Il fit imprimer à Bruxelles, en 1793, des Considérations sur la nature de la Révolution de France, petit écrit qui fit sensation en Europe, et dont Burke, après l’avoir lu, déclara qu’il lui semblait l’avoir fait. […] Mallet du Pan, dans son ordre de prévision et de perspicacité, n’appartient en rien à cette école ni à cette nature de Joseph de Maistre, avec lequel il ne s’est rencontré qu’un instant : c’est un appréciateur tout positif et moins sublime, ne faisant intervenir dans les choses humaines aucun autre élément que ceux qui se prêtent à l’observation, nullement prophète ni voyant : ce n’est qu’un esprit ferme et sensé, très clairvoyant et très prévoyant. […] On pouvait plus que prévoir dès lors en Mallet du Pan un de ces esprits qui sauraient concilier des idées et des qualités de diverse nature, ne pas verser tout d’un côté, se donner sur les pentes diverses des limites précises, quelqu’un enfin à qui Mme de Staël un jour écrira qu’elle aurait désiré le voir et l’entretenir, ne fût-ce que pour entendre causer des choses avec raison et justice, et pour se reposer « de ces opinions extrêmes, ressource de ceux qui ne peuvent embrasser qu’une idée à la fois ». […] On retrouve quelques-unes de ces pensées et de ces expressions tout à fait poignantes dans la brochure qu’il publia à Bruxelles en mars 1793 (Considérations sur la nature de la Révolution de France, et sur les Causes qui en prolongent la durée), et dans laquelle il dit à tous de grandes vérités. […] On croit qu’il va se limiter lui-même ; mais ce genre de raisonnement, qui peut être vrai pour une période historique de quelque étendue, est tout à fait trompeur et décevant pour les courtes périodes d’années qui sont si essentielles dans la vie d’une génération : Tandis que cette foule de gens d’esprit, dit-il, pour qui la Révolution est encore une émeute de séditieux, attendent, comme le paysan d’Horace, l’écoulement du ruisseau ; tandis que les déclamateurs phrasent sur la chute des arts et de l’industrie, peu de gens observent que, par sa nature destructive, la Révolution amène nécessairement la République militaire.
Ce ne serait pas la première fois qu’une nature supérieure se serait transformée en s’emparant du pouvoir et en l’exerçant ; et même on n’est tout à fait supérieur qu’à cette condition d’avoir en soi ce qui transforme et renouvelle, ce qui suffit à toutes les situations grandes. […] Et Retz, dans cette comparaison, a le désavantage d’avoir survécu, d’avoir assisté à l’entier avortement de ses espérances, de s’y être en partie démoralisé, rabaissé et dégradé, comme il peut arriver aux plus fortes natures à qui le but échappe. […] J’ai voulu glisser cette réserve parce que j’admire toujours à quel point les natures étroites et négatives sont empressées de dire à tout génie supérieur : « Tu n’as fait que ceci dans ta vie jusqu’à présent ; la fortune t’a empêché de t’essayer dans une plus large et plus ouverte carrière, donc tu n’aurais pu faire autre chose. » Ces gens-là ont besoin, de temps en temps, de recevoir quelques démentis comme celui que leur donne, par exemple, un Dumouriez aux défilés de l’Argonne. En ce qui est de Retz, il y a malheureusement beaucoup de raisons d’induire que chez lui l’aventurier, l’audacieux, le téméraire, comme disait Richelieu, faisaient la partie la plus essentielle et le fond même de sa nature, et qu’ils eussent de tout temps compromis l’homme d’État dont il n’embrassait l’idée que par l’esprit. […] Et puis il y a, nous le savons, de certains moments où des maladies de même nature éclatent à la fois dans divers pays : cela est vrai des maladies physiques et aussi des épidémies morales.
Il s’y annonçait comme un émule de Lucrèce, et il aspirait à être un peintre de la nature. […] Toute ode est, de sa nature, destinée à être chantée. […] S’agissait-il de célébrer, par exemple, le livre des Époques de la nature, Le Brun avait droit de s’écrier : Au sein de l’Infini ton âme s’est lancée ; Tu peuplas ses déserts de ta vaste pensée. La Nature, avec toi, fit sept pas éclatants ; Et, de son règne immense embrassant tout l’espace, Ton immortelle audace A posé sept flambeaux sur la route des Temps. […] Mais une année à peine s’était écoulée, que les procédés de Le Brun envers sa femme dénotèrent des défauts et même des vices de nature, dont toute sa destinée s’est ressentie.
