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1261. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les snobs » pp. 95-102

Je crois vraiment que quelques-uns des événements les plus heureux de notre littérature, et par exemple l’épuration et l’affinement de la langue dans la première moitié du dix-septième siècle, l’entrée des sciences politiques et naturelles dans le domaine littéraire au dix-huitième, le mouvement sentimental et naturiste provoqué par Jean-Jacques, et l’évolution romantique suivie de l’évolution réaliste qu’a suivie la réaction idéaliste, un peu trouble, à laquelle nous assistons, ne se seraient point accomplis aussi vite sans les snobs.

1262. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Heredia, José Maria de (1842-1905) »

Il a vu les profondeurs du passé magnifiquement illuminées par ces sciences très spéciales que le vulgaire ignore ou méprise, et qui sont d’admirables lampes de mineur : l’archéologie, l’épigraphie, la diplomatique.

1263. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Maeterlinck, Maurice (1862-1949) »

Son évolution l’y entraîne ; et cet homme, qui a commencé par être un parfait artiste de légendes, finira par renoncer aux drames et aux œuvres imaginatives pour se consacrer exclusivement aux sciences morales.

1264. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Merrill, Stuart (1863-1915) »

Albert Mockel Stuart Merrill a la science de la ligne décisive, comme il sait onduler toutes les souplesses d’une attitude ; mais, il faut le remarquer, ses formes sont presque toujours en équilibre statique, telles que les fortes et nobles créations de Constantin Meunier, par exemple ; le geste, chez lui, peut s’immobiliser indéfiniment, par cela même qu’il indique plus souvent un état qu’une action, et donne mieux l’impression de la chose qui dure.

1265. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Retté, Adolphe (1863-1930) »

Singulière esthétique, car, enfin, la reproduction directe de la vie ou, comme ici, du possible est œuvre de science et non d’art, — à moins qu’on ne tolère cette enseigne ; photographie artistique.

1266. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Démosthéne, et Eschine. » pp. 42-52

Cette ville, l’exemple des autres, l’asyle des beaux arts, des sciences & des vertus, alloit tomber sous un conquérant ambitieux.

1267. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 29, si les poëtes tragiques sont obligez de se conformer à ce que la geographie, l’histoire et la chronologie nous apprennent positivement » pp. 243-254

Section 29, si les poëtes tragiques sont obligez de se conformer à ce que la geographie, l’histoire et la chronologie nous apprennent positivement remarques à ce sujet sur quelques tragedies de Corneille et de Racine . je crois donc qu’un poëte tragique va contre son art, quand il peche trop grossierement contre l’histoire, la chronologie, et la geographie, en avançant des faits qui sont démentis par ces sciences.

1268. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 2, du génie qui fait les peintres et les poëtes » pp. 14-24

Lorsque la qualité du sang est jointe avec l’heureuse disposition des organes, ce concours favorable forme, à ce que je m’imagine, le génie poëtique ou pittoresque ; car je me défie des explications physiques, attendu l’imperfection de cette science dans laquelle il faut presque toûjours déviner.

1269. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 7, que les genies sont limitez » pp. 67-77

Il arrive donc aux hommes, dans toutes les professions, ce qu’il leur arrive dans la science des jeux.

1270. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 3, de la musique organique ou instrumentale » pp. 42-53

Pour revenir à la guerison de quelques maladies par la musique ; les memoires de l’academie des sciences qui ne sont point écrits par des personnes qui croïent legerement, font mention sur l’année mil sept cens deux et sur l’année mil sept cens sept, de guerisons operées recemment par la vertu de la musique.

1271. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paria Korigan » pp. 341-349

En lisant ces Récits de la Luçotte, on sent qu’on n’a pas le moindrement affaire à un de ces archéologues qui refont, à force de science, une langue perdue, comme Balzac, par exemple, lequel, dans ses Contes drolatiques, le plus étonnant de ses ouvrages, a été le résurrectionniste de Rabelais, et qui a parlé la langue de Rabelais mieux que Rabelais lui-même, et pour dire des choses que Rabelais n’aurait jamais dites.

