Il est vrai que je l’aime tant que j’aurais peur, à la fin, d’aimer en lui jusqu’à un défaut. […] Jugez-en. « Nous aimons mieux vraiment, quel qu’il ait été, conclut M. […] J’aime beaucoup Balzac, et je sais tous les grés du monde à M. […] Avec une intuition qui n’enlève rien à la maturité de ses jugements, il devine le talent encore anonyme et se prend à l’aimer. […] L’auteur l’aime, comme peut-être le plus naturel de ses ouvrages.
On se plut même et on applaudit aux singularités les plus passées de ce langage héroïque ou amoureux, comme à de belles modes du temps de MMes de Longueville ou de La Vallière ; on aima jusqu’au parfait amant et jusqu’à l’adorable furie, tout comme on aime des meubles de Boule. […] Il fallait, remarque-t-on justement, avoir vécu sur mer, avoir aimé la mer, pour la chanter ainsi. […] Nous aimons à en rappeler ce détail aujourd’hui que M. […] » — Par contraste, dans le Mariage de Figaro, Chérubin dit bien gaiement je vous aime aux arbres, au vent, aux nuages. […] demanda l’un des convives à Talma. — J’aime le romantique, répondit-il vivement, mais surtout celui de Racine.
On a beau être courtisane, on n’aime pas être marchandée sottement, comme un cheval anglais ou un objet d’art. […] Il la plaint, il la console, il voudrait l’arracher à ce climat de feu qui la tue, il lui dit qu’il l’aime depuis longtemps, que sa vie lui appartient et qu’elle ne peut en disposer comme d’une chose à elle ; la scène est poignante de vérité douloureuse. […] Elle l’aimera donc, mais à une condition : c’est qu’il la laissera libre de sa vie, et qu’elle n’aura jamais de comptes à lui rendre. […] Elle l’ignore mais, quel qu’il soit, elle est bien près de l’aimer. […] elle l’aime déjà, de toute la folie de sa tête, de toute l’oisiveté de son cœur.
Il aime enfin tout ce qui a saveur et couleur. […] Il aime à donner à ses récits, pour fond et pour premier plan, un lieu, une contrée précise qui elle-même fait une bonne partie de l’intérêt. […] Jeune, il a aimé à la passion l’époque de Louis XIII ; il l’a fort étudiée, et son volume des Grotesques (1844) renferme une suite de portraits originaux et singuliers de ce temps-là. […] Par un effet de ce grand goût qu’il a pour l’art et un certain art de convention, il a mieux aimé étudier la vie dans la comédie que de retrouver la comédie dans la vie. […] Il aime mieux voir la nature à travers un léger travestissement.
Mais si vous voulez, Sire, qu’on rompe le silence, c’est à vous de l’ordonner. » Louis XV accepte de bonne grâce cette ouverture et lui permet de libres avis ; il avait du goût pour ce genre de correspondance particulière, j’allais dire cachotière, en dehors de ses ministres en titre ; ce n’était pas précisément un insouciant que Louis XV, c’était même un curieux ; il aimait à tout savoir, le pour et le contre sur les choses et sur les gens, sauf à en très peu profiter et à n’en rien faire. […] III Un des mérites du maréchal de Noailles est, du moins, de l’avoir senti et d’avoir averti Louis XV de ce relâchement de tous les ressorts (8 juillet 1743) : « Qu’il me soit permis, Sire, de vous exprimer combien je souffre et je suis touché de voir Votre Majesté, qui mérite d’être aimée et bien servie, l’être si mal. […] « Je ne m’étendrai pas davantage pour cette fois-ci, mais j’attendrai votre réponse avec honnêtement d’inquiétude ; pensez le reste. » Il y a là quelque bon désir, quelque étincelle ; et quinze jours après (9 août), lorsque la retraite de l’armée de Bavière a ramené la guerre à notre frontière du Rhin, Louis XV dira : « Si l’on mange mon pays, il me sera bien dur de le voir croquer, sans que je fasse personnellement mon possible pour l’empêcher ; mettons-nous au moins en état de réparer de bonne heure ce que nous aurons pu perdre toute cette année-ci. » Sous des expressions peu nobles on aime à surprendre de ces réveils d’honneur. […] On aime peu à voir cette décadence de la nation, avouée et reconnue d’un roi jeune, et qui devrait protester contre, ne fût-ce que par son exemple. […] Ces soins sont une partie essentielle de ceux de la royauté, et ne sont pas les moins difficiles à remplir ; mais ils ne le seront pas pour Votre Majesté, vu les talents que Dieu lui a donnés pour se faire aimer de ceux dont elle veut l’être, et pour discerner le mérite. » Un peu de flatterie, il en faut ; il faut le passeport au conseil.
Jamais mère n’eut tant de droit de parler avec autorité que l’impératrice ; je l’ai représenté plusieurs fois dans les moments où les lettres chagrinaient : on convenait du principe, mais on s’est toujours figuré qu’on était peu aimée et qu’on serait traitée comme un enfant jusqu’à trente ans. […] M. ne m’a rien dit de plus ; elle n’en désire peut-être pas davantage ; elle trouvera une importunité de moins pendant mon absence, et quand elle aimerait mieux ma présence, elle sent bien qu’elle ne peut plus m’en parler sans répondre aux motifs clairs et décisifs que je lui ai présentés l’année dernière. […] Elle est assez bien et convenablement avec toute la famille royale, excepté qu’elle marque beaucoup trop de prédilection pour le comte d’Artois, quoiqu’au fond elle ne l’aime ni ne l’estime, mais uniquement parce qu’il l’amuse et lui procure des amusements. […] 96 Elle est maîtresse de ses volontés ; elle n’aime pas l’application, elle ne veut pas de gêne ; elle ne trouve pas beaucoup de ressources dans la famille royale, et elle craint surtout l’ennui. […] Il avait établi son influence sur elle dans l’âge où les impressions sont le plus durables, et il était aisé de voir qu’il n’avait cherché qu’à se faire aimer de son élève et s’était très-peu occupé du soin de l’instruire.
On aime, indépendamment du jugement critique, à savoir avec précision ce qu’a écrit l’auteur qu’on juge, ce qu’il a laissé d’imprimé ou d’inédit, et même ce qui a été pensé par d’autres à son sujet. […] Gautier est tel ; il aime, non pas à modifier, mais à retourner sans dire gare les jugements les plus reçus. […] Et encore, pour les deux premières, j’aime mieux renvoyer au volume que de les transcrire ici. […] J’y distingue les stances écrites pour le Prince de Chypre dans un ballet, et où l’on croirait entendre à l’avance quelque accent de Quinault ; je me rappelle aussi que madame Tastu aime particulièrement les stances qui ont pour titre les Nautonniers. […] Au défaut de ses vers, un ingénieux et savant critique, avec qui j’aime à me trouver d’accord (M.
