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1254. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Préface »

. — L’autopsie à laquelle ont présidé MM. les docteurs Veyne et Piogey, au lendemain de la mort, a révélé la présence dans la vessie de trois pierres dont l’une affecte le volume et la forme d’un gros œuf de poule ; les deux autres ressemblent par la forme et leur grosseur à deux châtaignes ordinaires.

1255. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « APPENDICE. — CASIMIR DELAVIGNE, page 192. » pp. 470-486

Sans prétendre que sa pureté et son élégance l’aient partout abandonné, ce que démentiraient d’heureuses exceptions, nous lui reprocherons de les avoir mises en oubli plus souvent qu’à l’ordinaire.

1256. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Jean-Baptiste Rousseau »

Puis vient la comparaison avec Orphée et la prière aux trois sœurs filandières pour le comte du Luc ; on y trouve quelques strophes assez touchantes, que La Harpe, d’ordinaire peu favorable à Jean-Baptiste, mais attendri cette fois comme Pluton, a jugées tout à fait dignes d’Orphée.

1257. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

Je me hâte de dire que la seule version que j’admette et que j’admire, c’est la première, celle qui a obtenu le prix aux Jeux Floraux, et qui est d’ordinaire reléguée parmi les notes.

1258. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Notes sur l’Ancien-Régime »

2° Pour ce qui est du clergé, j’ai relevé, aux Archives nationales, dans les papiers du comité ecclésiastique, l’état nominatif des religieux de 28 ordres : Grands-Augustins 694, Petits-Pères 250, Barnabites 90, Bénédictins anglais 52, Bénédictins de Cluny 298, de Saint-Vanne 612, de Saint-Maur 1 672, Cîteaux 1 806, Récollets 2 238, Prémontrés 399, Prémontrés-Réformés 394, Capucins 3 720, Carmes déchausses 555, Grands-Carmes 853, Hospitaliers de Saint-Jean de Dieu 218, Chartreux 1 144, Cordeliers 2 018, Dominicains 1 172, Feuillants 148, Genovéfains 570, Mathurins 310, Minimes 684, Notre-Dame de la Merci 31, Notre-Sauveur 203, Tiers-ordre de Saint-François 365, Saint-Jean des Vignes de Soissons 31, Théatins 25, abbaye de Saint-Victor 21, Maisons soumises à l’ordinaire 305.

1259. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

Cette mort, qui lui assurait un ange au ciel au lieu d’une amie sur la terre, ne lui laissa point de tristesse, mais cette gaieté sereine qui brave les malheurs ordinaires de la vie.

1260. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre 2. La littérature militante »

Mais dans la Harangue aux États d’Orléans (1560) et dans le Mémoire au Roi sur le But de la guerre et de la paix (1568), ses ordinaires remontrances en faveur de la paix et de la tolérance ont revêtu une forme singulièrement forte ; vigueur de raisonnement, mouvement pathétique, expression saisissante, toutes les parties d’un grand orateur se trouvent dans ces deux pièces.

1261. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Alphonse Daudet  »

Alphonse Daudet a beaucoup d’esprit et qu’il est toujours à l’affût, il s’arrête et s’intéresse à des détails qui nous échapperaient ou que nous remarquerions à peine ; il nous fait trouver curieuses par la façon dont il nous les présente des choses tout ordinaires et qui nous auraient sans doute faiblement frappés ; il a, si j’ose dire, un merveilleux flair des petits drames obscurs dont fourmille la réalité.

1262. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

Mais quand tout vous rit, et que le monde est bien infatué de vos richesses, il faut prendre à toute main l’argent qu’on vous offre, faire grande dépense à l’ordinaire ; et puis un beau matin, après avoir mis tous vos meilleurs effets dans une cassette, déloger à petit bruit, et donner ordre à votre portier de dire à tout le monde qu’on ne sait où vous êtes allé.

1263. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Enchérissant d’ordinaire sur les devoirs tracés par la Loi et les anciens, il voulait la perfection.

1264. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

Le phénomène primitif est l’impression, ou, comme on dit d’ordinaire, la sensation ; l’idée en est une copie affaiblie ; puis les idées s’associent, s’unissent, et il en résulte des phénomènes complexes ou agrégats.

1265. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Qu’est-ce qu’un classique ? » pp. 38-55

Un classique, d’après la définition ordinaire, c’est un auteur ancien, déjà consacré dans l’admiration, et qui fait autorité en son genre.

1266. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

Dans tous les établissements publics où il s’emploie un certain nombre d’hommes, il s’en trouve toujours un qui, d’ordinaire placé dans les rangs inférieurs, a amassé durant des années en silence des trésors de fiel et d’envie ; et, le jour d’une révolution survenant, cet homme se lève contre les autres qui ne le connaissaient même pas jusque-là, il devient leur ennemi ulcéré et leur dénonciateur.

1267. (1903) Zola pp. 3-31

Il reste formidablement incomplet, comme tout le monde, sans doute, mais beaucoup plus, que ne le sont d’ordinaire ceux qui occupent un certain rang dans la célébrité.

1268. (1889) Méthode évolutive-instrumentiste d’une poésie rationnelle

Car, dans cette formule sont impliquées pour moi telles folies et dangereuses imaginations inspirées par les religions (citons plus près de nous Milton et Dante), et sensationnelles seulement, pour peu qu’on les pense, sont les ordinaires visions de paradis ou d’enfers sous divers noms, où se meuvent les diverses théogonies d’amour et d’effroi.

1269. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse psychologique »

Or, ce sont précisément ces facultés saillantes et sortant de l’ordinaire que nous donne l’analyse esthétique telle que nous l’avons indiquée et telle que nous avons appris à l’interpréter, traduites en indications mentales, ramenées à leur sens précis en termes de psychologie, ces données aboutissent à nous révéler le caractère essentiel et particulier de la nature de l’artiste étudié, l’élément même en excès ou en défaut11 par lequel il est à part des autres hommes en tant qu’artiste, et des artistes en général, en tant que tel artiste.

1270. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

La fable de la comédie consiste dans l’exposition d’une action prise de la vie ordinaire, dans le choix des caractères, dans l’intrigue, les incidents, etc., au moyen desquels on parvient à faire sortir le ridicule d’un vice quelconque, si le sujet est vraiment comique, ou à développer, divers sentiments du cœur, si le sujet n’est pas véritablement comique.

1271. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Paragraphe sur la composition ou j’espère que j’en parlerai » pp. 54-69

Il y a sans doute des sujets ingrats ; mais c’est pour l’artiste ordinaire qu’ils sont communs.

1272. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 24, des actions allegoriques et des personnages allegoriques par rapport à la peinture » pp. 183-212

La composition purement allegorique ne devroit donc être mise en oeuvre que dans une necessité urgente, et pour tirer le peintre d’un embarras dont il ne pourroit sortir par la route ordinaire.

1273. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Seconde partie. Nouvelles preuves que la société a été imposée à l’homme » pp. 243-267

Le sentiment de l’avenir repose d’ordinaire dans le passé ; s’il est vrai que le passé nous échappe, nous ne pouvons pas en tirer des documents pour l’avenir.

1274. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre V. Mme George Sand jugée par elle-même »

D’ordinaire, l’hypocrisie n’est pas commode.

1275. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Hippolyte Babou »

En effet, en ces deux-là, on trouve, avec ses qualités habituelles et dans le milieu ordinaire de l’observation de l’auteur, deux ou trois individualités, deux ou trois têtes, en profil, il est vrai, mais qui sont arrêtées et dont la fine originalité vous saisit au plus délicat de votre être.

1276. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VII. Le cerveau et la pensée : une illusion philosophique »

D’abord il est fragmentaire ; il ne retient d’ordinaire que quelques éléments de la perception primitive.

1277. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VII : Théorie de la raison par M. Cousin »

Ce qu’on exprime dans le langage ordinaire, en disant qu’entre les parties de l’espace pur il n’y a aucune différence.

1278. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXII. »

L’étrangeté de la pensée et l’irrégularité du vers ont été jugées d’ordinaire le seul moyen de ressembler à Pindare.

1279. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

, non moins satirique, mais plus plaisant et plus gai qu’à son ordinaire, rassemble les successeurs autour d’un énorme turbot, délibérant gravement sur les moyens de l’apprêter sans le dépecer. […] « Mais vous défendez Sénèque comme un homme ordinaire.  » — C’est que le plus grand homme n’est pas toujours admirable, et que Turenne est encore un héros après avoir révélé le secret de l’État à sa maîtresse70. […] Les hommes ordinaires peuvent s’en imposer sur le motif qui les détermine ? Mais Sénèque fut-il un homme ordinaire ? […] La disgrâce confirmée trouva le philosophe détaché de toutes ces importantes frivolités dont la privation rend aux hommes ordinaires le moment du repos et de la liberté si fâcheux, et la vie privée si ennuyeuse.

1280. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

Cela explique l’âpreté ordinaire de Nietzsche. […] Ils avisent la façon d’être, naturelle, acquise aussi, et, enfin et surtout, ordinaire et générale, d’un peuple, et cette façon d’être : 1° ils la disciplinent ; 2° ils la divinisent, ils l’autorisent d’une idée théologique et théocratique. […] Ils divinisent la vie ordinaire d’un peuple. Ils persuadent à un peuple que sa vie ordinaire a un sens, et un beau sens, un sens divin, un sens mystérieux, agréable à une puissance supérieure et voulu par elle. […] Il est très rare qu’une nature supérieure conserve assez de raison [de souplesse de bon sens et d’intelligence compréhensive] pour comprendre et pour traiter les hommes ordinaires en tant qu’hommes ordinaires.

1281. (1914) Une année de critique

Nous quittâmes ensemble nos hôtes, et notre sympathie s’établit comme s’établissent d’ordinaire toutes les amitiés entre jeunes gens, par une conversation où nous parlâmes de nos admirations communes. […] Presque, toujours il transpose une sensation visuelle en une image visuelle, celle-ci, à l’encontre du but que se propose d’ordinaire une métaphore, n’étant pas nécessairement plus générale que celle-là. […] L’observation de Jules Renard ne pénètre pas très avant dans l’âme humaine, mais elle en découvre des aspects que les hommes cachent d’ordinaire, ou que les écrivains négligent. […] L’émotion leur fait peur ; les discours sentimentaux ne composent pas l’ordinaire de leur vie. […] Et tout ce monde-là pleure de nobles larmes, uniquement parce que, à l’orient de l’Europe, a existé une littérature russe qui, chère d’abord à une élite, est devenue la pâture ordinaire du public français.

1282. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

Il travaillait d’ordinaire dans un atelier du faubourg Saint-Antoine, alimenté par l’hôpital voisin. […] Qu’on baptise ces guérisons du nom de phénomènes ou de miracles, peu importe, il y a là quelque chose qui sort de l’ordinaire de la nature et que la science n’a pu expliquer jusqu’à présent. […] Après des jeux qu’il serait peu généreux de mentionner, presque tous violèrent cette élégante jeune femme, dont les cris n’attirèrent personne, car à cette heure, dans Estella, de telles protestations étaient ordinaires. […] « Parmi les questions qu’il fit, quelques-unes attestaient une si complète ignorance des choses les plus ordinaires que plusieurs de mes camarades sourirent. […] Il parcourut, lentement et en tous sens, ses grands appartements, plus lentement qu’à l’ordinaire : lui-même aussi semblait vouloir observer.

1283. (1896) Les époques du théâtre français (1636-1850) (2e éd.)

Pardonnez-moi donc de passer outre aux préliminaires, et, aujourd’hui surtout, que j’ai beaucoup de choses à vous dire, — plus que je n’en aurai d’ordinaire, — permettez-moi d’entrer immédiatement en matière. […] Hérode vient de faire exécuter sa femme, et elle n’est pas plutôt expirée que, selon l’ordinaire des meurtriers d’amour, il regrette amèrement de l’avoir envoyée au supplice : Quoi ! […] Et, en effet, dit Corneille, ce n’est pas une aventure ordinaire ; mais quoi ! […] Mettons, Messieurs, que sa passion soit noble, qu’elle passe l’ordinaire de l’humaine nature, qu’il faille même des Polyeucte pour nous élever au-dessus du culte des intérêts matériels, pour nous faire sentir combien il y a de choses qui valent mieux que la vie. […] Mais Racine, lui, parti de l’observation, et ne tâchant qu’à peindre des sentiments qui fussent de tous les temps et de tous les lieux, dans des situations ordinaires, pour ne pas dire quotidiennes, n’a cherché dans l’histoire que le moyen de les rendre tragiques ou uniques.

1284. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

Il était naturellement si bon que, dans son enfance, s’étant fait au sourcil une brûlure grave qui lui laissa cicatrice, comme il en souffrait beaucoup, il dissimulait tout à fait cette douleur devant sa belle-mère, qu’il aimait tendrement ; il triomphait sans trop d’effort de l’égoïsme si ordinaire à cet âge, et, dès que sa belle-mère s’approchait de son lit, il ne sentait plus son mal. […] Il y avait, vers cette époque, dans le pays, une petite société dite de Chambarans, telle sans doute que les jeunes gens en forment d’ordinaire dans leur vue anticipée du monde et dans leurs rêves d’utopie première : « C’est là, lui écrivait après des années l’un des membres de cette petite coterie, c’est là que je sus vous apprécier et que vous m’apprîtes à lire les Ruines de Volney. […] J’y profite peu ; mais c’est une façon de jouir que de voir combien les hommes ordinaires de notre temps, tant maudit et même avec justice, voient nettement de bonnes choses que les hommes supérieurs d’un temps très-peu ancien ne voyaient que très-obscurément. […] Rendez-moi comme vous me sentez, c’est-à-dire bien plus beau que je ne suis… » Et encore : « Moi, mon cher ami, je ne vous demande qu’une chose, comme à mon traducteur, c’est de ne pas l’être dans le sens ordinaire, mais dans le sens réel, c’est-à-dire de rendre l’âme et non pas le corps de mon ouvrage. […] Ces preuves, je l’avoue (et je parle ici d’après ma plus vraie pensée, indépendamment de ma fonction d’avocat naturel), me paraissent fort satisfaisantes et de celles dont les critiques sagaces n’hésitent pas à se prévaloir d’ordinaire en cet ordre de conjectures.

1285. (1881) Le naturalisme au théatre

Or, nos monstres sont tout simplement des hommes, et des hommes fort ordinaires, comme nous en coudoyons partout dans la vie, sans tant nous offenser. […] Quand la phrase sort de l’ordinaire, il ne peut plus la prononcer, l’auteur doit en chercher une autre. […] Paris semble croire qu’une telle aventure, fort ordinaire, ne s’était jamais vue. […] Ce personnage est d’invention ordinaire, légèrement mélodramatique même ; mais je voulais le signaler, pour montrer l’idée de foi et de patriotisme qui plane sur toute l’œuvre. […] Seulement, le génie, dans les mélodrames, n’est d’ordinaire pas là pour accomplir ce miracle.

1286. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Une terrasse inondée de soleil couchant et recouverte d’une treille de vigne laissait entrevoir à travers les pampres une table rustique couverte de corbeilles de raisin, de figues, de crème et de fiasques ficelées de paille jaune, dont des fleurs sauvages bouchaient le long col à la manière d’Italie ; c’était une collation préparée par le métayer pour la promenade ordinaire de la belle princesse. […] À ce moment la porte s’ouvrait aux visites : le bon Ballanche venait le premier, et d’ordinaire avait déjà vu madame Récamier ; puis un flot plus ou moins nombreux, plus ou moins varié, plus ou moins animé, d’allants, de venants, au milieu desquels se retrouvait le groupe des personnes accoutumées à se voir chaque jour, quelques-unes plusieurs fois par jour, et, comme le disait M. 

1287. (1860) Cours familier de littérature. X « LVe entretien. L’Arioste (1re partie) » pp. 5-80

Mais, au lieu de laisser dans notre entretien de la soirée cette mélancolie pensive que laisse la lecture d’un livre passionné dans l’esprit d’une société de lecteurs, notre entretien, plus gai et plus souriant qu’à l’ordinaire, se ressentit de la folie et de la verve du poète : la villa, les jardins, les bois de lauriers, les vallées de l’horizon, la mer et le ciel nous parurent pleins de paladins, d’enchanteurs et de belles aventurières poursuivies par leurs persécuteurs ou poursuivant leurs héros à travers le monde. […] « J’apparus au balcon comme à l’ordinaire, vêtue de la robe de Ginevra ; ma parure blanche éclatait au loin sous les reflets de la lune ; ma taille et mon visage, qui ressemblaient à la taille et au visage de ma maîtresse, me faisaient confondre avec elle ; l’astucieux duc d’Albanie s’approche à pas furtifs, saisit l’échelle que je lui jette et monte sur le balcon. » — Passez une stance inutile, dit le chanoine au professeur ; elle ne méritait pas un sinet, mais un silence. » Le professeur omit la stance et poursuivit.

1288. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (3e partie) » pp. 193-271

Aristote prend un exemple des plus ordinaires ; et, considérant que, quand une pierre est mue par un bâton, c’est la main qui meut le bâton et l’homme qui meut la main, il en conclut que, dans tout mouvement, il faut toujours remonter à un premier moteur, lequel est lui-même nécessairement immobile, tout en communiquant au dehors le mouvement qu’il possède et qu’il crée. […] La loi morale, que les cœurs ignorants ou faibles se représentent sous des couleurs si sévères, afin de la mieux éluder, n’interdit à l’homme ni la richesse, fruit ordinaire et mérité de son labeur, ni le plaisir, besoin de sa nature, ni le bonheur, tendance spontanée et constante de tous ses efforts.

1289. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

Cet écrivain si grave et si solide n’a pas échappé cette fois à la tentation, si ordinaire de notre temps, de substituer son jugement personnel à l’opinion commune. […] Daunou, retentirent longtemps d’anathèmes contre ce roman ; on s’en obstina davantage le lire, quelque ennuyeux qu’il pût être. » Je ne reconnais pas là le sens d’ordinaire si sûr de M.

1290. (1890) L’avenir de la science « XVII » p. 357

Ces objections sont d’autant plus sérieuses que je reconnais tout le premier que la science, pour arriver à ce degré où elle offre à l’âme un aliment religieux et moral, doit s’élever au-dessus du niveau vulgaire, que l’éducation scientifique ordinaire est ici complètement insuffisante, qu’il faut, pour réaliser cet idéal, une vie entière consacrée à l’étude, un ascétisme scientifique de tous les instants et le plus complet renoncement aux plaisirs, aux affaires et aux intérêts de ce monde, que non seulement l’homme ignorant est radicalement incapable de comprendre le premier mot de ce système de vie, mais que même l’immense majorité de ceux qu’on regarde comme instruits et cultivés est dans l’incapacité absolue d’y atteindre. […] Un des lieux communs le plus souvent répétés par les esprits vulgaires est celui-ci : « Initier les classes déshéritées de la fortune à une culture intellectuelle réservée d’ordinaire aux classes supérieures de la société, c’est leur ouvrir une source de peines et de souffrances.

1291. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre premier. Causes physiologiques et psychologiques du plaisir et de la douleur »

D’ordinaire, on appelle indifférence un état de bien-être ou de malaise peu notable. […] Telle est, par exemple, chez les animaux supérieurs, la respiration ; c’est un perpétuel passage du malaise à l’aise, que cependant nous ne remarquons pas en temps ordinaire.

1292. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1874 » pp. 106-168

Eh bien, pour le livre, sorti de cette collaboration, pour L’Art du xviiie  siècle, les articles, sauf un article de Banville, d’ordinaire très lyrique à l’endroit de ses amis, tous les articles sont des appréciations fadement bienveillantes, et telles que le journalisme en consacre au livre d’un agent de change, qui dresse le catalogue de sa galerie de tableaux. […] La conversation, qui va de la cuisine milanaise, du risotto au polichinelle napolitain, lui donne l’occasion de montrer une science, une érudition que n’ont pas d’ordinaire les princes.

1293. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXe entretien. Dante. Deuxième partie » pp. 81-160

. — On voyait de là peu de chose du dehors ; mais par ce peu d’espace je voyais les étoiles plus scintillantes et plus grandes qu’à l’ordinaire. […] — La rumeur publique, comme à l’ordinaire, s’acharnera sur l’innocent persécuté ; mais la vérité, qui dispense la vengeance, s’élèvera un jour en témoignage !

1294. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Cette ferveur ascétique était le caractère dominant de son visage ; ses yeux bleus et vifs étant presque toujours perdus dans des regards qui ne voyaient de l’horizon que le ciel ; quelquefois ils étaient si visiblement retournés en sens inverse de la vision ordinaire qu’ils semblaient regarder en dedans plus qu’en dehors. […] Je ne sais quel vague ennui, phénomène ordinaire du printemps sur les hommes sédentaires, se trahissait en nous par l’inattention, les nonchalances d’attitude, les bâillements mal contenus sur les bancs de bois de la salle.

1295. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Cicéron après Aristote déclare nettement que la philosophie est progressive et que « les choses les plus récentes sont d’ordinaire les plus précises et les plus certaines. » Sénèque trace un éloquent tableau des progrès de l’astronomie, et croit pour l’avenir à des conquêtes plus merveilleuses encore ; il proclame que la nature aura toujours de nouveaux secrets à nous livrer, qu’elle ne révèle ses mystères que graduellement et dans une longue suite de générations humaines, que nous nous figurons être initiés à la vérité, et ne sommes encore qu’au seuil du temple, qu’un jour enfin reculeront les bornes de la terre et se déploieront, par-delà l’extrême Thulé, les vastes étendues d’un nouveau monde. […] Toute classification, en effet, est nécessairement provisoire ; Buffon a même pu dire que ce procédé de la méthode n’a pas toute l’importance qu’on lui attribue d’ordinaire, qu’il est toujours plus ou moins artificiel, parce que la nature brise de toutes parts les cadres rigides qu’on lui impose et que les genres, les ordres, les classes n’ont d’existence que dans notre esprit.

1296. (1767) Salon de 1767 « Peintures — La Grenée » pp. 90-121

Et ces eaux peintes comme à l’ordinaire. […] Troisièmement, toutes ces natures sont trop petites, trop ordinaires.

1297. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

. — Ce qui prouve bien que notre conception ordinaire de la durée tient à une invasion graduelle de l’espace dans le domaine de la conscience pure, c’est que, pour enlever au moi la faculté de percevoir un temps homogène, il suffit d’en détacher cette couche plus superficielle de faits psychiques qu’il utilise comme régulateurs. […] Cette dissociation des éléments constitutifs de l’idée, qui aboutit à l’abstraction, est trop commode pour que nous nous en passions dans la vie ordinaire et même dans la discussion philosophique.

1298. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — I. » pp. 1-19

Chaque développement chez Massillon, chaque strophe oratoire se compose d’une suite de pensées et de phrases, d’ordinaire assez courtes, se reproduisant d’elles-mêmes, naissant l’une de l’autre, s’appelant, se succédant, sans traits aigus, sans images trop saillantes ni communes, et marchant avec nombre et mélodie comme les parties d’un même tout.

1299. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — II. (Fin.) » pp. 20-37

» Acceptant hardiment l’éloge et en tirant sujet de s’humilier : Dieu, dit-il, ne retire plus ses prophètes du milieu des villes, mais il leur ôte, si j’ose parler ainsi, la force et la vertu de leur ministère ; il frappe ces nuées saintes d’aridité et de sécheresse : il vous en suscite qui vous rendent la vérité belle, mais qui ne vous la rendent pas aimable ; qui vous plaisent, mais qui ne vous convertissent pas : il laisse affaiblir dans nos bouches les saintes terreurs de sa doctrine ; il ne tire plus des trésors de sa miséricorde de ces hommes extraordinaires suscités autrefois dans les siècles de nos pères, qui renouvelaient les villes et les royaumes, qui entraînaient les grands et le peuple, qui changeaient les palais des rois en des maisons de pénitence… Et faisant allusion à d’humbles missionnaires qui, durant ce même temps, produisaient plus de fruit dans les campagnes : « Nous discourons, disait-il, et ils convertissent. » J’ai cité, d’après la tradition, quelques-unes des conversions soudaines opérées par l’éloquence de Massillon : pourtant, sans nier les deux ou trois cas que l’on cite, je vois que Massillon croyait peu à ces sortes de conversions par coup de tonnerre, « à ces miracles soudains qui, dans un clin d’œil, changent la face des choses, qui plantent, qui arrachent, qui détruisent, qui édifient du premier coup… Abus, mon cher Auditeur, disait-il ; la conversion est d’ordinaire un miracle lent, tardif, le fruit des soins, des troubles, des frayeurs et des inquiétudes amères ».

1300. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — II. (Fin.) » pp. 62-79

La régence de son fils ramena du monde de la Cour chez Madame, et d’ailleurs le séjour plus ordinaire à Paris durant cette régence lui permettait moins la retraite que ne l’avait fait le séjour à Versailles.

1301. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Il prit son parti et résolut de se remettre dans le train ordinaire par quelque coup d’éclat, qui rompît avec le passé.

1302. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — III. (Suite et fin.) » pp. 454-472

Quelques fragments, lus en séance publique, de ce poème exact, dont l’écueil à la longue est dans la monotonie, mais dont la versification ferme et serrée rappelle souvent les bonnes parties ordinaires de Lucrèce, inspirèrent assez d’estime à l’Académie des sciences pour qu’elle s’associât l’auteur comme membre libre en remplacement du comte Andréossi (27 octobre 1828).

1303. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — II. (Fin.) » pp. 495-513

Elle n’était savante que dans son cabinet ou avec des savants ; partout ailleurs simple, unie, avec de l’esprit, agréable dans la conversation, où on ne se serait pas douté qu’elle sût rien de plus que les femmes les plus ordinaires.

1304. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

tout le monde verrait et jugerait ; peut-être, au grand jour, l’impression serait autre et se réduirait ; peut-être Buffon, qui se réservait aux grandes choses et qui ne montait son imagination et son talent qu’à haute fin, n’est-il coupable que d’avoir écrit des lettres trop ordinaires.

1305. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — II. (Fin.) » pp. 198-216

Cependant Bourdaloue continua d’être pour le siècle le prédicateur ordinaire par excellence, celui qui donnait un cours continuel de christianisme moral et pratique, et qui distribuait à tous fidèles sous la forme la plus saine le pain quotidien.

1306. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — I. » pp. 312-329

Un des derniers numéros du Bulletin du bibliophile (janvier et février 1854) contient une analyse complète et détaillée, qu’a faite M. le vicomte de Gaillon, du poème de d’Aubigné, Les Tragiques, poème si dur à lire d’un bout à l’autre et dont on ne cite d’ordinaire que des fragments.

1307. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — II. (Fin.) » pp. 361-379

redoublent ; Bailly ne peut s’empêcher de les enregistrer avec son émotion ordinaire : mais, par une espèce de pressentiment trop justifié, il ajoute : J’arrivai à Notre-Dame dans cette espèce de triomphe, le premier dont un citoyen né dans ce qu’on appelait jadis l’obscurité, ait été honoré.

1308. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — I. » pp. 409-426

Il me semble pourtant qu’elles ont toujours quelque chose de matériel pour la plus grande partie, et que le résultat ordinaire, c’est l’annonce d’un bonheur terrestre véritable, même dans leurs afflictions.

1309. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

On cite d’ordinaire, dans les poèmes épiques en renom, tel ou tel chant célèbre ; il faudrait citer de même, dans l’ordre des grandes choses historiques, le troisième livre des Commentaires de Montluc.

1310. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

Il lui écrit de Blois, le 18 mai 1589, dans les termes ordinaires : Mon âme, je vous écris de Blois, où il y a cinq mois que l’on me condamnait hérétique et indigne de succéder à la couronne, et j’en suis à cette heure le principal pilier.

1311. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — II » pp. 369-387

En deux endroits (pages 95 et 196) je vois le mot luxure appliqué couramment aux galanteries de Henri IV ou de sa femme, et ce mot, qui est du style ascétique ou biblique, n’est plus du langage ordinaire et bienséant.

1312. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

Il s’était levé le matin, et avait même assisté aux harangues qu’on faisait à M. le duc avant son départ, louant les uns et blâmant les autres avec sa liberté ordinaire, et si haut que M. le duc fut, dit-on, obligé de le repousser du bout de sa canne.

1313. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « La princesse des Ursins. Ses Lettres inédites, recueillies et publiées par M. A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. François Combes » pp. 260-278

Combes pour son étude attentive, approfondie, pour les sources officielles et secrètes qu’il a diligemment explorées, et pour les judicieuses conclusions ou inductions qu’il en tire d’ordinaire, il en est un, un seul, que j’ai le regret de ne pouvoir y joindre.

1314. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

L’agent d’un État considérable, tel que Berne ou Zurich, était d’ordinaire probe, mais indolent ; l’agent d’un petit canton était presque toujours rapace, insolent, insatiable.

1315. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Journal d’Olivier Lefèvre d’Ormesson, publié par M. Chéruel » pp. 35-52

Telle me semble avoir été d’ordinaire, et du plus au moins, la loi des générations dans ces familles, qu’on est accoutumé à louer uniformément et en bloc, sur l’étiquette.

1316. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

On avait vu, à propos du Béranger des Familles, descendre des hauteurs où il se tient d’ordinaire, et se lancer dans l’arène, un esprit fin, délicat, élevé, un peu dédaigneux, une intelligence aristocratique, et qui a gardé des abords du sanctuaire et du commerce des Prophètes l’habitude du respect et une sorte de démarche religieuse jusque dans la suprême philosophie.

1317. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

Les talents ordinaires sont toujours emprisonnés dans leur temps et se nourrissent des éléments qu’il renferme.

1318. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite.) »

Et d’abord, l’idée d’avoir voulu donner à Judas de mauvais antécédents, pour préparer et justifier sa trahison, est une idée ordinaire et même vulgaire.

1319. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

Amis de l’ancien régime et partisans du droit divin, qui en étiez venus, en désespoir de cause, à préconiser le suffrage universel ; à qui (j’aime à le croire) la conviction était née à la longue, à force de vous répéter, et qui vous montrez encore tout prêts, dites-vous, mais moyennant, j’imagine, certaine condition secrète, à embrasser presque toutes les modernes libertés ; — partisans fermes et convaincus de la démocratie et des principes républicains, polémistes serrés et ardents, logiciens retors et inflexibles, qui, à l’extrémité de votre aile droite, trouvez moyen cependant de donner la main parfois à quelques-uns des champions les plus aigris de la légitimité ; — amis du régime parlementaire pur, et qui le tenez fort sincèrement, nonobstant tous encombres, pour l’instrument le plus sûr, le plus propre à garantir la stabilité et à procurer l’avancement graduel de la société ; — partisans de la liberté franche et entière, qui ne vous dissimulez aucun des périls, aucune des chances auxquelles elle peut conduire, mais qui virilement préférez l’orage même à la stagnation, la lutte à la possession, et qui, en vertu d’une philosophie méditée de longue main dans sa hardiesse, croyez en tout au triomphe du mieux dans l’humanité ; — amis ordinaires et moins élevés du bon sens et des opinions régnantes dans les classes laborieuses et industrielles du jour, et qui continuez avec vivacité, clarté, souvent avec esprit, les traditions d’un libéralisme, « nullement méprisable, quoique en apparence un peu vulgaire ; — beaux messieurs, écrivains de tour élégant, de parole harmonieuse et un peu vague, dont la prétention est d’embrasser de haut et d’unir dans un souple nœud bien des choses qui, pour être saisies, demanderaient pourtant à être serrées d’un peu plus près ; qui représentez bien plus un ton et une couleur de société, des influences et des opinions comme il faut, qu’un principe ; — vous tous, et j’en omets encore, et nous-mêmes, défenseurs dévoués d’un gouvernement que nous aimons et qui, déjà bon en soi et assez glorieux dans ses résultats, nous paraît compatible avec les perfectionnements désirables ; — nous tous donc, tous tant que nous sommes, il y a, nous pouvons le reconnaître, une place qui resterait encore vide entre nous et qui appellerait, un occupant, si M. 

1320. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

Les cartons de Raphaël à Hampton-Court, les fresques du même grand peintre dans les galeries du Vatican, les fameuses statues du Laocoon et de l’Apollon du Belvédère, et l’église de Saint-Pierre à Rome, le plus magnifique édifice qui soit peut-être au monde, produisent également cet effet le plus ordinaire de désappointer le spectateur à première vue.

1321. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset. »

L’argent pour le payement des troupes, une fois qu’elles seraient en campagne, fut envoyé à l’avance avec des précautions infinies, de manière à ne donner aucun éveil et que les trésoriers ordinaires des troupes, auxquels on ne voulait pas confier le secret du projet, n’en eussent vent ni soupçon.

1322. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise par M. Taine. »

Les avantages d’une telle palestre savante, d’un tel séminaire intellectuel, sont au-delà de ce qu’on peut dire, et c’est ainsi qu’en doivent juger surtout ceux qui ont été privés de cette haute culture privilégiée, de cette gymnastique incomparable, ceux qui, guerriers ordinaires, sont entrés dans la mêlée sans avoir été nourris de la moelle des lions et trempés dans le Styx.

