Cet homme, qui était suprêmement un artiste par l’enthousiasme et par l’expression, eut toujours la rage d’être philosophe. […] Il s’y obstina, il s’y acharna, il s’y exaspéra, il s’y échevela, il s’y ensangmêla, — comme dit une expression magnifique du pays où j’écris ce chapitre, — et il y ruina un esprit superbe. […] La Correspondance de Diderot, dans laquelle on chercherait vainement l’inconnue que le génie n’arrache pas toujours de son âme, répète seulement les notions données par ses livres ; mais elle les répète en les abaissant dans l’expression familière et les détails du tous-les-jours, et elle les frappe de vulgarité. […] Et ici plus de bourgeois comme en ses livres, où Diderot s’efforce de grandir le bourgeois dans l’emphase de son expression, et où il le retrouve quand il cherche à lui échapper. […] Vœux atroces, — pudeur, préjugé, — inceste, chose indifférente, — déisme et matière organisée d’elle-même, — ce sont les propres expressions de Villemain, qui n’est pas catholique comme moi.
Elle en est l’expression directe. — C’est ici le cœur même de notre sujet : la Physiologie appliquée à la Critique. […] Des cheveux blonds, une peau pâle-clair, des yeux sans expression. […] Expression naïve et très juste, trouvaille de la langue populaire. […] Sa musique est profondément humaine : elle donne une expression et un soulagement à toutes les douleurs ; elle redouble toutes les joies ; elle exalte l’amour et donne l’héroïsme. […] Lui seul possède cette concentration de ligne et d’expression, unie au sentiment de la grâce, à la puissance de l’idéalité.
Il faut accepter l’influence des oeuvres au même degré que l’influence de la vie, dont elles sont l’expression ; il ne faut ni la fuir, ni la chercher volontairement. […] Quoi de plus banal, maintenant, que les expressions formées du mot envelopper ? […] Ailleurs, je tombe sur une expression que je reconnais : cou délicat ; elle est jolie : Flaubert l’a déjà prise à André Chénier. […] Œuvre, en leur forme dernière, d’une caste de prêtres qui étaient aussi des grammairiens, les Védas sont une expression toute symboliste de la poésie. […] Elle est même bien plus grande qu’il ne le croit, car ce besoin obscur d’uniformité n’est que l’expression brutale d’une tendance universelle.
Molière détestait les Précieuses ; lui-même n’était pas raffiné dans son style ; toutes les grossièretés imaginables d’expression, vous pouvez les ramasser dans ses comédies ; il met, toutes les fois qu’il le peut, l’expression crue et brutale : eh bien, il veut peindre un jour les Précieuses : voyez comme il attrape leur jargon ! […] Même justesse dans le choix des expressions destinées à exprimer une condition ou un caractère. […] Goethe a créé un mot, une expression de génie que tout le monde connaît : l’éternel féminin. […] Goethe, en créant cette expression, qui est à la fois chez lui une expression poétique et scientifique, a voulu signifier que la nature, en créant des sexes, a fait de la différence des sexes une différence aussi profonde, en quelques points, que le peut être la différence des espèces. […] Personne, quand il le fallait, n’a eu, autant que lui, de mesure dans l’expression d’un caractère et d’élévation dans les sentiments et les pensées !
M. de Laprade excelle à saisir l’insaisissable, à renfermer dans des vers d’une grande beauté plastique des idées qui semblent ne pas donner prise à l’expression. […] Le jugement de Béranger sur le 18 Brumaire n’est que l’expression raisonnée de cet instinct. […] employer cette forme artificielle à l’expression des plus hautes idées, quelle fantaisie regrettable ! […] Nous n’avons qu’à généraliser ce titre pour avoir l’expression la plus exacte de son talent. […] Ce sont précisément ces nuances dans l’expression de la passion aristocratique qu’il importe de bien saisir.
Je sais plus de gré à La Rochefoucauld pour cette expression lasse et abandonnée d’un sentiment si naturel, que pour la polissure et la concision éclatantes de ses plus célèbres paradoxes. […] « Aspirer au néant » est une expression vide de sens, puisque nous y sommes précipités sans effort. […] Il peut arriver aussi que la présence ou l’absence d’un certain talent d’expression trompe l’historien littéraire sur l’importance relative des auteurs. […] Essayant de définir « l’agrément, le sel propre à piquer le goût général des hommes », Boileau dit qu’« il consiste à ne jamais présenter au lecteur que des pensées vraies et des expressions justes ». […] Elle avait appris de Boileau lui-même qu’il ne faut jamais présenter au lecteur que « des pensées vraies et des expressions justes ».
Jamais un écrivain n’a su tant de choses si diverses avec une si singulière expression de dédain pour toutes choses. […] L’expression était pleine de pathétique, mais grande comme celle d’un dieu. […] Il la considérait, suivant son expression, comme « quelque chose d’intermédiaire entre Rachel et une panthère sauvage ». […] Les yeux eux-mêmes, sous les grosses lunettes dorées qui les couvraient, avaient une expression douce et presque enfantine. […] Capuana, « un petit homme chauve, rose, un peu obèse, avec une expression pleine de douceur ».
