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1825. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 111-112

Il montre quelquefois de l’imagination dans l’invention des sujets, des traits pétillans, des pensées ingénieuses ; mais l’esprit, sans le talent, ne procura jamais de succès, & le talent ne se fit jamais sentir dans des Vers assez communément prosaïques, sans grace, & péniblement travaillés.

1826. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 175

Ils sont, en général, écrits avec feu ; la marche en est rapide ; elle entraîne, malgré le ton romanesque qui s’y fait sentir.

1827. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 198

L’Ecrivain y fait sentir le mérite du goût sûr & attentif à ne jamais s’écarter des bons principes.

1828. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 257

Parmi les choses senties avec esprit & exprimées avec élégance, qu’on rencontre dans son Oraison funebre Henriette d’Angleterre, on peut citer ce morceau, où, parlant des Princes, il dit : « Qu’ils s’imaginent avoir un ascendant de raison, comme de puissance ; qu’ils mettent leurs opinions au même rang que leurs personnes, & qu’ils sont bien aises, quand on a l’honneur de disputer avec eux, qu’on se souvienne qu’ils commandent à des Légions ».

1829. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 498-499

Ses Fables seroient plus piquantes, si la fureur de montrer de l’esprit s’y faisoit moins sentir.

1830. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 178-179

L'amour patriotique ne s'y fait pas moins sentir que le talent de rendre, avec une sorte d'énergie, les traits les plus frappans de notre Histoire, & qui font le plus d'honneur à la Nation.

1831. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Préface »

., peut-être n’est-il plus temps d’entendre que LITTÉRATURE EUROPÉENNE, tant, à l’exception des langues, qui entreront aussi un jour dans la mêlée universelle, les littératures modernes sont en train de faire de l’unité monstrueuse dans leurs conceptions et leurs manières de sentir !

1832. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

Pareillement, dans ce théâtre en ce moment, les âmes sont neuves, prêtes à tout sentir comme le poëte à tout oser. […] Au premier regard, on croit qu’on n’avance point, on ne sent point à chaque phrase qu’on a fait un pas. […] Elle se laisse frapper et traîner. « Faites, faites. » En cet état, les nerfs s’exaltent, et ne sentent plus rien ; elle refuse de dire le nom, et par surcroît, elle loue son amant, elle l’adore en présence de l’autre. […] Mais toutes ces peurs, sitôt qu’elles sentent la flamme des pensées nobles, s’envolent et s’évanouissent comme des nuages. —  Supposez que ce soit la mort. —  Je l’ai supposé […] Do the noblemen in Rome Erect it for their wives, that I am sent To lodge there ?

1833. (1929) Amiel ou la part du rêve

L’enfant sentit dans son corps le tragique de la vie, et qu’il faut parfois la payer cher. […] Sentez passer d’un vieux sur un jeune visage le feu tournant de Genève ! […] Il aimait, et plus encore il eût aimé se sentir quelqu’un à Genève. […] Elles se sentent comprises, enveloppées, protégées, et si elles m’eussent souhaité moins de désintéressement et plus d’exclusivisme, elles sentent du moins qu’elles peuvent se reposer sur moi, et que je suis un véritable ami. […] D’avance ils sentent l’avantage et le droit de la diversité.

1834. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « au lendemain du saint-simonisme  » p. 505

Elle attend ; elle se sent mal, et accepterait avec reconnaissance tout soulagement positif qu’on lui voudrait apporter ; mais, pour la convaincre, il ne faut pas trop lui promettre ; elle n’en est plus aux illusions de l’enfance ; et, sans prendre la peine d’examiner longuement, il lui suffit d’opposer aux magnifiques avances de ses bienfaiteurs cette réponse de simple bon sens, que qui prouve trop ne prouve rien.

1835. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Abadie, Michel (1866-1922) »

Il sent la nature.

1836. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Brandenburg, Albert-Jacques (1878-1934) »

Je suis presque inquiet de n’y pas bien sentir de défauts. — Émotion vague et continue, pensée volontairement et simplement supérieure, amplification spontanée, enlacement charmant des images, généralisations aisées, manière naturelle de montrer, plutôt que les choses, l’ombre abstraite des choses agrandies — il a beaucoup d’un grand poète.