Sa nature calme et peu passionnée ne paraît point avoir souffert d’ailleurs d’une telle union : En l’année 1639, ayant épousé M. de Motteville, dit-elle, qui n’avait point d’enfants et avait beaucoup de biens, j’y trouvai de la douceur avec une abondance de toutes choses ; et si j’avais voulu profiter de l’amitié qu’il avait pour moi, et recevoir tous les avantages qu’il pouvait et voulait me faire, je me serais trouvée riche après sa mort. […] « C’est un lambeau que je veux laisser tomber en marchant mon chemin, dit-elle de quelqu’un de ces épisodes de rencontre ; il trouvera sa place avec les autres de même nature : et, comme il ne sera pas traité avec plus d’ordre et de suite, il n’aura pas aussi plus de prix ni de valeur. » Le bon esprit de Mme de Motteville, qui l’a portée à ne consulter sur ces choses éloignées que de bons témoins et qui faisait que les plus dignes de foi aimaient à s’en ouvrir avec elle, donne à ces parties accessoires et à ces hors-d’œuvre plus d’intérêt qu’elle n’ose en prétendre. […] Elle avait puisé dans sa belle Normandie l’amour de la campagne et de la nature, mais elle n’en savait pas jouir en courant : « La campagne, disait-elle, n’est belle qu’avec le repos et la solitude, quand on y peut goûter les plaisirs innocents que la beauté de la nature nous fournit dans les bois et auprès des rivières. » Elle disait encore en parlant des rois : J’estime bien heureux celui qui ne les connaît que par le respect qu’on doit à leur nom, et qui peut jouir de la vie douce et tranquille d’un bon citoyen qui est homme de bien, qui a de quoi vivre, et qui n’est point empoisonné par l’ambition. […] La première journée des Barricades se passe presque toute en plaisanteries contre elle : « Comme j’étais la moins vaillante de la compagnie, toute la honte de cette journée tomba sur moi. » Pour une personne de cet intérieur, elle comprend très bien du premier coup la nature de la révolte dans la ville, et ce désordre si vite et si bien ordonné : Les bourgeois, dit-elle, qui avaient pris les armes fort volontiers pour sauver la ville du pillage, n’étaient guère plus sages que le peuple, et demandaient Broussel d’aussi bon cœur que le crocheteur ; car, outre qu’ils étaient tous infectés de l’amour du bien public, qu’ils estimaient être le leur en particulier… ils étaient remplis de joie de penser qu’ils étaient nécessaires à quelque chose. […] L’amour de la liberté, ajoute-t-elle, est fortement imprimé dans la nature.
Il raconte ces arrestations avec une sorte de gaieté ironique, qu’il n’y a pas mise après coup et qui était bien dans sa nature. […] Le moment où Mme de Senneterre se voit munie de cette lettre de recommandation, son étonnement involontaire en la retournant machinalement entre ses mains, sa préoccupation de l’accueil qui lui sera fait, son inquiétude pour sa toilette qu’il faut proportionner à la modestie de sa condition nouvelle, tout cela est pris dans la nature et devait rappeler à plus d’une lectrice des circonstances trop réelles et trop récentes : Extrêmement fatiguée de ne pouvoir m’arrêter à rien, racontait Mme de Senneterre, je me couchai. […] Je craignais d’inspirer la pitié ; je craignais encore plus de ne pouvoir adoucir un air de dignité que la nature et l’habitude de commander avaient répandu sur toute ma personne. […] Les principaux personnages y sont vertueux, sensibles, intéressants, et l’on y a affaire à une nature humaine d’Opéra-Comique ou de Gymnase, non pas à la vraie et sincère nature. […] [NdA] Comme il m’est arrivé de parler bien des fois des mêmes hommes et que c’est par suite de ce commerce réitéré que je me hasarde ainsi à les juger en définitive, j’indiquerai encore quelques lignes de moi sur la nature de talent et d’esprit de M.
(Il s’agit des découvertes de physique, qui, après s’être fait attendre durant des siècles, ont éclaté coup sur coup depuis Galilée jusqu’à Newton) : « On dirait que la nature a fait comme ces vierges qui conservent longtemps ce qu’elles ont de plus précieux, et se laissent ravir en un moment ce même trésor qu’elles ont conservé avec tant de soin et défendu avec tant de constance. » Et cette autre pensée encore, qui vient singulièrement dans un rapport de Montesquieu Sur l’usage des glandes rénales : « La vérité semble quelquefois courir au-devant de celui qui la cherche ; souvent il n’y a point d’intervalle entre le désir, l’espoir et la jouissance. » Montesquieu, comme académicien des sciences de Bordeaux, paya donc un léger tribut à la mode et à son admiration pour Fontenelle. […] Car il gardera la plupart de ses idées ; seulement, dans ses futurs ouvrages, il ne les rendra pas de même, il les réfléchira autrement et ne parlera qu’avec sérieux, sentant de plus en plus la grandeur de l’invention sociale et désirant l’ennoblissement de la nature humaine. Quand on veut apprécier la nature et la forme d’esprit de Montesquieu, il faut se souvenir de ce qu’il écrivait lui-même, vers la fin de sa vie, à d’Alembert qui lui demandait pour l’Encyclopédie certains articles qu’il avait déjà traités dans L’Esprit des lois : « J’ai, disait-il, tiré, sur ces articles, de mon cerveau tout ce qui y était. […] Je ne blâme point cet hommage rendu, en tout cas, à l’élévation et à l’idéalisation de la nature humaine ; mais je ne puis m’empêcher de remarquer que c’est prendre et accepter les idées de justice et de religion plutôt par le côté politique et social que virtuellement et en elles-mêmes13. […] Dans cette vue que je me suis permise sur la nature morale de Montesquieu, et à laquelle a donné jour sa définition de la justice dans les Lettres persanes, loin de moi l’idée de diminuer la beauté sévère et humaine du caractère !
C’est dans des paysages, en effet, empruntés tous à la nature alpestre du Jura, probablement longtemps habité, que l’auteur des Horizons prochains a placé la scène de ces romans de courte haleine, dont il commence par nous dessiner la vignette. […] L’auteur des Horizons prochains est évidemment une âme active, plus active que contemplative, quoiqu’il y ait de la contemplation dans tout peintre de la nature et de l’âme humaine. […] De nature, elle ne l’est point, si elle l’est de secte. […] et sa nature donnée peut-elle rester protestante ? […] Lisez, enfin, ce livre exquis, mais qui n’est pas exquis à la manière des livres littéraires, car le charme en vient de la femme et de la nature.