Mais, du moment qu’on rendait chacun de nous à lui-même, ces distinctions s’évanouissaient avec la doctrine dont elles étaient l’expression ; tous les mots devenaient bons qui nous servaient à manifester notre personnalité ; et en littérature comme en politique l’individualisme aboutissait à l’égalité. […] et le don de l’expression leur faisant ordinairement défaut, leurs airs de supériorité nous irritent. […] Si les mots sont plus ambitieux, — depuis que le romantisme en a élevé le diapason, — nous n’avons pourtant pas de peine à reconnaître ici des idées qui furent chères jadis aux plus illustres de nos classiques ; et en effet, pour la simplicité du plan comme pour la force de l’expression, il n’y a pas de roman plus « classique » que Madame Bovary. […] Jeanne la Rousse] dans l’expression des sentiments forts ; — et surtout d’élévation. — Il a aussi manqué de générosité ; — et bien loin qu’il ait élevé la Chanson jusqu’à la hauteur de l’Ode ; — c’est au contraire le triomphe de l’Ode ; — et généralement du lyrisme romantique ; — qui nous a ouvert les yeux sur le « prosaïsme » des Chansons de Béranger. […] Le Manchy, Qaïn, L’Illusion suprême] ; — mais à son parti pris de ne prêter son vers qu’à l’expression des misères de l’humanité ; — non des misères de l’individu ; — et aussi peut-être à sa conception du style.
— De là au fait d’exagérer sa sensation, même de la créer artificiellement, pour en modeler l’expression sur l’exemple d’un maître, il n’y a qu’un pas, et c’est l’instinct d’imitation qui le lui fait franchir. […] On se rappelle les confidences de Mme de Commanville, la nièce de Gustave Flaubert, lequel contribua à sa première éducation : on ne peut soutenir que cette fille adoptive d’un illustre écrivain possédât le moindre don d’expression verbale. […] Affaissement de l’être moral, prédominance de l’instinct, pourrait-on ajouter, car la servitude amoureuse à ce degré ne se différencie guère du pur instinct animal que par les nuances d’expression qu’y surajoute le conteur. […] Plus tard en effet, dans la réalisation définitive, la beauté du tableau sera faite, non seulement de l’expression de chacune, mais aussi de l’harmonie des rapports qui les unissent entre elles. […] Elles obéissent simplement aux exigences spontanées de l’être : utiliser la faculté d’expression que la Nature mit en elles.
Du visage un peu lourd, aux traits réguliers, la singularité était l’arc surélevé des sourcils qui lui donnait une expression comme étonnée. […] Toute la figure offrait une expression de bonté et de rêverie, de douceur et de tristesse. […] Cette mystérieuse figure, sur laquelle se lisait une expression d’orgueil désespéré, était la célèbre comtesse de Castiglione. […] Le russe, l’anglais, l’allemand lui étaient familiers et le français était pour lui un moyen d’expression dont il savait user avec aisance, mais sans en faire un emploi original. […] Parfois, il revint aux cadences traditionnelles, mais toujours le vers, entre ses mains, est un instrument d’expression forte et juste.
Croirait-on que, dans sa rapide réminiscence, il a fait de la belle similitude ces trois vers sans expression et d’une élégance commune : Ut solet a ventis alimenta adsumere, quæque Parva sub inducta latuit scintilla favilla, Crescere, et in veteres agitata resurgere vires : Sic jam lentus amor, etc., etc…103 ! […] Mais en général on a recouvert l’antique mal, lorsqu’il se présente, d’expressions plus vagues et plus flatteuses, en même temps que, dans une foule de cas de simple galanterie, on a détourné par abus les expressions physiques de leur sens propre : on s’est mis à brûler et à mourir par métaphore. […] Ce discours, tout positif et de prescription technique, a pour avantage, en allant d’abord au principal de son inquiétude, de la sauver encore elle-même des restes d’embarras qu’elle éprouve, de lui donner le temps de se remettre et de suspendre par un dernier détour l’expression directe de ses sentiments ; ils éclatent pourtant dans ce peu de mots qui terminent les conseils : « Tu pourras de cette sorte emporter la toison en Grèce, — bien loin de Colchos114 ; après cela, pars, va où le cœur t’appelle, où tu es si empressé de retourner. » Tout ce qui suit est d’une gradation charmante : « Ainsi donc parla-t-elle ; et en silence, ses regards tombant devant ses pieds, elle baignait sa joue divine de tièdes larmes, s’affligeant de ce qu’il allait errer si loin d’elle à travers les mers ; et de nouveau elle lui adressa en face ces paroles pleines d’amertume, en lui prenant la main droite, car déjà la pudeur désertait de ses yeux : « Souviens-toi, si jamais tu es de retour dans ta patrie, souviens-toi du nom de Médée, comme moi-même je me souviendrai de toi, si éloigné que tu puisses être. […] Mot à mot : laissant là mon cœur de chien. — Homère met la même expression dans la bouche d’Hélène. […] Il y a dans l’Anthologie une épigramme de Rufin que voici au naturel : « Quand même il ne viendrait pu’au bord des lèvres, le baiser d’Europe est doux ; il est doux, quand même il ne ferait qu’effleurer la bouche ; mais il ne touche pas seulement du bout des lèvres : quand elle appuie la bouche, elle enlève l’âme jusque des ongles. » On retrouverait la même expression dans d’autres épigrammes, notamment d’Asclépiade. — Comme correctif au baiser si accentué de Rufin, j’ai bien envie de glisser un baiser moderne, plus délicat, pétrarquesque, et qui a pourtant aussi son aiguillon, sa saveur pénétrante !
