; c’est en cela qu’ils nous surpassent ; nous jugeons d’après des ouï-dire et des phrases toutes faites, en badauds ; ils jugent d’après les faits et les choses, en originaux : à vingt-deux ans il avait vu l’ennui né de la contrainte désoler toute la high life. « Là se tient debout la noble hôtesse, qui restera sur ses jambes — même à la trois-millième révérence. —  Les ducs royaux, les dames grimpent l’escalier encombré, et à chaque fois avancent d’un pouce1297. » — « Il faut aller voir à la campagne, écrivait-il, ce que les journaux appellent une compagnie choisie d’hôtes de distinction, notamment les gentlemen après dîner, les jours de chasse, et la soirée qui suit, et les femmes qui ont l’air d’avoir chassé, ou plutôt d’avoir été chassées… Je me rappelle un dîner à la ville chez lord C…, composé de gens peu nombreux, mais choisis entre les plus amusants.

1705. (1883) La Réforme intellectuelle et morale de la France

Les exigences cléricales auxquelles on se soumettait ne laissaient passer qu’une inoffensive médiocrité ; tout ce qui était un peu original se voyait condamné à une sorte de bannissement dans son propre pays. […] Ces sociétés manquent de distinction, de noblesse ; elles ne font guère d’œuvres originales en fait d’art et de science ; mais elles peuvent arriver à être très puissantes, et d’excellentes choses peuvent s’y produire.

1706. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

L’original de cette dépêche est sous nos yeux : Alphonse y proteste aussi énergiquement contre cette infidélité qu’il aurait pu le faire contre l’envahissement d’une de ses provinces ; on voit aussi par une lettre du cardinal de San Sisto, ministre du pape Grégoire XIII, au gouverneur de Pérouse, que les intentions d’Alphonse furent accomplies, et qu’on interdit sévèrement partout les éditions subreptices de la Jérusalem.

1707. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

« Mais ce soir-là toute sa vivacité de libres pensées et de verve originale, toute cette chaleur de sympathie et de bienfaisance était comme éteinte par un seul et absorbant intérêt.

1708. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Louis Étienne Les Chansons des rues et des bois, la dernière cargaison poétique envoyée de Guernesey, ont été accueillies par une bourrasque, et pourtant plusieurs pièces originales ou ingénieuses et nombre détachées méritaient une plus heureuse traversée.

1709. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre III. Les immoralités de la morale » pp. 81-134

Et je citerai d’autant plus volontiers Victor Cousin que le livre auquel je me réfère n’est pas une tentative originale et hardie, mais un exposé destiné à une sorte de vulgarisation philosophique.

1710. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Quellien, poète breton d’une verve si originale, le seul homme de notre temps chez lequel j’ai trouvé la faculté de créer des mythes, a rendu ce tour de ma destinée par une fiction très ingénieuse.

1711. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

Beaucoup d’autres saints personnages travaillaient au même but ; mais la façon dont Olier s’y prit fut tout à fait originale.

1712. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VII. La littérature et les conditions économiques » pp. 157-190

C’est lui qui a porté le drapeau et la langue de la France en des pays lointains, restés dès lors de petites Frances exotiques d’où nous arrivent à certains moments des œuvres originales d’une saveur pénétrante.

1713. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

De cette sentence, trop sommaire pour être juste, il faut excepter quelques œuvres que la sincérité du sentiment ou un effort original a mises hors de pair.

1714. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VIII : Hybridité »

À ce point de vue, les espèces originales devraient avoir produit tout d’abord des hybrides parfaitement féconds, ou tout au moins ils devraient l’être devenus par suite de la domestication pendant les générations suivantes.

1715. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Edmond et Jules de Goncourt »

Cette femme-là, ils l’avaient très nettement et même très brillamment posée dès le début de leur roman, dans cette scène, originale et nouvelle, qui ouvre le livre, entré Renée Mauperin et son fiancé Reverchon, nageant en pleine rivière, aux rayons obliques d’un soleil à son déclin… comme deux garçons qui veulent gagner de l’appétit avant de dîner.

1716. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

— écrivant un livre tardif où je n’aperçois, au bout de quatre cents pages, poindre ni caractère original, ni beauté d’âme, ni intérêt profond de trame humaine, se livrer à des besognes inférieures de pédant et de faiseur de dictionnaire, et atteler son vigoureux génie au haquet des plus lourdes dissertations ?