1272. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — IV »

Sand et les Flaubert, et que l’on retrouve dans les livres les plus personnels de Renan, par exemple dans l’Avenir de la Science.‌

1273. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Hæckel a cherché une fois de plus à fonder une religion sur la science. […] La biologie c’est précisément la science du mal sur la terre, de sorte que c’est la science de l’objection à Dieu ; et que ce Dieu soit plongé dans l’univers ou distingué de lui, l’objection reste la même, sauf que, en supposant Dieu plongé dans le monde, elle est plus forte. […] Il en est ici tout de même que dans l’ordre des sciences. La multiplicité des connaissances humaines a fait que les sciences aussi se sont divisées et subdivisées à l’infini. Il y avait autrefois des hommes qui possédaient la science intégrale.

1274. (1902) Le critique mort jeune

Ce pêcher s’appelle l’arbre de la science du bien et du mal. […] Se rendre maître d’une telle science égalerait une créature à son créateur. […] Faguet aille invoquant à grand bruit la raison, la science ou l’infaillibilité de sa méthode. […] Enivré de mysticisme, il finit par verser dans les sciences occultes et la magie. […] « La femme qui vit de la tête est un épouvantable fléau », a dit Balzac, docteur ès sciences conjugales.

1275. (1788) Les entretiens du Jardin des Thuileries de Paris pp. 2-212

N’étoit-il pas plus simple d’intituler le dictionnaire de toutes les sciences, dictionnaire universel, mais il a fallut revêtir son frontispice du mot Encyclopédique, comme étant plus sonore, plus pompeux ; & c’est ainsi qu’on fait croire aux ignorans que la science est une magie impénétrable au commun des mortels. […] Celui qui s’éleve par sa propre science, est presque toujours celui qu’on rabaisse & qu’on déchire. […] La science de Montpellier ne vaut rien à Paris, celle de l’Isle-de-France n’est pas reçue dans le Languedoc….. […] Chose d’autant plus singuliere, que les sciences sont un champ ouvert à qui veut le cultiver, & qu’on peut être bon médecin, sans avoir pris des degrés. […] Une patente donne-t-elle donc la science & la capacité ?

1276. (1927) Les écrivains. Deuxième série (1895-1910)

Même quand il crut devoir orienter son esprit vers la science et qu’il suivait les cours, à la Faculté de médecine, on le laissa faire, et pas un de ceux qui vivaient près de lui ne douta un seul instant, que cette incursion scientifique n’aboutît à la littérature. Car ce n’était, au fond, chez lui, qu’un besoin littéraire, une soif ardente de connaître, et la juvénile assurance qu’il allait, par la science, entrer dans le monde merveilleux de la vie. […] Mais n’avait-il point trop demandé à la science ? […] Il était le grand ouvrier de pensée, le maître des corporations, l’Ecclésiaste de chaque religion, le chantre de l’art et de la science. […] *** La genèse symbolique de la femme, interprétée par Remy de Gourmont, concorde exactement avec les conclusions de la science anthropologique.

1277. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre II. Lord Byron. » pp. 334-423

. —  La réponse des sciences. —  Équilibre futur de la raison. —  Conception moderne de la nature. […] Le paganisme, au contact de la science, s’était réduit à la reconnaissance des forces naturelles ; le christianisme, au contact de la morale, se réduisait à l’adoration de l’idéal. […] » Qu’est-ce qu’il découvre dans la science, sinon ses lacunes, et dans la religion, sinon ses momeries1324 ? […] Il a tant d’esprit, de l’esprit si neuf, si imprévu, si poignant, une si étonnante prodigalité de science, d’idées, d’images ramassées des quatre coins de l’horizon, en tas et par masses, qu’on est pris, emporté par-delà toutes bornes, et qu’on ne peut pas songer à résister. […] Dans cet emploi de la science et dans cette conception des choses il y a un art, une morale, une politique, une religion nouvelles, et c’est notre affaire aujourd’hui de les chercher.

1278. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Le classique français est un composé assez curieux de science des livres et de science de l’homme. […] Le crime lui-même de Faust n’a servi qu’à l’arracher à son laboratoire suspect de vague sorcier, pour le lancer dans le domaine de la vraie science et de la vie active. […] Il croyait au progrès indéfini par la science. […] L’amour du fait et le culte de la science, culte sans foi, sans la moindre croyance à l’infaillibilité de la science et à la puissance qu’elle aurait de régénérer et de diviniser l’homme, c’était toute la conscience intellectuelle d’Hippolyte Taine. […] Reste qu’on en parle, non seulement sans ménagements, mais avec tranquillité, comme la science doit toujours parler.

