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1015. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

On voit transpercer ces sentiments dans une longue lettre qu’il publia à cette époque. […] Il y a loin de ce découragement à l’époque où Pétrarque était le complice patriotique de Rienzi, mais il n’est pas donné aux regrets de réveiller les nations assoupies dans la servitude. […] Son ami Boccace, converti par une vision à une vie chrétienne et sévère, lui rendit à cette époque une seconde visite à Venise. […] Un vers de Lucain a donné lieu à cette erreur, en joignant le Timave à l’Apono dans les monts Euganées. » XX C’est à peu près à cette époque qu’il adressa au nouveau pape Urbain V, pontife enfin selon son cœur, une lettre véritablement cicéronienne pour le décider à rétablir le siège du pontificat à Rome. […] « J’ai bâti, écrit-il à cette époque à un de ses amis, une maison petite et décente sur les collines euganéennes, où je passe la fin de mes jours, préférant à tout la liberté. » Il n’écrivait plus que des sonnets à Laure, des hymnes adressés au Ciel et quelques lettres à Boccace, son ami, à Florence.

1016. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre (2e partie) » pp. 5-80

Personne ne sait à quelle époque remontent, je ne dis pas les premières ébauches de la société, mais les grandes institutions, les connaissances profondes et les monuments les plus magnifiques de l’industrie et de la puissance humaines. […] Cette époque touche celle des Étrusques, dont les arts et la puissance vont se perdre dans l’antiquité, qu’Hésiode appelait grands et illustres, neuf siècles avant Jésus-Christ, qui envoyèrent des colonies en Grèce et dans nombre d’îles, plusieurs siècles avant la guerre de Troie. […] Songez que les pyramides d’Égypte, rigoureusement orientées, précèdent toutes les époques certaines de l’histoire ; que les arts sont des frères qui ne peuvent vivre et briller qu’ensemble ; que la nation qui a pu créer des couleurs capables de résister à l’action libre de l’air pendant trente siècles, soulever à une hauteur de six cents pieds des masses qui braveraient toute notre mécanique, sculpter sur le granit des oiseaux dont un voyageur moderne a pu reconnaître toutes les espèces ; que cette nation, dis-je, était nécessairement tout aussi éminente dans les autres arts, et savait même nécessairement une foule de choses que nous ne savons pas. […] « Quinze siècles avaient passé sur la ville sainte lorsque le génie chrétien, jusqu’à la fin vainqueur du paganisme, osa porter le Panthéon dans les airs, pour n’en faire que la couronne de son temple fameux, le centre de l’unité catholique, le chef-d’œuvre de l’art humain, et la plus belle demeure terrestre de celui qui a bien voulu demeurer avec nous, plein d’amour et de vérité. » XI Voilà tout ce livre du Pape, œuvre très savante, quoique très décousue, inférieure aux Soirées de Pétersbourg, et qui cependant produisit plus de gloire à l’écrivain, parce qu’elle fut adoptée à son apparition par les Chateaubriand, les Bonald, les Lamennais, hommes éclatants de la restauration théocratique en France à cette époque. […] Mais ce n’est pas moins une très grande calamité publique qu’un bonhomme dans une place et à une époque qui exigeraient un grand homme ! 

1017. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIIe entretien. Madame de Staël. Suite. »

Ceux qui avaient été proscrits le 18 fructidor prétendaient qu’à cette époque j’avais eu le tort de recommander à Barras M. de Talleyrand pour le ministère des affaires étrangères, et ils passaient leur vie chez ce même M. de Talleyrand qu’ils m’accusaient d’avoir servi. […] Toute cette époque de la vie de madame de Staël fut pleine d’oscillations féminines qu’on ne peut justifier ; on y sent la mauvaise influence d’un homme qui faisait fléchir son caractère sous ses propres versatilités. […] Le siècle n’avait point de poëte français en vers, point d’orateur en action ; il adopta cette femme comme la poésie et l’éloquence de l’époque. […] Peu d’écrivains de cette époque se firent scrupule d’adorer au moins d’une génuflexion et d’un enthousiasme le maître de la force. […] Elle ne fut pas un débris à cette époque, elle fut une puissance ; son salon, où se groupaient pour l’entendre tous les hommes éminents de toutes les opinions et de toutes les nations réunies par la coalition de Paris, devint la tribune du monde.

1018. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VI »

