D’ailleurs ce mystère, ce profond secret qu’on exige de moi, sans m’en donner positivement la clef, peuvent faire penser à mes amis qu’on me tend un piège. […] Un directeur était, au reste, autre chose qu’un confesseur, et La Bruyère pense « que si certaines femmes pouvaient dire à leur confesseur, avec leurs autres faiblesses, celle qu’elles ont pour leur directeur, peut-être il leur serait donné pour pénitence d’y renoncer. » Ceci ne se peut appliquer à madame de Maintenon ; il lui fallait un sol docile à ses instructions, et qui eut l’air de la mener, et toutefois la menât comme elle voulait aller ; et Gobelin était cet homme-là.
Pourtant, parce qu’un homme tel que M. de Lamartine a trouvé convenable de ne pas clore l’année 1848 sans donner au public ses confessions de jeunesse et sans couronner sa politique par des idylles, faut-il que la critique hésite à le suivre et à dire ce qu’elle pense de son livre, faisant preuve d’une discrétion et d’une pudeur dont personne (et l’auteur moins que personne) ne se soucie ? […] Il a fini, sans trop y penser peut-être, par opérer un singulier mélange, par adopter cette manière étrangère sans renoncer pour cela à la sienne propre, par faire entrer, en un mot, du Balzac dans du Bernardin.
S’accoutumer à écrire comme on parle et comme on pense, n’est-ce pas déjà se mettre en demeure de bien penser ?
D’ailleurs nous ne sommes pas de ceux qui pensent guérir leur blessure en empoisonnant la plaie d’autrui. […] De là une crainte singulière de tout ce qui marche, de tout ce qui remue, de tout ce qui parle, de tout ce qui pense.
Elle est tantôt celui des foux ; rarement celui d’un honnête-homme. » Si l’on remonte des particuliers aux princes, on verra que bien des souverains ont pensé de même ; qu’ils n’ont rien eu tant à cœur que de tenir la poësie éloignée de leurs états, comme un de ces maux contagieux qui portent la désolation & la mort partout où ils se glissent. […] Mais ce même Gacon, si connu pour avoir été à la tête de cette association, appellée le régiment des fous & de la calotte, pensa gâter entièrement la cause qu’il défendoit.
On est d’abord conduit à penser que cette circonstance est le volume ou plutôt la masse des cerveaux7, car c’est une loi assez générale de la physiologie que la force des organes est proportionnelle à leur masse, et ainsi, par exemple, les plus gros muscles sont les plus forts. On a donc pensé à peser les cerveaux aux différents degrés de la série animale, et à comparer cette échelle de poids avec l’échelle d’intelligence des différentes espèces.
On y trouve des choses curieuses, & il est plus exact qu’on ne pense. […] Le voyageur anglois, très-riche seigneur, qui posséde excellemment l’art de voyager & sur-tout celui d’observer, tous deux plus rares qu’on ne pense, est accompagné d’un habile physicien, dont les découvertes enrichissent extrêmement ses rélations.
Vous pensez que les souverains veulent être servis à point nommé. […] Dites-moi, ne pensez-vous pas que c’est là l’origine de tous ces éloges des mortels, empruntés des attributs des dieux, et de toutes ces épithètes indivisiblement attachées aux héros et aux dieux ?
En effet, s’ils trouvaient aujourd’hui dans un livre, sans nom d’auteur, que les lettres ne guérissent de rien, qu’elles ne nous apprennent point à vivre, mais à disputer ; que la raison est un mauvais présent fait à l’homme ; que depuis que les savants ont paru, on ne voit plus de gens de bien ; ils ne manqueraient pas d’attribuer cette satire de l’esprit et des talents à quelque déclamateur moderne, ami des paradoxes et des sophismes ; l’antiquité, diront-ils, était trop sage pour penser de la sorte, et encore moins pour l’écrire. […] Après trente ans d’étude, vous me demanderiez en vain pourquoi une pierre tombe, pourquoi je remue la main, pourquoi j’ai la faculté de penser et de sentir.