L’art, du reste, a tué la passion ; et il semble que ces natures si vives, si guerrières, soient soumises à toutes les gênes d’une science technique et raffinée. […] Il aura, dans son langage habilement extrait de tous les dialectes vulgaires de l’Italie, l’énergie populaire et la sublimité, ou la douceur mystique ; il empruntera sans cesse à la riche nature dont il est entouré, au spectacle des champs, au souvenir de ses fuites à travers tous les lieux et parmi toutes les conditions humaines, à ses combats, à ses souffrances, bien des images de la vie réelle et des mœurs de son temps et il sera pourtant, à certaines heures de son inspiration, le plus idéal et le plus recueilli des poëtes religieux. […] Car aucune grâce ne me fut refusée, quand la nature me demanda à celui qui a voulu, ô femmes, m’associer à vous pour compagne. […] Merveilleux et tendresse, sublimité des images et profonde émotion du cœur, il y aura donc là ce que la poésie la plus vraie, la plus naturelle, avait pu concevoir de plus grand, à la pensée de Dieu et sous les rayons de la plus éclatante nature ; et là devait se rencontrer aussi ce que l’âge plus avancé du monde, ce que l’expérience plus triste de la vie, ce que les malheurs réitérés des siècles, auront appris à l’âme humaine. […] C’est un hymne à Dieu ; c’est une paraphrase populaire du chant sublime où le Psalmiste appelait tous les objets de la nature à célébrer le Créateur.
Mais les deux autres, par la nature même des choses, lui sont associées. […] Sous prétexte de remettre la nature en sa place, Rousseau abolit le naturel. […] N’est-il pas le plus pur ainsi que le plus doux penchant de la nature ? […] Sans les exaltations et sans les oppressions romantiques en face de la nature, M. […] L’esprit de sacrifice n’était point dans sa nature.
Le christianisme poussait toujours hors de la nature, ou contre la nature : l’antiquité ramenait à la nature, et faisait voir la puissance de la raison. […] Appuyée sur l’antiquité, l’Italie prenait confiance en la nature humaine, confiance en la raison ; écartant la contrainte du dogme, la tristesse de l’ascétisme, elle faisait en tous sens l’expérience des forces de l’esprit : forte de la première et saisissante victoire de la raison sur la théologie dans la découverte de Colomb, elle affranchissait les sciences et la philosophie, et s’essayait librement, par toute sorte de pointes hardies, à les constituer dans leur pleine indépendance.
José-Maria de Heredia exprimait de préférence, c’était je ne sais quelle joie héroïque de vivre par l’imagination à travers la nature et l’histoire magnifiées et glorifiées. […] Si bien qu’un jour, non content de diviniser la nature, il l’a anoblie et blasonnée. […] Vous trouverez dans les apothéoses de M. de Heredia cette intime union de la Nature et de l’homme-dieu. […] Rappelez-vous l’adorable sonnet Sur un marbre brisé, où la bonne Nature enveloppe de feuilles et de fleurs la vieille statue éclopée : La mousse fut pieuse en fermant ses yeux mornes… Lisez les « sonnets épigraphiques » : le Dieu Hétre, Nymphis Augustis sacrum, le Vœu.
Le ciel, la terre, la nature tout entière, la folie, la maladie et la mort ne sont que des instruments pour lui. […] Une révolution radicale 352, embrassant jusqu’à la nature elle-même, telle fut donc la pensée fondamentale de Jésus. […] Sa belle nature le préserva de l’erreur qui eût fait de lui un agitateur ou un chef de rebelles, un Theudas ou un Barkokeba. […] Le grand signe du Messie, c’est « la bonne nouvelle annoncée aux pauvres 364. » La nature idyllique et douce de Jésus reprenait ici le dessus.
Non content d’écraser la faiblesse humaine sous les fatalités du sort et de la nature, il l’asservit aux transmissions du passé. […] Or la nature du mythe est d’absorber des peuples dans des hommes, des cataclysmes dans une catastrophe ; d’immenses carnages dans un meurtre unique. […] Hermès, par l’ordre de Zeus, jeta les morceaux de l’enfant dans une chaudière enchantée autour de laquelle Pan — la divine Nature qui transforme et qui ressuscite — exécuta une danse mystérieuse. […] La nature outragée châtie les attentats de l’homme par ses perturbations vengeresses.
Puis, l’heure passait, et quelquefois minuit avait sonné à tous les clochers de la vallée qu’il était encore là, debout dans quelque brèche du donjon, songeant, regardant, examinant l’attitude de la ruine ; étudiant, témoin importun peut-être, ce que la nature fait dans la solitude et dans les ténèbres ; écoutant, au milieu du fourmillement des animaux nocturnes, tous ces bruits singuliers dont la légende a fait des voix ; contemplant, dans l’angle des salles et dans la profondeur des corridors, toutes ces formes vaguement dessinées par la lune et par la nuit, dont la légende a fait des spectres. […] Il se dit qu’il fallait que dans ce palais lugubre, inexpugnable, joyeux et tout-puissant, peuplé d’hommes de guerre et d’hommes de plaisir, regorgeant de princes et de soldats, on vît errer, entre les orgies des jeunes gens et les sombres rêveries des vieillards, la grande figure de la servitude ; qu’il fallait que cette figure fut une femme, car la femme seule, flétrie dans sa chair comme dans son âme, peut représenter l’esclavage complet ; et qu’enfin il fallait que cette femme, que cette esclave, vieille, livide, enchaînée, sauvage comme la nature qu’elle contemple sans cesse, farouche comme la vengeance qu’elle médite nuit et jour, ayant dans le cœur la passion des ténèbres, c’est-à-dire la haine, et dans l’esprit la science des ténèbres, c’est-à-dire la magie, personnifiât la fatalité. […] Quel que soit le drame, qu’il contienne une légende, une histoire ou un poème, c’est bien ; mais qu’il contienne avant tout la nature et l’humanité. […] Ainsi l’histoire, la légende, le conte, la réalité, la nature, la famille, l’amour, des mœurs naïves, des physionomies sauvages, les princes, les soldats, les aventuriers, les rois, des patriarches comme dans la Bible, des chasseurs d’hommes comme dans Homère, des titans comme dans Eschyle, tout s’offrait à la fois à l’imagination éblouie de l’auteur dans ce vaste tableau à peindre, et il se sentait irrésistiblement entraîné vers l’œuvre qu’il rêvait, troublé seulement d’être si peu de chose, et regrettant que ce grand sujet ne rencontrât pas un grand poëte.
