On ne saurait imaginer pour un enfant de génie un berceau plus heureux que celui d’Alfred de Musset. […] s’imaginent-ils que je me suis confessé à l’abbé Delille ou que j’ai été frappé de la grâce en lisant Laharpe ? […] Ils imaginèrent les déviations de sentiment les plus bizarres, et leur intérieur fut le théâtre de scènes qui égalaient en étrangeté les fantaisies les plus audacieuses de la littérature contemporaine. […] Qu’on ne s’imagine pas que ses œuvres dramatiques auraient été à peu près les mêmes, s’il avait eu l’espoir de les voir jouer. […] Elle se charge aussi, toute jeune fille qu’elle soit, de corriger les jeunes fats qui s’imaginent connaître les femmes parce qu’ils ont eu des succès dans les coulisses et dans les fêtes de bienfaisance internationales.
Tel homme s’immole à la gloire, qu’il se peint comme un être vivant dans la postérité : l’instant où, cessant de l’imaginer, il en reconnaît le prestige, est la dernière ligne de son histoire. […] En les envisageant, on s’imagina qu’ils apparaissaient eux-mêmes ; en les mesurant, leur grandeur fit apercevoir qu’ils étaient l’ouvrage de son esprit sublime. […] Mais alors il est maître d’en imaginer les circonstances et d’y supposer tout ce qu’on en peut ignorer. […] La durée même du temps que l’auditeur s’imagine être écoulé durant la représentation ajoute en son esprit à la longueur des supplices du héros. […] Vous croyez qu’il est facile de s’imaginer qu’un mois entier s’est écoulé comme un seul jour dans l’intervalle des actes.
« Imaginez, madame, que je fais aussi des feuilles politiques ou des pamphlets à l’anglaise ; les vôtres par leur brièveté m’encouragent. […] Je n’imaginais pas quelle monstrueuse lacune l’omission de deux courriers faisait à deux cent cinquante lieues l’un de l’autre. […] J’ai un grand plaisir à vous dire : Je vous aime, mais j’ai encore plus de peine à imaginer que vous en doutez. […] » Et faisant allusion à ce qu’elle avait pu espérer d’être un moment pour lui, elle disait encore : « On ne veut pas seulement que quelqu’un s’imagine qu’il pouvait être aimé et heureux, nécessaire et suffisant à un seul de ses semblables. […] La dernière lettre de lui à elle que nous ayons sous les yeux est du 26 mars 1796, à la veille de son départ pour la France dont il va devenir décidément citoyen ; elle se termine par ces mots et comme par ce cri : « Adieu, vous qui avez embelli huit ans de ma vie, vous que je ne puis, malgré une triste expérience, imaginer contrainte et dissimulante, vous que je sais apprécier mieux que personne ne vous appréciera jamais.
Le deuxième volume renferme un chapitre aux Infortunés, dans lequel, à travers les conseils et les règles de conduite que l’auteur essaye de déduire, on lit toute l’histoire de sa vie d’émigration et de sa noble pauvreté : « Je m’imagine, s’écrie-t-il, que les malheureux qui lisent ce chapitre le parcourent avec cette avidité inquiète que j’ai souvent portée moi-même dans la lecture des moralistes, à l’article des misères humaines, croyant y trouver quelque soulagement. Je m’imagine encore que, trompés comme moi, ils me disent : « Vous ne nous apprenez rien ; vous ne nous donnez aucun moyen d’adoucir nos peines ; au contraire, vous prouvez trop qu’il n’en existe point. » — Ô mes compagnons d’infortune !
Hugo a tout d’abord tendu la main à ce haut et grave vieillard ; c’est ainsi qu’il les aime, qu’il les peint et qu’il les rêve : don Ruy Gomès de Sylva, dans Hernani, n’est pas d’une autre souche ; et lui-même, poëte, il m’a fait souvent l’effet de représenter cette sorte de type inflexible, transporté, dépaysé dans la littérature et dans l’art de nos jours : de là en partie, j’imagine, ce qu’il y a de faussé dans sa puissance. […] Nous n’imaginons pas que personne mette en doute que partout et dans tous les temps il ne vive et ne meure loin de tout éclat une multitude d’hommes supérieurs à ceux qui jouent un rôle sur la scène du monde, etc. » Peut-être il n’a manqué à Mirabeau lui-même qu’un peu plus de vertu, de discipline, et un cœur moins relâché, pour rester et vivre inconnu ou du moins médiocrement connu, et simplement notable à la manière de ses pères.