Ils font leur métier, ces prêtres qui traduisent des Saints, dit-on ou pensa-t-on avec insolence, et on courut à quelque roman de Mme Sand comme à l’abreuvoir. […] Qu’on en pense ce qu’on voudra lorsqu’on l’aura lue !
Il avait la simplicité qu’ont tous les hommes qui ne pensent jamais qu’à une seule chose, et pour lui c’était toujours à quelque page brillante ou charmante à écrire ! […] À l’heure de la vie où l’on est frivole et où l’homme tient à relever ses avantages extérieurs par les soins de la mise et les détails de la toilette, à une époque où tant de gens de lettres affectaient d’être des Beaux, parmi les de Musset, les Roger de Beauvoir, les Roqueplan, les Sue, qui furent des dandies, des gants jaunes, des furieux (un mot du jargon de la mode du temps), Janin, très à la mode par l’esprit et par le talent et très en vue, Jules Janin, qui n’était pas sans beauté alors, ne pensait point à la faire valoir, cette beauté, par les ressources que la mode offre à la coquetterie.
Quoiqu’il n’ait pas eu le dessein de reproduire les traits de Mazarin dans ce qu’ils ont d’arrêté, de gravé, de connu, mais bien plutôt dans ce qu’ils ont de fuyant, de mystérieux encore ; quoiqu’il ait dit, avec cette sobriété et ce tact qui sont le goût : « N’abusons pas de l’oncle en parlant des nièces », l’auteur des Nièces de Mazarin n’a pas cependant pensé qu’à elles seules. […] Je n’ose rien entreprendre sans y avoir beaucoup pensé.
D’habiles critiques ont porté plus loin le scepticisme : ils ont pensé que la guerre de Troie n’avait jamais eu lieu, du moins telle qu’Homère la raconte ; et ils ont renvoyé à la Bibliothèque de l’Imposture les Dictys de Crète, et les Darès de Phrygie, qui en ont écrit l’histoire en prose, comme s’ils eussent été contemporains. […] … et que penserons-nous de celles des Romains, peuple tout occupé de l’agriculture et de la guerre, lorsque Thucydide fait un tel aveu au nom de ses Grecs, qui devinrent sitôt philosophes ?
Je n’ai jamais tant dit ce que je pensais.
⁂ « Il n’est pas nécessaire, disait Montesquieu, d’épuiser un sujet, il suffit de faire penser ».
Le seul contact des idées qui doivent être rapprochées suscite d’autres idées : la série qu’on ordonne se continue d’elle-même, après qu’on a classé ses premières acquisitions ; l’œuvre maintenue dans sa droite direction par la sévérité du plan est poussée plus loin, plus haut, plus profondément qu’on n’avait pensé d’abord, et le terme qu’on espérait à peine d’atteindre est allègrement franchi.
Le Chef des odeurs suaves contient près de deux cents petits poèmes, et j’avoue qu’avant d’en avoir lu le premier vers, je pensai involontairement à ce grenadier qui, voyant se précipiter sur son bataillon d’innombrables ennemis, mâchonne dans sa moustache le légendaire : « Ils sont trop !
Depuis lors, Pierre Quillard a donné La Gloire du Verbe, un recueil de beaux poèmes qui symbolisent la suite des idées et des visions d’un homme qui rêve et qui pense.
Vous pensez si la bonne femme chauffera le débit.
Pensez au nombre de livres que chaque siècle ajoute à la masse des livres déjà imprimés !
Ces Discours renferment la quintessence de tout ce qu’on a pensé de plus sage sur l’établissement, les progrès & les révolutions de la Religion Chrétienne.
On pense qu’il nous vient des Arabes, ainsi que la sculpture du même style.
Que dirait-il, que penserait-il, dans son second étonnement, qui ne tarderait pas à suivre le premier ?
Pour juger sainement de leur conduite, il faut entrer dans leurs idées, et penser comme eux-mêmes ils pensoient.
L’homme de génie, qui compose sur des paroles semblables, trouve qu’il a fait des chants variez, même sans avoir pensé à les diversifier.
Qu’en pense Feydeau-Pacha, la lumière du Divan ?
Ils eussent dû s’anéantir dans la botte et dans le pur machinisme, mais ils pensent.