Il est de sa nature révolutionnaire de se passer d’ancêtres. […] Qu’appelez-vous nature morte ? […] on est tenté de crier au secours dans la forêt ; on est tenté de demander appui, concours et main-forte à cette grande nature sombre. […] Ainsi que vous, ils ont pour seul point de départ, en dehors d’eux, l’être universel, en eux, leur âme ; ils ont pour source de leur œuvre la source unique, celle d’où coule la nature et celle d’où coule l’art : l’infini.
la nature se substituant à l’art, fait en quelque sorte à notre place de tristes expériences, lorsque, sous l’influence des causes les plus diverses, elle trouble, elle bouleverse, elle anéantit chez l’homme le sentiment et la raison. […] Selon d’autres, les altérations sont cérébrales, mais de toute sorte de nature. […] N’est-il pas étrange cependant que des phénomènes de nature si diverse soient employés à expliquer un même fait ? […] Il n’est donc pas contraire à la nature des choses que l’âme soit malade, et ce principe ne peut nous servir à rien pour décider si la folie a son siège organique, oui ou non.
Ses situations heureusement ménagées, amenent de ces momens où la nature frémit d’horreur. […] Il y a aussi quelques détails qui ont paru minutieux ; mais ils peignent le sentiment & la nature, & ce n’est pas un petit mérite. […] La nature y est peinte avec autant de vérité que de graces. […] de Querlon, en est quelquefois trop maniéré, & l’affectation d’esprit, ou l’art, en un mot, y laisse trop peu apercevoir la nature.
Restait donc à savoir, selon lui, comment le son émis par un organe, reçu par un autre organe, passe à l’état de signe abstrait et général, en vertu de la faculté fondamentale du moi, l’absolu, qui tient à notre nature d’être infini ; comment nous obtenons ainsi la série de l’ordre des signes vocaux ou oraux, laquelle se substitue successivement à l’ordre des signes visuels et tactiles. […] « La pensée alors n’est plus évoquée que par cette nature de signes ; la perception d’un rapport rappelle immédiatement son signe oral représentatif ; et la perception et le signe se confondent ensemble, sont simultanément perçus. […] « D’ailleurs, ajoute mon contradicteur, quand on reporte son attention sur les mots et les expressions considérés en eux-mêmes, dans nos langues dérivées, l’on parvient souvent et facilement à en découvrir la nature physique et matérielle. […] Le mot quelquefois ne signifie pas la chose, mais la chose oblige le mot à être vrai ; car il est dans sa nature d’être une expression vraie, ou destinée à devenir vraie.
Pour les curieux de nature humaine, pour les moralistes, pour ceux que la vie et son impatientant mystère préoccupent plus que les babioles menteuses de l’art d’écrire, les correspondances sont les vrais livres et le style qu’elles ont est vraiment l’homme, comme le disait Buffon un peu trop du style en général, Buffon qui, par parenthèse, n’aurait pas su écrire une lettre. […] La psychologie d’un tel homme eût été bonne à étudier et à connaître dans le détail des circonstances suprêmes où, selon nous, il naufragea et se perdit… S’il fut un apostat, — car nous ne pouvons changer, parce que sa cendre est chaude encore, ni la nature des choses ni le sens des mots, — nous voulons cependant bien convenir qu’il ne fut pas, du moins, un apostat vulgaire, et que ses motifs pour le devenir n’étaient pas ceux qu’on lui a prêtés. […] Comme Chateaubriand, son illustre compatriote, qui, lui aussi, changea d’opinion, mais qui garda sur Lamennais la supériorité de l’unité religieuse, il était de nature un rêveur et même il préserva toujours la naïveté de sa rêverie, quand Chateaubriand travaillait la sienne et coquettait avec elle. Ce roseau pensant de Pascal, qui n’avait pas besoin que la nature s’armât pour l’écraser quand il remuait, lui, l’univers, et qui, comme tous les roseaux, aimait le bord de l’eau, même la plus humble, ce fortuné de renommée qui s’appelait Félicité, le nom le plus mélancoliquement moqueur qui puisse être donné à un homme, ne fut jamais heureux et n’était rien de plus qu’une âme triste dans un corps malade.
