« Si notre âme n’est qu’une matière subtile, mise en mouvement par d’autres éléments plus ou moins grossiers, auprès desquels même elle a le désavantage d’être passive ; si nos impressions et nos souvenirs ne sont que les vibrations prolongées d’un instrument dont le hasard a joué, il n’y a que des fibres dans notre cerveau, que des forces physiques dans le monde, et tout peut s’expliquer d’après les lois qui les régissent. […] « Lorsque Keppler eut découvert les lois harmoniques du mouvement des corps célestes, c’est ainsi qu’il exprima sa joie : « Enfin, après dix-huit mois, une première lueur m’a éclairé, et, dans ce jour remarquable, j’ai senti les purs rayons des vérités sublimes. […] Villemain, j’avais vu madame de Staël dans cette maison et ailleurs éclairer d’une vive lumière quelques entretiens accidentels sur la politique, les lettres, les arts, parcourir le passé et le présent comme deux régions ouvertes partout à ses yeux, deviner ce qu’elle ne savait pas, aviser par le mouvement de l’âme ou l’éclair de la pensée ce qui n’était qu’un souvenir enseveli dans l’histoire, peindre les hommes en les rappelant, juger, par exemple, le cardinal de Richelieu avec une sagacité profonde, et il faut ajouter une noble colère de femme, puis l’empereur Napoléon qui résumait pour elle tous les despotismes, et que sa parole éloquente retrouvait à tous les points de l’horizon comme une ombre gigantesque qui les obscurcissait.
Au mouvement, au mécanisme intérieur de la phraséologie française, il a rendu ces périodes amples et flottantes que le xviiie siècle dédaignait, qui avaient été s’effaçant de plus en plus sous les petits mots, les petites railleries des salons de Mme Geoffrin. […] Il s’opérait un mouvement pareil à celui de la Renaissance. […] Le mouvement créé par Victor Hugo se continue encore sous nos yeux.
Et dans tous les mouvements d’idées, les déviations ont été nombreuses et assez graves. […] Quand nous appelons déviation un mouvement qui a été enrayé ou corrigé, nous jugeons souvent par rapport au résultat final. Mais si ce mouvement avait réussi, il aurait peut-être abouti, lui aussi, à un équilibre, un équilibre différent, mais peut-être supérieur à celui qui s’est produit.
Colbert imprime un mouvement énergique à la marine marchande aussi bien qu’à l’industrie ; il administre avec une habileté prudente les ressources du pays. […] Alors aussi il y a un réveil agricole qui met en mouvement les esprits sérieux. […] Quoique la condition matérielle des ouvriers de la pensée se soit certainement élevée du moyen âge à nos jours, et d’un mouvement presque constant, ces contrastes fréquents, ordinaires même, d’opulence et de gueuserie ne permettent guère de suivre avec précision les phases par où elle a passé.
Dimanche 5 mars Aujourd’hui Tourguéneff est entré chez Flaubert, en disant : « Je n’ai jamais si bien vu qu’hier, combien les races sont différentes : ça m’a fait rêver toute la nuit… Nous sommes cependant, n’est-ce pas, nous, des gens du même métier, des gens de plume… Eh bien, hier, dans Madame Caverlet, quand le jeune homme a dit à l’amant de sa mère qui allait embrasser sa sœur : « Je vous défends d’embrasser cette jeune fille. » Eh bien, j’ai éprouvé un mouvement de répulsion, et il y aurait eu cinq cents Russes dans la salle, qu’ils auraient éprouvé le même sentiment… et Flaubert, et les gens qui étaient dans la loge, ne l’ont pas éprouvé ce moment de répulsion… J’ai beaucoup réfléchi dans la nuit… Oui, vous êtes bien des latins, il y a chez vous du romain et de sa religion du droit, en un mot, vous êtes des hommes de la loi… Nous, nous ne sommes pas ainsi… Comment dire cela ? […] Il entremêle son récit de détails sur la vie des habitants, sur leurs habitudes, sur les mouvements d’âme de ces infirmes, sur les originaux de l’endroit, des détails enfin, avec lesquels un romancier ferait un original et neuf début d’une existence. […] Dimanche 12 novembre Au fond, je n’ai pas grande sympathie pour ces femmes du dix-huitième siècle, ces femmes sans premier mouvement, sans foi, sans croyance à un sentiment bon et désintéressé, toute saturées, à l’exception de deux ou trois, de positivisme et de scepticisme.
Une des matières les plus neuves de l’enseignement, celle que semblait appeler le mouvement littéraire de l’époque, c’était la question du beau et de l’art. […] Chez les nations vieillies, le mouvement des arts commence souvent par la critique. […] — Non ; le mouvement social n’étouffe point le sens littéraire : tout ce qui éveille l’intelligence d’une nation est moins pour la poésie un obstacle qu’un moyen.