Maintenant que le livre est achevé, ce qu’il a de bon est à vous, plus que vous ne pensez.
Ce trait seul suffirait pour nous indiquer ce qu’il faut penser de la fécondité, de la vérité et de la variété de M. de Balzac. […] Hugo, qui est pourtant un penseur, n’a pas pensé à cela : on ne peut pas penser à tout ! […] il faut du courage pour évoquer encore ce grand nom dans une causerie littéraire : que penser et que dire des premières pages de ce qu’il appelle son Cours familier de littérature ? […] Ils ne se préoccupent jamais que de la liberté de penser, et ils dénoncent ceux qui ont tenté de l’entraver ou de l’amoindrir aux anathèmes de tous les pays et de tous les siècles. […] qu’on pense à atténuer les différences, à contester le bienfait, à nier le progrès ?
Je pense qu’elles doivent désormais unir leur sève, alimenter un seul tronc et nourrir une science unique, la physiologie nouvelle. […] Je pense que la nutrition doit surtout s’opérer au moyen de réserves alimentaires que renferme le corps de l’animal et non par l’absorption de substances venues du dehors. […] Ils ne pensent pas, en un mot, que la graisse se forme dans les animaux ou les végétaux par l’union nécessaire d’acides gras et de glycérine préexistants. […] Les paroles de certains chimistes, qu’on pourrait appeler vitalistes, sembleraient avoir cette conséquence, c’est pourquoi je pense utile de m’expliquer à ce sujet. […] C’est ainsi que pensait Broussais.
Il vante la vie au sein de la nature et pense qu’on peut trouver le bonheur à se réjouir de ses harmonies. […] Ils se virent beaucoup et il est permis de penser que ce ne fut pas sans une influence réciproque de l’un sur l’autre. […] Mais je ne pense pas qu’une si triste unité puisse être regrettée par personne. […] Il pense un instant à consacrer sa vie à Dieu ; mais l’étude de la philosophie le détourne de ces idées. […] Il faut donc penser qu’il subissait une influence secrète qui dominait les conditions même de son existence.
« Qui oserait, dit Bossuet2, penser à d’autres excès qui se déclarent d’une manière bien plus dangereuse dans un autre plaisir des sens ? qui, dis-je, oserait en parler, ou oserait y penser, puisqu’on n’en parle point sans pudeur, et qu’on n’y pense pas sans péril, même pour le blâmer ? […] Je pense au contraire qu’il lui a fallu d’incroyables ressources dans l’esprit et une force de résolution peu commune pour entreprendre l’épreuve qu’il a fait subir à notre langue, et qu’il a soutenue, l’espace de six cents pages, sans découragement et sans relâche. […] Il faut donc traiter fort sérieusement la mort, c’est-à-dire se garder des pièges qu’elle nous tend, et penser à elle le moins possible. […] Indiana, Valentine, nous avons tous pensé que c’étaient là deux brillants plaidoyers contre le mariage.
— Pas davantage. — Vous pensez qu’il y a une faculté autre que l’expérience et la raison propre à découvrir les causes ? […] Nous allons même plus loin que vous : nous pensons qu’il n’y a ni esprits ni corps, mais simplement des groupes de mouvements présents ou possibles, et des groupes de pensées présentes ou possibles. […] Nous pensons qu’il n’y a rien au monde que des faits et des lois, c’est-à-dire des événements et leurs rapports, et nous reconnaissons comme vous que toute connaissance consiste d’abord à lier ou à additionner des faits. […] Pour mon compte, je le pense, et la raison en est qu’étant des abstraits, ils ne sont pas situés en dehors des faits, mais compris en eux, en telle sorte qu’il n’y a qu’à les en retirer. […] A les voir virginales et timides dans ce voile doré, on pensait aux joues empourprées, aux beaux yeux modestes d’une jeune fille qui pour la première fois met son collier de pierreries.