Ribot, le vulgarisateur de Schopenhauer, prétend qu’il y avait, en cet Allemand, du Français, de l’Anglais et de l’Indou, et il est heureux que, dans cette complexité de natures, ce soit le Français qui ait dominé. […] Ermite là, espèce de Timon enragé dans la carapace d’obscurité qui l’écrasait, il publia, en 1836, un nouveau livre, qui tomba à pic dans l’oubli avec la précision des premiers : La volonté dans la nature. — Il n’en démordait pas, de la volonté ! […] Ribot : « Il faut être complètement aveugle, ou entièrement chloroformé par la puanteur judaïque (Schopenhauer déteste les juifs, comme les hommes du théisme qui a précédé le Christianisme sur la terre), pour ne pas voir qu’au fond l’animal est la même chose que nous et qu’il n’en diffère que par accident. » Ailleurs, il se demande ce « que serait l’homme, si la nature, pour faire le dernier pas qui conduit à lui, était partie du chien ou de l’éléphant », — et il se répond sans sourciller (pourquoi sourcillerait-il ?) […] « Voyons — dit-il, pour expliquer cette apparition, — comment la morale de Schopenhauer se rattache au principe de sa philosophie et comme elle s’en déduit » Et il nous l’explique : « La volonté — continue-t-il — étant, prise en elle-même, un désir aveugle et inconscient de vivre, et s’étant développée dans la nature inorganique, végétale, animale, et arrivant dans l’homme à la conscience claire d’elle-même, il se produit alors un effet merveilleux.
avec la réputation de l’auteur, ses précédents, sa vie extérieure, son imagination, brillante et bruyante, et toute cette nature alcibiadesque qui est la sienne et qui semble avoir, comme le caméléon amoureux de la Légende, des reflets plus séduisants que des couleurs, on se serait attendu, en pensant à cette plume chaude et passionnée, bien plus à une œuvre d’imagination, de rythme ouvragé, de grande broderie, qu’à un livre de sentiment. […] Roger de Beauvoir dont la nature ouverte et sympathique s’imprègne des contagions aussi bien que des parfums, a dû porter sur sa pensée l’influence de la littérature générale de l’époque qu’il a trop étreinte avec le feu de son esprit. […] Déjà très-éloigné par la vérité des sentiments de son premier recueil de poésies qui n’avait que la vérité très-relative de la jeunesse et la ferveur de l’imitation, M. de Beauvoir, s’il ne veut pas manquer aux dons qu’il a reçus, aux facultés d’une nature primitivement exquise et dont il a certainement abusé comme tous ces Polycrates de la destinée qui lancent à la mer leur émeraude qu’un brochet ne leur rapporte pas toujours, M. de Beauvoir doit entrer résolument dans la voie que certaines pièces de son dernier recueil viennent d’ouvrir. […] Le Christianisme n’est pas seulement une civilisation qui renferme en soi toutes les civilisations possibles : c’est aussi le dernier mot de la nature humaine prise dans ce mystère de la vie qui l’étreint et qui la déchire.
Lorsque les Champis triomphent sur toute la ligne, lorsque des paysans et des ouvriers de fantaisie, aussi faux que ceux de Watteau et moins jolis, ont, grâce à une plume qui n’est pas pourtant une baguette de fée, le privilège de tourner la tête à l’Opinion superstitieuse, le moment n’est pas mal choisi, ce nous semble, pour nous rappeler à la réalité de cette nature populaire qu’il n’est pas besoin de flatter pour qu’elle intéresse, et pour nous la montrer éloquemment et simplement, dans tous les plis de sa forte étoffe, ample et sincère, — parlant français et non faux patois ! […] Illuminés d’enthousiasme ; hommes de parti enlevants d’éloquence dans des camps opposés ; natures bouillonnantes qui dégorgent incessamment comme la bouche d’un fleuve, soit des pensées, soit des images ; espèces de Pythonisses de leur propre esprit ; passionnés dans leur âme et passionnés dans leur sang que l’Imagination fouette incessamment de ses mille dards enflammés, ils ont les mêmes audaces d’expression et ils se ressemblent jusque dans leur originalité… La seule différence qu’il y ait entre eux, c’est que Diderot l’athée ne fut jamais qu’un athée. […] Brucker, c’est autre chose, il n’a encore qu’une célébrité contestée, et il faut l’avoir touché dans la vie littéraire pour savoir quelle flamme peut tout à coup jaillir de cette nature de naphte, de ce volcan intellectuel. […] Il écrivit, après leur publication, près de trente volumes qu’il jeta dans le torrent de la publicité avec l’insouciance d’une de ces natures qui se sentent supérieures à ce qu’elles produisent, et qui, malheureusement pour elles, ne s’incarneront jamais de pied en cap dans une œuvre quelconque.
Le bon moment pour naître, l’étonnant fanatisme, cela allait jusque-là, d’un critique célèbre, sans enthousiasme, mais, au contraire, habituellement difficile et hargneux, l’influence de la Revue des Deux-Mondes, aussi réelle alors qu’elle est nulle maintenant, tout, jusqu’à la rareté de ses publications, — rareté qui tenait même à la nature de son talent, — facilita la fortune littéraire de M. […] Mérimée, au contraire, par le fait seul de la nature de son esprit, qui conserve toujours la froideur de l’analyse et le vouloir du procédé, M. […] Carmen elle-même ne demande pas plus d’une heure de lecture, et il y a plus : comme en condensant, il obéit à la nature d’un esprit qui peut pincer avec des doigts nerveux, mais qui ne saurait étreindre à pleins bras, c’est le plus court qui vaut le mieux chez M. […] Mérimée, qui n’est pas seulement sec de nature, mais qui l’est encore de système, et il faut d’autant plus insister sur ce reproche qu’il existe à cette heure beaucoup d’esprits assez intéressés à proclamer que le sans ornement et la brièveté sont la force.