1323. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. »

Il n’est pas en représentant ni en délégué ; il lui manque les insignes, le panache et l’écharpe ; il est en bourgeois, la tête couverte d’un chapeau ordinaire et commun, aux larges bords, les bras croisés, les cheveux longs, flottants, avec la queue derrière, dans l’attitude de l’observation sévère, ardente, pénétrante ; le profil est grave, attentif ; l’œil à moitié dans l’ombré lance un regard perçant : tout dans cette physionomie veut dire sévérité, vigilance, fermeté.

1324. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet »

. — Puis les Montagnards : ceux-ci violents, exaspérés, partant d’un principe extrême, s’inspirant d’une passion outrée, mais bon nombre également sincères, patriotes, d’une intégrité exemplaire, ne songeant dans l’établissement de leur terrible dictature temporaire qu’à la défense du territoire et au salut de la Révolution : Carnot, Cambon, Robert Lindet, Jean-Bon Saint-André, d’autres moins en vue comme Levasseur, Baudot… Pour les juger avec équité, il faut faire la part du feu, la part de la fièvre, et sacrifier sans doute beaucoup des idées applicables aux temps ordinaires ; mais, historiquement, à leur égard, ce n’est que justice. — Puis, la Terreur passée, il y a eu les hommes fermes, modérés, honorables, qui ont essayé de fonder l’ordre et le régime républicain en dépit des réactions, les hommes de l’an iii, Thibaudeau, Daunou, La Revellière-Lépeaux… — Je compterai ensuite une autre génération d’hommes politiques, ceux de 1797, de la veille de Fructidor, très honnêtes gens d’intention, un peu prématurés d’action et d’initiative, qui voulaient bien peut-être du régime légalement institué, mais qui le voulaient avec une justice de plus en plus étendue et sans les lois d’exception : les Barbé-Marbois, les Portalis, les Camille Jordan. — Enfin il y eut, à la dernière heure du Directoire, les hommes qui en étaient las avec toute la France, qui avaient soif d’en sortir et qui entrèrent avec patriotisme dans la pensée et l’accomplissement du 18 brumaire : Rœderer, Volney, Cabanis… Je crois que je n’ai rien omis, que tous les moments essentiels de la Révolution sont représentés, et que chacun de ces principaux courants d’opinion vient, en effet, livrer à son tour au jugement de l’histoire des chefs de file en renom, des hommes sui generis qui ont le droit d’être jugés selon leurs convictions, selon leur formule, et eu égard aux graves et périlleuses circonstances où ils intervinrent.

1325. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

N’aurait-il pas ce qui, dans les talents heureux, tient lieu d’ordinaire, en avançant, de la pudeur instinctive de la jeunesse ?

1326. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. le Cte Alfred de Vigny à l’Académie française. M. Étienne. »

« On peut assurer, dit-il, que l’Académie changea de face à ce moment ; de peu connue qu’elle étoit, elle devint si célèbre, qu’elle faisoit le sujet des conversations ordinaires. »— Perrault, en effet, avait bien vu ; cet homme d’esprit et d’invention, ce bras droit de M. 

1327. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre I. Composition de l’esprit révolutionnaire, premier élément, l’acquis scientifique. »

De cette façon la science parfaite s’achèvera par une langue bien faite347  Grâce à ce renversement du procédé ordinaire, nous coupons court à toutes les disputes de mots, nous échappons aux illusions de la parole humaine, nous simplifions l’étude, nous refaisons l’enseignement, nous assurons la découverte, nous soumettons toute assertion au contrôle, et nous mettons toute vérité à la portée de tout esprit.

1328. (1892) Boileau « Chapitre VII. L’influence de Boileau » pp. 182-206

Ce qui apparaît dans leurs relations qui ne furent jamais intimes, c’est qu’ils se ménagent réciproquement ; ils s’estiment et se craignent, et ne veulent pas se brouiller ; aussi y mettent-ils du leur tous les deux, Bussy avec un peu de piaffe et de morgue féodale, à son ordinaire, Despréaux, en simple bourgeois qui se tient à sa place.

1329. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Pierre Loti »

Mais ce qui lui est particulier, c’est que sensations et sentiments se résolvent d’ordinaire en je ne sais quelle langueur de volupté et de désir, comme si le trouble qu’éveille en lui la figure de la Terre était un peu semblable à un autre trouble, à celui qui nous vient de la femme, et y disposait l’âme et le corps… Tout cela est bien difficile à dire clairement.

1330. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jean Richepin »

Richepin n’en met d’ordinaire dans ses rimes.

1331. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

A deux conditions qui d’ordinaire s’accomplissent dans le même temps, la connaissance du passé et une expérience assez longue de la vie sociale pour appliquer au présent les enseignements du passé.

1332. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre dixième »

Les défauts, c’est-à-dire tout ce qui n’est pas le style, ces traits saillants qu’on veut mettre partout, ces mots « qui nous éblouissent un moment pour nous laisser ensuite dans les ténèbres, ces pensées fines, déliées, sans consistance, qui, comme la feuille du métal battu, ne prennent de l’éclat qu’en perdant de la solidité » ; la peine qu’on se donne pour exprimer des choses ordinaires ou communes d’une manière singulière ou pompeuse ; les phrases arrangées, les mots détournés de leurs acceptions, les traits irréguliers, les figures discordantes ; — d’où tout cela vient-il, sinon de ce qu’on écrit hors de soi, à côté de soi, et qu’il y a un auteur au lieu d’un homme ?

1333. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre premier. La contradiction de l’homme » pp. 1-27

§ 4 C’est pour le même motif qu’est née et que s’est développée la morale, au sens ordinaire du mot.

1334. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre XI. La Science et la Réalité. »

Quand le même antécédent se reproduit, le même conséquent doit se reproduire également ; tel est l’énoncé ordinaire.

1335. (1890) L’avenir de la science « V »

V Ce n’est pas sans quelque dessein que j’appelle du nom de science ce que d’ordinaire on appelle philosophie.

1336. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre III : Les Émotions »

Enfin la décharge nerveuse peut s’opérer dans une autre direction, qu’elle suit d’ordinaire quand l’excitation n’est pas forte.

1337. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

D’ordinaire, un vulgarisateur aime et admire les connaissances qu’il répand.

1338. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

À cette époque si rude de la saison, dans une salle de spectacle non chauffée comme celle du Conservatoire, il serait difficile de prendre une juste idée de ce que sont les réunions en temps ordinaire ; l’auditoire se trouve nécessairement très réduit.

1339. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Le Palais Mazarin, par M. le comte de Laborde, de l’Institut. » pp. 247-265

Les politiques ne s’arrêtent pas, ou, si l’on veut, ne s’arrêtaient pas alors à ces bagatelles qui gênent les hommes d’honneur dans le train ordinaire de la vie.

1340. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le surintendant Fouquet. (Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M. P. Clément.) 1846. » pp. 294-312

Maintenant, je le sais, tout le monde est plus ou moins homme de lettres ; ce n’est plus une classe proprement dite ; on les traite avec la rudesse et le positif qui règnent dans les relations ordinaires de la vie, et eux-mêmes ils semblent s’être dès longtemps appliqué ce régime universel.

1341. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — III. (Suite et fin.) » pp. 128-145

À ceux qui l’avaient connu dans l’intimité, et autrement que par son rôle public, il a laissé le souvenir d’un homme parfaitement bon, facile même dans l’ordinaire de la vie, ayant des négligences et des insouciances de soldat ou d’artiste, et parfois des accès de gaieté d’enfant.

1342. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

Ce qu’il faut rappeler à l’honneur de la reine Marguerite, c’est son esprit, c’est son talent de bien dire, c’est ce qu’on lit à son sujet dans les Mémoires du cardinal de Richelieu : « Elle était le refuge des hommes de lettres, aimait à les entendre parler ; sa table en était toujours environnée, et elle apprit tant en leur conversation qu’elle parlait mieux que femme de son temps, et écrivit plus élégamment que la condition ordinaire de son sexe ne portait. » C’est par là, c’est par quelques pages exquises qui sont une date de la langue, qu’elle est entrée à son tour dans l’histoire littéraire, ce noble refuge de tant de naufrages, et qu’un rayon dernier et durable s’attache à son nom.

1343. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

Il y avait dans La Fontaine un idéal de sensibilité, de poésie, de sincérité, de fierté et d’indépendance, je ne sais quelle chose légère et sacrée qui dépasse trop les qualités estimables, mais ordinaires, du metteur en scène de Joconde.

1344. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Allez aux petits théâtres, vous avez chance d’y rire ; mais cet ordinaire de gaieté et de bonne humeur qui tenait à l’ancien fonds gaulois a disparu.

1345. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

La Fontaine vint à Paris, plut à Fouquet, bon juge de l’esprit, et le voilà transporté tout d’un coup au milieu de la société la plus brillante, devenu le poète ordinaire des merveilles et des magnificences de Vaux.

1346. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

Pour les écrivains du xviie  siècle, il fait d’ordinaire un partage égal.

1347. (1912) Le vers libre pp. 5-41

D’ailleurs nous ne proscrivons pas la rime ; nous la libérons, nous la réduisons parfois et volontiers à l’assonance ; nous évitons le coup de cymbale à la fin du vers, trop prévu, mais nous soutenons notre rime telle quelle par des assonances, nous plaçons des rimes complètes, à l’intérieur d’un vers correspondant à d’autres rimes intérieures, partout où la rythmique nous convie à les placer, la rythmique fidèle au sens et non la symétrie, ou, si vous voulez, une symétrie plus compliquée que l’ordinaire.

1348. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

Or, puisqu’il écrit lui-même à la tête de son livre le mot « voyage », il aurait dû se rappeler qu’un critique n’est pas un voyageur ordinaire et de ceux-là dont Sterne a donné la liste dans son Voyage sentimental.

1349. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Pour toute garantie, il trouvait la méthode ; avec sa passion ordinaire, il embrassa la méthode et ne la quitta plus.

1350. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIII : De la méthode »

Nous causerons, et, s’il se dit quelque chose d’utile, vous en ferez ce qu’il vous plaira. » Le soir venu, il me prit la main avec sa grâce ordinaire, m’installa dans un fauteuil, me versa du thé, m’avertit d’en boire beaucoup, disant qu’il voulait me tenir éveillé, qu’il en avait besoin, qu’il allait faire le professeur, que c’était la première fois de sa vie, et que d’avance il m’en demandait pardon. « Je ne vous parlerai que d’analyse.

1351. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIV : De la méthode (Suite) »

La forme de la dent entraîne celle du condyle, celle de l’omoplate, celle des ongles, tout comme l’équation d’une courbe entraîne toutes ses propriétés ; et de même qu’en prenant séparément chaque propriété pour base d’une équation particulière, on retrouverait et l’équation ordinaire et toutes ses autres propriétés quelconques, de même l’ongle, l’omoplate, le condyle, le fémur et tous les autres os pris séparément, donnent la dent et se donnent réciproquement101.

1352. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Futilités, déloyauté, vénalité, telles sont les vertus ordinaires qu’il attribue à cette belle institution qu’on appelle la Presse parisienne. […] Il n’est le produit d’aucune camaraderie ; comme tant d’autres, il n’est point sorti des fabriques ordinaires de renommées. […] Avec ces façons-là, qui sont façons belges ordinaires, il n’est plus de littérature possible. […] Dans les cerveaux ordinaires, chez les petits esprits, seulement intuitifs, le mode de concevoir et de sentir est un danger, et presque une infériorité ; il mène droit à la sécheresse ; il réprime les élans de la nature. […] Nul fleuron, nulle vignette, nul cul-de-lampe, nul ornement par où s’avère, si lourdement, l’ordinaire incompétence, en éditerie, des éditeurs.

1353. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

II C’est par hasard que de Foe, comme Cervantes, a rencontré ici un roman de caractères ; d’ordinaire, comme Cervantes, il ne fait que des romans d’aventures ; il connaît mieux la vie que l’âme, et le cours général du monde que les particularités de l’individu. […] Voilà certes un talent étrange, composé d’aveuglement et de clairvoyance, et qui ressemble à ces maladies de la rétine dans lesquelles le nerf surexcité devient à la fois obtus et perspicace, incapable d’apercevoir ce que les yeux les plus ordinaires atteignent, capable d’apercevoir ce que les yeux les plus perçants ne saisissent pas. […] La méditation, qui d’ordinaire ne produit que des phrases, aboutit chez lui à des actions.

1354. (1904) Zangwill pp. 7-90

Les humanités déistes et particulièrement chrétiennes, ces singulières humanités, qui ne nous paraissent ordinaires et communes que parce que nous y sommes habitués, ces singulières humanités, où l’homme occupe envers Dieu une si singulière situation de grandeur et de misère, si audacieuse au fond, et si surhumaine, — l’homme fait à l’image et à la ressemblance de Dieu, — et Dieu fait homme, — avaient séparément le sens du parfait et de l’imparfait, du fini et de l’infini, du relatif et de l’absolu ; elles connaissaient donc les limitations de l’humanité ; ajouterai-je que généralement ces humanités étaient à la fois intelligentes et profondes, et que la constatation même des contrariétés intérieures, de la grandeur et de la misère, faisait peut-être le principal objet de leurs méditations ; dans ces humanités l’homme était reconnu créature et limité aux limites humaines ; l’historien demeurait un homme. […] Le cerveau se décomposant, nulle conscience dans le sens ordinaire du mot ne peut persister. […] Les transporter dans l’infini, c’est comme si l’on prétendait mesurer la chaleur du soleil ou du centre de la terre avec un thermomètre ordinaire.

1355. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Les civilisations antiques ont précisément péri de l’intrusion d’indignes adeptes dans le collège des Initiés : comme les hommes ordinaires ne pouvaient supporter la pleine lumière de l’Initiation, ils l’éteignirent. — Mais comment nos modernes, lestés de toute l’expérience de l’histoire, n’ont-ils pas vu que le principe même de la vulgarisation est faux ! […] Et cela est logique ; la moralité en action, composé bâtard de la Fiction et de la Vie, n’a l’autorité ni de l’une ni de l’autre, ni la vertu du Sermon qui porte directement les flambantes clartés de la foi dans les consciences obscures et impose le respect, au nom de Dieu, ni la grâce vraiment sanctifiante du Poëme qui relève l’âme de sa triste faction, dans les boues ordinaires et lui donne la bienfaisante nostalgie de la liberté naturelle. […] Tel quel, sans doute, l’officiel Credo protégeait et soutenait la littérature, la contenait dans une atmosphère de noblesse, un peu officielle aussi, mais non sans grandeur : toutefois cette garantie d’unité, qui imposait à tous l’obligation morale de fonder sur l’angle religieux tous leurs efforts, comportait un soin bien étroit de prendre garde à ne point outrepasser les conclusions du Dogme, un conseil au moins de se maintenir dans les régions moyennes où l’indépendance court le moins de risques, dans l’héroïsme vital de Corneille, dans la psychologie passionnelle de Racine, dans les rigueurs d’ordre ordinaire de Molière, dans l’observation minutieuse et piquante de La Bruyère, dans la morale malicieuse et commune de La Fontaine. […] ; excessive à l’ordinaire, mordante, cassante et déchirante, parole de dandy sadique, et qui sait s’alanguir et caresser, murmurer, sourire ; qui semble toujours décrire et qui presque toujours suggère ; qui laisse le souvenir comme d’une saveur, comme d’une blessure, comme d’une injure, comme d’un colloque entendu dans l’ombre ; rouge, safran, gris-perle : peut-être le plus extraordinaire monument, dans la littérature, où la voix du Passé gronde encore, et s’irrite des « Mais » et des « Pourtant » du Présent, et s’épeure un peu du « Parce que » définitif que va prononcer l’Avenir. […] comme une arme qui serait mortelle s’il n’était généreux et chrétien, résulte moins de la cause ordinaire (la disproportion de la Vie et du Rêve, des gens et du génie, de l’erreur et de la Vérité) que des conditions de l’heure où le Poëte parvient à la maturité.

1356. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

C’est l’éloge de La Vogue et des œuvres qu’elle publia, dans sa première série, qu’on ne pensa jamais en citant son titre, devenu une sorte de nom propre, à la vulgarité du mot « vogue » conçu en son sens ordinaire, et à tout ce qu’il indique de plate poursuite du succès courant, et de course à quatre pattes vers la vulgarité. […] Il avait la connaissance des bonnes méthodes érudites et aussi des habitudes du journalisme (il y fut toujours expert), il résolut donc d’avoir recours à l’interview, et de nous demander à chacun le choix de nos mots nouveaux, mais point de cette façon verbale de l’interview ordinaire qui laisse tomber des détails, mais de façon scripturaire et, pour ainsi dire, ferme. […] Quand allait mourir lady Ligeia, après que les circonstances de la rencontre et de l’amour ont été rendues suffisamment énigmatiques, et que le lecteur est prévenu qu’un agrégat de choses précieuses, rares et extraordinaires va disparaître, l’horreur s’augmente du poème qui rend ce cas de disparition si général, humain, ordinaire, que des anges d’espérance ne peuvent que se voiler et se lamenter quand d’inéluctables lois de destruction s’accomplissent. […] Telle est cette œuvre courte et touffue indiquant le départ hors d’une vie ordinaire vers quelque vie mentale et personnelle, sur laquelle on ne nous donne pas plus de détails. […] Aussi, les projets d’amélioration agricole de Lévine nous laissent froids ; mais la beauté du livre réside dans la présentation vive des bonheurs que l’homme peut rencontrer sur la voie rectiligne et ordinaire (Lévine fauchant les foins, — les joies et les douleurs de Lévine pendant l’accouchement de sa femme) el, en face, du bonheur et des douleurs et des catastrophes de la passion (vie de Wronsky et d’Anna).

1357. (1898) La cité antique

Par un procédé assez ordinaire, du nom commun on avait fait un nompropre. […] Pour choisir la place où l’on s’établirait, on n’avait pas la ressource ordinaire de consulter l’oracle de Delphes, car la Pythie était alors du parti de Sparte. […] Ce mépris mêlé de rancune, qui s’attache d’ordinaire aux grandeurs abattues, ne la frappa jamais. […] Nous verrons plus loin que l’étranger, domicilié dans une ville, ne pouvait ni y être propriétaire, ni y hériter, ni tester, ni faire un contrat d’aucune sorte, ni paraître devant les tribunaux ordinaires des citoyens. […] La punition ordinaire des grands crimes était l’exil.

1358. (1853) Propos de ville et propos de théâtre

À force d’écrire des récitatifs, des duos et des quatuors, cette forme lyrique est dans leur langage ordinaire. […] *** Si les familiers de l’atelier Dantan se montrent un peu négligents à tresser des couronnes pour l’ambitieuse Victoire, ils n’oublient pas ses bons services et son affabilité ordinaire lorsque vient le Jour de l’An. — Au premier janvier dernier, M. […] Revenu de la campagne, avec une série de nouvelles à la main, dans le nombre desquels il s’en trouvait quelques-unes qui l’inquiétaient instinctivement, B… leur fait subir la censure ordinaire. […] Je veux que mes cent mille francs soient mangés à peu près dans le sens littéral du mot. — La somme épuisée, je veux que la personne qui sera restée adjudicataire ne conserve que le portefeuille qui l’aura contenue. — On va allumer les bougies, et mon notaire, ici présent, présidera à l’adjudication ; — on soumissionnera au rabais… en partant d’un mois au plus. — On pourra opérer par rabais de jours, d’heures et même de fractions d’heures. — Voici du papier, des enveloppes, des plumes et de la cire, car les soumissions devront être cachetées. — Me G… en fera le dépouillement, et poursuivra l’opération selon les usages ordinaires. […] Cette singulière conduite déterminait, comme on le pense, un bruit énorme dans tout le Landernau dramatique. — C’était le canevas ordinaire sur lequel on brodait depuis un mois le cancan des coulisses, — où il ne manque pas de brodeuses.

1359. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Combien les hommes ordinaires sont mieux venus à se raconter eux-mêmes et à se peindre ! […] D’ordinaire, les miracles durent peu. […] Le Génie (le Génie, c’était Chateaubriand) est ici depuis quinze jours ; il part dans deux mois, et ce n’est pas un départ ordinaire, ce n’est pas pour un voyage ordinaire non plus. […] Mais la foule était plus nombreuse, plus animée, plus remuante que d’ordinaire. […] Des journalistes, peu tendres d’ordinaire, se sont émus de cette touchante merveille.

1360. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — II. (Suite.) » pp. 155-174

Henri IV aimait à consulter Rosny dans les circonstances décisives, et il le faisait d’ordinaire en secret pour ne pas donner trop d’ombrage et de jalousie aux témoins.

1361. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — II. (Fin.) » pp. 213-233

Tous les entretiens ordinaires des compagnies étaient des discours sur les sacrements, sur la grâce et sur les cérémonies, les dames même et les artisans ayant les épîtres de saint Paul à la bouche, et avec cela des invectives contre le pape et le Saint-Siège.

1362. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — I. » pp. 234-253

À propos de je ne sais quelle position avantageuse aux Prussiens : « Le roi l’occupa parfaitement bien, dit le prince de Ligne ; il jouit de son plaisir ordinaire, qui était de nous tenir en suspens. » À la fin de la campagne de 1759, le prince de Ligne est choisi pour aller porter au roi de France à Versailles la nouvelle de l’affaire de Maxen ; il a raconté sa première apparition dans cette Athènes dont il était déjà, et il l’a fait avec piquant et un peu de cliquetis.

1363. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — I. » pp. 431-451

Son père se décida à le placer à Oxford et le fit inscrire en qualité d’étudiant ordinaire au collège de la Madeleine.

1364. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

Parlant, je crois, de quelque souper chez le président Hénault, qui faisait les honneurs de chez lui en mangeant beaucoup, le prince de Ligne nous dit : « Marmontel l’a secondé à merveille ; Duclos pas mal, avec sa sécheresse et son sel ordinaire ; sel de mer à la vérité, sel amer, mais qui vaut mieux que le sel attique dont on parle toujours et où je ne trouve jamais le mot pour rire. » Les portraits des gens de lettres qui terminent le fragment trop court des Mémoires de Duclos, et où l’on voit passer Fréret, Terrasson, Du Marsais, La Motte, forment un des meilleurs et des plus agréables chapitres de notre histoire littéraire.

1365. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

Le vilain, qui était proprement le nom donné à l’habitant des campagnes, exprime l’impression même que faisait d’ordinaire le lieu qu’il habitait ; en général, et sauf quelques rares éclaircies au soleil du printemps, ces portions défrichées et non désertes de la contrée étaient les plus pleines de boue, de fumier et de misères.

1366. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Une Réception Académique en 1694, d’après Dangeau (tome V) » pp. 333-350

Quelques jours après cette mésaventure de M. de Noyon (21 décembre), le roi le désignait pour faire la harangue de clôture de la prochaine assemblée du Clergé : « C’est d’ordinaire, nous dit Dangeau, le président (de l’assemblée) qui nomme l’évêque qui doit haranguer le roi ; ainsi M. l’archevêque de Paris qui présidera aurait pu nommer qui il lui aurait plu ; mais il a consulté le roi, qui a accordé cette grâce-là à M. de Noyon qui l’a demandée. » M. de Noyon brûlait de se relever par quelque harangue de sa disgrâce académique, et Louis XIV dans sa bienveillance lui en procurait l’occasion.

1367. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — I » pp. 395-413

Ces gens n’ont d’esprit que dans la société ; ils sont sévères sur leurs ouvrages pour ne point être critiqués par d’autres, et indulgents sur leur conduite, qui d’ordinaire est ridicule, et qu’ils croient ne point passer à la postérité.

1368. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « II » pp. 21-38

De même que dans ses lettres les plus ordinaires, il y a toujours un joli tour, un je ne sais quoi de piquant et de leste et un air d’agrément, de même dans ses meilleures pages, il y a presque toujours une pointe de licence, d’impiété, qui se glisse et qui se fait sentir, ne fût-ce qu’en jouant, et au moment où l’on s’y attend le moins.

1369. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

« Il en est de l’amour comme de la petite vérole, qui tue d’ordinaire quand elle prend tard. » C’est Bussy-Rabutin qui le dit, et Béranger l’éprouva.

1370. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Montaigne, retiré vers l’âge de trente-huit ans dans son château et dans sa tour seigneuriale, s’était amusé à tracer ou à faire tracer sur les poutres et chevrons supérieurs de la pièce qu’il appelait sa librairie ou bibliothèque quelques inscriptions morales et philosophiques, reproduisant les maximes ordinaires de sagesse qu’il tenait à avoir constamment devant les yeux.

1371. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

Je ne ferai plus que lui emprunter un portrait exact, peu flatté, mais assez amusant, du philosophe Ballanche, d’ordinaire si pacifique, mais irascible par accès et subitement colérique au moment où l’on s’y attendait le moins.

1372. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

 » Le doyen de ces maîtres confrères, en 1639, était un Pierre Dubout, tapissier ordinaire du roi et collègue de Jean Poquelin.

1373. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni (suite et fin.) »

Gavarni travaillait d’ordinaire par jour ses dix-huit heures sur vingt-quatre, et c’est ainsi qu’il est arrivé à produire ce chiffre de pièces qui n’est pas encore bien connu : les uns disent dix mille ; d’autres qui doivent être bien informés aussi, prétendent que c’est dix fois plus.

1374. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

Je suis persuadé que les ennemis ne manqueront pas de profiter du temps que vous leur donnez, et la chose demande une détermination plus prompte. » Villars, en effet, d’ordinaire si porté à l’offensive, reculait devant une action générale engagée avec le prince Eugène dans ces conditions-là, c’est-à-dire dans un pays boisé où il aurait affaire à toute l’infanterie ennemie, appuyée à des lignes.

1375. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite et fin.) »

L’auteur n’a pas craint, puisqu’il avait affaire à des comédiens, de leur appliquer dans la vie les aventures mêmes des tragi-comédies qu’ils représentent ; il n’a pas manqué d’employer la reconnaissance finale et subite, ordinaire à ces fabuleux dénoûments, en faisant d’Isabelle la fille d’un prince.

1376. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois par M. Camille Rousset. Victor-Amédée, duc de Savoie. (suite et fin.) »

s’écriait-il, si l’on veut me perdre auprès du roi, je prendrai la poste, j’irai le trouver ; je m’assure qu’un si grand monarque, et qui a tant de belles qualités personnelles, ne m’abandonnera point ; j’irai même servir de volontaire auprès de sa personne, en cas qu’il entreprenne quelque chose ; car j’ai fortement dans la tête de mériter son estime. » — « Mais, lui répondait-on, les princes comme Votre Altesse Royale n’ont point accoutumé d’aller ainsi ; une telle démarche surprendrait fort le roi de France. » — « Non, répliquait-il, je sais bien que je n’ai rien à craindre en me jetant entre les bras du roi, qui est aussi honnête homme que grand monarque. » Et Louis XIV, touché à l’endroit chatouilleux, s’adoucissait pour le jeune prince, dont les effusions lui arrivaient par le canal de M. de La Trousse et de Louvois, tandis que son envoyé officiel, l’abbé d’Estrades, lui écrivait dans le même temps : « L’on doit cette justice à M. le duc de Savoie que c’est un prince qui a beaucoup d’esprit, qui est fort éloigné de tous les amusements ordinaires aux personnes de son âge, et que toutes ses occupations marquent des sentiments fort élevés, et beaucoup d’inclination pour la guerre et pour les affaires. » Le duc de Savoie marchait sur ses dix-huit ans.

1377. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

J’y vois bien le mélange qu’offre d’ordinaire l’humanité.

1378. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

Il y parle de lui, de ses titres littéraires qu’il détaille au long et du peu de fruit qu’il en a tiré ; il ne craint pas d’étaler sa pauvreté avec sa bonne humeur ordinaire.

1379. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

Il dut à sa condition de papiste de n’être point élevé dans les universités et de ne point passer par la voie commune et par les méthodes ordinaires.

1380. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

On aura remarqué cette élocution nombreuse et pure qui découlait de ses lèvres, cette accentuation plus prononcée qu’elle ne l’est d’ordinaire dans la conversation, et que M. 

1381. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Leckzinska (suite et fin.) »

Elle n’avait que son train ordinaire, qui se compose de quatre carrosses à huit chevaux, dont il y en a deux magnifiques… » Et après une description minutieuse de la cérémonie : « Quant à ce qui est de la personne de la reine, elle est petite, plus maigre que grasse, point jolie, sans être désagréable, l’air bon et doux, ce qui ne lui donne pas la majesté requise pour une reine.

1382. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre »

Saint-Simon, quand il parle du duc de Noailles (et il y revient souvent), commence d’ordinaire par en parler à ravir, puis il s’emporte peu à peu, ne se contient plus ; il excède, je le crois et j’en suis certain : il va jusqu’à crier au monstre.

1383. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre (suite et fin) »

Je me hasarde peut-être un peu trop dans les circonstances critiques où nous sommes ; mais si vous ne croyez pas la chose possible, mandez-le-moi avec votre franchise ordinaire.

1384. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Saint-Simon considéré comme historien de Louis XIV, par M. A. Chéruel »

Chéruel aime à s’appuyer, va nous servir à apprécier sur un point le talent de Saint-Simon et l’accent par lequel il tranche sur les récits ordinaires.

1385. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

J’ai commencé l’histoire de France, mais je ne m’en suis servi que comme d’un canevas sur lequel je pouvais broder tous les objets dont la connaissance est nécessaire dans le cours ordinaire de la vie.

1386. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La comédie de J. de La Bruyère : par M. Édouard Fournier. »

Voici le portrait que trace de M. de Valincour Saint-Simon qui, d’ordinaire, ne flatte guère son monde : « C’était un homme d’infiniment d’esprit, et qui savait extraordinairement ; d’ailleurs, un répertoire d’anecdotes de Cour où il avait passé sa vie dans l’intrinsèque, et parmi la compagnie la plus illustre et la plus choisie ; solidement vertueux et modeste, toujours dans sa place, et jamais gâté par les confiances les plus importantes et les plus flatteuses : d’ailleurs très-difficile à se montrer, hors avec ses amis particuliers, et peu à peu, très-longtemps, devenu grand homme de bien.

1387. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Le fond et le thème ordinaire de toutes ces scènes orageuses était le même : reproches et récriminations sur le duc d’Enghien, sur les affaires d’Espagne, sur les vols et affaires d’argent, sur de sourdes intrigues en jeu27.

1388. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « HISTOIRE de SAINTE ÉLISABETH DE HONGRIE par m. de montalembert  » pp. 423-443

L’auteur d’ordinaire termine ses chapitres par quelque vocation élevée, quelque réflexion affectuese, ni sur le don des larmes qu’on avait en ces temps, et qui semble de jour en jour tarir ; sur les mariages chrétiens à la fois si passionnés et si chastes, et dont celui d’Élisabeth et du landgrave est comme un type accompli ; sur ce que le souvenir de Luther, au château même de la Wartbourg a détrôné celui de l’humble Élisabeth, dont le nom toutefois est resté à une fleur des champs.

1389. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « THÉOPHILE GAUTIER (Les Grotesques.) » pp. 119-143

Gautier, qui souvent aurait eu peu à faire pour compléter de la sorte ses propres aperçus, pour donner du moins un fond solide à ses jeux brillants et capricieux, s’en est trop peu soucié d’ordinaire.

1390. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

Il avait été très-touché de cette vue, aimant extrêmement les enfants, comme cela est ordinaire aux poëtes et aux âmes pures.

1391. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 193-236

Le petit Zampogna, joyeux comme nous, marchait plus vite qu’à l’ordinaire en remontant la montagne, comme s’il avait l’espoir d’y retrouver aussi son jeune maître Hyeronimo.

1392. (1892) Boileau « Chapitre VI. La critique de Boileau (Fin). La querelle des anciens et des modernes » pp. 156-181

Il tint à démontrer qu’Homère parlait congrûment de l’anatomie et du battage de l’or, qu’il savait la géographie et la durée ordinaire de la vie des chiens, et qu’il ne faisait pas tenir aux princesses des propos de corps de garde.

1393. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

Enfin par certaines combinaisons régulières ou du moins correctes, mais qui détournent les constructions de leur emploi ordinaire comme les tropes détournent les mots de leur sens commun, on peut rendre certains sentiments et certaines idées dont la langue ne pourrait autrement marquer l’exact degré et la couleur particulière.

1394. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre II. Littérature dramatique — Chapitre I. Le théâtre avant le quinzième siècle »

Les sociétés littéraires qui devinrent si nombreuses à partir du xiie  siècle, les puys, la choisirent à l’ordinaire pour patronne ; un genre même de poème lyrique, le serventois, lui fut consacré dans les concours.

1395. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre III. La poésie : V. Hugo et le Parnasse »

La puissance de la sensation est limitée : le sens de la vue est ordinaire.

1396. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Henry Rabusson »

La dissipation de la vie ne permet guère le recueillement où se nourrissent et croissent d’ordinaire les profondes amours.