Le comique de situation et le comique de mots [ I ] Nous avons étudié le comique dans les formes, les attitudes, les mouvements en général. […] À mesure que la scène avance, l’image du diable à ressort se dessine mieux, si bien qu’à la fin les personnages eux-mêmes en adoptent le mouvement, Sganarelle repoussant chaque fois Pancrace dans la coulisse. […] Le comique est ce côté de la personne par lequel elle ressemble à une chose, cet aspect des événements humains qui imite, par sa raideur d’un genre tout particulier, le mécanisme pur et simple, l’automatisme, enfin le mouvement sans la vie.
La pratique et la politique ne s’accommodent pas des élans impétueux ni des mouvements brusques ; au contraire, l’art en profite. […] Il y gagne la force ; car il y prend le droit d’aller jusqu’au bout de sa sensation, d’égaler les mouvements de son style aux mouvements de son cœur, de ne ménager rien, de risquer tout.
On peut dire qu’il s’est enseveli dans son triomphe, que le scepticisme intégral serait désormais ridicule, que la science positive s’est prouvée elle-même en se constituant comme on prouve le mouvement en marchant. […] Il y avait déjà d’heureux symptômes, mais le mouvement a été déterminé en grande partie par l’afflux des savants byzantins fuyant devant l’envahisseur avec leurs bibliothèques et emportant l’hellénisme en Occident. […] Le mouvement instinctif du lecteur est de courir d’abord au texte de Rodin. […] Il voudrait provoquer un mouvement efficace, une dévotion plus pratiquante. […] Infiniment sociable, éblouissant causeur, il recherchait naturellement la bonne compagnie, le mouvement et les réunions brillantes.
Mais les arguments et les mouvements qui conviennent ici, il les trouve tout de suite après. […] C’est-à-dire que les caractères et tous les sentiments des personnages se traduisent par des mouvements extérieurs, parlent aux yeux. […] Il explique aussi qu’il est en train de découvrir le mouvement perpétuel. — Koudriache est employé chez Dikoï, un riche marchand connu pour sa violence et sa méchanceté. […] Il n’y a donc pas grand’chose à en faire au théâtre, car le théâtre vit de mouvement. […] Le mouvement est bien encore dans chaque scène en particulier : il n’est plus dans l’ensemble de l’œuvre.
Les pages qui suivent sont le fruit de ce second mouvement : après avoir perdu, devant les œuvres du grand homme et devant la vie dont elles sont le reflet, ma liberté d’esprit, je l’ai retrouvée et j’ai tâché de m’en servir. […] D’autres, parmi ses contemporains, ont contribué à préparer le large mouvement scientifique qui a emporté ce siècle, ont répandu le goût du travail pénible, patient et complet. […] Le mouvement puissant des flots se tourne en écume, l’activité puissante de la jeunesse se tourne en jeu. […] Je le vois distinctement, je vois sa forme, ses mouvements. […] Tu contrôlais chacune de mes expressions, tu blâmais chacun de mes mouvements, chacune de mes manières d’être, et me mettais toujours mal à l’aise.
Je serais ravi de ce bon mouvement. […] Le roi-citoyen dut reculer devant un mouvement populaire qu’un grand poète a trop cruellement appelé la « révolution du mépris ». […] Soit, disent les raisonneurs un peu déconcertés, tout s’explique par l’emploi des mouvements tournants, du télégraphe électrique et des chemins de fer… Eh ! […] Il me parut un homme dépaysé dans le chaos, qui semblait chercher la lumière et une route à tâtons à travers le mouvement. […] Le fandango tourne et oscille… Tous les bras, tendus et levés, s’agitent en l’air, montent ou descendent avec de jolis mouvements cadencés, suivant les oscillations du corps.
Et ces sources ne sont pas près d’être taries, car l’eau empoisonnée qui les alimente filtre de trop haut, et c’est un immense mouvement du terrain social qui, seul, pourrait empêcher cette infiltration et ses conséquences. […] Emile Zola dans sa Page d’amour ou son Ventre de Paris, et de peindre, avec l’imagination des masses, les vastes mouvements de la foule dans les vastes quartiers. […] C’est le mouvement seul de cette âme qui fait la beauté de ces vers ; et que ce mouvement ait eu pour principe la conviction la plus erronée ou la plus correcte, qu’importe ? […] Une machine mise en mouvement par des sensations, et, ces sensations, il les montre morbides, douloureuses, suprêmement lancinantes et inquiètes. […] Se découvrir un style, c’est tout simplement avoir le courage de noter les mouvements de son moi.
