Chapitre VIII La mécanique cérébrale Jusqu’ici, nous ne nous sommes occupé que des rapports extrinsèques de la pensée et du cerveau, En effet, que la masse, le poids absolu ou relatif, les lésions matérielles, les développements anormaux, puissent correspondre à un certain degré d’intelligence, ce sont là des relations tout empiriques qui ne disent rien à l’esprit, de simples rapports de coïncidence et de juxtaposition qui laissent parfaitement obscure la question des vrais rapports, des rapports intrinsèques et essentiels du cerveau et de la pensée. […] La vraie science du cerveau devrait donc comprendre, outre la description anatomique de cet organe, une analyse de ses opérations, et nous faire voir comment ces opérations sont liées au résultat final, qui est la pensée. […] « Il est bien vrai, dit-il, que les changements organiques du cerveau font quelquefois disparaître la mémoire des faits qui se rapportent à certaines périodes ou à certaines classes de mots, tels que les substantifs, les adjectifs ; mais cette perte ne pourrait être expliquée au point de vue matériel qu’en admettant que les impressions se fixent d’une manière successive dans des portions stratifiées du cerveau, ce à quoi il n’est pas permis de s’arrêter un seul instant… La faculté de conserver ou de reproduire les images ou les idées des objets qui ont frappé les sens ne permet pas d’admettre que les séries d’idées soient fixées dans telles ou telles parties du cerveau, par exemple, dans les corpuscules ganglionnaires de la substance grise, car les idées accumulées dans l’âme s’unissent entre elles de manières très-variées, telles que les relations de succession, de simultanéité, d’analogie, de dissemblance, et ces relations varient à chaque instant. » Müller ajoute : « D’ailleurs, si l’on voulait attribuer la perception et la pensée aux corpuscules ganglionnaires et considérer le travail de l’esprit, — quand il s’élève des notions particulières aux notions générales, ou redescend de celles-ci à celle-là, — comme l’effet d’une exaltation de la partie périphérique des corpuscules ganglionnaires relativement à celle de leurs parties centrales ou de leur noyau relativement à leur périphérie, si l’on prétendait que la réunion des conceptions en une pensée ou en un jugement qui exige à la fois l’idée de l’objet, celle des attributs et celle de la copule, dépend du conflit de ces corpuscules et d’une action des prolongements qui les unissent ensemble ; si l’on prétendait que l’association des idées dépend de l’action soit simultanée, soit successive, de ces corpuscules, — on ne ferait que se perdre au milieu d’hypothèses vagues et dépourvues de tout fondement72. » De tout ce qui précède, je ne crois pas qu’il soit bien téméraire de conclure que nous ne savons rien, absolument rien, des opérations du cerveau, rien des phénomènes dont il est le théâtre lorsque la pensée se produit dans l’esprit.
Il y a là une équivoque, ou plutôt une vraie faute. […] On le voit à travers un nuage ; cela est si vrai, que La Fontaine est obligé d’expliquer son idée toute entière, et de dire enfin : Et quant au canal, c’est celui Que chacun sait, le livre des Maximes. […] Encore de la mauvaise morale : on peut trop louer sa maîtresse, et tout éloge qui n’a pas l’air d’échapper à un sentiment vrai, ou d’être une galanterie aimable d’un esprit facile, déplaît souvent même à celle qui en est l’objet.
J’aperçois de ce point de vue si élevé la seule vraie raison pour séparer les institutions politiques des institutions religieuses. […] Ne défendons plus la religion sous le rapport de l’utilité dont elle est, soit à l’homme, soit à la société ; c’est un vrai blasphème qui a été trop souvent reproduit. […] Il faut bien savoir admirer tout ce qui peut développer dans l’homme des sentiments élevés, tout ce qui peut lui fournir l’occasion de beaux sacrifices ; mais il faut être juste aussi : et il n’est pas moins vrai que cette gloire, acquise en dernier lieu, au prix de tant de sang, n’a servi qu’aux vastes triomphes d’un aventurier.
Levallois, lequel ne croit peut-être pas inconséquemment à l’action de la Providence, mais qui croit à l’action de la nature physique, est un livre de forme très douce et très charmante, mais positivement dirigé (sans en avoir l’air) contre l’idée chrétienne, qui est la seule vraie en moralité pratique et complète. […] Il a oublié que les ermites, dans toutes les religions, placent toujours Dieu, un dieu personnel, — qu’il soit faux ou vrai, mythologique ou chrétien, — dans le fond de leurs ermitages. […] Nous en avons, nous autres chrétiens, de ces saints-là, qui sont de grands hommes miraculeux, et ce sont là les vrais ermites !
Cette manière de voir et de reproduire (produire serait peut-être un mot plus vrai), il s’en est servi, il l’a appliquée, mais largement, en artiste vrai, qui ne se bute pas à un système, qui ne se cogne pas, comme un aveugle, à la borne d’un parti pris. […] Rappeler Buffon après avoir rappelé Montaigne, et avec cela rester très individuel, très soi-même, un vrai humouriste, qu’on aime à lire, qui séchera suavement nos larmes ou reposera délicieusement nos yeux, quand nous les aurons mouillés par Sterne ou éblouis par Jean-Paul, n’est-ce donc pas assez pour la gloire d’un homme, fût-il même le compatriote de Rousseau ?