1397. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

Intense, outrée, intermittente et comme émiettée, telle est d’ordinaire sa traduction de la vie.

1398. (1829) De la poésie de style pp. 324-338

Il nous a semblé aussi que ce recueil avait un genre d’intérêt que l’on ne trouve pas d’ordinaire dans des pensées détachées.

1399. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Le propre des conversations de Napoléon, comme de celles de Pascal, était de se graver bon gré mal gré dans les esprits qui l’écoutaient, de nous arriver reconnaissables même à travers les témoins les plus ordinaires, et l’on est tout surpris, quand on les retrouve rapportées quelque part, de l’éclat soudain qu’elles jettent sur les pages insignifiantes d’à côté.

1400. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Mais, après l’invasion du 15 mai, il donna sa démission de représentant, comprenant sans doute que, sous le coup d’un tel attentat, on allait rentrer dans les voies de la politique ordinaire, de la défense sociale méthodique, et qu’il n’y avait plus jour à tenter d’aucun côté une infusion d’esprit nouveau.

1401. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

Ce génie, tel qu’il se prononce dans les parties ordinaires et comme dans le récitatif du poème, est tout moral et grave.

1402. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

Tout judicieux et sensé qu’il se montrait d’ordinaire, il n’était pas sans aimer le paradoxe ; c’est le faible des gens qui sont oracles et qui ont l’habitude d’être écoutés.

1403. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits de Fénelon. (1850.) » pp. 1-21

Je sais, en parlant ainsi des lettres de Fénelon, les exceptions qu’il convient de faire : il y en a de très belles de tout point et de très solides, telles que celle à une dame de qualité Sur l’éducation de sa fille, telles que les Lettres sur la religion qu’on suppose adressées au duc d’Orléans (le futur Régent), et qui se placent d’ordinaire à la suite du traité De l’existence de Dieu.

1404. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mme du Châtelet. Suite de Voltaire à Cirey. » pp. 266-285

Voltaire se trompait peut-être et avait le bandeau sur les yeux quand il écrivait : Jamais personne ne fut si savante qu’elle, et jamais personne ne mérita moins qu’on dît d’elle : C’est une femme savante… Les dames qui jouaient avec elle chez la reine étaient bien loin de se douter qu’elles fussent à côté du Commentateur de Newton : on la prenait pour une personne ordinaire.

1405. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Cette facilité, cette aisance, qui d’ordinaire sera si peu vraie de lui lorsqu’il se trouvera de sa personne auprès des femmes, sera toujours vraie de son style en les peignant.

1406. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

L’esprit de l’homme lui paraît en général plus pénétrant que conséquent, et d’ordinaire embrassant plus qu’il ne peut lier.

1407. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

Comme toutes choses ne peuvent pas demeurer au même état et vont naturellement en dépérissant, les années suivantes, il fallut aller recevoir soi-même les pensions chez le trésorier en monnaie ordinaire.

1408. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

Cette date est d’ordinaire celle de notre jeunesse, de notre première ivresse et de nos premiers succès : il se fait là au fond de nous-mêmes un mélange chéri, que rien plus tard n’égalera.

1409. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — I. » pp. 84-104

Pour mieux dégoûter du suicide, l’ami ne craint pas de nous montrer l’impression d’horreur que cause même aux indifférents la vue d’un homme jeune et beau, d’une noble créature qui a ainsi attenté contre elle-même, et qui a tout fait pour dégrader et dévaster son image (jusque dans les traits qu’une mort ordinaire et naturelle sait respecter.

1410. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

Si la conversation roulait sur ses ennemis, d’ordinaire il coupait court : Nous avons, disait-il à son ami Gudin, un meilleur emploi à faire de nos conversations : elles deviendraient tristes, au lieu d’être amusantes ou instructives. — Ils font leur métier, faisons le nôtre, disait-il encore.

1411. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

L’abbé Barthélemy avait de l’attrait, du charme, un agrément continu, un sentiment véritable et attachant : « Ma destinée, disait-il, est d’avoir des amis vifs ; c’est un bonheur dont je sens l’étendue. » On a les lettres qu’écrivit l’abbé Barthélemy au comte de Caylus durant ces deux années de voyage d’Italie ; curieuses pour le biographe, elles n’ont rien d’intéressant pour l’ordinaire des lecteurs.

1412. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre deuxième. La force d’association des idées »

Seulement, un esprit ordinaire se contentera de remarquer une similitude entre deux idées sans en tirer des conséquences et sans remonter aux principes ; un Franklin, habitué à ce que Platon appelait la chasse aux ressemblances, partira de là pour concevoir sous les contrastes visibles des similitudes cachées et pour les vérifier par l’expérimentation.

1413. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers libre  »

La rime ou l’assonance achèvent de la différencier d’avec la prose ordinaire.

1414. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

D’ailleurs nous ne proscrivons pas la rime ; nous la libérons, nous la réduisons parfois et volontiers à l’assonance ; nous évitons le coup de cymbale à la fin du vers, trop prévu, mais nous soutenons notre rime telle quelle par des assonances, nous plaçons des rimes complètes, à l’intérieur d’un vers correspondant à d’autres rimes intérieures, partout où la rythmique nous convie à les placer, la rythmique fidèle au sens et non la symétrie, ou, si vous voulez, une symétrie plus compliquée que l’ordinaire.

1415. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Certains mots, bizarrement figurés ou violemment détournés de leur acception ordinaire, véritables tics de langage, sont reproduits à tout propos, hors de propos surtout, et marquent d’un sceau ridicule les productions de la nouvelle école.

1416. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

Les commencements, c’est le plus beau, en tout ; mais particulièrement en républiques, lesquelles d’ordinaire commencent en belles femmes, un peu affolées, mais finissent toujours en queue de poisson, et de poisson vitement pourri, à faire mal au cœur aux républicains les plus solides !

1417. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Xavier Aubryet » pp. 117-145

On a plus d’horizon devant soi, et la critique a pris une largeur et une lumière inconnues à MΜ. les coloristes ordinaires et les nomenclateurs.

1418. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Prosper Mérimée »

On l’en a trouvé plus nerveux, et on a presque fourré dans un nid d’aigle cet échassier attentif et concentré, qui, d’un long bec, affilé et tranchant, attrapa, au milieu du fretin qu’il péchait d’ordinaire, deux ou trois poissons comme Carmen, le Vase étrusque et Colomba !

1419. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

VII Ainsi, Macaulay n’est pas seulement un homme de talent qui se lève tout à coup dans le xixe  siècle, et qui, plus heureux que les hommes de talent ne le sont d’ordinaire, y prend sa place sans attendre, c’est de plus une influence certaine dans l’histoire de la Critique et de ses progrès.

1420. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

car l’inspiration et la Science ne vont pas d’ordinaire par les mêmes chemins… ces fragments sont d’autant plus curieux qu’ils remontent à une époque éloignée, où le génie de Joseph de Maistre en était encore à ses premières élaborations.

1421. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

Jouffroy, sur bien d’autres ; ils chantent trop haut et d’ordinaire se cassent la voix.

1422. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Au milieu de la fausse sensibilité et de la passion bâtarde des romans ordinaires, un tel accent de nature devait produire un grand effet, et Sous les Tilleuls obtint un des plus beaux succès que puisse désirer un amour-propre, si difficile qu’il soit. […] Karr contiennent d’ordinaire une fable touchante et naturelle qui, réduite à sa plus simple expression, ne suffirait pas pour remplir les deux volumes. […] Là, comme au collège de Vendôme, son génie ne se décela point, et il resta confondu parmi le troupeau des écoliers ordinaires. […] Un véritable sang rouge circule dans leurs veines au lieu de l’encre qu’infusent à leurs créations les auteurs ordinaires. […] Les sommes promises n’arrivaient pas toujours aux échéances, et pour soutenir ce qu’il appelait en riant sa dette flottante, Balzac déploya des ressources d’esprit prodigieuses et une activité qui eût absorbé complètement la vie d’un homme ordinaire.

1423. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Et de tous ces documents, choisis et présentés avec son industrie habituelle, contrôlés par la rigueur de sa méthode, commentés enfin avec son ordinaire malice, M.  […] Toutes ces recherches du luxe de la table, qui peuvent bien séduire la fille au père Rouault, elles sont l’ordinaire de madame de Camors ou de madame de Vaudricourt, à peu près, comme, au dire de madame du Maine, cinquante ou soixante personnes, toujours présentes et empressées autour d’elle, faisaient jadis le « particulier » d’une princesse. […] Ôtez seulement ce « plus ordinaire », sur lequel on pourrait parler longtemps : n’est-ce pas la même idée que Leconte de Lisle exprimait tout à l’heure ? […] Le socialiste de notre temps, qui déclame contre les abus inévitables d’un grand État organisé, ressemble fort à Amos présentant comme des monstruosités les nécessités les plus évidentes de la société, le paiement des dettes, le prêt sur gage, l’impôt. » Et, grâce à l’ordinaire lucidité du style de M.  […] Et je veux bien, messieurs, qu’en raison de la malignité trop ordinaire à notre espèce, il y ait peu de devoirs dont on s’acquitte plus allègrement.

1424. (1921) Esquisses critiques. Première série

Il ne conte cependant que des choses fort ordinaires, sans s’efforcer de tenir l’esprit en suspens par des apprêts d’intrigue ou de le surprendre par un dénouement ménagé. […] Bourget avait étudié d’une façon souvent frappante les tribulations d’âmes religieuses mises en contact avec les passions ordinaires de la vie. […] La réunion des qualités qu’il faut pour pousser des recherches en des directions si distinctes surprend, — car ce n’est pas l’ordinaire du roman d’analyse d’être machiné comme un roman d’aventures. […] Toulet au point qu’elles en devraient faire la proie des pasticheurs, ces messieurs singeant à l’ordinaire les écrivains dont les façons comportent des traits extrêmement perceptibles et saisissables. […] Qu’alors viennent en question les choses les plus ordinaires, des choses triviales, — qu’un prolétaire à ceinture de flanelle rouge exprime grossièrement des revendications, qu’une petite femme tombe d’un omnibus81, ces événements se dépourvoient de leur vulgarité, et même de leur sens naturel.

1425. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Il gronde sourdement, en le voyant abattu, tourne autour de lui et d’un coup il pleure : « Regarde, empereur, voilà une rosée qui n’est pas ordinaire. —  Je n’ai pas pleuré depuis quarante ans, —  mais à présent la faiblesse de ma mère me revient aux yeux. » — « Par le ciel, dit Antoine, il pleure le bon vieil homme, il pleure — et les grosses gouttes rondes courent les unes après les autres sur les sillons de ses joues732. » Et là-dessus Antoine, lui-même, pleure. […] Pourtant, je ne peux pas vous regarder et vous tuer ; je vous prie, tournez votre face. —  Soit, et frappe bien, à fond. —  À fond, aussi loin que mon épée entrera734. » Et du coup, lui-même il se tue. —  Ce sont là les mœurs tragiques et stoïques de la monarchie militaire, les grandes prodigalités de meurtres et de sacrifices avec lesquelles les hommes de ce monde bouleversé et brisé tuaient et finissaient. —  Cet Antoine, pour qui on a tant fait, lui aussi, il a mérité qu’on l’aime ; il a été l’un des vaillants sous César, le premier soldat d’avant-garde ; la bonté, la générosité palpitent en lui jusqu’au bout ; s’il est faible contre une femme, il est fort contre les hommes ; il a les muscles, la poitrine, la colère et les bouillonnements d’un combattant ; c’est cette chaleur de sang, c’est ce sentiment trop vif de l’honneur qui cause sa perte ; il ne sait pas se pardonner sa faute ; il n’a pas cette hauteur de génie qui, planant au-dessus des maximes ordinaires, affranchit l’homme des hésitations, des découragements et des remords ; il n’est que soldat, il ne peut oublier qu’il a failli à la consigne : « Mon empereur !  […] —  L’injure et l’enthousiasme étaient son style ordinaire ; —  l’un et l’autre (signe de bon jugement !)

1426. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff (suite) » pp. 317-378

D’ordinaire, s’il rencontre l’un de nous, il nous crie de loin : « Au large, frère ! […] Il est vrai que, lorsqu’il rencontrait par hasard quelque trou rempli de feuilles sèches et de bois mort, le feu s’élançait tout à coup en longues mèches qui se tordaient avec fureur, faisant entendre une sorte de mugissement sinistre ; mais il retombait bientôt au niveau ordinaire, et reprenait sa course en pétillant. […] Son visage était ridé, ses joues creuses ; et ses lèvres plissées, qu’il remuait perpétuellement comme s’il mâchait quelque chose, aussi bien que le silence obstiné qu’il gardait d’ordinaire, lui donnaient une expression presque sinistre.

1427. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

Mais le front si tendrement offert d’ordinaire se déroba, le baiser glissa dans les cheveux. […] La notion plus exacte des situations et des choses m’était revenue avec le jour, comme il arrive d’ordinaire. […] S’il fût né pauvre, il n’eût été qu’un homme ordinaire ; riche, c’était un sot… Physiquement, M. de Maurescamp était un grand et beau garçon, un peu haut en couleur et d’une élégance un peu lourde. […] J’ai vu ce que tu as vu ; ma mère nous a échappé de même ; huit jours avant sa mort, nous étions avec elle à une fête, et ces huit jours passés la terre s’était refermée sur elle, et tout avait repris son train ordinaire. […] Elle ne me poursuivait pas comme une chose funeste qui empoisonne les amusements et les occupations ordinaires : elle m’obsédait comme une illusion qui doit cesser.

1428. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. THIERS. » pp. 62-124

Écrire comme on pense, modeler son style sur les choses, les bons esprits en viennent là d’ordinaire en avançant ; mais M. […] Ces dix volumes d’histoire ont eu tout d’un coup la vogue de certaines compositions romanesques ou de certains pamphlets immortels ; et, en effet, ce n’est point, d’ordinaire, à des œuvres tout impartiales, toutes tempérées d’éléments rassis, que se prend ainsi la flamme.

1429. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « LEOPARDI. » pp. 363-422

Antonio Ranieri, écrivain distingué lui-même, auteur d’une Histoire du royaume de Naples, avait connu pour la première fois Leopardi à Florence le 29 juin 1827, jour anniversaire de la naissance du poëte (l’amitié aussi, dans les cœurs passionnés, a ses dates mémorables) : il fut saisi aussitôt de ce je ne sais quoi d’attrayant qu’exerçait cette nature douloureuse et puissante ; après quelques absences, Pylade rejoignit son Oreste, il s’attacha à lui dès novembre 1830, pour ne le plus quitter jusqu’à la mort : « Ranieri, écrivait Leopardi, que la foudre seule de Jupiter pourrait arracher d’auprès de moi ; col quale io vivo, e che solo il fulmine di Giove polrebbe dividere dal mio fianco 157. » — Nous donnerons deux ou trois passages de cette correspondance avec M. de Sinner ; elle est d’ordinaire en italien, et je traduis : « De Rome, 24 décembre 1831. […] Depuis ce temps, Ranieri prépare l’édition complète des œuvres, qui a subi tous les retards ordinaires en ces contrées de lenteur et d’entraves ; mais nous espérons que l’entreprise pieuse aura son issue.

1430. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

Par exemple, dans les Fêtes de Cynthia, trois enfants arrivent, se disputant le manteau de velours noir que d’ordinaire l’acteur met pour dire le prologue. […] Quand nous pensons une chose, nous autres hommes ordinaires, nous n’en pensons qu’une portion ; nous en voyons un aspect, quelque caractère isolé, parfois deux ou trois caractères ensemble ; pour ce qui est au-delà, la vue nous manque ; le réseau infini de ses propriétés infiniment entre-croisées et multipliées nous échappe ; nous sentons vaguement qu’il y a quelque chose au-delà de notre connaissance si courte, et ce vague soupçon est la seule partie de notre idée qui nous représente quelque peu le grand au-delà.

1431. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

Woferl n’était pas dans son assiette ordinaire. […] J’ai même attiré Gluck dans notre parti ; du moins, s’il n’y est pas de cœur, il ne peut pas le faire voir, car nos protecteurs sont aussi les siens ; et, pour m’assurer les acteurs, qui causent d’ordinaire le plus de désagrément aux compositeurs, je me suis mis en rapport direct avec eux sur les indications que l’un d’entre eux m’a données ; mais la vérité est que la première idée de faire composer un opéra à Wolfgang m’a été suggérée par l’empereur, qui lui a demandé par deux fois s’il ne voulait pas composer et diriger lui-même un opéra.

1432. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

« Aussi, dans le poème épique, si l’on se borne à une fable unique, on tombera nécessairement dans un de ces deux inconvénients : ou avec une exposition concise, de paraître tronqué et de finir comme en queue de rat ; ou avec les dimensions ordinaires du poème épique, de paraître diffus et délayé. […] Aristote, sans engager une polémique directe, avait essayé d’étudier l’âme surtout par l’observation ordinaire et le témoignage des sens, comme tout autre objet extérieur.

1433. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

Sir Temple s’était jeté, avec une témérité qui ne lui était pas ordinaire, dans cette vaine polémique sur le mérite comparé des anciens et des modernes, qui avait traversé la France et qui occupait en Angleterre des esprits distingués. […] Mais agiter un article de foi aussi fondamental, dans un pays où le christianisme est déjà établi, ne peut qu’avoir des conséquences pernicieuses pour la morale et la tranquillité publique. » Il semblerait que Montesquieu eût voulu résumer toute la polémique religieuse de Swift et le fond de son argumentation ordinaire, lorsqu’il écrivit cette page, que le doyen de Saint-Patrick eût signée : « Quel peut être le motif d’attaquer la religion révélée en Angleterre.

1434. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre quatrième. L’idée du temps, sa genèse et son action »

William James suppose que, semblablement, le Créateur fasse naître tout d’un coup un homme avec un cerveau contenant des processus analogues à ces processus d’images évanouissantes qui existent dans un cerveau ordinaire après une certaine expérience de la vie ; le premier stimulus réel qui agirait après la création sur le cerveau d’Adam serait donc accompagné d’un processus évanouissant additionnel : ces deux processus s’envelopperaient l’un l’autre, « et l’homme nouvellement créé aurait sans aucun doute, juste au premier instant de sa vie, le sentiment d’avoir existé déjà depuis un certain espace de temps ». — L’hypothèse est ingénieuse, la solution nous semble inexacte. […] À l’exemple de ce dernier, il considère, en premier lieu, la représentation ordinaire du temps comme spatiale ; il va même jusqu’à dire qu’en croyant nous représenter la durée nous ne nous représentons que de l’espace.

1435. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

Arrivé dans les coulisses, je vois Méténier plus blême qu’à l’ordinaire, et Paul Alexis, affalé sur une rampe d’escalier, l’oreille tendue à la parole de sa femme, qui lui conte qu’un de ses confrères a passé la soirée à crier, que c’est un four. […] Dehors, toujours de la bruine, de la pluie et du vent, le temps ordinaire des inaugurations à Rouen, et là-dedans, une population tout à fait indifférente à la cérémonie qui se prépare, et prenant tous les chemins qui n’y mènent pas.

1436. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

Les vieillards y sont galants, polis et civils ; les jeunes gens y sont durs, féroces, affranchis de toute politesse, et parfaitement délivrés des belles passions, à l’heure ordinaire où les jeunes gens commencent à savoir ce que c’est que l’amour. […] Elle savait confusément que si, d’ordinaire, le comédien et l’artiste passent vite, la durée est un des caractères du grand artiste.

1437. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre I. Des poëtes anciens. » pp. 2-93

Quelle pitié donc d’entendre Javenel de Carlencas s’écrier : Pindare a franchi les liaisons ordinaires du discours ; il émeut, il étonne par des cadences nombreuses, qui en augmentent la force. […] Le camp de César en Espagne est inondé par une forte pluie qui l’incommode beaucoup, mais dont César parle lui-même, comme d’un événement ordinaire.

1438. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

ce n’est pas parce que Roméo et Juliette est l’œuvre la plus fraîche de sentiment, la plus rose de couleur, la plus tendre dans sa mélancolie, que Shakespeare dut être nécessairement, quand il l’écrivit, jeune de l’ordinaire jeunesse des hommes. […] Cela dit — qui devait être dit — sur le jeune traducteur de Shakespeare, risquons un mot sur ce Roi Lear qu’il a traduit avec son intelligence et son attention ordinaires.

1439. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

L’approche et la vue de Rome lui causèrent un battement de cœur et un enthousiasme qu’il a soin de noter comme peu ordinaire en lui.

1440. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Et ce n’était pas seulement Bayle qui écrivait ces choses, c’était Mme de Maintenon qui le disait aussi et qui reconnaissait cela pour vrai dans les conseils qu’elle donnait à une demoiselle sortie de Saint-Cyr : Ne soyez jamais sans corps (sans corset, c’est-à-dire en déshabillé), et fuyez tous les autres excès qui sont à présent ordinaires, même aux filles, comme le trop manger, le tabac, les liqueurs chaudes, le trop de vin, etc. ; nous avons assez de vrais besoins sans en imaginer encore de nouveaux si inutiles et si dangereux.

1441. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — II. (Fin.) » pp. 513-532

Les autres chevaliers cependant se mirent à le railler et à le narguer à la française : « Bien fol est le roi, lui disait-on, s’il ne vous croit contre tout le conseil du royaume de France. » Au dîner qui suivit, le roi ne lui adressa point la parole comme il faisait d’ordinaire.

1442. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

J’ai remis les deux autres à ce matin. » Elle aurait pu en écrire autant presque à chaque ordinaire.

1443. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — I. » pp. 473-493

Mme Dacier nous a peint son père, bel homme, quoique d’une taille peu dégagée, blond, avec des yeux d’un bleu remarquable ; extrêmement bon, mais un peu brusque ; vif, plein de feu dans le moment, sans rancune, et bien qu’ayant rompu presque tout commerce avec le monde, toujours ouvert et tendre à l’amitié : Quoiqu’il fût, dit-elle, dans un des plus beaux pays du royaume, où l’on peut se promener le plus agréablement, il ne se promenait presque jamais ; son étude, ses enfants et un jardin, où il avait toutes sortes de belles fleurs qu’il prenait plaisir à cultiver lui-même, étaient son divertissement ordinaire.

1444. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — III » pp. 178-197

Tu n’as point de somptueux atours ; tu n’as pas besoin, comme la Nuit, de relever des traits ordinaires par des grappes de diamants : une étoile ou deux luisant sur ton front te suffisent, sans compter que la lune t’appartient non moins qu’à elle, une lune modeste, non étalée d’en haut avec faste, mais attachée pourtant dans sa pleine rondeur à un pli de sa ceinture de pourpre.

1445. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — II » pp. 375-394

Il se montre toutefois plus tolérant pour les systèmes élevés qu’il n’est ordinaire aux sceptiques et aux empiriques ; dans ces divers systèmes imaginés par les Leibniz, les Malebranche et autres, il n’en est aucun qui n’ait des obscurités et qui n’implique contradiction dans certains endroits : Toutefois, dit Frédéric, il est agréable de connaître et de suivre toutes les routes que l’esprit humain s’est frayées pour parvenir à des vérités qu’il n’a pu découvrir.

1446. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — I » pp. 432-453

On y chercherait en vain ce qu’il est trop ordinaire de rencontrer dans la jeunesse des femmes du xviiie  siècle, le tempérament ou le roman ; c’est à une personne tout à fait calme et vertueuse (s’il est permis de savoir si bien ces choses de si loin) qu’on a affaire ici.

1447. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — IV » pp. 103-122

Il se plaignit au roi ; il lui dit avec sa hardiesse ordinaire à demander, et avec cette aisance à parler pour soi qui serait la chose la plus impossible à des âmes de la race pudique de Catinat : Ayant mon départ pour Bade, j’ai supplié Votre Majesté de vouloir bien se souvenir de moi lorsque la charge de chef du Conseil des finances viendrait à vaquer.

1448. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Mémoires ou journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guetté. Tomes iii et iv· » pp. 285-303

Si Bossuet a une grande parole, ce n’est pas celle-là qu’il répète ; s’il a une parole ordinaire ou familière, c’est celle dont il s’empare de préférence, et il la rend triviale en l’écrivant.

1449. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

et l’observation est de d’Argenson répliquant au ministre : ces petits hommes chétifs d’apparence, et qu’on croirait énervés par le luxe, vérifient à l’instant par leur exemple ce que Voltaire disait des courtisans français dans La Henriade : La paix n’amollit point leur valeur ordinaire ; De l’ombre du repos ils volent aux hasards… Ils sortent du sein de la mollesse pour aller aux combats comme des lions.

1450. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Ballanche, le plus grave et le plus doux d’entre les familiers de l’Abbaye-au-Bois, était le messager ordinaire qu’on dépêchait à la rue Saint-Dominique dans la prima sera, et qui en rapportait des nouvelles ; il était le chargé de bonnes paroles et de petits soins entre les deux puissances.

1451. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

Chaque chartreux avait devant lui un pot d’étain, d’une pinte, rempli de bière, un autre de même dimension, rempli de vin de Champagne ordinaire, et une bouteille cachetée de vin vieux ; et ce qu’il ne buvait pas était porté par les frères lais dans le tour placé à côté de la porte de la cellule ; on servait à chacun une tranche d’esturgeon d’une livre, du poisson de rivière en pareille quantité, une omelette de six œufs, du pain frais à volonté, du fromage et les plus beaux fruits.

1452. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

On lit tout haut ces autres mots d’une lettre de Jean-Jacques à Hume : Vous êtes un traître… Ces deux mots, traître et scélérat, dans un temps où ils n’étaient pas prodigués comme ils l’ont été depuis (c’est Garat qui parle), retentissent dans ce souper, et la nuit même dans une partie de la capitale, comme deux coups de tocsin. » Hume, quoiqu’ayant eu pour but d’informer le monde de Paris, ne s’était pas douté du retentissement soudain qu’aurait une lettre, vive, il est vrai, et non confidentielle, mais qui, d’après les probabilités ordinaires, devait mettre quelque temps à s’ébruiter ; il n’avait pas compté sur l’atmosphère inflammable de ce Paris oisif et passionné.

1453. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Je vous salue avec grande affection et respect pour la dernière fois. » Certes, la femme qui inspirait à un sage mourant de tels sentiments suprêmes d’intérêt et d’amitié n’était point une âme ordinaire ; et ce seul témoignage, qui rattache son souvenir à celui d’une des plus belles morts que la philosophie nous offre, suffirait pour empêcher son nom à elle-même de mourir.

1454. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Dans la vie ordinaire et la société privée, on verra de quelles ressources il était et de quelle chaleur ; au premier rang dans les seconds rôles. — Son nom d’abord n’était pas Sismondi, mais Simonde ; son père Gédéon Simonde était pasteur protestant d’un petit village au pied du mont Salève, et descendait d’une famille française du Dauphiné réfugiée a Genève après la révocation de l’Édit de Nantes.

1455. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin (suite et fin.) »

Madeleine, dans sa générosité innocente, se remet à le vouloir consoler ; elle y apporte, cette fois, une hardiesse de candeur qui fait trembler ; mais un jour, comme il arrive d’ordinaire en ces sortes de cas, en tournant trop autour de la flamme, elle-même se prend et s’allume ; la passion l’a touchée, sa physionomie change et s’éclaire d’une pâle lueur.

1456. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Un jour que Murville montait les dernières marches de l’escalier, la camériste entra tout effrayée dans la chambre de sa maîtresse pour lui annoncer le péril, péril plus grand encore qu’à l’ordinaire.

1457. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — M. de Sénancour, en 1832 »

Mais jugeant que la raison et la foi sont chez l’homme inconciliables et sans rapport réel, lisant dans l’histoire que la tradition révélée anathématise le reste, il oppose d’ordinaire une aversion un peu rancuneuse à la foi et à la tradition.

1458. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 177-201

Ces personnages mêmes, l’artiste les a poussés d’ordinaire au profil le plus vigoureux et le plus simple, au langage le plus bref et le plus fort ; dans sa peur de l’épanchement et de ce qui y ressemble, il a mieux aimé s’en tenir à ce qu’il y a de plus certain, de plus saisissable dans le réel ; sa sensibilité, grâce à ce détour, s’est produite d’autant plus énergique et fière qu’elle était nativement peut-être plus timide, plus tendre, plus rentrée en elle-même ; elle a fait bonne contenance, elle s’est aguerrie et a pris à son tour sa revanche d’ironie sur le siècle : de là une manière à part, à laquelle toutes les autres qualités de l’auteur ont merveilleusement concouru. — Esprit positif, observateur, curieux et studieux des détails, des faits, et de tout ce qui peut se montrer et se préciser, l’auteur s’est de bonne heure affranchi de la métaphysique vague de notre époque critique, en religion, en philosophie, en art, en histoire, et il ne s’est guère soucié d’y rien substituer.

1459. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN DERNIER MOT sur BENJAMIN CONSTANT. » pp. 275-299

La différence entre ces deux rôles chez Benjamin Constant passait même le contraste et allait d’ordinaire jusqu’à la contradiction.

1460. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

Dans la première, une femme de qualité établie à Lausanne, la mère de la jolie Cécile dont nous avons cité le portrait, écrit à une amie qui habite la France les détails de sa vie ordinaire, le petit monde qu’elle voit, les prétendants de sa fille et les préférences de cette chère enfant qu’elle adore ; le tout dans un détail infini et avec un pinceau facile qui met en lumière chaque visage de cet intérieur.

1461. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Aloïsius Bertrand »

Il essuya complaisamment son fusil, l’enferma dans une robe d’étamine, et l’accrocha au manteau de la cheminée, entre l’épi insigne de blé de Turquie et la branche ordinaire du buis saint.

1462. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre III »

En vertu de cette loi, 50 000 mendiants, dit-on, furent arrêtés tout d’un coup, et, comme les hôpitaux et prisons ordinaires ne suffisaient pas à les contenir, il fallut construire des maisons de force.

1463. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

J’aime particulièrement les pages où M. de Glouvet nous conte l’enfance de l’Innocent et « comment on devient sorcier » : … Lui, cependant, qu’on évitait dans l’ordinaire de la vie, qu’on entourait d’un superstitieux respect à certaines heures, n’écoutait pas impunément tout ce monde qui lui chuchotait d’un ton craintif : — Fleuse, Fleuse, tu sais ce que les autres ne savent point, té !

1464. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

Il disait, dans l’avant-propos de celle-ci, quelques années avant sa mort : « Il y a plus d’un demi-siècle, élève de troisième année à l’École normale, j’avais, avec l’ambition ordinaire à cet âge, formé le projet de consacrer ma vie scientifique à écrire une Histoire de France en huit ou dix volumes.

1465. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XX. La fin du théâtre » pp. 241-268

J’insinuai que l’ahurissante stupidité des fabricants ordinaires était sans doute la cause de son indifférence « Non, mon ami, me répondit-il ; n’accusez point l’impuissance de ces dégénérés ; s’ils savaient porter à la scène une intrigue adroite ou des caractères ingénieux, ils ne me feraient pas davantage sourire par quelle nouveauté pourrait bien encore m’amuser une intrigue, “depuis plus de sept mille ans qu’il y a des hommes, et qui pensent” à bâtir des scénarios ?

1466. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre I : La loi d’évolution »

Il ne faut donc jamais perdre de vue que la science et la connaissance ordinaire sont de même nature et que l’une n’est que l’extension et la perfection de l’autre133.

1467. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XII »

Mais combien les filles séduites du drame ordinaire, avec leur désespoir factice et leurs invectives, paraîtraient fausses auprès de cette pécheresse sans le savoir, qui ne joue point la passion et ne feint pas le remords !

1468. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

Les scrupules de justice ordinaire ne sont pas, en général, ce qui arrête les hommes de la portée des Frédéric et des Napoléon, qu’il s’agisse de la Silésie ou de l’Espagne.

1469. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

Il confesse que l’amour de la popularité fut longtemps son faible et son idole, et que, s’il dévia un moment de la droiture de sa ligne, ce fut pour la ressaisir quand il la vit près de s’échapper : Dès qu’un homme faible, a-t-il remarqué, sent échapper la popularité, il fait mille efforts pour la retenir, et, pour l’ordinaire, ce moment est celui où on manque le plus à son opinion, et où l’on peut se laisser entraîner aux plus folles et aux plus funestes extravagances. — Pour un homme de caractère, l’abus contraire serait plutôt à craindre, et, tout comme l’autre y eût mis de la lâcheté, il serait enclin à y mettre du dépit.

1470. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mlle de Lespinasse. » pp. 121-142

« L’amour, a-t-on dit, commence d’ordinaire par l’admiration, et il survit difficilement à l’estime, ou du moins il n’y survit qu’en se prolongeant par des convulsions. » Ce fut là, en elle, l’histoire de cette passion funeste qui fut si prompte qu’on a peine à y distinguer des degrés.

1471. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Il aurait mieux valu presque avoir échoué totalement et n’avoir réussi à faire qu’un original en sens inverse, tandis qu’avec tant de soins et à tant de frais, n’en être venu qu’à produire un homme du monde insignifiant et ordinaire, un de ceux desquels, pour tout jugement, on dit qu’on n’a rien à en dire, il y avait de quoi se désespérer vraiment, et prendre en pitié son ouvrage, si l’on n’était pas un père.