Ils pensent, continûment, du même mouvement ils pensent à la vendange de l’année prochaine. […] Le mouvement est tel que c’est toujours le premier vers, ou les vers conducteurs, qui mangent le titre, qui deviennent le titre. […] Elle suit le mouvement de l’histoire. […] Dans une courbe d’une plénitude, d’un mouvement unique. […] Ce mouvement de fleuve aisé, de Loire et de Rhin victorieux.
Se peut-il que la poésie ait seule échappé à ce mouvement universel vers l’unité, ou plutôt vers l’union des forces, vers le mélange des intérêts et des idées ? […] Et quelle merveilleuse variété de mouvements dans ce récit ! […] Se peut-il que la poésie ait seule échappé à ce mouvement universel vers l’unité, ou plutôt vers l’union des forces, vers le mélange des intérêts et des idées ? […] Le singulier mouvement d’idées et de passions que l’année 1848 a vu éclater, est encore bien mal connu dans ses causes, dans sa nature et dans ses conséquences. […] avec quels doux mouvements d’espoir !
Je ne crois pas qu’à aucune époque d’aucun mouvement littéraire, il y ait eu, contre un groupe de nouveaux venus, un pareil emportement de gausseries et d’injures. […] Et d’ailleurs, si le récit de nos batailles littéraires perd de son autorité à être fait par un des combattants, — le plus humble de tous, — il y gagnera peut-être quelque chose en mouvement et en pittoresque. […] En un clin d’œil mes pieds sont emboîtés en deux infâmes machines de fer, vissées par dessous le lit de camp, et me voilà sur le dos, dans l’impossibilité absolue de faire un mouvement. […] On voit d’ici ce mouvement, cette vie, cette animation extraordinaire que les intérêts financiers sont seuls capables de donner, aujourd’hui, à des villes sérieuses. […] Alors, beaucoup d’entre les esprits nouveaux s’adonnaient à la politique, commençaient l’œuvre des revendications sociales, et c’était l’autre côté de l’eau qui était le lieu de ces travaux ; c’était là que se plaçait le centre de ce mouvement.
Or, tu sais que le mouvement exaspère l’appétit et je suis aujourd’hui encore plus enragé qu’avant. […] C’est le mouvement sublime par lequel les sentiments enveloppés et sommeillant dans l’âme humaine éclatent soudainement dans la vie morale et retentissent dans tous les actes extérieurs de la vie physique. […] C’était ineffablement bête, c’était idiot, criminel même, mais enfin, c’était encore de l’âme et de l’âme humaine ; c’était du mouvement et de la vie. […] Et comme cette Douleur est le résultat d’un mouvement infini de pitié combiné avec le mouvement contraire d’une prodigieuse prévarication — puisqu’il s’agissait d’y remédier sans détruire la liberté de l’homme — il devient évident qu’elle ne pouvait se produire sans défaillance qu’accompagnée de l’enthousiasme perpétuel d’un amour sans bornes. […] Donato fasse un beau jour telle expérience magnétique qui produise cet effet d’inspirer à son sujet un mot spirituel, un mouvement généreux ou simplement un geste noble et je lécherai le dessous de ses pieds.
ce me sont de mortelles blessures, De voir qu’avec le vice on garde des mesures ; Et parfois il me prend des mouvements soudains De fuir dans un désert l’approche des humains. […] Madame, je vous crois l’âme trop raisonnable Pour ne pas prendre bien cet avis profitable, Et pour l’attribuer qu’aux mouvements secrets D’un zèle qui m’attache à tous vos intérêts. […] Madame, je vous crois aussi trop raisonnable Pour ne pas prendre bien cet avis profitable, Et pour l’attribuer qu’aux mouvements secrets D’un zèle qui m’attache à tous vos intérêts. […] Et je ne veux aussi, pour grâce singulière, Que montrer à vos yeux mon âme tout entière, Et vous faire serment que les bruits que j’ai faits Des visites qu’ici reçoivent vos attraits Ne sont pas envers vous l’effet d’aucune haine, Mais plutôt d’un transport de zèle qui m’entraîne, Et d’un pur mouvement… ELMIRE. Et d’un pur mouvement…Je le prends bien ainsi, Et crois que mon salut vous donne ce souci.