Le son des trompettes guidait les guerriers aux combats : le son des trompettes, rythme, mélodie, timbre, devint expressif des émotions guerrières ; quand fut institué le rite chrétien, les mélodies religieuses intimement liées au sens des paroles qu’elles accompagnaient, devinrent expressives des émotions suggérées par ces paroles ; les chansons populaires au moyen-âge devinrent également des motifs d’expression musicale ; et le langage de la musique s’accroissait de formes expressives de sentimentalités ; ce fut l’époque du moyen-âge finissant où s’épanouissait cet art nouveau si riche de promesses, de promesses hélas chûtées ! […] Parmi les œuvres glorieuses de Wagner — je nomme ici la Tétralogie, Tristan et les Maîtres, les pièces symphoniques, enfin le Parsifal — m’apparaît une marche en avant, un progrès continu que je définirai ainsi : D’abord l’œuvre théâtrale, c’est-à-dire l’œuvre amalgamant tous les modes d’expression sous l’unité du drame théâtral ; l’œuvre théâtrale, une action morale symbolisée sous une action légendaire et s’exprimant par le complexe moyen de littératures, de musiques et de cette très grossière et primitive forme des arts plastiques, le trompe-l’œil des décors et de personnages animés (époque des écrits théoriques de 1849 et 1852) ; Puis une transition, l’œuvre théâtrale où prédomine largement un mode d’expression aux dépens des autres ; le drame moral plus net symbolisé par un drame légendaire atténué ; la musique accaparant toute importance, la littérature s’effaçant, les décorations se faisant inutiles ; le drame moral devenant drame de musique ; Enfin l’œuvre musicale, sous la glose des additions littéraires et décoratives ; l’œuvre de pure musique, où le texte littéraire et le spectacle n’ont plus d’autre valeur que d’être les commentaires à l’intelligence des musiques ; l’action purement morale, sous le symbole quelconque d’une fable (époque initiée au Beethoven af et accomplie à Art et Religion). […] Mais échauffé des plus nobles chimères, il a rêvé un art complexe de toutes les puissances de l’art ; j’ai dit que c’était l’époque de l’Œuvre d’art de l’avenir, de Drame et Opéra ; le jeune artiste, avant de comprendre que l’œuvre de Beethoven réside majeurement en ses quatuors de cordes, a vu dans le hasard d’un chœur concluant la neuvième symphonie le commencement d’un art nouveau ; il a calculé, le jeune artiste, que l’émotion de ses musiques se doublerait de l’émotion de ses poèmes et se triplerait de l’émotion de ses spectacles ; et — ne serait-ce pas le profond de la vérité ? […] X Le Gral fut mis par les anges à la garde de Titurel ; Titurel, afin de le défendre, ordonna de bons chevaliers dans le domaine du Mont-Salvat ; Amfortas, fils unique de Titurel, hérita le royaume de son père devenu vieillard ; et cela était en Espagne, de l’époque où s’y heurtaient Chrétiens et Infidèles.

1019. (1856) Cours familier de littérature. I « IIIe entretien. Philosophie et littérature de l’Inde primitive » pp. 161-239

Mais avant nous devons dire ce que nous pensons de l’origine des théologies, des religions, des morales, des philosophies sur la terre, à ces époques antéhistoriques de l’humanité. […] Nous aimerions mieux rêver, imaginer et croire que l’homme, à cette époque, doué d’une liberté mystérieuse sans laquelle il n’y aurait rien d’actif et de méritoire en lui, aurait abusé de cette liberté morale pour pécher contre son Créateur et contre sa destinée ; que cette faute ou cette déchéance successive aurait eu pour conséquence une dégradation et une expiation de l’espèce humaine ; que les ténèbres de l’intelligence se seraient épaissies alors sur ses yeux, en ne lui laissant entrevoir pendant longtemps que des lueurs et des mémoires confuses de son état primitif. […] L’éternel effort de nos arts modernes est de remonter à ces types du beau dans l’architecture et dans la sculpture ; et comme les arts prennent ordinairement leur niveau dans une même époque, tout fait conjecturer que les arts de l’esprit égalaient en perfection ceux dont la matière plus solide nous a conservé les chefs-d’œuvre. […] Que dit cette philosophie de la douleur dans tous ces pays, dans toutes ces époques, dans toutes ces théologies, dans toutes ces langues ? […] Une telle littérature atteste, par son existence à cette époque reculée du monde, une de ces deux choses : ou bien une révélation primitive dont les perfections étaient encore présentes à la mémoire de l’homme, ou bien une maturité consommée d’âge et de raison qui portait déjà ses fruits de sagesse et de sainteté dans la philosophie et dans la poésie de la prodigieuse vieillesse d’une telle race humaine.

1020. (1927) André Gide pp. 8-126

De sa poétique, assez décadente, un précepte est à retenir, entre beaucoup d’autres qui portent seulement la marque de l’époque. […] André Gide et ne recommencerai pas cette fois l’éloge de ce talent délicat et subtil, l’un des plus séduisants de notre époque. […] Mais je ne comprends pas comment Gide peut n’avoir aucune préférence pour ce qui concerne son pays, à l’époque contemporaine. […] Un drame de Shakespeare, une tragédie de Corneille ou de Racine, ressemble à tout ce qui se faisait à l’époque, et le Panthéon à tous les temples grecs. […] Il reconnaît qu’à cette époque il adorait la poésie.

1021. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Mais quelque diversité de traits que l’on rencontre en lui, qui lui font une physionomie si complexe, et dont la complexité même n’est que plus expressive de la confusion des idées de l’époque, un de ces traits domine, résume et se subordonne tous les autres, qui est celui que nous essayons précisément de mettre en évidence. […] Un rapprochement inconscient s’opère, dont l’effet, s’il est d’une part d’abolir en nous le sens historique, — je veux dire le sens de la diversité des époques, — est d’autre part de nous enseigner l’identité foncière de la nature humaine. […] Les auteurs et les œuvres Première Époque. […] Deuxième Époque. […] Troisième Époque.