1472. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Diderot. (Étude sur Diderot, par M. Bersot, 1851. — Œuvres choisies de Diderot, avec Notice, par M. Génin, 1847.) » pp. 293-313

Je sais une objection qu’on fait d’ordinaire à ces beaux discours sur les arts, et que les Salons de Diderot provoquent en particulier.

1473. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Théodore Leclercq. » pp. 526-547

Sociabilité, finesse et moquerie, tels étaient les principaux traits de ce charmant esprit, qui y mêlait, dans la pratique, de cette bonté facile et de cette indulgence assez ordinaire à ceux qui n’ont point placé trop haut l’idéal de la nature humaine.

1474. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Le duc de Lauzun. » pp. 287-308

Elle me permit plusieurs fois de lui donner un baiser ; ce que je fis avec ma maussaderie ordinaire… Le pauvre Jean-Jacques fait des réflexions à perte de vue sur ce baiser, qui ne le rendait pas moins interdit que la pauvre petite.

1475. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

J’aime à noter les mots vrais, et que d’ordinaire on n’écrit pas.

1476. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Notice historique sur M. Raynouard, par M. Walckenaer. » pp. 1-22

Ces traits spirituels sont rares dans sa critique écrite : il les réservait d’ordinaire pour sa conversation.

1477. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Et encore (ceci est pour Mme Geoffrin) : « Je n’ai pas été fâché de passer pour distrait ; cela m’a fait hasarder bien des négligences qui m’auraient embarrassé. » Cet esprit supérieur et qui, sans le vouloir, a donné naissance ou prétexte à cette quantité de demi-Montesquieu qui sont si tranchants d’ordinaire et si suffisants, était, lui, la modestie même : Hommes modestes, s’écriait-il dans les Lettres persanes, venez, que je vous embrasse !

1478. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — I. » pp. 287-307

Quoi qu’il en soit, il va devenir de plus en plus le critique ordinaire intérieur et le chroniqueur littéraire du siècle.

1479. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Il avait la tête grosse et le visage long ; c’était surtout la longueur du front, et plus encore celle du menton, qui excédait les proportions ordinaires.

1480. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Cazalès y est touché avec distinction, et avec plus de légèreté que la plume d’Arnault n’en aura d’ordinaire : Les cas exceptés, dit-il, où la conversation roulait sur des questions d’intérêt public, Cazalès ne commandait pas à beaucoup près, dans un salon, l’attention qu’on ne pouvait lui refuser à la tribune.

1481. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Émile Zola » pp. 70-104

Il a encore ce que personne n’a eu avant lui, le don d’animer ainsi, d’une vie puissante, les êtres moyens, ordinaires, sans traits exceptionnels, et sans autres qualités qu’une grande bonté et une forte volonté.

1482. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre II : Rapports de l’histoire de la philosophie avec la philosophie même »

Rien de plus ordinaire aujourd’hui, rien de plus généralement admis (excepté dans les plus bas degrés de la controverse) que ce procédé qui consiste tout d’abord à faire la part du vrai chez ses adversaires, et en général chez tous les penseurs.

1483. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre I. »

2° Le merveilleux ordinaire où jouent leur rôle tous les êtres fabuleux créés par l’imagination des noirs : génies, hafritt, taloguina, nains, ogres, animaux-génies, etc.

1484. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

Puis elle se tut pour reprendre avec son importance et son essoufflement ordinaires, l’examen de l’actrice en voyage et du vaudeville en vogue, la grande affaire pour le public français !

1485. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Henri Heine »

Chose sublime et presque incompréhensible, tant elle est le renversement des lois ordinaires qui régissent l’humanité et la vie !

1486. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ernest Hello » pp. 207-235

Malgré le talent dont il éclate, il restera probablement incompréhensible à ceux-là qui cherchent dans l’Histoire des faits à la taille de l’humanité, de ces faits parfaitement incapables de déconcerter le train-train ordinaire de leurs petites facultés.

1487. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre I. La demi-relativité »

Pourtant il faut que nous la commentions, que nous la décrivions même encore, parce que nous n’allons pas adopter d’emblée, comme on le fait d’ordinaire, l’interprétation qu’en donne aujourd’hui la théorie de la Relativité.

1488. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XI : M. Jouffroy moraliste »

Non-seulement nous remarquons ici, comme dans le cas précédent, que le transport des fardeaux est l’effet principal et ordinaire de la machine ; mais nous jugeons qu’il est sa cause ; un savant mécanicien s’est proposé ce but ; et le but a déterminé la quantité du fer, la disposition des roues, l’établissement des pistons, l’épaisseur de la chaudière, le choix du combustible, et le reste.

1489. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre X. »

En même temps que poëte, il pouvait être guerrier de terre et de mer comme Eschyle ou Sophocle, par la condition générale du dévouement à la patrie ; mais, d’ordinaire, il n’était poëte que dans une seule des grandes et simples divisions de l’art, la tragédie, la comédie, le poëme lyrique ou gnomique.

1490. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Puis vient une période de calme ; Ibsen écrit alors « des pièces assez ordinaires » et devient directeur du théâtre de Christiania. […] s’il ne s’agissait ici que d’une maladie mortelle ordinaire ! […] Voulez-vous le ton ordinaire du drame ? […] Cette sublime délicatesse des enfants a paru assez invraisemblable et fort éloignée du train ordinaire des choses. […] Cette histoire de la bonne Lorraine est aussi prodigieuse, aussi éloignée du train ordinaire des choses, aussi romanesque que celle d’Alexandre ou de Napoléon, et elle est plus belle.

1491. (1884) Cours de philosophie fait au Lycée de Sens en 1883-1884

L’opinion de sens commun est nécessaire à l’homme pour se guider dans les circonstances ordinaires de la vie. […] L’évolutionnisme n’échappe pas plus à cette critique que l’empirisme ordinaire ou l’associationnisme. […] On ne doit pas appeler hallucination vraie la perception ordinaire. […] Voilà donc une troisième espèce de certitude et de beaucoup la plus fréquente dans la vie ordinaire. […] Port-Royal distingue le sens ordinaire du mot, et voit une définition de choses là où le mot défini a ce sens ordinaire.

1492. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

En second lieu, j’avance que, malgré l’opinion contraire, les Personnages d’une condition ordinaire sont plus intéressants que ceux pris entre les Princes qui tiennent moins à nous. […] Un calme parfait enveloppait toute la personne de l’abbé Godeau, qui ne paraissait accablé que de porter un triple étage de mentons s’étalant dans leur superbe indolence, et couvrant entièrement le rabat. » À part le vicaire général Ordinaire, ces curés, comme tous les vieux célibataires, sont des maniaques comiques ; ils servent à égayer le roman. […] M. Ordinaire tombe subitement dans une décrépitude morale et corporelle, quand il a perdu tout espoir d’arriver à l’évêché. […] Parce que l’art sort assez de toutes les conditions de la vie ordinaire et active pour que les gens qui veulent s’y adonner se trouvent tout gênés, tout roidis, tout entravés, et s’y montrent bien inférieurs à ce qu’ils auraient pu être dans la vie pratique. […] … Qu’on lise les œuvres de ces auteurs qui cherchent à introduire la musique dans la littérature, qu’on étudie leur style, et l’on ne verra qu’une prétention d’agencement, que des accouplements bizarres de mots, faits plutôt pour étonner que pour plaire ; et, chose singulière, ces harmonieux, d’ordinaire, ne comprennent rien à la musique, ne la sentent même pas ; et pourtant l’harmonie musicale n’est-elle pas la quintessence de l’harmonie parlée ?

1493. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Étrange pédantisme de le chicaner là-dessus et de prétendre appliquer les règles ordinaires à ce qui en est dehors et au-delà de toutes les règles ! […] Vous leur répondrez avec votre aménité ordinaire : Oh ! […] Vous n’y trouverez pas mes finesses ordinaires, mais des bavures en quantité. […] Lafontaine au premier rang ; puis Parade, à la fois comique et attendri dans le rôle du juge de paix ; Dieudonné amusant à son ordinaire ; Berton ni meilleur ni pire ; Saint-Germain faisant ce qu’il est possible de faire d’un rôle antipathique et médiocre. […] Peu intelligent, le baron, joueur, viveur et usé, mais c’est là le train ordinaire ; les jeunes filles du monde ne regardent pas à cela.

1494. (1905) Promenades philosophiques. Première série

On retrouve perpétuellement en lui ce goût, si particulier aux saints, de faire le contraire de ce qui séduit l’ordinaire humanité. […] C’est que le monde se reflète en eux bien plus nettement que dans les intelligences ordinaires. […] Mais les faits ne sont pas tous connus, surtout de ceux qui font profession d’être philosophes ; les plus ordinaires seulement, ceux qui atteignent un certain degré de constance, sont familier aux hommes. […] L’esprit de cette sorte, ordinaire chez l’homme d’action, compare et classe d’une façon discontinue. […] Les mots en caractères ordinaires indiquent les formes proposées par la Commission.

1495. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

Et enfin, sans presque y tâcher, je veux dire par le seul effet de l’exemple et de l’autorité, si Louis XIV, en les mêlant aux « gens de cour », a obligé les « gens de lettres » à dépouiller insensiblement je ne sais quelle morgue bourgeoise ou quelle rouille pédantesque dont ils étaient encore comme encrassés ; s’il les a mis ainsi du nombre des « honnêtes gens » ; s’ils ont acquis, au contact et dans la fréquentation des hommes d’État, des « gens du monde », et des femmes, quelques qualités qui ne germent point d’ordinaire dans l’arrière-boutique d’un « maître tapissier » ou dans le ménage d’un greffier du Palais, méconnaîtrons-nous aujourd’hui la grandeur du service ainsi rendu à la littérature française ? […] On joint d’ordinaire aux Pensées quelques opuscules dont les plus importants sont : l’Entretien avec M. de Saci ; — Trois discours sur la condition des grands ; — De l’esprit géométrique ; — la Préface du Traité du vide ; — et les Lettres à Mlle de Roannez. […] Segrais, Les Divertissements de la princesse Aurélie]. — 2º L’imitation de la réalité vivante se substitue aux combinaisons du romanesque. — Du mot de Fontenelle sur les caractères des personnages de Racine, « qui ne sont vrais, dit-il, que parce qu’ils sont communs » ; — et qu’en voulant critiquer Racine on ne saurait mieux le louer. — Les héros de Racine nous ressemblent ; — son invention est plus hardie que celle de Corneille de tout ce que ses sujets ont de plus ordinaire ; — de plus voisin de nous ; — de plus semblable à ce qui se passe autour de nous tous les jours. — D’une erreur de Taine à ce sujet [Cf.  […] — La « hardiesse » de Bourdaloue ; — et qu’il ne semble point qu’elle ait passé l’ordinaire de la chaire chrétienne en son temps. — Il faut chercher ailleurs l’explication du succès de Bourdaloue ; — et on la trouve aisément : A. […] Dans la nature de son éloquence et de son style. — Bourdaloue est le plus continûment éloquent de nos prédicateurs. — Par où l’on veut dire : — qu’il répand une lumière égale sur toutes les parties de son sujet ; — que le mouvement ordinaire de son éloquence a moins de variété que d’ampleur ; — et qu’il n’a presque point de traits ni de morceaux. — Simplicité du style de Bourdaloue. — Son dédain de toute rhétorique, — et si peut-être il ne l’a pas poussé au-delà des justes bornes ?

1496. (1802) Études sur Molière pp. -355

Aucune, si, en méditant ses rôles, il ne sait lire en même temps dans la tête, dans l’âme de son auteur, et y puiser la véritable, l’infaillible tradition ; l’acteur qui n’a pas reçu du ciel ce premier dom, et qui ne l’a pas perfectionné par l’étude, doit renoncer à jouer la comédie, les pièces de Molière surtout ; il est du petit nombre d’auteurs qui, toujours vrais, n’admettent jamais de contrefaction, ressource ordinaire des talents médiocres. […] Jeunes acteurs, qui ne savez pas encore raisonner vos imitations, croyez qu’en suivant cette tradition, vous suivez la mauvaise ; vous vous perdez, et vous gâtez votre rôle : ne voyez-vous pas que Lélie doit constamment conserver cette amabilité, cette décence, que l’auteur lui a données, et dont il a besoin pour m’intéresser, non seulement à sa passion, mais encore à l’amante qui l’a inspirée, et que je dois ne pas regarder comme une esclave ordinaire ? […] Acte II, scène v, Éliante dit : L’amour, pour l’ordinaire, est peu fait à ces lois. […] Dans l’acte I, scène vi, Orgon et Cléante sont seuls ; le premier dit à celui-ci, Mon frère, ce discours sent le libertinage ; à quoi Cléante répond : Voilà de vos pareils les discours ordinaires, Ils veulent que chacun soit aveugle comme eux ; mais ces deux premiers vers une fois débités, il a complaisamment adressé au parterre le reste de la tirade composée de vingt-huit vers ; et ce dernier seulement : Que cela vous soit dit en passant, mon beau-frère, a été dédié à Orgon.

1497. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

La nuit, on lui extraira une balle de la chair, ou des éclats enfoncés dans ses os ; il tendra sa bouche violemment fendue pour qu’on la lui recouse : tout cela pour un homme qu’il n’a jamais vu, ou par qui, s’il l’a vu, il n’a pas été remarqué, un homme qui l’enverra à la potence s’il essaye de fuir toutes ces misères372. » Voilà l’avantage de l’imagination complète sur la raison ordinaire. […] Comment les sentiments ordinaires, les jugements journaliers et naturels sur le bonheur et le plaisir subsisteraient-ils devant une conception pareille ? […] Ces allégories sont des hallucinations aussi nettes, aussi complètes et aussi saines que les perceptions ordinaires. […] « Selon le sens ordinaire de l’Écriture, dit le major Disbrowne, presque tous commettent des blasphèmes, selon ce mot de notre Sauveur dans saint Marc : « Péché, blasphème ; —  si cela est, il n’y a personne sans blasphème.

1498. (1778) De la littérature et des littérateurs suivi d’un Nouvel examen sur la tragédie françoise pp. -158

Alors, il fait disparoître la ressemblance ordinaire qui se trouve entre les hommes. […] Il n’y a qu’un homme qui pense qui sache distinguer le grand-homme de l’homme ordinaire. […] Les Ecrivains ordinaires ne trouvent aucune réponse à ce qu’ils écrivent, ils partent & bondissent en criant, j’ai du goût, avec une aisance qui décèle leur confiance présomptueuse. […] On conçoit un sentiment profond, on ne trouve point de rime ; il s’en présente une pour exprimer une pensée ordinaire ; on s’y refuse d’abord, on s’échauffe la tête pour rallonger, raccourcir, tourner, retourner sa phrase.

1499. (1856) Articles du Figaro (1855-1856) pp. 2-6

Weill qu’un esprit très ordinaire et qu’un fort médiocre écrivain. […] N’est-ce pas une mystification ridicule, pour l’honnête bourgeois qui assiste à la représentation d’une comédie, d’entendre traiter à chaque scène de « merveille divine » et de « beauté sans seconde » l’héroïne de la pièce, quand il n’a devant lui qu’une actrice fort ordinaire, d’une figure commune, et de tout point pareille à sa femme ou à sa fille — deux affreuses créatures qu’on dirait sorties de l’atelier de M. […] Barbara a commis, dans un sens inverse, la maladresse ordinaire de ces niais d’atelier ou de salon qui ne manquent jamais de vous dire, en manière d’exorde : — Ah ! […] l’intempérance de plume a remplacé le bon ton et la distinction du style ; cette parole, si mesurée et si sage d’ordinaire, franchit alors à pieds joints toutes les barrières, laissant en deçà les immunités de la critique, et avoisinant, de l’épaisseur d’un cheveu, l’ardente personnalité. — L’écrivain fils des croisés, le littérateur petit-maître, a jeté ses manchettes brodées par-dessus les moulins de la polémique, — ou du moins les retrousse-t-il jusqu’au coude.

1500. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

Grande ritournelle avant le lever du rideau ; la ritournelle est coupée en deux par un solo de violon… Madame Casimir chante un andante concertant avec le violoniste solo… c’est à ce moment de l’air de madame Casimir que j’allais bonnement m’accrocher pour trouver quelque chose, lorsque est venu le déluge ordinaire de gammes chromatiques, de trilles… mauvais tours de force en ah ! […] Elle était entourée de sa cour ordinaire deux ou trois Italiens qui la trouvent fort belle et le lui disent en riant… un compositeur de ballets spirituel et rouge, enfin un baryton ridicule, qui, ne pouvant plus jouer de rôles au théâtre où l’on ne se hâte pas de l’engager, joue auprès de la chanteuse en question celui de Patito, de Cavalier servente, de souffre-douleur, le rôle le plus sot, le plus grotesque et le plus pitoyable. […] D’ordinaire, M.  […] « Rouvière dit de son côté Méry, dans la création de Favilla, s’est placé au-dessus de toute analyse vulgaire et de toute comparaison. » Notre camarade Villemot le proclame un artiste de génie ; — la plaisanterie m’a semblé un peu forte pour un écrivain qui, d’ordinaire, a la malice bienveillante.

1501. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

La critique ordinaire ne le fait pas. […] Cette assertion était imprudente, car elle permettait aux bavards ignorants de parler, avec un semblant de raison, d’exagération, et de railler les neuro-pathologistes et aliénistes qui voient un fou dans tout individu qui se permet d’être autre chose, d’être quelque chose de plus que le contribuable normal le plus ordinaire, le plus impersonnel. […] Cela peut être de la spéculation ordinaire, mais, en général, c’est de la maladie. […] Il se passe donc ici exactement le contraire de ce que l’on observe chez le mystique ordinaire. […] Comme le montrent ces exemples, la compagne ordinaire de l’érotisme maladif, la ferveur religieuse, n’est pas non plus absente des œuvres de Verlaine.

1502. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Voici comment se passaient d’ordinaire ces altercations. — Le pape compte sur le calice ou la tiare qu’il a commandés ; l’artiste n’est pas prêt et envoie au diable ses messagers. […] Elle dort à l’ordinaire dix à douze heures ; elle mange quatre fois le jour de la viande ; il est vrai que son déjeuner et sa collation sont ses meilleurs repas. […] Le congé qu’elle prit de la reine fut celui d’une prêtresse quittant une idole infidèle à son propre culte. — « Son visage était plus pâle qu’à l’ordinaire et ses yeux plus étincelants. […] Elle en avoit toujours eu du soupçon, et le mandoit presque tous les ordinaires à Monsieur. […] Il ne peut mettre sa chemise sans un chambellan, et sa cravate sans l’empeseur ordinaire.

1503. (1893) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Première série

Les esprits éminemment scientifiques sont, en règle ordinaire, des écrivains médiocres. […]   Les écrits minuscules qui vivent éternellement sont constitués d’ordinaire par une idée très simple exprimée dans une forme parfaitement pure, claire et harmonieuse. […] Le sort ordinaire de tant de bons livres, pleins de substance et de saveur, c’est d’être vendus à vil prix, pour cause d’encombrement des bibliothèques particulières, à des bouquinistes, qui ne trouvant point pour eux d’acheteurs et finissant par être encombrés à leur tour, les cèdent moins à l’épicier, en dépit de la vieille plaisanterie classique, qu’au chiffonnier et à l’égout. […] Combien donc faudrait-il de savants ordinaires mis bout à bout pour balancer un Newton ? […] Le comble de la passivité, dans la conquête de la gloire, a été atteint par quelques auteurs qui, avec un talent ordinaire ou un génie non encore prouvé, ont eu la bonne fortune d’avoir pour parrains auprès de la postérité des hommes très illustres qui, en s’envolant au séjour des Immortels, les ont comme pris en croupe et emportés dans un pli de leur manteau.

1504. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Alors intervient l’ordinaire conseillère des meurtriers, la femme. […] Or, le duc Orsino a, dans sa cour, un page favori : Silvio, son compagnon et son confident ordinaire. […] Mais elle ne sera que Mme Valette, femme d’un garçon très sec, assez ordinaire, et qu’elle n’aime pas. […] Mais, à l’ordinaire, les écrivains du Théâtre-Libre nous apparaissent comme profondément misogynes, et mysogynes avec dérision et mépris, en même temps que hantés par l’image de la femme. […] Il paraît, au reste, que c’est l’ordinaire du ménage Fériaud, et qu’il est extrêmement rare que Monsieur et Madame dînent dans la salle à manger.

1505. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Il en veut à l’amour lui-même, à l’amour tel que nous le menons d’ordinaire. […] Il y a beaucoup à admirer chez une personne ordinaire. […] Je crois au contraire que les confidences des gens ordinaires sont bonnes à entendre. […] D’ordinaire, les pensions aidant, le métier d’homme de lettres était un métier fort doux. […] Mais ce n’est pas ici une œuvre ordinaire.

1506. (1907) Propos de théâtre. Quatrième série

Lisane qui s’est partagée, avec son inconscience ordinaire, entre l’affreux Tassin, bandit de lettres et voleur à l’occasion, et le pauvre naïf Glatigny, est maintenant chanteuse excentrique et danseuse acrobatique dans un café-concert monté par son ancien directeur sur le revers oriental de « la Butte », et elle est vaguement fidèle à Glatigny, en attendant que Tassin sorte d’une pension de l’État où le gouvernement le retient sur avis de la quatorzième ou quinzième chambre. […] Ce qui lutte dans le cœur de Thérèse, c’est la pitié, la pitié ordinaire, la charité générale et universelle ; et, d’autre part, le besoin de s’immoler elle-même, son immolation d’elle-même étant malheureusement attachée à celle d’Ervann, et inséparable de celle d’Ervann. […] Boisselot, dans un rôle épisodique d’académicien « vieille ficelle », a été délicieux, à son ordinaire. […] Donc, œuvre inégale, souvent très brillante, toujours franche et hardie, et qui fait honneur à son auteur, mais de second mérite en somme, et avec moins d’esprit, beaucoup moins qu’à l’ordinaire — qu’à l’ordinaire de M. 

1507. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome I

D’ordinaire il hésite entre la révolte de son individualité et l’accommodation au milieu, mais dans cette hésitation même on peut deviner la sagesse des renoncements futurs. […] D’ordinaire, un homme parvenu à la pleine possession de lui-même a fait son choix, et, par une intolérance bien logique, il désapprouve le choix des autres ou du moins le comprend à peine. […] Renan ne brisât sa belle intelligence contre l’écueil ordinaire du dilettantisme, qui est la frivolité. […] L’autre état d’esprit, le psychologique, est celui où se placent d’ordinaire les historiens, les romanciers, les moralistes, ceux qui ont pris pour objet de leur étude le domaine des actions humaines, les sentiments, les pensées, les volontés. […] De tels conflits amènent d’ordinaire la diminution progressive de l’un des deux hommes, puis sa défaite définitive, et son asservissement, sinon sa mort.

1508. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Alors son cœur fut vite corrompu par les femmes, et, comme une grande abondance et une liberté sans bornes inclinent d’ordinaire la nature humaine à consentir au péché, le jeune Roi se détourna du bien et ferma l’oreille aux avis loyaux et salutaires. […] Il dit, par exemple, dans ses strophes à Jean-Jacques Rousseau : Toi dont le siècle encore agite la mémoire… Il avait aussi de ces métaphores, véritablement poétiques, que les censeurs malavisés accusent d’ordinaire d’incohérence. […] Mais j’ai toujours pensé que même ce qui énerve d’ordinaire, peut stimuler une veine d’élection. […] Le langage de tragédie employé par Shakespeare est d’ordinaire solennel et noble jusqu’à l’emphase. […] Mais il répondait, comme à son ordinaire, que ce poète, qui était un grand génie, avait vécu dans un siècle grossier et que l’on retrouvait dans ses pièces la grossièreté de ce temps, beaucoup plus que le génie de l’auteur… Il composa donc une seconde Mort de César, dans le goût anglais, sans imiter directement Shakespeare.

1509. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

D’ordinaire, un jeune prince et une jeune princesse tombent amoureux l’un de l’autre ; après beaucoup de traverses, elle devient grosse, accouche d’un beau garçon ; le garçon est perdu, dévient homme, et prêt à engendrer un autre garçon… Tout cela en deux heures. » Sans doute, ces énormités s’atténuent un peu sous Shakspeare ; avec quelques tapisseries, quelques grossières imitations d’animaux, de tours, de forêts, on aide un peu l’imagination du public. […] Comment ont-ils réussi, et quel est cet art nouveau qui foule toutes les règles ordinaires ? […] L’avocat parle d’abord latin77 : « Non, qu’il parle en langue ordinaire ; autrement, je ne répondrai pas. —  Mais vous comprenez le latin. —  Je le comprends, mais je veux que toute cette assemblée entende. » Poitrine ouverte, en pleine lumière, elle veut un duel public, et provoque l’avocat : « Me voici au blanc, tirez sur moi, je vous dirai si vous touchez près. » Elle le raille sur son jargon, l’insulte, avec une ironie mordante. « Sûrement, messeigneurs, cet avocat a avalé quelque ordonnance ou quelque formule d’apothicaire, et maintenant les gros mots indigestes lui reviennent au bec, comme les pierres que nous donnons aux faucons en manière de médicaments.

1510. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

Il dit quelque part1408 qu’il y a au fond du naturel anglais, sous toutes les habitudes de calcul et de sang-froid, une fournaise inextinguible, un foyer de rage extraordinaire, la rage des dévoués Scandinaves1409, qui, une fois lancés au fort de la bataille, ne sentaient plus les blessures et vivaient et combattaient, et tuaient, percés de coups dont le moindre, pour un homme ordinaire, eût été mortel. […] C’est une chose vivante, une chose ineffable et divine, devant laquelle notre meilleure attitude, avec toute la science qu’il vous plaira, est toujours la vénération, le prosternement pieux, l’humilité de l’âme, l’adoration du silence, sinon des paroles1416. » En effet, telle est l’attitude ordinaire de Carlyle. […] Quel est ce sentiment, comment il se lie aux autres, quel est son degré, sa source, son effet, comment il transforme l’imagination, l’entendement, les inclinations ordinaires, quelles passions l’alimentent, quelle proportion de folie et de raison il renferme, ce sont là les questions capitales.

1511. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Ces deux défauts vont d’ordinaire ensemble. […] Quand la mode voulait qu’on brûlât de quelque belle passion, quand l’exemple en venait de la cour, ce n’était pas d’une vertu ordinaire de s’avouer peu sensible à l’amour. […] Je l’aime mieux quand il peint, parce que l’imagination y suffit, et quand il raconte, parce qu’il n’y faut que de l’enjouement et de l’esprit, avec une raison ordinaire.

1512. (1896) Le livre des masques

Parmi les vers jamais ordinaires des Amours jaunes, il y en a beaucoup de très déplaisants et beaucoup d’admirables, mais admirables avec un air si équivoque, si spécieux, qu’on ne les goûte pas toujours à une première rencontre ; ensuite on juge que Tristan Corbière est, comme Laforgue, un peu son disciple, l’un de ces talents inclassables et indéniables qui sont dans l’histoire des littératures, d’étranges et précieuses exceptions, — singulières même en une galerie de singularités. […] Dès que l’on veut, par exemple, traduire en une langue nouvelle les relations des sexes, on est immoral parce que, fatalement, l’on fait voir des actes, qui, traités par les ordinaires procédés, demeureraient inaperçus, perdus dans le brouillard des lieux communs. […] Gaston Boissier, en couronnant (touchante coutume) un poète quinquagénaire, le félicitait de n’avoir pas innové, d’avoir exprimé des idées ordinaires en un style facile, de s’être conformé avec scrupule aux lois traditionnelles de la poétique française.

1513. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

Il est obligé de nous donner souvent le détail et le menu de la vie humaine, et de nous entretenir, bon gré malgré, de choses simples, naturelles, ordinaires. […] Runjet-Sing, même en Europe, ne serait pas un homme ordinaire ; au milieu de son peuple, c’est un grand homme. […] Je pris toutes mes aises, non seulement sans en rien rabattre de mon ordinaire, mais en y ajoutant, je vous assure, largement ; laissant Neal-Sing par terre, dans toute son humilité, pour réfléchir en silence sur la grandeur du crime qu’il allait commettre. » Ce manège eut un commencement de succès ; le brigand rabattit de ses prétentions et proposa de relâcher son prisonnier, en ne retenant que son bagage.

1514. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le cardinal de Bernis. (Fin.) » pp. 44-66

Entre le pape et l’ambassadeur d’Espagne, il avait fini par être l’intermédiaire ordinaire et le conciliateur agréable à tous deux : « Je suis le calmant de l’un et de l’autre.

1515. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — I. » pp. 88-109

Il fut précédé d’une plainte particulière de Renaudot contre Gui Patin, lequel l’avait traité dans quelque préface latine avec sa bonne grâce ordinaire (nebulo, blatero, toujours le fripon et le polisson).

1516. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — III. (Fin.) » pp. 371-393

Il met de côté cette faculté d’admiration qui veut être satisfaite et tenue en haleine, même dans le régime ordinaire de la vie.

1517. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Il arrive d’ordinaire, dans les réflexions de moraliste sur les sentiments, qu’on ne fait ainsi que généraliser ses impressions secrètes et l’histoire de son propre cœur.

1518. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — I. » pp. 235-256

Je ne veux pas abuser avec Saint-Martin des pensées détachées, sachant qu’il a dit, de celles mêmes qu’il écrivait : « Les pensées détachées ne conviennent qu’aux esprits très faibles ou qu’aux esprits très forts ; mais, pour ceux qui sont entre ces extrêmes, il leur faut des ouvrages suivis qui les nourrissent, les échauffent et les éclairent tout à la fois. » Saint-Martin n’ayant écrit aucun ouvrage qu’un lecteur ordinaire puisse lire de suite, il faut bien en venir aux pensées et aux extraits avec lui pour en donner quelque idée au monde.

1519. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

Peu de temps après avoir été sur la bruyère de Chanteloup, il servit de témoin, et, comme on dirait en temps ordinaire, de parrain à un enfant mâle qui naquit à un brave homme d’Amboise.

1520. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

Il aimait la réflexion, l’étude, le vrai pour le vrai, le bien pour le bien ; il avait un sentiment de justice, de droiture, de cordialité que rien n’altéra, et qu’il exprime en des termes d’une sensibilité incomparable : Je suis tout accoutumé, disait-il, à cette espèce d’ingratitude ordinaire, qui est l’oubli des bienfaits, qui ne consiste qu’à ne pas rendre le bien pour le bien.

1521. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

Il lisait toutes sortes de livres anciens et nouveaux : c’était une nourriture qui lui était nécessaire. « Les jeunes gens surtout, disaii-il, devraient se mettre en tête cette maxime bien véritable, que plus on lit plus on a d’esprit… Celui qui a lu aurait encore plus d’esprit s’il avait lu davantage. » Il lisait toutes les nouveautés, et notait l’impression qu’il en recevait ; il n’était pas de ces dédaîgneurs (comme il les appelle) qui déclaraient d’un livre à première vue que cela ne valait rien ; il lisait jusqu’au bout le livre une fois commencé, biographies, mélanges, anecdotes, même les ana, même les contes de fées ; il les prenait par leur bon côté et y trouvait presque toujours sujet à quelque réflexion, à quelque plaisir : « Je dis à nos amis ordinaires : Que je vous plains de toujours critiquer !

1522. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — II » pp. 454-475

Certes, il était plus qu’un homme d’esprit dans le sens ordinaire et même dans le sens distingué où on emploie le mot.

1523. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La femme au XVIIIe siècle, par MM. Edmond et Jules de Goncourt. » pp. 2-30

Ce déchet l’a radoucie au point de la rendre plutôt agréable, car elle a de l’esprit et de bonnes manières ; mais vous jureriez, à voir l’agitation de sa personne et les effrois qu’elle ne peut cacher, qu’elle a signé un pacte avec le malin et qu’elle s’attend à être citée dans la huitaine, à l’échéance. » La sagacité de Walpole, d’ordinaire si pénétrante, semble l’avoir ici trompé, et il prête à l’activité de Mme de Luxembourg et à son goût pour les plaisirs de la société un sens plus profond qu’il n’en faut probablement chercher.

1524. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. (suite et fin) »

» Il avait ainsi une manière de piquer et de renchérir sur ce que vous aviez dit, et d’une de vos paroles ordinaires, en la reprenant et en la refrappant, il en faisait une toute neuve et saillante.

1525. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier. »

Une jeune fille noble, de vingt ans environ, d’un esprit hardi, d’un caractère entreprenant, poussée aussi par le vague instinct d’une nature moins uniquement féminine chez elle qu’elle ne l’est d’ordinaire chez ses semblables, s’est souvent dit que les jeunes filles, les femmes du monde ne connaissaient pas les hommes et ne les voyaient qu’à l’état d’acteurs et de comédiens ; elle a désiré savoir ce qu’ils se disent quand ils sont entre eux et qu’ils ont jeté le masque.