1837. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Deschamps, Antony (1800-1869) »

On y sent un cœur ému et, lorsqu’il nous parle de ses douleurs, qui ont été grandes, il excite notre intérêt et notre sympathie.

1838. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Calemard de Lafayette, Olivier (1877-1906) »

Calemard de Lafayette, un poème qui n’est sans doute pas de tout point parfait, mais qui est vrai, naturel, étudié et senti sur place, essentiellement champêtre en un mot, et dont un poète académicien, et non académique (M. 

1839. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lautréamont (1846-1870) »

On sent, à mesure que s’achève la lecture du volume, que la conscience s’en va, s’en va, et quand elle lui est revenue, quelques mois avant de mourir, il rédige les Poésies, où, parmi de très curieux passages, se révèle l’état d’esprit d’un moribond, qui répète, en les défigurant dans la fièvre, ses plus lointains souvenirs, c’est-à-dire, pour cet enfant, les enseignements de ses professeurs !

1840. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lombard, Jean (1854-1891) »

. — …… Jean Lombard avait gardé de son origine prolétaire, affinée par un prodigieux labeur intellectuel, par un âpre désir de savoir, par de tourmentantes facultés de sentir ; il avait gardé la foi carrée du peuple, son enthousiasme robuste, son entêtement brutal, sa certitude simpliste en l’avenir des bienfaisantes justices.

1841. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Pomairols, Charles de (1843-1916) »

Charles Maurras À force de considérer la structure profonde de sa terre, le poète des Regards intimes a senti ses propres regards se détacher de lui et lui revenir aussitôt comme des regards étrangers.

1842. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 255-256

Il a voulu aussi ajouter des synonymes à ceux de M. l’Abbé Girard ; mais cette tentative n’a servi qu’à faire mieux sentir la supériorité de celui qu’il a prétendu enrichir.

1843. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 282-283

Celui des quatre Saisons, offre quatre tableaux du grand genre, où le même génie se fait sentir, quoique sur un ton plus noble, plus vigoureux, plus varié, plus riche, ainsi que l’exigeoit le sujet.

1844. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 398-399

Clément, qui a trop fait sentir qu’il étoit son ami : il est cependant vrai que les morceaux qu’il cite de M.

1845. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 478

Nous connoissons de lui un Poëme de trois cents Vers, intitulé le Temple de la Mort, où l’harmonie se fait sentir autant que la verve, & où le langage est beaucoup plus pur que dans la plupart des Ouvrages de son temps & même de celui-ci ; ce qui prouve qu’il avoit du génie, & qu’il auroit pu porter plus loin la perfection de ses talens, si la mort n’eût abrégé sa carriere.

1846. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 11

Il n’en a pas été ainsi des Lettres secretes, publiées par le même Auteur, sous le nom de cette même Princesse, parce qu’il étoit aisé d’en sentir la supposition.

1847. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » p. 281

Je ne me verrai plus, par un triste réveil, Exposée à sentir les tourmens de la vie.

1848. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Bachelier »

Le géomètre ambitionne la réputation de littérateur, et il reste médiocre ; l’homme de lettres s’occupe de la quadrature du cercle, et il sent lui-même son ridicule.

1849. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — I. » pp. 495-512

On jeta la sonde ; on sentit la terre ; on se crut perdu ; le roi, pieds nus, en simple cotte et tout échevelé, était déjà sur le pont, les bras en croix devant le Saint-Sacrement86, comme celui qui croyait bien périrk. […] Saint Louis, né le 25 avril 1214 ou 121588, roi en 1226 à l’âge de douze ans sous la tutelle de sa sage et prudente mère, arrivé à sa majorité vers 1236, avait grandement commencé à ordonner son royaume d’après de bonnes lois, à y réprimer les entreprises des seigneurs, à y faire prévaloir la justice, la piété, à se faire respecter de ses voisins pour son amour de la paix et sa fidélité à ses engagements, lorsque, ayant été pris d’une grande maladie (décembre 1244), et étant tombé dans un tel état qu’on le crut mort, et qu’une dame qui le gardait voulait déjà lui tirer le drap sur le visage, il conçut au fond de son âme la pensée de se croiser ; au premier moment où il se sentit mieux et où il recouvra l’usage de ses sens, il appela à son lit l’évêque de Paris. […] Ce sentiment de Joinville, qui de nous ne l’a encore, malgré tout l’orgueil de nos modernes progrès, au moment où il se sent lancé sur l’abîme ?