Leurs façons de dire n’ont été que l’expression de leur manière de penser ; et le jugement qu’il convient d’en porter ne relève pas tant de la linguistique ou de la philologie que de la psychologie. […] Mais, parmi les manières de se distinguer, si l’on en connaît une qui soit assurément excusable, et légitime même à de certains égards, n’est-ce pas celle qui consiste à vouloir sentir, penser, et agir plus noblement, plus délicatement, plus finement ? […] Le Père Bouhours publie ses Dialogues sur la manière de bien penser dans les ouvrages de l’esprit. […] C’est la foi qu’on détruit et personne n’y pense. […] « Nous avons eu des contemporains dès le règne de Louis XIV », dira de lui Diderot, et en effet il sera le maître à penser des encyclopédistes.
Il paraît réellement qu’on a hésité, et que, de peur de déplaire au clergé en acceptant si hautement le grand excommunié, le ministère de l’intérieur avait pensé à retirer son épingle du jeu.
On s’accorde à penser que le tour de M. de Vigny maintenant ne sera plus reculé.
Il arriva même, je pense, que pour élargir un peu cette route disputée, il y eut quelques jeunes critiques plus osés qui n’hésitèrent pas à faire sauter (surtout du côté de Racine) quelque portion du marbre sacré, quelque coin des degrés de ces temples augustes.
Jeu commençant à m’être défavorable, parce que je ne pense qu’à Mme Récamier.
Oui, on ne peut s’empêcher de penser que ce poète est un terrible homme, un peu bien dur pour lui-même et un peu bien sévère pour sa première née.
Ces Articles prouvent combien cet Ecrivain est capable de joindre le mérite de penser avec justesse, à celui de s’exprimer avec grace, quand il ne cherche pas à sortir de lui-même, & à appliquer ses talens à des sujets qui leur sont étrangers.
Comment ont appris leur Langue M. de Voltaire, le propagateur de ce paradoxe, & M. d’Alembert qui semble se faire une loi de ne penser que d’après ce Poëte ?
« Ces héros pleins de bonté et de lumière pensent toujours à leur Créateur, et sont tout éclatants de la lumière qui rejaillit de la félicité dont ils jouissent en lui. » — Et plus loin, « héros vient d’un mot grec qui signifie amour, pour marquer que, pleins d’amour pour Dieu, les héros ne cherchent qu’à nous aider à passer de cette vie terrestre à une vie divine et à devenir citoyens du ciel69. » Les Pères de l’Église appellent à leur tour les saints des héros : c’est ainsi qu’ils disent que le baptême est le sacerdoce des laïques, et qu’il fait de tous les chrétiens des rois et des prêtres de Dieu 70.
Mais les hommes croïent naturellement que leur goût est le bon goût, et par consequent, ils pensent que les personnes qui ne jugent pas comme eux, ont les organes imparfaits, ou qu’elles se laissent conduire à des préjugez qui les gouvernent sans qu’elles-mêmes s’apperçoivent du pouvoir de la prévention.
J’ai dit ce que je pensais du critique littéraire en Dusolier, qui a débuté par un ouvrage intitulé Nos gens de lettres, un peu trop aimable pour nous tous, mais où l’œil trop bleu de l’auteur et trop noyé de bienveillance avait cependant des justesses et des pénétrations singulières.
. — Toute action de l’amant se termine par penser à ce qu’il aime. […] » Il va à l’endroit où il l’a vue pour la première fois, puis à un autre où il l’a entendue chanter ; « il n’y a point d’heure du jour ou de la nuit où il ne pense à elle. » Personne n’a depuis trouvé des paroles plus vraies et plus tendres ; voilà les charmantes « branches poétiques » qui avaient poussé à travers l’ignorance grossière et les parades pompeuses ; l’esprit humain au moyen âge avait fleuri du côté où il apercevait le jour. […] Les compliments expédiés, il pense au solide et demande à la dame de le laisser causer un peu avec Thomas. […] Chaucer ne s’amuse plus, il étudie ; il cesse de babiller, il pense ; il ne s’abandonne plus à la facilité de l’improvisation coulante, il combine. […] Sous cette contrainte on cesse de penser ; car qui dit pensée dit effort inventif, création personnelle, œuvre agissante.