Ce fut, encore, Sébastien Bach, un psychologue aussi, curieux de l’expression, mais enfermant les émotions qu’il traduit sous les rigoureuses lignes d’un contre-point fixe, tout rationnel. […] Et dans ce monde, était contenu aussi le doute de l’homme Beethoven, et c’est pour cela qu’il nous l’exprime immédiatement, — non comme l’objet d’une réflexion, — lorsqu’il apporte devant nous l’expression du monde entier. […] Rien n’est comparable à la ferveur pieuse avec laquelle chaque voix nouvellement arrivante redit ce motif premier, de la plus pure innocence, jusque ce que toutes les nuances et toutes les splendeurs de l’expression se fondent en elle, comme le Monde des Vivants autour d’un dogme, — enfin révélé — de pur Amour. […] Réelle et vivante est la chambre, réels, vivants, ces hommes, sans qu’un trait de leurs visages ait été modifié ; et, cependant, telle est la psychologique vision du Maître, que tous ces hommes, diversement, avec d’inégales expressions, témoignent l’émotion intime que leur a donnée, à tous, l’extraordinaire musique entendue. […] C’est là l’expression d’une utopie artistique et les fondements d’une véritable religion de l’art.
Sully-Prudhomme est incomparable dans les pièces courtes, exquises par contre, et, si l’expression d’une pensée fait leur mesure, la pensée n’y est pas d’une délicatesse moins rare que la forme qui l’enchâsse ; parfois même sa subtilité devient telle qu’elle en arrive à n’être sensible qu’à la façon d’un souffle, et visible seulement comme le « fard léger » de l’« aile fraîche des papillons blancs » auquel le poète se plaît à comparer ses vers. […] … « La forme qui touche », voilà ce que le vrai poète, le poète créateur, doit trouver lui aussi et ce qu’a trouvé bien des fois Sully-Prudhomme ; si « la petite ligne de la bouche fait les grands amours », c’est qu’elle est l’expression spontanée de l’âme, sans étude et sans effort ; telle est aussi la poésie où la pensée même ne fait que se prolonger et se rendre visible dans les lignes et les formes des vers : elle seule fait les grands amours. […] L’aspiration vers le familier, le « plébéien », suivant son expression, est tempérée aussitôt par la correction mondaine, parisienne. […] C’est, dit le philosophe anglais, un bien, à mon sens, pour la doctrine chrétienne, que le pessimisme ait mûri assez pour trouver son expression complète et définitive ; car il l’a trouvée chez l’auteur des Blasphèmes. […] » La vertu, comme la raison, l’idéal, etc., fait partie des monstres auxquelle nouvel Hercule va faire la chasse. « Somme toute, je suis allé loin plus qu’on ne le fit jamais sans la franche expression de l’hypothèse matérialiste. » Franche, sincère, est-ce bien certain ?
Tout y est du sujet, et le sujet sublime de soi n’y est du tout point ravalé par les expressions fort latines, et par les nombres fort soutenus et fort arrondis. […] L’expression de mitis y revient souvent et nous donne la note de cet esprit doux par excellence, et qui sut l’être sans fadeur. […] L’abbé Ducreux, éditeur des Œuvres complètes de Fléchier (1682), l’a publié en entier pour la première fois : seulement il avoue qu’il a cru devoir en quelques endroits substituer quelques termes à ceux de l’original : « non qu’ils aient rien de messéant, dit-il, mais nous avons pensé que cette attention était due aux personnes d’une imagination qui se blesse aisément, et qui découvre, sous les expressions les plus innocentes, des sens détournés et peu modestes dont ne se doutaient pas ceux qui les ont employés ». […] On voit de l’autre les montagnes d’Auvergne fort proches, qui bornent la vue si agréablement, que les yeux ne voudraient point aller plus loin, car elles sont revêtues d’un vert mêlé qui fait un fort bel effet, et d’ailleurs d’une grande fertilité… Fléchier en chaque occasion aura de ces descriptions de la nature, descriptions un peu maniérées et qui empruntent volontiers aux choses des salons, au cristal, à l’émeraude, à l’émail, leurs termes de comparaison et leurs images : toutefois, sous l’expression artificielle, on retrouve un certain goût et un sentiment fleuri de la nature. […] Il caresse volontiers son idée jusqu’au bout et concerte son expression ; il pousse et redouble à plaisir son antithèse.
Les plus sérieux se rencontrent ainsi, en quelque façon, avec les plus frivoles, avec les affranchis du chauvinisme du linge ou des bottes, avec ceux qui, suivant une expression désormais symbolique, « se font blanchir à Londres ». […] Deux épisodes, très connus, souvent cités, nous en fournissent, je crois, les deux expressions culminantes. […] la grande pitié qu’il peut y avoir, par tout ce qu’il sous-entend, dans le renoncement à l’expression des pitiés particulières ! […] Mais, d’abord, cet étonnement de vivre, cette sorte d’« horreur sacrée » ne comporte, par sa nature même, qu’une expression assez courte, ou qui ne s’allonge qu’en se répétant. […] Nous avons accueilli leur idéalisme par dégoût ou lassitude du naturalisme ; et il est vrai qu’ils nous ont induits à mettre plus d’exactitude et de sincérité dans l’expression d’idées et de sentiments qui nous furent jadis familiers, à préciser notre romantisme en même temps que notre réalisme s’attendrissait.