1526. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

L’épigramme, pour eux, était une petite pièce qui ne passait guère huit ou dix vers, et qui allait rarement au-delà, d’ordinaire en vers hexamètres et pentamètres ; c’était une inscription3 soit tumulaire, soit triomphale, soit votive ou descriptive ; une peinture pastorale trop courte pour faire une idylle, une déclaration ou une plainte amoureuse trop peu développée pour faire une élégie.

1527. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. (suite et fin.) »

Michel Nicolas, d’ordinaire bien informé, Jean-Bon, dans les premiers temps qu’il était commissaire général, aurait pris sur lui de faire commencer sans ordres la route riveraine de Mayence à Coblentz et d’y appliquer un reliquat de fonds disponibles qui était dans les caisses et qu’on voulait enlever au département.

1528. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

Sa figure me parut plus animée qu’à l’ordinaire.

1529. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le Général Franceschi-Delonne : Souvenirs militaires, par le général baron de Saint-Joseph. »

Franceschi n’était pas un prisonnier ordinaire, c’était un prisonnier national ; la vindicte espagnole était en jeu : Wellington, qui avait nouvellement pied en Espagne, évita tout conflit d’autorité et crut devoir s’abstenir.

1530. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite et fin.) »

Un éloge funèbre de lui par Suard sort du ton des notices chronologiques ordinaire et fait honneur à tous deux.

1531. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

Il en est que Jomini raconte d’original et qu’il doit à son expérience personnelle, comme par exemple, au chapitre des Guerres nationales, les deux faits qui se rapportent au temps où il était chef d’état-major de Ney en Espagne, et qui prouvent que les conditions habituelles de la guerre sont tout à fait changées et les précautions ordinaires en défaut, quand on a tout un pays contre soi69.

1532. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

Six semaines d’un voyage en calèche à travers la Belgique ou le long du Rhin, glaces ouvertes, lui suffisent d’ordinaire pour son plus long chef-d’œuvre, pour la pièce en cinq actes et sans collaborateurs.

1533. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

En d’aures termes, on ne rencontre pas d’ordinaire chez M.

1534. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

L’histoire en a profité cette fois, mais elle les admet peu en général ; son front, d’ordinaire impassible, ne laisse guère monter jusqu’à lui les mille éclairs sous-entendus et les sourires ; — et voilà pourquoi, en pur critique littéraire que je suis, j’ai toujours crainte de m’approcher, comme aussi j’ai peine à juger du masque de cette muse sévère.

1535. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DE BARANTE. » pp. 31-61

Il n’en restera pas moins vrai en principe que, puisqu’après tout l’historien fait toujours quelque peu l’histoire, soit qu’il articule à l’occasion ses pensées, soit qu’il se borne à extraire, à disposer les faits de manière à produire indirectement l’effet qu’il désire, il n’y a pas lieu, dans le champ ordinaire de ce noble genre, à tant de scrupule artificiel, à tant d’effacement de soi, à tant de confiance surtout en la réflexion du lecteur.

1536. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. Joubert »

« Quelque aménité doit se trouver même dans la critique ; si elle en manque absolument, elle n’est plus littéraire… Où il n’y a aucune délicatesse, il n’y a point de littérature. » A aucune en particulier, mais à toutes en général, ce qui ne peut, certes, blesser personne, dans ce sexe plus ou moins émancipé : « Il est un besoin d’admirer, ordinaire à certaines femmes dans les siècles lettrés, et qui est une altération du besoin d’aimer. » Et ces pensées qui semblent dater de ce matin, étaient écrites il y a quinze ans au moins, avant 1824, époque où mourait M. 

1537. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIe Entretien. Chateaubriand »

Les courtisans, comme à l’ordinaire, donnèrent le signal.

1538. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Il s’agenouilla seulement un moment, le front dans ses mains, pour changer le sujet et le plan de son discours, et, se relevant avec la sérénité de son inspiration ordinaire, il parla avec une onction pénétrante sur la soumission sans réserve, due dans toutes les conditions de la vie, à la légitime autorité de ses supérieurs.

1539. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

Il lui suffit à l’ordinaire de marquer qu’on a parlé beaucoup dans un sens et dans l’autre : et il vient aux résolutions prises.

1540. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

D’abord, il y a des chances pour que l’on soit heureusement doué et, par les qualités physiques et intellectuelles, au-dessus de l’ordinaire.

1541. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre III. La notion d’espace. »

Quand on parle de la relativité de l’espace, on ne l’entend pas d’ordinaire dans un sens aussi large ; c’est ainsi cependant qu’il conviendrait de l’entendre.

1542. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre X. La Science est-elle artificielle ? »

Croit-on que le langage ordinaire, à l’aide duquel on exprime les faits de la vie quotidienne, soit exempt d’ambiguïté ?

1543. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes décadents » pp. 63-99

Bonne affaire, trente-six grammes de papier de plus qu’à l’ordinaire. » Coppée est « débilitant ».

1544. (1887) Discours et conférences « Rapport sur les prix de vertu lu dans la séance publique annuelle de l’Académie française »

Un jour (il y a de cela quelques années), Emmeline revenait de porter la farine de ses clients ; elle était assise sur sa mule, tricotant comme elle le fait d’ordinaire dans ses courses, pour ne pas perdre le temps.

1545. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

Comme en pareil cas, les sujets politiques et religieux sont d’ordinaire ceux qu’on lui interdit (on l’a vu sous le premier Empire et sous le second), le livre reprend faveur, parce qu’il est seul admis à traiter certaines questions graves, et le journal pour remplir ses colonnes recourt à cette causerie sur les faits du jour qu’on nomme la chronique, au récit des crimes et des accidents, aux commérages de salon ou de coulisses, aux descriptions de cérémonies, aux feuilletons ; il se fait de la sorte plus littéraire, à condition de se maintenir dans ce que des mécontents ont baptisé dédaigneusement « la littérature facile » ; ou encore il invente, pour toucher aux matières brûlantes, une série d’allusions, de périphrases, de réticences, de malices sournoises qui passent, comme des pointes d’aiguille, à travers les mailles du réseau où la loi s’efforce de l’emprisonner.

1546. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVIII. Formule générale et tableau d’une époque » pp. 463-482

Impossible de les classer dans l’un ou l’autre des compartiments ordinaires !

1547. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « V »

En revanche l’on y a donné toute la fameuse Bacchanale du premier acte, qui se supprime d’ordinaire.

1548. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

Elle était seulement blessée de la négligence du roi et de ses attentions pour cette jeune et belle personne, qu’elle appelait une belle idiote, et elle avait recours à son secret ordinaire pour rappeler sur elle l’attention, c’était de s’éloigner.

1549. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chansons de Béranger. (Édition nouvelle.) » pp. 286-308

La conception, d’ordinaire, la composition de ces petits cadres, le motif est délicieux, poétique ; c’est l’expression, le style souvent qui s’étrangle ou qui fléchit.

1550. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Gil Blas, par Lesage. (Collection Lefèvre.) » pp. 353-375

Il suivit dans la composition de ce Bachelier son procédé ordinaire.

1551. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

Le célèbre Johnson l’employait d’ordinaire dans le siècle dernier, et il le rédigeait comme il suit : La loi de primogéniture, disait-il, a cela de bon, que du moins elle ne fait qu’un sot par famille.

1552. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

À dix heures du soir, rien ne la distinguait plus d’un jour ordinaire.

1553. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame Émile de Girardin. (Poésies. — Élégies. — Napoline. — Cléopâtre. — Lettres parisiennes, etc., etc.) » pp. 384-406

Une course de chevaux, une chasse, une mode nouvelle, une chose frivole prise au sérieux, une sérieuse prise au frivole, ce sont là ses sujets, ses triomphes ordinaires et faciles.

1554. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame de La Vallière. » pp. 451-473

Il est temps d’arriver aux sentiments de douleur et de repentir qui ont épuré la passion de Mme de La Vallière, et qui ont donné aux trente-six dernières années de sa vie la consécration sans laquelle elle n’eût été qu’une maîtresse de roi assez touchante, mais ordinaire.

1555. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La Grande Mademoiselle. » pp. 503-525

Les dents pourtant, qui n’étaient pas belles, et le nez grand et aquilin, accusaient les défauts assez ordinaires à la race des Bourbons.

1556. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits du comte Joseph de Maistre. (1851, 2 vol. in-8º.) » pp. 192-216

Rien n’est plus ordinaire que de rencontrer des hommes qui croient en Dieu et en la Providence, ou qui le disent, et rien n’est plus rare que d’en trouver qui, dans toutes leurs actions ou dans tous leurs jugements, se comportent comme s’ils y croyaient en réalité.

1557. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Lambert et madame Necker. » pp. 217-239

Les mardis ordinaires, la conversation chez Mme de Lambert était plus sérieuse et plus unie, bien que toujours très aiguisée.

1558. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame Necker. » pp. 240-263

En matière de goût, Mme Necker, peu sûre d’elle-même et ne jugeant que par réflexion, ainsi qu’il est ordinaire aux personnes qui ont passé leur jeunesse loin de Paris, crut, en y arrivant, qu’il n’y avait sur ce point qu’à prendre des leçons comme pour tout le reste : « Le seul avantage de ce pays, écrivait-elle après un an de séjour, est de former le goût, mais c’est aux dépens du génie ; on tourne une phrase en mille manières, on compare l’idée par tous ses rapports… » Et elle crut atteindre elle-même au goût en faisant subir à ses idées cette sorte d’épreuve et presque de tourment.

1559. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires de Marmontel. » pp. 515-538

Il se souvient même du menu de son premier dîner à la Bastille, de son ordinaire qui, grâce au gouverneur, fut aussi copieux que succulent ; et Vaucluse se recommandait trente ans après encore à sa mémoire par l’arrière-goût des belles écrevisses et des excellentes truites qu’il y avait mangées, non moins que par les réminiscences platoniques de Pétrarque.

1560. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

On ajoute que dans ces sortes d’arbitrage, qui d’ordinaire embarrassent et ennuient, il ne s’ennuyait pas ; il aimait à prolonger la discussion, à tout balancer, à tenir compte des moindres circonstances en artiste, presque en casuiste : c’était amour de la forme.

1561. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Les ruines les environnent, et ils passent devant elles sans éprouver seulement la curiosité ordinaire à un voyageur : ils ont déjà oublié ces temps d’une éternelle mémoire.

1562. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Voltaire et le président de Brosses, ou Une intrigue académique au XVIIIe siècle. » pp. 105-126

. — Écrivez-moi par la poste, et mettez hardiment : À Voltaire, gentilhomme ordinaire du Roi, au château de Ferney, par Genève ; car c’est à Ferney que je vais demeurer quelques semaines.

1563. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

Ce livre de Volney est de ceux qui se lisent moins qu’ils ne s’étudient : la partie intéressante pour le lecteur ordinaire se trouve rejetée dans les notes et les Éclaircissements.

1564. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre premier. Existence de la volonté »

On peut d’ailleurs, en vertu des corrélations mécaniques qui existent entre les diverses parties du corps vivant, admettre que certains points finissent par jouer d’ordinaire, par rapport à certains autres, le rôle d’organes relatifs d’inhibition, de même qu’il y a des points qui sont relativement sensoriels ; mais c’est là une organisation dérivée, qui n’implique pas une séparation primitive et complète, soit des fonctions sensorielle et motrice, soit des fonctions excitatrice et inhibitoire.

1565. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Introduction »

Lorsque les autres hommes ne sont pas de notre avis, que leur répondons-nous d’ordinaire ?

1566. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Plan, d’une université, pour, le gouvernement de Russie » pp. 433-452

J’en donnerai le plan aussi vaste qu’il peut l’être ; je circonscrirai ce plan dans les limites ordinaires et d’usage ; je présenterai le tableau de l’un et de l’autre.

1567. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Loutherbourg » pp. 258-274

Arbres lourds, mauvais ciel, à l’ordinaire ; pauvre paysage.

1568. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 35, de la mécanique de la poësie qui ne regarde les mots que comme de simples sons. Avantages des poetes qui ont composé en latin sur ceux qui composent en françois » pp. 296-339

L’inversion et les transpositions qui sont des licences en françois étoient dans la langue latine l’arrangement ordinaire des mots.

1569. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pommier. L’Enfer, — Colifichets. Jeux de rimes. »

Et Jeux de rimes non plus n’est pas un mensonge, car elles n’ont jamais, ces pauvres rimes qui, d’ordinaire, ne s’amusent pas (les rimes, ces galériennes du mètre !)

1570. (1887) Essais sur l’école romantique

Excepté quelques-unes, où tout est neuf et parfait, pensée et style, admirables morceaux que toutes les écoles du monde compteraient avec orgueil dans leurs archives, le reste va d’ordinaire par monts et par vaux. […] Hugo l’ait son choix ordinaire des sujets les plus élevés, qu’il varie incessamment la forme de ses compositions et les débuts de ses Odes. […] Telle idée devant laquelle nous passons tous les jours sans nous y arrêter, tel souvenir qui nous vient à l’esprit, sans que nous y trouvions ombre de poésie, tel sentiment qui effleure notre âme, et qui ne va pas jusqu’au fond, faute d’un foyer poétique à y réveiller, tels sont les textes ordinaires de ses Harmonies. […] Tel est l’effet ordinaire des ouvrages où l’imagination et la mémoire tiennent lieu de tout ; telle est l’impression que nous font en particulier les œuvres dramatiques de M.  […] Victor Hugo On remarque, dans sa carrière littéraire, un symptôme particulier qui inquiète même ses plus aveugles amis, c’est que, dans la prose comme dans la poésie, ses premiers écrits valent mieux que les derniers, sauf quelques parties d’ouvrage où le dernier rompt la loi ordinaire en n’étant que l’égal du premier.

1571. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

Il appartient rarement au même homme d’ouvrir et de parcourir la carrière, et d’ordinaire l’inventeur succombe sous le poids de sa propre invention. […] L’idée de négation domine la logique ordinaire, dont les affirmations ne sont que le produit laborieux de deux négations. […] À peine se fit-il connaître, que Richelieu l’attira à Paris et l’y retint, le comblant d’honneurs et lui donnant le brevet de premier peintre ordinaire du roi avec la direction générale de tous les ouvrages de peinture et de tous les ornements des maisons royales. […] Il y a des héros de probité, d’honneur, de loyauté dans les relations de la vie ordinaire, comme des héros de courage et de patriotisme dans les conseils des peuples ou à la tête des années. […] Il en faut beaucoup moins à la vertu ordinaire, dont la devise a toujours été : Fais ce que dois, advienne que pourra186.

1572. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Sully-Prudhomme crut qu’il ne serait pas de trop pour traduire les plus chers de ses propres sentiments ; que l’âme méritait bien cet effort pour être peinte dans ses replis ; que c’est spéculer lâchement sur l’intérêt qui s’attache d’ordinaire aux choses du cœur que de se contenter d’à peu près pour les exprimer. […] Mais, quelque discrétion que le poète y ait mise et quoique des pièces d’un caractère impersonnel se mêlent à celles qui peuvent passer pour des confessions, on sent à n’en pouvoir douter que les vers de Jeunes filles et Femmes, nous content par fragments une histoire vraie, très ordinaire et très douloureuse, l’histoire d’un premier amour à demi entendu, puis repoussé. […] Car on éprouve d’ordinaire ce sentiment pour des génies moins hauts, plus rapprochés de nous, plus mêlés, chez qui l’on sent plus de faiblesse, une humanité plus troublée. […] On s’est fort amusé ; on se sait bon gré de l’avoir compris ; mais en même temps on se sent troublé, désorienté, détaché de toute croyance positive, dédaigneux de la foule, supérieur à l’ordinaire et banale conception du devoir, et comme redressé dans une attitude ironique à l’égard de la sotte réalité. […] , je crois pourtant que la société a quelque intérêt à ce que cette vertu ne soit pas trop discréditée et à ce qu’elle soit pratiquée, en gros, par les individus : elle a peut-être son prix, sinon en elle-même, au moins comme étant d’ordinaire la meilleure épreuve de la volonté et la plus décisive : car qui s’est vaincu de ce côté peut beaucoup sur soi.

1573. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

En effet, si mille circonstances le dispersent, nous l’enlèvent de semaine en semaine, et le recomposent diversement de jour en jour, que sera-ce quand les causes ordinaires ne l’ont pas seulement écarté, dissipé, mais le bruit des tempêtes, mais des coups de tonnerre partant de tous les horizons en feu. […] Telle est la marche ordinaire des choses : l’imitation qui doit la suivre représentera donc rarement une grande action seule, nue et dégagée de tous les faits qui en secondent l’accomplissement, et de toutes circonstances accessoires ; sinon, infidèle à la vérité même, elle omettra l’utile et sortira du possible, unique fondement du vraisemblable. […] Un tel début, analogue à celui de l’Iliade, semblait permettre à Klopstock de s’exempter, comme Homère, de la condition ordinaire d’une invocation : mais le poète grec chante un sujet terrestre, tandis que le poète allemand veut chanter une action céleste. […] Non seulement tout ce qui constitue l’Iliade est utile, indispensable, dans les membres communs de la fable et dans les liens ordinaires des discours, mais encore ces deux autres espèces de nécessaire et de vraisemblable extraordinaires, qui tiennent au grand ordre idéal des fictions, y sont si bien employées que l’incroyable y paraît simple, et que l’imaginaire y semble réel. […] Homère fait agir et parler ces êtres surnaturels d’après les mouvements et les pensées que leur prête la tradition, ainsi qu’il fait agir et parler les hommes d’après la nature que nous connaissons tous ; aussi ne choque-t-il jamais la vraisemblance, et n’excède-t-il en rien la nécessité, tant ordinaires qu’extraordinaires ; mais ce nécessaire d’un ordre supérieur, ce vraisemblable élevé, sont fondés l’un et l’autre sur une condition majeure, sans laquelle il n’est point de véritable épopée : j’aborde ici la règle du merveilleux.

1574. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Si le bon Dieu et les saints faisaient habituellement les frais des Mystères, Satan avait d’ordinaire la plus large part dans les Moralités. […] En 1625, une aventure bien ordinaire, bien banale, faillit doter Paris d’un troisième théâtre permanent, et dota la scène française du plus grand génie qui se fût encore révélé au point de vue de l’art dramatique. […] En 1770, les comédiens ordinaires du roi s’établirent dans la salle des Tuileries où ils jouèrent jusqu’à l’année 1782, pendant que l’on construisait pour eux le théâtre de l’Odéon où ils restèrent de 1782 à 1799. […] Sorel, dans la Maison des jeux, raconte que le rôle d’Hercule était interprété par un acteur en vêtements ordinaires, mais en manches retroussées, qui le faisaient ressembler à un cuisinier en fonction. […] L’impression que cette représentation, ou plutôt ce récit, produisit sur Louis XIV, fut des plus vives, et cela valut à Racine la charge de gentilhomme ordinaire de la chambre.

1575. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Dans la première partie de son ouvrage, il assure, comme à son ordinaire, que l’imprimerie n’a jamais fait de mal, parce qu’elle n’a jamais rien fait du tout : 20 Hélas !

1576. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

D’ordinaire ces très grands retards dans la renommée et dans l’influence ont pour raison la nouveauté d’esprit de l’écrivain. […] Leur Demailly a exactement la destinée et les passions ordinaires de la classe dont il relève. […] En dépit de quelques énormes succès de vente, dus à des raisons d’à côté, le style des Goncourt et de leurs disciples reste en contradiction directe avec les habitudes intellectuelles du bourgeois français moyen, qui est aussi le lecteur ordinaire des romans et des nouvelles. […] Or, il n’est rien de plus différent que cette vision-là de l’incomplète, de la vague hantise d’images qui traverse la tête obscure de l’homme ordinaire. […] D’ordinaire, le sort se charge d’imposer ce salut aux malades de cet ordre en leur imposant l’action.

1577. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Si quelque méditation suivie l’occupait, c’était d’ordinaire un problème bien abstrus d’idéologie condillacienne ; car, privé de livres qu’il ne pouvait acheter, sevré du commerce des hommes, d’où il ne rapportait que trouble et regret, Joseph avait cherché un refuge dans cette science des esprits taciturnes et pensifs. […] Si, à l’ouverture du volume nouveau, ces personnes pouvaient croire que j’ai voulu quitter ma première route, je leur ferai observer par avance que tel n’a pas été mon dessein ; qu’ici encore c’est presque toujours de la vie privée, c’est-à-dire, d’un incident domestique, d’une conversation, d’une promenade, d’une lecture, que je pars, et que, si je ne me tiens pas à ces détails comme par le passé, si même je ne me borne pas à en dégager les sentiments moyens de cœur et d’amour humain qu’ils recèlent, et si je passe outre, aspirant d’ordinaire à plus de sublimité dans les conclusions, je ne fais que mener à fin mon procédé sans en changer le moins du monde ; que je ne cesse pas d’agir sur le fond de la réalité la plus vulgaire, et qu’en supposant le but atteint (ce qu’on jugera), j’aurai seulement élevé cette réalité à une plus haute puissance de poésie.

1578. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

C’était le médecin ordinaire de la maison de notre grand-père, à Sommérecourt. […] D’ordinaire, le grand-père le faisait dîner avec les domestiques, ne donnant l’ordre de mettre son couvert à table que dans les grandes occasions.

1579. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Jeudi 26 janvier Au fond, je pense avec une certaine ironie, du haut de quel mépris, la critique dramatique d’ordinaire, si facile à la louange de n’importe quoi de pas original, a traité la pièce de l’homme assis sur quarante volumes, un peu en avant de tout ce qui avait été fait ou écrit avant lui. […] Jeudi 9 novembre Voici qu’en sortant de table, Léon Daudet, avec son emballement ordinaire, se met à proclamer que Wagner est un génie supérieur à Beethoven, et se montant, se montant, arrive à affirmer, que c’est un génie aussi grand qu’Eschyle, que son Parsifal égale le Prométhée.

1580. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

Il est moins nécessaire qu’une fibre sympathique me relie à ce magnifique scélérat en écharpe rouge et plumet vert qu’à ce vulgaire citoyen qui pèse mon sucre, en cravate et en gilet mal assortis… Je ne voudrais pas, même si j’en avais le choix, être l’habile romancier qui pourrait créer un monde tellement supérieur à celui où nous vivons, où nous nous levons pour nous livrer à nos travaux journaliers, que vous en viendriez peut-être à regarder d’un œil indifférent, et nos routes poudreuses et les champs d’un vert ordinaire, les hommes et les femmes réellement existants… » Certes la vie est une partout et toujours ; sous tels dehors qu’il vous plaira de l’observer, vous la trouverez avec ses mêmes joies et ses mêmes peines. […] Il parle, agit comme un être ordinaire, et pourtant il y a quelque chose en lui qui échappe.

1581. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre III. De l’organisation des états de conscience. La liberté »

Aussi a-t-on eu tort, pour prouver que l’homme est capable de choisir sans motif, d’aller chercher des exemples dans les circonstances ordinaires et même indifférentes de la vie. […] Elle ne mesurerait pas cette diminution, sans doute, et même elle ne l’apercevrait peut-être pas tout de suite sous l’aspect d’un changement de quantité ; mais elle constaterait, sous une forme ou sous une autre, une baisse dans l’enrichissement ordinaire de l’être une modification dans le progrès qu’il a coutume de réaliser entre le lever du soleil et son coucher.

1582. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Bossuet, dans ce sermon, ne suit pas les règles ordinaires du discours, et ce qu’on a si justement dit de sa domination sur la langue est vrai surtout de ce magnifique morceau, où les tours sont plutôt les élans d’une pensée inspirée, que des formes régulières où la langue reconnaît ses lois. […] Si ce n’était pas trop de l’esprit de Fénelon pour se jouer sur cette lame, ce n’était pas assez d’une vertu ordinaire pour ne pas glisser du quiétisme des honnêtes gens dans les désordres de Molinos. […] Il en a jusqu’à en faire peur, et son malheur est de s’être chargé d’une cause où il en faut tant. » Pour lui, il répondit avec sa vigueur et sa simplicité ordinaires, se renfermant jusqu’à la fin dans l’exactitude, pensant plus aux juges qu’aux curieux.

1583. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

Quand un chanteur met la main sur son cœur, cela veut dire d’ordinaire : je l’aimerai toujours ! […] J’ai entendu dire à un poëte ordinaire de la Comédie-Française que les romans de Balzac lui serraient le cœur et lui inspiraient du dégoût ; que, pour son compte, il ne concevait pas que des amoureux vécussent d’autre chose que du parfum des fleurs et des pleurs de l’aurore. […] Qu’était-ce que cette grande tradition, si ce n’est l’idéalisation ordinaire et accoutumée de la vie ancienne ; vie robuste et guerrière, état de défensive de chaque individu qui lui donnait l’habitude des mouvements sérieux, des attitudes majestueuses ou violentes.

1584. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1870 » pp. 3-176

Sur la place, d’ordinaire si peuplée, quelques rares passants, et au plus loin, dans le fin fond des rues, deux ou trois groupes s’entretenant avec des gestes désolés. […] Paris est agité, Paris est inquiet de sa pitance ordinaire. […] L’œil du Parisien, aujourd’hui, n’est plus qu’aux étalages des choses susceptibles d’être mangées, aux étalages des produits avec lesquels on triche avec l’alimentation des jours ordinaires. […] Là-dedans, la foule insouciante d’un dimanche des temps ordinaires, qui marche à petits pas, musant et s’arrêtant à chaque étalage, au milieu des glapissements d’affreux marmousets, criant d’une voix déjà cassée par l’eau-de-vie : Madame Badinguet ou la femme Bonaparte, ses amants, ses orgies.

1585. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

En effet, c’est à peine un homme de lettres que Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais ; c’est un homme d’affaires, de quelles affaires, souvent, ou même à l’ordinaire ! […] Voltaire à la cour. — Ses relations avec Mme de Châteauroux ; — et surtout avec Mme de Pompadour. — Il se flatte que la nouvelle maîtresse fera passer le roi du côté des philosophes ; — et il l’accable de ses flatteries ; — qui lui valent le titre d’historiographe de France [1745]. — Le Poème de Fontenoy, 1745, et Le Temple de la Gloire, 1745. — Élection et réception de Voltaire à l’Académie française [mai 1746]. — Il est nommé gentilhomme ordinaire du roi [décembre 1746]. — Imprudences de Voltaire. — Il fatigue le roi de ses flagorneries ; — Mme de Pompadour de ses familiarités ; — et les courtisans de son importance. […] VII. — Claude-Adrien Helvétius [Paris, 1715 ; † 1771, Paris] Fils et petit-fils de médecin ; — fermier général et protecteur des lettres ; — maître d’hôtel ordinaire de la reine Marie Leczinska ; — enragé de célébrité, il débute par se faire la réputation d’un petit-maître accompli. — Il s’essaie ensuite dans la poésie ; — et soumet ses essais à Voltaire ; — qui les encourage en lui rappelant qu’Atticus était fermier général ; — mais qui les trouve d’ailleurs plutôt médiocres. — Helvétius se tourne alors du côté des mathématiques ; — et finalement du côté de la philosophie. — Il se démet de sa charge de fermier général, et compose laborieusement son livre De l’esprit, 1758. — Médiocrité générale du livre, — où les pires paradoxes s’autorisent de preuves ; — qui ne sont la plupart que des « anecdotes » scandaleuses ; — ce qui n’empêche qu’aucun livre, en son temps, n’ait fait plus de bruit ; — ni répandu plus d’idées destinées à faire fortune. — C’est Helvétius qui a proclamé le premier « que la morale devait être traitée comme une physique expérimentale » [Cf.  […] Le fondateur de la doctrine : François Quesnay [Mérey, 1694 ; † 1774, Paris] ; — ses débuts de chirurgien ; — sa nomination de médecin ordinaire du roi ; — et sa situation de confiance auprès de Mme de Pompadour [Cf. 

1586. (1891) Lettres de Marie Bashkirtseff

Chaque fois que vous vous impatienterez ou trouverez, en homme ordinaire, votre rôle ridicule, consultez ce petit Manuel du parfait amoureux ; il vous donnera la mesure de vos sentiments. […] C’est énorme pour mon impatience, mais c’est ordinaire pour le sens commun. […] au bout d’un certain nombre de lettres, ce serait peut-être un ami conquis dans des circonstances peu ordinaires ; alors on se demande qui ? […] Voilà un sentiment très féminin, très romanesque et très ordinaire que j’imagine éprouver autrement que les autres.

1587. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

Pour attaquer l’Idole, il fallait un courage plus que ordinaire ; pour oser maudire Napoléon, il fallait compter sur l’éloquence de la vérité ; ni le courage, ni l’éloquence n’ont manqué à M.  […] Quand l’hyperbole, interprète de la colère, se sert du langage ordinaire, comme dans Juvénal, par exemple, elle est forcée d’envahir successivement tous les éléments de la pensée. […] Ce qui est, pour les mécaniciens, erreur ou confusion, devient, pour les lecteurs ordinaires, une nuit impénétrable. […] Après ces réserves, nous pouvons sans danger employer le langage ordinaire. […] Pour sonder toutes les misères, toutes les lâchetés de la vie ordinaire, pour découvrir et montrer les trahisons et les mensonges qui se cachent sous le nom de prudence et d’habileté, il ne faut pas un regard moins sûr, une parole moins puissante, que pour compter les blessures de la passion.

1588. (1891) Esquisses contemporaines

Il y a une manière de la voir et une autre manière de la sentir ; la première est la bonne, mais la seconde est exquise ; la première est l’ordinaire, la seconde est plus rare et ne va point sans une certaine mélancolie qui est la rançon des sentiments trop intenses. […] L’infatuation naïve et l’orgueil inné de la créature suffisent pour l’ordinaire à cet office. […] Et cette question, toute différente de celle que discutent à l’ordinaire ceux qui se posent en réformateurs ou en prophètes de l’avenir, se trouve être une question de moralité. […] Il est excellent et il est, peu s’en faut, détestable. » Pour l’ordinaire, il déroule une phrase lente, monotone, habile aux transitions, sans images, sans éclats ni vibrations d’aucune sorte, si l’on excepte le frémissement contenu d’une pensée toujours anxieuse d’où se dégage à la longue une pénétrante tristesse. […] Quand les hommes, pour qui ces femmes-là ont eu la tendre hypocrisie de jouer ainsi un rôle, découvrent ce mensonge, ils entrent d’ordinaire dans des indignations et des mépris qui attestent assez combien la vanité fait le fond de presque tous les amours… » « Elles savent si bien que se donner dans l’amour n’a rien de commun pour elles avec se donner dans le devoir, dans l’intérêt, ou même dans le plaisir… » « La nature ne connaît ni le rire, ni la fantaisie, et l’être qui aime, comme l’être qui a faim, comme l’être qui meurt, sort du mensonge pour rentrer dans cette réalité invinciblement, indiciblement grave, qui accompagne tous les faits essentiels de l’existence.

1589. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

— Un duel, avec son accompagnement ordinaire de témoins, révélerait tout au public… Vous m’offriez tout à l’heure de faire avec moi un match au pistolet… J’accepte… je crois que nous sommes à peu près de force égale… Pour celui de nous qui aura l’avantage, ce sera la vie ; pour l’autre, ce sera le suicide. […] Là, du moins, leurs épanchements échappaient à leur père, qui d’ordinaire n’aimait pas à les voir ensemble, craignant que leur intimité ne diminuât son autorité sur eux. […] Prudhomme dans leur simple couleur de chair ordinaire, bien qu’un pinceau logique y eût glissé du vrai violet. […] Une chose pourtant m’avait frappé plus que toutes les autres, c’était les filets noirs dont, au lendemain de la mort du prince, les journaux, même ceux de l’opposition qui, d’ordinaire, en parlaient assez dédaigneusement, avaient encadré des articles nécrologiques qu’on se lisait tout haut en pleurant dans les familles. […] Casser de ses doigts un écu de cinq francs ou le plier comme du papier pour en faire un porte-bouquet est un tour de force ordinaire pour lui.

1590. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

On n’y voit d’ordinaire qu’une philosophie de l’histoire ; mais il est encore, et de plus, une apologie de la religion, et une démonstration du dogme de la Providence contre les libertins. […] Il passe alors au grand Alexandre, et découvre dans son histoire, non sans quelque plaisir secret, des crimes plus qu’ordinaires mêlés à une superstition sans mesure. […] M. de Girac dit non, en s’appuyant mal à propos de l’autorité d’Élien, de Pline, et d’Aristote, mais Vossius, Franzius et Borrichius disent oui… Bayle hésite et ne conclut pas… Il est plus affirmatif sur d’autres points, et traitant, par exemple, l’admirable question de savoir si « la nuit que passa Jupiter avec Alcmène fut double ou fut triple », il prouve, par de fort bonnes raisons, qu’en tout cas elle passa de longueur une nuit ordinaire. […] IV Mais on voit encore bien mieux qu’elle n’est pas d’un « sceptique », ou du moins qu’il faut commencer par changer le sens ordinaire du mot si l’on veut l’appliquer à Bayle. […] L’un de leurs procédés les plus ordinaires consiste à diviser, et comme qui dirait à éparpiller leurs idées, de façon que la suite, et au besoin la hardiesse, en échappent naturellement au lecteur inattentif, sans que pour cela le triomphe en soit moins sûr à la longue.