Ce jugement paraîtra sans doute extraordinaire ; mais si l’éloquence consiste à s’emparer fortement d’un sujet, à en connaître les ressources, à en mesurer l’étendue, à enchaîner toutes les parties, à faire succéder avec impétuosité les idées aux idées, et les sentiments aux sentiments, à être poussé par une force irrésistible qui vous entraîne, et à communiquer ce mouvement rapide et involontaire aux autres ; si elle consiste à peindre avec des images vives, à agrandir l’âme, à l’étonner, à répandre dans le discours un sentiment qui se mêle à chaque idée, et lui donne la vie ; si elle consiste à créer des expressions profondes et vastes qui enrichissent les langues, à enchanter l’oreille par une harmonie majestueuse, à n’avoir ni un ton, ni une manière fixe, mais à prendre toujours et le ton et la loi du moment, à marcher quelquefois avec une grandeur imposante et calme, puis tout à coup à s’élancer, à s’élever, à descendre, s’élever encore, imitant la nature, qui est irrégulière et grande, et qui embellit quelquefois l’ordre de l’univers par le désordre même ; si tel est le caractère de la sublime éloquence, qui parmi nous a jamais été aussi éloquent que Bossuet ? […] Lui seul a le secret de sa langue ; elle a je ne sais quoi d’antique et de fier, et d’une nature inculte, mais hardie. […] Toutes ses images sont des sensations vives ou terribles ; il les emprunte des objets les plus grands de la nature, et presque toujours d’objets en mouvement. Il faut que les hommes ordinaires veillent sur eux ; il faut que dans l’impuissance d’être grands, ils soient du moins toujours nobles : ils se voient sans cesse en présence des spectateurs, ils n’osent se fier à la nature, et craignent le repos.
Dans les pièces même telles que L’Avare, Le Tartufe, Le Misanthrope, qui peignent la nature humaine de tous les pays, il y a des plaisanteries délicates, des nuances d’amour-propre, que les Anglais ne remarqueraient seulement pas ; ils ne s’y reconnaîtraient point, quelque naturelles qu’elles soient ; ils ne se savent pas eux-mêmes avec tant de détails ; les passions profondes et les occupations importantes leur ont fait prendre la vie plus en masse. […] Swift, dans Gulliver et Le Conte du Tonneau, de même que Voltaire dans ses écrits philosophiques, tire des plaisanteries très heureuses de l’opposition qui existe entre l’erreur reçue et la vérité proscrite, entre les institutions et la nature des choses. […] La langue anglaise a créé un mot, humour, pour exprimer cette gaieté qui est une disposition du sang presque autant que de l’esprit ; elle tient à la nature du climat et aux mœurs nationales ; elle serait tout à fait inimitable là où les mêmes causes ne la développeraient pas.
L’État doit subvenir à la science comme à la religion, puisque la science, comme la religion, est de la nature humaine. Il le doit même à un titre plus élevé ; car la religion, bien qu’éternelle dans sa base psychologique, a dans sa forme quelque chose de transitoire ; elle n’est pas comme la science tout entière de la nature humaine. […] La récompense de ces modestes travailleurs ne sera pas la gloire ; mais il est des natures douces et calmes, peu agitées de passions et de désirs, peu tourmentées de besoins philosophiques (gardez-vous de croire qu’elles soient pour cela froides et sèches ; au contraire, elles ont souvent une grande concentration et une sensibilité très délicate), qui se contenteraient de cette paisible vie, et qui, au sein d’une honnête aisance et d’une heureuse famille, trouveraient l’atmosphère qu’il faut pour les modestes travaux.
Alors, nos regards curieux En verront naître une espece imparfaite, Qui du cheval n’aura point la beauté, Ni du taureau la force & la fierté ; De tous les deux sa nature est extraite, Mais impuissante à se régénérer. D’un sein fécond, sans jamais s’altérer, Chaque saison, la Nature abondante Répand les dons qu’une main bienfaisante, Dans leur principe, a pour nous préparé. […] Le vrai Philosophe, éclairé par les vérités qu’il connoît, est sans cesse enflammé par le désir d’en connoître de nouvelles ; s’il réfléchit sur ce qu’il fait, s’il observe bien, s’il apprécie ce qui l’entoure, c’est depuis la combinaison de ce qu’il sait & de ce qu’il voit, qu’il s’éleve à de nouvelles découvertes, ou dans les profondeurs de la Nature, ou dans les replis du cœur humain.
La nature y est dénombrée, non pas avec ferveur, décrite. […] Je détestai un poète, chez qui la nature se manifestait sous des traits si vagues et si faux. […] La nature lui sert de décor.
Une de ses mains qu’on voit en dehors est hâlée et brune, l’autre qu’on voit en dedans, est blanche : cela est dans la nature. […] Il serait plus aisé de retrouver les scènes et les personnages de ce peintre ; mais il y a plus d’élégance, plus de grâce, une nature plus agréable dans Greuze ; ses paysans ne sont ni grossiers comme ceux de notre bon Flamand, ni chimériques comme ceux de Boucher. […] Une femme de beaucoup d’esprit a remarqué que ce tableau était composé de deux natures.
« La nature leur a été moins « avare qu’ils ne le sont à eux-mêmes. […] Tout autre langage est abstrait ; toute autre représentation démembre et tue la nature vivante. […] Elle aussi, elle a son développement comme la nature. […] Ainsi muni et curieux, il pouvait avoir des vues générales sur la nature et la condition de l’homme. […] Dans son esprit comme dans la nature, la première place appartient aux multitudes inconnues.
Ô nature ! […] L’esprit, dont la nature est toujours de se porter en avant, peut donner à la scène la vigueur et l’énergie qui lui manquent ; mais après des poèmes monstrueux, qui font frémir la nature, que reste-t-il, sinon de s’enfoncer toujours plus avant dans les atrocités ? […] L’amour ne devait pas usurper les droits de la nature. […] ô nature ! […] Le Théâtre-Français ressemblait au sérail, où l’appartement d’une jolie sultane est gardé par un nègre hideux, l’effroi de la nature.