Dire donc ce qu’on sait, sans trembler et sans gaucher, est le plus sûr, même dans l’intérêt de cette autorité qui ne doit jamais déchoir ; car si elle a un jour de faiblesse, on montrera par le respect désolé du reproche, par le sentiment de soumission pour la personne qui circulera dans chaque expression du jugement sur sa conduite, que le principe de l’autorité domine toutes les solidarités et y échappe par son essence. […] Il a aussi raconté, dans ses Annales ecclésiastiques, des pontificats de honte et d’ignominie, qu’il appelait d’une expression empruntée aux prophètes : « l’abomination de la désolation dans le temple ». […] Il avait l’immortalité du principe dont il était l’expression. […] Avant le catholicisme, nulle institution politique ou religieuse ne l’avait révélé aux hommes avec cette force d’expression. […] Il semblait, par sa volonté, par sa parole et par sa beauté puissante et majestueuse, être l’expression vivante de la force de son gouvernement.
Nous le voyons dans les proverbes ; ces maximes de la sagesse vulgaire, sont entendues dans le même sens par toutes les nations anciennes et modernes, quoique dans l’expression elles aient suivi la diversité des manières de voir. — Cette langue appartient à la science nouvelle ; guidés par elle, les philologues pourront se faire un vocabulaire intellectuel commun à toutes les langues mortes et vivantes. […] Fable, convenance, pensée, expression, etc. […] Elles sont l’expression des passions et des sentiments, à la différence des pensées philosophiques qui sont le produit de la réflexion et du raisonnement. […] Les feudistes ne trouvent point d’expressions latines plus convenables pour traduire ces derniers mots que clientes et clientelæ. […] Les nations devant vivre pendant une longue suite de siècles encore incapables de connaître la vérité et l’équité naturelle, la Providence permit qu’en attendant elles s’attachassent à la certitude et à l’équité civile qui suit religieusement l’expression de la loi ; de façon qu’elles observassent la loi, même lorsqu’elle devenait dure et rigoureuse dans l’application, pour assurer le maintien de la société humaine.
Ils n’existent que dans le drame moderne ou dans le roman. » Je ne nie pas qu’il n’y ait mainte fois de la charge et du cumul dans l’expression ; mais, pour prendre le meilleur selon moi, le plus habile et le plus raffiné des romans de mœurs de M. […] S’il devient banal de redire que la littérature est l’expression de la société, il n’est pas moins vrai d’ajouter que la société aussi se fait l’expression volontiers et la traduction de la littérature. […] Cet inconvénient perce surtout dans l’introduction historique, et s’y trahit par de certains anachronismes d’expression, comme lorsque, par exemple, l’auteur nous dit qu’à cette époque le clergé français, sauf quelques exceptions, était profondément déconsidéré.
A des études vastes, continues, profondes, à la possession directe des sources supérieures, M ignet n’a cessé de joindre le soin accompli (cultus) de composer et d’écrire ; chaque œuvre de lui se recommande par l’ensemble, par la gravité et l’ordre, comme aussi par l’éclat de l’expression ou par l’empreinte. […] Si M ignet se produisait déjà si nettement dans son premier ouvrage par l’expression formelle de la pensée philosophique qu’il apportait dans l’histoire, il ne s’y donnait pas moins à connaître par le sentiment moral qui respire d’une manière bien vive et tout à fait éloquente dans les éloges donnés à saint Louis, à ce plus parfait des rois, du si petit nombre des politiques habiles qui surent unir le respect et l’amour des hommes à l’art de les conduire. […] C’est ainsi que M.Mignet a eu tour à tour à apprécier des philosophes, des hommes d’État, des jurisconsultes, des médecins, des économistes : il n’a failli à aucun de ces emplois, et on l’a vu porter dans tous la même conscience d’études, une vue équitable et supérieure, et une grande science d’expression ; mais il nous semble n’avoir jamais mieux rencontré que dans les portraits qui se détachent par la hauteur et l’unité de la physionomie, ou dans ceux qui se lient naturellement à de grands exposés de systèmes, par exemple dans ceux de Sieyès et de Broussais. […] Voilà les défauts qui disparaissent le plus habituellement dans la fermeté, l’énergie, l’éclat ou la propriété de l’expression, et qui ne se remarquent plus du tout dans les beaux récits de M.Mignet, tels que celui des événements de Hollande sous les frères de Witt ; nous osons lui proposer à lui-même ce parfait exemple pour son histoire future de la Réformation.