1022. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome I

Les discussions scolastiques ne sont plus de notre époque, au moins en physiologie. […] La quantité de sucre correspondant à la même époque sera plus considérable que dans l’état normal. […] L’époque du rut ne m’a pas paru non plus exercer une influence évidente sur la fonction glycogénique du foie. […] Il s’y produit constamment dans le foie depuis une certaine époque de la vie intra-utérine jusqu’à la mort, et il doit avoir des usages importants à remplir. […] À cette époque, le liquide de l’amnios subit probablement une espèce de fermentation visqueuse, car il devient visqueux en même temps que le sucre disparaît.

1023. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

— Boileau. — Réaction de l’esprit bourgeois contre la littérature aristocratique. — Les Satires et la première époque de la vie de Boileau. — Formation de l’idéal classique. — L’imitation de la nature. — L’autorité de la raison. — L’imitation des anciens, — Du fondement de l’imitation des anciens dans la doctrine de Boileau. — La religion de la forme. — Troisième époque de la critique, ou les règles fondées en nature et en raison. […] Rien de plus naturel si cette indépendance d’esprit, aidée du goût de la raillerie, commence par l’induire en satire : c’est la première époque de sa vie littéraire ; étendez-la de 1660 à 1670 environ. […] Cette division se rapporte également aux deux époques du monde, celle qui a précédé l’établissement du christianisme et celle qui l’a suivi. […] Ce n’est pas tout encore, et significative ou caractéristique de toute une famille d’esprits, l’œuvre littéraire est, ou peut être expressive de toute une époque. […] Dans la production successive et dans le développement naturel de cette œuvre, il me semble qu’on peut distinguer cinq époques, sur la première desquelles nous pouvons aujourd’hui passer assez rapidement.

1024. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

Dans Homère, la naïve brutalité des mœurs indique assez une époque primitive. […] Même aux époques les plus savantes, ce qu’on appelle couleur locale n’est jamais que très relatif. […] Chacun d’eux exprime toute une époque. […] C’est à l’époque où commença la lutte des Grecs contre les Perses que l’art parvint rapidement à la perfection. […] De sorte qu’à cette époque, le réalisme, supposé qu’on eût connu le mot et la chose, eût été encore de l’idéal.

1025. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Millevoye, Charles (1782-1816) »

[ Histoire de la poésie à l’époque impériale (1844).]

1026. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Redonnel, Paul (1860-1935) »

Louis-Xavier de Ricard De poète plus moderne que Paul Redonnel il n’y en a certes pas, — et pourtant il est en même temps la survivance, en ses qualités intimes d’artiste, des troubadours de la grande époque — supposez

1027. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Schuré, Édouard (1841-1929) »

De même que « Richard Wagner n’est pas entré dans la légende en savant ou en curieux, mais en créateur », de même que Richard Wagner, « rejetant les aventures sans fin et tous les accessoires du roman, se place du premier bond au centre même du mythe et de ce point générateur recrée de fond en comble les caractères et l’organisme de son drame », de même enfin « qu’en restituant au mythe sa grandeur primitive, son coloris original, il sait y approprier les passions et les sentiments qui sont les nôtres, parce qu’ils sont éternels, et subordonner le tout à une idée philosophique », — de même Édouard Schuré dégage d’une époque historique ses éléments essentiels, lui recrée une émouvante jeunesse, et la fixe en cet état dans l’imagination humaine.

1028. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1823 »

Convaincu que tout écrivain, dans quelque sphère que s’exerce son esprit, doit avoir pour objet principal d’être utile, et espérant qu’une intention honorable lui ferait pardonner la témérité de ses essais, il a tenté de solenniser quelques-uns de ceux des principaux souvenirs de notre époque qui peuvent être des leçons pour les sociétés futures.

1029. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre I. Des Livres qui traitent de la Chronologie & de la maniere d’écrire l’Histoire. » pp. 2-4

., qui contiennent les époques de l’Histoire sacrée & profane, ecclésiastique & civile jusqu’à cette année.

1030. (1860) Ceci n’est pas un livre « À M. Henri Tolra » pp. 1-4

Henri Tolra Mon ami, Les philosophes et les almanachs de statistique sont d’accord « qu’on vit très vite à notre époque ».

1031. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre II. Trois espèces de langues et de caractères » pp. 296-298

Lorsque l’esprit humain s’habitua à abstraire les formes et les propriétés des sujets, ces universaux poétiques, ces genres créés par l’imagination (generi fantastici), firent place à ceux que la raison créa (generi intelligibili), c’est alors que vinrent les philosophes ; et plus tard encore, les auteurs de la nouvelle comédie, dont l’époque est pour la Grèce celle de la plus haute civilisation, prirent des philosophes l’idée de ces derniers genres et les personnifièrent dans leurs comédies.

1032. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — II. Duclos historien » pp. 224-245

L’abbé Le Grand est abondant sur cette époque première et antérieure de Louis XI. […] Duclos, dans la suite de son récit, ne quitte Saint-Simon, ou plutôt n’est abandonné de lui qu’à la date de 1723, à la mort du duc d’Orléans et à l’époque du ministère de M. le Duc. […] Entre ces érudits modestes qui s’ensevelissent dans les fondations d’un vieux règne et dans les monuments d’un siècle où ils deviennent ensuite d’indispensables guides (comme l’abbé Le Grand), entre ces peintres éclatants et fougueux qui mettent toute leur époque en pleine lumière et qui la retournent plus vivante à tous les regards (comme Saint-Simon), Duclos n’a suivi qu’une voie moyenne, conforme sans doute à la nature de son esprit, mais qu’il n’a rien fait pour élargir, pour décorer chemin faisant, pour marquer fortement à son empreinte et diriger vers quelque but immortel ou simplement durable : l’abbé Le Grand le surpasse dans un sens, comme dans l’autre Saint-Simon le couvre et l’efface, et comme le domine Montesquieu.