Malouet lui-même se figure mal le Parlement anglais, et plusieurs, sur l’étiquette, l’imaginent d’après le Parlement de France Quant au mécanisme des constitutions libres ou aux conditions de la liberté effective, cela est trop compliqué. […] j’ai vu l’énorme tête d’un lion, gueule béante, et vomissant des chaînes dont il menace les passants ; peut-on imaginer un emblème plus effrayant de despotisme et de servitude ?
On imagina, pour couper le succès d’Iphigénie, d’y opposer une contre-lphigénie, fabriquée en hâte par Leclerc et Coras. […] Et, pour doubler l’audace de la peinture, imaginez que ce prophète découvre les crimes futurs de Joas, et risque de rendre odieux le personnage sympathique : faute insigne pour un dramaturge adroit, trait admirable de vérité profonde et de large poésie, qui jette soudainement une vive lumière sur la sinistre histoire de Juda, et sur le triste, le pauvre fond de notre humanité.
Caractère et esprit : orgueil, rêve, ennui ; médiocrité des idées : puissance d’imaginer et de sentir. — 3. […] C’est la formule même de son tempérament que fournit Chateaubriand dans cette étonnante lettre de René à Céluta, qui, du point de vue objectif, est bien de la plus extravagante inconvenance : imaginez une jeune sauvage, puérile et tendre, écoutant ces confidences : « Depuis le commencement de ma vie, je n’ai cessé de nourrir des chagrins : j’en portais le germe en moi, comme l’arbre porte le germe de son fruit.
L’idée était fort heureuse d’imaginer une réunion des principaux personnages des états, et de leur faire tenir des discours où ils se trahissent eux-mêmes, et dévoilent leurs motifs intéressés et ceux de leurs amis. […] Les mêmes hommes qui ne croyaient pas qu’un poète pût être supérieur à Ronsard, imaginaient un prosateur plus parfait que Montaigne.
Pour les grands auteurs dramatiques, on n’est pas d’aussi bonne composition ; on ne se rend pas après Corneille, Racine, Molière ; on a imaginé des théories qui permettent de faire mieux, ou tout au moins de tenter autre chose. […] La Fontaine devait imaginer un mètre particulier pour ses fables.
La plupart, interprétant mal l’étymologie de son nom, s’imaginent qu’il ne travaille que sur les mots (quoi, dit-on, de plus frivole ?) […] Il s’imagine que l’humanité a bien réellement traversé les trois états du fétichisme, du polythéisme, du monothéisme, que les premiers hommes furent cannibales, comme les sauvages, etc.
Qu’on ne s’imagine pas que nous voulions faire entendre par-là, que sa Prose soit mauvaise ou inférieure à sa Poésie : ce seroit être absurde, que de méconnoître dans le Prosateur les mêmes qualités qui brillent dans le Poëte. […] Pour s’épargner la peine d’imaginer, il a puisé chez les Etrangers des sujets & des plans, qu’il a habillés ensuite à sa mode ; Zadig, Memnon, le Monde comme il va, sont presque entiérement tirés de l’Anglois : mais, il faut l’avouer, la maniere dont il s’est approprié ces sujets, dont il les a enluminés ; mais les réflexions ingénieuses & pleines de sens dont il les a enrichis ; mais les traits sins & agréables dont il les a assaisonnés, l’en rendent comme le Créateur.
On n’imaginerait pas autrement le masque même de sa Muse. […] La statuaire grecque, par ses simplifications idéales, fait imaginer la guerre héroïque presque nue : pour tout costume et toute arme, elle lui donne un casque et une lance.