1591. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Ses limousines doublées de velours rouge semblaient quelque chose, je ne dis pas d’ordinaire, mais de nécessaire. […] Après cette première vision, cette reprise héroïque sur la mort, se déroulent les phénomènes ordinaires du spiritisme. […] Le général remercie ; la conversation s’engage, Denon parle avec sa grâce ordinaire et gagne en un quart d’heure l’amitié de Bonaparte. […] Je reconnus l’appartement de Marie-Antoinette, où, vingt ans auparavant, j’avais servi comme gentilhomme ordinaire de Louis XV. […] Et ce qui l’irritait, c’était la vulgarité, la médiocrité, le « juste milieu », enfin le train ordinaire des choses.

1592. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

Dans les vignes de Monteil le père, madame Monteil seule était sérieuse : elle restait d’ordinaire au logis, ne se sentant pas assez vaillante pour franchir les terrasses à travers ces ceps, pareils à des buissons d’épines ; elle se plaisait dans le pré attenant à la maison, sous quelques arbres touffus dont elle aimait l’ombre et le frais ; elle se promenait seule, en silence, et, quand par hasard son fils Alexis lui tenait compagnie, il sentait, au tressaillement de la main maternelle, que sa mère était heureuse ! […] Il faudrait avoir certains droits que je n’ai pas pour porter un jugement définitif sur ce livre étrange et sans antécédents ; il est le seul de son genre et de son esprit au milieu de tant et tant de témoignages si divers que les siècles écoulés laissent après eux d’ordinaire. […] Comme on l’écoutait un peu moins qu’à l’ordinaire (quelque bulletin de la grande armée circulait dans l’école), il se hâta de conclure, et il revint en toute hâte à son logis. […] Voilà pourquoi nous venons d’ordinaire tout seuls, et quand les partis ont fait silence, apporter notre hommage sincère et recueilli aux hommes illustres de chaque parti. […] À cette heure, un jour ordinaire, le cimetière eût été fermé jusqu’au lendemain, jusqu’à l’heure où la porte s’ouvre de nouveau pour laisser entrer les nouveaux morts de chaque jour ; cependant, nous avons traversé lentement ces tombes modestes, dont la plus opulente est chargée d’une pierre.

1593. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — II. (Suite.) » pp. 346-370

Ils ont trouvé dans ces visites, au lieu de la morgue si ordinaire à la puissance, cette curiosité que donnent l’amour du bien public et le respect pour l’opinion nationale.

1594. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « De la tradition en littérature et dans quel sens il la faut entendre. Leçon d’ouverture à l’École normale » pp. 356-382

Leur parlant déjà comme à un peuple-roi, leur prouvant que, du moment qu’ils l’ont été une fois, ils ne peuvent reculer et sont condamnés à l’être toujours ou à ne plus être du tout, à n’espérer plus même, s’ils tombent, la condition ordinaire des cités sujettes, il professe, à leur usage, les plus fermes maximes publiques et politiques : « Être haï, être odieux dans le présent, ç’a été le lot de tous ceux qui ont aspiré à l’empire sur les autres ; mais quiconque encourt cet odieux pour de grandes choses, il prend le bon parti et il n’a pas à s’en repentir. » Et certes, si l’on entendait toujours le Périclès de Thucydide, ce Démosthènes non seulement en parole, mais en action, on ne permettrait plus aux Romains de se vanter, comme ils l’ont fait, d’avoir ajouté de la solidité au génie charmant des Grecs.

1595. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Ce qui suffisait strictement dans les conditions ordinaires les plus simples, une fois dépassé, ne se regagne pas, et dans cette vie de prolétaire au jour le jour, une fois grevé et obéré, on ne s’en tire plus.

1596. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres mêlées de Saint-Évremond »

Le couplet n’a rien que d’ordinaire : Ninon, passe tes jours en jeu ; Cours toujours où l’amour te porte ; Le prédicateur qui t’exhorte, S’il était auprès de ton feu.

1597. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SUE (Jean Cavalier). » pp. 87-117

S’il n’a pas d’ordinaire composé avec une concentration très-profonde, il a presque toujours fait avec soin.

1598. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

On veut suivre dans la continuité de son tissu, on veut toucher de la main, en quelque sorte, l’étoffe et la qualité de ce génie dont on a déjà vu le plus brillant échantillon, mais un échantillon, après tout, qui tient étroitement au reste, et n’en est d’ordinaire qu’un accident mieux venu.

1599. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

S’il a perdu à ce manque d’émotions tendres quelque délicatesse et finesse de jugement, il y a gagné du temps pour l’étude131, une plus grande capacité pour ces impressions moyennes qui sont l’ordinaire du critique, et l’ignorance de ces dégoûts qui ont fait dire à La Fontaine : Les délicats sont malheureux.

1600. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre I »

Vienne une gelée, une grêle, une inondation, toute une province ne sait plus comment faire pour subsister jusqu’à l’année suivante ; en beaucoup d’endroits il suffit de l’hiver, même ordinaire, pour amener la détresse.

1601. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

Moins d’un an après cet exil, Côme fut rappelé par l’inconstance ordinaire du peuple.

1602. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Dans la nuit de la mort de Laurent, une étoile plus grande et plus brillante qu’à l’ordinaire, se levant sur le faubourg de la ville dans lequel mourut Laurent, parut perdre peu à peu de son éclat et s’éteindre au moment même où l’on apprit qu’il venait de quitter la vie.

1603. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

La morale souvent, comme on peut aisément le comprendre, tournera en satire, et la description parfois fort vive du monde réel, des occupations et inclinations ordinaires des hommes, viendra donner une saveur toute particulière aux enseignements moraux.

1604. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Ainsi montrait-il son « pas naturel et ordinaire, aussi détraqué qu’il est » ; comme, de plus, « la relation et la conformité ne se trouvent point en telles âmes que les nôtres », comme nos actions, toujours « doubles, bigarrées, et à divers lustres », ne se peuvent « attacher les unes aux autres », la vérité voulait qu’il « prononçât sa sentence par articles décousus232 ».

1605. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre IV. La fin de l’âge classique — Chapitre II. La Bruyère et Fénelon »

C’est une garantie d’impartialité ordinaire, de vérité moyenne : il évite ainsi les grandes erreurs et les grandes découvertes.

1606. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. Le théâtre romantique »

Fournisseur ordinaire du Gymnase depuis sa fondation (1820), applaudi souvent à la Comédie-Française, il offre à la bourgeoisie exactement le plaisir et l’idéal qu’elle réclame : elle se reconnaît dans ses pièces, où rien ne déroute son intelligence.

1607. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Ferdinand Fabre  »

Ils sont, à l’ordinaire, infiniment polis ; car la politesse leur est recommandée dès le séminaire comme une vertu chrétienne et comme une arme défensive : elle est pour eux une des formes de la charité, une expression de leur respect pour les âmes, et un rempart où ils se retranchent contre les familiarités et les indiscrétions.

1608. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Victor Hugo, Toute la Lyre. »

Et puis, je l’ai tant lu jadis, je me suis si bien pénétré de ses habitudes de style, de ses images ordinaires, de son vocabulaire, de son rythme, de ses rimes, de ses manies, que, lisant un nouveau volume de lui, il m’a semblé que je le relisais.

1609. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

La pièce est intitulée le Privilégié ; je traduis ainsi le nom de Kromesnik, qui avait été donné aux gardes du tsar Ivan IV, ministres ordinaires de ses cruautés.

1610. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Que de louanges ainsi renchéries Voltaire ne s’est-il pas attirées, en se dérobant à des louanges ordinaires !

1611. (1890) L’avenir de la science « XXII » pp. 441-461

S’il était vrai, il serait préférable à l’amour ordinaire de Clitandre et d’Henriette.

1612. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Discours préliminaire, au lecteur citoyen. » pp. 55-106

Helvetius naquit à Paris, qu’il y fut élevé, qu’il y fit, tout le temps de sa vie, son séjour ordinaire, & l’Auteur de l’Ouvrage posthume déclare n’y avoir séjourné qu’un certain nombre d’années.

1613. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — Y. — article » pp. 529-575

Autrefois l'ignorance & la barbarie en étoient les sources ordinaires ; mais alors, comme nous l'avons remarqué ailleurs, se montrant plus à découvert, ils étoient moins dangereux.

1614. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XV »

Les apparences crient contre elle : dix-sept cent mille francs soldés pour une femme, cela se paye d’ordinaire en valeur reçue sur le marché de l’amour.

1615. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Bussy-Rabutin. » pp. 360-383

Je ne puis m’empêcher de le donner ici presque en entier, après celui de Condé, qu’on vient de lire : Henri de La Tour, vicomte de Turenne, était d’une taille médiocre, large d’épaules, lesquelles il haussait de temps en temps en parlant ; ce sont de ces mauvaises habitudes que l’on prend d’ordinaire, faute de contenance assurée.

1616. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — I. (Dialogues inédits.) » pp. 1-28

Il tira de sa poche une lettre de son père, qu’il composa sur-le-champ conformément à ses vues, la commenta, et conversa avec la même netteté que s’il eut fait une visite ordinaire.

1617. (1913) La Fontaine « IV. Les contes »

Voilà une idée qui n’est pas ordinaire, qui n’est pas très fréquente, je crois avant La Fontaine, qui est touchante, il faut le reconnaître, quelque austérité que l’on puisse affecter.

1618. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IX. Eugénie de Guérin »

À trois heures, elle revenait à sa chambre où d’ordinaire elle lisait la Visite au Saint Sacrement, par saint Alphonse de Liguori, ou bien la vie du saint du jour.

1619. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Quelques romans récents, comme le Désastre, ont élargi les cadres ordinaires et indiquent une sorte d’aspiration vers le drame national et l’épopée.

1620. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre I. La conscience et la vie »

A quel signe reconnaissons-nous d’ordinaire l’homme d’action, celui qui laisse sa marque sur les événements auxquels la fortune le mêle ?

1621. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

Non seulement ils lui permettaient de sortir de la famille où il était sévèrement enfermé, mais encore de dépasser son rang ordinaire, et, nommé trésorier ou président, de dominer, pour quelques instants au moins, des hommes libres.

1622. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre premier. »

Car ce poëte, ce musicien, est un sage, un disciple immédiat de l’école philosophique la plus pure avant Socrate et Platon, de cette école pythagoricienne qui, mêlant l’ardeur ascétique à la science, inspira les premiers martyrs de la vérité morale et forma plus tard le héros le plus honnête homme de l’antiquité, Épaminondas, élève du chanteur Olympiodore et du philosophe Lysis, en même temps que le plus agile coureur de la lice thébaine8, Épaminondas, grand homme, sans les vices trop fréquents des héros antiques et les défauts ordinaires des hommes.

1623. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre III. »

Ce mode adouci de la poésie lyrique n’en admet pas moins ces rapides passages, ces changements de sujet ou d’émotion que d’ordinaire on attribue seulement à l’ardeur de l’enthousiasme.

1624. (1888) Poètes et romanciers

C’est l’ordinaire effet de l’imagination. […] Le petit livre des Destins, publié il y a six ans, sort déjà du cadre ordinaire des poésies de M.  […] Elle est l’opinion réfléchie, l’impression du second moment, celle qui, d’ordinaire, reste et a le dernier mot dans les questions d’art et de goût. […] C’est là l’ordinaire dénouement de ses agréables scènes, dénouement à coup sûr très légitime et très conjugal, bien qu’on puisse dire, si insister n’était pas déjà trop, que ces réconciliations, pour discrètes qu’elles soient, souffrent un peu de voir divulguer leur pudique mystère. […] L’amour n’y perd pas ses droits ; mais d’ordinaire il ne va guère au-delà d’une aventure furtive du cœur et d’une émotion passagère qui, victorieuse ou réprimée, n’a pas le temps de devenir une passion.

1625. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Ce n’est pourtant pas l’effet ordinaire. […] On me dira : « Pugnol n’est pas un forçat ordinaire. » Et, en effet, M.  […] Et quand on y songe, ces « cas particuliers », ces « miracles », ne sont presque pas plus étranges que le train ordinaire et normal des choses. […] « Voilà un trait qui n’est pas commun : dans le train ordinaire des choses, le frère trouverait le désespoir de sa sœur assez naturel. […] J’ai été médiocre, ordinaire, inutile.

1626. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Il ne s’intéressait nullement ni au cours régulier des choses, ni au train ordinaire des hommes. […] Zola, qui est obscène avec effarement et qui voit le train ordinaire de l’amour sous un aspect apocalyptique. […] Du moins trouvons-nous çà et là dans ses sermons de jolis raccourcis de contes, dont les personnages ordinaires sont le diable et la femme. […] C’est l’effet ordinaire des connaissances diverses chez un esprit facile. […] M. de Gourmont, assez dur d’ordinaire pour les chrétiens néo-classiques, accorde pourtant une vive admiration à Prudence, qui la mérite, en effet, par l’abondance fleurie de son imagination.

1627. (1890) Nouvelles questions de critique

Il ne paraît pas, à la vérité, que les Delille et les Thomas, d’ordinaire, laissent derrière eux grand’chose d’inimprimé. […] Le Dictionnaire invoque ailleurs l’autorité de Calvin, dans son Institution chrétienne, et il se réfère, comme d’ordinaire, en l’invoquant, l’édition de 1561. […] C’est qu’il y a peut-être une part de vérité dans leurs jugements ; et lorsque, par exemple, ils reprochent à Buffon la magnificence et la pompe ordinaire de son style, on est tenté de croire qu’ils n’ont pas toujours tort. […] Si nous ne mesurions pas les choses à la capacité de notre imagination, si nous épurions nos idées de tout ce que nos sens y mêlent de leur faiblesse et de leur impuissance, en un mot, si nous nous transportions à la source même des choses, nous ne verrions plus rien que de nécessaire, et, conséquemment, que d’assez ordinaire dans l’accomplissement de la loi. […] Et, si les situations que Racine, et surtout Corneille, empruntaient volontiers à l’histoire, ne sont pas toujours « ordinaires », le sont-elles donc, celles qu’ont inventées l’auteur lui-même d’Hernani, ou celui de Tragaldabas ?

1628. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Le plus violent chagrin semble un mal ordinaire ; quand la cloche de la mort sonne, on demande à peine pour qui ? […] Si ce n’est pas là la vérité, convenons du moins qu’un esprit qui sait produire de pareilles raisons n’est pas un esprit ordinaire. […] Les ruines les environnent, et ils passent devant elles sans éprouver seulement la curiosité ordinaire à un voyageur : ils ont déjà oublié ces temps d’une éternelle mémoire ! […] Est-il bon qu’un monarque donne, comme un homme ordinaire, la mesure de son esprit, et réclame l’indulgence de ses sujets dans une préface ? […] Quant à cette autre phrase, un auteur doit être pris dans les rangs ordinaires de la société , j’en demande pardon à mon censeur ; mais cette phrase n’implique pas le sens qu’il y trouve.

1629. (1896) Les idées en marche pp. 1-385

Il devient, de narrateur, un profond philosophe puisqu’il a déployé en nous tout ce dont notre pensée est capable, tout-ce que nous n’entrevoyons pas d’ordinaire. […] L’homme de génie est un grossissement de l’homme ordinaire. […] L’esprit y est transposé avec le langage, phénomène peut-être unique, car les poètes tirés de leur idiome sont à l’ordinaire méduses sorties des flots. […] D’ordinaire ce sont les yeux qui voyagent. […] Les associations ordinaires sont ici brisées, mais un axe très fort et solide empêche l’incohérence.

1630. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Ces guerres entre les peuplades syriennes du xie  siècle avant Jésus-Christ se terminent d’ordinaire par des carnages de Peaux-Rouges, par des massacres sans merci. […] Comme il arrive d’ordinaire aux grands écrivains, la popularité est venue à lui. […] Sa parole, d’ordinaire si abondante et si pleine, si féconde en faits précis, en souvenirs personnels, en aperçus rapides sur les hommes et sur les choses, était devenue lente, difficile, découragée. […] D’ordinaire les penseurs sont tentés de ne point voir ; et les voyants pensent peu. […] D’ordinaire, lorsqu’on sort des grandes écoles du gouvernement, après dix années d’internat et plusieurs « vétérances » en rhétorique ou en mathématiques spéciales, on ignore qu’il y a, au monde, des arbres, des pierres, de l’eau, de l’herbe, et que tout cela est délicieux à regarder.

1631. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Les influences nuisibles n’ont d’ordinaire qu’un temps ; les influences bienfaisantes sont éternelles. […] Il y voyait entrer avec lui presque tous ses rivaux des concours de 1847 et de 1848 : About, reçu second, Sarcey, Libert, Suckau, Albert, Merlet, Lamm, Ordinaire, Barnave, etc. […] De même l’Essai sur les sensations sous sa première forme partait du moi, de l’εντελεχεια pour aboutir à l’impression sensible ; dans l’Intelligence, Taine partira des sensations les plus ordinaires pour s’élever par des généralisations de plus en plus étendues à la loi et à la cause, et enfin jusqu’au point où l’être même s’identifie avec l’idée. […] À l’époque de la maturité de son talent, entre 1830 et 1840, il ne vivait que dans ses ouvrages, il leur donnait tout ce que son esprit et son cœur avaient de chaleur et d’énergie, à ce point qu’il semblait indifférent au monde, aux hommes, aux personnes même qui lui tenaient de plus près, et qu’il pouvait passer dans la vie ordinaire pour froid et insensible. […] Les Français, d’ordinaire, n’ont rien de l’enfant ; d’autres peuples au contraire, les races germaniques par exemple, en conservent toujours quelque chose ; aussi gardent-ils bien plus la fraîcheur des sentiments, la jeunesse du cœur et l’intelligence des choses simples qui sont si souvent en même temps les choses profondes.

1632. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

Après les trois coups de trompette ordinaires, le greffier criminel de Lyon, étant à cheval assez près de l’échafaud, lut l’arrêt de mort que ni l’un ni l’autre n’écoutèrent. […] la Raison est une puissance froide et lente qui nous lie peu à peu par les idées qu’elle apporte l’une après l’autre, comme les liens subtils, déliés et innombrables de Gulliver ; elle persuade, elle impose quand le cours ordinaire des jours n’est que peu troublé ; mais le Désespoir véritable est une puissance dévorante, irrésistible, hors des raisonnements, et qui commence par tuer la pensée d’un seul coup.

1633. (1899) Préfaces. — Les poètes contemporains. — Discours sur Victor Hugo pp. 215-309

La critique, d’ordinaire si élogieuse, a rudement traité ce poème, et le public lettré ne l’a point lu ou l’a condamné. […] Il est entendu que ceci s’adresse infiniment moins à Auguste Barbier, que nul n’admire plus que moi, là où il est admirable, qu’aux juges ordinaires, et peu informés, de la poésie contemporaine.

1634. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

De ces natures le sort peut faire à son gré des hommes obscurs ou des hommes célèbres, mais on peut le défier de faire des hommes ordinaires. […] Il n’en sortait ni serviteur, ni bruit, ni fumée, ni même l’aboiement d’un chien fidèle, ou ce gloussement de poules au soleil, signes ordinaires d’une maison habitée.

1635. (1888) Études sur le XIXe siècle

Cette funeste disposition d’esprit qui le poussait à déchirer « en toute occasion le manteau dont se couvre l’hypocrite cruauté du destin », à dépouiller les choses de leurs apparences pour en découvrir la laide nudité, à regarder en face l’idée de la douleur sans se laisser distraire par aucun des mille objets qui aident les hommes ordinaires à fuir ce spectacle, cette irrésistible disposition à l’analyse a donc été en même temps pour lui une cause de lâcheté physique et d’héroïsme moral. […] Je ne prétendrai pas que leur séparation ne s’est pas opérée d’une manière naturelle, encore moins blâmerai-je l’exercice de l’une ou de l’autre ; mais je regrette que cette réparation soit devenue si complète que l’on ne pense même plus à réunir les deux arts, ou que, si l’on y pense encore, ce soit pour réduire l’un des deux au rôle d’auxiliaire inférieur de l’autre, sans viser à un effet commun auquel chacun contribuerait également. » Et Herder, dans la Causerie sur Alceste : « Si le musicien ordinaire qui met orgueilleusement la poésie au service de son art, descendait de ses hauteurs, il s’appliquerait, autant du moins que le permet le goût de la nation pour laquelle il compose, à traduire dans sa musique les sentiments des personnages, l’action du drame et le sens des mots. […] Le caractère de la scène et le ton de la légende contribuent ensemble à jeter l’esprit dans cet état de rêve qui le porte bientôt jusqu’à la pleine clairvoyance, et l’esprit découvre alors un nouvel enchaînement des phénomènes du monde, que ses yeux ne pouvaient apercevoir dans l’état de veille ordinaire : de là lui venait cette inquiétude qui le portait à demander sans cesse “pourquoi ?” […] La répétition, l’antithèse et la métaphore sont des moyens très ordinaires, dont on divulgue la recette dans tous les lycées et que les plus mauvais poètes pratiquent avec succès. […] » Et Victor Hugo joue avec ces grands mots comme avec des hochets, les réduit en images qui correspondent à une notion des plus ordinaires, les sème éperdument dans son œuvre, se sert de leur prestige pour nous tenir en arrêt.

1636. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Dans À vau-l’eau, un employé de mairie, écœuré des fromages au savon de Marseille, des carnes fétides et des litharges coupées d’eau de pompe qu’on lui sert à son restaurant ordinaire, le quitte, tâte de restaurants nouveaux, y trouve la nourriture un peu plus détestable, et de lassitude conclut qu’il vaut encore mieux rentrera son ancienne « gargote ». […] Vous en connaissez le sujet : une amitié (non de ces amitiés « ordinaires et coutumières » qui ne sont, comme dit Montaigne, que « superficielles accointances », mais cette « souveraine et maîtresse amitié » où atteignent du premier bond les grands cœurs, comme si ces cœurs, qui se cherchaient dans l’inquiétude avant de s’être trouvés, obéissaient à je ne sais quelle « force inexplicable et fatale, médiatrice de leur union ») et cette amitié traversée par un amour de femme, les petits ongles cruels lacérant à plaisir ces cœurs doux et graves, la déchirure des cœurs qui s’élargit, et rien pour la fermer, sinon la mort. […] Ses incorrections, ses négligences d’abord ; il se fera un cahier de ses expressions et de ses tours les plus ordinaires ; il étudiera méticuleusement jusqu’aux places des que, des si, des virgules ; il s’embrouillera à plaisir d’incidentes ; il ne risquera de métaphores qu’autant qu’elles auront déjà servi aux Mémoires ; et ainsi pendant trois cents pages. […] , ni passer le seuil où des torches consument, dans une haute garde, tous rêves antérieurs à leur éclat, répercutant en pourpre dans la nue l’universel sacre de l’intrus royal qui n’aura eu qu’à venir : j’attendis, pour l’être, que lent et repris du mouvement ordinaire, se réduisit à ses proportions d’une chimère puérile emportant du monde quelque part, le train qui m’avait là déposé seul. » 52.

1637. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1871 » pp. 180-366

La portion de cheval, pesant trente-trois centigrammes, y compris les os, donnée pour la nourriture de deux personnes, pendant trois jours, c’est le déjeuner d’un appétit ordinaire. […] Tout le monde a l’air de vivre de sa vie ordinaire, et des cafetiers font remettre, avec le plus admirable sang-froid, les glaces cassées par les détonations d’obus. […] Il me dit : « Vous avez été frappé, moi aussi… mais moi, ce n’est pas ordinaire, deux coups de foudre dans une seule vie !  […] » Sous ces diverses impressions de tristesse, d’inquiétude, je m’en vais, ce soir, à mon observatoire ordinaire : la place de la Concorde.

1638. (1932) Les idées politiques de la France

Un mouvement intellectuel jeune catholique ne trouve d’ordinaire la voie libre que s’il emploie son esprit inventeur à réhabiliter paradoxalement un passe qu’on croyait mort : voyez le néo-thomisme. […] » Telle fut la pensée ordinaire de Robespierre. […] La Révolution pose le droit de l’homme à se gouverner dans une société égalitaire, l’Église son rôle et son devoir à gouverner dans une société inégale et hiérarchisée, et si le premier droit s’entend au temporel, le second au spirituel, l’expérience nous prouve qu’une endosmose pratique de ces deux sens est inévitable et ordinaire. […] Le groupe parlementaire socialiste est, ne l’oublions pas, le délégué ordinaire, et presque la boîte aux lettres des syndicats de fonctionnaires, particulièrement du syndicat national des Instituteurs.

1639. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Non qu’elle affectât telle ou telle forme excentrique ou simplement de plus mauvais goût que d’ordinaire toutes les pendules. […] Bien qu’étant, avec la généralité des gens ordinaires, louangeur des temps passés et regretteur des premières années de ma vie, je n’ai pu m’empêcher, altesse, d’aujourd’hui envier en quelque sorte mon bonheur actuel, et de m’en féliciter singulièrement : le même toit nous réunit ; et quel toit ! […] De la taille des plus grands, entre les écrivains de premier ordre, il a parfois sur eux ce quasi avantage et cette presque infériorité de se voir compris, mal à la vérité dans les trois quarts des cas, et c’est heureux et honorable, par des lecteurs d’ordinaire rebelles à telles œuvres de valeur exceptionnelle en art et en philosophie. […] Mais quelques esprits délicats de nos jours, heurtés par le côté bassement matériel de l’amour, par le prosaïsme des rapports journaliers, frappés de l’incomplet des formes féminines, du manque d’esthétique de leur amitié toujours peu sûre, ont jugé que la passion ordinaire ne pouvait jamais atteindre à ce haut point de désintéressement où se joue l’amitié entre hommes.

1640. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

Si j’avais à parler de Tartuffe, en le considérant, au rebours de ce qu’on fait d’ordinaire, comme une œuvre dirigée contre les dévots quels qu’ils soient, et contre la religion en général, je vous dirais bien des choses dont je n’ai pas à m’ouvrir aujourd’hui » ; Cette conférence sur Tartuffe, nous l’attendons, et je crois que M.  […] Ariste. — En ce cas, il ne s’agit donc que de finir le billet par un compliment ordinaire, et de l’envoyer de votre part ? […] Et il y joint la manie d’hyperbole qui est ordinaire à sa profession. […] Les cas d’hypocrisie humaine qu’il a réunis sont, en effet, très ordinaires, assez inoffensifs au fond, et ce ne sont pas de très méchants hommes que ces faux bonshommes-là. […] Elle perd son âme par le sentiment qui d’ordinaire sauve le mieux les âmes et les élève le plus en dignité.

1641. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

Il écrivait, dans sa dédicace au duc d’Alincourt : En m’écartant de la route ordinaire, Je me paraissais téméraire. […] Je dirai presque que c’est à la portée de nous tous, et que les inventions de cette sorte ont été souvent le fait d’esprits assez ordinaires. […] Dorante survient jaloux et furieux, comme à son ordinaire. « Hé ! […] Mais voyez que de vertus suppose d’ordinaire cette manie inoffensive. […] Ici, Fray Marcos, qui n’était auparavant qu’un assez ordinaire inquisiteur de drame romantique, se révèle grand connaisseur d’âmes, admirable de finesse hardie et de pénétration scélérate.

1642. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

La pauvre femme n’est plus, et sa fille s’est assise près d’elle pour la veiller ; l’abbé qui a donné l’extrême-onction vient de partir : Alors le vicomte, de sa voix ordinaire, demanda : « Vas-tu prendre quelque chose ?  […] Ils se voyaient récompensés, lui de son innocence, elle de la réserve que sa raison lui avait imposée, par une impression aussi délicieuse que rare ; ils jouissaient de l’intimité de cœur qui ne s’obtient d’ordinaire qu’après une longue possession, et ils en jouissaient dans toute la fraîcheur du désir timide. […] Ce n’étaient pas les gommeux ordinaires. […] Sœur Saint-Maurice fit ce qu’elle faisait d’ordinaire : elle se mit à genoux près du lit et demanda au ciel, qu’il ne voulait pas implorer lui-même, la grâce de ce grand coupable. […] N’eût été ce point capital à décider, le cœur meurtri, l’âme déchirée, il se fût presque indigné de se lever comme à l’ordinaire, ce matin-là, dans notre monde dégradé, si plein d’amertumes et de déceptions.

1643. (1927) Approximations. Deuxième série

D’ordinaire, une constatation de ce genre apporte avec elle la tranquillité qui naît de la seule certitude qu’on puisse connaître en pareille matière, la certitude que l’on continue à sentir ce que l’on avait déjà senti : que l’on ait tort ou raison de sentir ainsi est une tout autre question et reste hors de cause. […] À l’ordinaire le don de l’historien se présente isolé, — et aussi bien celui du biographe : un Albert Sorel d’une part, un Romain Rolland, un Daniel Halévy de l’autre déploient des qualités qui ne s’apparient qu’exceptionnellement. […] Il semble que dans la composition de son être aient été omis tous les réflexes défensifs inséparables d’ordinaire de l’être même. […] Profondeur et logique, — lorsque ces deux qualités coexistent au sein d’un même être, nous les voyons tantôt opérer chacune pour son compte et sur des plans qui d’ordinaire ne se coupent pas ; tantôt, et plus souvent, tirer chacune de son côté et se contrarier dans leur travail. […] combien me semble abject, plat, fatigant, improfitable tout l’ordinaire de cette vie », Hamlet, I, 2. — Traduction inédite d’André Gide. — « Que le cœur de l’homme est creux et plein d’ordure ! 

1644. (1906) L’anticléricalisme pp. 2-381

Mais, pour y revenir, c’est précisément ce serment que les Français, d’ordinaire, même quand ils ne l’ont pas fait, tiennent toujours. […] que ceux qu’il a attaqués d’ordinaire ; plus respectable aussi ; et pourquoi a-t-il rendu un homme qui se trompe sur le choix d’un directeur, car il n’y a que cela, aussi ridicule et de temps en temps aussi odieux et plus odieux que l’avare, le bourgeois gentilhomme et autres ? […] Vous ne sortez du monde que pour y mieux rentrer ; vous ne renoncez aux charges et aux conditions ordinaires de la vie de vos concitoyens que pour prendre aussitôt par l’éducation la direction de la société de demain, sinon de celle d’aujourd’hui. […] Le jour où l’État aura cessé de subventionner les Églises et de leur communiquer la force qu’elles tirent de leur union avec lui, il n’aurait plus à les considérer que comme des associations ordinaires soumises à la loi commune. […] De son côté, le rédacteur ordinaire de la Dépêche de Toulouse, avec les mêmes arguments et avec d’autres, prenant plus précisément à partie M. 

1645. (1923) Au service de la déesse

Encore faut-il le séparer des moralistes ordinaires. […] Les Conjectures prouvent assez qu’il possédait, mieux qu’un lettré ordinaire, les grands et les petits auteurs de l’antiquité. […] Claudel un peu clair, un peu analogue à du français ordinaire, il le cite bien volontiers. […] Le ton le plus ordinaire de ses ouvrages est le même qu’il définit comme celui de Jacques dans l’École des indifférents : « son ironie, son lyrisme et son humour commodes ». […] Et c’est l’infirmité d’un chacun, son infirmité naturelle, rendue beaucoup plus dangereuse par l’ignorance aujourd’hui ordinaire.

1646. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

. — « Un jour, en effet, observe notre confrère Charles Maurras, le poète de l’Occident épousa ce fils du soleil, le docteur Mardrus, né au Caire d’une famille orientale. » Belle union, vraiment faite pour rajeunir le sang des races… que ne l’imite-t-on plus souvent dans l’ordinaire de la vie, où nous voyons des enfants de frères unis par le mariage et voués à faire souche de dégénérés ! […] Transposé dans le domaine exclusif du sentiment, il aura tôt fait d’y perdre cette brusque violence, cette impériosité, ce despotisme, qui d’ordinaire régissent les impulsions passionnelles. […] Il n’y faut voir qu’une conséquence de cette personnalité au sujet de laquelle Fénelon observe : « Un défaut bien plus ordinaire chez les filles, c’est celui de se passionner même pour les choses les plus indifférentes.

1647. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

Il était, comme à son ordinaire, plein de gaieté et de vivacité.

1648. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Comme à l’ordinaire, je cache tout, ne pouvant obéir qu’à mon instinct d’aimer. — Si j’étais libre de suivre celui de mère, je changerais tout le régime adopté, et dès longtemps, je crois, j’aurais rétabli l’harmonie dans ce corps chéri, qui semble se dissoudre d’une maigreur désespérante, d’une faim étrange et jamais contentée, malgré quatre repas abondants et un bon sommeil souvent.