1033. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Revenant à ces grands esprits de l’Antiquité qu’on cite toujours et qu’on oppose à la prétendue stérilité des âges suivants, il estime qu’aucune époque n’en est déshéritée, que seulement la forme de ces esprits varie dans l’histoire et qu’ils se produisent avec plus ou moins de bonheur et de dégagement selon les temps et les conjonctures. […] À chaque époque il y a donc de nouvelles façons de penser possibles et nécessaires, et toutes ne sont pas épuisées, pas plus que les airs que la nature trouve à varier à l’infini dans le composé des physionomies et des visages. Telles sont quelques-unes des idées vraiment originales et à la Fontenelle, que Marivaux énonce avec autant de netteté que de hardiesse : à quoi il faut ajouter cette remarque très fine qu’il n’omettait pas, et qu’il aurait pu s’appliquer à lui-même et à ses amis, à savoir que le goût d’une époque n’est pas toujours en raison du nombre des idées qui y circulent ou qui y fermentent, et qu’il y a des temps où la critique et le goût peuvent s’altérer ou disparaître, « pendant que le fonds de l’esprit humain va toujours croissant parmi les hommes ».

1034. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Souvenirs militaires et intimes du général vicomte de Pelleport, publiés par son fils. » pp. 324-345

C’est ce mérite de la particularité et d’une sincérité parfaite que j’ai trouvé dans les deux volumes que je viens de lire, et qui me les a rendus intéressants après tant d’autres qui se sont publiés et qui se publieront encore sur cette grande époque de l’Empire. […] Personnellement il n’était pas ennemi de la Révolution, mais il en sentait les horreurs ou les ridicules, il en répudiait les crimes, et à propos de l’attentat du 21 janvier, il s’attache à constater les sentiments de réprobation générale que cet événement fit éclater dans tout le Midi, au sein des familles honnêtes, qui ne demandaient à la Révolution que l’égalité politique et la réforme de graves abus : Si cette réflexion, dit-il, passe un jour ou l’autre sous les yeux de quelques ardents, ils ne voudront peut-être pas croire que tel était l’état des esprits à cette époque. […] Il faut se reporter à cette époque de camaraderie pour bien juger l’ascendant de cet homme sur l’esprit des officiers qui se trouvaient sous ses ordres.

1035. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La femme au XVIIIe siècle, par MM. Edmond et Jules de Goncourt. » pp. 2-30

Les jeunes femmes de la fin du règne de Louis XIV, et qui entraient dans le monde en même temps que la duchesse de Bourgogne ou un peu auparavant (comme Mme de Caylus), ne sont pas exactement les femmes de la Régence ; celles-ci, écloses en pleine licence et comme vouées à l’orgie (Mme de Parabère, Mme de Prie), ne sont pas tout à fait celles dont l’avènement mondain retarde et se rapporte à l’époque du mariage de Louis XV et à l’arrivée en France de Marie Leczinska. […] Puis il y a l’époque Louis XVI, bien marquée et tranchée, Marie-Antoinette donnant le ton ; aux femmes de cette nouvelle génération, à celles qui règnent ou fleurissent pendant ces quinze premières années brillantes, et dont la duchesse de Lauzun est le parfait modèle, succèdent les femmes de la Révolution, Mme de Staël, Mme Roland, Mme de Condorcet, tant d’autres ; puis, l’on a les beautés du Directoire. […] Mais parmi la centaine de portraits de tout genre tracés ou esquissés par MM. de Goncourt dans ce volume si plein, il en est un d’un caractère plus sérieux, plus digne, et qu’ils ont très-bien senti, celui de la femme qui peut-être résume le plus complètement en elle l’esprit et le ton du xviiie  siècle classique, dans tout ce qui tient à l’ancien régime et qui périt avec cette société, à la veille de 89 : je veux parler de la maréchale de Luxembourg, cet arbitre souverain de l’usage et de la politesse, cette Mme de Maintenon, moins prude et moins confinée à son cercle que l’autre fée, mais qui, comme elle, tient la baguette et marque nettement la fin d’une époque.

1036. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Essai de critique naturelle, par M. Émile Deschanel. »

Bien parler a été de tout temps un don assez généralement dispensé aux hommes, et les orateurs, chez aucun peuple ni à aucune époque, n’ont jamais manqué : écrire était chose plus réservée, plus redoutée et jugée vraiment difficile. […] Cette objection écartée, qu’y a-t-il de plus légitime que de profiter des notions qu’on a sous la main pour sortir définitivement d’une certaine admiration trop textuelle à la fois et trop abstraite, et pour ne pas se contenter même d’une certaine description générale d’un siècle et d’une époque, mais pour serrer de plus près, — d’aussi près que possible, — l’analyse des caractères d’auteurs aussi bien que celle des productions ? […] encore une fois, sans doute, il est certaines beautés naturelles, simples, éternelles, de ces grands peintres du cœur humain, qui ont été senties de tout temps ; mais, dans les intervalles et pour l’ensemble de l’œuvre, que de restrictions, que de méprises, que de blâmes ou d’admirations à côté, avant que la critique historique fût venue pour éclairer les époques, les mœurs, le procédé de composition et de formation, tout le fond et les alentours de la société au sein de laquelle se produisirent ces grands monuments littéraires !