Leopardi35 I Si son nom disait vrai, à celui-là, au lieu d’un triste-à-pattes, ce devrait être un terrible-à-griffes littéraire ; car il s’appelle Leopardi ! […] Cela n’est pas vrai du tout que les grands poètes ne puissent être traduits d’une langue dans une autre. […] C’était aussi bête, n’est-il pas vrai ?
Si Belmontet s’était contenté de nous dire qu’à côté des inspirations de la poésie individuelle il y avait, grâce à l’Empire et aux souvenirs qu’il a laissés dans la mémoire des hommes, une autre source de poésie ouverte et coulant à pleins bords dans le xixe siècle, nous n’eussions pas réclamé contre une telle poésie ; car rien n’est plus vrai. […] Tous les poètes du xixe siècle, sans exception, ont plus ou moins chanté l’Empire ; attirés par la poésie fascinatrice d’un tel sujet, tous sont allés, plus ou moins, puiser à cette fontaine de poésie, à cette autre fontaine des Lions, plus intarissable que celle de l’Alhambra, et tous en sont revenus plus grands et plus forts, ayant plus en eux ce qui valait mieux qu’eux : la vraie marque de l’inspiration, disait madame de Staël, qui se connaissait en poètes ! […] Belmontet a plusieurs des grandes qualités qui font le poète : il a le souflle, le mouvement, la passion vraie, l’amertume, la griffe irritée, la familiarité saisissante, qui semble s’élever en descendant… Son rhythme même (cette chose sans laquelle maintenant il n’est plus possible d’être poète), son rhythme a de puissantes articulations qui jouent avec souplesse sous sa pensée.
Elle a parfumé non pas tous, mais quelques-uns de ses vers, et ces vers-là sont ses vrais vers parmi tous les autres, et ce sont ceux-là qui encharmeront le lecteur d’un recueil qu’il publia sur le tard, comme pour ajouter la tristesse de la vie écoulée à leur tristesse. […] Monselet ne l’est pas, il est vrai, tout à fait à la façon de ce Beauvoir qu’il me rappelle. […] III Ainsi, un poète, un poète de plus parmi les vrais poètes, voilà ce qu’apprend ce recueil des Poésies complètes de Monselet, réunissant tous les rayons éparpillés de son talent et nous faisant choisir entre tous celui-là qui plaît davantage, — le plus pénétrant et le plus pur… Certes !
Il a la qualité la plus aimablement et la plus estimablement allemande : la cordialité ; et quand il aura vécu davantage, quand il aura éteint bien des tons crus qui lui restent, quoiqu’il ait déjà commencé de les adoucir, — car l’enlumineur de L’Illustre Docteur Mathéus a cédé la place au peintre dans les nouveaux Contes, — quand il aura passé sur les tableaux de genre, pour lesquels il nous semble fait, l’ombre enfumée de la délicieuse bonhomie, il aura atteint le vrai de son talent et acquis sa valeur plénière. Telles sont, au vrai, les facultés naturelles, premières, développées déjà, et qu’il doit développer davantage. […] C’est là une question de biographie intellectuelle que la Critique n’a pas besoin de se poser pour être sûre qu’il s’est trompé, et pour le rappeler au sentiment de son talent vrai… et possible.
Accepter, s’accorder avec l’univers, voilà la vraie préparation à la mort. […] Selon moi, ils possèdent la vraie poésie de la vie. […] Dans ce temps-là, j’écrivais : « La religion et la philosophie sont produites par des facultés qui s’excluent réciproquement, se déclarent impuissantes… Le système qui essayerait de les réconcilier et de les confondre ne sera jamais qu’un roman. » J’allais même plus loin, et je disais : « Affirmer qu’une doctrine est vraie parce qu’elle est utile ou belle, c’est la ranger parmi les machines du gouvernement, ou parmi les inventions de la poésie3. » Eh bien !
En second lieu, ces éloges sont, la plupart, historiques, et des faits vrais valent beaucoup mieux que de la fausse éloquence. […] À la suite de tous ces noms de guerriers ou de princes rassemblés des trois parties du monde, c’est un spectacle curieux de retrouver les noms du Dante, de Pétrarque, de Boccace, de l’Arioste, du cardinal Bibiéna, auteur de la comédie de la Calandre, jouée au Vatican sous Léon X, et du célèbre Machiavel ; sans compter cette foule innombrable de savants, presque tous Grecs ou Italiens, qui dénués, il est vrai, de ce mérite rare du génie, contribuèrent, cependant, par leurs travaux, au rétablissement des lettres, en faisant revivre les langues qui ne s’étaient conservées que chez les chrétiens de Constantinople, et la philosophie ancienne qui, depuis la chute de l’empire, n’avait été cultivée que par les musulmans arabes. […] Quoique ce prince fût encore vivant, Paul Jove ose l’appeler de son véritable nom, c’est-à-dire, un monstre ; il est vrai que ce monstre était alors détrôné et enfermé dans une cage de fer ; mais beaucoup d’autres auraient craint que la cage ne fût brisée, et que ce monstre, en remontant sur le trône, ce qui est arrivé quelquefois, ne redevînt un très grand prince.
