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947. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

Il convient pourtant qu’il n’est pas inutile de l’être quelquefois ; car il faut avoir la tête bien grosse quand on a éprouvé une perte en un lieu pour ne pas y pourvoir lorsqu’on se retrouve exposé au même hasard ; c’est le cas de se faire sage par sa perte : « Mais je me suis bien trouvé, ajoute-t-il, de ne l’avoir pas été, et aime mieux m’être fait avisé aux dépens d’autrui qu’aux miens. » Pour un personnage tout d’action et si homme de main, il est à remarquer comme il aime les préceptes, les sentences, et à moraliser sur la guerre ; il le fait en un style vif, énergique, imaginatif, gai parfois et qui sourit : oh ! […] Il se hasarde de propos délibéré, à la tête d’une centaine de gens de pied, pour protéger la retraite de la cavalerie qui s’était imprudemment engagée, et à force d’audace, de ténacité, de ruse, de tours et de retours, il parvient non seulement à sauver les autres, mais à se sauver lui-même le dernier. […] Deux trous furent pratiqués à la muraille, et Montluc aussitôt se jeta dans l’un tête baissée : « Dieu me donna (alors), dit-il, ce que je lui avais toujours demandé, qui était de me trouver à un assaut pour y entrer le premier ou mourir. » Ce dernier vœu faillit se vérifier ; ses soldats, assaillis d’une grêle de pierres, ne purent le suivre, et n’eurent d’autre moyen de le secourir que de le tirer dehors par les jambes, quand, blessé et renversé à terre, il eut à faire sa retraite à reculons ; mais ils ne le tirèrent pas si bien que, roulant de haut en bas jusqu’au fond du fossé, son bras ne se rompît en deux endroits : « Ô mes compagnons !

948. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettres sur l’éducation des filles, par Mme de Maintenon » pp. 105-120

Cela bien entendu, elle veut le vrai dans l’éducation dès le bas âge : « Point de contes aux enfants, point en faire accroire ; leur donner les choses pour ce qu’elles sont. » — « Ne leur faire jamais d’histoires dont il faille les désabuser quand elles ont de la raison, mais leur donner le vrai comme vrai, le faux comme faux. » — « Il faut parler à une fille de sept ans aussi raisonnablement qu’à une de vingt ans. » — « Il faut entrer dans les divertissements des enfants, mais il ne faut jamais s’accommoder à eux par un langage enfantin, ni par des manières puériles ; on doit, au contraire, les élever à soi en leur parlant toujours raisonnablement ; en un mot, on ne peut être ni trop ni trop tôt raisonnable. » — « Il n’y a que les moyens raisonnables qui réussissent. » — Elle le redit en cent façons : « Il ne leur faut donner que ce qui leur sera toujours bon, religion, raison, vérité. » Dans un siècle où sa jeunesse pauvre et souriante avait vu se jouer tant de folies, tant de passions et d’aventures, suivies d’éclatants désastres et de repentirs ; où les romans des Scudéry avaient occupé tous les loisirs et raffiné les sentiments, où les héros chevaleresques de Corneille avaient monté bien des têtes ; où les plus ravissantes beautés avaient fait leur idéal des guerres civiles, et où les plus sages rêvaient un parfait amour ; dans cet âge des Longueville, des La Vallière et des La Fayette (celle-ci, la plus raisonnable de toutes, créant sa Princesse de Clèves), Mme de Maintenon avait constamment résisté à ces embellissements de la vérité et à ces enchantements de la vie ; elle avait gardé son cœur net, sa raison saine, ou elle l’avait aussitôt purgée des influences passagères : il ne s’était point logé dans cette tête excellente un coin de roman. « Il faut leur apprendre à aimer raisonnablement, disait-elle de ses filles adoptives, comme on leur apprend autre chose. » Et de plus, cette ancienne amie de Ninon savait le mal et la corruption facile de la nature ; elle avait vu de bien près, dans un temps, ce qu’elle n’avait point partagé ; ou si elle avait été effleurée un moment, peu nous importe, elle n’en était restée que mieux avertie et plus sévère. […] Mais avec Esther et les représentations toutes royales qui s’en étaient suivies, il y avait eu un enchantement plus insensible et comme une légère ivresse de la communauté tout entière : le goût de l’esprit, de la poésie, des écritures de tout genre, s’était glissé dans ces jeunes têtes, et menaçait de corrompre à sa source l’éducation simple et droite, et principalement utile, dont elles avaient avant tout besoin.

949. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier » pp. 303-319

Créature privilégiée, prenez un peu de confiance, soulevez votre tête charmante, et ne craignez pas d’essayer votre main sur la lyre d’or des poètes. […] Le Chateaubriand politique, que nous avons autrefois essayé de peindre, achève de s’y dessiner tout entier, jamais content, toujours prêt à rompre, en ayant, dès le second jour, de cent pieds par-dessus la tête, voulant tout et ne se souciant de rien, n’ayant pas assez de pitié et de dédain pour ses pauvres amis, ses pauvres diables d’amis (comme il les appelle), croyant que de son côté sont tous les sacrifices, et se plaignant de l’ingratitude des autres, comme si seul il avait tout fait. […] On vous a dit que l’encens m’était monté à la tête ; venez, et vous verrez ; il m’aurait fait un tout autre effet.

950. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers (tome xviie ) » pp. 338-354

Sans s’arrêter à des sièges, tournant nos défenses, elles se sont donné rendez-vous sur la Haute-Marne, entre Chaumont et Langres, d’où, réunies, elles doivent se porter en masse vers Paris, droit au cœur et à la tête de l’Empire. […] C’est un problème qui se déplace, qui se pose à chaque instant en des termes nouveaux ; et chaque fois il s’improvise, dans la tête militaire la plus inventive qui ait jamais été, une manière de solution nouvelle. […] Mais, apprenant que Blucher en personne s’avance pour avoir raison de l’affront de ses lieutenants, il revient sur Montmirail ; le 14 au matin, rejoignant Marmont qui tient tête à Blucher, il prend à l’instant l’offensive et fait perdre au généralissime prussien de 9 à 10000 hommes ; c’est la journée dite de Vauchamps.

951. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

L’entretien s’animant à ce sujet, et continuant de parler de cette sorte de chanson et de son influence électrique sur les nations à certaines heures, Gœthe disait qu’il fallait pour cela qu’une nation n’eût qu’une tête et qu’un cœur et, à un moment donné, qu’une seule voix : « Mais, ajoutait-il, une poésie politique n’est aussi que l’œuvre d’une certaine situation momentanée qui passe et qui ôte à la poésie la valeur même qu’elle lui a donnée. » Il reconnaissait qu’il y avait seize ans, même dans cette Allemagne si divisée, mais unie alors dans un sentiment commun contre l’étranger, un poëte politique aurait pu exercer aussi son influence sur le pays tout entier, et il ajoutait : « Mais ce poëte était inutile : le mal universel et le sentiment général de honte avaient, comme un démon, saisi la nation ; le feu de l’inspiration qui aurait pu enflammer le poëte brûlait déjà partout de lui-même. […] Il n’aimait pas la littérature qui fait dresser les cheveux sur la tête. […] Il n’y a pas un passage faible ; il n’y a pas un endroit grand comme la tête d’une épingle, où manquent l’invention et l’esprit.

952. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

À la surface tout était soumis en Allemagne ; tout reconnaissait la domination suprême du vainqueur de Wagram et de l’arbitre de la Confédération du Rhin ; les rois, les princes s’inclinaient et courbaient la tête : le peuples restaient frémissants. […] Une meilleure tête que l’abbé de Pradt eût été insuffisante à conjurer les événements qui se précipitèrent. […] Je le vois encore avec sa petite taille, sa tête portée en arrière, son geste pétulant, cette figure dont on a dit « qu’elle ressemblait à celle du péché mortel vieilli. » J’eus beau faire, je n’avais encore rien rabattu en moi, à cette époque, des hauts dégoûts et des dédains superbes de la jeunesse ; on l’entourait, on faisait cercle, on l’appelait Monseigneur à tour de bras : pour moi, je ne pus parvenir à rattacher à la figure du personnage rien qui ressemblât à de la considération et à du respect.

953. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite.) »

Ces diables d’animaux-là me feront tourner la tête ; ce qui fait bien voir combien il est difficile de concilier les différentes nations. […] Il voulait être bien des choses à la fois, il lui passait par la tête bien des idées qu’il n’accomplissait qu’à demi. […] Duclos, le courtisan bourru, qui avait été sondé à l’avance et consulté par quelque émissaire de Berny, se mit à la tête de ceux qui portaient le prince : il jouissait de faire pièce à son bon ennemi d’Olivet.

954. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

Le séjour au château de Silly chez une amie d’enfance, l’arrivée du jeune marquis, son indifférence naturelle, la scène de la charmille entre les deux jeunes filles qu’il entend sans être vu, sa curiosité qui s’éveille bien plus que son désir, l’émotion de celle qui s’en croit l’objet, son empire toutefois sur elle-même, la promenade en tête à tête où l’astronomie vient si à propos, et cette jeune âme qui goûte l’austère douceur de se maîtriser, cette suite légère compose tout un roman touchant et simple, un de ces souvenirs qui ne se rencontrent qu’une fois dans la vie, et où le cœur lassé se repose toujours avec une nouvelle fraîcheur. […] Son caractère ambitieux et sec parut se dessiner de plus en plus en avançant ; Grimm prétend qu’il était pédant et peu aimable ; il nous apprend que des mécomptes d’ambition lui troublèrent finalement la tête, au point qu’il se jeta par une fenêtre et se tua.

955. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VII. De l’esprit de parti. »

Cette passion étouffe dans les hommes supérieurs les facultés qu’ils tenaient de la nature, et cette carrière de vérité, indéfinie comme l’espace et le temps, dans laquelle l’homme qui pense jouit d’un avenir sans bornes, atteint un but toujours renaissant ; cette carrière se referme à la voix de l’esprit de parti, et tous les désirs, comme toutes les craintes, vouent à la servitude de la foi les têtes formées pour concevoir, découvrir et juger. […] D’abord l’esprit de parti ne peut jamais obtenir ce qu’il désire ; les extrêmes sont dans la tête des hommes, mais point dans la nature des choses. […] … C’est d’une telle supposition que les anciens ont tiré les plus terribles effets de leurs tragédies : ils attribuent à la fatalité les actions coupables d’une âme vertueuse ; cette invention poétique, qui fait du rôle d’Oreste le plus déchirant de tous les spectacles, l’esprit de parti peut la réaliser ; la main de fer du destin n’est pas plus puissante que cet asservissement à l’empire d’une seule idée, que le délire que toute pensée unique fait naître dans la tête de celui qui s’y abandonne ; c’est la fatalité, pour ces temps-ci, que l’esprit de parti, et peu d’hommes sont assez forts pour lui échapper.

956. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort »

Elle est singulière, cette tête si connue : longue, maigre jadis, au front proéminent, aux pommettes saillantes, aux yeux enfoncés, aux lèvres serrées, au nez un peu court et comme arrêté d’un coup de ciseau qui a trop mordu : tête tourmentée et bizarre, pleine de protubérances et de méplats, surmontée d’un toupet comme on en voit flamboyer sous le lustre des cirques, et où il y a, en effet, du Méphisto et du clown, et peut-être aussi du chevalier de la triste figure. […] Avouez en outre qu’en dehors de la famille Bonaparte il n’y a plus pour la France que honte et misère ; Le Moniteur publierait, pour le jour de l’enterrement, en tête de sa partie non officielle, cette note triomphante : « Le fameux X…, qui après avoir donné, au coup d’État, sa démission de professeur de rhétorique au collège de Senlis, a été transporté à Lambessa aux frais de notre généreux gouvernement ; le fameux X…, pressé par l’évidence, a avoué, à son lit de mort, qu’il n’avait jamais été plus libre que sous ce règne, et qu’il expirait dans les bras de la Constitution, à laquelle il jurait obéissance dans ce monde et dans l’autre. » Appliqué aux derniers moments de l’honorable M. 