1279. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Le Roi, de l’Académie des sciences, lequel, lui-même, le tenait de M.  […] Autre question encore, plus générale : à quel rang ses inventions placent-elles Pascal dans l’histoire de la science ? […] Tel est en effet sur la foule, et sur quelques habiles aussi, le prestige naturel de ce mot de science ! […] À quelque raillerie méprisante qu’il se soit emporté contre la science humaine, si Pascal est un sceptique, où trouverez-vous un croyant ? […] Quand l’art de plaire devient une science : la science de tout promettre et de ne rien accorder ; l’art de vaincre en devient une autre : celle de ne rien donner et de tout obtenir.

1280. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

C’est enfin le public qui a voulu que le bon, l’excellent bibliophile, mêlât sa science à l’action d’un roman futile ; si le bibliophile n’eût pas fait son roman, adieu sa science ! on n’eût pas voulu pour rien de sa science. […] C’est bien la peine d’être savant pour être forcé de laisser sa science sur le seuil de la renommée ! […] Il était déjà un savant absorbé par la science ; mais la science ne lui suffisait pas. […] Mais aussi plus l’œuvre est grande, plus elle demande d’instinct, de science, d’esprit et de cœur.

1281. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Mais l’heure est venue où, sous le poids d’une lassitude, nous avons perdu la science de notre pouvoir. […] Dressons, sur les débris de tous nos orgueils mauvais, cet orgueil sacré de la Science […] Et nous, reprenons la science bénie, qui nous va délivrer ! […] Œuvre de science et d’art, où sont des documents à l’intelligence de l’idée Wagnérienne et de la civilisation grecque.

1282. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

Dans cette multiplicité d’aveux échappés aux plus cruels tournions, le chant, le récitatif, la parole, l’interjection, le cri, le rire sardonique se succèdent et s’entremêlent avec une telle vérité pathologique, une telle science toxicologique, une telle variété de mouvements passionnés, désolés et révoltés, selon que les espérances accordées et frustrées, la pitié due à un cuisant remords obstinément déniée, le pardon d’une faute amèrement déplorée à jamais rendu impossible, les instantes supplications repoussées, les repentirs ardents dédaignés, enfin le terrifiement dernier du désastre irrémédiable viennent se retracer dans une énumération haletante, que es moment forme à lui seul un drame dans le grand drame, et par ses sombres couleurs et son épouvantable angoisse, se détache de ce qui l’a précédé ainsi que de ce qui va suivre, comme une évocation qui aurait brisé les scellés de l’abîme des maux, pour surgir devant nos regards pétrifiés, pour leur dévoiler subitement tout l’infini de la douleur, et chacun de ses râles impuissants. […] Platon a compris la réalité unique du Moi créateur, la projection de Lui au néant d’où naissent les mondes ; il a superposé la philosophie idéaliste parfaite du Vrai à la science évolutionniste de l’Apparent. […] Et c’est, aux actes I, IV et V, la merveille d’une musique radieuse, adaptée au sujet, presque continue : c’est la solennelle majesté d’un rite sacré, où bruissent les révoltes de quelque luxurieuse passion ; c’est l’émotion douloureuse d’une lutte entre la science et les épouvantables désirs des ors ; c’est un chant d’amour si fervide et cruel, que le cœur halète, abîmé, sous l’afflux des perverses harmonies. […] Il devient ensuite un travail de préparation à la science — à peine ébauchée aujourd’hui — de la philosophie de l’histoire.

1283. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre X, Prométhée enchaîné »

C’est alors que Prométhée commence le récit épique qui le révèle dans toute sa grandeur ; non plus seulement donateur du Feu, mais sauveur des hommes, inventeur de toute civilisation et de toute science. […] La science moderne a précisé les lignes du sombre tableau tracé par Eschyle. […] De plus hautes leçons s’ajoutent à ces rudiments de la vie : Prométhée invente pour ses enfants d’adoption l’Écriture qui éternise la mémoire, les Nombres dont le rythme gouverne l’univers, les plantes qui guérissent les maladies, les baumes qui pansent les blessures, la science des présages et des aruspices qui, par les spirales observées du vol des oiseaux, relie le ciel à la terre. — « Écoute enfin, en un seul mot qui résume : tous les arts ont été révélés aux vivants par Prométhée. » — « N’as-tu rien fait de plus pour eux ?  […] Le Titan est puni de ses bienfaits, châtié de ses dons ; il expie sa science par la souffrance, et son génie par la dérision.