1649. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

Marty-Laveaux, à mettre en regard de ce choix complet, portant sur toute l’œuvre de Marot, et auquel a présidé un goût supérieur, il n’y aurait pas, pour un lecteur ordinaire et qui tient surtout à l’agrément, de quoi hésiter et balancer.

1650. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

C’est que presque toujours les personnages qu’on s’est habitué à considérer d’après des types fantastiques et de convention, ou d’après les statues historiques qu’on leur a dressées, s’y montrent à nous sous un autre jour plus intérieur et souvent satisfaisant, meilleurs d’ordinaire que leur renommée, bons, ou tâchant par moments de l’être, avec leurs doutes, leurs variations, leurs infirmités, étant des nôtres à beaucoup d’égards, et, comme tels, des moules à imperfections et à sentiments contraires et sincères.

1651. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Bruyère »

Quoique ce soit l’homme et la société qu’il exprime surtout, le pittoresque, chez La Bruyère, s’applique déjà aux choses de la nature plus qu’il n’était ordinaire de son temps.

1652. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la loi sur la presse »

Sous la Restauration, le 7 août 1827, sous une juridiction pareille à celle qu’on maintient aujourd’hui, on a vu comparaître devant le tribunal de police correctionnelle un homme vénérable, un homme de bien, un philosophe éminent, M. de Sénancour, auteur d’un Résumé de l’histoire des traditions morales et religieuses ; on l’a vu, pour quelques phrases qui ne semblaient pas assez respectueuses envers les religions positives, accusé avec véhémence par un avocat du roi qui ne croyait que remplir son devoir ; on l’a vu, comme de juste, condamné par le tribunal : car, d’ordinaire et provisoirement, en pareil cas, la police correctionnelle commence par condamner.

1653. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) » pp. 5-56

La solitude rendit son esprit indépendant, effet ordinaire et naturel d’une méditation solitaire.

1654. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

X Pendant son ambassade de Rome, peu de temps avant la révolution de 1830, M. de Chateaubriand, triomphant de l’élection d’un pape faite sous ses auspices, heureux en fortune, heureux en séjour, heureux en sentiment pour des personnes innomées, se prend, comme à l’ordinaire des grandes âmes, d’un fastidieux dégoût pour tant de félicités, et continue à écrire ses Lamentations très déplacées à son ancien secrétaire de Paris.

1655. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIVe entretien. Mélanges »

Elle ne vint point quand j’entrai me flairer et me caresser gaiement, comme d’ordinaire, mais en regardant pleurer sa maîtresse à côté du berceau vide de son enfant, elle posa la tête sur les genoux de la pauvre mère, et en contemplant le berceau, elle se mit elle-même à verser de grosses larmes qui mouillèrent mes mains étonnées.

1656. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Adoptez pour votre nourriture ordinaire des mets simples et communs, et faites beaucoup d’exercice, parce qu’on est bientôt exposé à des infirmités, dans l’état que vous avez embrassé, si l’on ne sait pas prendre les précautions convenables.

1657. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mendès, Catulle (1841-1909) »

Théodore de Banville Quant à l’idée du drame Justice, elle a la gloire et aussi le tort, si je la comprends bien, d’être une idée purement abstraite, que l’auteur a traduite matériellement, cela va sans dire, sans quoi il n’eut pas fait une pièce de théâtre, mais qui, néanmoins, force le spectateur à lever les yeux un peu plus haut que le niveau ordinaire de la vie.

1658. (1889) Les premières armes du symbolisme pp. 5-50

Un journal, qui reçoit d’ordinaire les manifestes des princes, vient de publier la profession de foi des symbolistes.

1659. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

Je reconnais encore le grand écrivain de tous les temps dans cette critique de certains auteurs de son siècle : « Pourveu, dit-il, qu’ils se gorgiassent en la nouvelleté, il ne leur chault de l’efficace ; pour saisir un nouveau mot, ils quittent l’ordinaire, souvent plus fort et plus nerveux168. » Mais voici qui est de l’écrivain du xvie  siècle « Le langage françois n’est pas maniant et vigoureux suffisamment ; il succombe ordinairement à une puissante conception ; si vous allez tendu, vous sentez souvent qu’il languit soubs vous et fleschit ; et qu’à son default le latin se presente au secours, et le grec à d’aultres. » Cette crainte d’en dire trop peu dans le discours, de laisser quelque chose de reste, et que ce reste soit le plus important, est bien d’un siècle plus affamé de connaissances que de vérité.

1660. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre dixième. »

Pour une description, pour un tableau, pour un récit où les événements n’ont pas à se presser, c’est d’ordinaire le grand vers de douze syllabes.

1661. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Il est ordinaire de qualifier l’ironie d’inféconde et de l’opposer à l’activité.

1662. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « II »

Alors sera atteint le but que Wagner disait à Berlioz, lequel n’y a rien compris : « Mon but était de montrer la possibilité de produire une œuvre d’art, dans laquelle ce que l’esprit humain peut concevoir de plus profond et de plus élevé fût accessible à l’intelligence la plus ordinaire, sans qu’il fut besoin de la réflexion ni des explications de la critique et c’est cet essai que j’intitulai l’œuvre d’art de l’avenir.

1663. (1863) Le réalisme épique dans le roman pp. 840-860

Cette conception logique, cette vigueur de trait, qualités si rares parmi les coryphées de la littérature courante, ne pouvaient manquer de produire quelque impression ; des juges assez peu sensibles d’ordinaire à certaines qualités de la forme ont été éblouis de cette rencontre en plein roman réaliste, et un hégélien fort sceptique sur les vérités les plus claires a déclaré sans hésiter que Madame Bovary était une œuvre classique.

1664. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XII, les sept chefs devant Thèbes. »

Le bas-relief, image et analogie ordinaire des spectacles de la poésie hellénique, fait place cette fois à ces tapisseries de haute lice où s’entre-heurtent, sur leurs palefrois caparaçonnés, des paladins masqués de leurs cribles, où s’alignent, épaule contre épaule, des chevaliers aux profils barrés par les longues lances qu’ils tiennent en arrêt.

1665. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1856 » pp. 121-159

Cauchemar du gendre, la nuit, voyant des milliers de têtes dont le nez est ainsi tourmenté par des mains au bout de bras n’appartenant à personne. » Octobre Mlle *** (Renée Mauperin), la cordialité et la loyauté d’un homme alliées à des grâces de jeune fille ; la raison mûrie et le cœur frais ; un esprit enlevé, on ne sait comment, du milieu bourgeois où il a été élevé, et tout plein d’aspirations à la grandeur morale, au dévouement, au sacrifice ; un appétit des choses les plus délicates de l’intelligence et de l’art ; le mépris de ce qui est d’ordinaire la pensée et l’entretien de la femme.

1666. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

Il nous montre ses Chardin et ses Prud’hon, — et nous qui avons fait le vœu de ne jamais acheter de tableaux, — nous revenons amoureux de deux tableaux, il est vrai que ce sont deux esquisses : l’esquisse des Tours de cartes de Chardin, une merveille de couleur gaie et papillotante qu’on ne rencontre pas d’ordinaire chez lui, et le portrait de Mlle Mayer par Prud’hon, le portrait que le peintre eut jusqu’à sa mort dans son alcôve, — un portrait où l’on dirait le sourire de la Joconde dans l’ovale ramassé d’une nymphe de Clodion.

1667. (1899) Esthétique de la langue française « La métaphore  »

L’idée de cochon pour nommer le cloporte a eu à lutter avec l’idée d’âne, qui n’est pas plus explicable par les logiques ordinaires : l’oniscus latin est l’[mot en caractères grecs] (petit âne), mais les paysans romains connaissaient aussi le mot asellus, et l’allemand assel doit sans doute être rapproché de esel (âne).

1668. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

& le Ministre Jurieu a pensé sensément contre son ordinaire, en regardant cette contestation comme une bagatelle.”

1669. (1913) La Fontaine « VII. Ses fables. »

Et puis le renard et le loup, qui ont le même caractère, ce qui est absolument contraire aux habitudes ordinaires de La Fontaine ; le renard flattant le souverain, lui disant qu’il ne peut pas se tromper, qu’il ne se trompe jamais, que ses cruautés même sont des honneurs qu’il fait aux hommes : Vous leur fîtes, seigneur, En les croquant beaucoup d’honneur.

1670. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

Seulement, par exception, par grande exception à l’usage sur le flot coulant de cette pensée en détrempe surnagent, çà et là, de ces énormités comme les bons sophistes des sociétés en décadence en lâchent quelquefois au nez des peuples blasés, et ennuyés auxquels ils ont affaire, pour les tirer de leur engourdissement… L’auteur des Dialogues philosophiques d’ordinaire, le courage de la sottise et la bravoure de la folie impudente.

1671. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Michelet » pp. 167-205

Quoiqu’il ait voulu, — nous dit-il, à la fin de son ouvrage, sentant bien où en est la faiblesse, — quoiqu’il ait voulu opposer « la dame cultivée (sic) de La Femme à la simple femme de L’Amour », et que par là il se soit placé dans des conditions de nuances inappréciables au gros des imaginations qui, d’ordinaire, les méprisent, il n’a pas su pourtant introduire entre ses deux livres les véritables différences qui font d’un même sujet deux œuvres distinctes, au moins par l’aperçu, par le détail, ou même par une manière inattendue de présenter la même pensée exprimée déjà.

1672. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

Et, véritablement, si effacés, si énervés que nous soyons dans les dernières passions qui nous restent, ce n’est pas encore un fait ordinaire — une habitude dans nos mœurs — que cette commisération conjugale qui fait reprendre à un mari sa femme l’âme pleine d’un homme qui n’est pas le premier, mais le second, qu’elle ait mis dans son cœur.

1673. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Il fait son entrée dans le monde à la façon ordinaire des enfants, en criant beaucoup.

1674. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Ainsi, dans les sociétés esclavagistes, les maîtres s’interdisent de prendre des esclaves parmi les gens de leur race, ou du moins, s’ils en prennent, ils ne les traitent pas comme les esclaves ordinaires.

1675. (1864) Le roman contemporain

L’évêque n’a rien perdu de son calme et de sa placidité ordinaire ; en voyant son hôte de la veille, il va droit à lui, et lui reproche doucement de n’avoir emporté que les couverts, lorsque les chandeliers d’argent étaient également à lui puisqu’il les lui avait donnés.

1676. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

L’esprit de parti, reste des habitudes de faction, est venu se mêler dans cet examen ; l’aigreur et les hostilités personnelles, fruits ordinaires de la controverse, ont pris la place du raisonnement. […] D’ordinaire, les écrivains se servent du doute pour détruire ce qui existe, afin d’y substituer leur opinion. […] Qu’un homme ordinaire, dont l’emploi n’est pas de réfléchir et d’observer, laisse divaguer au hasard ses opinions et ses jugements, qu’il se livre à chacune de ses impressions fugitives ; c’est un malheur, sans doute : il vaudrait mieux, pour le bonheur d’une nation, qu’il y régnât un esprit plus réservé, même quand on y devrait perdre un peu de grâce et de facilité. […] D’ordinaire, je ne sais quelle pudeur unie à la crainte de pas être entendu le porte à voiler ses secrets mouvements et à amortir ses impressions. […] D’ordinaire, pour plaire aux hommes et pour produire sur eux un effet plus sûr, on entre dans leur sentiment, ou du moins on cherche à ne point le blesser ; ainsi les prédicateurs du dix-huitième siècle ressentaient l’effet de l’esprit général.

1677. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

Je vois, messieurs, à cette phrase sur le ridicule, un nuage sombre se répandre sur vos physionomies d’ordinaire si épanouies. […] Je dirai donc aux poètes comiques, s’il en est qui aient un vrai talent et qui se sentent le pouvoir de nous faire rire : Attaquez les ridicules des classes ordinaires de la société ; n’y a-t-il donc que les sous-ministres de ridicules ?

1678. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

C’est de la prose qu’on ne trouve pas d’ordinaire au bas d’un journal, et qui vous fait plaisir à lire, au réveil. […] Huysmans porte sur lui le bonheur du succès de son roman : Là-Bas ; et ce bonheur chez l’auteur d’ordinaire contracté nerveusement sur lui-même, se traduit par le gonflement dilaté d’un dos de chat, quand il ronronne.

1679. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1892 » pp. 3-94

Causerie sur les ménages amis, où, nous tous, nous nous mettons à parler du charme du ménage Rodenbach : de l’homme à la conversation spirituellement animée, à la discussion littéraire passionnante, de la femme, aux rébellionnements à voix basse, aux flots de paroles irritées, qu’elle vous jette dans l’oreille, quand elle entend une chose qui n’est pas vraie, ou qui ne lui semble pas juste, et nous constatons le petit émoi chaleureux, qu’apporte dans la froideur ordinaire des salons, la vie nerveuse de ces deux aimables êtres. […] Dimanche 12 juillet Jean Lorrain nous disait, qu’aujourd’hui, le vin ordinaire des grandes cocottes, brûlées par les soupers aux écrevisses à la bordelaise et au champagne, était à la maison, une boisson faite de centaurée, de réglisse, et encore je ne sais quoi de rafraîchissant et de dépuratif.

1680. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre IV. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire. » pp. 87-211

On ne trouve dans ce livre ni la sécheresse ordinaire des abrégés, ni les détails ennuyeux des grandes histoires. […] C’est un tissu de rescrits, de déclarations & d’autres piéces, qui se font d’ordinaire au nom des Rois, quand ils sont en guerre.

1681. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IV : Sélection naturelle »

Mais qu’un amateur remarque chez un Pigeon un bec un peu plus court qu’à l’ordinaire, un autre amateur, au contraire, remarquera, chez un autre sujet, un bec d’une longueur en quelque chose inaccoutumée. […] Mais il faut bien reconnaître combien ce problème offre encore de sujets d’incertitude, quand on voit que, parmi les poissons, par exemple, quelques naturalistes placent au premier rang des genres tels que les Requins (Squales), parce qu’ils approchent le plus des reptiles ; tandis que d’autres considèrent au contraire que les poissons osseux ordinaires, de l’ordre des Téléostéens, sont les plus élevés de la série, parce qu’ils en réalisent mieux le type et qu’ils diffèrent plus complétement des autres classes des vertébrés.

1682. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Et sur son aire vaste et à demi nue, isolé au sommet de sa colline, séparé encore des cultures de la plaine par les rochers et les bois qui environnent ses flancs, Cassel ressemblait beaucoup plus à la Bibracte des Celtes indépendants qu’au Lyon des temps romains : lieu de marché ou lieu de foire à certains jours, alors bruyant et populeux, et demi-désert en temps ordinaire. […] C’est là que nous écrivions l’après-midi et le soir d’ordinaire, après nous être pénétrés, le matin, dans les musées et les églises, de pure beauté76. […] En ces moines retirés de la vie, toutes les passions des hommes ordinaires s’agitent ; et l’orgueil et l’ambition et l’envie et la méchanceté et la flatterie. […] Est-ce toujours en ces moments, est-ce même d’ordinaire ce que vous dites ou ce qu’on vous répond qui importe le plus ?

1683. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

L’imagination ordinaire est un souffle assez fort pour enlever d’un coup cette brillante poussière ou cette fleur qui revêt le fruit ; les plus heureux, parmi les littérateurs et les poètes qui ont, comme l’on dit, exploité la religion, n’ont guère fait autre chose ; mais ce demi-christianisme s’est trouvé faux comme toutes les demi-vérités, et cette composition, ce plaqué, destiné à imiter l’argent ou l’or, n’a pas trompé un instant les yeux exercés. […] Pour les réconciliations, comme pour les renonciations et les reniements, le chant du coq retentit d’ordinaire jusqu’à deux et trois fois à l’âme, avant d’achever d’avertir97. […] On reconnaît même ici quelque chose de plus que l’idée catholique ordinaire ; Port-Royal enchérit sur le système de l’Église, ou plutôt (car au fond cela n’est pas possible), il l’accentue avec énergie, il y revient souvent, il y ramène sans cesse. […] La direction catholique, dans sa mesure et dans sa forme ordinaire, ne prépare point encore à ce langage ; mais il ne faut pas prendre le change : ce qu’il y a d’extraordinaire ici, ce n’est pas tant l’attitude du directeur que la nature des idées qu’il exprime, et la prodigieuse hauteur spirituelle de ses principes et de ses injonctions. […] En d’autres langues, il faut que tout poète versifie ; rien ne l’en dispense ; et c’est pourquoi dans ces langues la prose poétique est inadmissible ; ce n’est peut-être qu’en français qu’elle a un rôle ; et plus elle prendra un caractère distinctif et irrécusable, moins courra de danger la prose ordinaire ; du reste qu’est la poésie versifiée, toutes choses égales d’ailleurs, sinon la poésie à son comble, la poésie armée de toutes pièces ?

1684. (1914) Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne pp. 59-331

Après cela, j’ai examiné quels étaient les premiers et les plus ordinaires effets qu’on pouvait déduire de ces causes ; et il me semble que par là j’ai trouvé des cieux, … Eh bien je dis : qu’importe. […] Et pour le chrétien de l’espèce la plus ordinaire Jésus est mort. […] Dans la physique ordinaire ou si l’on veut dans la première physique, dans la physique du poids et de l’hydrostatique l’accrochement et par lui la causation joue toujours. […] Il a été un saint ordinaire, le premier dans l’ordre, mais dans l’ordre. […] En ceci aussi Jésus a voulu être un saint ordinaire, un homme, un saint comme les autres parmi les autres.

1685. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Comment cette fierté l’immobilisa dans une douloureuse expectative, pendant la période la plus féconde d’ordinaire, la jeunesse, c’est ce que je voudrais montrer maintenant. […] C’est l’effet ordinaire du malheur sur une âme fière. […] Pour le même motif encore, il évite d’ordinaire les analyses poussées trop loin. […] Ceux de la littérature, plus inoffensifs, déploient, d’ordinaire, une aisance égale à renier leurs trop hardis débuts, quand ils deviennent, à leur tour, des personnages officiels et comblés d’honneurs. […] Les Mémoires des écrivains et des artistes, lorsqu’ils en laissent après eux, chose rare, appartiennent d’ordinaire à cette seconde catégorie.

1686. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Le champ ordinaire et limité de M. 

1687. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. VILLEMAIN. » pp. 358-396

Il fut d’ordinaire, à l’égard de cette tentative, non répulsif, attentif plutôt, bienveillant, légèrement douteur, ou même moqueur avec grâce.

1688. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

Cette célébrité même et le caractère passionné de ses poésies furent cause qu’après sa mort il se forma insensiblement sur elle une légende qui, accueillie et propagée sans beaucoup d’examen par des critiques d’ordinaire plus circonspects, par Antoine Du Verdier et Bayle, recouvrit bientôt le vrai et finit par rendre l’intéressante figure tout à fait méconnaissable.

1689. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

… Non ; mais voici une source d’erreur bien ordinaire : beaucoup d’hommes, invinciblement attachés aux préjugés de leur enfance, mettent leur gloire, leur piété, à prouver aux autres un système avant de se le prouver à eux-mêmes.

1690. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Jouffroy »

Ces cours privés étaient fort recherchés ; quelques esprits déjà mûrs, des camarades du maître, des médecins depuis célèbres, une élite studieuse des salons, plusieurs représentants de la jeune et future pairie, composaient l’auditoire ordinaire, peu nombreux d’ailleurs, car l’appartement était petit, et une réunion plus apparente serait aisément devenue suspecte avant 1828.

1691. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIe entretien. Poésie lyrique » pp. 161-223

XV À la fin de la journée, après avoir dételé, jeté le trèfle dans le râtelier, chaussé ses souliers et passé sa veste, il ne parut point à la cuisine pour recevoir, comme à l’ordinaire, son écuelle des mains du vieux Joseph.

1692. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

XVII Mais cette souveraineté temporelle des pontifes romains est-elle assujettie à d’autres lois que les souverainetés profanes ordinaires ?

1693. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

La vallée de Saint-Point était plus recueillie dans son ombre, plus caressante à l’œil qu’à l’ordinaire.

1694. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXIXe entretien. Tacite (2e partie) » pp. 105-184

« Cependant, par une monstrueuse émulation des sénateurs, on vota des prières publiques dans tous les sanctuaires, des jeux annuels, des fêtes à Minerve, en commémoration du jour où le prétendu complot d’Agrippine avait été prévenu, et le jour de la naissance d’Agrippine fut mis au nombre des jours néfastes. » LIII « Pætus Thraséa, qui avait l’habitude de flétrir les bassesses ordinaires de son silence, ou de les laisser passer avec un bref et dédaigneux consentement, sortit alors du sénat, se vouant ainsi lui-même au dernier péril, sans donner aux autres le courage de la liberté. »… LIV Quelle condition du beau dans l’histoire manque dans ce récit de Tacite ?

1695. (1863) Cours familier de littérature. XV « XCe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (3e partie) » pp. 385-448

ce petit Journal qui continuera ma pensée et ma vie, cette vie maintenant hors de son cours ordinaire, comme si notre ruisseau se trouvait transporté sur les bords de la Loire, cette Loire, ce pays que je ne devais jamais voir, tant j’en étais née loin.

1696. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

Le soir, nous n’entendîmes pas, comme à l’ordinaire, sa zampogne à travers les lauriers de la montée ; nous n’entendîmes que le pas lent et lourd de ses souliers ferrés sur les cailloux et le souffle d’une haleine haletante.

1697. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXVIIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 5-64

Cette tour du bargello avait fait partie autrefois, dit-on, d’un palais d’une maison éteinte des seigneurs de Lucques ; on l’avait convertie ensuite en prison d’État, et, plus tard encore, en prison pour les meurtriers ordinaires.

1698. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Le bonhomme, assez mal vêtu à son ordinaire, ayant sur la tête son immortelle perruque, quelques maigres tisons de l’an passé faisant mine de se consumer dans sa cheminée, combla de civilités son protégé et le provincial qu’on lui annonçait comme un admirateur de la Pucelle.

1699. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Il a trois atlas principaux en lui, à demeure, chacun d’eux composé « d’une vingtaine de gros livrets » distincts et perpétuellement tenus à jour : un atlas militaire, recueil énorme de cartes topographiques aussi minutieuses que celles d’un état-major ; un atlas civil, qui comprend tout le détail de toutes les administrations et les innombrables articles de la recette et de la dépense ordinaire et extraordinaire ; enfin, un gigantesque dictionnaire biographique et moral, où chaque individu notable, chaque groupe local, chaque classe professionnelle ou sociale, et même chaque peuple a sa fiche.

1700. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Si nous devons nous écarter des règles ordinaires dans l’appréciation des œuvres du génie, nous ne suivrons pas plus, dans la manière de vous les faire connaître, l’exemple de la plupart des cours de littérature.

1701. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre sixième. »

Je veux qu’on voye mon pas naturel et ordinaire ainsi detracqué qu’il est ; je me laissé aller comme je me treuve.

1702. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

Car, si beaucoup de ces termes forgés par la science ne se hasardent pas dans le langage ordinaire, beaucoup aussi sont entrés dans l’usage courant avec les choses qu’ils représentent et les plus délicats des puristes n’oseraient affronter le ridicule de s’en passer.

1703. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 septembre 1886. »

Notes sur la musique wagnérienne (suite)ba V Durant l’été de 1825, Beethoven s’était senti plus qu’à l’ordinaire souffrant : alors son âme, longuement accoutumée aux émotions, fut — sous l’influence encore de maints embarras matériels, — très saisie par des multiples émotions : le maître les recréa volontairement, les promut à la vie enfin réelle de l’art, en son dernier quatuor 64.

1704. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 décembre 1886. »

Assez souvent on peut constater des essais de drame populaire en dehors de nos théâtres ordinaires ; les processions historiques, partout tant appréciées, sont un symptôme ; les mystères d’Oberammergau ont eu un retentissement énorme, c’est là le berceau de notre drame moderne, et on serait bien tenté de le vérifier en retournant à cette source ; le drame religieux que M.Friedrich Schœn fit exécuter par le peuple dans la cathédrale de Worms, tout récemment, à l’occasion du quatrième centenaire de Luther, a produit un effet immense, 2° J. van Santen Kolfk : Considérations historiques et esthétiques sur le motif de Réminiscence.

1705. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VII. Repos »

D’ordinaire le spectacle qui dans l’un ou l’autre cadre s’agite, c’est un être isolé, une âme de profondeur et d’émotion.

1706. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VI »

Il arrivait la plume sur l’oreille, le cahier sous le bras, l’encrier de corne à la ceinture ; on apportait une petite table sur la place publique, où d’ordinaire se passait la scène ; le bonhomme saluait, se mouchait, déployait un grand feuillet in-folio enjolivé de rubans ; il y griffonnait un paraphe, les amants signaient, et tout était dit.

1707. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1855 » pp. 77-117

L’homme à la cage écarte le paquet d’épinards qui bouche d’ordinaire la gargouille, et pendant que le traqueur y place sa troublette, lui, passe dans la rainure du conduit la baguette de fer que suit le nez du chien, et le bout du filet s’agite et le traqueur l’élève en l’air, et montre un rat qui sautille, en disant : « Un gaspardo. » Il a été pris une vingtaine de rats en deux heures.

1708. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — La déformation  »

Vaugelas dit innocemment : « Dans les doutes de la langue, il vaut mieux pour l’ordinaire consulter les femmes et ceux qui n’ont point étudié que ceux qui sont bien sçavans en la langue Grecque et en la Latine.  » Et Vaugelas, vraiment, ne trompe jamais.

1709. (1856) Cours familier de littérature. II « IXe entretien. Suite de l’aperçu préliminaire sur la prétendue décadence de la littérature française » pp. 161-216

Il y a de la fascination dans les calamités même du peuple, quand ces calamités dépassent les proportions ordinaires du crime et s’élèvent jusqu’à l’impossible du forfait.

1710. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

Ces sortes de récits sont, pour l’ordinaire, dans la bouche des personnages qui, s’ils n’ont pas un intérêt à l’action du poème, en ont du moins un très fort qui les attache au personnage le plus intéressé dans l’événement funeste qu’ils ont à raconter.

1711. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre II : Règles relatives à l’observation des faits sociaux »

Aussi toutes les questions que se pose d’ordinaire l’éthique se rapportent-elles, non à des choses, mais à des idées ; ce qu’il s’agit de savoir, c’est en quoi consiste l’idée du droit, l’idée de la morale, non quelle est la nature de la morale et du droit pris en eux-mêmes.

1712. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VII. M. Ferrari » pp. 157-193

En effet, d’ordinaire, quand les erreurs d’un homme ne viennent pas de l’infirmité de ses facultés, ses facultés deviennent bientôt des infirmités comme ses erreurs, et telle cependant jusqu’ici n’a pas été l’histoire de M. 

1713. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

Zola, avec sa grâce ordinaire, était au fond du trou, et les paysans retiraient les cordes.

1714. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre VI. L’espace-temps à quatre dimensions »

D’ordinaire, nous nous représentons les visions fantasmatiques comme entourant, fugitives, le noyau stable et ferme de vision réelle.

1715. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre III. De la logique poétique » pp. 125-167

Enfin au moyen âge, la loi ecclésiastique fut appelée canon, terme par lequel on désignait aussi la redevance emphytéotique payée par l’emphytéote… Les Latins furent peut-être conduits par une idée analogue, à désigner par un même mot jus, le droit et l’offrande ordinaire que l’on faisait à Jupiter (les parties grasses des victimes).

1716. (1898) Impressions de théâtre. Dixième série

Ils sont persuadés que l’oisiveté, le jeu et la débauche ont pour effet ordinaire d’affiner secrètement le sentiment de l’honneur, et qu’il y a dans tout jeune décavé un héroïque soldat d’Afrique qui sommeille. […] L’amour idéaliste et sentimental, ou, simplement, l’amour ordinaire, même assez vivement sensuel, n’exclut ni la notion du devoir, ni les soucis altruistes et les pensées généreuses. […] Elle lui dit : « Tu as commis le grand péché de mort… Que tu m’aies trahie pour Gunhild, je n’ai vu là qu’un cas d’inconstance ordinaire et que l’effet des artifices d’une femme sans cœur… Mais à présent je comprends tout ! […] Renard a su nous faire sentir, dans cette rupture médiocre de deux amants ordinaires, l’infinie et inévitable tristesse de toutes les ruptures, même de celles qui délient ceux qui ne s’aiment plus. […] Le tout, cuisiné selon les procédés ordinaires par quelque « habile dramaturge », pouvait donner une pièce à la fois banale et brutale, pas ennuyeuse.

1717. (1892) Essais sur la littérature contemporaine

Endormis de leur dernier sommeil, côté à côte et la main dans la main, c’est elle qui, de monde en monde et d’étoile en étoile, renversant pour eux son trajet ordinaire, les remmènera de leur Éden vers leur ancien séjour. […] Et aussi le lien qui s’établit entre ses lecteurs et lui semble-t-il plus étroit et plus fort qu’il n’est d’ordinaire entre nous et le poète. […] Et j’en appelle aux spectateurs ordinaires du Théâtre-Libre : l’Honneur de M.  […] C’est ce que n’ignorent pas les fournisseurs ordinaires de l’Ambigu-Comique et les auteurs de romans feuilletons. […] Elle pourrait empêcher nos romanciers contemporains de prendre des états plus que particuliers, exceptionnels et morbides, pour des états ordinaires et généraux de l’âme humaine.

1718. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion statique »

Nous ne savons guère ce qui se passe dans des consciences autres que la nôtre ; mais comme les états religieux se traduisent d’ordinaire par des attitudes et par des actes, nous serions bien avertis par quelque signe si l’animal était capable de religiosité. […] Nous ne saurions trop le répéter : ces superstitions impliquent d’ordinaire un grossissement, un épaississement, quelque chose enfin de caricatural. […] Nous avons seulement voulu essayer à un problème très controversé la méthode qui nous paraît d’ordinaire la plus sûre.

1719. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

Ces lois logiques pures sont l’intelligible même, elles apparaissent comme le type de l’évidence, mais elles ne constituent pas, à elles seules, toute la logique : la logique ordinaire, dite syllogistique, ne se contente pas de ces trois principes. […] Sans doute, c’est faire à une personne un reproche grave que de lui dire qu’elle manque de logique, et l’on admire d’ordinaire les hommes capables d’organiser une grande masse de matériaux suivant le type des principes d’identité et de contradiction. […] Zeller, est le discernement des caractères propres à chaque époque ; et l’on se trompe d’ordinaire quand on juge du passé par le présent, ou réciproquement.

1720. (1885) L’Art romantique

Pour bien comprendre l’étendue du sens impliqué dans cette phrase, il faut se figurer les usages ordinaires et nombreux du dictionnaire. […] Il a pu quelquefois, car il ne manquait certes pas de tendresse, consacrer son pinceau à l’expression de sentiments tendres et voluptueux ; mais là encore l’inguérissable amertume était répandue à forte dose, et l’insouciance et la joie (qui sont les compagnes ordinaires de la volupté naïve) en étaient absentes. […] Se débarrassant ainsi du tracas ordinaire des réalités présentes, elle poursuit plus librement son rêve de Beauté ; mais aussi elle risquerait fort, si elle n’était pas si souple et si obéissante, et fille d’un maître qui sait douer de vie tout ce qu’il veut regarder, de n’être pas assez visible et tangible. […] Le caractère de la scène et le ton de la légende contribuent ensemble à jeter l’esprit dans cet état de rêve qui le porte bientôt jusqu’à la pleine clairvoyance, et l’esprit découvre alors un nouvel enchaînement des phénomènes du monde, que ses yeux ne pouvaient apercevoir dans l’état de veille ordinaire. […] J’aime ces excès de santé, ces débordements de volonté qui s’inscrivent dans les œuvres comme le bitume enflammé dans le sol d’un volcan, et qui, dans la vie ordinaire, marquent souvent la phase, pleine de délices, succédant à une grande crise morale ou physique.

1721. (1902) La poésie nouvelle

… ‌ Tandis que, d’ordinaire, les vers d’amour racontent, avec plus ou moins de discrétion, quelque aventure heureuse ou triste dont on n’aurait pas beaucoup de peine à reconstituer les péripéties, l’anecdote ici ne se révèle pas, ni nul détail qui prive ce poème de son caractère universel et absolu.

1722. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

Il vivait d’ordinaire à Lyon, il s’y maria ; il fut reçu membre de l’Académie lyonnaise et y donna des lectures sur différentes questions d’une littérature élevée : l’influence de la Révolution sur l’éloquence française, un mémoire sur la Littérature allemande, dont Klopstock, à son point de vue, était le centre ; un Éloge de l’avocat général Servan, Les manuscrits de ces divers ouvrages ne se sont malheureusement point retrouvés, et l’on n’en a que des analyses dans les procès-verbaux de l’Académie. […] Mon cœur en a tout à fait besoin. » Camille Jordan, un peu trop absorbé dans les joies et les soucis de la famille, trop loin du centre, n’ayant pas à Lyon ses vrais juges, même parmi ses confrères de l’Académie, un peu trop abondant dans les matières qu’il traitait devant eux, comme il arrive d’ordinaire quand on n’a pas en vue une publicité immédiate, Camille ne tint pas assez compte des judicieux conseils littéraires de Mme de Staël, et toute cette partie de sa vie qui se rapporte à la période de l’empire a pu paraître de loin non occupée : elle est restée comme enfouie dans les registres de l’Académie de Lyon.