« Le vrai amour », dit-il, « est rare comme le vrai génie, comme la vraie vertu, comme le vrai bon sens, comme tout ce qui est vrai enfin. […] Le voilà enfin sous sa vraie lumière, l’être fugace ! […] Elle fut vraie. […] En admettant que cette doctrine fût vraie, il ne serait pas moins vrai qu’elle va contre la nature. […] Rien de fini n’est vrai, n’est intéressant, n’est digne de me fixer.
Je noterai seulement trois ou quatre points de détail, qui donneront à mon observation son vrai sens et toute sa portée. […] Il est vrai que, si l’on compare, Grotius a bien moins réussi que Baïf. […] La duchesse d’Angoulême et ses enfants, Marguerite et François, s’aimaient tous les trois passionnément ; c’était, comme le dit Marguerite, un parfait triangle , et une vraie trinité. […] Mais la lettre qui, par ses termes obscurs, avait fourni matière à l’équivoque, a été depuis lors éclaircie, rapportée à sa vraie date, et une explication naturelle l’a replacée au nombre des témoignages de dévouement que Marguerite prodigua à son frère durant sa captivité. […] Cigongne contient aux dernières pages une pièce qui rappelle un peu, pour le motif, la chanson de l’Arioste, mais qui va fort au-delà ; elle trouverait sa vraie place dans un Parnasse satyrique.
Le troupeau, bondissant de joie, le précède et l’agneau suit les traces de sa mère, et si quelqu’un d’eux vient de naître à l’instant sur le sentier, le berger l’emporte dans ses bras, pendant que le chien fidèle veille sur tous et leur fait escorte. » De telles images sont d’un vrai poëte. […] Il passa de là aux harmonies sacrées où Dieu remplit tout, et me montra à moi-même la vraie route et le vrai but de toute poésie. […] À dire le vrai, c’est l’état où je suis dans tous les moments, et rien de ce que je puis voir, entendre, ou faire, n’a le pouvoir de dissiper la sombre tristesse que m’inspire la pensée des maux qui nous affligent ; que je dorme ou que je veille, elle est incessamment présente à mon esprit. […] « Dernièrement, dit-il, je me laissai entraîner à un de ses sermons, plutôt, à dire le vrai, par curiosité que dans l’espoir d’y trouver un grand intérêt. […] Tartufe, tribun et fou, c’était la vraie définition de Savonarole.
L’illusion, il est vrai, a son utilité, et je ne la méconnais point, mais il faut quelquefois la prendre pour ce qu’elle est. […] Sans doute il est facile d’être ironique sans clairvoyance et sans réflexion vraie. […] Ceci est vrai pour des ironies sans rapports visibles très étroits avec l’attitude morale que conseillent les traits caractéristiques du monde et des sociétés. […] Et les vraies occasions n’en sont pas si fréquentes qu’il soit prudent de les laisser échapper. […] La morale vraie est un art difficile et délicat, plein de nuances et semé de pièges.
On peut y entendre uniquement des fragments, des morceaux choisis des œuvres du maître allemand, non pas des œuvres symphoniques, mais bel et bien des œuvres dramatiques, sans décor il est vrai, sans mimique, sans acteur, mais avec la musique et le chant. […] Il est certain que nul n’est obligé d’être wagnérien, mais il n’est pas moins vrai que tous ceux qui prétendent à ce titre sont tenus de connaître Wagner et son œuvre, et de partager ses idées. […] » s’il les a jugés incapables de comprendre sa pensée, il n’en est pas moins vrai que ce cri de triomphe, qui s’est échappé de ses lèvres, est le seul qui émanât de sa pensée et le seul qu’il eût le droit de pousser. […] La musique, il est vrai, reste au-dessous de la conception poétique ; mais nos regrets sont de courte durée, car, dès l’entrée d’Elsa, la mélodie atteint ce degré de richesse qui a fait la fortune de l’œuvre dans toute l’Europe musicale. […] Georges Servières, musicologue et critique musical français (de son vrai nom Georges Serrurier) est né le 13 octobre 1858 à Fréjus et mort le 25 juillet 1937 à Paris.
Pour du talent, de vrai talent, je crains qu’il n’en ait pas ; du moins son Marchand n’annonce rien du tout, et ne tient pas plus que sa Jeune Indienne ne promettait autrefois. […] C’est ce qui doit arriver chez un peuple neuf, qui, pendant trois années, a parlé sans cesse de sa sublime Constitution, mais qui va la détruire, et, dans le vrai, n’a su organiser encore que l’insurrection. C’est peu de chose, il est vrai, mais cela vaut mieux que rien. De telles paroles montrent à quel point Chamfort, malgré quelques parties perçantes et profondes, n’était qu’un homme d’esprit sans vraies lumières et fanatisé. […] Oui, il est très vrai, monsieur, qu’à un certain jour j’ai pu m’assurer que le public et le peuple ne font qu’un, et sont parfois une personne ou plutôt une chose aveugle, brutale et déraisonnable ; il est très vrai que… Mais un ami me tire par l’oreille et m’avertit : « Que vous êtes bon de répondre avec autant de sérieux à un républicain pour rire !