1717. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

Or, la philosophie chimique cherche à démontrer que ces prétendues forces originales ne sont que les résultantes de la composition toute mécanique des atomes élémentaires ; en sorte que les mouvements intérieurs des corps rentreraient sous les lois de la mécanique aussi bien que les mouvements extérieurs : nouveau pas fait dans la voie de l’imité.

1718. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

Qu’on se représente ce cadre majestueux, rempli par un homme d’une intelligence supérieure, déjà éprouvé par tant de vicissitudes, et qui, avant trente ans, laissait derrière lui toute une odyssée voyageuse et une révolution ; rappelez-vous que cet homme était dans toute la verdeur d’un talent original, et que son imagination, dans toute sa richesse, prodiguait les couleurs qu’elle avait rassemblées sur cette palette intérieure que les grands écrivains portent en eux et qui s’enrichit de tous les spectacles qu’ils contemplent et de toutes les émotions qu’ils éprouvent ; puis ramenez votre pensée sur les dispositions intellectuelles et morales du public, sur le désenchantement qu’avait laissé dans les âmes l’essai qui venait d’être tenté, pour appliquer les doctrines du dix-huitième siècle, sur le vide profond des cœurs et des intelligences, et alors vous comprendrez l’effet que produisit l’apparition du Génie du christianisme. […] Déjà, dans les dernières années de l’ancienne monarchie, Ducis, cet esprit vigoureux, avait imité le théâtre de Shakspeare sur notre scène, et si le traducteur d’Hamlet duRoi Léar et de Macbeth, pour se conformer aux habitudes de notre littérature dramatique et aux idées de son temps, avait rogné les ongles et les serres du vieil aigle britannique, un grand acteur65, en étudiant ses rôles dans l’original, lui rendait par son jeu une partie de ce que le traducteur lui ôtait. […] Walter Scott, par les traductions qui popularisèrent ses ouvrages en France est presque devenu un de nos auteurs nationaux ; mais il ne devait guère marquer son influence sur notre littérature qu’en donnant le goût des romans historiques et en excitant quelques esprits distingués à s’essayer dans ce genre : c’est peut-être à l’influence exercée par les romans de Walter Scott qu’on devra le Cinq-Mars de M. de Vigny, esprit original qui marchera dans la même voie sans l’imiter. […] Mais ils n’ont pu cependant détruire par tant de copies les beautés primitives et inspirées de l’original.

1719. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

C’était un homme universellement respecté qui, en outre, avait et méritait la réputation d’un original. Il me semble qu’il n’y a plus de ces originaux. […] Aujourd’hui que, déçu de quelques attentes, il est retourné aux vieux livres, si les éditions originales l’enchantent, c’est notamment pour leur nouveauté ancienne : nous avons tort de traiter comme vieux le passé, qui était plus jeune que nous. […] Dira-t-on qu’ils sont moins originaux à cause de cela ? ou, du moins, qu’ils sont originaux en dépit de cela ?

1720. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Je ne me défends donc pas, par un parti pris d’avance, de l’entraînement, que je reconnais être le souverain par excellence en matière d’art et de sentiment ; mais je m’obstine à vous dire que je ne veux être vraiment entraîné que par les choses que je comprends bien, et qu’à force d’être concise, pittoresque, originale, la forme de M.  […] Dans ce détail, je trouve le beau, c’est-à-dire de solides et touchantes vérités, revêtues d’une forme originale et charmante, souvent magnifique ; des pages de sentiment et de poésie qui sont des modèles et qui vous restent dans l’esprit comme des miroirs tournés vers un monde de prestiges divins, où notre œil n’eût su ou osé se fixer. […] Le tout est si complètement renouvelé, que ce serait une tâche intéressante pour la critique, non seulement de noter ces altérations, mais leur degré de ressemblance ou de dissemblance avec l’original. […] Byron lui-même était effrayé de cette ressemblance qui frappait Goethe, lorsqu’il écrivait avec une légèreté affectée : « Sa première scène, cependant, se trouve ressembler à celle de Faust. » Ainsi le peu de critiques français qui ont daigné jeter les yeux sur la magnifique improvisation de Mickiewicz, ont dit à la hâte : « Ceci est encore une contrefaçon de Faust », comme Goethe avait dit que Faust était l’original de Manfred. […] Konrad Konrad étant le nom du type privilégié de Mickiewicz, et en particulier celui du héros des Dziady, j’intitule ainsi le fragment de Mickiewicz dont je vais essayer de rendre compte, quoique ce fragment n’ait point de titre, ni dans la traduction ni dans l’original, et soit seulement désigné : Troisième partie des Dziady, acte Ier.