Le frère laïque était à cheval ; il pleuvait à verse depuis deux jours ; le frère pensa se noyer à une lieue du château, dans un fossé large et débordé, où son cheval tomba, et dont nous le retirâmes à grand’peine et à demi mort. […] Les uns ont embrassé cette créance pour obtenir des emplois à la cour, et des pensions de l’État ; les autres, pour avoir l’honneur de marier leurs filles au roi, ou seulement de les faire entrer au service de ses femmes. […] La mère ayant fait savoir cette violence à sa pauvre demoiselle, elle pensa se désespérer ; elle aimait un jeune seigneur qui demeurait en son voisinage, et en était extrêmement aimée. […] Archyle avait toujours pensé à elle, depuis qu’il l’avait perdue de vue. […] Ces grands écrivains ont été de mauvais voyageurs ; ils ont pensé à faire admirer leur esprit et leur style.
Et quand on pense que Diderot, dont se recommandent les réalistes, blâmait même Rubens de manquer de goût en s’en tenant à la race flamande trop plantureuse et trop massive, suivant lui. […] la pensée est le produit du corps entier Faites donc penser un cerveau tout seul ! […] Cependant l’auteur, sur la fin de sa vie, regretta, amèrement, suivant le dire de son éditeur, certains passages propres, pensait-il, à blesser la décence. […] Il y a beaucoup plus de bien en ce monde qu’on ne le pense. […] Et nous pensons être habiles, pratiques en ne nous étonnant et ne ‘nous scandalisant de rien.
On pense, non sans émotion, au « charnier » dans lequel, d’après la Chanson, Charlemagne fit réunir les corps des Francs tués dans le combat. […] Soderhjelm pense aussi que la légende du Tannhäuser a été apportée au Monte della Sibilla par ces visiteurs allemands que mentionne La Sale et dont le bon Arnold de Harff fut le dernier. […] C’est le problème même du bonheur, que l’humanité, depuis qu’elle pense, qu’elle sent et qu’elle songe, se pose toujours et n’arrive pas à résoudre. […] Le même critique pense que Matthieu Paris n’a rapporté la légende contée par l’évêque arménien que « parce qu’elle différait du récit reçu dans les contrées soumises à l’Église latine ». […] Je ne sais si mon savant confrère ne prête pas ici involontairement aux hommes du xiiie siècle notre façon de penser et de sentir.
L’amitié lui sera sacrée, parce qu’il jouira de vivre dans une autre moitié de soi-même, et de penser qu’une âme entend la sienne et lui répond. […] Le génie, avons-nous dit, dépend de la nature ; mais l’expression dépend de l’art : on n’apprendra pas à penser, mais à dire et à écrire bien ce qu’on pense. […] Le judicieux auteur du Traité des études, Rollin, recteur de l’université, puisa, je pense, à de pareilles sources les maximes qu’il nous a transmises et la patience qui féconda ses travaux. […] « Sitôt que sur un vice ils pensent me confondre, « C’est en me guérissant que je sais leur répondre ; « Et plus en criminel ils pensent m’ériger, « Plus, croissant en vertu, je songe à me venger. […] Penserions-nous que la naïveté dégradât le sublime ?
Il n’est nul besoin, pour sentir une chose, d’avoir la penser ou le nom de cette chose : pour sentir la différence du plaisir à la douleur, il n’est pas besoin de penser ni de nommer cette différence ; de même, pour sentir cette différence particulière qui constitue un changement interne, il n’est nul besoin de faire appel à la pensée pure, à la raison qui compare, aux catégories, à la forme pure du temps. […] Bergson compare le sentiment de la durée pure : se laisser vivre sans rien penser, sans rien distinguer, sans discerner le plaisir de tout à l’heure d’avec la peine présente, c’est être dans la « durée pure » ; disons plutôt : c’est perdre tout sentiment de la durée, toute mémoire du passé comme distinct du présent, toute anticipation de l’avenir ; cette sorte de vie, en apparence mystique et « libre », ne serait qu’un complet abêtissement ou, plus encore, un retour à la vie purement végétative. […] Penser, c’est établir des relations entre des termes qui, tous les cieux, doivent être présents à la fois pour que la comparaison soit possible. […] Penser, en un mot, c’est établir des relations tout au moins de différence et de ressemblance ; or, il n’y a de différence et de ressemblance aperçue qu’entre des objets co-existants dans la conscience.