Cependant si le cas de roitelet était unique ou rare ; si l’on ne trouvait dans les langues européennes que trois ou quatre exemples de cette sorte, on pourrait imaginer une chanson, un conte, une de ces traditions populaires qui traversent les siècles, les montagnes, et les océans ; mais, au contraire, à la moindre recherche les exemples se multiplient et l’on est forcé de ramener la plupart des causes à une seule, la nécessité psychologique. […] La même idée, ou celle de douceur, s’imaginerait dans le grec [mot en caractères grecs], la blanche, la douce 168, et ce serait encore la douce dans le latin mustela.
Rien de ce qui est passionné ne peut lui convenir, et dès que l’on imagine de lui faire jouer un rôle et prendre un parti dans la pièce même, on le dénature, et son effet est manqué. […] Quoi de plus simple que d’imaginer que cet effort de la nature pour pénétrer en nous n’est pas sans une mystérieuse signification ?
Il n’y a rien qui gâte l’homme comme ces deux choses, la première parce qu’on en a toujours un souvenir un peu irrité ; la seconde, parce que quand on ne retrouve plus la même vogue, le même succès, le même enivrement de la gloire naissante, on s’imagine — ou on peut s’imaginer — pour cela, que l’on a des ennemis, que l’on a des envieux, et la manie de la persécution finit par s’installer en vous Mais il est bien certain que, ces différences étant établies, il y a dans La Fontaine un Rousseau qui ne pouvait pas aller jusqu’au bout des conséquences désastreuses que le caractère de Rousseau comportait.
Capefigue avait cru repétrir la statuette, j’imagine, pour le seul plaisir d’y toucher. […] Capefigue n’a imaginé rien de mieux que de rappeler Mme de Maintenon et son influence sur un roi vieux et ennuyé, et les calomnies dont elle aussi fut abreuvée, et l’obscurité de sa jeunesse, quand elle était Mme d’Aubigné ou Mme Scarron, et que de chercher dans tout cela des analogies !
Pour en empêcher la consommation menaçante, Feuillet imagine à la Trublet une amie, — invention touchante qui a tant touché qu’elle ne touche plus, — laquelle intervient fougueusement dans cet adultère en fermentation et en demi-bouteille, et, se posant comme la Sabine entre le Sabin et le Romain, étend les bras, et d’une main chasse à Londres le mari furieux, mais docile, pour faire pendant qu’il y sera la cure de sa femme, et de l’autre main elle amène son frère pour aide-médecin dans la cure qu’elle a entreprise. […] L’amour même n’est souvent que de la pitié en elles, et nous, les orgueilleux qui savons de quelles rares facultés doit se composer une femme vraiment organisée pour l’amour, nous n’avons pas de sujet d’être bien fiers de celui que nous imaginons leur inspirer.
Cette phosphorescence, s’éclairant pour ainsi dire elle-même, crée de singulières illusions d’optique intérieure ; c’est ainsi que la conscience s’imagine modifier, diriger, produire les mouvements dont elle n’est que le résultat ; en cela consiste la croyance à une volonté libre. […] C’est quelque chose comme l’art du musicien ; mais ne croyez pas que la musique dont il s’agit ici s’adresse simplement à l’oreille, comme on se l’imagine d’ordinaire.
« Ainsi, dit M. de Tocqueville, cette théorie (la nécessité de partager l’action législative en plusieurs Corps) à peu près ignorée des républiques antiques, introduite dans le monde presque au hasard, ainsi que la plupart des grandes vérités, méconnue de plusieurs peuples modernes, est enfin passée comme un axiome dans la science politique de nos jours. » Il y a loin de cette prudente et saine façon de raisonner à tout ce qu’imaginent encore les uns sur les vertus inhérentes à une Chambre aristocratique et de grande propriété qu’ils voudraient reconstituer artificiellement, et à tout ce que déduisent les autres d’extrêmement logique sur l’unité simple d’une Chambre ou Convention souveraine qu’aucun pouvoir collatéral ne contrôlerait.
Sinon, on l’imagine tel qu’il a dû être, tel que les témoins l’ont ressenti, Rappelez-vous comment Mme de Sévigné raconte à sa fille la mort de Turenne.
On met l’intelligence partout, et l’on s’imagine qu’elle suffit à tout.