1284. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — II. (Fin.) » pp. 513-532

On croyait alors à son roi, on croyait surtout à son Dieu ; on y croyait non pas en général et de cette manière toujours un peu vague et abstraite, dans ce lointain où la science moderne, si on n’y prend garde, le fait de plus en plus reculer, mais dans une pratique continuelle et comme si Dieu était présent même physiquement dans les moindres occurrences de la vie. […] [1re éd.] avec Robert Sorbon et autres gens de science al.

1285. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « I » pp. 1-20

Pilot de l’Académie des sciences, il faut encore, monsieur, que je vous importune sur une petite difficulté. […] Émile Du Bois Reymond, l’un des secrétaires perpétuels de l’Académie de Berlin, dans un discours prononcé en séance publique (1868), a traité de Voltaire dans ses rapports avec les sciences naturelles.

1286. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

Il se livra à l’étude ; pendant deux années, il lut toutes sortes de livres ; il s’appliqua avec suite aux mathématiques : « J’ai conçu beaucoup de choses dans cette science, disait-il, mais je n’ai pas une tête à calcul, et ma santé est trop faible pour supporter l’extrême contention qu’exige cette étude. » Il se considérait dès lors comme un solitaire un peu cacochyme, que son organisation éloigne de la vie active et des affaires, et qui est plutôt fait pour se replier et se renfermer au dedans. […] Il donne l’idée que la première condition pour être psychologue est d’être infirme, ce qui ne se doit dire d’aucune science vraie : « Quand on a peu de vie, dit-il, ou un faible sentiment de vie, on est plus porté à observer les phénomènes intérieurs.

1287. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Je commence à m’apercevoir que la plupart ne savent que ce que les autres ont pensé ; qu’ils ne sentent point, qu’ils n’ont point d’âme ; qu’ils ne jugent qu’en reflétant le goût du siècle, ou les autorités, car ils ne percent point la profondeur des choses ; ils n’ont point de principes à eux, ou s’ils en ont, c’est encore pis ; ils opposent à des préjugés commodes des connaissances fausses, des connaissances ennuyeuses ou des connaissances inutiles, et un esprit éteint par le travail ; et, sur cela, je me figure que ce n’est pas leur génie qui les a tournés vers les sciences, mais leur incapacité pour les affaires, les dégoûts qu’ils ont eus dans le monde, la jalousie, l’ambition, l’éducation, le hasard. […] Si j’avais plus de santé, et si j’aimais assez la gloire pour lui donner ma paresse, je la voudrais plus générale et plus avantageuse que celle qu’on attache aux sciences.

1288. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

Le piquant, lorsqu’on lit de suite le Journal, est de voir les idées sensées de d’Argenson, ses vœux honorables pour la grandeur de son pays, se mêler sans cesse à ses propres poussées d’ambition ; car ce vertueux était de la même pâte que les autres hommes, seulement son ambition prenait, à son insu, je ne dirai pas le masque, mais la forme du bien public : il avait l’ardeur du bien, s’en croyait les moyens et la science, et avait hâte d’en venir à l’application. […] D’Argenson a écrit quelque part, dans cette supposition favorite de son futur ministère : « Si j’étais premier ministre et le maître, certainement j’établirais une académie politique dans le goût de celle de M. de Torcy. » Et voilà à quoi, certainement, il était le plus propre : établir une Académie des sciences morales et politiques, faire une société de l’Entresol en grand et au premier étage, y lire, en compagnie de gens de savoir et de mérite, des mémoires nourris, instructifs, à vues nombreuses et touffues, à projets drus et vifs, et dans lesquels d’autres que lui verraient ensuite ce qui est à prendre ou à laisser, ce qui est pratique ou ce qui ne l’est pas.