Sa nature intellectuelle et, par suite, morale, était, par elle-même, droite et active ; un veto intermittent, qui le garantissait de toute faute involontaire, suffisait à lui assurer la parfaite sagesse et constituait à lui seul une direction morale complète ; Socrate n’avait besoin ni de préceptes positifs ni d’encouragements. […] Ainsi s’expliquent les locutions bien connues : la voix de la raison, la voix du cœur, la voix du sang, la voix des passions ; chez nos tragiques, tout mobile est une voix ; ils disent : la voix de la nature, la voix de la fortune, la voix des bienfaits. Chez des auteurs moins classiques, la voix devient un cri ; il y a le cri de l’innocence, le cri de la nature, le cri de l’amour, le cri du remords, le cri de l’honneur, et même le cri du besoin public. […] Qu’un sot entêté parle à son bonnet à tout propos, cela est naturel ; mais, lorsqu’un homme de sens rassis en fait autant, ce n’est plus la nature prise sur le fait, c’est l’art qui se substitue à la nature pour les besoins du genre dramatique. […] Il est incontestable qu’aliéner des faits de conscience sans les externer constitue un état très faiblement anormal, et, sans nul doute, il est à souhaiter « que la nature produise souvent des fous tels que Socrate ».
— La Vie d’un artiste, art et nature (1890). — Un peintre paysan, souvenirs et impressions (1895). […] On ressent, à le feuilleter, une impression complexe, et il y a certaines de ses pièces formant si bien tableau, qu’on s’arrête pour laisser passer l’image ; il faut lire les Glaneuses, les Deux Croix et le poème du Pardon : un long défilé de costumes bretons, de mendiants bariolés, de bannières flottant comme des petites voiles sur cet horizon de mer qui sert de fond à toutes les fêtes bretonnes, apparaît écumant ou calme, uni ou blanchissant, entre les menhirs gigantesques, les vieilles églises romanes, comme la poésie éternelle et l’éternelle menace de la nature.
Le troisième chant, qui a pour objet la nature de l’homme, est terminé par un épisode un peu surchargé de détails, mais où les beautés compensent les défauts. […] Actuellement encore, les trois règnes de la nature sont l’objet des travaux d’un poète, et l’on peut compter sur un bel ouvrage ; car le sujet est admirable, et le poète est M.
Henri Ghéon est un amoureux de la nature, un poète qui sait bien voir et souvent bien rendre les féeries et les enchantements des prés et des bois… Dans ce livre, qui fleure bon la terre et l’herbe fauchée, on ne regrette qu’un métier plus habile et une musique moins élémentaire. […] Henri Ghéon est l’un de ces poètes qui retournent ou prétendent retourner à la nature, et s’il mène à bien la série qu’il a commencée, il aura composé avec une méthode presque didactique quelque chose comme des Géorgiques françaises.
Aristote, dans sa Poétique, avoit réduit le but de la Poésie à l’imitation de la Nature ; M. l’Abbé Batteux, d’après l’Essai sur le Beau du P. […] Il commence par examiner quelle est la nature des Arts, quelles en sont les parties & les différences essentielles ; il fait voir ensuite que leur unique but ne tend qu’à cette imitation nécessaire, & qu’ils ne different entre eux que par les moyens qu’ils emploient pour y arriver.
Ses Pieces de Théatre annoncent l’Observateur, le Critique, le Peintre habile du ridicule ; son talent principal est de saisir la Nature, de la développer avec adresse, & de la peindre avec une piquante précision. […] L’Ecrivain promene sans fatigue son Lecteur, au milieu d’une infinité de tableaux qui peignent d’après nature tout ce que la Scene du monde, depuis la Cour jusqu’aux plus basses conditions, peut offrir d’instructif & de varié.
En effet, les grands sociologues dont nous venons de rappeler les noms ne sont guère sortis des généralités sur la nature des sociétés, sur les rapports du règne social et du règne biologique, sur la marche générale du progrès ; même la volumineuse sociologie de M. […] Nous avons donc été amené, par la force même des choses, à nous faire une méthode plus définie, croyons-nous, plus exactement adaptée à la nature particulière des phénomènes sociaux.
Cette formule affirme l’action de la « nature médicatrice » qui veut vivre. […] Mais comment l’aider, cette nature ? […] C’est la nature commentée. » Et qu’entend-il par ce mot « nature » ? […] Il représente une adoration des mages, avec des personnages de grandeur nature. […] Cela signifie une nature à la fois respectée et ordonnée.
Elle le sait aussi bien entretenir de bons et sages propos comme ferait une femme de vingt-cinq ans. » L’éducation toute lettrée et tout italienne de la jeune Écossaise achevait, en effet, tout ce qu’avait en elle ébauché une riche nature. […] Un tel frère était un favori donné par la nature à la jeune reine. […] Mais toutes les grandes passions sont des prodiges ; si on les mesure à la nature ordinaire de nos sentiments, on se trompe ; il ne faut les mesurer qu’à elles-mêmes ; l’impossible est la mesure de ces passions. […] C’était un désespéré, de mouvement, d’ambition, d’aventures, un de ces aventuriers plus grands que nature, qui brisent en croissant tout le système social dans lequel ils sont nés pour se faire une place à leur mesure ou pour succomber avec éclat en la cherchant. […] Le poëme n’approche pas de l’histoire ; toujours la nature, qui est le souverain poëte, dépasse la fiction par la vérité.