Car toutes ces discordes domestiques et ces guerres civiles littéraires n’empêchent pas, Messieurs, et tout devant moi le prouve, que les vrais lettrés, j’entends par là ceux qui aiment les lettres pour elles-mêmes, ne soient, toute rébellion cessante, d’une même cité, d’une même famille, et que le bien acquis et par les pères et par les neveux ne compose finalement le trésor de tous. […] Après le travail, la conversation fut aisément amenée sur le chapitre des vers, que Louis XVIII aimait, comme on sait, et dont il se piquait fort. […] Casimir Delavigne aimait avant tout son art et le renom populaire qu’il s’y était fait. Il avait gravé au fond du cœur l’antique programme d’Horace : « Quem tu, Melpomene, semel… Celui, ô Melpomène, que tu as regardé d’un œil d’amour au berceau, celui-là, il ne sera ni lutteur aux jeux de Corinthe, ni vainqueur aux courses d’Élide, ni général triomphateur au Capitole ; mais il aimera les belles eaux de Tibur, et il trouvera la gloire par des vers nés à l’ombre des bois. » Et dans le cas présent d’ailleurs, il y avait mieux, il y avait de quoi tenter et retenir toute l’ambition d’une âme de poëte. […] La popularité qui lui avait souri de si bonne heure, qu’il avait goûtée avec délices, qu’il avait certes le droit d’aimer (car elle ne s’était jamais présentée à lui que sous la forme de l’estime publique), il la traduisit au théâtre dans une de ses dernières œuvres, qui n’a peut-être pas été assez appréciée.
Dorante se fait passer pour un domestique, et Silvia pour une soubrette ; un homme et une femme se rencontrent, qui ont juré chacun de leur côté de né jamais aimer ; une fée s’éprend d’Arlequin balourd et niais : ces données ne représentent rien, ou pas grand chose, de réel. […] Il a posé en face l’un de l’autre ces deux êtres destinés à s’aimer, qui se sentent disposés à s’aimer avant de se connaître, et qui font effort pour se connaître avant de s’aimer, qui s’observent, s’étudient, se tendent des pièges, tâchent de forcer le mystère de l’âme par laquelle ils se voient pris irrésistiblement. […] Dans la diversité des cas particuliers, deux conditions se trouvent toujours : il faut gagner l’attention ; on est sur le chemin d’aimer quand on distingue ; et il faut intéresser la vanité, fut-ce en la blessant ; caressée ou irritée, dès qu’elle est émue, elle fouette le sentiment et fait doubler les étapes. […] Il ne s’agit plus de peindre la vie, mais de faire aimer la vertu et détester le vice.
Il aime Clémence, la fille de M. Charrier ; il en est aimé ; mais l’honneur l’attache à la femme qu’il a compromise. […] J’aime moins Vernouilhet rapportant à la marquise cent mille francs qu’elle a perdus dans sa débâcle et l’amenant, grâce à ce beau trait, à demander pour lui la main de Clémence, qui est sa filleule. […] Cette bonne dame, affligée d’une lubie chronique, se croit aimée de tous les secrétaires que prend son mari. […] Il se prend à l’aimer, avec l’emportement de la passion sans espoir.
De même en littérature, le poète qu’il aime par-dessus tout est l’Arioste : L’Arioste fait mes délices perpétuelles ; je ne puis le quitter depuis que je suis en état de l’entendre. […] Dante, au contraire, lui est pénible et difficile ; il le trouve d’un sublime dur : « Il me paraît plein de gravité, d’énergie et d’images fortes, mais profondément tristes ; aussi je n’en lis guère, car il me rend l’âme toute sombre. » Le Moyen Âge répugne à de Brosses ; il lui refuse le nom d’antiquité ; il visite au retour, à la bibliothèque de Modène, le docte Muratori, avec ses quatre cheveux blancs et sa tête chauve, travaillant malgré le froid extrême, sans feu et nu-tête, dans cette galerie glaciale, au milieu d’un tas d’antiquités ou plutôt de vieilleries italiennes : « Car, en vérité, dit-il, je ne puis me résoudre à donner le nom d’antiquités à tout ce qui concerne ces vilains siècles d’ignorance… Sainte-Palaye, au contraire, s’extasiait de voir ensemble tant de paperasses du xe siècle. » — Tous ces jugements se tiennent, on le sent, et s’accordent soit en littérature, soit en peinture ou en musique ; et celui qui aime tant l’Arioste pourra se déclarer de la sorte en faveur de Pergolèse : Parmi tous ces musiciens, mon auteur d’affection est Pergolèse. […] « J’aime bien pis que les rois, écrivait un jour le président à Voltaire : j’aime les papes. […] Il a bien du cœur en effet, un foyer d’affection vraie et sincère ; et, après un an environ d’absence, il y a quelque chose qu’il aime encore mieux que de visiter le Capitole, « c’est d’en parler avec ce qu’on aime ».
Au milieu des changements merveilleux qui s’accomplissent et qui inaugurent de toutes parts une ère de paix et de régularité, la littérature ne saurait souffrir : pour peu qu’elle se ressemble à elle-même et à ce qu’elle a été dans les beaux temps, elle aime l’ordre, le travail, une société plus active qu’orageuse, assise et florissante, et qui n’est plus uniquement occupée chaque jour à s’empêcher de périr. […] L’abbé Barthélemy a été pour eux, à cet égard, un instituteur comme l’avait été précédemment Rollin, mais approprié au moment nouveau ; un instituteur fleuri, poli et disert, éclairé, agréable et très aimé, habile à dérober la profondeur et l’exactitude du savoir sous une grâce à demi mondaine. […] L’évêque de Marseille, qui avait été si admirable pendant la peste, le vertueux Belsunce, n’aimait point les doctrines théologiques et à demi jansénistes qu’on supposait à l’Oratoire ; il fut cause que Barthélemy alla faire ses cours de philosophie et de théologie chez les Jésuites. […] Mais Obéron, ajoute-t-il, ne l’aime pas, et il lui préfère une grande mortelle Hermione, sa propre sœur. » Cela fait allusion à la préférence un peu scandaleuse que le duc de Choiseul accordait ouvertement à la duchesse de Grammont, tout en ayant pour Mme de Choiseul les attentions les plus respectueuses, et en restant jusqu’à la fin l’objet de son amour. […] Tout le monde l’aime, excepté son mari, qui lui préfère sa propre sœur, la duchesse de Grammont, espèce d’amazone, d’un caractère fier et hautain, également arbitraire dans son amour et dans sa haine, et qui est détestée. — Mme de Choiseul, passionnément éprise de son mari, a été martyre de cette préférence, mais, à la fin, elle s’est soumise de bonne grâce ; elle a gagné un peu dans son esprit, et l’on croit qu’elle l’adore toujours. — Mais j’en doute. — Elle prend trop de peine à le persuader !