1037. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

Le chapitre IV de l’introduction (Coup d’œil sur la constitution des différentes armées européennes à l’époque de la déclaration de guerre en 1792) est tel que Jomini seul pouvait l’écrire. […] Et quand on songe qu’une telle histoire est ainsi continuée d’un cours égal et plein à travers la Convention et le Directoire jusques et y compris l’époque du Consulat et les victoires de Marengo et de Hohenlinden, on appréciera tout ce que Jomini a préparé de matière toute digérée et de besogne, relativement facile, aux historiens de la Révolution qui ont succédé. […] Étudier sans doute en elle-même une physionomie militaire distinguée et singulière en son genre, un personnage plus cité que connu ; traverser avec lui la grande époque, la traverser au cœur par une ligne directe, rapide et brisée, par un tracé imprévu et fécond en perspectives ; recueillir chemin faisant des traits de lumière sur quelques-uns des grands faits d’armes et des événements historiques auxquels il avait pris part ou assisté.

1038. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

Ce personnage, alors inconnu et bien oublié de nos jours, qui s’appelait lui-même à travers le désert bruyant de son époque le Robinson de la spiritualité, que M. de Maistre a nommé le plus aimable et le plus élégant des théosophes, créature de prédilection véritablement faite pour aimer, pour croire et pour prier, Saint-Martin s’écriait, en s’adressant de bien loin aux hommes de son temps, dans ce langage fluide et comme imprégné d’ambroisie, qui est le sien : « Non, homme, objet cher et sacré pour mon cœur, je ne craindrai point de t’avoir abusé en te peignant ta destinée sous des couleurs si consolantes. […] Aux soi-disant poëtes de son époque qui dépensaient leurs rimes sur des descriptions, des tragédies ou des épopées, toutes de convention et d’artifice, Saint-Martin fait honte de ce matérialisme de l’art : Mais voyez à quel point va votre inconséquence ! […] Après les Cent-Jours, Lamartine ne reprit point de service : une passion partagée, dont il a éternisé le céleste objet sous le nom d’Elvire, semble l’avoir occupé tout entier à cette époque.

1039. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Le parti dit royaliste arrivait aux affaires dès cette époque ; Hugo jeune, non envié encore, caressé de tous, eût pu aisément se laisser porter et parvenir vite et haut. […] D’autre part, le brevet de pension était aussi arrivé à Victor Hugo vers l’époque où parut son premier volume d’Odes, et il avait attribué cette faveur royale à sa publication récente : il n’en sut que plus tard la vraie origine. […] Vers 1828, à cette époque que nous avons appelée le moment calme et sensé de la Restauration, le public avait fait de grands progrès ; l’exaspération des partis, soit lassitude, soit sagesse, avait cédé à un désir infini de voir, de comprendre et de juger.

1040. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

Je conçois que la Comédie-Française, à cette époque, n’ait pas fait les mêmes frais pour s’acquérir M. […] Scribe a toujours faits de l’histoire à la scène, lui donnent un trait d’exception de plus entre les autres auteurs plus ou moins dramatiques du jour, dont la prétention et la marotte sont d’observer la couleur dite locale, et de rester fidèles à l’époque. […] Ainsi donc, que la reine Anne, qui monta sur le trône à trente-huit ans, en ait eu quarante-quatre ou quarante-cinq à l’époque où Mlle Plessy nous la rend si flattée et si jolie ; que son mari le prince George de Danemark (effectivement très-nul) soit réputé n’avoir jamais existé ; que la duchesse de Marlborough se trouve incriminée à tort sur le chapitre de la chasteté qu’elle eut toujours irréprochable, peu importe à M.

1041. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Pierre Corneille »

A cette époque unique dans la vie, le génie, qui, depuis quelque temps adulte et viril, habitait avec inquiétude, avec tristesse, en sa conscience, et qui avait peine à s’empêcher d’éclater, est tout d’un coup tiré de lui-même au bruit des acclamations, et s’épanouit à l’aurore d’un triomphe. […] Depuis 1620, époque où Corneille vint pour la première fois à Paris, jusqu’en 1636, où il fit représenter le Cid, il acheva réellement son éducation littéraire, qui n’avait été qu’ébauchée en province. […] Vers la même époque, en Angleterre, les auteurs n’étaient pas en condition meilleure et on trouve là-dessus de curieux détails dans les Vies des poëtes par Johnson et les Mémoires de Samuel Pepys.

1042. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. Joubert »

Joubert, à cette époque, suivait avec ardeur ce mouvement aventureux d’innovation que prêchaient Le Tourneur par ses préfaces, Mercier par ses brochures. […] Mal connu par ceux-là, méconnu par ceux-ci, il met à notre décharge, dans ses balances équitables, les superstitions et les incrédulités des époques où nous vivons. […] « Quelque aménité doit se trouver même dans la critique ; si elle en manque absolument, elle n’est plus littéraire… Où il n’y a aucune délicatesse, il n’y a point de littérature. » A aucune en particulier, mais à toutes en général, ce qui ne peut, certes, blesser personne, dans ce sexe plus ou moins émancipé : « Il est un besoin d’admirer, ordinaire à certaines femmes dans les siècles lettrés, et qui est une altération du besoin d’aimer. » Et ces pensées qui semblent dater de ce matin, étaient écrites il y a quinze ans au moins, avant 1824, époque où mourait M. 