Cette pièce abonde en inconvenances de toute nature. […] L’imprécation de Guanhumara, quand elle prend la nature à témoin de son serment de vengeance, est un des plus beaux morceaux de notre littérature : c’est l’ampleur de la poésie à toute volée de la tragédie antique, bien différente de la tragédie classique… Soutenir ainsi ce ton d’apogée, ce bel élan lyrique pendant trois grands actes, M. […] Jules Méline Au plus grand peintre de la nature, l’Agriculture reconnaissante. […] Sa haute et forte nature se prêtait à un tel rôle, qui eût été insupportable pour tout autre. […] Il était de plus en plus pris de pitié pour les milliers d’êtres que la nature immole à ce qu’elle fait de grand.
Le beau mérite qu’a eu Térence de faire parler ses personnages selon la nature ! La nature est tout au plus bonne dans les bois et dans la solitude. […] Les caractères ne valent même pas ceux de Térence ; ils ne parlent ni selon la nature, ni en gens d’esprit. […] Je vois au sein de la nature L’idée invariable et sûre De l’utile beau, du parfait. […] Il ne veut pas d’une religion que la raison pourrait regarder comme son œuvre, et il en qualifie le système de roman de la nature.
N’est-ce pas s’amuser aux subtilités du paradoxe que d’établir un lien entre des choses de nature si différente ? […] les personnages qu’on y rencontre sont d’étrange nature ! […] Et, en notre siècle, est-ce que la littérature française ne doit pas ses peintures les plus éclatantes de la nature dans le pays du soleil et des bengalis à un poète créole, à Leconte de Lisle ? […] Tu n’auras pas sans doute exprimé tes idées, tes sentiments, ta nature ; mais tu n’auras pas perdu ton temps et ta peine. […] Mais ce qui vaut surtout la peine d’être étudié en détail, c’est l’autre face de la question, j’entends la série des effets que leur position sociale produit sur la nature de leurs œuvres.
L’énigme même de sa nature ambiguë, à la fois génératrice et féconde, les attire en les inquiétant. […] Son étonnante fortune vînt, en partie, de cette double nature : l’homme vit en lui un homme déifié, et l’en aima davantage. […] Fidèle à sa nature qui est de briser tout joug et toute chaîne, il « délie » les âmes en les enlevant de la vie. […] Les promiscuités de la nature étaient mises en scène par leurs mythes dont Bacchus sera désormais l’agent enthousiaste. […] En l’arrachant de la nature pour l’exalter au-dessus d’elle, ses fanatiques l’ont blessé à mort.
Les sciences morales suivent le branle communiqué par celles de la nature. […] L’art qui se pique d’imiter la nature a besoin comme elle de préparations lentes pour des effets rares et intenses. […] C’était bien mal connaître l’histoire et la nature, qui agissent lentement. […] le curieux spectacle, une nature d’homme qui se forme pour l’emploi auquel elle est prédestinée ! […] La nature de ses souffrances est imparfaitement connue, comme l’état de son esprit durant les dernières années.
Mais plutôt ces pages ne font pas voir, elles font, elles créent ; elles ne traduisent pas la nature, elles sont une nature, faite de substance verbale, de rythmes, d’images. […] Celle-ci : Molière défenseur de la nature contre la convention. […] Je ne crois pas que ce style ait été donné dans sa nature. […] Ce qu’un pamphlétaire de cette nature apprécie en l’Église, c’est qu’elle a un enfer. […] Le Français prend parti pour un seul aspect de la vérité, raison, nature, tradition.
Tout est là. « Humiliez-vous, raison impuissante, taisez-vous, nature imbécile. […] Ô nature ! […] Il voit de l’intelligence et de l’ordre dans la nature. […] En revanche, sa sensibilité native lui suffit pour comprendre et aimer la nature. […] Mais par nature, ce grand intellectuel est un sentimental, un inquiet, un anxieux.
M. de Vigny les lisait comme nous ; la nature un peu féminine de son talent le portait naturellement à l’imitation. […] L’excellent esprit de M. de Vigny était de sa nature propre à comprendre cette vérité. […] « Au-dessus de lui est un homme d’une nature plus forte et meilleure. […] « Mais il est une autre sorte de nature, nature plus passionnée, plus pure et plus rare. […] Nous n’avons heureusement pas en France de nature aussi perverse (le crime en dehors), mais il y a des cas où le vice vaut le crime.
Son panégyrique de l’isolement et de la nature est le bréviaire des Timons actuels. […] Un art suprême soumet toute la nature physique aux prodigieux débats de la nature morale. […] Il devient une exception momentanée de la nature. […] Il est, en face de la nature, l’attitude guerrière de l’individu. […] Privé du spectacle de la nature, cet être n’est pas modifié dans son essence.
Molière est du siècle où il a vécu, par la peinture de certains travers particuliers et dans l’emploi des costumes, mais il est plutôt encore de tous les temps, il est l’homme de la nature humaine. […] Molière prit dans ces conférences de Gassendi l’idée de traduire Lucrèce ; il le fit partie en vers et partie en prose, selon la nature des endroits ; mais le manuscrit s’en est perdu. […] Nous avons changé de méthode ; Jodelet n’est plus à la mode, Et maintenant il ne faut pas Quitter la nature d’un pas. […] Ce qui est ubéreux, surtout la gaieté, répugne singulièrement aux natures délicates et rêveuses. […] La lutte qu’il soutint avec l’hôtel de Bourgogne, et dont l’Impromptu de Versailles constate plus d’un détail piquant, n’est autre que celle du débit vrai contre l’emphase déclamatoire, de la nature contre l’école.