On reconnaît sa présence à divers indices, notamment au règne du style oratoire, régulier, correct, tout composé d’expressions générales et d’idées contiguës. […] On exclut du discours la plupart des mots qui servent à l’érudition spéciale et à l’expérience technique, les expressions trop latines ou trop grecques, les termes propres d’école, de science, de métier, de ménage, tout ce qui sent de trop près une occupation ou profession particulière et n’est pas de mise dans la conversation générale. […] Un jour, à l’Académie, Gresset, dans un discours, en osa lâcher cinq ou six359 : il s’agissait, je crois, de voitures et de coiffures ; des murmures éclatèrent ; pendant sa longue retraite, il était devenu provincial et avait perdu le ton Par degrés, on en vient à ne plus composer le discours que « d’expressions générales ». […] Les œuvres de Milton contiennent environ 8 000 mots. « Shakespeare, chez qui la variété de l’expression est probablement plus grande que dans tout autre écrivain de quelque langue que ce soit, a composé toutes ses pièces avec 15 000 mots environ. » (Max Müller, Lectures on the science of language, I, 309.) — Il serait curieux d’établir en regard le compte si restreint du vocabulaire de Racine.
L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes La génération qui précède immédiatement la génération symboliste s’était signalée par son caractère misogyne. […] Il est vrai que l’Amour est le thème éternel de toute poésie et qu’à l’inverse de sa pratique, immuable dès l’origine, son expression littéraire diffère et varie au cours des âges, au point de marquer la valeur du groupe social. […] C’est qu’alors son expression est libre, à travers les secousses et le désordre de l’État et l’indifférence de l’opinion, embesognée ailleurs. […] Au-dessus de l’homme et de la femme, vulgaires, simples animaux reproducteurs, tend à s’élever un Être, d’une finalité plus haute, résumant en lui les vertus du couple, spiritualisées, à leur plus haut point d’expression.
J’entends par la Solidarité des Élites, cette communauté de vision chez des êtres profondément différents d’âge, de race et de caractère, vivant sous les plus dissemblables latitudes, ne se connaissant pas entre eux pour la plupart, mais donnant de l’énigme du monde une solution identique, au fond, malgré les innombrables différences dans l’expression de leur désir. […] Ne sent-on pas là, comme je la sens, l’expression d’un des sentiments les plus modernes et les plus profonds d’un monde qui s’élargit démesurément ? […] Il est donc clair que les formes extérieures de gouvernement qui appartiennent à la période de civilisation ne sont que l’expression, en symboles extérieurs et distincts, des faits de la véritable vie interne de la société »43. […] Révolution religieuse, révolution de l’autorité, enrichissement du sens social, pénétration franche et directe de la réalité, sens de l’universel et des coexistences, tout ce que nous venons de voir successivement exposé, se résume en une nouvelle expression du sentiment du lien entre toutes les parties de l’univers, entre toutes les vies, humbles ou immenses, riches ou frustes, immédiates ou lointaines, Ces hommes sincères dont je viens de traduire la pensée, appartiennent tous, quoique d’âge et de renom différents, à la génération nouvelle.
Une expression naturelle de regret se mêle dans la parole d’Arago au sentiment d’orgueil que lui inspire la vérité inaltérable, mais peu accessible, des sciences : Les sciences exactes, a-t-il dit dans sa notice sur Thomas Young, ont sur les ouvrages d’art ou d’imagination un avantage qui a été souvent signalé : les vérités dont elles se composent traversent les siècles sans avoir rien à souffrir ni des caprices de la mode ni des dépravations du goût. […] Lorsque Richelieu déchaîna contre le grand Corneille une tourbe de ces hommes que le mérite d’autrui rend furieux, les Parisiens sifflèrent à outrance les séides du Cardinal despote (dans tout ceci l’expression est bien violente), et applaudirent le poète. […] Lorsqu’il s’agit d’un savant qui s’est distingué dans les sciences physiologiques ou naturelles, la difficulté est grande, mais elle est plus de nature à être vaincue ; il y a toujours moyen pour le talent ingénieux et habile (nous en avons des preuves) de trouver des expressions qui traduisent le genre de mérite du mort et donnent à tous quelque idée de ses travaux.
Le premier point du discours où l’orateur glorifie la bonté de Jésus, toute conforme à sa vraie nature, est marqué par des bonds et des élans, des termes vifs et impétueux, des mots significatifs qui enfoncent la pensée ; un peu d’archaïsme s’y mêle dans l’expression : Et à ce propos (de la miséricorde), il me souvient, dit l’orateur, d’un petit mot de saint Pierre par lequel il dépeint fort bien le Sauveur à Corneille : Jésus de Nazareth, dit-il, homme approuvé de Dieu, qui passait bien faisant et guérissant tous les oppressés : Pertransiit benefaciendo… Ô Dieu ! […] Un demi-sourire plein de grâce et d’arrière-pensée muette était leur expression la plus fréquente. […] Allez plutôt voir au Louvre son buste par Coysevox : noble tête, beau port, fierté sans jactance, front haut et plein, siège de pensée et de majesté ; la bouche singulièrement agréable en effet, fine, parlante même lorsqu’elle est au repos ; le profil droit et des plus distingués : en tout une expression de feu, d’intelligence et de bonté, la figure la plus digne de l’homme, selon qu’il est fait pour parler à son semblable et pour regarder les cieux.