Quand je dis : j’aime la chasse, je préfère la bière au vin, la vie active au repos, etc., j’émets des jugements qui peuvent paraître exprimer des estimations, mais qui sont, au fond, de simples jugements de réalité. Ils disent uniquement de quelle façon nous nous comportons vis-à-vis de certains objets ; que nous aimons ceux-ci, que nous préférons ceux-là. […] Entre ces deux propositions : J’aime ceci et Nous sommes un certain nombre à aimer ceci, il n’y a pas de différence essentielle. […] Ces mêmes valeurs qui, par certains côtés, nous font l’effet de réalités qui s’imposent à nous, nous apparaissent en même temps comme des choses désirables que nous aimons et voulons spontanément. […] Sans doute, c’est un fait que les hommes aiment une beauté, une bonté, une vérité qui ne sont jamais réalisées d’une manière adéquate dans les faits.
Et, comme ce prêtre de campagne n’aimait pas les paysans, il avait quelquefois sur eux des remarques d’une clairvoyance cruelle et d’une éloquente âpreté. […] En voici de littéraires : « Paul de Kock éclabousse la modestie et la pudeur pour faire rire. » « Tacite est merveilleux dans l’antithèse, lorsqu’il n’y est pas ridicule. » En voici de morales : « Peu aiment beaucoup ; beaucoup aiment peu. » « Un despote n’a pas d’amis. » « L’époux qui frappe sa compagne mérite-t-il le nom d’époux ?
Il lui arrive quelque chose de fort simple : il est à la campagne ; le printemps lui fait aimer une femme, et son amour lui fait trouver la nature plus belle. […] Nous aimions naïvement les grands classiques ; nous aimions Lamartine, Hugo, Musset, Sand, Michelet, Taine, Renan.
Et pourtant je ne peux les séparer, et ceux qui aiment l’une ne peuvent pas ne pas aimer l’autre. […] En un mot, je rapproche les deux vérités, parce que ce sont les mêmes raisons qui nous les font aimer et parce que ce sont les mêmes raisons qui nous les font redouter.
Le roi avait déclaré, en voyant la douleur que ressentait madame Scarron de la mort du premier de ces enfants, qu’il serait doux d’être aimé par madame Scarron. […] Vous me demanderez d’où vient cela : c’est que l’orgueil de l’amie (madame Scarron) la rend révoltée contre les ordres de madame de Montespan : elle n’aime pas à obéir. […] Madame de Sévigné, fort aimée de madame Scarron, était instruite, comme madame de Coulanges, de beaucoup de particularités secrètes des relations de la gouvernante avec madame de Montespan et le roi.
Touchant de son âme aux cieux, et de son corps à la terre, on aimait à le voir former, dans la chaîne des êtres, l’anneau qui lie le monde visible au monde invisible, le temps à l’éternité. […] Mais quand des congrégations de savants se formèrent ; quand les philosophes, cherchant la réputation et non la nature, voulurent parler des œuvres de Dieu, sans les avoir aimées, l’incrédulité naquit avec l’amour-propre, et la science ne fut plus que le petit instrument d’une petite renommée. […] Les unes appartiennent à l’esprit, les autres au cœur ; or, il se faut donner de garde de cultiver le premier à l’exclusion du second, et de sacrifier la partie qui aime à celle qui raisonne.
On croiroit que l’amour fut une passion gaie à oüir les gentillesses que ces galands disent aux personnes qu’ils aiment ; ils ornent leurs discours enjouez de ces traits ingenieux, de ces métaphores brillantes, enfin de toutes les expressions fleuries qui ne sçauroient naître que dans une imagination libre. […] L’auteur anglois prétend que l’ancienne chevalerie et ses infantes ont laissé dans l’esprit de quelques nations le goût qui leur fait aimer à retrouver par tout un amour sans passion et ce qu’elles appellent galanterie, espece de politesse que les grecs et les romains si spirituels et si cultivez n’ont jamais connuë. […] De là sont nées les extravagances de tant d’amans dont la plûpart n’étoient point amoureux ; les uns se sont fait assommer en écrivant le nom des belles qu’ils pensoient aimer sur les murailles des villes assiegées ; d’autres sont allez de vie à trepas pour avoir voulu rompre dans les portes d’une ville ennemie leur lance enrichie des livrées d’une maîtresse qu’ils n’aimoient point, ou qu’ils n’aimoient gueres.
C’est très dangereux : « Pourquoi aimez-vous, ce me semble, la conversation des imbéciles ? […] Pourquoi aime-t-il à lire les livres, puisque, jamais non pas une seule fois de sa vie, il n’en a trouvé un bon ? […] Figurez-vous un enfant qui, de naissance, n’aimerait pas la musique et que, par autorité paternelle, on aurait fait jouer du violon pendant dix ans : il ne pourrait plus passer devant un marchand d’instruments de musique.
Si l’auteur de l’Art d’écrire (cet art de s’aimer soi-même) avait eu quelque souci de logique vraie dans la disposition des parties de son livre, à coup sûr il eût commencé par l’un des derniers chapitres, celui qu’il intitule : « Comment on crée les images ». […] Nous eussions aimé voir de ces petites âmes, qui vivent de notre âme au contact des choses, évoluer dans le langage, etc. » Le singulier livre que j’aurais écrit, si j’eusse suivi le conseil de ces messieurs ! […] Je n’ai jamais aimé l’idéologie et, lorsqu’il s’agit d’enseignement, je trouve que la meilleure méthode est de démontrer, non de philosopher.
Aime-t-elle vraiment Chatterton ? […] L’Académie l’a élu ; le public l’aimera. […] mais ce n’est plus la forêt que j’ai tant aimée. […] L’homme jouit et souffre, aime et maudit. […] aimons-nous toujours !