On y voit même des spectres, et Voltaire croit avoir fait du Shakespeare ou de l’Eschyle pour avoir imaginé ces piteuses apparitions d’Eriphyle et de Sémiramis, si acerbement et si justement critiquées par Lessing.
On ne saurait s’imaginer quelle somme de difficultés vaincues il y a dans cette pièce.
Schwob analyse : « Quand nous saisissons des choses leurs rapports de position, nous les classons suivant la cause et l’effet ; quand nous les envisageons suivant leurs relations de ressemblance et de grandeur, nous les classons suivant les idées logiques de notre esprit… on peut imaginer que les choses ont entre elles d’autres rapports que le rapport scientifique et le rapport logique. » Mais on peut même dire qu’elles n’ont ni l’un ni l’autre de ces deux rapports qui sont tous deux des façons subjectives de représentation d’un inconnu.
On imagine sans peine que pour Jésus, à l’heure où nous sommes arrivés, tout ce qui n’était pas le royaume de Dieu avait absolument disparu.
Il semble assez simple d’imaginer que cette femme mal mise , qui ressemblait à un fantôme, qui attendait madame de Montausier dans un passage obscur , pour lui faire des reproches sanglants sur madame de Montespan , n’était autre que Montespan lui-même, pressé du besoin de se venger, par un nouvel outrage sur la dame d’honneur, qu’il avait accusée hautement chez elle-même de son malheur.
La princesse Parthénie madame de Sablé) avait le goût aussi délicat que l’esprit ; rien n’égalait la magnificence des festins qu’elle faisait : tous les mets en étaient exquis, et sa propreté a été au-delà de tout ce qu’on peut imaginer.
L’animal qui sent la dent de son ennemi n’a besoin d’aucune subtilité métaphysique pour imaginer un autre animal mordant.
Il faudrait imaginer deux sensibilités identiques pour que le même mot suscitât exactement la même image, et c’est à peine si deux instants successifs de la sensibilité d’un même homme parviendraient à réaliser cette identité.
Telle était cette Sophie Swetchine qui, dans la hiérarchie des Saints, embrassant comme on le sait, toutes les fonctions et tous les états de la terre, pourrait être, à ce qu’il semble, la patronne des femmes du monde, lesquelles, j’imagine, n’en ont pas eu beaucoup jusqu’ici… C’était l’amabilité, la bonté, la raison pratique, faites saintes et revêtues du calme du ciel… Moraliste chrétienne de bonne humeur, quand les moralistes, même chrétiens, sont plus ou moins moroses, elle introduisit la gaieté dans la foi, qui ne s’y voit guère, et c’est elle qui a pu écrire, en se rappelant son pays : « Je suis avec le bon Dieu comme les femmes russes sont avec leurs maris.
Edmond et Jules de Goncourt se sont imaginé pouvoir arrêter facilement, comme une bague qui roule et qu’on rattrape, le kaléidoscope d’une société dont ils avaient à nous démontrer le mécanisme après nous en avoir fait jouer les couleurs, ce kaléidoscope-tourbillon — comme dirait Carlyle — que le Temps tourne incessamment dans ses vieilles mains infatigables, à la lumière électrique de chaque événement !
Depuis qu’il y a des partis, ils se sont toujours comptés avant la patrie, et voilà pourquoi ce qu’il faut contre eux, c’est un genre de gouvernement qui ne s’imagine pas se les concilier, mais qui les dompte ; et le gouvernement parlementaire, qui traite avec eux, qui leur fait même une place au soleil de ses institutions, leur donne une importance qu’ils ne manquent jamais de retourner contre lui.
Je puis trouver plus ou moins drôle… ou triste — et le garder pour moi — qu’un esprit, qui paraissait en bonne santé, en soit venu à ce point d’agacement et de révolte contre la réalité qu’il s’imagine que chaque semaine de ce temps, si peu exigeant et si tranquille !
Ce rêveur de Ballanche, qui avait tout à la fois du Platon et du Jocrisse dans sa personne, s’imaginait (écrit-il encore dans la même Préface) qu’il y avait de son temps, dans la Belle France, dix mille fois les dix justes qu’il fallait pour sauver Sodome.