Vitet, qui est depuis plus de trente ans une sorte de secrétaire perpétuel extérieur, le plus brillant et le plus fin, mais à ses heures et à ses moments, se dit : « Pourquoi nous conduire toujours comme une Académie muette et dépendante, nous qui possédons par excellence toutes les autres formes sensibles de l’expression ? […] Mais l’Éloge de Simart, le dernier de ceux qu’Halévy a eu à prononcer, est des meilleurs ; j’y noterais à peine un ou deux endroits pour le trop de mise en scène ou la fausse élégance de l’expression ; l’analyse des travaux de l’artiste y occupe une juste place, et toute cette partie est traitée avec bien du sérieux, et cependant avec animation et vie : « Simart, au reste, ne courait pas après la popularité ; il l’attendait, non comme l’homme de la fable attendait la Fortune, mais debout et laborieux. […] « Il écrivait tout, musique et littérature, avec grand soin, et était difficile pour lui-même : il raturait, il émondait ; il voulait la clarté, l’expression juste.
Il sait le détail des champs comme Hésiode, et ne recule devant aucun conseil, même technique et aride, sauf à l’orner et à l’embellir par une expression pittoresque ou sensible. […] Tout a son prix aux yeux de la critique qui sent l’art comme l’expression presque directe de la nature et de la vie. […] Ces expressions de Buffon même.
« Son œil est plein de feu, mais d’un feu doux, sa conversation riche et abondante, son expression toujours pittoresque, et sa pensée rarement ordinaire. » Rien n’égale à mes yeux le prix des témoignages contemporains quand ils sont donnés avec cette précision, cette justesse, et qu’ils nous arrivent contrôlés par les juges les plus compétents. […] Lefebvre a retenu l’esprit, les idées et les expressions de notre causerie ; il arrive rarement que nos vues soient aussi bien saisies par un étranger avec lequel nous nous entretenons pour la première fois. […] Armand Lefebvre, qui devait être cet historien, se trouvait donc, selon une expression heureuse3, voué et comme promis dès sa première jeunesse à la carrière diplomatique.
., dans la strophe que vous me citez de mon Ode à la Fortune ; et je vous avoue, puisque vous approuvez la manière dont je me suis approprié la pensée de cet ancien, que je m’en sais meilleur gré que si j’en étois l’auteur, par la raison que c’est l’expression seule qui fait le poëte, et non la pensée, qui appartient au philosophe et à l’orateur, comme à lui. » L’aveu est formel ; on conçoit maintenant que Saurin ait dit qu’il ne regardait Rousseau que comme le premier entre les plagiaires. […] Boileau en est la preuve : il imite, il traduit, il arrange à chaque instant les idées et les expressions des anciens ; mais tous ces larcins divers sont artistement reçus et disposés sur un fond commun qui lui est propre : son style a une couleur, une texture ; Boileau est bon écrivain en vers. […] C’est que ce brillant et ce beau appartiennent tantôt à Platon, tantôt à Pindare, tantôt même à Boileau et à Racine : Rousseau s’en est emparé comme un rhétoricien fait d’une bonne expression qu’il place à toute force dans le prochain discours.
C’est le cas de Dalembert mathématicien illustre, esprit indépendant, au-dessus de l’ambition et de l’intérêt, ami de son repos jusqu’à l’égoïsme, et jusqu’à renoncer à l’expression publique de ses idées, excitant les autres sous main à se compromettre, et gardant lui-même un silence prudent : critique étroit, fermé à l’art, à la poésie, philosophe intolérant, affolé de haine contre la religion et les prêtres ; écrivain lourd et pâteux, sans tact, d’une inélégance innée, et d’une sécheresse qui se dissimule mal par l’emphase et la fausse noblesse. […] Il fut le principal rédacteur des articles littéraires de l’Encyclopédie ; ni les connaissances ni le goût ne lui manquaient ; et le recueil de ces articles, qui forme les Éléments de littérature, est l’expression la meilleure que nous ayons du goût moyen du xviiie siècle. […] Son œuvre, comme celle de Descartes au xviie siècle, est l’expression philosophique du même esprit qui a produit la littérature du temps.
Maurice Maeterlinck n’est pas un simple fantastique, et cet art n’est chez lui qu’une méthode, plus au juste une expression naturelle de son tempérament. […] Toute la différence de son point de vue à celui du savant et même du vulgaire est que où l’on reconnaît : 1º des faits inexpliqués expérimentalement perçus ; 2º des lois qu’on peut dégager de l’apparence de ces faits, — le symboliste, intervertissant, discerne : 1º les vérités intuitivement sues ; 2º les faits, expressions concrètes de ces vérités, ou symboles. […] Et je voudrais qu’on n’eût pas abusé de l’expression pour dire, avec quelque saveur encore, que l’écrivain de telle phrase du Narcisse est nécessairement un grand esprit.
N’oublions pas le musicien Dubreuilh qui préconisait une restauration de la musique française dont la Dame blanche était, à son avis, l’un des plus hauts points d’expression. […] Qu’est-ce que la mort d’une vague individualité si elle sert à l’éclosion d’une œuvre immortelle et à créer, selon l’expression de Keats, une source éternelle de ravissement ? […] Je connais le prix d’un beau vers, mais aussi d’une rose, d’un vin de cru, d’une cravate adaptée et d’un mets délicat. » Je résume ainsi les propos d’Oscar Wilde, mais ce que je n’en puis rendre c’est le tour et l’expression.