Nous avons entendu alors, il est vrai, passer eu se glissant le bruit mystérieux de saisie, risqué peut-être par la spéculation ; mais ce bruit n’est pas allé loin… Telle est l’histoire du livre de Michelet. […] Lui, l’écrivain intense, étincelant, nerveux, nous le trouvons là, pour la première fois, pâli, vieilli, mais surtout ramolli, dans toute cette boue saignante et morbide d’une physiologie en laquelle il noie son génie vrai ! […] et il est vrai et concluant contre ce monde-là, comme nous le serions. […] S’il y a çà et là, ici, quelques idées qui échappent à la fausseté de l’ensemble, quelques clartés qui n’ont pas péri sous la préoccupation inouïe de l’auteur, c’est un fait de hasard ou d’inconséquence qui ne prouve rien en faveur de ses facultés et de leur retour à l’ordre et au vrai. […] En théologie, tous les deux donnent une singulière idée de leur science lorsqu’ils soutiennent hardiment que la Grâce, comme l’entend l’Église catholique, est exclusive de la Justice ; car c’est précisément l’idée contraire qui est la vraie.
Elles se remuent et elles s’agitent, il est vrai, mais tout ce qui agonise, tout ce qui va passer, se remue et s’agite ainsi. […] Du moins, dans Luther, on pouvait reconnaître encore, mutilés, il est vrai, par l’orgueil du sectaire, et souillés par d’ignobles concupiscences, les débris de ce qui avait autrefois été une foi et une conscience humaines ; mais chez Henri VIII, rien de pareil ! […] De 1820 à 1830, quelques ouvrages, vrais brandons d’idées, comme l’Essai de Jepp sur le caractère particulier de l’Église anglicane, et la Théosophie de Coleridge, furent introduits dans l’Université5. […] qui se resserrerait, au contraire, si l’âme d’un de ceux entre qui elle subsiste toujours se retrempait aussi dans l’obéissance et dans la vraie foi. […] Les masses ne se rendent pas raison de cette insuffisance, il est vrai ; mais qu’on ne s’y trompe pas !
S’il est vrai qu’on ne trouve pas toujours, à l’autopsie, des lésions du cerveau chez les aliénés, du moins en rencontre-t-on souvent ; et, là où il n’y a pas de lésion visible, c’est sans doute une altération chimique des tissus qui a causé la maladie. […] Il est vrai que la vue et l’ouïe vont au-delà des limites du corps ; mais pourquoi ? […] On allègue, il est vrai, que la loi de conservation de l’énergie s’oppose à ce que la plus petite parcelle de force ou de mouvement se crée dans l’univers, et que, si les choses ne se passaient pas mécaniquement comme on vient de le dire, si une volonté efficace intervenait pour accomplir des actes libres, la loi de conservation de l’énergie serait violée. […] Il est vrai que du dedans serait venue la première impulsion, à la vision intérieure nous aurions demandé le principal éclaircissement ; et c’est pourquoi le problème resterait ce qu’il doit être, un problème de philosophie. […] Descartes, il est vrai, n’allait pas encore aussi loin : avec le sens qu’il avait des réalités, il préféra, dût la rigueur de la doctrine en souffrir, laisser un peu de place à la volonté libre.
Plus tard, il est vrai, il devient triste et dégoûté de la vie ; mais, au milieu de ses souffrances d’esprit et de corps, la chose qui l’occupe le plus, celle dont il parle sans cesse, c’est toujours sa chère peinture ; c’est toujours son tableau des Pêcheurs. […] Si c’est vrai, c’est peut-être la plus grande preuve de notre misère humaine.
Karr a-t-il été toujours vrai dans ce qu’il a dit jusqu’ici ? […] Je concevrais plutôt encore une indignation réelle, sincère, ardente, souvent injuste, une vraie Némésis ; mais ces guêpes, si acérées qu’elles soient d’esprit, pourtant sans passion aucune, ces guêpes-là ne peuvent aller longtemps sans se manquer à elles-mêmes.
Ses lettres confidentielles, intimes et sublimes révélations à son ami le plus cher, montrent une résignation portée jusqu’à l’indifférence, en tout ce qui touche à la gloire éphémère des lettres… C’était une de ces âmes froissées par la réalité commune, tendrement éprises du beau et du vrai, douloureusement indignées contre leur propre insuffisance à le découvrir, vouées, en un mot, à ces mystérieuses souffrances dont René, Oberman et Werther offrent, sous des faces différentes, le résumé poétique. […] Maurice de Guérin, qui était un catholique, il est vrai, un peu inquiet, fut aussi, et à la même heure, un païen fervent.
Il est vrai qu’on reproche à celles de M. […] Ce sont-là les vrais Philosophes dignes de l’estime des Citoyens ; & non ces esprits audacieux & inquiets, qui se font un jeu de détruire ce qu’il y a de plus respectable, & dont l’objet principal est de se faire remarquer par la singularité de leurs idées.