Je voudrais pouvoir citer plusieurs de ces pages exquises qu’il faut lire et aimer et dans lesquelles nous retrouvons tous un peu de nous-mêmes, car elles sont, fixées par un Véritable poète, les minutes fugitives d’amour, de souffrances et de joies de nos enfances et de nos vingt ans, aujourd’hui déjà devenus de lointains passés. J’ai beaucoup aimé les poèmes d’André Magre, je les ai souvent relus et, dans ma mémoire, le livre fermé, chantent encore ces strophes d’une si délicieuse mélancolie : Tu viens, je te connais, ne me dis pas ton nom ; L’ombre est chaude, il fait bon rêver de mois de femme.
Sans doute qu’il a mieux aimé suivre les impressions de son génie que la décence de son état, qui lui a paru trop sévere. […] Mais les graces les plus touchantes Ne sont pas toujours suffisantes ; Et ce seroit trop présumer D’imaginer que l’on doit faire Pour une Belle un Art d’aimer, Parce qu’elle a celui de plaire.
Dans l’article sur Joseph de Maistre, inséré le 1er août dernier, il a été parlé d’un savant de Lyon, respectable et modeste, auquel l’illustre auteur du Pape avait accordé toute sa confiance sans l’avoir jamais vu, qu’il aimait à consulter sur ses ouvrages, et dont, bien souvent, il suivit docilement les avis. […] Deplace prêtait souvent sa plume aux idées et aux ouvrages de ses amis ; pour lui, il ne chercha jamais les succès d’amour-propre, et je ne saurais mieux le comparer qu’à ces militaires dévoués qui aiment à vieillir dans les honneurs obscurs de quelque légion : c’est le major ou le lieutenant-colonel d’autrefois, cheville ouvrière du corps, et qui ne donnait pas son nom au régiment. […] En supposant qu’il se l’exagérât un peu, qu’il accordât à son judicieux et savant correspondant un peu trop de valeur et d’action, on aime à voir cette part si largement faite à la critique et au conseil par un esprit si éminent et qui s’est donné pour impérieux. […] On sait la phrase finale du Pape, dans laquelle il est fait allusion au mot de Michel-Ange parlant du Panthéon : Je le mettrai en l’air. « Quinze siècles, écrit M. de Maistre, avaient passé sur la Ville sainte lorsque le génie chrétien, jusqu’à la fin vainqueur du paganisme, osa porter le Panthéon dans les airs, pour n’en faire que la couronne de son temple fameux, le centre de l’unité catholique, le chef-d’œuvre de l’art humain, etc., etc. » Cette phrase pompeuse et spécieuse, symbolique, comme nous les aimons tant, n’avait pas échappé au coup d’œil sérieux de M.
Les Grecs peignaient une action généreuse ; mais ils ne savaient pas quelles jouissances on peut trouver à braver la mort pour ce qu’on aime, quelle jalousie on peut attacher à n’avoir point de rivaux dans ce sacrifice passionné. […] Mais jamais un Grec n’aurait trouvé ce vers : Ils ne se verront plus ; — Ils ne se verront plus ; —ls s’aimeront toujours. […] L’illusion de la royauté subsistait chez les Athéniens, quoiqu’ils aimassent leur gouvernement républicain. […] Les Athéniens aimaient leurs institutions et leur pays, mais ce n’était pas, comme les Romains, par un sentiment exclusif.
J’ai tâché de rassembler, dans cet ouvrage, tous les motifs qui peuvent faire aimer les progrès des lumières, convaincre de l’action nécessaire de ces progrès, et par conséquent engager les bons esprits à diriger cette force irrésistible, dont la cause existe dans la nature morale, comme dans la nature physique est renfermé le principe du mouvement. […] L’on doit donc s’affranchir, s’il se peut, des craintes douloureuses qui pourraient troubler l’indépendance des méditations, confier sa vie à la morale, son bonheur à ceux qu’on aime, et ses pensées au temps, au temps, l’allié fidèle de la conscience et de la vérité. […] qui éloigne peut-être de vous des êtres que vous auriez aimés, qui se seraient attachés à vous, si de vains bruits n’avaient épouvanté les affections qui se nourrissent du calme et du silence. […] Les affections modifient toutes nos opinions sur tous les sujets : l’on aime tels ouvrages parce qu’ils répondent à des douleurs, à des souvenirs qui disposent de nous-mêmes à notre insu ; l’on admire avant tout certains écrits, parce que seuls ils ont ému toutes les puissances morales de notre être.
Barrès aime l’action, ou plutôt le rêve de l’action, parce qu’au moment du geste — il en est trop sûr — la peur le serrera comme une paralysie. […] Lâche tremblant, toujours préoccupé de sa chère guenille et qui aime sa santé et sa maladie comme on aimerait deux filles, vous êtes entraîné, pour vous rendre les faits extérieurs intéressants, à les traduire, sadique inconscient, en phénomènes pathologiques. […] Le client qui aime que ça dure en a pour son argent.
Faites donc le même reproche à Horace, que vous n’accuserez pas de n’avoir point aimé les vers, et qui a prescrit aux poètes des lois aussi sévères que moi. […] D’abord, car j’aime la justesse, expliquons-nous un peu sur cette proposition, que les images sont l’âme de la poésie. […] Convenez aussi, et par cette même raison, que ce sont les vers de sentiment que vous aimez de préférence, que vous les préférez même aux vers pensés, et que les vers d’image n’ont auprès de vous que la dernière place. […] Celui qui nous a donné la meilleure poétique est un des plus grands philosophes de l’antiquité ; les vers du Virgile de nos jours sont remplis d’une philosophie aussi solide qu’agréable ; enfin j’ai vu un roi, qui pour avoir gagné douze batailles n’en était pas moins philosophe et homme de lettres, avoir auprès de lui, sur la même table, Athalie et les Commentaires de César, et douter lequel des deux ouvrages il aimerait mieux avoir fait.