Malgré ces coins d’humeur et ces instants irrités, Ducis était assez habituellement calme pour que sa figure de vieillard, en ces années, ait bien de l’expression antique, et que nous la trouvions de plus en plus noble et belle. […] Ducis ne se doutait pas de tout ce qui manquait à son expression en vers. […] » Puis, s’appuyant sur mon épaule pour descendre, et m’ayant consulté sur l’effet de son bouquet, le seul sans doute que la saison eût pu lui offrir : « Mon ami, ajouta-t-il avec une figure dont l’expression m’est encore présente, les anciens couronnaient de fleurs les sources où ils avaient puisé.
De là, par exemple, cette représentation tout imaginative de l’âme, qui nous la montre dans le corps « comme un pilote dans son navire », selon l’expression d’Aristote, et en dehors de Dieu comme un homme est en dehors de sa maison, — de là cette idée de substance suivant laquelle l’âme serait une espèce de bloc solide, revêtu de ses attributs comme un homme de son manteau. […] Par rapport au phénomène, il est comme un tout ; par rapport à l’être, il est comme rien ; c’est un milieu entre rien et tout, selon la profonde expression de Pascal. […] Le moi qui pense est-il de roc et d’argile selon l’expression de Descartes ?
disait Virgile, qu’à toi seul appartient de donner des lois à l’univers : tels seront les seuls arts dignes de toi. » Ce que Virgile disait, du temps d’Auguste, était l’expression de la pensée même de ce peuple, qui, à toutes les époques, fondait toujours pour l’éternité, et affectait l’empire du inonde. […] Lorsque l’on trouve pour la première fois cette expression, elle est déjà consacrée par la tradition ; et l’on sait que nos rois n’ont jamais été moins jaloux que les autres de leur indépendance dans leurs rapports avec la cour de Rome. […] Dieu, en retirant à Bonaparte un pouvoir qui fut essentiellement, et par sa nature, temporaire et conditionnel, ne s’est point repenti, selon la belle expression de l’Écriture ; car Bonaparte ne fut qu’un auxiliaire du temps, pour hâter la destruction.
Toutes ces œuvres, pour n’être pas rimées, n’en ont pas moins une poésie charmante, si, par ce nom, l’on entend le don d’exprimer d’une manière rare des idées, ou de décrire des paysages au moyen d’images choisies ; et aussi, selon la belle expression de Diderot : tout ce qu’il y a d’élevé, de touchant dans une œuvre d’art, dans le caractère ou la beauté d’une personne ou même dans une production naturelle. […] Poinsot et Normandy sur les tendances de la poésie nouvelle, j’insisterai à mon tour sur des innovations nécessaires qui tendent à élargir le domaine poétique, qui sont acceptées par des poètes de grand talent et dont l’emploi est fort justifiable, pourvu qu’il se fasse avec méthode, tact et goût, afin de garder à la pensée sa pleine valeur et sa juste expression, ce respect du bien dire. […] Elles ne s’écartent en rien du génie de notre race et tendent à donner un peu d’élasticité à des préceptes dont l’étroitesse ne peut que nuire à l’essor poétique, puisque la poésie est l’expression musicale et rythmée du sentiment et des idées.
Nous ne croyons pas faire tort au théâtre si populaire où elle a été donnée, ni encore moins faire peine à MM. les auteurs, en consignant ici l’expression, toute flatteuse pour eux, de ce regret. […] Agréez, je vous prie, l’expression de mes humbles respects, etc.
qu’on ne me dise pas qu’Oberman et René ne sont que deux formes inégalement belles d’une identité fondamentale ; que l’un n’est qu’un développement en deux volumes, tandis que l’autre est une expression plus illustre et plus concise ; qu’on ne me dise pas cela ! […] Les expressions, les réminiscences d’Oberman s’appliquent à chaque pas. — Nous obéissons à une intention du vénérable auteur en rappelant formellement ici qu’il n’en est pas resté au système oppressé d’Oberman ; il s’est appliqué à s’en dégager sans relâche, à perfectionner, à mûrir ses Libres Méditations, et à y considérer la pensée religieuse indépendamment de tout dogme téméraire ; il ne vit depuis des années que dans ce haut espoir.)
Je mets plus haut, pour ses chefs-d’œuvre, un genre qui appartient spécialement au second empire, et qui en est, à certains égards, l’originale expression : je veux parler de l’opérette telle que l’a compris Offenbach897, surtout lorsque ses rythmes échevelés coururent sur les livrets de MM. […] La moitié du rôle de la femme, une détraquée honnête, mais surtout les trois rôles d’hommes qui sont de vivantes expressions de la veulerie contemporaine, chacun avec sa physionomie propre, font de la pièce une des excellentes études de mœurs que nous ayons.
Il aura créé un mode d’expression qui lui demeurera propre. […] Georges Polti Si d’autres présentent, toutes les élégances dont la langue française soit capable comme l’expression exacte de leur âme raffinée, et raniment, une fois de plus, la légende wagnérienne, Watteau ou l’antiquité (à la façon du bon Gautier), Verhaeren, — moins symboliste d’ailleurs, n’en déplaise au classement en vogue, que naturaliste, — a crié, dans des strophes dont lui ont appris le rythme les tempêtes, la nouvelle, la paroxysmatique clameur du farouche siècle qui se lève.
Luc, au contraire (IV, 16), écrivant avec réflexion, a employé, pour être conséquent, une expression plus adoucie. […] L’expression de « frère du Seigneur » constitua évidemment, dans l’Église primitive, une espèce d’ordre parallèle à celui des apôtres.