957. (1890) L’avenir de la science « XII »

Les murs de l’église en granit à peine équarri et couvert de mousse, les maisons d’alentour construites de blocs primitifs, les tombes serrées, les croix renversées et effacées, les têtes nombreuses rangées sur les étages de la maisonnette qui sert d’ossuaire 110 attestaient que, depuis les anciens jours où les saints de Bretagne avaient paru sur ces flots, on avait enterré en ce lieu. […] C’est un usage en Bretagne de renfermer les têtes de morts dans une boîte de bois en forme de petite chapelle, au-devant de laquelle est une ouverture en forme de cœur, et c’est par là que la tête voit le jour.

958. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre III. Le cerveau chez l’homme »

Ainsi tous les auteurs ont trouvé la tête plus grosse chez les Caucasiques que chez les Mongols, chez les Mongols que chez les nègres, chez les nègres d’Afrique que chez ceux d’Océanie. […] Le développement du cerveau est un phénomène tout dynamique et le signe d’une vitalité plus grande : une petite tête dont le cerveau s’accroît encore est dans une. condition meilleure pour l’éducation de l’intelligence qu’une tète plus grande dont le développement est arrêté. […] Enfin, si l’on considère la forme du crâne, et par conséquent du cerveau, comme plus significative que le poids, il nous apprend que les idiots ont au moins autant que les autres hommes cette forme de tête allongée, qui, depuis Vésale, est généralement attribuée à une plus forte intelligence.

959. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

Si l’on écrit la vie de Charlemagne ou de Napoléon, ce sont ces mots qu’on écrira en tête du livre. […] C’est Laurence Sterne lui-même qui raconte avoir pleuré rien qu’à lire ces mots inscrits en tête d’un livre, avec, sans doute, un frontispice ad hoc : les lamentations du glorieux roi de Kaërnavan mis en prison par ses enfants . […] Quels mots plus obscurs que ceux-ci : le Repas du Lion, placés par M. de Curel en tête du drame qu’il fit jouer l’an dernier ?

960. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

qui se posa jusqu’à son dernier jour sur un trépied de Pythonisse, prête à vous le jeter à la tête, comme une cuisinière, pour peu que vous eussiez seulement contesté l’inspiration ou le trépied ! […] Et à commencer par son roman intitulé Lui, ce scandale, imité d’un autre scandale, dont les personnages, aux noms seulement défigurés pour qu’on les reconnaisse tous, ne vivent plus maintenant, à l’exception d’un seul… Ce qui prouve la radicale nullité des femmes, en fait d’invention, c’est qu’elles n’ont dans la tête qu’un roman et c’est le leur, celui de leur vie : Mme Golet n’a pas fait exception à cette loi. […] Elle s’y pose en Artémise, buvant, dans l’encre, les cendres de son époux, quand il est de légende que feu Colet, qui était musicien, et qui n’était pas Socrate, cassait à cette Xantippe, ses meilleurs violons sur la tête… L’hypocrisie du mot n’a d’égale, en son livre, que son impertinence.

961. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

Un homme gravit le tertre, la tête baissée, le dos frissonnant, un homme écrasé, éreinté, portant un sac. […] Rougit comme un bébé, dès que l’espérance d’un plaisir permis lui monte à la tête. […] Mais c’est à faire jaillir des cheveux de la tête d’un chauve ! […] Ajoutez une demi-douzaine de têtes amusantes et de corps imprécis, que M.  […] Il lève la tête et voit devant lui une jeune miss qui le toise d’un air exigeant.

962. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

Il sortit de l’École avec le titre d’agrégé des Lettres, et le premier à la tête du concours. […] Beulé, en partant, laissait Gandar aux soins d’un jeune et nouveau membre de l’École, dont le coup d’essai brillant, le premier exploit signalé datera également de la Grèce, mais dans un genre bien différent : « Beulé parti, écrivait Gandar, je vivrai en tête à tête avec un de nos jeunes collègues né à Dieuze et garçon d’esprit, M.  […] J’ai regretté particulièrement il y a quelques semaines de n’avoir pas sous la main les Artistes dominicains du père Marchese ; mais je dois me résigner et marcher toujours, toujours courir… Jugez si les désirs et les regrets se pressent dans ma pauvre tête. […] Sainte-Beuve ont été réimprimés en tête du premier volume des Lettres. […] « … Mon fardeau m’a poursuivi jusqu’ici, et aucun chapelier ne consent à la coiffer (ma tête) ni d’un chapeau ni d’un bonnet grec ; il paraît que dans le pays de Phidias on me trouve aussi plus gros que nature ; mais vous devez me pardonner ma laide grosse tête, car j’ai un bon gros cœur pour vous aimer… » (Lettre d’Athènes, 23 mai 1848, à Mme Viollet-Le-Duc.) — En insistant sur l’idée de force et de solidité, qui était le caractère le plus saillant, il ne serait que juste toutefois, pour compléter la physionomie, de marquer aussi ce qu’il y avait d’intelligence sur ce front et parfois de finesse dans ce regard.

963. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

…………………………………………………… Certes, quiconque a vu pleuvoir dessus nos têtes Les funestes éclats des plus grandes tempêtes Qu’excitèrent jamais deux contraires partis, Et n’en voit aujourd’hui nulle marque paraître, En ce miracle seul il peut assez connaître Quelle force a la main qui nous a garantis. […] L’invective contre les rebelles est, dès le début, poussée à outrance : il est temps d’en finir, et, comme il le dit, de donner le dernier coup à la dernière tête de l’Hydre : Fais choir en sacrifice au Démon de la France132 Les fronts trop élevés de ces âmes d’Enfer, Et n’épargne contre eux, pour notre délivrance,     Ni le feu ni le fer. […] Il a eu cependant d’heureux mouvements dans ses amours de tête, et l’on chante encore avec plaisir : Ils s’en vont, ces rois de ma vie,     Ces yeux, ces beaux yeux, etc. […] — Mieux que personne, Malherbe, avec cette verdeur de sexagénaire que lui ont reconnue de bons juges, mérite l’éloge et le respect qu’un esprit délicat, Joubert, accorde aux têtes et aux écrits de vieillards. Après en avoir cité quelques-uns : « Feuilletez ceux que je vous nomme, ajoute-t-il, et vous me direz si vous ne découvrez pas visiblement, dans leurs mots et dans leurs pensées, des esprits verts quoique ridés, des voix sonores et cassées, l’autorité des cheveux blancs, enfin des têtes de vieillards.

964. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

Mell prend sa flûte, et y souffle, dit Copperfield, « au point que je finissais par penser qu’il ferait entrer tout son être dans le grand trou d’en haut pour le faire sortir par les clefs d’en bas. » Tom Pinch, désabusé, découvre que son maître Pecksniff est un coquin hypocrite. « Il avait été si longtemps accoutumé à tremper dans son thé le Pecksniff de son imagination, à l’étendre sur son pain, à le savourer avec sa bière, qu’il fit un assez pauvre déjeuner le lendemain de son expulsion. » On pense aux fantaisies d’Hoffmann ; on est pris d’une idée fixe et l’on a mal à la tête. […] À l’instant, son tablier blanc était relevé par dessus sa tête, comme la blouse d’un enfant méchant, et l’on voyait sa faible petite canne lutter et s’agiter inutilement dans sa main ; ses jambes subissaient une agitation terrible, et Toby lui-même tout courbé, faisant face tantôt d’un côté, tantôt d’un autre, était si bien souffleté et battu, et rossé, et houspillé, et tiraillé, et bousculé, et soulevé de terre, que c’était presque positivement un miracle s’il n’était pas enlevé en chair et en os en haut de l’air, comme l’est parfois une colonie de grenouilles, ou d’escargots, ou d’autres créatures portatives, pour tomber en pluie, au grand étonnement des indigènes, dans quelque coin reculé du monde où l’espèce des commissionnaires est inconnue1341. […] Cette autorité était accrue par les cheveux de l’orateur, qui se dressaient sur les côtés de sa tête chauve, sorte de plantation de pins ayant pour but de protéger contre le vent la surface luisante, toute couverte de protubérances, ainsi qu’une croûte de pâté aux prunes, comme si la tête eût été un magasin insuffisant pour la dure masse de faits accumulés dans son intérieur. […] Vous pourriez espérer de faire entrer quelque autre croyance dans la tête de Georges Gradgrind, ou d’Auguste Gradgrind, ou de John Gradgrind, ou de Joseph Gradgrind (toutes personnes fictives, non existantes), mais dans la tête de Thomas Gradgrind, —  non, monsieur !  […] C’est le masque anglais d’une tête allemande, et lorsqu’un écrivain de talent, qui est souvent un écrivain de génie, vient toucher la sensibilité froissée ou ensevelie sous l’éducation et sous les institutions nationales, il remue l’homme dans son fond le plus intime, et devient le maître de tous les cœurs.

965. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

Est-ce que la réalité la plus haute n’appartient pas toujours aux sentiments capables de nous porter en avant, ne fût-ce qu’un seul instant, d’élever au-dessus de nos têtes ne fût-ce qu’un seul d’entre nous ? […] Dites que vous êtes un observateur, nous vous l’accordons, sauf à faire nos réserves sur ce que vos observations peuvent avoir d’insuffisant, de borné et de systématique ; mais ne vous érigez pas en expérimentateur lorsque vous n’avez pour tout cabinet d’expérience que votre propre tête. […] Dans la réalité, l’homme supérieur ne porte aucune étoile au front, il ne brandit pas au-dessus de sa tête, à la façon de certains héros de roman, et ainsi qu’une lame d’épée brillante et tranchante, cette supériorité ; c’est tout au plus si on la devine parfois au fond de son regard ; il la prouve, et voilà tout. […] L’instinct génésique, comme il l’appelle, deviendrait, à l’en croire, la préoccupation incessante du genre humain ; voilà, par exemple, des mineurs harassés, épuisés, assommés par de longues heures de travail au fond d’une mine, qui, une fois rentrés chez eux, n’ont qu’une idée en tête : l’idée génésique. […] Il descendit ouvrir petit à petit et faire reconnaître ma voix. » Il ouvrit le volet assez pour passer la tête, et en répétant à voix basse : « C’est un ami. » Il s’assura, en prêtant l’oreille, que rien ne troublait le silence profond de la chambre.

966. (1874) Premiers lundis. Tome I « Diderot : Mémoires, correspondance et ouvrages inédits — II »

Il le surpasse de beaucoup par le ton et la couleur, lorsque, parlant d’une femme de sa connaissance que mademoiselle Voland jugeait coquette, il dit : « Vous vous trompez ; elle n’est point coquette ; mais elle s’est aperçue que cet intérêt vrai ou simulé que les hommes portent aux femmes, les rend plus vifs, plus ingénieux, plus affectionnés, plus gais ; que les heures se passent ainsi plus rapides et plus amusées ; elle se prête seulement : c’est un essaim de papillons qu’elle assemble autour de sa tête, le soir elle secoue la poussière qui s’est détachée de leurs ailes, et il n’y paraît plus. » C’est avec madame Legendre surtout que notre philosophe aime à marivauder, comme il dit, à l’égal de la fée Taupe de Crébillon. […] comme votre tête va et arrange !

967. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXV » pp. 402-412

Dans le fait, le 4 de mars, dans le moment que l’Europe le croyait le plus occupé des plaisirs du carnaval, il se trouve à la tête des armées de Flandre, commandées par les maréchaux d’Humières et de Luxembourg. […] Dès le 14 septembre 1676, madame de Sévigné écrivait à sa fille : « On prétend qu’elle n’est plus ce qu’elle était, et qu’il ne faut plus compter sur aucune bonne tête, puisque celle-là n’a pu soutenir le tourbillon de ce bon pays.

968. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre quatrième. L’aperception et son influence sur la liaison des idées »

On prétend que Léonard de Vinci recommandait à ses élèves, lorsqu’ils cherchaient un sujet de tableau, d’étudier avec soin l’aspect des surfaces de bois ; on finit par voir se dessiner, au milieu des lignes confuses, certaines formes d’animaux, des têtes humaines, des groupes pittoresques. […] Nous voilà revenus à la fleur que Gœthe, en penchant la tête, voyait s’épanouir, se ramifier et se métamorphoser.

969. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Racine, et Pradon. » pp. 334-348

Deux ou trois voix, élevées dans le parterre, procurent aisément la gloire de se donner en spectacle sur le théâtre, la tête ombragée de faux lauriers, & qui sont bientôt flétris. […] Deux femmes, rivales & beaux esprits, se mettent à la tête des factions.

970. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre III. Suite des Époux. — Adam et Ève. »

Je tressaillis, elle tressaillit ; j’avançai la tête de nouveau, et la douce apparition revint aussi vite, avec des regards de sympathie et d’amour. […] Bientôt le firmament étincela de vivants saphirs : l’étoile du soir, à la tête de l’armée des astres, se montra longtemps la plus brillante ; mais enfin la reine des nuits, se levant avec majesté à travers les nuages, répandit sa tendre lumière, et jeta son manteau d’argent sur le dos des ombres14.

971. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VII. Des ouvrages périodiques. » pp. 229-243

Il explique lui-même à la tête de son Nouvelliste du Parnasse comment il prétendoit exécuter son projet. […] Il est entre les mains d’une société de gens de lettres de beaucoup de mérite, à la tête desquels est M.

972. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Mes petites idées sur la couleur » pp. 19-25

Si sa pensée habituelle est triste, sombre et noire, s’il fait toujours nuit dans sa tête mélancolique et dans son lugubre atelier, s’il bannit le jour de sa chambre, s’il cherche la solitude et les ténèbres, n’aurez-vous pas raison de vous attendre à une scène vigoureuse peut-être, mais obscure, terne et sombre ? […] C’est que tandis que l’œil de l’artiste est attaché à la toile et que son pinceau s’occupe à me rendre, je passe, et que lorsqu’il retourne la tête, il ne me retrouve plus.

973. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Philippe II »

Quelques têtes éprises de la force, comme celle de Stendhal, par exemple, qui aimait mieux le brigandage que la civilisation, et qui avait rêvé d’écrire l’Histoire de l’énergie en Italie, peuvent, par amour de l’émotion, poétiser un temps où le danger et la mort étaient noblement au bout de tout ; mais il n’y avait pas au XVIe siècle que la palpitation héroïque, chère aux hommes de courage, il y avait, dans les mœurs, autant de corruption et de bassesse que d’atrocité. […] Tête de gouvernement, esprit historique, il a, à plus d’une place, exprimé le plus hautain mépris pour elles.

974. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des ducs de Normandie avant la conquête de l’Angleterre »

Henri Martin a mis une préface fort bienveillante à la tête de l’ouvrage en question. […] comme si refuser l’hommage au xe  siècle n’était rien aux yeux de ces tout-puissants raisonneurs qui trouvent naturel que la République prît nos têtes quand nous n’acceptions pas les assignats de Cambon !

975. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Taine »

La vérité n’y est pas… et l’erreur, qu’on prend quelquefois pour elle quand elle est puissante, l’erreur — j’entends la forte erreur d’une tête robustement organisée — n’y est pas davantage. […] Toutes ces constructions de sensations, toutes ces reviviscences d’images, toutes ces études d’hallucination, toutes ces dentelles d’analyses physiologiques faites au microscope, tous ces fils de la Vierge qu’on nous montre entre l’index et le pouce, toutes ces bluettes, en fin, qu’on veut nous donner et qu’on nous donne, c’est pour que nous ne puissions apercevoir du premier regard le but où l’on veut nous conduire, et ce but, c’est de réduire les plus grandes et les plus vivantes choses qu’il y ait dans le cœur et la tête de l’homme : Dieu, l’âme et le devoir, à n’être qu’une vile sensation, un ridicule bruit de sonnette dont on tire le cordon, en attendant qu’avec ce cordon on puisse les étrangler.

976. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « J.-K. Huysmans »

Huysmans pût germer dans une tête humaine, il fallait vraiment que nous fussions devenus ce que nous sommes, — une race à sa dernière heure. Une tête humaine, eût-elle du génie et si faussée qu’elle soit, n’importe guères à l’humanité.

977. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XI. Des éloges funèbres sous les empereurs, et de quelques éloges de particuliers. »

Il ne nous reste aucun des discours d’Auguste ; nous savons seulement que ce meurtrier avait un genre d’éloquence plein de simplicité et de grâce : il faisait des vers aisément16, et il avait composé les mémoires de sa vie : tout cela s’est perdu ; on se doute bien qu’il fut hué après sa mort ; on célébra son humanité et sa clémence sur la tribune où la tête sanglante de Cicéron avait été attachée. […] Enfin, il vint à parler de sa rare prudence et de sa profonde sagesse, c’est-à-dire, de la profonde sagesse d’un empereur qui n’avait ni une idée dans la tête, ni un sentiment dans le cœur ; qui ne sut jamais ni vouloir, ni aimer, ni haïr ; toujours prêt à obéir à qui daignait lui commander, jouet de ses courtisans, esclave de ses esclaves même, et si stupide qu’il inspirait encore plus de pitié que de mépris.

978. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIII. Éloges donnés aux empereurs, depuis Auguste jusqu’à Trajan. »

Tout le monde sait que Néron fut loué par Lucain ; nous avons vingt vers de lui, à la tête de la Pharsale, où ce monstre est placé dans le ciel. […] Le grave auteur des institutions oratoires, à la tête de son quatrième livre, ne rougit pas de donner le nom de censeur très saint, et de divinité favorable, à Domitien, à ce tyran jaloux, capricieux et lâche, sous qui le nom même de la vertu fut proscrit, qui n’eut que des vices, ne fit que des crimes, empoisonna peut-être Titus, et teint de sang, voulait être homme de lettres et passer pour juste.

979. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVII. De l’éloquence au temps de Dioclétien. Des orateurs des Gaules. Panégyriques en l’honneur de Maximien et de Constance Chlore. »

Je ne parle pas de vingt autres causes qui la préparèrent ; mais je remarque que dès le premier siècle, la grandeur de l’empire, une puissance qui n’était limitée par rien, des fantaisies qui n’avaient de bornes que la puissance, des trésors qu’on ne pouvait parvenir à épuiser, même en abusant de tout, firent naître dans les princes je ne sais quel désir de l’extraordinaire qui fut une maladie de l’esprit autant que de l’âme, et qui voulait franchir en tout les bornes de la nature ; de là cette foule de figures colossales consacrées aux empereurs, la manie de Caligula de faire enlever de toutes les statues des dieux leur tête, pour y placer la sienne ; le palais d’or de Néron, où il avait englouti un quart de Rome, une partie des richesses du monde, et des campagnes, des forêts et des lacs ; la statue d’Adrien élevée sur un char attelé de quatre chevaux, et qui faite pour être placée au sommet d’un édifice, était d’une grandeur que nous avons peine à concevoir ; sa maison de campagne, dont les ruines seules aujourd’hui occupent dans leur circonférence plus de dix milles d’Italie, et où il avait fait imiter les situations, les bâtiments et les lieux les plus célèbres de l’univers ; enfin le palais de Dioclétien à Spalatro en Illyrie, édifice immense partagé par quatre rues, et dont chaque côté avait sept cents pieds de long. […] On s’étonne qu’après avoir goûté la douceur et les charmes du repos, il veuille bien se donner encore la peine de commander ; et l’on finit par prier sa divinité de vouloir bien, du faîte où elle est placée, veiller sur l’univers, et de sa tête céleste faire quelques signes, pour marquer aux choses humaines le cours de leur destinée.

980. (1824) Épître aux muses sur les romantiques

C’était un beau jeune homme, une tête à caprices ; Son front à demi chauve, et le désordre heureux Où tout l’art d’Hippolyte avait mis ses cheveux, Son cou penché, son air tendre et mélancolique, Ses yeux à peine ouverts, et son regard oblique, Tout en lui décelait une peine de cœur, Que de son teint fleuri démentait la fraîcheur. […] Des sentimens du cœur ne sois plus l’interprète ; La sensibilité n’est plus que dans la tête.

981. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DAUNOU (Cours d’Études historiques.) » pp. 273-362

Victor Le Clerc enfin, en tête du vingtième volume de l’Histoire littéraire, a plus particulièrement apprécié le continuateur des Bénédictins. […] On baissait la tête après l’avoir entendu, et on n’éclatait pas. […] Pithou mit en tête du livre un avertissement en latin, où il protesta de son amour de la concorde et de sa haine du schisme : l’auteur du présent Essai en aurait-il pu dire autant avec sincérité ? […] Le livre qu’on examine, et dont le titre figure en tête de l’article, n’est le plus souvent aujourd’hui que le prétexte pour parler en son propre nom et produire ses vues personnelles. […] Le ton de Bonaparte s’élevait, il avait l’air de s’impatienter : les personnes qui se promenaient de long en large dans le salon voisin, militaires et aides-de-camp, retournaient de temps en temps la tête par curiosité pour ces éclats de voix qui leur arrivaient.

982. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

L’immense majorité des têtes humaines est incapable de reposer sur cet oreiller. […] Le spectre se tait, immobile et la tête penchée vers la terre. […] On peut leur répondre que si Ève pécha la première, il est dit dans la Bible qu’il est réservé à Ève d’écraser la tête du serpent. […] Vous n’avez dans la tête que la fiscalité ! […] Va, marche au milieu de ce monde ennemi ou embarrassé d’obstacles ; tu portes en toi une force fatale, et il y a tout à parier qu’elle ne produira que du mal. » Aujourd’hui quand des têtes de criminels sont tombées sur des échafauds, nos savants recueillent ces têtes, qui vont enrichir leurs précieuses collections.

983. (1864) Le roman contemporain

» lui revenait à la mémoire et à la bouche, et, se couvrant la tête de son manteau, elle s’éloignait. […] About est de ne pas avoir dit, en tête de la première édition, ce qu’il a dit en tête d’une des éditions suivantes. […] Une tête plus solide que la sienne n’aurait pas résisté à cette épreuve. […] Ceux qui rencontrent le mendiant lui font l’aumône et détournent la tête. […] Elle avait de l’or et des perles pour dot, mais son or était Sur sa tête et ses perles dans sa bouche.

984. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

je le vois aussi ; elle peut bien porter sa tête sous son bras, car Persée la lui a coupée. […] je descendais dans un rayon et je planais sur sa tête. […] … ils avaient tous, comme des recrues, la tête rasée, les fers aux pieds ! […] Cette main, cette tête, sont encore devant mes yeux et resteront gravées dans ma pensée. […] Il te livrait un combat de tête ; entre nous, ce sera un combat de cœur.

985. (1884) La légende du Parnasse contemporain

Il perdit la tête, il n’osa pas prier l’homme du pont de le laisser aller pour rien. […] Il me montra dans son cabinet un buste du maître allemand auquel il avait mis une couronne de lauriers sur la tête — et une corde au cou ! […] Et dans la ville aussi il y avait sur notre passage des saluts, des chuchotements, des groupements de têtes découvertes. […] Peut-on bien s’imaginer les expressions différentes que prennent, alors, toutes ces têtes de la foule, ces illuminations, ces bravos, cette allégresse ? […] Ou des habitacles sombres, quand on a le soleil dans la tête ?

986. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

N’avons-nous pas tous le ciel au-dessus de nos têtes !  […] Un autre chef leur eût peut-être impitoyablement cassé la tête. […] Si le grand homme est longtemps à la tête des affaires, il y devient despote. […] Il ne s’agit pas de ce qui s’est passé dans sa tête, mais de ce qui se passe dans la nature. […] L’aristarque aura-t-il la tête saine quand il approuve, ne l’aura-t-il plus quand il blâme ?

987. (1905) Études et portraits. Portraits d’écrivains‌ et notes d’esthétique‌. Tome I.

Il prend sa plume, sa tête palpite, son cœur tremble. […] Ce signe négatif, écrit par Adam en tête de la colossale addition des efforts humains, annule à jamais leur résultat. […] Il était lyrique de la tête aux pieds. […] J’ai conservé le titre plus vague que Pierre V… avait griffonné en tête de ses notes. […] Les bustes sans tête des mannequins tendent de leurs seins en bois l’étoffe claire ou sombre des robes.

988. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

Il résista courageusement à tous ces corps, & fit tête au pape lui-même. […] Il se mit lui-même à la tête d’une troupe de soldats, & les conduisit où il sçavoit qu’étoit frère Fossombrone. […] Tout un couvent fort nombreux, de la province de Calabre, le gardien à la tête, se capuchonna. […] Ce capuchon pointu & cette barbe faisoit tourner la tête à tous les dévots & à toutes les dévotes d’Italie. […] Les capucins confus baissoient la tête, enfonçoient leur capuce & passoient bien vîte leur chemin.

989. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

On l’a joué, le public n’en a pas voulu ; il est vrai qu’on n’y voyait ni le sabbat des sorcières, ni le choc guerrier de deux grandes armées se heurtant, se poussant, se culbutant sur le théâtre comme au mélodrame, ni enfin sir Macduf arrivant la tête de Macbeth à la main. […] Une tête sans poudre lui rappelle les images sanglantes de la révolution française, premiers objets qui frappèrent son imagination royale, il y a trente-un ans. […] En tête des dialogues si vrais et si passionnés qui forment la partie la plus entraînante des poésies d’Homère, imprimez le mot tragédie, et à l’instant ces dialogues, qu’ils admiraient comme de la poésie épique, les choqueront et leur déplairont mortellement comme tragédie. […] Mais était-ce une raison pour jeter au public, avec un ton de supériorité si bouffon32, l’opinion qu’elle veut placer dans les têtes parisiennes ? […] Je vois avec plaisir que vous ne croyez pas qu’un système dramatique quelconque soit capable de créer des têtes comme celles de Molière ou de Racine.

990. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

Les cèdres qui pyramident en noir sur votre tête sont aussi immobiles que les flèches noirâtres d’une cathédrale détachées sur le bleu cru du firmament. […] D’une oreille ravie le monarque écoute, se pose en dieu, et en remuant la tête semble ébranler l’univers. […] Vois comme à ce bruit formidable le héros soulève la tête comme s’il sortait du tombeau et regarde autour de lui avec étonnement. […] Je n’aime pas écrire des choses que mainte tête carrée de notre pays traiterait de mensonges en devisant derrière le poêle. […] J’étais glacé, non seulement des mains et des pieds, mais de tout le corps, et la tête commençait à me faire mal.

991. (1899) Les industriels du roman populaire, suivi de : L’état actuel du roman populaire (enquête) [articles de la Revue des Revues] pp. 1-403

On voit ça et là des têtes de caïmans, dix, vingt têtes, émergeant de l’eau, gueule ouverte. […] « … On voyait, reprenait-il, des têtes d’amphibies, dix, vingt têtes, émergeant de l’eau, la gueule ouverte… Mais, circonstance à laquelle les justiciers n’avaient pas songé, c’était pour les alligators le temps des amours, et, poussés par un doux attrait vers les caïmanes, les caïmans laissaient glisser au fil de l’eau la planche sur laquelle le misérable pantelait d’effroi. […] Et pourquoi se mettraient-ils martel en tête, à propos d’un chimérique résultat, que personne ne réclame d’eux ? […] Il s’est jeté tête baissée dans le dédale des sombres aventures, poétisant de son encre la plus noire le crime et l’assassinat, n’oubliant pas de promener les cœurs naïfs à travers les situations les plus funestes, enchevêtrant presque avec art les quiproquos et les mystères, se perdant et se retrouvant le mieux du monde parmi les zigzags innombrables du dialogue, destinés à prolonger les suites insidieuses au prochain numéro ; enfin s’acquittant en conscience de son office. […] Son principal roman-feuilleton fut les guerres de l’Empire : il eut fort à faire de l’écrire avec son sang ; il n’eut point en tête d’autre romanesque.

992. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

Chez nos volailles, une grosse touffe de plumes sur la tête est généralement accompagnée d’une plus petite crête, et un collier de plumes entraîne la perte du barbillon charnu. […] Tel est le cas de l’Ibla mâle ; et on l’observe chez le Protéolepas dans des circonstances encore plus frappantes : chez tous les autres Cirripèdes, la carapace présente un énorme développement des trois segments antérieurs de la tête qui sont les plus importants de tous, en ce qu’ils sont généralement pourvus de gros nerfs et de muscles puissants ; au contraire, chez le Protéolepas, protégé par ses habitudes parasites, toute la partie antérieure de l’armure de la tête est réduite à de simples rudiments attachés à la base des antennes préhensibles. […] Ainsi, les races de Pigeons les plus distinctes, et dans les contrées les plus distantes, sont toutes susceptibles de produire des sous-variétés portant une houppe de plumes redressées sur la tête, ou des plumes aux pieds. […] Il avait même quelques zébrures sur les côtés de la tête. À l’égard de ce dernier fait, j’étais si convaincu que jamais une raie de couleur quelconque n’apparaît, grâce à ce qu’on appelle communément le hasard, que la seule inspection des raies de la tête de cet hybride provenu de l’Âne et de l’Hémione me fit demander au colonel Poole si de telles rayures n’apparaissent jamais sur les joues des Chevaux Kattywar, si remarquablement rayés, et sa réponse, ainsi qu’on l’a vu, fut affirmative.

993. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

Je n’ai pas assez de bonheur pour qu’il se présente : je cherche cependant bien. » Après une tournée qu’il a faite à la tête d’une colonne mobile, il est invité par le général Meunier à assister à une distribution de drapeau et de croix qui se fait dans une plaine auprès d’Amailhou. […] La gaieté et l’entrain y sont d’ailleurs fréquemment coupés par la maladie, la gastrite et les accès de découragement. « Je ressemble à ces vieux chevaux de bonne maison qui, bien pansés, bien cirés, bien harnachés et un peu poussés d’avoine, redressent encore la tête et piaffent avec élégance ; mais plus de fond, plus de nerf… L’élan est toujours là, impétueux, terrible, mais il ne faut pas que la course soit longue. » Dans ce camp du Fondouck, dans ces commandements de misérables bicoques où l’on est relégué durant des saisons, il y a de longs intervalles d’ennui, d’attente, où l’on est visité par la fièvre ; on sent qu’on s’use et qu’on se mine sans profit : « Ah ! […] Moi, je l’aime malgré tout, parce que je suis obligé d’en vivre en attendant que j’en meure. » Lui-même, il a son accès terrible ; « il va piquer une tête contre la porte de l’enfer, mais le diable le renvoie et ne veut pas encore de lui. » Avec cela, il n’est pas nommé chef de bataillon. […] Moi je penserai à vous tous, à ma femme, à mes enfants. » Un moment viendra où il entendra la messe pour elle-même, le sacrifice pour le sacrifice : il a en lui un commencement de disposition, qui de la tête lui descendra dans le cœur. […] Je serai le 23, au plus tard, sous Sébastopol. » Le 20 septembre se livre cette glorieuse bataille de l’Alma qui restaure, en face de l’Europe, l’honneur des armes de la France, et à laquelle il n’a manqué que mille sabres des chasseurs d’Afrique pour être la plus merveilleuse par les résultats : « Malgré tout, belle et magnifique journée, qui a mis au grand jour la valeur et les qualités de chacun, nation et hommes, a donné à l’armée un moral de 99 degrés et tué les Russes. » Saint-Arnaud écrit ces mots triomphants sur le champ de bataille même et la tête encore ardente de l’action.

994. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Ampère »

. — Elle m’ouvrit la porte en bonnet de nuit et me parla un moment tête à tête dans la cuisine ; j’entrai ensuite chez madame Carron, on parla de Richelieu. […] Je lis dans une lettre de ce temps : … J’ai été chercher dans la petite chambre au-dessus du laboratoire, où est toujours mon bureau, le portefeuille en soie, J’en veux faire la revue ce soir, après avoir répondu à tous les articles de ta dernière lettre, et t’avoir priée, d’après une suite d’idées qui se sont depuis une heure succédé dans ma tête, de m’envoyer les deux livres que je te demanderai tout à l’heure. […] En tête d’un des nombreux projets d’ouvrages de métaphysique qu’il a ébauchés, je trouve cette phrase qui ne laisse aucun doute : « C’est en 1803 que je commençai à m’occuper presque exclusivement de recherches sur les phénomènes aussi variés qu’intéressants que l’intelligence humaine offre à l’observateur qui sait se soustraire à l’influence des habitudes. » C’était s’y prendre d’une façon scabreuse pour tenir fidèlement cette promesse de soumission religieuse et de foi qu’il avait scellée sur la tombe d’une épouse. […] Prenez bien garde, mon cher et très-cher ami, vous êtes sur la pointe d’un précipice : pour peu que la tête vous tourne, je ne sais pas ce qui va arriver. […] Il n’est pas jusqu’aux vers latins, adressés à son fils en tête du tableau, qui n’aient dû lui retracer un peu ses souvenirs poétiques de 95, un temps plein de charme.

995. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre III. Services locaux que doivent les privilégiés. »

Ils adoucissent, ils tempèrent les poursuites parfois trop rigoureuses des fermiers, des régisseurs, des gens d’affaires54. » — Une Anglaise qui les voit en Provence au sortir de la Révolution dit que, détestés à Aix, ils sont très aimés sur leurs terres. « Tandis que devant les premiers bourgeois ils passent la tête haute, avec un air de dédain, ils saluent les paysans avec une courtoisie et une affabilité extrêmes. » Un d’eux distribue aux femmes, enfants, vieillards de son domaine de la laine et du chanvre pour filer pendant la mauvaise saison, et, à la fin de l’année, il donne un prix de cent livres aux deux meilleures pièces de toile. […] Les cent trente et un évêques et archevêques ont ensemble 5 600 000 livres de revenu épiscopal et 1 200 000 livres en abbayes, en moyenne 50 000 livres par tête dans l’imprimé, 100 000 en fait : aussi bien aux yeux des contemporains, au dire des spectateurs qui savaient la vérité vraie, un évêque était « un grand seigneur ayant 100 000 livres de rente73 ». […] Jamais conducteurs d’hommes n’ont tellement désappris l’art de conduire les hommes, art qui consiste à marcher sur la même route, mais en tête, et à guider leur travail en y prenant part  Notre Anglais, témoin oculaire et compétent, écrit encore : « Un grand seigneur eût-il des millions de revenu, vous êtes sûr de trouver ses terres en friches. […] C’est pourquoi ses terres deviennent l’asile de tous les scélérats du canton »  Terrible effet de son indifférence et qui va se retourner contre lui-même : demain, au club, les procureurs qu’il a multipliés demanderont sa tête, et les bandits qu’il a tolérés la mettront au bout d’une pique. […] Les trente ou quarante braconniers qu’ils poursuivent aujourd’hui sur leurs terres marcheront demain contre leur château à la tête de l’émeute. — Absence des maîtres, apathie des provinces, mauvais état des cultures, exactions des fermiers, corruption des justices, vexations des capitaineries, oisiveté, dettes et exigences du seigneur, abandon, misère, sauvagerie et hostilité des vassaux, tout cela vient de la même cause et aboutit au même effet.

996. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Ce légat, dans une sédition excitée par Rienzi, fut atteint d’une flèche à la tête. […] Rienzi triompha quelques jours alors à la tête de ses anciens partisans ; mais, ayant renouvelé ses démences et ses cruautés, il fut assailli dans le Capitole par une émeute combinée des grands et de la populace. […] Alors je courbe la tête, et je lui demande humblement de permettre que je reste là à contempler l’un et l’autre visage. […] Thérésa alors, relevant sa tête pensive et promenant un regard sur les alentours : — “Oh ! […] J’y venais souvent passer l’été avec ma mère.” — Elle se tut, s’arrêta et détourna sa tête en arrière comme pour attendre l’Isabellina, qui s’était un peu distancée de nous.

997. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Du moment que, pour être un docteur renommé, il suffisait de raisonner sans faute sur des propositions acceptées sans contrôle, on pouvait se borner à entasser sans choix dans sa tête des textes problématiques, des faits douteux, des phrases vides. […] L’ambition d’entrer à l’Académie, en inclinant les têtes les plus fières, n’a donc pas toujours favorisé la franchise, et l’on comprend que des caractères peu flexibles se soient mal accommodés des concessions qu’il aurait fallu consentir pour y être admis. […] — vont même jusqu’à le traiter de polisson ; ils flétrissent Boileau de son prénom de Nicolas ; fiers de leurs longs cheveux, ils jettent aux têtes chauves des derniers classiques une injure juvénile ; ils les traitent de perruques ; ils définissent l’art du xviie  siècle : le perruquinisme 169. […] X. dans sa tête porte, un monde. Ce n’est rien de moins qu’un monde ce que porte dans sa tête M. 

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