1850. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

Louis XIV, rentré dans son cabinet, l’appela et lui dit : « Mon neveu, quand je dis ces choses-làat, je vous prie de ne pas rire. » Besenval, qui raconte le trait, n’en paraît sentir qu’à demi la portée. […] Quand il prévit que M. de Choiseul ne tarderait pas à tomber, il fut des premiers à résigner son emploi d’inspecteur des Suisses, qui ne lui promettait plus d’agrément : « Je me suis toujours étonné, remarque-t-il à ce propos, que les hommes qui font tant de choses pour avoir, ne sentent que bien rarement qu’il est des époques où il faut abandonner. […] Ses divers jugements, qui en général, et si l’on excepte celui-là, témoignent d’un assez bon esprit, ne sont guère définitifs, et se sentent des contradictions et de l’inachevé de la conversation.

1851. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

Le roman, qui n’a été ainsi désigné qu’au Moyen-Âge et d’un nom qui sent la décadence ; que les Grecs avaient oublié de nommer, et qui ne faisait pas d’abord un genre bien à part, était partout chez eux. […] dès que j’eus entendu prononcer ce nom de magicienne qui m’avait toujours séduit, loin de songer à me précautionner contre Pamphile (l’hôtesse elle-même), je me sentis au contraire l’envie d’aller de ce pas la prier de m’initier à son art, quoi qu’il pût m’en coûter, et il me tardait de me jeter à corps perdu dans cet abîme. […] Mais Apulée n’y met pas tant d’intention et se contente d’une malice générale qui circule, et que le lecteur sent ou néglige selon qu’il lui plaît : lui, il ne songe qu’à bien conter avant tout, à donner du mouvement à ses récits et à être plaisant.

1852. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet »

Mais, assistant à des spectacles militaires avec des goûts si prononcés, il s’imbut de l’esprit de ces dernières années de l’Empire ; quand les revers survinrent, et mirent à nu la fibre patriotique, il sentit aussi fortement qu’aucun les douleurs de l’humiliation et de là défaite : garde national zélé, militaire amateur exemplaire, il mérita la croix en 1814 pour les services qu’il avait rendus dans la défense de Paris. […] On parle toujours de croyance dans l’art, on admire cette disposition chez quelques peintres anciens et pieux qui ont rendu dévotement ce qu’ils sentaient. […] On était loin de prévoir alors que Sigalon mourrait après une belle œuvre, mais sans avoir récidivé autrement que comme un copiste consciencieux et fidèle ; que Léopold Robert ne pourrait survivre à ses deux ou trois chefs-d’œuvre, et qu’il périrait comme écrase sous leur poids, dans son désespoir de se sentir impuissant à les renouveler.

1853. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Enfin la chambre des époux Poquelin est tendue d’une tapisserie de Rouen sur laquelle sont accrochés cinq tableaux et un miroir de glace de Venise. » Ce sont là les objets qui frappaient habituellement la vue de Molière enfant ; il ne naquit nullement dans un intérieur pauvre ou mesquin, et tout sentait autour de lui le marchand à son aise et le bourgeois cossu. […] Soulié : elle sent moins l’antiquaire ; elle est surtout littéraire et critique. […] Aimer Molière, c’est être également à l’abri et à mille lieues de cet autre fanatisme politique, froid, sec et cruel, qui ne rit pas, qui sent son sectaire, qui, sous prétexte de puritanisme, trouve moyen de pétrir et de combiner tous les fiels, et d’unir dans une doctrine amère les haines, les rancunes et les jacobinismes de tous les temps.