1043. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) » pp. 129-176

Il représente les masses et non les supériorités de l’époque. […] Ses crimes à lui avaient au moins une certaine intellectualité qui les rendait non pas moins odieux, mais plus intelligibles ; ils avaient pour but une idée implacable, une idée fausse, ce qu’on appelle une utopie, mais enfin une idée impersonnelle, l’idée de tous les fanatiques devenus bourreaux à toutes les époques de l’histoire des rénovations accomplies ou tentées sur la terre. […] Jamais peut-être sur cette terre, à aucune époque, sauf l’ère de l’incarnation de l’idée chrétienne, un pays ne produisit, en un si court espace de temps, une pareille éruption d’idées, d’hommes, de natures, de caractères, de talents, de crimes, de vertus.

1044. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Dans ce livre était une terrible accusation : il la réservait pour l’époque où le duc de Bourgogne atteindrait à la maturité des années et s’approcherait des degrés du trône. […] « Ce livre de Fénelon, dit Bossuet, qui vivait encore à l’époque de son premier bruit, est un roman. […] Ses écrits et ses correspondances de cette époque portent tous l’empreinte de cette mélancolie qui, dans les hommes de foi, n’est que le déplacement de leurs espérances d’ici-bas, là-haut.

1045. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

Sa réputation fut assez grande, sous ce rapport, pour qu’une tradition, dont les échos, il est vrai, n’ont été recueillis que très tard, lui attribuât des scènes tout italiennes, par exemple, l’anecdote de la Lettre improvisée, qui se rapporte à l’époque où Molière résidait à Pézenas et fréquentait, dit-on, la boutique du perruquier Gély. […] M. de Molière fit un prologue en marquis ridicule qui voulait être sur le théâtre, malgré les gardes, et eut une conversation risible avec une actrice, qui fit la marquise ridicule, placée au milieu de l’assemblée. » Ainsi, non seulement les deux troupes qui se partagèrent la salle du Petit-Bourbon, à l’époque où Molière revint s’installer à Paris, avaient dans leur répertoire les mêmes œuvres, mais encore la méthode artistique des uns était fréquemment employée par les autres. […] L’École des maris fut représentée le 24 juin 1661 : elle marque une nouvelle époque dans la carrière du grand comique, celle où il est en pleine possession de son génie : désormais il fera encore plus d’un emprunt à la comédie italienne, il lui empruntera une situation, une scène, quelque moyen d’action ; il ne reproduira plus une œuvre dans son ensemble.

1046. (1890) L’avenir de la science « XIX » p. 421

Certaines personnes se plaisent à relever les traits qui, dans notre littérature et notre philosophie, rappellent la décadence grecque et romaine, et en tirent cette conclusion, que l’esprit moderne, après avoir eu (disent-elles) son époque brillante au XVIIe siècle, déchoit et va s’éteignant peu à peu. […] Ces natures effacées, formées par une sorte de moyenne proportionnelle entre les extrêmes, sont de nulle valeur à une époque d’analyse. […] Ainsi l’esprit, à ses différentes époques, est comme garni d’un assortiment divers de choses, et cela, joint aux modifications intimes de son être, fait la diversité de ses aspects.

1047. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

M. de Chamarante la mène et la ramène à la face de l’univers136. » Je remarque ici qu’en 1680, époque du premier éclat de cette insigne faveur, madame de Maintenon avait quarante-cinq ans ; et cette circonstance fixe la date inconnue d’une lettre à madame de Frontenac, rapportée dans tous les recueils. […] Elle se rapporte à l’époque du mariage de madame de Maintenon avec Louis XIV, deux ans plus tard que l’époque où nous sommes arrêtés dans ce mémoire.

1048. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Huet, évêque d’Avranches, par M. Christian Bartholmèss. (1850.) » pp. 163-186

Huet se rendait parfaitement compte qu’il était l’homme d’une époque qui finissait : Quand je suis entré dans le pays des lettres, dit-il, elles étaient encore florissantes, et plusieurs grands personnages en soutenaient la gloire. […] À cette époque, d’ailleurs, Huet n’était qu’un homme du monde, le plus savant des jeunes gentilshommes normands, mais pas autre chose. […] Il ne lui manque, pour faire le lien des deux époques, de la Renaissance et des temps modernes, pour donner la main, d’une part à Politien, et de l’autre à Voltaire, que d’avoir en son humeur tempérée cette ouverture, cette disposition accueillante aux idées nouvelles qu’eut, pour sa part, le sage et discret Fontenelle.

1049. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame Émile de Girardin. (Poésies. — Élégies. — Napoline. — Cléopâtre. — Lettres parisiennes, etc., etc.) » pp. 384-406

Elle aura jusque dans son époque la plus spirituelle et la plus consommée en connaissance du monde et en raillerie, elle aura, dis-je, de ces retours singuliers et impétueux de Jeanne d’Arc et d’amazone, qui ne seraient concevables que chez une muse restée naïve. […] Dans ce poème de Napoline, qui marque sa seconde époque (1834), elle suppose une jeune fille, une amie intime, qui se croit fille du grand homme du siècle, Napoléon, et qui l’est grâce à une faute de sa mère, et c’est bien pourquoi on l’appelle Napoline. […] Le Nil, le climat d’Égypte, le soleil d’Afrique, deviennent successivement des thèmes à des tirades plus ou moins magnifiques : mais cette vérité qui sort, qui par endroits éclate d’une époque bien comprise ou de la nature humaine vue dans tous les temps, ne la demandez pas.