Paganisme, Chrétienté, Génie national, auxquels nous devrons ajouter le mouvement scientifique (qui, remontant aux époques immémoriales de Prométhée et de l’inventeur de la charrue, pour aboutir à Képler et Ampère, modifie tous les jours la nature par ses nobles découvertes), voilà les quatre grandes traditions que doivent rénover pour une définitive synthèse, les jeunes et candides esprits, soucieux d’une œuvre humaine, conforme à la nature. […] Croient-ils donc avoir atteint à un pathétique bien élevé ; pour avoir accumulé une infinité de traits ténus, et avoir figuré de beaux mouvements d’âme, ils n’ont pas créé de héros vivants. […] Nous assistons à un mouvement naturel, nécessaire et fatal, destiné peut-être à bouleverser dans sa morphologie la surface terrestre, mais imposé par des lois cosmiques. […] Le poète d’Eurythmie, des Lavandières, des Étoiles Filantes possède ce rare privilège d’avoir été l’instigateur d’un mouvement dont il ne tolère pas les erreurs. […] Nos mains s’étreignent, voilà des mouvements irréfléchis et d’une coutumière banalité, ils possèdent cependant la superbe signification des alliances héroïques.
» Mardi 24 février Ce matin, à propos du patriotisme de Renan, je reçois une carte postale signée : « Un patriote français vainqueur à Coulmiers (9 novembre 1870) » me disant : « L’article du 15 septembre 1870 de la Revue des Deux Mondes, signé Renan, connu plus tôt, eût, peut-être empêché son élection à l’Académie française, car cet article antifrançais, n’était pas fait pour encourager les soldats de l’armée de la Loire, qui, comme moi l’ont lu à Orléans, avant de marcher à l’ennemi. » Mercredi 25 février À midi, enfin arrive une dépêche de la comtesse Greffulhe, qui m’annonce d’une manière positive, que l’Impératrice de Prusse ne viendra pas décidément chez moi, ce qui me comble de joie, vu que dans l’état des esprits et le mouvement d’éreintement de ma personne, cette visite aurait fait demander ma tête. […] pas un mouvement de répulsion, pas un timide chuchotement, pas un sifflet. […] Tout cela est dit, avec une parole légère sans appuiement, des mouvements d’un dessin élégant, et dans la pose et l’attitude doucement dédaigneuse, qu’elle me donne à peindre. […] Il trouve nos danses trop sautillantes, trop brisées, tandis que dans ces danses, c’est une succession de mouvements engendrant et produisant un serpentement, une ondulation. […] Ce jeune homme qui est un exubérant, dans la chaleur de son exposition, posait la main sur le couvercle d’un sucrier, faisant partie d’un verre d’eau posé sur le bureau du banquier, et emporté par un mouvement oratoire, il l’enlevait en l’air, au bout de sa main.
Et, en même temps, un mouvement populaire renverse du trône le mauvais roi Palaka. […] (C’est cet inconnu si bref, ce mouvement insaisissable de la suprême pensée qu’escompte l’Église dans certaines de ses absolutions.) […] Parfois, d’un mouvement spontané, la prose délirante et harmonieuse de Courteline se tourne en vers lyriques. […] Dès lors, tout ce qui n’est pas action matérielle, mouvement physique, m’est importun. […] Cet écrivain, trop malin ailleurs, a comme cela, parfois, des mouvements par où son âme sera sauvée, — sinon ses pièces.
Antoine a, par le Théâtre-Libre, créé un mouvement dramatique : car qui est-ce qui crée un mouvement ? […] Nous sommes persuadés qu’elle ne pourra tenir devant ce spectacle ; que, par un invincible mouvement de tout son cœur, elle va se précipiter et crier : « Me voilà ! […] Puis, on est, si je puis dire, trop certain de leur incertitude ; on prévoit trop l’imprévu et l’incohérence chétive de leurs mouvements. […] Toute cette douleur que son frère l’industriel est si fier d’avoir mise en mouvement, Daniel se dit que sa souffrance, à lui, en est la représentation et peut-être le rachat. […] En l’absence d’une action continue, d’une intrigue qui relie les tableaux entre eux, il veut beaucoup de mouvement et d’invention dans le détail.
On eût dit qu’il voulait substituer à l’ancienne agitation de la république le mouvement paisible des lettres. […] Qu’importe, en effet, que l’on étudie l’art des paroles, que l’on calcule l’élégance et l’harmonie, quand tout mouvement lier et libre est interdit à l’âme ? […] Cependant il y avait alors un mouvement de renaissance dans la partie la plus éclairée de la nation. […] Il n’y a du reste dans tout cela nulle passion vraie, nulle peinture de mœurs, nulle imitation de la nature, mais quelquefois un mouvement singulier d’imagination. […] La tragédie de Samson fait peu regretter qu’il n’ait pas suivi ce dessein : elle manque à la fois de régularité et de mouvement dramatique.