1721. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Seulement, si Rousseau s’était contenté d’exhorter ses contemporains à la simplicité des mœurs et de leur recommander la vie de la campagne ou des petites cités, cela n’aurait pas semblé bien original et n’aurait pas fait beaucoup de bruit. […] Mais de la partie originale, de la partie propre à Rousseau, je le répète, on n’a rien pu retenir. […] Mais l’idée essentielle, originale et absurde de l’Émile se plie si mal à la pratique, que Jean-Jacques, consulté par des mères, des abbés précepteurs, même des princes, fait ce qu’il avait déjà fait à propos du Discours sur les sciences et du Discours sur l’inégalité : il avoue sa propre outrances ou bien il l’atténue, ou même il se contredit. — A madame de T… (6 avril 1771) il conseille nettement d’éloigner et de mettre en pension un enfant indisciplinable, et ne se soucie nullement de laisser faire la nature chez ce jeune vaurien. — A l’abbé M… (28 février 1770) il écrit (et je ne sais trop s’il n’y met pas une ironie sourde de pince-sans-rire, bien que ce sentiment lui soit, en général, très étranger) : S’il est vrai que vous ayez adopté le plan que j’ai tâché de tracer dans l’Émile, j’admire votre courage : car vous avez trop de lumières pour ne pas voir que, dans un pareil système, il faut tout ou rien, et qu’il vaudrait cent fois mieux reprendre le train des éducations ordinaires et faire un petit talon rouge que de suivre à demi celle-là pour ne faire qu’un homme manqué… Vous ne pouvez ignorer quelle tâche immense vous vous donnez : vous voilà, pendant dix ans au moins, nul pour vous-même, et livré tout entier avec toutes vos facultés à votre élève ; vigilance, patience, fermeté, voilà surtout trois qualités sur lesquelles vous ne sauriez vous relâcher un seul instant sans risquer de tout perdre ; oui, de tout perdre, entièrement tout : un moment d’impatience, de négligence ou d’oubli peut vous ôter le fruit de dix ans de travaux, sans qu’il vous en reste rien du tout, pas même la possibilité de le recouvrer par le travail de dix autres.

1722. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Marot l’eût aimé, Boileau le salue, et Musset non seulement le salue, mais veut que nous le saluions : « Ôtez votre chapeau, c’est Mathurin Régnier. » Personne n’est plus original, personne n’est plus lui-même. […] On voit que c’est un livre de Lamartine à tout le moins très original. […] Renée Mauperin, chef-d’œuvre, à mon avis, des deux auteurs, vraiment original à sa date, premier portrait, à ma connaissance, de la jeune fille aux libres allures, — dont on a tant abusé depuis qu’elle inspire une espèce de fureur quand on la rencontre encore et qu’il suffit qu’elle apparaisse aux premières pages d’un volume pour qu’on le ferme à jamais, — n’est pas responsable de son horripilante postérité, et c’est un livre heureusement venu presque en entier. […] Et leur nervosisme graphique est devenu à son tour un procédé, même pour eux, et surtout pour leurs imitateurs ; mais il avait commencé par être original, et la première qualité du style est d’être original. […] Le sens pittoresque est devenu en lui cette couleur grosse et criarde qui fait comme hurler les objets au lieu de les faire chanter, comme disent les peintres, dans une harmonie et comme une symphonie générale selon leurs rapports avec les autres objets qui les entourent. — L’objet matériel inanimé d’une vie mystérieuse, qui est peut-être l’invention la plus originale des romantiques et d’où est venue toute la poésie symbolique, est devenu chez Zola, souvent, du moins, une véritable caricature lourde, grossière et puérile, et la « solennité de l’escalier » d’une maison de la rue de Choiseul a défrayé avec raison la verve facile des petits journaux satiriques. — La simplification de l’homme, réduit à une passion unique et dépouille de sa richesse sentimentale et de sa variété sensationnelle, est devenue, chez Zola, une simplification plus indigente encore et plus brutale ; chaque homme n’étant plus chez lui qu’un instinct et l’homme descendant, en son œuvre, on a dit jusqu’à la brute et il faut dire beaucoup plus bas, tant il s’en fallait que l’animal soit une brute et que chaque animal n’ait qu’un instinct.