1854. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. (suite) »

Gavarni, on l’a vu, a eu dans un temps, à un moment de sa jeunesse, non pas des prétentions, mais des velléités ou de vagues projets littéraires ; au nombre de ces projets était un roman, non terminé, dont, je puis cependant donner une idée assez précise et citer quelques pages arrachées qui seront autant de jours ouverts sur sa manière de penser et de sentir. […] Y eut-il, au jour dit, un billet moqueur apporté par un petit commissionnaire au quai d’Orsay, lieu indiqué pour le rendez-vous, un billet mignon qui sentait l’iris, dont le cachet avait des armes, — couronne de duchesse ou de comtesse, — et contenant ces seuls mots à l’adresse de Michel : « Un des plus doux plaisirs d’une femme est de faire un regret » ; et ne fut-ce que plus tard, par l’effet d’un hasard nouveau, que Michel retrouva la belle inconnue et reconquit l’occasion ? […] La femme du monde a bien vite senti qu’elle avait affaire à un poète, à un artiste, à un homme d’une autre race.

1855. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois par M. Camille Rousset. Victor-Amédée, duc de Savoie. (suite et fin.) »

Je lui vois, à regret, un naturel porté à la rigueur et à la violence, peu de tendresse et de sûreté… » Mais, à ce même moment, le jeune duc déjouait sa mère par une tactique hardie et habile ; il sentait où était la force, la menace d’oppression ; il essayait de la conjurer en feignant de l’accepter sans réserve, et il faisait de son côté des contre-propositions toutes soumises et tout humbles à Louis XIV. […] S’il se sentait un moment découvert, il rentrait aussitôt dans son labyrinthe. […] Ayant senti de bonne heure tous les inconvénients de la faiblesse, il aspirait à en sortir par tous les moyens, et il s’était fait un principe de l’infidélité.

1856. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

Son railleur favori, le bachelier Samson Carrasco, qu’il introduit dans la dernière partie de son Don Quichotte et qui est une invention caractéristique de cette seconde moitié, n’exerce ses doutes et sa moquerie que dans le cercle des choses permises, et l’on sent qu’il n’a aucun effort à faire pour s’y renfermer. […] Lorsqu’il ne s’agit pas d’étudier pour gagner sa vie, et si l’étudiant est assez heureux pour que le Ciel lui ait donné des parents qui lui assurent du pain, je serais volontiers d’avis qu’on le laissât suivre la science pour laquelle il se sentirait le plus d’inclination ; et bien que celle de la poésie soit moins utile qu’agréable, du moins elle n’est pas de ces sciences qui déshonorent ceux qui les cultivent La poésie, seigneur hidalgo, est, à mon avis, comme une jeune fille d’un âge tendre et d’une beauté parfaite, que prennent soin de parer et d’enrichir plusieurs autres jeunes filles, qui sont toutes les autres sciences ; car elle doit se servir de toutes, et toutes doivent se rehausser par elle. […] Le traducteur avait tâché, comme il disait, d’accommoder son texte au génie et au goût de notre nation, sans trop s’éloigner du sujet, et de telle sorte que quelques endroits sentissent encore l’espagnol ; car, remarquait-il naïvement, « j’ai cru qu’une traduction doit toujours conserver quelque odeur de son original, et que c’est trop entreprendre que de s’écarter entièrement du caractère de son auteur. » Cette traduction de Filleau de Saint-Martin, qui est des meilleures dans le goût du xviie  siècle, et des plus belles comme on disait alors, fut aussi attribuée à M. 