Les honneurs et la gloire ne peuvent pas grand-chose, j’imagine, sur ce casanier de l’érudition qui, depuis qu’il n’est plus curé, s’est cloîtré dans la science, et qui doit joindre l’insouciante bonhomie du savant à l’indifférence du saint pour les choses du siècle.
Je m’imaginais qu’il fondrait comme un flocon de neige.
De tous les gouvernements qui peuvent immensément par eux-mêmes et qui s’imaginent, malgré l’expérience, jeter la civilisation à tous les rivages avec les ancres de leurs vaisseaux, le gouvernement d’Angleterre est assurément le plus intelligent, le plus profond, le plus habile.
On ne sait véritablement pas trop par quel éblouissement de jansénisme attardé l’auteur de l’Énigme d’Alceste, que j’imagine assez indifférent à la question théologique du jansénisme, arrive à cette glorification du jansénisme comme réformateur de la France et à la conclusion qu’Alceste est un janséniste, au lieu d’être seulement et simplement un homme et un misanthrope… Ce qui fait croire à du Boulan que ce n’est pas un misanthrope comme le Misanthrope et l’Auvergnat, qui fait tant rire, c’est qu’il est trop grave, trop vertueux et trop indigné pour être comique, et il est vrai qu’un janséniste ne le serait pas.
Ils peuvent en rire dans leur barbe, Vacquerie et Hugo, mais je m’imagine que c’est Hugo qui rit le moins des deux… Vacquerie, lui, est flatté… il est très flatté de couvrir si bien Hugo qu’on prenne, sans se faire prier, Hugo pour Vacquerie ; mais Hugo, malgré son affection patriarcale pour Vacquerie, est probablement moins flatté d’avoir été si facilement et si complètement Vacquerie que cela !
Il est le misanthrope de la vie coupable, et souvent on s’imagine, en le lisant, que si Timon d’Athènes avait eu le génie d’Archiloque, il aurait pu écrire ainsi sur la nature humaine et l’insulter en la racontant !
Tel, je le crois et je me l’imagine, M.
Ils n’étaient pas très vieux, bien qu’ils eussent vu tant de choses, mais on imagine partout des vieillards lorsqu’on a dix-sept ans. […] — tu t’imagines que tu es réelle ? […] Et vraiment l’on prend en pitié alors, si malheureux qu’on soit, tous ceux qui s’imaginent être heureux. […] Le titre : Parnasse contemporain, recueil de vers nouveaux, fut imaginé alors. […] Quiconque imagine, crée !
Pour animer un peu ce beau visage qui semblait s’aplatir et se déteindre, il imagina de faire venir ses enfants. […] J’imagine qu’il aurait eu à dire des choses plus grandes que dans l’Oraison funèbre de Madame Henriette. […] Une pareille contradiction de tous les systèmes de physiognomonie ne s’imagine pas. […] Imaginez-vous une chose plus atroce que celle-ci ? […] Je ne crois pas, d’ailleurs, qu’on puisse imaginer une plus monstrueuse disproportion de l’auteur à son interprète.
C’est une certaine sensualité, qui ne se développe en Europe qu’avec une mauvaise conscience, et à laquelle l’Orient, imagine-t-on, donne un cadre, une nourriture, une philosophie. […] Tels récits qui semblent authentiques et vécus, comme le vol dont il est victime à Laghouat, sont imaginés par lui sur le noyau réel d’une vieille histoire qui lui est arrivée plusieurs années auparavant. […] Depuis le jour où Greuze imagina la peinture sentimentale. » Or, c’est exactement le contraire dans l’art hollandais, aussi bien que dans la peinture d’aujourd’hui, qui a donné, à ce point de vue, satisfaction posthume à Fromentin. […] De là cette figure de sa sœur Julie, imaginée par Fromentin ; Julie se consume d’amour pour leur cousin Olivier, en meurt sous l’indifférence cruelle du jeune homme. […] J’imaginerais seulement de lui un second volume sur la peinture espagnole, qui eût été admirable.