Lucrèce a dit que les chiens de chasse mettoient une forest en mouvement ; où l’on voit qu’il prend la forest pour les animaux qui sont dans la forest. […] C’est ainsi qu’on parle de la blancheur, du mouvement, du repos, sans faire aucune atention particulière à quelque objet blanc, ni à quelque corps qui soit en mouvement ou en repos. […] C’est à l’ocasion de ces impressions que nous considérons ensuite séparément, et indépendament des objets, les diférentes afections qu’elles ont fait naitre dans notre esprit, c’est ce que nous apelons les propriétés des objets : je ne considérerois pas le mouvement en lui même, si je n’avois jamais vu de corps en mouvement. […] Nous somes acoutumés dès notre enfance à voir des corps qui passent successivement d’une place à une autre, ensuite pour exprimer cette propriété et la réduire à une sorte d’idée générale, nous nous servons du terme de mouvement. […] Il en est de même de douceur, amertume, être, néant, vie, mort, mouvement, repos, etc.
Seulement, dans cet écrit si étroit et si simple d’idées, il y a de fortes pages, des mouvements vigoureux et suivis, d’éloquentes poussées d’indignation, un très beau talent de style : on y sent quelque chose du poète dans un grand nombre de comparaisons heureuses. […] Tout ce qu’on fait l’un pour l’autre porte plus constamment le caractère d’une heureuse inspiration, d’un mouvement involontaire, indépendant de toute espèce de calcul ou de réflexion.
Il y prend position contre la philosophie du jour : « J’ai été moins l’ami de Dieu, dit-il, que l’ennemi de ses ennemis, et c’est ce mouvement d’indignation contre les ennemis de Dieu qui m’a fait faire mon premier ouvrage. » Mais ce livre qui allait à défendre la Providence et les premiers principes ne porta point et fut comme non avenu. […] Ce qu’il faut lui demander en attendant, avant de pousser plus loin le récit de sa vie et pour nous bien persuader qu’il mérite l’examen et l’attention de tous, ce sont les pensées du cœur, les mouvements puisés dans la sublime logique de l’amour ; car c’est à quoi il était le plus sensible et le plus propre : J’ai été attendri un jour jusqu’aux larmes, dit-il, à ces paroles d’un prédicateur : « Comment Dieu ne serait-il pas absent de nos prières, puisque nous n’y sommes pas présents nous-mêmes ?
Mais ce qui m’a soutenu, c’est la persuasion que notre Révolution ayant un grand but et un grand mobile, on doit s’estimer heureux toutes les fois qu’on se trouve pour quelque chose dans ce grand mouvement, surtout quand c’est de cette manière-là, où il ne s’agit ni de juger les humains, ni de les tuer. […] Sa profession de foi sur la Révolution française est simple, elle est celle d’un croyant : il pense que la Providence s’en mêle soit directement, soit indirectement, et par conséquent il ne doute pas que cette Révolution n’atteigne à son terme, « puisqu’il ne convient pas que la Providence soit déçue et qu’elle recule » : En considérant la Révolution française dès son origine et au moment où a commencé son explosion, je ne trouve rien à quoi je puisse mieux la comparer qu’à une image abrégée du Jugement dernier, où les trompettes expriment les sons imposants qu’une voix supérieure leur fait prononcer, où toutes les puissances de la terre et des cieux sont ébranlées… Quand on la contemple, cette Révolution, dans son ensemble et dans la rapidité de son mouvement, et surtout quand on la rapproche de notre caractère national, qui est si éloigné de concevoir et peut-être de pouvoir suivre de pareils plans, on est tenté de la comparer à une sorte de féerie et à une opération magique ; ce qui a fait dire à quelqu’un qu’il n’y aurait que la même main cachée qui a dirigé la Révolution, qui pût en écrire l’histoire.
Il nous faudrait des chefs qui nous éduquassent mieux, qui eussent donner l’essor à nos mouvements, qui laissassent aller nos saillies pour mettre les esprits dans l’habitude d’un mouvement noble et d’un feu qui les élèverait, et rétablirait le génie et le goût comme dans le beau siècle de Louis XIV, et peut-être mieux ; des chefs qui récompenseraient à propos et ne puniraient les Français que par la privation des grâces, seule façon de diriger les gens à talents.
ce n’est plus ici la joie de Plombières, ce n’est plus le mouvement, la danse, cette légèreté d’écureuil, ces gaietés de chèvre par les hauts sentiers. […] Napoléon, voyant se replier ses tirailleurs et irrité que les Prussiens fussent près de lui échapper, fit précipiter le mouvement sur toute la ligne et lança même à la charge ses quatre escadrons d’escorte sous les ordres du général Le Tort, un de ses aides de camp.