1857. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

de Talleyrand : « Ce ministre, qui posséda si éminemment, dit-il, l’art de la société, et qui en a si souvent usé avec succès, tantôt pour imposer à ceux qu’on voulait détruire, en leur faisant perdre contenance, tantôt pour attirer à lui ceux dont on voulait se servir, fit à M. de Senfft un accueil assez froid (avril 1806). » Ce ne fut qu’un peu plus tard, lorsque M. de Talleyrand eut quitté le ministère et perdu la faveur, que Mme de Senfft, personne distinguée et généreuse, — ce qu’on appelle une belle âme, — se sentit prise pour lui d’une sorte d’attrait et de beau zèle, d’un mouvement admiratif qui n’échappa point au personnage et qui fixa pour l’avenir l’agrément de leurs relations. […] Le fait est qu’il y eut, depuis la scène de janvier 1809, plus d’une répétition avec variantes de ces soudains éclats de l’empereur contre M. de Talleyrand ; il le sentait ennemi, sourdement aux aguets, jouissant tout bas de chaque échec, de chaque faute, en mesurant la portée et les suites, n’attendant que l’heure pour l’abandonner ; et le voyant là debout, devant lui, avec sa mine solennelle, insolemment impassible et froide, il ne pouvait se contenir, il débordait. […] Ici deux points de vue, deux façons de sentir, qui avaient l’une et l’autre leur raison d’être et leur légitimité, sont en présence, et l’histoire ne peut que les constater sans trancher le différend : il y avait la manière héroïque et patriotiquement guerrière d’entendre la défense du sol, la résistance nationale ; de faire un appel aux armes comme aux premiers jours de la Révolution, et, ainsi que Napoléon l’écrivait à Augereau, de « reprendre ses bottes et sa résolution de 93 » ; mais il y avait aussi chez la plupart, et chez les hommes de guerre tout les premiers, fatigue, épuisement, rassasiement comme après excès ; il y avait partout découragement et dégoût, besoin de repos, et, dans le pays tout entier, un immense désir de paix, de travail régulier, de retour à la vie de famille, aux transactions libres, et, après tant de sang versé, une soif de réparation salutaire et bienfaisante.

1858. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « JASMIN. » pp. 64-86

Sept ans arrivent : il sent, il se souvient, il peut peindre son enfance. […] Quoi qu’il en dise, il n’a pas tout à fait quitté la guitare pour le flageolet ; et Marot, qui parle aussi de son flageolet, n’avait-il pas, au milieu de sa verve badine, de tendres accents, que le contraste fait mieux sentir encore ? […] Sitôt qu’on entend, dans l’été, le joli zigo, ziou, ziou des cigales sautilleuses, le jeune moineau s’élance et déserte le nid où il a senti venir des plumes à ses ailes.

1859. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

Pour que la figure soit bonne, il faut qu’éveillant instantanément l’idée de l’objet sans que l’esprit sente le besoin de repasser par le mot propre qui le désigne, elle le présente accompagné et comme enrichi de tout ce que peuvent suggérer et l’objet signifié et l’expression figurée. […] La métaphore soutenue plaît ou déplaît, selon que dans cette continuité l’on sent une rencontre naturelle ou une recherche laborieuse ; elle est de bon goût, quand les expressions figurées qui font cortège à la figure initiale naissent d’une création incessante de l’imagination, qui garde l’image comme elle la changerait, par la découverte instantanée et toujours renaissante de ressemblances successives ; elle est de mauvais goût, quand, par un renversement des rôles, l’esprit sacrifie la pensée à la figure, quand celle-ci, devenant tyrannique en cessant d’être dépendante, avide de durer, ne laisse plus pénétrer dans la phrase que les idées qu’elle peut absorber et amalgamer. […] S’il eût dit sans périphrase, cinquante mille soldats, qui ne sent ce que la pensée eût perdu ?

1860. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IV. Précieuses et pédantes »

On sent que le kleptomane aveugle n’a rien su faire des matériaux volés. […] Ses pages sont des tapisseries hâtives où l’on sent, non coordonné, le travail de mille mains fortuites. […] Mais on ne va pas sentir les déjections d’un Hauser.

1861. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre V »

Le service même sent le sacristie, les valets ont l’air contrit et le service clandestin ; ils passent les rafraîchissements comme du pain bénit. […] Giboyer se sent renaître dans ce noble enfant, avec la joie d’un paria qui, assistant vivant à sa métempsycose, se verrait, du fond de son abjection, revivre sous la forme d’un être sacré. […] Pour le coup, Maréchal hésite ; on sent pourtant qu’il cédera encore.