Une femme seule pouvait nous donner ces feuilletons, qui feront certainement suite, dans l’histoire de la société française, aux lettres de Mme de Sévigné, cette feuilletoniste du grand siècle de Louis XIV, et déplier au regard qui craint qu’elles ne s’envolent ces fragiles peintures d’éventail On aura beau, par un tour de souplesse de l’imagination, se faire spirituel, dandy, Rivarol en habit violette expirante, grand seigneur, prince de Ligne, avec ses coureurs roses et argent, devant sa voiture rose, on n’arrivera jamais, si on n’est qu’un homme, à être le vicomte de Launay d’un siècle grave, par des choses que le siècle dédaigne ou n’aime plus, avec cette supériorité ! […] Ce n’est plus là la fée aux pieds de qui tous ceux qui aiment la grâce tomberaient pour lui rendre hommage, si ces pieds étaient encore là ! […] Comme il eût compris qu’elle aimât la beauté, mais bien plus encore la parure ! […] Nous sommes en pleine femme naturelle et mondaine, en pleine femme vraie, en plein génie de légèreté, en pleine légèreté de génie ; de ce génie qui nous donne, par exemple, la sublime lettre sur la robe à huit volants, que j’aime mieux, pour ma part, que tous les tricots, compliqués et savants, des pages les plus citées, en littérature !
J’aime l’obscurité. […] Si Robert Emmet n’avait pas aimé Mlle Curran, aurions-nous eu ce. […] Je ne saurais pas qui elle est, l’auteur de Robert Emmet, et elle n’aimerait que Villemain, je ne serais pas bien sûr qu’elle fût une femme, car Villemain a le pédantisme sec que les femmes doivent détester, — il est vrai que celle-ci est de race doctrinaire, — mais l’amour de Sainte-Beuve m’aurait fait reconnaître la femme si, malgré la faiblesse du livre et ce bariolage d’opinions avec lesquelles les femmes font un livre comme elles font des tapis avec des petits morceaux d’étoffes de diverses couleurs, j’avais pu, une minute, en douter ! […] Mais c’est la seule illustration et c’est aussi la seule gaieté à recueillir pour les gens qui aiment à s’amuser un peu, dans ce torrent de bavardages, de vocalises et d’échos qui sonnent creux sur une si grande mémoire… et qui finissent par ennuyer.
L’auteur de Louis XVI et sa Cour 38, qui fut aussi le traducteur de Chesterfield et de Cantu, est d’instinct, d’éducation et d’étude, un esprit vraiment littéraire, qu’on aime à retrouver présent dans l’historien alors qu’il manie avec le plus de préoccupation les choses de l’histoire, et dans un temps surtout où, comme dans le nôtre, la Spécialité est entrain d’assassiner, avec un si grand succès, la littérature ! […] Cette histoire, d’une si triste conclusion pour qui aime le pouvoir, compromis ou trahi si souvent par ses propres titulaires, n’a point, sous la plume brillamment limpide de Renée, un seul mot de haine, de dureté ou de colère. […] Quand on aime les rois et qu’on a mieux pour eux que des larmes, quand on croit que les plus belles choses qu’il y ait encore sur la terre ce sont les pouvoirs qui conduisent les sociétés ou qui les défendent, on doit avoir réellement peur de toucher au cadavre décapité de Louis XVI à travers la pourpre de son sang répandu, plus inviolable à la postérité que ne le fut à ses contemporains sa pourpre royale. […] « Louis XVI — nous dit excellemment Renée — aimait à transporter lui-même dans les combles de son palais, où il travaillait, son enclume et ses lourds ustensiles.
cette espèce de Robert Macaire héroïque à qui la France, qui aime à rire, a passé ses duplicités et ses manquements de foi et de sincérité, comme si c’étaient des plaisanteries. […] Il prouve admirablement, au contraire, qu’au xvie siècle les novateurs, à commencer par Luther lui-même, ne surent d’abord où aller, voulant une réforme des mœurs, mais tenus en respect par le dogme et l’opinion des peuples qui aimaient encore la « Sainte mère l’Église ». […] Que surtout les ennemis du catholicisme apprennent d’un homme qui ne déclame point une seule fois, qui ne crie point et qui s’est peut-être comprimé le cœur pour ne pas crier, en écrivant ces choses désespérées qui, pour lui, sortent de son livre ; qu’ils apprennent ce que fut ce Sixte-Quint qui aima la France, et même Henri IV, mais qui sut résister à Henri, à la France, à la Ligue elle-même, à l’Espagne, la catholique Espagne, qu’il finit par impatienter, — car, chose curieuse ! […] L’auteur du Sixte-Quint nie absolument ces deux circonstances que nous aimons comme des légendes ; car les légendes sont l’idéal du vrai, et non pas le faux, comme le croient d’imbéciles philosophes.
Le National du temps, qui n’aimait pas la police et prenait des airs avec elle, l’arrêta un jour en flagrant délit de vol, comme un simple sergent de ville littéraire. […] On aimerait pourtant à y voir quelquefois le rayon. » Mais l’éternité ne se bavarde pas, et qui verrait le rayon, verrait tout ! […] Si, de son vivant, quelque ami littéraire lui avait exposé la théorie de son historien futur, elle l’eût bientôt coupé en quatre, comme dit Sainte-Beuve, avec un de ces mots comme il en bondissait de son esprit, puis elle aurait tourné sur les hauts talons de ses mules, et tous ceux qui aiment la grâce même dans l’impertinence, lui auraient pardonné. […] Souvent nous avons vu un peu de grâce faire passer par-dessus beaucoup de folie, mais que dire de beaucoup de grâce consacrée à nous faire aimer beaucoup de bon sens ?
» disait plaisamment la duchesse de Boufflers à un mari qu’elle avait aimé. […] On lui savait gré, de part et d’autre, de tout ce qu’il faisait et de tout ce qu’il ne faisait pas… Marié à une femme qu’il aimait, indépendant par la fortune quand son talent ne lui aurait pas constitué une indépendance, A. de Tocqueville convient de son bonheur dans sa correspondance. […] Il est vrai que Sainte-Beuve, cet homme des « coteaux modérés », doit aimer la modération en toutes choses et peut prendre pour de la poésie ce qui n’en est pas à des yeux plus exigeants que les siens. […] Traité de grand homme, en pleine Académie, par la voix d’un orateur qui a toujours aimé à faire porte-voix à son époque, c’est ainsi qu’il aura été embaumé Montesquieu par Guizot dans la grande parole invoquée de Royer-Collard.