1289. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — M. de Sénancour, en 1832 »

Sa science consiste désormais à discerner ce qui est proche et permanent, ce qui est facile et inévitable, à s’y ranger, à s’y retrancher comme à un centre vrai, juste, essentiel, et à l’indiquer au monde. Plein d’aversion pour une société factice où tout, suivant lui, s’est exagéré et corrompu ; en perpétuelle défiance contre cette force active qui projette l’homme inconsidérément dans les sciences, l’industrie et les arts ; ne croyant plus, d’autre part, à la libre et hautaine suprématie de la volonté, il tend à faire rétrograder le sage vers la simple sensation de l’être, vers l’instinct végétatif, au gré des climats, au couchant des saisons ; pour une plus égale oscillation de l’âme, les données qu’il exige sont un climat fixe, des saisons régulières ; il choisit de la sorte, il compose un milieu automnal, éthéré, élyséen, selon la molle convenance d’un cœur désabusé, ou selon la mâle âpreté d’une âme plus fière, l’île fortunée de Jean-Jacques ou une haute vallée des Alpes ; il y pose le sage, il l’y assimile aux lieux, il lui dit d’aller, de cheminer à pas lents, prenant garde aux agitations trop confuses, et se maintenant par effort de philosophie à la sensation aveugle et toujours semblable. « Je ne m’assoirai point auprès du fracas des cataractes ou sur un tertre qui domine une plaine illimitée ; mais je choisirai, dans un site bien circonscrit, la pierre mouillée par une onde qui roule seule dans le silence du vallon, ou bien un tronc vieilli, couché dans la profondeur des forêts, sous le frémissement du feuillage et le murmure des hêtres que le vent fatigue pour les briser un jour comme lui.

1290. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN DERNIER MOT sur BENJAMIN CONSTANT. » pp. 275-299

Que si l’on a affaire à un homme politique, à l’un de ceux qui ont professé hautement la science sociale, et qui, de leur vivant, ont joui tant bien que mal des honneurs et du renom de grand citoyen, oh ! […] On travaille à séparer le plus qu’on peut les sciences et les lettres de tout ce qui tient à la politique et à toute espèce d’idée d’organisation sociale : je ne dis rien sur ce système ; mais on agit ensuite comme si ce but était déjà atteint, et on protége les lettres, comme si elles étaient déjà dans ce bienheureux état d’indépendance de toutes les agitations humaines.

1291. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — II. » pp. 195-213

Sa vie déborde, elle se compare à un lion en cage : elle devait naître femme spartiate ou romaine, ou du moins homme français ; osons citer son vœu réalisé depuis par des héroïnes célèbres : « Viens donc à Paris, écrit-elle à la douce et pieuse Sophie ; rien ne vaut ce séjour où les sciences, les arts, les grands hommes, les ressources de toute espèce pour l’esprit, se réunissent à l’envi. […] Il ne me surprend pas que Christine ait quitté le trône pour vivre paisiblement occupée des sciences et des arts qu’elle aimait… Pourtant, si j’étais reine, je sacrifierais mes goûts au devoir de rendre mes sujets heureux… Oui, mais quel sacrifice !

1292. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

II Dans toutes les langues, l’homme a parlé et écrit en prose des choses nécessaires à la vie physique ou sociale, domesticité, agriculture, politique, éloquence, histoire, sciences naturelles, économie publique, correspondance épistolaire, conversation, mémoires, polémique, voyages, théories philosophiques, affaires publiques, affaires privées, tout ce qui est purement du domaine de la raison ou de l’utilité a été dévolu sans délibération à la prose. […] XIII Mais que serait-ce si nous parcourions la gamme entière de l’âme humaine depuis l’enfance jusqu’à la caducité, depuis l’ignorance jusqu’à la science, depuis l’indifférence jusqu’à la passion, pour y discerner d’un coup d’œil ce qui est du domaine de la poésie de ce qui est du domaine de la prose ?

1293. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IX, les mythes de Prométhée »

La science moderne des langues et des mythes a révélé cette généalogie étonnante. […] Quelque chose de sacré s’attachait pour eux à cette science.

1294. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

Dans cette campagne où tant de mobiles l’animent, Napoléon va être victorieux sur tous les points ; mais, pour la première fois, il ne l’est pas comme il l’aurait voulu ; les résultats ne répondent qu’incomplètement à la science de ses manœuvres. […] Encore l’horreur de l’événement moderne dépassait-elle l’horreur des événements anciens de toute la puissance des moyens de destruction imaginés par la science.