C’est précisément contre la soumission de certains Juges & les applaudissemens du Parterre abusé, que le Zélateur du bon, du vrai, du beau, doit s’élever avec le plus de force. […] Son premier soin doit être pour le vrai, & sa derniere inquiétude pour les murmures.
En revanche, les deux Familles de satyres me font un vrai plaisir. […] Est-ce que ces chairs-là ne sont pas bien vraies [?]
Mais ils sont faux… Cela se peut, et je ne me suis pas soucié d’être vrai. […] Il avait une couleur forte et vraie.
Mais parce que c’est vrai. […] Et c’est tellement vrai. […] Il est vrai qu’il était jeune. […] Aux vrais. […] C’est que c’est vrai.
Quel beau programme, n’est-il pas vrai ! […] On peut appeler cela une vraie trouvaille ! […] Il a pu, sans fausser leur physionomie, les faire vraies et poétisées. […] Les gens qui nous lisent sont toujours (n’est-il pas vrai, confrères ?) […] « Il faut tout de même une église au milieu du village », n’est-il pas vrai ?
Chacun de nous est bien comme il est ; il a le droit de continuer de l’être ; et quiconque prétend l’en empêcher n’est de son vrai nom qu’un pédant. […] La Fontaine, vendu par la disparition ou l’éloignement de ses anciens amis à son vrai tempérament, n’écrit plus guère que des Contes ; et quels Contes, si l’on songe qu’il a passé la soixantaine ! […] Descartes n’avait été que le précurseur du rationalisme, c’est Bayle qui en est le vrai père. […] II]. — S’il est vrai, comme le dit Rapin, qu’on n’eût rien vu de mieux écrit dans notre langue ; — et que fait-il de l’Introduction à la vie dévote ? […] — On refusait de reconnaître la vérité des peintures qu’il traçait de l’amour ; — et, parce qu’elles étaient trop « vraies », on les trouvait « excessives ». — Une citation de Subligny : « Je trouverais M.
L’encens, non moins cher à la poésie, et qui par son parfum rappelle si bien celui de quelques œuvres mystiquement exquises dont nous aurons à parler, l’encens lui-même n’est guère qu’une aberration de la vraie séve, un trésor lent sorti d’une blessure, et douloureux sans doute au tronc qui le distille. […] Ce rapport, juste et délicat, se trouvera plus vrai encore pour Kitty Bell, pour Mlle de Coigny et Mme de Saint-Aignan, ces sœurs humaines d’Éloa, à mesure que nous avancerons dans les dédales d’ivoire que le père de Stello aime à construire et où il dispose ses blanches figures. […] Il avait chanté (bien rarement, il est vrai, — une seule fois dans le Trappiste) la légitimité, et il se demandait pourquoi. […] Pour emprunter des paroles à l’auteur lui-même, je dirai aussi : Tout cela est très-bien, très-pur, très-dèlicat ; d’un vrai idéal, et à ravir26. […] C’est une chose certaine, que le vrai, quand je le vois, me transporte hors de moi ; je le rencontre comme un ami intime, et, dans tout ce que vous dites, il n’y a rien qui ne soit d’une admirable justesse.
Et pourtant il est vrai de dire que, hors de l’enceinte des Facultés, et dans ce qu’on peut appeler le grand milieu de la littérature courante, ce progrès des lettres anciennes se marque assez peu et ne se produit par aucun représentant notable, par aucune œuvre lue de tous. […] C’est ainsi que j’ai péri par la plus lamentable mort… » Ce dernier trait si vrai, si vrai à la fois quant à l’image physique et quant au contraste moral qui en ressort (le Roi des rois tué, assommé comme le bœuf qui mange !) […] L’idéal, en cette période de Sophocle, peut sensiblement revêtir et comme modeler les groupes tragiques, mais c’est un idéal encore qui n’altère en rien le naturel simple et vif, et qui respecte la douleur humaine prête à se faire jour par des cris au besoin et par tout ce qu’il y a de plus vrai dans le langage. […] Le sentiment vrai, qui, par instants s’y glisse, est propre à augmenter encore les regrets. « Catulle, qu’on ne peut nommer sans avoir horreur de ses obscénités, a écrit Fénelon en cette même Lettre qu’il m’arrive d’invoquer souvent, est au comble de la perfection pour une simplicité passionnée » ; et il cite un distique sur Lesbie. […] » — Et si vous dites cela, voguez au plus vite, voguez à souhait : Jupiter propice soufflera dans votre voilure. » Démo, la petite-maîtresse aux parfums, lui inspirera aussi quelques vrais accents ; c’est pour elle qu’il s’écriait à l’aurore : « Point du jour, pourquoi, ennemi des amoureux, m’es-tu survenu si vite sur ma couche lorsqu’à peine je commençais à m’attiédir auprès de ma chère Démo ?