1862. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

Son style est de robe longue, même dans ses lettres où il ne vise point à être pompeux ; mais, à tout moment, il rachète ces défauts réels, ces longueurs de phrase, par des expressions heureuses qui honoreraient Montaigne ; il joint à sa gravité habituelle, à la justesse et à la prud’homie de ses pensées, un agrément qui sent le poète dans la prose. […] Mais bientôt, avec l’âge et le cours des événements, les sujets deviennent plus sérieux : à partir d’un certain moment, toute l’histoire et la politique de son temps y passent, et nous y assistons avec lui, c’est-à-dire par les yeux d’un témoin judicieux, éclairé, placé au meilleur point de vue, ni trop près ni trop loin de la Cour, qui ne se pique point de parler en homme d’État, mais qui apprécie et sent les choses de sa nation avec le cœur et l’intelligence de cette haute bourgeoisie, alors si intègre et si patriotique, et qui se pouvait dire le cœur même de la France. […] M. le chancelier s’en contriste : tous les autres y prennent plaisir (1561). » Il gémit de ce vertige presque universel ; il sent que le peuple et la classe moyenne n’ont rien à gagner à ces querelles d’ambitieux qui se servent des passions et des croyances de tous pour arriver à leurs propres fins et se supplanter l’un l’autre : « S’il m’étoit permis de juger des coups, écrit-il, je vous dirois que c’est le commencement d’une tragédie qui se jouera au milieu de nous, à nos dépens ; et Dieu veuille qu’il n’y aille que de nos bourses ! 

1863. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers libre  »

Elle se sentit mère une seconde fois. […] Il serait encore assez laborieux de compter les accents en ces phrases mal déterminées ; cependant on se sent en présence de vers évidents. […] Qu’un tel vers nous paraisse plus près de la prose qu’il n’y est en vérité, cela vient sans doute de notre ignorance ; mais aujourd’hui même et s’il s’agit ne notre littérature, il semble plus facile de sentir que de définir la nuance qui sépare tels vers libres de telle prose rythmique.

1864. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

C’est sur un parquet bien ciré que son pied se sentait à l’aise pour frapper du talon. […] Et c’est ainsi qu’Augier est mort, entouré des siens, comme il le désirait, sans s’être senti mourir. […] La vérité était qu’il gênait les romantiques, car ils sentaient en lui un adversaire redoutable, un auteur dramatique qui renouait la tradition française par-dessus l’insurrection de 1830.

1865. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

On sent si bien, aux palpitations de sa pensée, qu’il a poursuivi d’une course haletante tous ces rêves et toutes ces espérances ! […] Schaunard, Rodolphe, Marcel, Colline, ne sont ni des d’Arthez, ni des Lousteau, ni des héros de tragédies romaines, ni-des sacripants de boudoir. — Ils pensent et ils sentent, ils sentent surtout.

1866. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IX. Mémoires de Saint-Simon » pp. 213-237

L’orgueil souffrant de celui-ci, de cet esprit qui sentait sa puissance, mais qui, comme tant d’esprits, se méprenait sur elle, a cherché à voiler cette blessure, mais il l’avait au fond du cœur, et elle saigne partout dans ses Mémoires. […] « Elle sentait et pensait en petit. » La première misère de sa vie — cette sainte misère qui nous lave le cœur avec nos larmes et qui nous le parfume pour toujours lorsque nous l’avons respirée !  […] Il a tordu et retordu, d’une main cruelle, cette couronne d’épines dont elle n’a pas plus senti le poids que celui de l’autre couronne.

1867. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Prosper Mérimée »

On sent que cet homme sans mollets souffre beaucoup de son indigence de plastique. […] Mérimée, avec son Vase étrusque (une Nouvelle qui est peut-être sa meilleure œuvre) et son Théâtre de Clara Gazul, date de la première heure de ce romantisme béni, si favorable à tous ceux-là qui se sentaient, dans ce temps-là, un peu de vie dans la tête ou dans la poitrine. […] Talleyrand, dit-on, n’écrivit jamais une seule lettre ; Talleyrand, cet homme médiocre qui sentait sa médiocrité et malgré la conscience de l’enchantement de ses manières, n’avait pas tant d’esprit puisqu’il n’avait pas d’âme dessous !