1295. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Essai sur Amyot, par M. A. de Blignières. (1 vol. — 1851.) » pp. 450-470

Ce livre fait beaucoup d’honneur à M. de Blignières, qui est professeur de rhétorique dans l’un de nos collèges de Paris (Stanislas) ; la science dont il fait preuve n’est pas la seule chose qui plaise en lui ; son affection pour Amyot décèle ses mœurs, une âme qui aime les lettres, et qui les aime avec cette humanité d’autrefois, avec cette chaleur communicative qui est propre à gagner la jeunesse, et que possédaient les vieux maîtres. […] Amyot, appliqué, patient, un peu lent, dit-on, dut conquérir sa science à force d’opiniâtreté et d’ardeur.

1296. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — II. (Suite et fin.) » pp. 341-361

Dans cette formation du parti libéral où il entrait alors tant d’éléments divers, Courier reste ce qu’il était de tout temps, le plus antibonapartiste possible, ennemi des grands gouvernants, se faisant l’avocat du paysan, l’homme de la commune, prêchant l’économie, parlant contre la manie des places, voulant de gouvernement le moins possible, faisant des sorties contre la Cour et les gens de cour toutes les fois qu’il y a lieu, méconnaissant ce qu’il y a eu de grand, d’utile, de nécessaire dans l’établissement des Louis XIV, des Richelieu, des grands directeurs de nations, disant en propres termes, pour son dernier mot et son idéal : « La nation enfin ferait marcher le gouvernement comme un cocher qu’on paie, et qui doit nous mener, non où il veut, ni comme il veut, mais où nous prétendons aller, et par le chemin qui nous convient » ; disant encore, et cette fois plus sensément : Il y a chez nous une classe moins élevée (que les courtisans), quoique mieux élevée, qui ne meurt pour personne, et qui, sans dévouement, fait tout ce qui se fait ; bâtit, cultive, fabrique autant qu’il est permis ; lit, médite, calcule, invente, perfectionne les arts, sait tout ce qu’on sait à présent, et sait aussi se battre, si se battre est une science. […] Pour traduire Hérodote, il faut unir certaines qualités de science et de simplicité : Un homme séparé des hautes classes, dit-il, un homme du peuple, un paysan sachant le grec et le français, y pourra réussir si la chose est faisable ; c’est ce qui m’a décidé à entreprendre ceci où j’emploie, comme on va voir, non la langue courtisanesque, pour user de ce mot italien, mais celle des gens avec qui je travaille à mes champs, laquelle se trouve quasi toute dans La Fontaine.

1297. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — I. » pp. 127-148

Plus tard, dans les relations diplomatiques, lord Shelburne, traitant avec Franklin, observait que son caractère principal en affaires était « de ne point s’embarrasser de faire naître les événements, mais seulement de bien profiter de ceux qui arrivaient » ; et il lui reconnaissait la science de la médecine expectative. […] Il arrivait, par une voie laborieuse, à une fortune honnête et à une indépendance qui allait le mettre en état de se livrer à ses goûts pour l’étude et pour les sciences.

1298. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Émile Zola » pp. 70-104

Hugo, ni un homme habitué à manier les pensées abstraites comme le montre sa psychologie rudimentaire et les quelques articles où il a tenté d’appliquer à la littérature les procédés de la science. […] C’est la pensée qui est le centre, et le corps la périphérie ; la science le démontre après que l’expérience l’a constaté, et au nom même de l’évolutionnisme, l’activité cérébrale étant la plus récente est la plus haute, et l’être qui pense le plus étant le plus noble, est le plus intéressant.

1299. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre VI. Le beau serviteur du vrai »

L’art doit aider la science. […] L’intelligence, la pensée, la science, l’art sévère, la philosophie, doivent veiller et prendre garde aux malentendus.

1300. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre II : La littérature du xviie  siècle »

Nisard établit entre Descartes et Boileau me fait pressentir ce que la poétique de celui-ci peut avoir de sec et d’étroit, car comment cet esprit de méthode, si excellent dans les sciences, serait-il en même temps bon pour la poésie, sans que celle-ci en fût un peu diminuée et refroidie ? […] Ce n’est pas seulement sur deux points particuliers que Bossuet me paraît s’être trompé : c’est sur tout un ensemble de faits qui, dans la politique, dans la science, dans la conscience, se sont produits à partir du xve  siècle, et qui, espérons-le, sont appelés à conquérir le monde.