Alfred de Musset, cet amoureux immortel de femmes mortes maintenant, heureux par toutes, malheureux par une seule, a fini par mourir de celle-là… mais il a vécu par les autres, et vous n’empêcherez jamais l’imagination humaine, éprise de ses poètes, de s’intéresser à toutes celles qui ont doublé, par le bonheur qu’elles lui ont donné, les facultés du poète qu’elle a peut-être aimé le plus, et d’en désirer obstinément l’histoire. […] Nous connaissons les femmes qu’aima lord Byron. Les femmes qu’aima Musset, ce Byron de France, nous resteront-elles inconnues ? […] Le caractère du génie de Musset, c’est, au contraire, la tendresse, — la tendresse jusqu’au fond de la passion la plus ardente et plus forte qu’elle ; car elle la fond toujours, cette passion, dans une dernière larme52… Et il l’avait tellement, cette tendresse, qu’il en oublia le plus souvent, dans les bras de celles qui l’aimèrent (et même pour cela il n’était pas toujours besoin de leurs bras !)
Ainsi elle n’était pas que poète, cette enfant, elle était aussi la poésie, et tout ce qui aimait la poésie en fut enivré. […] j’aime mieux Delphine Gay ! […] III Je l’aime mieux et j’ai dit pourquoi. […] On peut vraiment presque tout citer des pièces intitulées : Il m’aimait, L’Une ou l’autre, le Rêve d’une jeune fille, Le Départ, le Découragement, le Désenchantement, L’Orage, le Conseil aux jeunes filles et La Nuit, la pièce la plus inspirée, où la femme malheureuse arrache son masque pour ne pas étouffer, sûre de n’être pas vue, et, quand vient l’aurore, le rejette sur sa figure avec une fougue si pathétique de main !
Il était, lui, le pauvre, le luxe de ces gens riches ; car, dans ce temps-là, les gens riches faisaient cas du génie, et personne ne fut plus peut-être agréé et aimé des femmes que cet homme qui mettait ses bas à l’envers… Les témoignages sur ce point abondent, et le pudibond Walckenaer en a des rougeurs qui surprennent de traverser ainsi son vieux maroquin. […] Il le dit lui-même : « Je suis chose légère. » Les femmes qui l’aimèrent, l’aimèrent surtout comme de belles marraines qui lui firent chanter sa romance à Madame jusqu’à sa dernière heure, à ce Chérubin attardé qui devint une barbe grise avant de cesser d’être un enfant, mais qui finit, tout en la chantant, par rire de sa romance. […] … Elles l’aimèrent jusqu’à la barbe grise.
Malgré les frères et amis, qui ne le vantent pas, malgré une fortune qu’on dit considérable, — une fortune à payer des condottieri, s’il en voulait, — et la bassesse des journaux toujours prêts à la réclame, Laurent Pichat avait la distinction d’être obscur, et pour moi, qui aime les distinctions et qui l’avoue sous ce régime d’égalité républicaine, celle que j’aime le plus, par ce temps de gloires insultantes, c’est l’obscurité ! […] ce n’est pas moi qui citerai ici pour les faire valoir les pièces du recueil de Pichat contre ce que nous aimons, nous, les croyants, et respectons encore. […] — Si tout était vide Comme la coupe de Thulé, Où tout ce que l’on aime et souffre Dans une gorgée a coulé, Que la clé rose reste au gouffre !
Amédée Pommier, moins âgé que Hugo, aimait à se dire un des grenadiers de sa vieille garde. […] Il aimait mieux déterrer des cadavres oubliés, ce petit sergent Bertrand de la littérature ! Il aimait mieux, par exemple, exhumer ce mort trente-six fois mort et trente-six fois ridicule d’Abbé de Marolles, que de parler de ce robuste vivant qui s’appelait Amédée Pommier, et qui ne tendit jamais sa noble main à l’aumône d’un article. […] Il les aimait et elles l’admiraient, et lui, le poète trompé peut-être dans ses aspirations de renommée, buvait l’admiration dans la coupe de ces deux cœurs, qui en étanchaient, mieux que le monde, la soif infinie.
Ces trois romans : Un début à l’Opéra, M. de Saint-Bertrand et le Mari de la Danseuse, qui ne font, comme je l’ai dit, qu’un seul livre, malgré leur triple étiquette, et qui devraient seulement s’appeler M. de Saint-Bertrand, ne sont que la vie de ce beau fils aimé d’une danseuse, homme entretenu (il faut dire exactement le mot), qui, pour jouer et bambocher, vend tout, se vend lui-même d’abord, puis vend sa maîtresse, puis sa femme, puis, quand sa femme n’est plus, son cadavre ! […] Je n’en nie point l’ignoble vérité, mais je dis qu’on a beau aimer l’exactitude, il est un point où elle devient insupportable. […] L’impresario Giskel est cet éternel vieillard qui aime, et qui également fait pleurer ou rire, selon qu’on le trouve dans un roman ou dans une comédie. […] Enfin Barberine, la danseuse, est idéale de pirouettes, il est vrai, et n’a pas usé par les jambes, comme le dirait Stendhal, le fluide nerveux qui fait qu’on aime ; mais l’obstination de son amour pour Saint-Bertrand, amour qui aurait dû être combattu par des hontes et des résistances infinies, sa docilité à reprendre son amant chaque fois qu’il lui revient, couvert d’un flot de boue de plus, a quelque chose de si ponctuel qu’elle ne semble plus une femme qui se débat comme l’oiseau fasciné par le monstrueux reptile, mais la poupée mécanique de l’amour.
Plus le prince a de réputation, plus cet intérêt augmente ; on aime à voir un homme admiré dans sa cour et sur les champs de bataille, écrire et penser dans son cabinet, et parler en philosophe aux peuples qu’il sait gouverner en roi. […] Il dédaigne les richesses qui ne sont que de l’or ; les siennes sont des amis qui l’aiment sans feinte, et qui le servent sans le flatter. […] Il aime également et les citoyens et les soldats. […] Cette femme, une des plus belles de son siècle, aima les sciences, non par ostentation, mais par goût.
Dis, aimes-tu mieux recevoir la réponse de notre bouche ou de celle de nos maîtres ? […] Aimé Martin, le plus doux des hommes, a commenté Molière : trahit sua quemque coluptas. […] D’ailleurs, j’aime trop le commentateur de Molière pour être juste ; je suis surtout ami ! […] Que Dieu les bénisse et me permette de les retrouver dans l’immortelle réunion promise à ceux qui s’aiment ici bas ! […] Vous qui vivez maintenant plus près de lui, aimez encore votre ami d’exil et priez pour lui.