Le vrai nom de Mme d’Holwede était Mlle de Colomel, du nom d’une famille française de la Bourgogne réfugiée en Allemagne après la révocation de l’édit de Nantes. […] Il n’avait qu’un vrai mérite, il étudiait consciencieusement ce que les autres avaient découvert ; il savait, dans le sens borné du mot science, et il préparait dans l’ombre le procès-verbal à peu près complet de tout ce que le monde savait ou croyait savoir de son temps pour écrire un jour son Cosmos. […] Mais là où il avait reconnu le bon et le vrai, il s’y sentait porté à encourager, à conseiller, à venir en aide, et, des points les plus éloignés de l’univers, se concentrèrent auprès de lui les demandes, les confidences, les sollicitations de secours, non-seulement pour des intérêts scientifiques, mais pour une foule d’intérêts publics. Il se faisait un devoir de soutenir le vrai talent. Il ne connaissait ni jalousie ni politesse, là où d’autres opinions le blessaient, pourvu qu’elles fussent guidées par le désir d’arriver à la vraie science.
— C’est vrai, pourtant, dis-je, en baissant la tête, à la brave femme, de peur de me trahir. […] Non, non, je mourrai plutôt mille fois pour un faux crime, que de vivre par un vrai crime dont toi et eux vous seriez punis à jamais pour moi ! […] je n’eus pas grand-peine à provoquer ces renseignements ; dès que je la rencontrai, en sortant du cloître, dans la cuisine où j’allais chercher les paniers de provende pour le souper des prisonniers : — Tu auras trop tôt une écuelle de moins à leur servir, me dit-elle avec une vraie compassion. […] C’est une belle loi de Lucques, n’est-ce pas, celle-là, c’est une loi de vrais chrétiens qui donne le temps de revenir à Dieu avant que de quitter la terre, et qui suppose déjà innocents ceux à qui Dieu lui-même va pardonner au tribunal de sa miséricorde ? […] Et vous me croirez encore, si vous avez de la foi, j’ai reconnu, tout comme je reconnais votre voix à tous les deux à présent, la vraie voix et le vrai air de la zampogne de votre frère et de votre mari, mort des fièvres en revenant des Maremmes ; et, bien plus encore, ajouta-t-il, l’air que j’ai entendu si souvent jouer dans la grotte par vos deux enfants, pendant que je montais ou que je descendais par votre sentier !
Les vrais réalistes sont Hérondas, Pétrone, Alain Lesage. […] Avant de toucher ce vrai fond de Henri Lavedan, voyons d’abord en lui ce qui, tout de suite, apparaît. […] Et, en effet, ce n’est que le futur qu’on peut « systématiser » sans violenter le vrai. […] À cause de cela, et parce qu’il me semble avoir plus d’imagination et plus de sensibilité feinte ou vraie que de précision dans les idées ou de force dans le raisonnement, M. […] Il contient l’âme vraie de Bernadette, et il interprète Lourdes avec une bienveillance qui écarte les grossièretés fâcheuses du spectacle extérieur.
Faire vrai, de nos jours, c’est nous représenter une chaufferie de navire ou nous montrer une femme gigotant dans son lit. […] C’est si vrai qu’Antoine, fidèle à lui-même, essaie de le réouvrir en son vaste Odéon où nous voyons avec joie le succès récompenser enfin son inlassable effort, et que M. […] Ernest Bovet, Lyrisme, épopée, drame, dont la thèse ingénue et hardie à la fois a quelques chances d’être vraie. […] Sans doute, s’il est vrai que les choses scéniques détournent bien des lecteurs, accaparent bien des cerveaux, retiennent bien des attentions qui n’ont plus, dès lors, le temps, ni la force de s’abandonner aussi librement ailleurs. […] La littérature, la vraie, ne peut pas s’installer au théâtre, parce que le bruit d’un cœur battant est étouffé par le bruit des gens qui marchent.
Les hommes d’un vrai talent de chaque époque sont toujours doués d’un instinct qui les pousse vers le nouveau, comme des voyageurs qui marchent sans cesse à la découverte des pays inconnus. […] Songez que vous parlez à ce peuple français, le premier peuple du monde, parce qu’il est le plus chevaleresque et en même temps le plus philosophique ; à ce peuple changeant il est vrai, parce qu’il est étonnamment impressible, mais qui sait souffrir et mourir pour une doctrine, qui fait la guerre pour le triomphe d’une idée, et dont les fureurs même ont été commises au nom d’un principe. […] Nous examinerons plus loin si cet avantage n’a pas été payé depuis trop chèrement, en nous privant d’un grand nombre de ressorts dramatiques ; toujours est-il vrai, que si les pères de la tragédie française n’ont pas créé beaucoup de personnages, ni de fables, on ne peut leur refuser une création immense, celle d’un système entier dont les formes majestueuses ne se sont pas altérées pendant deux cents ans. […] Une autre erreur, à laquelle sont même sujets certains hommes de lettres, c’est de croire qu’il n’y a qu’une manière de bien écrire, qu’un vrai type de style. […] Sans doute, avec du travail et une organisation assez heureuse, on parvient dans les vers, comme dans tous les arts, à une certaine élégance vulgaire, à une froide correction, à une mélodie molle, que n’ont pas quelquefois au même degré les hommes d’un vrai génie.