1868. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

Ce ne sont pas des moralistes ordinaires, quel que soit l’extraordinaire de leur talent, ce n’est ni Montaigne, par exemple, ni La Rochefoucauld, ni Vauvenargues, ni Chamfort, ni madame de Staël (la madame de Staël du sombre livre de l’Influence des passions sur le bonheur individuel), ni même le religieux et platonicien Joubert, qui auraient pu écrire ce traité de « la Douleur », tracé d’une main si attendrie, mais si ferme, pour nous la faire comprendre et pour nous la faire accepter… On sent, en le lisant, qu’on n’a plus affaire ici à un moraliste au détail, inspiré par le spectacle isolé de la misère humaine, étudiée peut-être sur son âme, mais à une tête d’ensemble qui a une nette et transcendante conception de la vie et de la destinée, et qui fait rentrer la douleur dans la notion la plus profonde des choses et dans le pian providentiel de la Création. […] — jusqu’aux oreilles, et on fait accueil à ces Allemands, qu’il faudrait, si la France était encore spirituelle, reconduire intellectuellement à la frontière de leur littérature avec les coups dans les jambes de la serviette de Figaro, quand il met Basile à la porte en lui disant : « Allez vous coucher, Basile ; vous sentez la fièvre ! » Eux, c’est bien pis que la fièvre qu’ils sentent.

1869. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

Étudier le génie dans son œuf est une volupté d’observation que ce volume ne manquera pas de donner à ceux qui sont capables de la sentir. […] Borgia écouta Machiavel, et Joseph de Maistre sentit ses conseils lui revenir sur le cœur, salive plus pesante que celle de l’homme qui crache en l’air et dont le crachat lui retombe sur la figure. […] Le comte de Maistre, qui avait senti l’angoisse de cela avec son maître, — comme Mirabeau avec le sien, — avec l’Empereur de Russie aurait-il été plus heureux ?

1870. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Ernest Renan »

Embarrassé par les témoignages positifs de l’Évangile sur les guérisons de Notre-Seigneur, il dit que tout l’Orient d’alors guérissait par l’emploi des pratiques religieuses, et que ce fut la joie de revoir son ami (à travers les pierres de son sépulcre probablement) qui ressuscita Lazare, quoiqu’il sentît mauvais déjà (mais c’était le chagrin peut être de ne plus voir son ami qui le faisait sentir mauvais ?). […] Quelques groupes d’hommes dans l’humanité, sur ce point de terre calciné, la Judée, virent passer l’adorable visage et en sentirent sur eux les rayons, — quelques groupes, morts maintenant, représentés, en tout, par quatre témoignages… Mais l’Église, elle, ne passe point.

1871. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Pas une seule fois, dans ces trois livres de vers, pas une seule fois, un mot, un tour, — une étrangeté, — une incorrection qui sente le dialecte et les âpres habitudes de sa province n’est venu se mêler à la langue de ce poète par trop francisé à la fin, de ce chantre des mœurs bretonnes, sans courage quand il s’agit de risquer à propos un mot patois ! […] Hormis en effet le plan de son poème, qui est ambitieux, et le labeur que l’on y sent, comme l’enclume, si elle avait une âme, sentirait le marteau, Les Bretons n’ont guère (quand ils les ont toutefois) que les qualités idylliques qui firent la fortune de Marie et de quelques pièces du poème qui suivit celui de Marie : La Fleur d’or.

1872. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lacaussade, Auguste (1815-1897) »

Lacaussade, qui sent profondément cette nature tropicale, a mis sa muse tout entière au service et à la disposition de son pays bien-aimé.

1873. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Plessis, Frédéric (1851-1942) »

Anatole France J’entends par bien aimer les vers, en aimer peu, n’en aimer que d’exquis et sentir ce qu’ils contiennent d’âme et de destinée ; car les plus belles formes ne valent que par l’esprit qui les anime.

1874. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Ruyters, André (1876-1952) »

Il n’y réussit pas toujours, mais en avoir senti la nécessité, c’est déjà bien joli.

1875. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Avertissement. » pp. -

J’ai donc peint ce que j’éprouvois, & je crois que plusieurs Ecrivains sentent comme moi.

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