Il s’imagine avoir un polype au cœur et va consulter à Montpellier. […] Ils imaginèrent de dire que c’était conscience d’obliger cette vieille femme à passer l’hiver dans un isolement complet, loin de tout secours. […] Pour l’hiver, Rousseau imagine d’autres divertissements. […] Impossible d’en imaginer une seule… Bouvard et Pécuchet firent lire à leurs élèves des historiettes tendant à inspirer l’amour de la vertu. […] Rousseau juge indispensable que ce bon prêtre ait commis autrefois une faute contre les mœurs : car Rousseau ne peut imaginer un personnage sympathique qui n’ait, comme lui, quelque souillure.
Il n’est pas extraordinaire que deux sémites se soient imaginé que la langue primitive était une langue sémitique, comme après tout l’enseigne la théologie chrétienne. […] On ne saurait imaginer ce qu’elle a coûté à son auteur de temps, d’observation, d’intelligence et de raison. […] Et comment s’imaginer qu’il cherchait son intérêt en se faisant des ennemis dans tous les camps ? […] Pour le coup, je n’en revenais pas je faisais les plus folles hypothèses pour imaginer comment une femme ressemble à un pistolet. […] Plus tard, quand on s’imagina connaître l’Orient, ce fut pis encore.
Si l’on déclare en termes généraux que « la vie est mauvaise », ils s’imaginent qu’il n’y a d’autre issue du pessimisme que la « destruction de la vie ». […] Si les romans de Mlle de Scudéri sortent du bon caractère et de la vérité, ce n’est pas avec les visions cornues de ce fiacre de Scarron qu’il faut s’imaginer que l’on y rentre. […] Il a bien fait ; et je n’imagine pas que personne soit tenté de le lui reprocher. […] Pourquoi ne pas dire, en effet, tout uniment, que l’opinion commune, plus juste, mieux fondée qu’on ne se plaît à l’imaginer, loue dans Marivaux ce qu’il y a de louable, y blâme ce qu’il y a de blâmable, et qu’il n’y a pas d’autre mystère aux vicissitudes que sa réputation a subies depuis plus d’un siècle ? […] Imaginez la recommandation que ce serait aujourd’hui même, pour un roman étranger, que de paraître traduit en français par l’auteur du Nabab ou de la Joie de vivre !
Nous imaginons des faits qui apparaîtraient et disparaîtraient capricieusement. […] En réalité, nous avons substitué du vouloir au mécanisme de la nature ; nous avons remplacé l’« ordre automatique » par une multitude de volontés élémentaires, autant que nous imaginons d’apparitions et de disparitions de phénomènes. […] Mais si je remarque que l’état de choses impliqué par la contingence d’un ordre déterminé est simplement la présence de l’ordre contraire, si, par là même, je pose deux espèces d’ordre inverses l’une de l’autre, je m’aperçois qu’entre les deux ordres on ne saurait imaginer de degrés intermédiaires, et qu’on ne saurait davantage descendre de ces deux ordres vers l’« incohérent ». […] Imaginons donc un récipient plein de vapeur a une haute tension, et, çà et là, dans les parois du vase, une fissure par où la vapeur s’échappe en jet. […] On conçoit (quoiqu’on n’arrive guère à l’imaginer) que de l’énergie puisse être mise en réserve et ensuite dépensée sur des lignes variables courant à travers une matière non encore solidifiée.
On n’imagine pas M. […] qu’on imagine l’âme des hommes des cavernes. […] Nous l’imaginons sur quelques vagues indices. […] C’est peut-être aussi par envie d’imaginer un objet qui ressemblât à une rame. […] Cependant, il ne faut pas s’imaginer que M.
Charles-Louis Philippe s’était d’abord imaginé d’être polytechnicien. […] Il n’eut qu’à rédiger les résultats qu’il avait, pendant son insomnie, imaginés : cela ne lui demanda que quelques heures. […] Ce jour-là, imaginons qu’en l’honneur de quelque anniversaire royal ou bien pour quelque fête religieuse, les bibliothèques étaient fermées. […] Cette femme ne m’intéresse pas ; vous l’avez imaginée à grand peine. […] Tu imagines, très loin, de telles choses qu’à seulement y penser, en chimère, le temps te dure ?