1723. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

L’énoncé du problème à résoudre était ainsi conçu : Où s’instruisent et comment se forment, de l’autre côté de la Manche, les classes supérieures ou moyennes, où la politique recrute-t-elle ses parlementaires et ses diplomates, l’administration ses fonctionnaires, la guerre et la marine leurs officiers, l’industrie ses directeurs techniques, le commerce ses agents, la philosophie de si profonds penseurs, la littérature, l’histoire, la science tant de talents originaux ? […] L’expression toute fraîche des sensations originales affleure à la surface de cette science et ne perd rien à venir de si loin. […] Parigot a reçu communication de divers manuscrits originaux ; il les a étudiés minutieusement ; il a noté, en quelque sorte ligne par ligne, les tâtonnements et les scrupules d’une pensée qui se contentait difficilement. […] Ce mélange de hardiesse et de mesure, cette grâce rassurante de mousquetaire assis et calmé, cette façon, fort originale, de concilier la fantaisie avec la règle et la tradition avec la nouveauté, cette alliance de la réflexion avec la fougue, ce souci de morale austère, qui domine et dirige les démarches d’un esprit libre, toutes ces qualités complexes, délicates et d’apparence contradictoire, se montrent dans le talent de M. 

1724. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

D’autres, comme Southey et surtout Coleridge, fabriquaient des rhythmes absolument neufs, aussi heureux parfois et parfois aussi malheureux que ceux de Victor Hugo, par exemple un vers dans lequel on comptait les accents et non plus les syllabes ; singulier pêle-mêle de tâtonnements confus, d’avortements visibles et d’inventions originales. […] C’est justement avec ces facultés qu’ils créent un nouveau genre, qui par des milliers de rejetons pullule encore aujourd’hui, avec une abondance telle que les talents s’y comptent par centaines, et qu’on ne peut le comparer pour la séve originale et nationale qu’à la peinture du grand siècle des Hollandais.

1725. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Le vrai qui fait vivre ses satires littéraires, le plus original peut-être de ses ouvrages, c’est le vrai d’un excellent plaidoyer en faveur de l’esprit français contre le tour d’imagination qui, au dix-septième siècle, en avait pris la place et usurpé le nom. […] Oui, si les pensées empruntées ne font pas corps avec l’ouvrage ; si je les rencontre parmi des pensées faibles et languissantes, et comme en mauvaise compagnie ; si elles ne sont point amenées invinciblement par la suite du discours ; si je puis les en ôter sans qu’il y ait lacune ; si exprimées en perfection dans l’original, elles ne sont qu’ébauchées dans l’imitateur, oui, il y a imitation, ou plutôt il y a plagiat.

1726. (1805) Mélanges littéraires [posth.]

Dans cette espèce de liste des mots originaux et primitifs, il y a deux vices à éviter : trop courte, elle tomberait souvent dans l’inconvénient d’expliquer ce qui n’a pas besoin de l’être, et aurait le défaut d’une grammaire dans laquelle des racines grammaticales seraient mises au nombre des vérités : trop longue, elle pourrait faire prendre pour deux mots de signification très différente, ceux qui dans le fond renferment la même idée. […] Les difficultés en sont d’autant plus grandes, que le genre d’écrire de cet auteur célèbre est absolument à lui, et ne peut passer à un autre sans s’altérer ; c’est une liqueur qui ne doit point changer de vase : il a eu, comme tous les grands écrivains, le style de sa pensée ; ce style original et simple ne peut représenter agréablement et au naturel un autre esprit que le sien : en cherchant à l’imiter, j’en appelle à l’expérience, on ne lui ressemblera que par les petits défauts qu’on lui a reprochés, sans atteindre aux beautés réelles qui font oublier ces taches légères.

1727. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Gérome, il faut bien le dire, n’a jamais été forte ni originale. […] Parmi les artistes qui se contentent du pittoresque naturel de l’original se font surtout remarquer M. 