Ces pensées, qui assiégeaient Jésus à sa sortie de Jérusalem, trouvèrent leur vive expression dans une anecdote qui a été conservée sur son retour. […] Mais l’éclair deviendra le plein jour, et, après avoir parcouru tous les cercles d’erreurs, l’humanité reviendra à ce mot-là, comme à l’expression immortelle de sa foi et de ses espérances.
On y voit l’imagination la plus vive & la plus féconde, un esprit flexible pour prendre toutes ses formes, intrépide dans toutes ses idées, un cœur pétri de la liberté Républicaine, & sensible jusqu'à l’excès, une mémoire enrichie de tout ce que la lecture des Philosophes Grecs & Latins peut offrir de plus réfléchi & de plus étendu ; enfin une force de pensées, une vivacité de coloris, une profondeur de morale, une richesse d’expressions, une abondance, une rapidité de style, & par-dessus tout une misanthropie qu’on peut regarder comme le ressort principal qui a mis en jeu ses sentimens & ses idées. […] Du côté du style, un tissu séduisant de tout ce que l’imagination a de plus brillant & de plus riche, de tout ce que le sentiment a de plus chaud & de plus énergique, de tout ce que l’expression a de plus mâle, de plus tendre, de plus pittoresque, & de plus élégant.
Rotrou & moi, disoit quelquefois Corneille, ferions sauter des saltinbanques : expression basse, mais qui signifioit que leurs pièces auroient réussi bien ou mal joués. […] Il releva les expressions offensantes pour sa personne ou pour celle de tant de gens respectables devant qui la pièce avoit été jouée, & se moqua de ce qui ne tomboit que sur l’ouvrage.
Enfin Horace et tous les auteurs de l’antiquité qui parlent en passant de la déclamation tragique des anciens, se servent d’expressions qui marquent qu’elle étoit ce que nous appellons chantante. […] Ciceron se sert de la même expression, facere modos, pour designer ceux qui composoient la declamation des pieces de théatre.
Lui, le critique attitré du théâtre de Hambourg, prit acte des pièces qu’on y jouait pour les faire passer, elles et le système dramatique dont elles étaient l’expression, par les dents d’une herse si terrible et si profondément enfoncée, que, de ces pauvres pièces, il n’en resta plus que les lambeaux ! […] Mézières est un écrivain d’expression professorale, commune et correcte, un de ces pauvres d’idées qui, n’ayant pas de chemise, boutonnent strictement leur habit.
Jourdain n’a ni une seule expression pittoresque, ni une seule expression incisive, ce qui serait une indécence en métaphysique.
Il a la stricte netteté de Carrel, sa forte sobriété d’expression (qualité militaire du style), et s’il est moins provocateur et moins hautain que Carrel, on sent l’homme, sous l’écrivain, tout aussi solide, avec un mordant et une terrible plaisanterie que n’avait point Carrel, le morose Carrel à l’ambition verte. Ces qualités, qui feront peut-être un jour de Ranc un polémiste de premier ordre, et qui donnent à ses feuilletons de théâtre une simplicité et une sévérité d’expression (je ne dis pas d’opinion) à laquelle les feuilletons de théâtre ne nous ont pas accoutumés ; ces qualités sont-elles de celles qui annoncent et promettent le romancier ?
C’est un écrivain véritable, qui a le don de la goutte de lumière tombant de la plume, et chez qui l’on peut constater deux qualités qui semblent s’exclure et qui peuvent faire un jour d’un homme un des maîtres de l’expression : la concentration et la transparence. […] Et s’il n’y avait dans cette idée que l’influence d’un patriotisme exalté, nous ne relèverions pas une telle illusion ; nous la laisserions tomber d’elle-même… Mais le livre n’est, au fond, que l’expression éloquente, et par conséquent dangereuse, de cette forte tendance que Bonald, avec son génie positif, condamnait déjà il y a une trentaine d’années22, et qui consiste à sacrifier la France interne et agricole à la France externe et commerçante.
Il possède à un haut degré le don de l’expression créée. […] Toute expression lui semble irréprochable, pourvu qu’elle soit précise. […] Il n’y a rien à reprendre à l’expression où l’on trouve réunis à la fois la justesse et l’agrément. […] Le mémoire qu’il a écrit pour le Régent en mai 1717, est l’expression très nette de cette inquiétude. […] Le besoin pur d’amuser y inspire le plan, y engendre les situations et y crée jusqu’à l’expression comique.
Le principe de contradiction, au contraire, représente le type du faux, de l’impossibilité logique : A est non-A, telle en est l’expression. […] Ce n’est là pour lui qu’une expression, et comme une métaphore, désignant une relation phénoménale. […] Faut-il donc leur dénier toute réalité véritable et dire, avec l’idéalisme, qu’elles ne sont autre chose qu’une expression et une projection des lois de l’esprit lui-même ? […] Le psychique ne serait ainsi qu’une expression, une traduction, en un langage spécial, de certains phénomènes physiques. […] Pour lui, une loi sociale n’est plus l’expression d’un vœu, mais l’expression de faits observés avec impartialité.
Charles Fuster Ces « poèmes de jeunesse », comme les appelle l’auteur lui-même, ont des violences d’expression, mais aussi du pittoresque et un parfum de rusticité sincère.