Il existe un vrai supérieur qui est vrai à l’exclusion de tout à peu près de vérité. […] Poitou traite surtout, il est vrai, du théâtre et du roman. […] Il est vrai qu’il respecte médiocrement la syntaxe et qu’il ne sait point se borner. […] Tout détail lui est bon, pourvu qu’il soit vrai, même quand il serait insipide. […] Vrai Horace de Paris, s’il se fût mieux exercé dans l’épître familière !
On ne cesse d’opposer à toute réforme de l’orthographe le vers d’Horace sur l’usage, maître absolu et seul régulateur légitime du langage : « Quem penes arbitrium est… » Cela est vrai des mots mêmes qui sont mis en circulation plus que de la manière de les écrire. […] Il retrouva quelques années après une compagnie plus à son gré dans la société de l’Entresol (1725), vrai berceau d’une Académie des sciences morales et politiques. […] Être lu et traduit par un homme d’esprit comme Voltaire, c’est tout profit pour l’abbé ; il devient alors un 48 vrai répertoire d’idées, même pratiques, et c’est en ce sens qu’il a pu influer indirectement. […] Tant il est vrai que le bonhomme devait avoir de ce qui fait sourire, jusque dans l’instant suprême !
L’imagination et la sensibilité, quand on les possède, ont vite reconnu leurs traces, et la vraie poétique est trouvée. […] La vie privée, en tant qu’elle est vraie, se vit avant tout, se pratique, se démontre par l’exemple et par le récit ; elle ne se préconise pas. Quisapit, in tacito gaudeat ille sinu a dit le poète élégiaque ; ce qui n’est pas moins vrai des félicités et des vertus domestiques que des amours mystérieuses. […] Ce personnage de Simiane à côté de Rousseau est vrai ; celui-ci a eu de tels amis, ses égaux d’esprit et d’âme, et obscurs ; on peut relire l’éloquente page qu’il consacre à la mémoire de l’un d’eux : « Ignacio Emmanuel de Altuna était un de ces hommes rares que l’Espagne seule produit, et dont elle produit trop peu pour sa gloire…31. » Simiane est un de ces Emmanuels de Jean-Jacques, restés inconnus.
Les sentiments qui ne réveillent dans la pensée aucune idée morale aucune réflexion générale, sont probablement des sentiments affectés qui ne répondent à rien de vrai dans aucun genre. […] Une épithète trop forte peut détruire entièrement un argument vrai ; la plus légère nuance déroute entièrement l’imagination prête à vous suivre ; une obscurité de rédaction que la réflexion pénétrerait bien aisément, lasse tout à coup l’intérêt que vous inspiriez ; enfin le style exige quelques-unes des qualités nécessaires pour conduire les hommes. […] La vraie dignité du langage est le meilleur moyen de prononcer toutes les distances morales, d’inspirer un respect qui améliore celui qui l’éprouve. […] Jamais, dans nos crises révolutionnaires, jamais aucun homme n’aurait parlé cette langue dont j’ai cité quelques mots remarquables ; mais dans tout ce qui nous est parvenu des rapports qui ont existé par écrit entre les magistrats d’Amérique et les citoyens, l’on retrouve ce style vrai, noble et pur dont la conscience de l’honnête homme est le génie inspirateur.
De temps en temps, surtout dans les épîtres, dans les élégies, deux ou trois vers naturels se détachent ; c’est un geste vrai qui s’est montré en dépit des broderies roides et des longues manches. […] Il essayait des dizains, des ballades, des rondeaux, des virelais ; il revenait à la source gauloise, au style naïf, au petit vers leste et campagnard, qui aime les mots francs, qui dit en courant toutes les choses vraies. […] Il est difficile à un homme si gai d’être un vrai précepteur de moeurs. […] Plus tard ayant trouvé le rythme vrai, il est devenu notre plus grand poëte.
Il fut, lui, un vrai critique, et le premier, en exceptant toutefois cet abbé d’Aubignac, si pédant et si injurieux, mais qui du moins bataillait pour des idées et des principes. […] Il est très vrai que Boileau ne motive pas toujours toutes ses condamnations, et qu’il fait plus d’une exécution sommaire. […] Et notamment si tout l’effort de la critique depuis Scaliger tendait à fonder en raison le culte, et l’imitation des anciens, le vrai collaborateur et précurseur de Boileau, celui qui est comme l’anneau intermédiaire de la chaîne entre Malherbe et lui, c’est Chapelain. […] Il est vrai qu’il ne définit pas le bon sens : et l’on entrevoit que pour lui, le bon sens, sans qu’on sache pourquoi, se réduit à la stricte observance des règles, comme si c’étaient des moyens nécessairement efficaces, qui produisent les chefs-d’œuvre par une vertu intrinsèque.
Tout Marivaux donc était là, et le vrai Marivaux. […] Larroumet aimait mieux induire lentement de faits multiples, emboiter le pas tranquillement à des jugements antérieurs qu’il reconnaissait vrais, que de jeter des aperçus mal vérifiés, ou d’étaler des fantaisies brillantes. […] Eugène Benoist fut le vrai maître de Larroumet, avec Sainte-Beuve. […] A vrai dire, l’état civil d’Armande est fort louche ; et les vraisemblances communes sont pour que Madeleine Béjart ait eu plus d’un amant.