1728. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

La nature de telle traduction peut vous renseigner sur la nature de l’idiome original. […] Toutes ces œuvres si fortes, si énergiques, si originales, sont donc restées inconnues ou ont été oubliées après avoir brillé un instant, si bien inconnues et oubliées qu’un des titres de gloire de Guillaume Schlegel, et non le moins enviable, est d’avoir compris le génie de Calderon et de l’avoir révélé à l’Europe. […] Tels qu’ils étaient, ils étaient originaux ou intéressants, ou dignes d’observation ; s’ils avaient été des caractères, ils auraient été insupportables. […] Mais ce retour à l’Église primitive prit une forme originale, et cette vieille vertu de la résignation devint une vertu toute nouvelle chez ces âmes rajeunies par un ravivement de ferveur religieuse. […] Quelques réflexions morales et quelques rêveries d’une nature poétique et romanesque ont été baptisées Images des rêves et fantômes subjectifs ; mais, de tous ces groupes de rêveries et de pensées, celui qui m’a paru le plus nouveau et le plus original est un ensemble de récits et de souvenirs réunis sous ce titre alléchant pour le moraliste et le psychologue : les Petits Secrets du cœur.

1729. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

Dans ce livre où se révèlent bien des qualités d’écrivain et d’observateur, mais que je ne puis vraiment recommander qu’aux curieux, se déroule aussi un roman passionnel très étudié et qui met en relief de curieuses et originales physionomies. […] Je copie sur le manuscrit original une note qui est une indication précieuse, elle est comme le titre des chapitres de la seconde partie du poème, définition des êtres que le poète interroge : La Chauve-souris représente l’athéisme : Nihil. […]   Je sens, après l’avoir écrit, que ce résumé, où tous les faits ainsi pressés s’étouffent et se déforment, ne peut donner une juste idée du livre très original et très hardi de M.  […] » Plus loin je trouve tout le récit des premiers temps de la vie de Ziem ; le peintre charmant et original raconte son roman tout aussi fantaisiste, tout aussi curieux qu’un voyage de d’Assouci. […] Gustave Larroumet vient de réunir en un volume de haut intérêt, paru chez Hachette, une suite de ses Études d’histoire et de critique dramatiques ; la rare et pénétrante éloquente de l’auteur, rendant accessible à tous les questions d’art les plus élevées, nous montre Œdipe roi tel qu’il est joué à la Comédie-Française, en le rapprochant de la tragédie originale de Sophocle, la comédie au moyen âge, le théâtre de Molière à Marivaux, Shakespeare et le théâtre français, Beaumarchais dans sa vie et dans son œuvre ; puis il aborde le théâtre en général pour en dégager la morale, il étudie les comédiens et leurs mœurs et les théâtres de Paris, appréciant leurs troupes et leurs genres.

1730. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Les uns en ont conscience, ainsi Leconte de Lisle qui écrit le Catéchisme républicain, ainsi Sully Prudhomme qui compose ses sonnets sur la France et qui dit : « Ce peuple illustre porte, écrasé par un autre, Le deuil des vérités dont il s’est fait l’apôtre, Et dont l’aube orageuse éblouit l’univers… » « Ainsi Léon Cladel, dont l’œuvre entière est l’épopée du prolétaire, des Va-nu-pieds, pour rappeler le titre d’un de ses volumes les plus originaux. […] Cette différence entre la mauvaise copie et l’original, vous ne pouvez pas la rendre avec du noir sur du blanc. » Le dialogue, il ne l’appréciait que réduit aux mots essentiels. […] C’est une autre des vertus essentielles du roman : il faut qu’il mette en scène des caractères originaux et qu’il dégage dans ces caractères les traits qui les rangent dans des espèces psychologiques, lesquelles rentrent elles-mêmes dans l’expérience du lecteur. […] Je voudrais dire en quoi Sainte-Beuve qui fut un portraitiste des intelligences, comme Balzac fut un portraitiste des caractères, a, lui aussi, pensé la littérature par les causes, et par quel chemin très original il est arrivé à ce point de vue. […] Ainsi de Descartes, génie si original, et comme ses théories s’harmonisent avec l’activité littéraire, artistique et sociale du dix-septième siècle !