1050. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits du comte Joseph de Maistre. (1851, 2 vol. in-8º.) » pp. 192-216

Il fut, sous divers titres et dans des fonctions différentes, membre du sénat de Chambéry jusqu’à l’époque de la Révolution, c’est-à-dire pendant près de vingt ans. […] Il ne compte point, pour renverser Bonaparte et son pouvoir, sur le choc armé de l’Europe, mais bien plutôt sur la France et sur l’opinion du dedans : « Tant que les Français supporteront Bonaparte, l’Europe sera forcée de le supporter. » Plus il examine ce qui se passe, plus il se persuade qu’il assiste à une des grandes époques du genre humain. […] Dans le vrai, je suis mort en 1798 (époque à laquelle il a quitté le pays), les funérailles seules sont retardées.

1051. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — II. (Suite.) » pp. 23-46

C’était l’époque des fureurs de parti ; des accusations s’élevèrent peu après au sein de la Chambre des députés contre le duc de Raguse, et les prescripteurs trouvèrent des apologistes. […] Il se montra en même temps humain et moral, fidèle à ses principes de Lyon, en insistant pour qu’on prévînt la conspiration une fois connue, au lieu de la laisser à demi éclater comme quelques ministres l’auraient voulu Vers ces années, pour se consoler des injustices de l’opinion publique à son égard, se sentant peu de goût d’ailleurs pour tout ce qui se pratiquait à la Cour, et croyant aussi qu’il était séant à une époque de paix d’inaugurer le rôle d’une espèce de grand seigneur industriel, il conçut l’idée de fonder dans sa terre de Châtillon un vaste établissement où il assemblerait toutes les industries, et moyennant lequel il doterait son pays des innovations utiles en tous genre. […] Quatorze années de réflexions avaient succédé pour lui à l’époque de l’action et des combats.

1052. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

En mêlant au vieil esprit gaulois les goûts du moment, un peu de Rabelais et du Voltaire, en y jetant un léger déguisement espagnol et quelques rayons du soleil de l’Andalousie, il a su être le plus réjouissant et le plus remuant Parisien de son temps, le Gil Blas de l’époque encyclopédique, à la veille de l’époque révolutionnaire ; il a redonné cours à toutes sortes de vieilles vérités d’expérience ou de vieilles satires, en les rajeunissant. […] Ce qui caractérise bien l’époque, ce sont ces espèces de chapitres de Sterne, ces actes de bienfaisance sentimentale à la Geoffrin, qui servaient comme d’intermède au Mariage de Figaro, et qui en accompagnaient le succès.

1053. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Parmi les ordonnances qu’il rendit durant son rectorat, on en distingue une par laquelle il improuve vivement l’usage de jouer des tragédies dans les collèges de l’Université à l’époque de la distribution des prix ; c’est tout au plus s’il tolère les tragédies empruntées aux Saintes Écritures et sans rôles de femmes. […] Le mérite, à cette date de 1726, c’est d’avoir donné la Rhétorique classique très large et très facile d’une époque où l’on comptait déjà les excellents et élégants traducteurs, les Gédoyn, les Montgault, les d’Olivet, les Sacy ; il les amène et les introduit dans le courant de son style, sans rien de sec ni d’accablant. […] Ils ont franchi brusquement toutes les époques du premier âge, et se sont assis parmi les anciens, qu’ils ont étonnés par une maturité précoce, mais sans y trouver ce qui avait manqué à leur jeunesse.

1054. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

Un recueil du même genre fut publié au siècle dernier, mais la littérature était modeste alors ; l’on se contentait d’un dictionnaire d’épithètes220, livre misérable et qui n’a d’intérêt que comme représentant psychologique d’une basse époque. […] Comme il y a toujours eu des écrivains privés de la mémoire visuelle, et que la mémoire verbale est un des signes les plus apparents de la vocation littéraire, l’usage des phrases toutes faites se retrouve à toutes les époques ; tout auteur célèbre traîne après lui un cortège équivoque qui répète ses mots et ses gestes. […] Cela se représente à toutes les époques de la langue française et de toutes les langues, mais en atteignant surtout les mots d’origine étrangère.

1055. (1889) L’art au point de vue sociologique « Introduction »