1723. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

On y observe des hommes qui sans doute n’étaient pas mauvais dans le cours ordinaire de la vie, et qui, déconcertés par des circonstances exceptionnelles, devinrent féroces à force d’être lâches. […] Elle employait la méthode que les chercheuses d’aventures illégitimes appliquent d’ordinaire à l’honorable résistance des hommes mariés. […] Il y a une question qui domine toutes les autres : — question nationale puisque de cette énigme dépend le salut de notre patrie ; — question sociale, puisqu’une France humiliée, diminuée, décadente, ne pourra jamais imposer sa règle de justice et de bonté à l’assentiment de l’univers ; — question qui touche aux plus vives et plus chères susceptibilités du citoyen, puisque les événements quotidiens de la politique atteignent, par des touches incessantes et répétées, la plaie, encore fraîche, de notre orgueil meurtri ; — question militaire, puisqu’une, armée inemployée, perpétuellement déçue dans son espérance et frémissante de son inaction, risquerait de perdre son éclat et sa trempe, comme un sabre qui demeure trop longtemps au fourreau ; — question littéraire même, puisque nous n’avons pas le droit, jusqu’à nouvel ordre, de parler haut à l’Europe et que notre littérature semble condamnée aux pornographies et aux gaudrioles, ordinaire gagne-pain des vaincus ; — question universelle enfin, puisque l’humanité aura reculé de dix siècles en arrière, si une violation flagrante du droit des gens se consacre par notre misère et se prescrit par l’interminable délai de nos revendications. […] Et l’on fonde un régime nouveau, qui, d’ordinaire, ne dure pas longtemps.

1724. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

Cette difficulté, comme c’est l’ordinaire des natures généreuses, ne fait que l’enhardir ; il s’ingénie, il repousse, il détrône pour se faire jour ; par moments il tâche d’ignorer, ou de restaurer à d’autres moments.

1725. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Charles Labitte »

Lui, dont plus tard les convictions politiques ou philosophiques n’eurent guère d’occasion bien directe de se produire et semblaient plutôt ondoyer parfois d’un air de scepticisme sous le couvert de l’érudition, il croyait vivement à l’amour, surtout à l’amitié, à l’immortalité volontiers, à la liberté toujours, à la patrie, à la grandeur de la France, à toutes ces choses idéales qu’il est trop ordinaire de voir par degrés pâlir autour de soi et dans son cœur, mais qu’il est impossible de sauver, même en débris, après trente ans, lorsqu’on ne les a pas aimées passionnément à vingt.

1726. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

Je rends grâce au ciel de m’avoir fait vivre jusqu’à ce jour, où, par la main d’un grand homme, le voile du sanctuaire a été déchiré et les secrets de Dieu révélés au grand jour, car cet homme, enflammé d’une si immense ambition, cet homme dont le nom retentit depuis ma naissance dans le monde lettré, cet homme devant qui les savants de tous les pays s’inclinent en lui rendant hommage, ne peut pas être un homme ordinaire, un jongleur, un charlatan, un joueur de gobelets pleins de vide, un nomenclateur spirituel prenant les noms pour des choses ; il doit savoir mieux que moi qu’un dictionnaire n’est pas un livre, qu’un procès-verbal n’est pas une logique, qu’en nommant les phénomènes on ne les définit pas, qu’on recule la difficulté sans la résoudre par des dénominations savantes, et qu’en réalité la vraie science ne consiste pas à connaître, mais à comprendre l’œuvre du Créateur.

1727. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (4e partie) » pp. 429-500

On ne croirait jamais que la petite lanterne qui est au-dessus a cinquante-cinq pieds de haut, l’élévation d’une maison ordinaire.

1728. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 321-384

XCII Les bêtes ne comprenaient pas pourquoi nous les retenions à côté de nous par les cornes ou par la laine, et pourquoi nous les empêchions de s’aller repaître, comme à l’ordinaire, dans le bois, dans l’herbe, sous les mûriers, dans les allées gazonnées de la vigne.

1729. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXIXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 129-192

CCXXII Quand tout fut rentré dans le silence ordinaire du cloître, et que le bargello en fut sorti avec le forgeron et les hommes noirs de la justice, j’y entrai sans bruit avec la provende et les cruches d’eau des prisonniers ; je ne fus pas lente, croyez-moi, à distribuer à chacun sa portion, à ouvrir et à refermer leurs grilles ; les pieds me brûlaient de courir au cachot de votre enfant.

1730. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

D’ordinaire, la pensée seule fixe l’attention.

1731. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « M. Deschanel et le romantisme de Racine »

Il y a, je le sais, des choses très connues, très ordinaires, qu’on est obligé de répéter tout au long devant un auditoire mondain et qui lui sont toujours assez nouvelles ; mais est-il bien nécessaire de les imprimer ?

1732. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

Ce qui frappe dans ces romans, qui sont tous des histoires de conscience, c’est la constante préoccupation morale dont ils sont marqués à chaque page, et c’est la sympathie cordiale et attentive de l’auteur pour les formes les plus modestes et les plus ordinaires de la vie humaine.

1733. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Figurines (Deuxième Série) » pp. 103-153

Et, une fois ou deux, il nous a dénoncé ce qui grouille dans ce vide, et comment ce nihilisme, d’ordinaire avachi et doux, des vieux viveurs peut tourner au farouche et au macabre.

1734. (1912) Enquête sur le théâtre et le livre (Les Marges)

Donc prenez un homme moyen, moyennement intelligent, moyennement cultivé, moyennement sensible… Parlons d’avance le langage de la postérité, la poire ordinaire !

1735. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, le 8 décembre 1885. »

Il y a deux théâtres de musique : le théâtre de Gluck et de Beethoven, celui de Wagner, le théâtre du drame intense, profond, impitoyable de la vie ; — et le théâtre de Mozart et de Rossini, le théâtre de Grétry, des musiciens français depuis Rameau, notre tradition française, certes, avec les ordinaires émotions de la vie commune.

1736. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VIII, les Perses d’Eschyle. »

L’exécution d’une épouse ou d’une concubine était et est encore un accident ordinaire dans le régime des harems ; mais on ne touche pas à la mère absoute, quoi quelle fasse, de tout châtiment.

1737. (1856) Cours familier de littérature. I « Digression » pp. 98-160

On la trouvait trop grande pour la maison d’un époux ordinaire ; on rêvait pour elle on ne sait quel sort plus grand que nature.

1738. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

Les badauds de la plume, en service ordinaire et extraordinaire, qui entretiennent, avec la leur, la grande badauderie universelle, ont recommencé d’éventer le chef-d’œuvre en poche, avec des airs mystérieusement indiscrets.

1739. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Alphonse Daudet »

Mais les rois en exil ont-ils mérité ces durs portraits, venant d’un homme qui n’a pas d’ordinaire la main dure ?

1740. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Balzac » pp. 17-61

Dans La Comédie humaine, on rencontre bien çà et là des types et des tableaux d’une bonhomie adorable, mais ce n’est pas là le ton ordinaire de l’écrivain ou la qualité la plus en relief de l’inventeur.

1741. (1888) Impressions de théâtre. Première série

D’ordinaire, lorsqu’on pense à Corneille, ces formules vous montent à la mémoire : « Poète du devoir…, triomphe du devoir sur la passion…, les hommes tels qu’ils devraient être…, le plus moral des poètes… » Et en effet ces formules s’appliquent assez bien à plusieurs de ses tragédies. […] fit-il avec sa bonhomie ordinaire, je ne prétends point qu’Andromaque joue de la prunelle ni qu’elle cherche expressément à allumer Pyrrhus. […] Shakespeare, ici comme dans quelques autres pièces, a mieux respecté ce mystère que ne font d’ordinaire les poètes dramatiques ; surtout il a moins simplifié l’âme humaine que ne font Corneille, Racine ou Molière. […] Ils sont plutôt graves à l’ordinaire, mais quelques-uns ont le don d’un certain comique froid et macabre ; et, comme ce sont nos contemporains, je les aime mieux que les hurluberlus d’Henry Murger. […] Nous trouvons, dans Souvent homme varie, à peu près tous les caractères qu’on attribue d’ordinaire aux œuvres de la littérature classique.

1742. (1858) Du roman et du théâtre contemporains et de leur influence sur les mœurs (2e éd.)

Sans contester la justesse de cet adage, sous sa forme générale et dans ses applications ordinaires, il convient peut-être cependant d’y faire quelques restrictions et de ne l’admettre que sous de certaines réserves. […] Si on trouvait que sur ces points fondamentaux nos citations ont été rares, nous ferions observer que le roman et surtout le drame ne procèdent point d’ordinaire par formules abstraites et par propositions générales. […] C’est encore la thèse du triomphe du mal ; mais en l’introduisant dans la peinture des mœurs familières, en la ramenant aux proportions de la vie ordinaire et dans le cadre de notre société bourgeoise, l’auteur du Père Goriot lui a donné un caractère de vraisemblance et imprimé en quelque sorte un cachet de réalisme qui la rend encore plus cruelle et plus malfaisante. […] Bientôt même, la publicité ordinaire ne lui suffisant plus, on l’a vu appeler à son aide la publicité immense et hâtive des journaux : c’était l’industrie et ses forces gigantesques appliquées à la littérature.

1743. (1898) Essai sur Goethe

Vous ne les admirez point pour cela, tant s’en faut ; mais vous ne vous indignez pas non plus contre eux : vous les considérez comme de moyens exemplaires d’une ordinaire humanité, qui exercent sans noblesse, bien qu’avec correction, leur métier d’hommes […] Tout en suivant les marches et les contremarches, il observe dans les ruisseaux des phénomènes de réfraction — d’ailleurs assez ordinaires, prétendent les spécialistes — et se persuade qu’il fait « des découvertes in opticis ». […] En sorte que l’homme, sans aucun doute, n’a rien perdu à avoir conservé son sang-froid, en des moments dont le seul souvenir fait s’effarer les ordinaires publicistes. […] Maintenant, ils trouvent mieux : éclairés par la lumière nouvelle que Nietzsche a projetée sur les choses, ils proclament que les Affinités dégagent une haute leçon, qui serait celle-ci : « Seul, l’homme faible subit sa destinée ; le fort se crée la sienne59. » Vous reconnaissez là le sel des propos ordinaires du moderne Zarathustra.

1744. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

René de Planhol eut à rejoindre son régiment, dès le premier jour de la mobilisation, dans une petite ville de l’Ouest, une bonne petite ville qui, en temps ordinaire, s’anime seulement pour les foires et qui soudain tressaille : « Artisans et rentiers, blouses bleues et vestons, forment des groupes mêlés où les voix retentissent et les cannes se lèvent. […] Un jour, lui qui a d’ordinaire le teint vif, ses joues sont pâles, blanches. […] Afin d’occuper les heures vides et afin d’occuper aussi les portions les plus chimériques d’une âme, fût-elle ordinaire entre toutes les âmes, il faut un rêve, honnête ou non. […] L’homme ordinaire, le simple voyageur de la vie : mais le philosophe ? […] Ne dénigrons pas la diplomatie du second Empire : « Elle a été beaucoup plus attentive, beaucoup plus avisée et beaucoup plus clairvoyante qu’on ne le croit à l’ordinaire… » Qui lui rend cet hommage ?

1745. (1908) Après le naturalisme

Parce que c’est la vie ordinaire de chacun et parce que l’éducation traditionnelle de l’écrivain ne l’a pas mis à même de prendre connaissance et conscience des autres facteurs et des autres réalités de la vie — qui n’est pas seulement passionnelle, grand merci ! […] On sait quelles causes très ordinaires la produisirent et l’examen de celles-ci ramène l’acte du croyant à un fait matériel basé sur des erreurs d’interprétation de la nature et une ignorance absolue de la vérité.

1746. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre II. Lord Byron. » pp. 334-423

Quand à dix ans il hérita du titre de lord, et que pour la première fois à l’école on appela son nom en le faisant précéder du titre de dominus, il ne put répondre le mot ordinaire adsum 1247, demeura immobile parmi ses camarades, qui ouvraient des grands yeux, et à la fin fondit en larmes. […] Croyez-vous que les grands sentiments, ceux de Childe Harold par exemple, soient la trame ordinaire de sa vie1315 ?

1747. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1889 » pp. 3-111

En effet, il est animé, vivant, loquace, et sous l’amaigrissement de la figure et le reflet basané du voyage, moins commun d’aspect qu’à l’ordinaire. […] Le logis de Raffaëlli, une petite maison bourgeoise de banlieue, sans rien de la bibeloterie ou de la faïencerie ordinaire des ateliers, mais où est posé sur un chevalet, ou accroché, çà et là, aux murs pour la vue, dans un cadre joliment doré, un paysage d’Asnières ou de Jersey, le plus souvent peint aux crayons de couleur à l’huile de Faber, un paysage qui a l’air d’un pastel fixé.

1748. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Comme il aimait à souper avec sa femme, cette ingrate et cette perfide, qu’il entourait d’une passion si tendre, il avait renoncé à son régime ordinaire (deux tasses de lait par jour), et il s’était mis au régime échauffant de Chapelle et de Baron. […] Et notez bien que, non content d’être un bon jeune homme sans façon, parlant comme tout le monde, entrant dans un salon comme vous et moi nous y pourrions entrer, vêtu à la diable, empêtré dans ses dentelles d’emprunt, gêné dans son habit de louage qui craquait de toutes parts, haut perché et portant une perruque aussi mal peignée que des cheveux naturels, notre débutant, pour mieux entrer dans l’esprit de son rôle, se croyait encore obligé de forcer sa nature bourgeoise, de vulgariser son geste, de se faire bonhomme et brusque plus encore qu’il ne l’est d’ordinaire ! […] S’il vous plaît aussi, vous remarquerez la belle tirade d’Éliante : L’amour pour l’ordinaire est peu fait à ces lois.

1749. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

Aussi l’a-t-il hardiment déclaré : « Pour atteindre à la connaissance des causes permanentes et génératrices, l’homme a deux voies : la première, qui est la science, par laquelle dégageant ces causes et ces lois fondamentales il les exprime en formules exactes et en termes abstraits ; la seconde, qui est l’art, par laquelle il manifeste ces causes d’une façon sensible, en s’adressant non seulement à la raison, mais au cœur et aux sens de l’homme le plus ordinaire » [Cf.  […] Chansons et poésies diverses de Désaugiers, Paris, 1827, Ladvocat]. — Du caractère navrant de leur gaîté, — et de la vulgarité de sentiments que leurs Chansons trahissent. — Qu’au surplus, et si l’on veut reconstituer la lignée des « ancêtres » de Béranger, — il convient de se reporter au Chansonnier Maurepas ; — et on reconnaît alors dans les origines de son œuvre le confluent de la chanson politique ; — de la chanson érotique ; — et de la chanson « bachique » ; — sans que d’ailleurs il s’y mêle quoi que ce soit de la veine « populaire ». — D’une erreur grave que l’on commet encore à ce sujet ; — et qu’il n’y a rien dans l’œuvre entière de Béranger, — qui rappelle ni la mélancolie ordinaire ; — ni la franchise habituelle ; — ni la générosité naïve de l’âme populaire ; — et qu’au contraire elle est l’expression de ce qu’il y a de plus « bourgeois » dans l’esprit français. […] Histoire de ma vie] ; — son mariage ; — ses premières Lettres [Cf. notamment la lettre de Bagnères, 28 août 1825]. — Sa séparation [Cf. lettre du 3 décembre 1830, et Indiana] ; — son installation à Paris et ses débuts littéraires. — Henri de Latouche et Jules Sandeau. — Rose et Blanche, 1831 ; — Indiana, 1831 ; — Valentine, 1832 ; — Lélia, 1833 ; — Jacques, 1834 ; — et qu’au moyen de leurs autres mérites [il faut excepter Rose et Blanche], fraîcheur et vérité poétique du paysage ; — caractère bourgeois et réel surtout de l’intrigue ; — fluidité et abondance du style ; — l’originalité n’en est pas tant d’avoir proclamé le « droit divin » de la passion, — que d’avoir achevé de rendre le roman, comme genre, « capable de porter la pensée ». — C’est ce qu’on n’avait pas fait depuis La Nouvelle Héloïse, 1762, et depuis Corinne, 1807. — Mais, tandis que Corinne était placée dans des conditions singulières, — et qu’il n’y a pas d’« intérêt » proprement romanesque dans le roman de Rousseau, — il y en a un dans Valentine, comme dans Indiana ; — et quelle que soit la condition des héroïnes de George Sand, leurs aventures du moins ne sortent pas de l’ordinaire. — Peut-on en dire autant de leurs sentiments ; — et surtout de ceux qu’on trouve exprimés dans Jacques ou dans Lélia ? […] Elle consiste essentiellement dans la verve un peu brutale qu’il a mise au service de certaines idées ; — qu’on ne défend d’ordinaire qu’avec un peu d’hésitation ou de timidité ; — parce qu’elles sont effectivement aussi banales que justes. — Il a par exemple solidement établi que « bonne renommée vaut mieux que ceinture dorée », — et que l’amour ne refait point la virginité des courtisanes. — Il a également démontré que les gens dits d’affaires manquaient assez souvent de scrupules [Cf. 

1750. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Saint-Marc Girardin, lui aussi, à qui d’ordinaire ce mot de passion semble faire peur, ou qui du moins aime à se jouer en en parlant, a compris que c’était là ou jamais le cas de se déclarer, que c’était une passion par raison, tout pour le bon motif et pour l’ordre, pour l’étroite morale et la juste discipline : dans une suite de charmants articles il a pris rang à son tour parmi ceux qui occupent en propre un de ces beaux noms de femmes d’autrefois, qui s’en emparent et portent désormais couleurs et bannière de chevaliers. — Et vous donc qui parlez, me dira quelqu’un, où avez-vous planté votre drapeau ?

1751. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre III. Combinaison des deux éléments. »

Un sentiment si grandiose, une divination si compréhensive et si pénétrante, une pensée par laquelle l’homme embrassant l’immensité et la profondeur des choses, dépasse de si loin les bornes ordinaires de sa condition mortelle, ressemble à une illumination ; elle se change aisément en vision, elle n’est jamais loin de l’extase, elle ne peut s’exprimer que par des symboles, elle évoque les figures divines391.

1752. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (2e partie) » pp. 365-432

Ce ne sont pas les lois ordinaires du roman conçu, médité, écrit par un écrivain consciencieux et humain ; c’est le procédé d’un dieu de la plume, d’un possédé de la verve, qui se dit à soi-même : « À quoi bon composer du vraisemblable ?

1753. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

Ces hommes subirent sans doute les vicissitudes ordinaires de la vie de leurs semblables : mais la fortune ne parut pas s’acharner sur eux de préférence aux autres hommes ; ils n’accusèrent point le sort d’une partialité exceptionnelle ; ils furent plus grands sans être plus misérables ; pourquoi ?

1754. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

Il se portait très bien le 3 octobre au matin, et il travailla à son ordinaire ; je rentrai à quatre heures pour dîner, et je le trouvai avec la fièvre : la goutte s’était fourrée dans les entrailles, qu’il avait très affaiblies depuis quelque temps, ne pouvant quasi plus manger… Enfin le samedi 8, après avoir passé une nuit moins mauvaise que les précédentes, il s’affaiblit, il perdit la vue, et mourut sans fièvre, comme un oiseau, sans agonie, sans le savoir.

1755. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVIe Entretien. Marie Stuart (reine d’Écosse) »

Mais toutes les grandes passions sont des prodiges ; si on les mesure à la nature ordinaire de nos sentiments, on se trompe ; il ne faut les mesurer qu’à elles-mêmes ; l’impossible est la mesure de ces passions.

1756. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

Mais par là se découvre à nous une vérité qu’on s’est d’ordinaire refusé à voir : l’ascétisme janséniste de Pascal et les Pensées ne sont pas en contradiction avec le développement antérieur de son intelligence.

1757. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Si deux lectures n’y suffisent pas, il faut lire une troisième fois ces raisons « qui s’entre-suivent de telle sorte, dit-il, que comme les dernières sont démontrées par les premières qui sont leurs causes, ces premières le sont réciproquement par les dernières, qui sont leurs effets22. » Qu’on ne s’imagine pas qu’il suffise d’une attention ordinaire pour s’approprier ou pour avoir le droit de rejeter ses raisons ; il ne le souffre pas, il ne permet pas « qu’on croie savoir en un jour ce qu’un autre a pensé en vingt années23. » La fuite n’est pas possible avec honneur ; car comme il nous fait connaître toute la puissance de la réflexion, et qu’il agrandit notre raison par la sienne, ce serait nous avouer incapables d’application que de lâcher prise après un premier effort, ou que de n’oser le tenter.

1758. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

Selon les règles ordinaires, j’aurais dû mourir ; j’aurais peut-être mieux fait.

1759. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « III »

. — Aux gestes exagérés des bras, qu’il reprochait à l’instant aux acteurs, Wagner oppose des mouvements plus modérés : « Nous pensâmes, dit-il, qu’une simple élévation du bras ou un mouvement caractéristique de la main ou de la tête, suffirait à exprimer les émotions de l’acteur. » A cette immobilité contre nature du chanteur, à cette situation étrange où se trouvent les acteurs, dans les ensembles des opéras, a cette nécessité enfin de parler devant le public ou de se dérober aux trois-quarts à sa vue, Wagner remédie par une simple attitude, basée sur l’observation de la nature : « Nous tirâmes, dit-il, de la passion même du dialogue le changement de poses que nous cherchions : nous avions observé que les accents les plus pathétiques de la fin d’une phrase donnaient lieu naturellement à un mouvement de la part du chanteur. « En effet, la force de l’expression se porte toujours à la fin d’une phrase, et, même dans la conversation ordinaire, nous faisons involontairement un geste pour ponctuer en quelque sorte le sens de notre discours (tome X, 389 et sq.) « Ce mouvement fait faire à l’acteur un pas en avant et, en attendant la réponse, il tourne à demi le dos au public ; ce mouvement le montre en plein à son partenaire : celui-ci, en commençant sa réponse, fait aussi un pas en avant, et, sans être détourné du public, il se trouve face à face avec le premier. » Ce jeu de scène paraîtra bien simple et indigne d’explication à nos critiques qui n’y verront « qu’un truc » comme un autre.

1760. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Lettres de m. l’Abbé Sabatier de Castres ; relatives aux trois siecles de la littérature françoise.ABCD » pp. -641

J’ai cru d’abord qu’un peu de réflexion suffiroit pour détruire une idée aussi folle, démentie par l’uniformité de style, par celle des principes & par mille autres raisons ; mais rien n’est plus ordinaire, dans un certain monde, que de tout avancer & de tout faire croire, au mépris de l’évidence ; & c’est ce monde qu’on nous assure bonnement être le seul en état de penser & de raisonner, A présent qu’il ne m’est plus permis de douter que ce bruit ne soit une ruse philosophique, imaginée pour décréditer des censures & des jugemens avoués par la plus saine partie de la Nation, en les attribuant à des motifs étrangers, je déclare qu’aucun des Ecrivains, que je viens de nommer, n’a eu part à mon travail.

1761. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Le petit livre des Destins, publié il y a six ans, sort déjà du cadre ordinaire des poésies de M. 

1762. (1920) Action, n° 3, avril 1920, Extraits

Aux fous eux-mêmes, la folie apparaît comme quelque chose de très ordinaire et très commun, car elle est très vraie.

1763. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

Il ne fallait point avoir une fermeté ordinaire d’esprit pour estimer si bas, dès 1796, des hommes qui avaient accompli des bouleversements aussi redoutables. […] Il le comprenait si bien que, s’il faut en croire les traditions contemporaines, lorsque, dans les entr’actes de paix, il était moins bien reçu qu’à l’ordinaire à son entrée au théâtre, il lui arrivait de dire aux confidents qui l’entouraient : « Messieurs, il faudra bientôt rentrer en campagne. » Le véritable titre de sa toute-puissance, c’était sa supériorité. […] Sans doute la résistance de Fontanes était mesurée, convenable, obséquieuse même, telle, en effet, que le temps la comportait ; et c’est ce qui a fait illusion aux observateurs superficiels qui, entre le tumulte de la licence révolutionnaire et le bruit du régime libre de la restauration, n’ont pas voulu comprendre les ménagements infinis auxquels toute voix d’opposition était astreinte sous l’empire, par la nature des choses, et n’ont vu dans Fontanes qu’un courtisan ordinaire, parce qu’il ne disait pas, comme Mirabeau : « Nous sommes ici par la volonté du peuple », ou qu’il n’écrivait pas un pamphlet à la manière de Paul-Louis Courrier. […] La faveur naturelle qui entourait, au début de la restauration, une femme que l’empereur avait poursuivie d’une inimitié si persévérante, et à laquelle il avait fait l’honneur de personnifier en elle cette puissance de l’esprit, objet de ses appréhensions ; l’influence d’un salon européen ; l’intérêt de l’ouvrage, la nouveauté du sujet, à une époque où la littérature allemande était si peu connue en France, où l’on n’avait guère lu jusque-là que les idylles de Gessner et quelques œuvres de Klopstock, de Schiller et de Gœthe ; ce mélange séduisant d’études littéraires et d’études de mœurs ; la poésie des descriptions, le charme d’un enthousiasme communicatif, tout concourait à donner au livre De l’Allemagne un des meilleurs de madame de Staël, quoiqu’il porte la trace de ses défauts ordinaires, une popularité qui devait, en définitive, profiter à l’influence du génie allemand sur le mouvement des esprits dans notre pays.

1764. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

C’est à se demander si certaines créatures humaines n’échappent point, par une constitution spéciale, aux lois de la morale ordinaire et n’ont point ce don de garder, dans le vice et dans le mal, une irréductible et mystérieuse innocence… Oh ! […] Même ils chargent la pièce d’incidents qui n’ont aucun rapport avec l’action principale, — et cela, pour se rapprocher davantage de la réalité, « les drames de la vie réelle ne suspendant pas le cours ordinaire de l’existence, et leur développement étant entrecoupé de mille circonstances étrangères plus ou moins banales Par suite, nulle unité d’action. […] Il est vrai aussi qu’il n’en a guère connu que le train le plus ordinaire, qu’il a presque ignoré les curiosités psychologiques, et qu’enfin il ne s’est jamais fort intéressé au spectacle des choses concrètes. […] Pour en revenir à Célimène, et à supposer que cette jeune veuve soit, en effet, une façon de femme galante, si Molière ne nous le dit pas nettement, c’est peut-être moins, il faut le reconnaître, par un manque ordinaire de précision dans la notation des états sociaux que pour ne point heurter certaines habitudes du public de son temps.

1765. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

répondit-il en bon ibsénien, la vie n’est pas simple… Mais je me suis toujours écarté des conditions ordinaires de l’existence. » En somme, si l’on regarde les faits, le Chariot de terre cuite est sans doute un drame bouddhique, c’est-à-dire évangélique ; vous y trouverez la pitié, l’amour des faibles (misereor super turbam), la haine des mensonges sociaux et le mépris des autorités constituées, la courtisane rachetée par l’amour, le voleur purifié ; et le voleur et la courtisane fort supérieurs, même avant leur rachat et leur purification, aux pharisiens et aux riches sans entrailles, etc. […] « Vous savez que la grande originalité de Dumas, dans la Dame, c’est de nous avoir montré, sur les planches, des gens qui, au travers de l’action principale, font un tas de petites choses ordinaires et qui parlent, le plus souvent, le langage vrai de la conversation ; bref, d’avoir apporté au théâtre plus de vérité… Je me souviens que, toutes les fois : qu’on parlait à Barrière de la Dame aux camélias, ou plutôt toutes les fois) qu’il vous en parlait (car c’était lui qui y revenait toujours), il criait que Dumas l’avait volé ; que Marguerite, c’était Mimi ; qu’Armand, c’était Marcel ; que le père Duval, c’était l’oncle Durantin. […] Dumas, et que les écrivains commencent d’ordinaire par l’observation et finissent par l’abstraction, et qu’ils n’ont pas le droit d’échapper à cette règle) : et j’ai vu que Nourvady et Lionnette vivaient avec intensité […] Victorien Sardou ne s’est montré plus habile (il l’est, à un ou deux moments, jusqu’à mépriser ses ordinaires habiletés), ni plus sûr de ses moyens, ni plus connaisseur de la foule, de ce qui lui plaît, de ce qui la secoue et de ce qui l’amuse.

1766. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Le petit cénacle Après avoir été cérémonieusement présenté au chef de l’école, qui vous a reçu avec son affabilité et sa grâce ordinaires, vous plairait-il d’être introduit dans un groupe de disciples, tous animés de l’enthousiasme le plus fervent ? […] Grâce à sa barbe, à sa voix puissante et douce, à son costume pittoresquement arrangé sans trop sortir de la mode ordinaire et maintenu avec goût dans les teintes sombres, Petrus Borel nous en imposait extrêmement et nous lui témoignions un respect qui n’est pas ordinaire entre jeunes gens à peu près du même âge ; il parlait bien, d’une façon étrange et paradoxale avec des mots d’une bizarrerie étudiée et une sorte d’âpreté éloquente ; il n’en était pas encore aux hurlements à la lune du lycanthrope et ne montait pas trop à la gorge du genre humain. […] C’est dans cet état d’esprit que nous le trouvâmes plusieurs années après, vers 1843 ou 44, dans une taverne de High-Holborn, où il s’était installé par économie et pour dîner en plein centre anglais avec de braves gens bourrés de roastbeef et de bière, parfaitement étrangers aux idées, et tels à peu près que devaient être les spectateurs ordinaires du théâtre « le Globe », devant lequel le jeune William avait gardé les chevaux. […] Quand on assiste aujourd’hui à une représentation d’Hernani, en suivant le jeu des acteurs sur un vieil exemplaire marqué de coups d’ongle à la marge pour désigner des endroits tumultueux, interrompus ou sifflés, d’où parlent d’ordinaire maintenant les applaudissements comme des vols d’oiseaux avec de grands bruits d’ailes et qui étaient jadis des champs de bataille piétines, des redoutes prises et reprises, des embuscades où l’on s’attendait au détour d’une épithète, des relais de meutes pour sauter à la gorge d’une métaphore poursuivie, on éprouve une surprise indicible que les générations actuelles, débarrassées de ces niaiseries par nos vaillants efforts, ne comprendront jamais tout à fait. […] Il suffisait de jeter les yeux sur ce public pour se convaincre qu’il ne s’agissait pas là d’une représentation ordinaire ; que deux systèmes, deux partis, deux armées, deux civilisations même, — ce n’est pas trop dire — étaient en présence, se haïssant cordialement, comme on se hait dans les haines littéraires, ne demandant que la bataille, et prêts-à fondre l’un sur l’autre.

1767. (1933) De mon temps…

D’ordinaire Edmond de Goncourt prenait place sur le divan, couvert d’un tapis d’Orient, qui occupait le fond de la pièce, entre deux bibliothèques basses, et au-dessus duquel étaient suspendues des aquarelles de Gavarni. […] Il y avait dans tout ce visage énergique quelque chose de tourmenté et d’irritable, de contracté et de violent… En effet, le tourment et la violence étaient l’état d’esprit le plus ordinaire de Mirbeau.

1768. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Pour bien comprendre l’étendue du sens impliqué dans cette phrase, il faut se figurer les usages nombreux et ordinaires du dictionnaire. […] « Elle devait , nous dit l’artiste qui connaît son monde, être exécutée dans de grandes proportions à Saint-Sulpice, dans la chapelle des fonts baptismaux, dont la destination a été changée. » Bien qu’il eût pris toutes ses précautions, disant clairement au public : « Je veux vous montrer le projet, en petit, d’un très-grand travail qui m’avait été confié », les critiques n’ont pas manqué, comme à l’ordinaire, pour lui reprocher de ne savoir peindre que des esquisses !

1769. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre III. De la signification de la vie. L’ordre de la nature et la forme de l’intelligence. »

Difficultés et illusions tiennent d’ordinaire à ce qu’on accepte comme définitive une manière de s’exprimer essentiellement provisoire. […] Il est vrai qu’il faudrait commencer par distinguer, par opposer même l’une à l’autre, deux espèces d’ordre que l’on confond d’ordinaire ensemble.

1770. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

La méthode la plus ordinaire et la plus humble consiste à passer devant ces toiles et ces marbres afin de s’exposer soi-même, et de faire voir au prochain ce que l’on porte sur la tête ou sur le dos. […] Les philologues, gens intrépides, qui d’ordinaire ne reculent pas devant l’ennui, devraient aller dans les cercles pour étudier les dialectes qu’on y parle. […] Hervieu a consenti quatre ou cinq fois, à quitter sa clientèle ordinaire. […] Les Américaines ont d’ordinaire les cheveux longs, la taille riche, les dents claires, le teint éblouissant, les plus beaux yeux du monde, et le diable au corps (oh !

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