Nous en sommes venus à mieux aimer l’esprit que l’emploi qui s’en fait, et l’écrivain que la vérité. […] Les mêmes qualités, un charme particulier de douceur et d’onction, font aimer les écrits de Nicole, cette autre plume de Port-Royal, et, comme l’appelle Bayle, une des plus belles plumes de l’Europe. […] Comment un livre si apprécié par Voltaire, si aimé de Mme de Sévigné, n’est-il pas plus populaire ? […] N’ai-je pas été d’accord avec ce doux maître, qu’il est injuste de vouloir être aimé ? […] Plus tard, à mesure qu’on avance dans la vie, on aime de plus en plus les vérités familières qui se présentent avec un air naturel, et l’on préfère les auteurs qui ne sont que des gens de bien faisant voir leurs sentiments, aux écrivains qui étalent leur dextérité.
Il aime la nature comme il aime une longue course et un bain rafraîchissant au bout de cette course. […] Un des vétérans les plus honorés et les plus aimés de l’école romantique, M. […] Ils aiment, et voilà tout. […] Aimez-vous la danse et le chant, vous pouvez vous en donner à cœur joie. […] Il aime sa Lydia, comme sa nature le rendait capable de l’aimer, c’est-à-dire avec trop d’indulgence et de familiarité.
Elle est, « comme un agneau », aimée, aimante, sans orgueil, ni vanité, ni rancune, timide, toujours humble. […] Lovelace hait Clarisse encore plus qu’il ne l’aime. […] Nous aimons l’art, et vous n’en avez guère ; nous souhaitons qu’on nous plaise, et vous n’y songez pas. […] Vous ne savez pas l’aimer, et votre punition est que vous ne pouvez pas la voir. […] Celui qui aime la nature tout expansive et abondante chasse loin de lui, comme des ennemis, la solennité, la tristesse et la pruderie des puritains.
Il convient pourtant qu’il n’est pas inutile de l’être quelquefois ; car il faut avoir la tête bien grosse quand on a éprouvé une perte en un lieu pour ne pas y pourvoir lorsqu’on se retrouve exposé au même hasard ; c’est le cas de se faire sage par sa perte : « Mais je me suis bien trouvé, ajoute-t-il, de ne l’avoir pas été, et aime mieux m’être fait avisé aux dépens d’autrui qu’aux miens. » Pour un personnage tout d’action et si homme de main, il est à remarquer comme il aime les préceptes, les sentences, et à moraliser sur la guerre ; il le fait en un style vif, énergique, imaginatif, gai parfois et qui sourit : oh ! […] Dès le premier instant qu’il eut à commander à d’autres, dès qu’il eut à porter enseigne, dit-il, il voulut savoir ce qui est du devoir de celui qui commande, et se faire sage par l’exemple des fautes d’autrui : « Premièrement j’appris à me chasser du jeu, du vin et de l’avarice, connaissant bien que tous capitaines qui seraient de cette complexion n’étaient pas pour parvenir à être grands hommes. » Il développe ces trois chefs, et particulièrement, et avec une verve singulière, les inconvénients de l’avarice en un capitaine : « Car si vous vous laissez dominer à l’avarice, vous n’aurez jamais auprès de vous soldat qui vaille, car tous les bons hommes vous fuiront, disant que vous aimez plus un écu qu’un vaillant homme… » Il ne veut pas qu’un homme de guerre, pareil à un citadin ménager, songe toujours à l’avenir et à ce qu’il deviendra en cas de malheur ; le guerrier est enfant de l’État et du prince, et il pose en maxime « qu’à un homme de bien et vaillant, jamais rien ne manque. » — Après ces trois vices qui sont à éviter à tout prix, car ils sont ennemis de l’honneur, il en touche plus rapidement un quatrième dans lequel, sans raffiner sur les sentiments, il conseille du moins toute modération et sobriété : C’est l’amour des femmes : ne vous y engagez pas, cela est du tout contraire à un bon cœur. […] Pourtant, comme il est un guerrier de l’époque intermédiaire, il le faut voir tel qu’il se peint à nous lui-même, une hallebarde à la main dans la mêlée ; c’était son arme ordinaire de combat. — Ou comme il le dit encore d’un air de fête : « J’ai toujours aimé à jouer de ce bâton. » La première bonne occasion où il se trouve commander n’étant qu’enseigne, et où il commence à marquer sa réputation auprès de ses camarades et de ses chefs, est sur la frontière d’Espagne, du côté de Saint-Jean-de-Luz (1523). […] je ne vous avais pas toujours si bien traités et tant aimés pour m’abandonner en un si grand besoin. » En même temps qu’il a de ces reproches d’un accent presque affectueux envers les siens, Montluc était moins tendre pour les ennemis.
Dans les lettres de cette date à Mme de Brinon, Mme de Maintenon entre dans les plus minutieux détails d’économie ; elle envoie du beurre, quelque argent chaque mois : « J’ai des tabliers pour elles, mais je veux leur donner moi-même, et voir si elles ont du potage raisonnablement, car je vous dirai librement que je ne leur ai jamais vu la moitié de ce qu’il leur en faut, et que j’ai quelque soupçon qu’elles meurent de faim. » Depuis qu’elle est gratifiée des bienfaits du roi, elle ne songe qu’à les faire retomber sur celles qui sont pauvres comme elle l’a été ; mais elle n’aime pas à demander, elle pense qu’il faut apprendre à se suffire. […] Cela bien entendu, elle veut le vrai dans l’éducation dès le bas âge : « Point de contes aux enfants, point en faire accroire ; leur donner les choses pour ce qu’elles sont. » — « Ne leur faire jamais d’histoires dont il faille les désabuser quand elles ont de la raison, mais leur donner le vrai comme vrai, le faux comme faux. » — « Il faut parler à une fille de sept ans aussi raisonnablement qu’à une de vingt ans. » — « Il faut entrer dans les divertissements des enfants, mais il ne faut jamais s’accommoder à eux par un langage enfantin, ni par des manières puériles ; on doit, au contraire, les élever à soi en leur parlant toujours raisonnablement ; en un mot, on ne peut être ni trop ni trop tôt raisonnable. » — « Il n’y a que les moyens raisonnables qui réussissent. » — Elle le redit en cent façons : « Il ne leur faut donner que ce qui leur sera toujours bon, religion, raison, vérité. » Dans un siècle où sa jeunesse pauvre et souriante avait vu se jouer tant de folies, tant de passions et d’aventures, suivies d’éclatants désastres et de repentirs ; où les romans des Scudéry avaient occupé tous les loisirs et raffiné les sentiments, où les