L’impression des contemporains est que, si Mayenne avait gagné la partie en ces journées et avait vaincu l’armée royale, le mouvement populaire aidant et l’avénement de Henri IV ayant réveillé toutes les colères de la Ligue, il n’avait qu’à se saisir de la couronne, il était roi ; il l’était en vertu d’un mouvement français égaré, et sans avoir eu trop besoin de Philippe II.
Félix Clément a recueilli quantité de passages qui prouvent que ce mouvement d’interrogation si naturel a été trouvé de bonne heure60. […] Je ne saurais, je l’avoue, admirer beaucoup cette prose symétrique dans laquelle la rime donne le mot, de gré ou de force, et tire tout à soi ; mais enfin le premier mouvement, l’accent et, pour ainsi dire, le geste sont là.
Benjamin Constant, arrivant de Suisse à Paris, en 1795, à l’âge de vingt-huit ans, pour s’y lancer dans le mouvement politique, était un beau grand jeune homme, d’un blond hardi, muscadin, à l’air candide, mais au dedans très avancé, très désabusé, et qui était allé de bonne heure au fond de tout. […] Ouvrez la brochure des Réactions politiques (1797), on y voit « une tendance de l’esprit humain à englober dans ses regrets tout ce qui entourait ce qu’il regrette » ; on y voit « un mouvement rétrograde qui, se prolongeant au-delà de ses bornes nécessaires, ne laisse enfin pour vestige du changement qu’on voulut opérer, que des débris, des larmes, de l’opprobre et du sang. » Depuis lors, la langue de Benjamin Constant se rompit et se brisa ; elle devint facile, et parut encore plus élégante qu’elle ne l’était.
La maison, à l’étage inférieur, était animée par le mouvement des gens de service, et l’on sentait la présence d’une famille. […] La difficulté est bien plutôt de s’isoler, de se défendre du trop d’information qui, de droite ou de gauche, n’est qu’une distraction perpétuelle ; mais, à Weimar, Gœthe avait dû songer de bonne heure à la meilleure manière d’entretenir et de renouveler régulièrement l’activité, le mouvement dont il sentait le besoin, — la seule chose qui lui ait un peu manqué.
On dit pourtant qu’en apprenant la nouvelle de la disgrâce de M. de Maurepas (avril 1749), son premier mouvement fut de s’écrier : « Voilà donc enfin la vie de Mme de Pompadour en sûreté ! » A défaut de portraits gravés ou peints, on a un portrait d’elle à cette date de jeunesse encore, — de seconde jeunesse, — par Mme du Deffand : « Mme la duchesse de Boufflers est belle sans avoir l’air de s’en douter ; sa physionomie est vive et piquante, son regard exprime tous les mouvements de son âme ; il n’est pas besoin qu’elle dise ce qu’elle pense, on le devine aisément, pour peu qu’on l’observe.
C’est, comme le titre l’indique, un journal, une espèce de livre de bord, exactement tenu par un homme du métier (Jean-Bon avait été marin), par un homme de bon sens, et qui rend compte jour par jour de tous les mouvements, des ordres donnés et plus ou moins bien — et souvent fort mal — exécutés, depuis la sortie de la flotte de la rade de Brest le 16 mai au soir, jusqu’à sa rentrée dans cette rade le 11 juin suivant. […] Dans ce poste de Mayence si capital et si central pour les opérations de guerre, il se serait fait une délicatesse de demander à s’absenter pendant toute la durée des grands mouvements militaires qui donnaient à l’administration civile des devoirs extraordinaires à remplir.
Non pas seulement assister d’une bonne place à ce savant et terrible jeu à combinaisons non limitées qu’on appelle la grande guerre, non pas seulement être appelé à donner en quatre ou cinq occasions des conseils plus ou moins suivis, mais être une bonne fois à même d’appliquer son génie, ses vues, sa manière d’entendre et de diriger les mouvements d’un corps d’armée, être compté, en un mot, lui aussi, dans la liste d’honneur des généraux qui ont eu leur journée d’éclat, qui ont combiné et agi, qui ont exécuté ce qu’ils avaient conçu. […] De même pour les mouvements du maréchal Ney dans la seconde quinzaine de mai 1813, dans les jours qui précédèrent la bataille de Bautzen, le colonel Lecomte, en discutant la Correspondance impériale, y signale des lacunes et s’attache à montrer d’ailleurs que, même avec les éléments qu’on a, il y a tout à fait lieu et moyen d’attribuer à l’influence directe de Jomini le changement de résolution qui détourna le maréchal Ney de faire front vers Berlin pour se rabattre sur Bautzen.