1731. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Le rare de l’aventure, ce qui en fait l’original mérite, et aussi ce dont les critiques louent chaleureusement l’auteur, c’est que, contrairement aux écrivains « raseurs » qui ont parlé de la guerre d’une façon plutôt triste, avec de sottes défiances et des pitiés surannées, le capitaine Driant a semé, lui, au cours de son ouvrage, une gaîté franche, large, inaltérée, une gaîté irréprochable, qui ne verse jamais dans l’ironie — ce qui eût été de mauvais ton pour un capitaine, — ni dans l’humour, car l’humour garde souvent un arrière-goût de tristesse amère et de désenchantement, qu’un homme vraiment gai doit savoir éviter. […] Il est certain que l’auteur charmant de Un homme libre apportera là — s’il apporte autre chose que du dédain, de l’ennui et du quinquina — des habitudes d’élégance intellectuelle, des raffinements d’idées, qui risquent fort de rester incompris, ridiculisés même, pour l’unique raison qu’ils seront originaux et curieux. […] Maurice Maeterlinck se montre un artiste consommé, sous l’admirable instinctif qu’il est : et la poésie qui encadre chacune de ces scènes d’horreur en est tout à fait originale et nouvelle ; plus que cela : véritablement visionnaire. […] « Sans doute, elles ne s’adressent qu’à une élite de rares esprits ; mais il convient qu’il en soit ainsi d’une œuvre essentiellement originale, à laquelle je suis heureux d’applaudir. » Rêverie [Le Journal, 11 mars 1894] On peut penser ce qu’on voudra de M. 

1732. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

Aucun artiste d’aujourd’hui, avec un os pour planche et un silex pour pointe, ni même avec nos moyens perfectionnés, ne pourrait donner du renne une image plus vivante que celle dont l’original est au musée de Constance ; elle a été gravée sur un os de renne par une main de l’âge de la pierre taillée, la même ou une autre qui grava aussi des mammouths, des chevaux, des bœufs, des hommes. […] D’une part, l’homme intelligent peut avoir existé et n’avoir pas exercé son activité sur des matières durables ; il peut également avoir existé, sans avoir été encore en état d’exercer une activité originale. […] C’est une suite d’observations qui semblent entièrement originales et de déductions d’une belle logique. […] Car il ne paraît guère avoir travaillé d’original, ce qui, d’ailleurs, n’a point ici d’importance.

1733. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Peut-être en prendrait-il son parti, maintenant qu’on lui a dit sur tous les tons que la pièce était originale et belle. […] Et, comme si ce nom respecté n’était pas assez significatif par lui-même, il y a d’autres affiches où on le voit entouré de formules telles que Délivrance nationale, et où la disposition typographique de ce nom et de ces formules rappelle les réclames les plus originales de nos plus ingénieux commerçants. […] Je me demandais, à ce propos, quel peut bien être, au milieu de la vie extraordinaire qu’elle mène depuis dix ans, l’état d’esprit de cette originale personne.

1734. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

J’aimerais mieux être le propriétaire de la plus humble maisonnette des champs que d’habiter un palais qui ne m’appartiendrait pas. » « Deux routes peuvent conduire à la renommée ; la première est l’art d’imitation, la seconde est l’art qui ne relève que de lui-même, l’art original. Les avantages de l’art d’imitation sont que, comme il répète les œuvres des maîtres que l’œil est depuis longtemps accoutumé à admirer, il est rapidement remarqué et estimé ; tandis que l’art qui veut n’être le copiste de personne, qui a l’ambition de ne faire que ce qu’il voit et ce qu’il sent dans la nature, ne parvient que lentement à l’estime, la plupart de ceux qui regardent les œuvres d’art n’étant point capables d’apprécier ce qui sort de la routine et atteste des études originales. » « C’est ainsi que l’ignorance publique favorise la paresse des artistes et les pousse à l’imitation. […] Il eût été bien plus étrange qu’ils eussent battu chaleureusement des mains à une œuvre originale.Ils n’ont pas encore d’habitudes contre nature.

1735. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

Hafiz est amoureux comme Salomon ; il prend ses images et ses couleurs dans la voluptueuse Arabie ; Horace ne les prend que dans ses modèles grecs ; Hafiz est un inspiré de l’amour et de la divinité ; Horace, tout parfait qu’il soit de style, n’est qu’un littérateur accompli de Rome ; le premier, original comme la nature ; le second, académique comme la cour d’Auguste.

1736. (1860) Cours familier de littérature. IX « Le entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier (2e partie) » pp. 81-159

Sainte-Beuve, poète sensible et original alors, politique depuis, critique maintenant, supérieur toujours, qui aurait été le plus agréable des amis s’il n’avait pas eu les humeurs et les susceptibilités d’une sensitive ; Ballanche, enfin, que nous avons caractérisé plus haut, et le jeune disciple de Ballanche, Ampère, qui devait prendre sa place après la mort de son maître et se dévouer à la même Béatrice.

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