héros chevaleresques de Corneille avaient monté bien des têtes ; où les plus ravissantes beautés avaient fait leur idéal des guerres civiles, et où les plus sages rêvaient un parfait amour ; dans cet âge des Longueville, des La Vallière et des La Fayette (celle-ci, la plus raisonnable de toutes, créant sa Princesse de Clèves), Mme de Maintenon avait constamment résisté à ces embellissements de la vérité et à ces enchantements de la vie ; elle avait gardé son cœur net, sa raison saine, ou elle l’avait aussitôt purgée des influences passagères : il ne s’était point logé dans cette tête excellente un coin de roman. « Il faut leur apprendre à aimer raisonnablement, disait-elle de ses filles adoptives, comme on leur apprend autre chose. » Et de plus, cette ancienne amie de Ninon savait le mal et la corruption facile de la nature ; elle avait vu de bien près, dans un temps, ce qu’elle n’avait point partagé ; ou si elle avait été effleurée un moment, peu nous importe, elle n’en était restée que mieux avertie et plus sévère. […] C’est pendant sa maladie et sa convalescence en 1686, que le roi entre de plus en plus dans l’idée de Saint-Cyr, qu’il la prend à cœur, l’adopte tout entière et se l’approprie magnifiquement : Dieu sait, écrivait Mme de Maintenon en octobre 1686 à l’une des dames de Saint-Louis, Dieu sait que je n’ai jamais pensé à faire un aussi grand établissement que le vôtre, et que je n’avais point d’autres vues que de m’occuper de quelques bonnes œuvres pendant ma vie, ne me croyant point obligée à rien de plus, et ne trouvant que trop de maisons religieuses ; moins j’ai eu de part à ce dessein et plus j’y reconnais la volonté de Dieu, ce qui me le fait beaucoup plus aimer que si c’était mon ouvrage : il a conduit le roi à cette fondation, comme vous l’avez su, lui qui, de son côté, ne veut plus souffrir de nouveaux, établissements. […] Il a corrigé le chœur de Saint-Cyr et plusieurs autres endroits… — Quelques années après (1698), quand l’établissement fut en pleine prospérité, les charges s’étant trouvées supérieures aux revenus, il fut question de diminuer le nombre des demoiselles : mais le roi n’y voulut point entendre ; il n’aimait point à resserrer les idées qu’il avait une fois conçues et mises à exécution ; il maintint donc expressément le nombre de deux cent cinquante demoiselles qu’il voulait faire élever dans la maison, et pour qu’on les pût garder jusqu’à vingt ans, c’est-à-dire dans les années les plus périlleuses, il ajouta à la dotation première trente mille livres de revenu. […] J’aime mieux en emprunter un parmi nos voisins.
Maxime du Camp, avec moins de fini, se rattache par le côté de Théophile Gautier à l’école de Victor Hugo ; il aime et cultive la description pour elle-même, il la cherche ; un de ses premiers soins a été de visiter cet Orient que le maître n’avait chanté que de loin et sur la foi du rêve. […] celui-là, nous l’avons bien aimé ! […] Ici nous retrouvons des paroles connues et qui ont été proclamées il y a plus de vingt-cinq ans. — L’âge d’or, qu’on place toujours en arrière, est devant nous. — Aimons, travaillons, fécondons l’imprescriptible progrès. — La littérature, dans l’avenir, aura à formuler définitivement le dogme nouveau. — Tout cela encore est bien vague, bien peu défini ; Déroulant devant nous le mouvement scientifique et le mouvement industriel de notre temps, l’auteur essaie de préciser ce rôle qu’il assigne au littérateur, au poète, et qui est, selon lui, d’expliquer la science, de la revêtir de charme et de lumière : « Il se passe parfois, dit-il, de planète à planète, de fer à aimant, de mercure à mercure, de chlore à hydrogène, des romans extraordinaires qu’on dissimule pudiquement derrière des chiffres et des A+B. » L’auteur voudrait que le poète expliquât et rendît sensibles à chacun de nous ces mystères. […] » Si la bonne Aimée causait avec des militaires, j’aimerais autant qu’on ne le dît pas dans une élégie en son honneur. […] Aussi j’aime à dormir sans bandeaux et sans voiles, Loin de toute maison, aux clartés des étoiles, Sous l’azur infini de quelque ciel lointain.
Dans la dernière année et quand la maladie déjà mortelle retenait Bossuet à Paris, il l’y venait voir, passait avec lui plusieurs heures, lui lisant l’Évangile et lui en parlant : entretiens doux et graves, élevés et purs, entre ces deux chrétiens si à l’unisson ; c’est là ce qu’on aimerait à entendre et à connaître ; mais Le Dieu ne nous donne que le titre de l’entretien. […] On aime à rejoindre ces détails sur le Bossuet de la fin et sur son bel organe, éclatant une dernière fois, avec ce que le même biographe nous a dit de lui dans sa jeunesse, quand il nous le montre affectionné à chanter l’office de l’Église et les psaumes : « Il avait la voix douce, sonore, flexible, mais aussi ferme et mâle. […] On aime, vieux, ce qu’on aimait enfant ; on y revient et l’on s’y reprend d’une plus vive étreinte39. Bossuet, durant toute sa vie, avait lu et aimé les psaumes ; mais ce premier temps où, chanoine, âgé de treize ans à peine, il les chantait de sa voix pure et peut-être avec larmes aux offices du chœur à Metz, lui revenait plus tendrement dans ses derniers jours.
Biot la portait encore sur bien des objets, astronomie, physique, chimie, agriculture, et les plaisirs actifs, chasse, pêche, nage ; vieux, il disait en souriant : « J’ai aimé dans ma vie bien des choses. » Faudrait-il en conclure qu’il s’est trop dispersé, et qu’il ait eu le droit de se dire à lui-même comme La Fontaine : J’irais plus haut peut-être au Temple de Mémoire, Si dans un genre seul j’avais usé mes jours… ? […] Il n’aimait pas cela. […] Biot, visiblement ému, le saisit par le bras et lui dit : « Mon cher enfant, j’ai tant aimé les sciences dans ma vie que cela me fait battre le cœur. » C’est en vertu de l’observation de M. […] Les premières fois que j’eus l’honneur de causer avec lui, je crus m’apercevoir que, si on le laissait faire, il aimait assez la méthode de Socrate, c’est-à-dire à vous supposer quelque idée fausse que souvent vous n’aviez pas, et à se donner le plaisir de la réfuter en se faisant naturellement la belle part, — un peu comme Béranger. […] Poinsot (que par parenthèse il n’aimait pas), M.