1301. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — L’inter-nationalisme »

A cette double question la science répond : mille fois non ! […] La science a découvert la loi de la lutte pour la vie.

1302. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre I. La demi-relativité »

La science de l’électro-magnétisme, que tu as si laborieusement construite, aurait été pour moi à refaire ; j’aurais eu à modifier mes équations, une fois établies, pour chaque nouvelle vitesse de mon système. […] Au prix de quelle liquéfaction de toute science eût été achetée la solidité des relations temporelles et spatiales !

1303. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXIX » pp. 117-125

Sa lettre à Villemain sur la liberté de l’enseignement commence en ces termes : « Vous n’aurez point de vacances cette année, monsieur le ministre, ni votre successeur l’année prochaine, s’il plaît à Dieu, car les catholiques ne veulent plus interrompre la guerre qu’ils livrent à l’enseignement de l’État… » Au nom d’un article de la Charte, au nom des serments d’août 1830, voici en fait ce que les catholiques, par l’organe de Veuillot, réclament : 1° Liberté pour tout citoyen d’ouvrir école ; 2° Liberté pour tout citoyen de fréquenter telle école que bon lui semblera, et d’y envoyer ses enfants ; 3° Formation d’un jury d’examen pour le baccalauréat, réunissant aux garanties nécessaires de science et de sévérité, les garanties non moins indispensables de moralité et d’impartialité, afin que devant ce jury, tout citoyen, sous le seul patronage de sa capacité et de son honneur, puisse demander le diplôme, quelle que soit l’école qu’il ait fréquentée, et quand même il n’en aurait fréquenté aucune.

1304. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « APPENDICE. — M. DE VIGNY, page 67. » pp. -542

Le romancier n’est rien, au contraire, qu’un praticien consommé dans la science de la vie, s’accommodant à tout ce qu’elle offre d’irrégulier, et d’ordinaire s’y tenant.

1305. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Réception à l’Académie Française »

Cuvier est un homme de génie lui-même ; arrivé à ces hauteurs de la science où elle se confond presque avec la poésie, il était digne de comprendre et de célébrer le poète philosophe qui, dans l’incertitude de ses pensées, avait plus d’une fois plongé jusqu’au chaos, et demandé aux éléments leur origine, leur loi, leur harmonie : Aristote pouvait donner la main à Platon.

1306. (1874) Premiers lundis. Tome II « E. Lerminier. Lettres philosophiques adressées à un Berlinois »

Par lui, les grandes phases de l’histoire des nations, les monuments de leurs lois, la série des législateurs et des philosophes, tout ce que le travail continu des siècles a apporté d’indestructibles matériaux à l’édifice du nôtre ; par lui, tout ce fortifiant spectacle n’a cessé de se dérouler aux regards des jeunes intelligences que la vue seule du présent pouvait décourager ou irriter outre mesure : leur devancier à peine de dix ans, l’ardent professeur les a constamment échauffées pour la science et pour l’avenir.

1307. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Préface »

Avec leur littérature, leur philosophie, leurs sciences, leurs gazettes et leurs correspondances, nous pouvons reconstituer toute leur pensée et jusqu’à leur conversation familière.

1308. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre premier. Les signes — Chapitre premier. Des signes en général et de la substitution » pp. 25-32

Deux sciences complètes, infiniment fécondes, reposent sur elle et ne sont efficaces que par là. — Que le lecteur me pardonne de l’avoir arrêté sur des remarques si simples.

1309. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Prosper Mérimée. »

Elle suppose beaucoup de science et de désenchantement  et beaucoup de pudeur et d’orgueil.

1310. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Pronostics pour l’année 1887. »

Le pape Pie XI annoncera par une suprême encyclique (Gaudeamus, fratres) à ce qui restera du monde chrétien qu’il remet ses pouvoirs aux mains de l’Académie des sciences de Berlin.

1311. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’état de la société parisienne à l’époque du symbolisme » pp. 117-124

Célèbres, au même titre que la plupart des gens, grâce au hasard qui les fit naître assistés d’une riche écuelle, ils voisinent avec les notabilités de la science, des lettres, des arts, du barreau, de la finance, de la noblesse et des cabinets particuliers.

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