Aujourd’hui il n’en est plus ainsi : la critique s’est remise en marche ; à y bien voir, elle n’avait jamais abdiqué ; elle avait toujours eu ses studieux asiles, ses doctes laboratoires, à Oxford, à Leyde ; mais le mouvement se poursuivait à l’ombre, sans éclater au dehors. […] Il ignore ce que nos jeunes savants appellent aujourd’hui « la belle langue du xiiie siècle », cette langue si délitable, si en usage et en faveur dans tout l’Occident, et qui, vers le temps de saint Louis, était peut-être plus voisine d’une certaine perfection dans son genre que cette même langue, remise en mouvement et en fusion, ne l’était au xvie siècle.
Corneille, avons-nous dit, était un génie pur, instinctif, aveugle, de propre et libre mouvement, et presque dénué des qualités moyennes qui accompagnent et secondent si efficacement dans le poëte le don supérieur et divin. […] Il rentra dans l’imitation espagnole par le Menteur, comédie dont il faut admirer bien moins le comique (Corneille n’y entendait rien) que l’imbroglio, le mouvement et la fantaisie ; il rentra encore dans le génie castillan par Héraclius, surtout par Nicomède et Don Sanche, ces deux admirables créations, uniques sur notre théâtre, et qui, venues en pleine Fronde, et par leur singulier mélange d’héroïsme romanesque et d’ironie familière, soulevaient mille allusions malignes ou généreuses, et arrachaient d’universels applaudissements.
Un jour qu’il dictait selon sa coutume, son secrétaire distrait peut-être, ou entendant mal la voix déjà altérée, lui fit répéter le même mot deux et trois fois ; à la troisième, un mouvement de vivacité et d’humeur échappa. La dictée continuant, M. de Ségur eut soin d’adresser à plusieurs reprises la parole au jeune homme, comme pour couvrir ce mouvement involontaire ; mais il put deviner, à l’accent un peu ému des réponses, l’impression pénible qu’il avait causée.
Il ne comprit d’elle que son mouvement, non sa direction. […] On est fier d’être d’une race d’hommes à qui la Providence a permis de concevoir de telles pensées, et d’être enfant d’un siècle qui a imprimé l’impulsion à de tels mouvements de l’esprit humain.
Sa place dans le mouvement général de la littérature. — -î. […] Dans celle-ci se relient et tous les mouvements, toutes les tendances de la Renaissance française, dont elle est à ce moment la plus complète expression : plus complète sans nul doute que Marot qui la surpasse en talent littéraire.
C’est là cette morale pratique dont nous fournissons la matière, et qui nous avertit de nos plus secrets mouvements, non par des analogies plus ou moins éloignées, mais en nous les faisant toucher du doigt. […] La Rochefoucauld, en poursuivant de son analyse amère et impitoyable tous les déguisements de notre mauvaise nature, en nous faisant peur de nos mouvements les plus naïfs, aurait pu nous ôter jusqu’au désir de l’innocence, à force de nous prouver qu’elle est impossible.
Ce fut un mouvement imprévu et spontané qui les entoura d’une admiration ardente. […] Je ne peux pas vous faire ici, année par année et jour par jour, l’histoire de ce mouvement littéraire.
Il s’est défié des sceaux de l’État, et il a pensé qu’il ne fallait mettre en mouvement l’autorité préfectorale que pour des vertus qui ne supposent pas un petit cercle d’initiés. […] Son frère, perclus, qui n’a pas un mouvement, reçoit d’elle une instruction et des sentiments religieux qui le consolent ; un vieux grand-père, dans la misère, est adopté ; la mère, devenue paralytique, une jeune sœur, victime d’un accident, sont soignées, remplacées ; l’intempérance du père est limitée ; grâce à Emmeline, tout va pour le moins mal possible dans la plus triste des maisons.
Cela entraine des conséquences graves : d’abord un dédain profond des classes subalternes, un parti pris d’écarter ce qui peut rappeler les vulgarités de la vie domestique ou populaire ; puis, entre les privilégiés admis sur un terrain de choix, un code très sévère de bienséances : peu parler de soi ; épargner l’amour-propre d’autrui ; flatter ou ménager les travers des gens en leur présence, ce qui n’interdit pas — au contraire — de les railler en leur absence ; beaucoup de tact et de circonspection ; adoucir les angles de son caractère ; mettre une sourdine aux émotions trop vives, aux convictions trop fortes ; laisser entendre ce qu’on ne peut pas dire tout haut ; s’habituer ainsi à une fine analyse des sentiments, à une psychologie déliée qui permet de reconnaître à un froncement de sourcils, à un regard, à une inflexion de voix les plus subtils mouvements du cœur. […] Les salons ne sont plus seulement une école du bien-dire ; ils sont aussi pour les écrivains un milieu excitant, où ils pensent pour le plaisir de penser, où ils sont entraînés par le mouvement de la causerie à tirer de leur cerveau les trésors qu’il contient à l’état latent et à faire en eux-mêmes des découvertes.