En outre il est des types proprement sociaux, qui ont pour but de représenter l’homme d’une époque dans une société donnée ; or, les conditions de la société humaine sont de deux sortes : il y en a d’éternelles et il y en a de conventionnelles. […] VIII. — Après avoir constaté l’introduction des idées philosophiques et sociales dans le roman, Guyau nous la montre dans la poésie de notre époque, dont elle devient un trait caractéristique. […] L’émotion esthétique se ramenant en grande partie à la contagion nerveuse, on comprend que les puissants génies littéraires ou dramatiques préfèrent ordinairement représenter le vice, plutôt que la vertu. « Le vice est la domination de la passion chez un individu ; or, la passion est éminemment contagieuse de sa nature, et elle l’est d’autant plus qu’elle est plus forte et même déréglée. » Dans le domaine physique, la maladie est plus contagieuse que la santé ; dans le domaine de l’art, la reproduction puissante de la vie avec toutes ses injustices, ses misères, ses souffrances, ses folies, ses hontes mêmes, offre un certain danger moral et social qu’il ne faut pas méconnaître : « tout ce qui est sympathique est contagieux dans une certaine mesure, car la sympathie même n’est qu’une forme raffinée de la contagion. » La misère morale peut donc se communiquer à une société entière par la littérature même ; les déséquilibrés sont, dans le domaine esthétique des amis dangereux par la force même de la sympathie qu’éveille en nous leur cri de souffrance. « En tout cas, conclut Guyau, la littérature des déséquilibrés ne doit pas être pour nous un objet de prédilection exclusive, et une époque qui s’y complaît comme la nôtre ne peut, par cette préférence, qu’exagérer ses défauts.

1056. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Première partie. Écoles et manifestes » pp. 13-41

Aucune époque ne fut aussi pauvre en romans et en comédie de mœurs. […] Le symbolisme a augmenté la sensibilité esthétique de notre époque et, sans lui, le mouvement de renaissance latine ne se serait pas produit ou serait resté une simple continuation du lyrisme parnassien. […] Nous nous moquons de l’art pour l’Art et de ces questions si vaines et stériles…” « Paganisme, Chrétienté, Génie national, auxquels nous devrons ajouter le mouvement scientifique (qui remontant aux époques immémoriales de Prométhée et de l’inventeur de la charrue, pour aboutir à Képler et Ampère, modifie tous les jours la nature par ses nobles découvertes), voilà les quatre grandes traditions que doivent rénover pour une définitive synthèse, les jeunes et candides esprits, soucieux d’une œuvre humaine, conforme à la nature6.

1057. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

Amédée Thierry, qui a souvent de la largeur et dont l’imagination historique aime à hanter les époques les plus grandioses et les plus barbares de notre histoire, M.  […] Il ne s’agit que d’événements communs, de règlements de chancelleries, de diplomatie plus ou moins fine, de guerres régulières en douze temps, comme l’exercice, mais, quand il est question d’Attila, du maillet du Seigneur, comme disaient les moines, qui avaient le sentiment plus juste de leur époque que les écrivains du xixe  siècle, venus maintenant pour l’expliquer ; quand il est question du monde romain qui s’écroule sous cet effroyable maillet emmanché dans une si compacte masse d’hommes, il n’y a plus de Gibbon ni de Montesquieu qui puissent arracher le sens à cette exceptionnelle histoire ! […] On les rencontre dans son histoire : saint Aignan, saint Germain, saint Loup, sainte Geneviève, saint Léon, furent les intuitions vivantes de leur époque.

1058. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Avec Chateaubriand, malgré un mysticisme réel, nous atteignons l’époque du dilettantisme chrétien. […] Ce fut une époque toute en gestes, follement éprise de vie, — mais follement, c’est-à-dire au-delà de la vie et c’est-à-dire mortellement. Aussi le sens de cette époque est dans une récurrence, sans souci d’avenir, vers le passé par l’histoire. […] Pourtant, à l’époque du Romantisme, la Critique était née. […] Comparez à ces points de vue divers l’époque présente avec la Restauration, avec la Monarchie de Juillet, avec le Second Empire.

1059. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — [Note.] » pp. 444-445

J’ai quitté Robert à Rome en juin 1830 : il finissait son tableau des Moissonneurs, et je puis assurer qu’à cette époque il n’était pas plus amoureux de la princesse… que moi.

1060. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Faramond, Maurice de (1862-1923) »

Pierre Quillard Vers l’époque où MM. 

1061. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Séverin, Fernand (1867-1931) »

L’élégance et la pureté de la versification, la tendresse et la sincérité du fonds séduiront les intelligences distinguées de notre époque, beaucoup plus nombreuses qu’on le pense, et qui sont avides de beauté virginale et de radieuse sensibilité.

1062. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre premier. La question de fait et la question de goût » pp. 30-31

Bref, on peut énoncer un jugement, qui variera d’une époque, d’une contrée, d’une personne à une autre, qui ne pourra jamais être fixé, témoin les hauts et les bas par lesquels a passé toute réputation.

1063. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — I »

Elle date de l’époque où la foi en l’existence d’une vérité objective était le point de départ de toute spéculation mentale.

1064. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

À chaque époque, on en rencontre, de ces génies dont tout le monde parle, et qui ne sont lus de personne ! […] Époque malheureuse ! […] On vous épargne ici tous les meurtres de ces époques horribles ! […] De ces filles bien nées et bien humbles, l’histoire est la même en toute famille, à cette époque. […] Cette femme a été tout le mystère, c’est-à-dire toute la poésie de cette époque.

1065. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Non, l’homme vient à son heure et l’époque n’influe sur lui que s’il n’est pas de taille à influer sur l’époque. […] Voici comme l’Anglais comprend l’amour, et cela à l’époque de sa première manière, dit M. François Hugo, époque où il était affecté à l’italienne. — Je cite quelques strophes, ensuite nous verrons comment Victor Hugo aime. […] Babou était plus connu à l’époque où il ne faisait rien que maintenant. […] » Mais à cette époque-là une pareille idée est compréhensible.)

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