Les montres réglées de la sorte ne marqueront donc pas le temps vrai, elles marqueront ce qu’on peut appeler le temps local, de sorte que l’une d’elles retardera sur l’autre. […] Cela sauverait le principe de Newton, mais cela n’est pas vrai ; si l’énergie en se propageant restait toujours attachée à quelque substratum matériel, la matière en mouvement entraînerait la lumière avec elle et Fizeau a démontré qu’il n’en est rien, au moins pour l’air. […] Et maintenant certaines personnes pensent qu’il ne nous paraît vrai que parce qu’on ne considère en mécanique que des vitesses modérées, mais qu’il cesserait de l’être pour des corps animés de vitesses comparables à celle de la lumière. […] Peut-être ont-ils, outre leur masse électro-dynamique, une vraie masse mécanique.
N’y a-t-il pas en France de vrais Français portant des noms germaniques ? […] Michelet, à propos de Zaïre, écrit44 : « L’âme française un peu légère, mobile et refroidie par le convenu, l’artificiel, semble à ce moment gagner un degré de chaleur. » Ce qui était vrai dès 1732 l’est bien davantage dans les soixante années qui suivent. […] » Cela est vrai en partie, semble-t-il. […] Il n’en est pas moins vrai que dans les classes les plus instruites se propagent des états morbides à demi factices.
Et ainsi s’accomplit la vraie révélation. […] C’est ainsi, nous le répétons, que les poètes sont réellement de vrais prophètes. […] Il serait stupide de prétendre que ce n’est pas là une chose vraie et absolue. […] Dans un grand peintre, dans un poète vrai et sévère, dans un dramaturge éloquent et fort, dans un musicien limpide et précis, il y a un penseur instruit de toutes les connaissances possibles.
Je ne sais si cela a cessé d’être vrai aujourd’hui qu’on se flatte d’avoir aboli les distinctions de naissance, il me semble que les fils de personnages considérables, que les noms historiques, ne laissent pas d’avoir encore au moins dix ans d’avance sur les autres au début de la carrière. […] Saint-Marc Girardin nous dira avec Fénelon ; et il nous répondrait encore avec Voltaire, car je me plais à laisser parler ces esprits excellents ; toute la vraie rhétorique française, la rhétorique naturelle est comme éparse dans leurs écrits ; il ne s’agit que de la recueillir. […] Horace, dans ses vers, a résumé toute la substance et la fleur de l’ancienne critique : en vraie abeille qu’il est, il en a fait un miel aussi agréable que nourrissant. […] Il a écrit, à propos d’une comédie de Collé et de La Métromanie de Piron, des pages charmantes, délicates, que je prise bien plus comme témoignage vrai de son talent que d’autres plus saillantes et où il élève la voix.
Ma pensée est claire ou obscure, vraie ou fausse : qu’est-ce qu’un mouvement clair ou obscur, vrai ou faux ? […] Je ne suis pas porté à croire que cette seconde proposition soit plus vraie que la précédente. […] On connaît ces deux lois qui ont pu être exagérées sans doute par l’école empirique et sensualiste, mais qui restent vraies dans leur généralité : l’âme ne pense pas sans images, l’âme ne pense pas sans signes.
Ces tendances dissemblables, M. de Bouhélier, confusément, il est vrai, les avait pressenties et les mêlait en sa Tragédie du Nouveau Christ et dans la Victoire, œuvres inégales, manquées, énorme effort égaré dans le vide mais qui dénote une ardeur considérable, un tempérament audacieux. […] Théâtre moral, parfaitement possible devant un vrai public, d’un intérêt plus soutenu qu’on ne peut l’avouer, Saül et le Roi Candaule seront jouées régulièrement quelque jour et lors, on s’étonnera de l’inintelligence de notre critique actuelle. […] Dans toutes les pièces qui suivront il unira le poète au psychologue, le rêve à la vérité la plus stricte et par là il sera plus vrai que tant d’autres. […] Il y voit avec son cœur ; sa vérité n’est pas celle du statisticien ni celle du photographe ; sa préoccupation du détail ne nuit pas aux effets de l’ensemble, le Masque, Maman Colibri, la Marche Nuptiale réalisent le théâtre d’aujourd’hui le plus intense, le plus sobre, le plus vrai que nous ayons eu depuis Amoureuse, depuis Porto-Riche et depuis Jules Renard.
Dans la comédie, les acteurs chaussez et vétus à l’ordinaire ne crient point si haut, mais leurs masques sont encore plus ridicules que ceux des premiers. " il est vrai qu’à l’aide de ces masques, l’acteur paroissoit aussi conforme qu’il le vouloit au caractere qu’il devoit soutenir. […] Nous souffrons bien, il est vrai, que nos comédiens nous cachent aujourd’hui la moitié des signes des passions qui peuvent être marquez sur le visage. […] Or s’il est vrai de dire que les passions se rendent encore plus sensibles par les altérations qui surviennent sur notre visage, que par les altérations qui surviennent dans notre geste et dans toutes nos attitudes et dans notre ton de voix ; il est aussi vrai que les passions se rendent encore plus sensibles par ce qui arrive dans nos yeux que par ce qui arrive dans les autres parties de notre visage.