Toutefois entendons-nous : si, d’une part, la seule Science ne peut produire que d’habiles amateurs, — grands détrousseurs de « procédés », de mouvements et d’expressions, — consommés, plus ou moins, dans la facture de leurs mosaïques, — et, aussi, d’éhontés démarqueurs, s’assimilant, pour donner le change, ces milliers de disparates étincelles qui, au ressortir du néant éclairé de ces esprits, n’apparaissent plus qu’éteintes, — d’autre part, la foi, seule, ne peut produire et proférer que des cris sublimes qui, faute de se concevoir eux-mêmes, ne sembleront au vulgaire, hélas, que d’incohérentes clameurs : — il faut donc à l’Artiste-véritable. à celui qui crée, unit et transfigure, ces deux indissolubles dons : la Science et la Foi. — Pour moi, puisque vous m’interrogez, sachez qu’avant tout je suis chrétien, et que les accents qui vous impressionnent en mon œuvre ne sont inspirés et créés, en principe, que de cela seul. […] L’orchestre sous la direction du Kappelmeister Mahleraa a montré qu’il « comprenait » la signification de l’œuvre : il y a plusieurs manières d’interpréter les drames wagnériens : soit d’une manière incorrecte, mais en indiquant le mouvement, comme le fait M.
Il trouva cette coterie à Sceaux, et, à force de mouvement et d’invention, il sut la remplir, durant plus de vingt-cinq ans, de l’idée de son mérite et de sa sublimité. […] Les philosophes, quelques philosophes du moins, ont imaginé que si l’homme, après sa naissance et dans ses premiers mouvements, n’éprouvait pas de résistance dans le contact des choses d’alentour, il arriverait à ne pas se distinguer d’avec le monde extérieur, à croire que ce monde fait partie de lui-même et de son corps, à mesure qu’il s’y étendrait de son geste ou de ses pas.
La modestie, la grâce, une grâce simple et ingénue, un air de pudeur qui gagnait l’estime, inspiraient et disposaient à ravir tous ses mouvements. […] Bossuet suivait cette alternative de retards et de progrès avec une sollicitude paternelle : « Il me semble, disait-il de l’humble convertie, que, sans qu’elle fasse aucun mouvement, ses affaires avancent.
Fontenelle nous dit que, dès ce temps-là, elle se dérobait souvent aux plaisirs de son âge, pour aller lire en son particulier, et qu’elle s’accoutuma de son propre mouvement à faire de petits extraits de ce qui la frappait le plus. […] Il faut par de grands objets donner un grand ébranlement à l’âme, sans quoi elle ne se mettrait point en mouvement… Rien ne convient moins à un jeune homme qu’une certaine modestie, qui lui fait croire qu’il n’est pas capable de grandes choses.
s’écrie-t-il en parlant des entretiens de d’Alembert et de Mairan, quelles âmes que celles qui ne sont inquiètes que des mouvements de l’écliptique (d’Alembert), ou que des mœurs et des arts des Chinois (Mairan) ! […] Marmontel, dans les livres suivants, continue d’exposer les faits avec lucidité et de peindre les personnages politiques avec intelligence et mouvement ; mais ce n’est plus le père qui parle à ses enfants, c’est l’historiographe de France qui remplit sa charge et ses derniers devoirs envers Louis XVI.
Le sentiment qui anime les derniers chapitres, et qui fait que cet homme au cœur trop desséché par l’air des salons se relève et surnage, par l’intelligence, du milieu de la catastrophe universelle, me rappelle quelque chose du mouvement d’un naufragé qui s’attache au mât du navire, et qui tend les bras vers le rivage. […] Mais aussi ce qui honore en Rivarol l’intelligence et l’homme, c’est qu’il s’élève du milieu de tout cela comme un cri de la civilisation perdue, l’angoisse d’un puissant et noble esprit qui croit sentir échapper toute la conquête sociale : « Malgré tous les efforts d’un siècle philosophique, dit-il, les empires les plus civilisés seront toujours aussi près de la barbarie que le fer le plus poli l’est de la rouille ; les nations comme les métaux n’ont de brillant que les surfaces. » Il y a des moments où, porté par le mouvement de son sujet et par l’impulsion de la pensée sociale, il va si haut, qu’on se demande si c’est bien Rivarol qui écrit, le Rivarol né voluptueux avant tout et délicat, et si ce n’est pas plutôt franchement un homme de l’école religieuse : Le vice radical de la philosophie, c’est de ne pouvoir parler au cœur.