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857. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

Celui qui arrive le premier reçoit l’argent. […] Dobson, mais comme il arrive après les accès de remords, cela n’aboutit à rien. […] Mais l’homme qui habite le désert en arrive à trouver un charme subtil à ce fantastique pays de monstruosités. […] Nous n’arrivons jamais à être près de lui. […] Ghose arrivera un jour à se faire un nom dans notre littérature.

858. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre II. Le rôle de la morale » pp. 28-80

L’idée de liberté complète est un excellent point de départ pour arriver à une réglementation insupportable destinée en principe à sauvegarder cette liberté. […] Il leur est arrivé aussi d’affaiblir à l’excès, ou de subordonner trop complètement les désirs individuels sans lesquels la société ne peut vivre, ou même des sentiments affectueux sans lesquels elle perd son agrément. […] Mais s’il s’y oppose, comme cela arrive forcément, ses devoirs sont doubles, opposés et contradictoires selon que nous regardons en lui l’élément social ou la nature individuelle, selon que nous y considérons les autres hommes, qu’il est à un certain degré, ou l’individu différent des autres et hostile aux autres qu’il est aussi par l’autre face de sa nature. […] L’esprit social, si aveugle et si maladroit qu’il lui arrive d’être, a compris le péril et le repousse, assez gauchement, avec l’aide de l’étroitesse et de la raideur d’esprit si largement répandues. […] C’est ce qui arrive quand le désir d’obliger un ami pousse l’homme dans une direction, tandis que le devoir professionnel le tire en sens inverse.

859. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

déesse dont le culte signifie raison et sagesse, toi dont le temple est une leçon éternelle de conscience et de sincérité, j’arrive tard au seuil de tes mystères ; j’apporte à ton autel beaucoup de remords. […] Arrivé enfin au centre de la forêt, à l’endroit où étaient les plus grands chênes, le chariot s’arrêta. […] Est-ce qu’il est arrivé quelque chose à ma cousine Amélie ? […] Arrivé au roulement de tambours de Santerre, il ne put aller plus loin. « S’il lui avait été permis de parler, me dit-il en se levant fièrement, le peuple se serait révolté. […] Le bonheur, c’est le dévouement à un rêve ou à un devoir ; le sacrifice est le plus sûr moyen d’arriver au repos.

860. (1874) Premiers lundis. Tome II « Étienne Jay. Réception à l’Académie française. »

Sans doute il est trop vrai de dire que la langue, dans ce qu’elle avait d’excellent, se déforme, se perd de jour en jour ; qu’elle est à la merci de tous, tiraillée, gonflée, bigarrée en cent façons, et qu’au train dont on la mène, on ne peut savoir, d’ici à cinquante ans, ou seulement à vingt-cinq, ce qui en arrivera. […] Ils disent des banalités avec un air de finesse qui semble promettre ; on cherche, on attend, et rien n’arrive.

861. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Jean Lahor (Henri Cazalis). »

Chaque image qui nous arrive en éveille d’autres, indéfiniment, suscite même la vision confuse de l’Être total. […] C’est mon sang qui coula dans la première aurore… De même, l’idée de l’univers sera toujours présente au poète bouddhiste quand il lui arrivera d’aimer une femme.

862. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Des avantages attachés à la profession de révolutionnaire. » pp. 200-207

Et dès lors, il est bien à l’aise ; il sait pour qui il doit être, et contre qui, toujours et quoi qu’il arrive. […] Car nous avons beau savoir que les fauteurs de révolte ont toujours participé largement de l’égoïsme contre lequel ils s’insurgeaient ; que, si la justice et la charité appellent quelquefois les révolutions, c’est la haine et l’envie qui les accomplissent, et que, par exemple, ce sont les meneurs de grèves qui, nés capitalistes, eussent été les plus durs patrons : il semble parfois que, les révolutions faites, il en revienne tout de même quelque chose, au bout d’un certain temps, aux résignés, aux humbles de cœur, bien qu’elles n’aient été faites ni par eux ni même, au fond, pour eux ; et il arrive ainsi que les violents et les féroces paraissent finalement avoir travaillé pour la justice… Ou peut-être que je m’abuse, et que le bénéfice humain acquis par des moyens révolutionnaires eût pu l’être, et mieux, par un progrès uniquement légal et pacifique.

863. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VII. Le théâtre français contemporain des Gelosi » pp. 119-127

« Sur ces entrefaites, voici arriver un conseiller de la Cour des aides, un commissaire et un sergent, qui viennent demander la taille à ces pauvres gens, et, à faute de payer, veulent exécuter. […] L’autre, italien, était arrivé au plus haut point de culture, et jetait le plus vif éclat.

864. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre IV. Bossuet orateur. »

C’est par l’opposition qui se trouve entre ce grand cœur, cette princesse si admirée, et cet accident, inévitable de la mort, qui lui est arrivé comme à la plus misérable des femmes ; c’est parce que ce verbe faire, appliqué à la mort qui défait tout, produit une contradiction dans les mots et un choc dans les pensées, qui ébranlent l’âme ; comme si, pour peindre cet événement malheureux, les termes avaient changé d’acception, et que le langage fût bouleversé comme le cœur. […] Il expire en disant ces mots, et il continue avec les anges le sacré cantique. » Nous avions cru pendant quelque temps que l’oraison funèbre du prince de Condé, à l’exception du mouvement qui la termine, était généralement trop louée ; nous pensions qu’il était plus aisé, comme il l’est en effet, d’arriver aux formes d’éloquence du commencement de cet éloge, qu’à celles de l’oraison de madame Henriette : mais quand nous avons lu ce discours avec attention ; quand nous avons vu l’orateur emboucher la trompette épique pendant une moitié de son récit, et donner, comme en se jouant, un chant d’Homère ; quand, se retirant à Chantilly avec Achille en repos, il rentre dans le ton évangélique, et retrouve les grandes pensées, les vues chrétiennes qui remplissent les premières oraisons funèbres ; lorsqu’après avoir mis Condé au cercueil, il appelle les peuples, les princes, les prélats, les guerriers au catafalque du héros ; lorsque, enfin, s’avançant lui-même avec ses cheveux blancs, il fait entendre les accents du cygne, montre Bossuet un pied dans la tombe et le siècle de Louis, dont il a l’air de faire les funérailles, prêt à s’abîmer dans l’éternité, à ce dernier effort de l’éloquence humaine, les larmes de l’admiration ont coulé de nos yeux, et le livre est tombé de nos mains.

865. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Il lui est arrivé de dire, je crois, que s’il l’avait connue dès lors, il n’aurait pas fait son premier ouvrage. […] Arrivés à la porte, nous fûmes accostés par un personnage qui en sortait. […] Enfin nous arrivâmes sur la porte de la Sorbonne où M.  […] Ce fut bien pis quand ils virent arriver MM.  […] Il eut cependant comme tous les génies hors ligne beaucoup de peine à arriver.

866. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

On arrivera à n’acheter que les feuilles politiques, les suppléments et les revues illustrées. […] L’impulsion arrive toujours du dehors, parce qu’il n’y a d’originalité qu’en dehors de la capitale. […] Plus on vieillit, plus on arrive à admettre le bon dans le vrai. […] Par quels moyens arrive-t-on à avoir une originalité et une forme personnelles ? […] On n’arrive à l’originalité expressive que par la prof

867. (1864) Études sur Shakespeare

Un tel état de la société amène l’aisance avec la confiance ; et là où règne l’aisance, où la confiance s’établit, arrive bientôt le besoin d’en jouir en commun. […] Un malheur est arrivé à Shakespeare ; prodigue de ses richesses, il n’a pas toujours su les distribuer à propos ni avec art. […] Cependant ces sentiments nous arrivent, nous pénètrent, et de leur existence dépend l’effet dont le poëte a voulu nous saisir. […] C’est ce qui arriverait si, au moment où il se livre à des sentiments qui lui sont familiers, le spectateur était dérangé, c’est-à-dire averti par des formes de mœurs qui lui fussent trop étrangères. […] Les partisans exclusifs du système classique ont cru qu’on ne pouvait arriver à l’unité d’impression qu’à la faveur de ce qu’on appelle les trois unités.

868. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

La forêt s’ouvre, et l’on arrive sur une route à mi-côte. […] Nous arrivons aux cours qui touchent de plus près la vie morale. […] Il m’est souvent arrivé de causer avec eux sur les affaires publiques. […] Depuis longtemps, il était arrivé à l’âge où les hommes qui ont travaillé prennent possession de la place qu’ils se sont faite. […] Le changement d’air arrêta la dyssenterie ; arrivé à Beyrouth, il se traîna hors du navire.

869. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Mackenzie a découvert l’Océan Boréal, et c’est en le remontant qu’il est arrivé à l’Océan Pacifique. […] Le voyageur arrive au pied des Montagnes Rocheuses, et s’engage dans leurs détours. […] Bientôt nos voyageurs arrivèrent chez des tribus indiennes, dont M.  […] Ils arrivaient avec des habits simples, et modestement fermés. […] L’auteur pense que l’ordre et le repos sont les deux plus sûrs moyens d’arriver à ce but.

870. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

C’est ce qui arrive toujours et Molière ne l’ignorait pas. […] Or, qu’arrive-t-il ? […] Cela est arrivé à Corneille avec Polyeucte, avec Théodore ; cela est arrivé à Racine avec Phèdre et avec Athalie ; cela est arrivé plusieurs fois à Dumas fils et cela n’est guère arrivé à Molière qu’avec, peut-être, l’École des maris et avec le Misanthrope. […] Et, comme il arrive toujours, votre sottise devenue manie vous rend méchant où au moins dur. […] Leur mot éternel est : « Est-il possible qu’il arrive du bonheur ? 

871. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

Le Braz a mises en pleine lumière, à la fois le premier et définitivement, sauf correction, que je serais bien étonné qui pût arriver. […] Cela arrive assez souvent. […] Et puis on découvre les raisons, toujours infiniment curieuses, des changements qui sont arrivés dans votre état d’esprit. […] Le 9 thermidor arrive. […] Elle y tâche au moins de toutes ses forces, elle y arrive presque, ma foi, et personne ne lui en veut de n’y point venir absolument.

872. (1900) La culture des idées

D’où et comment m’arrivent-elles ? […] L’homme arrivé au degré vraiment humain limite à son gré sa fécondité ; c’est un de ses privilèges, mais un de ceux qu’il n’atteint que pour en mourir. […] Il est arrivé nécessairement qu’en s’opposant aux excessives apothéoses de la femme ils ont touché aux droits de l’art. […] En insistant on arriverait au langage des couleurs, contrepartie du langage des fleurs, mais plus instable encore et plus arbitraire. […] Mais comment en est-on arrivé à considérer comme un péril toute réelle innovation en art ou en littérature ?

873. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Mais vous vous rappelez ce qui arrive. […] Ces choses arrivent. […] Que nous arrive-t-il donc ? […] Voyez ce qui est arrivé pour Shakespeare. […] Il doit arriver le jour même où s’ouvre le drame.

874. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

Moréas est arrivé au classicisme pur, non sans le parer de beauté — si M.  […] Qu’arrivera-t-il de cette armée ? […] Le comte Tolstoï est arrivé à se le demander plus profondément qu’encore cela n’avait été fait. […] Amiel arriva bon dernier. […] Il arrive, Guillaume présente le héros au roi Louis et à Blanchefleur.

875. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

Il fallait passer par les livres pour arriver aux choses. […] La méthode même pour arriver à la science n’était pas découverte. […] Parfois il faut du génie pour en arriver au bon sens. […] Le decorum devait arriver avec un autre ordre politique. […] À force de vouloir être neuf, il lui arrive de devenir puéril et affecté ?

876. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Jules Claretie nous raconte en un volume intéressant comme tout ce qui est vrai, comme tout ce qui a été vécu ; car, malgré les exagérations de ses récits, tout ce que Brichanteau raconte lui est arrivé ou est arrivé à d’autres. […] Enfin on arrive, mais la pluie commence à tomber. […] qu’il ne lui arrive rien !  […] Ensuite les Prussiens arrivèrent derrière l’ennemi. […] Il arrive souvent que les différentes âzoua d’un même village sont entre elles à couteaux tirés.

877. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « L’obligation morale »

C’est en notant ses propres faiblesses qu’on arrive à plaindre ou à mépriser l’homme. […] N’est-ce pas ce qui est arrivé à la plupart des philosophes ? […] Ni dans un cas ni dans l’autre nous n’arrivons a l’humanité par étapes, en traversant la famille et la nation. […] C’est ce qui arrive dans l’émotion musicale, par exemple. […] La vérité est qu’il faut passer ici par l’héroïsme pour arriver à l’amour.

878. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

On en arriva à l’absurde. […] Il arrive à s’imaginer que c’est une force de s’être affranchi de ce qu’il appelle la bégueulerie. […] Seulement, il arrive un instant où toutes sont épuisées. […] Ce qui est arrivé depuis cette conférence, a confirmé ce que je disais alors. […] Nous en arrivons à suspecter les actes les plus désintéressés et à leur prêter un mobile égoïste.

879. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre II. La parole intérieure comparée à la parole interieure »

Cela arrive évidemment à quelque degré à tous les enfants durant une certaine période de la première éducation. […] Nous arrivons maintenant à un dernier caractère, tout différent des précédents, à une association d’idées tout autre que l’association d’une sensation à une autre sensation ou d’une image à une autre image. […] Mais il m’est arrivé une fois, dans l’état hypnagogique, de me demander si certain bruit était une hallucination de l’ouïe ou un son réel, et cela sans pouvoir m’arrêter à une solution : je dois d’ailleurs reconnaître que le son problématique n’était pas une parole. […] Ce qui arrive aux mots arrive également aux locutions composées et aux phrases usuelles, consacrées, familières, et cela dans la mesure où elles sont familières, c’est-à-dire en proportion de leur fréquence. […] Une conscience décroissante en vertu de l’habitude peut-elle arriver à zéro ?

880. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « L’abbé Fléchier » pp. 383-416

Voyons Fléchier tel qu’il était, apprenons à le goûter dans les qualités qui lui sont propres et qui lui assurent un rang durable comme écrivain et comme narrateur ; ne craignons pas de nous le représenter dans sa première fleur d’imagination et d’âme, dans sa première forme de jeune homme, d’abbé honnête homme et encore mondain ; et bientôt sans trop de complaisance, sans presque avoir à retrancher, nous arriverons insensiblement à celui qui n’avait eu en effet qu’à se continuer lui-même, et à se laisser mûrir pour devenir l’orateur accompli si digne de célébrer Montausier et Turenne, et l’évêque régulier, pacifique, exemplaire, édifiant. […] Voilà pourtant ce qui serait immanquablement arrivé à la relation des Grands Jours si on l’avait publiée plus tôt83. […] À propos de la rivalité entre Riom et Clermont, il cite complaisamment des vers de Chapelain, ce qui lui arrivera encore en un autre endroit : il y a là une légère flatterie à l’adresse de Chapelain, l’un de ses protecteurs. […] Le compliment guindé que lui adressent les précieuses du lieu en l’abordant ; L’Art d’aimer, traduit par le président Nicole, qu’elles trouvent sur sa table, et qu’il leur prête avec le regret de ne pouvoir en même temps les rendre plus aimables ; la demande d’un sermon à faire, qui lui arrive précisément ce jour-là, tout cet ensemble compose un petit tableau malin, moqueur, assorti pourtant, et où rien ne jure. […] Faites que je le prenne en repos et à mon aise, autrement je recommencerai à tousser, et vous répondrez à votre cœur de tous les accidents qui pourraient arriver à ma poitrine. » Ces lettres inédites de Fléchier à Mlle Des Houlières sont en bonnes mains, et j’espère qu’elles seront bientôt publiées.

881. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

Il résulte de plus de cette première période mieux connue, que Marsillac, qui, en effet, avait trente-trois ans bien passés lors de son engagement avec Mme de Longueville, et trente-cinq ans à son entrée dans la Fronde, n’y arriva que déjà désappointé, irrité, et, pour tout dire, fort perverti : et cela, sans l’excuser, explique mieux la détestable conduite qu’il y tint. […] Quelques-unes de ses maximes ont été refaites plus de trente fois, jusqu’à ce qu’il fût arrivé à l’expression nécessaire. […] Quelle que soit la diversité des points de départ, les esprits capables de mûrir arrivent, plus qu’on ne croit, aux mêmes résultats ; mais les rôles sont pris, les apparences demeurent, et le secret est bien gardé. […] » — « Tout arrive en France, » repartit le frondeur moraliste ; et pourtant, remarque M. Bazin, il étoit loin encore d’avoir vu tout ce qui pouvait y arriver. — Un moraliste de l’école de La Rochefoucauld a dit : « Il n’est que de vivre ; on voit tout et le contraire de tout. » 139.

882. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

Elle arrivait simple et franche, avec ses habitudes de conversation aisée, au sein de ce monde de mot d’ordre et d’étiquette où, à ce début, l’on était, en général, assez ignorant et timide. […] Quand les propos assez exacts se transmettraient dans des écrits, dans des lettres, ils y arriveraient la plupart du temps figés, car le papier ne sourit pas245. […] La jeune fille se dit qu’elle montrera les lettres à son père dès qu’il arrivera, et on l’attend de jour en jour. […] A un certain moment, le jeune homme, qui lit Werther, se monte la tête ; le style de ses lettres s’échauffe ; cela va se gâter, quand tout à coup le père, au lieu d’arriver, envoie une de ses sœurs, une tante de la jeune fille, qui la vient chercher et comme enlever du soir au lendemain. […] Nous arrivons au dernier écrit de Mme de Rémusat, à son livre sur l’Éducation des Femmes, publié par son fils.

883. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Charles Labitte »

Il arrivait cette fois pourvu de vers et de prose, de canevas de romans et de poëmes, de comédies, d’odes, que sais-je ? […] Qu’arrive-t-il en effet, et que voyons-nous de plus en plus dans la foule écriveuse qui nous entoure ? […] Quoi qu’il arrive d’ailleurs, mon cher Jules, mon ambition ne sera jamais déçue. […] C’est un Colomb qui se noie avant d’arriver, ou plutôt qui s’en retourne […] Et tâchons nous-mêmes, nous qui l’avons si bien connu, de les cultiver assez pour mériter d’arriver jusqu’au rivage, et pour y déposer en lieu sûr ce que nous portons de plus cher avec nous, la mémoire de l’ami mort dans la traversée et enseveli à bord du navire !

884. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (4e partie) » pp. 429-500

Comme dans toutes les régions intertropicales, il n’y a guère qu’une seule et même saison durant le cours entier de l’année, et on n’y observe ni hiver ni été ; on y voit les phénomènes de la vie animale et végétale se reproduire régulièrement, à peu près vers la même époque, ou pour toutes les espèces, ou pour tous les individus d’une espèce donnée, comme il arrive dans les zones tempérées. […] Ce moment dispose admirablement à être touché de Saint-Pierre, mais il échappe aux curieux qui arrivent en voiture. […] La longueur totale de ces trois places qui précèdent Saint-Pierre est, à partir de la rue par laquelle on y arrive, de mille cent quarante-huit pieds. […] Une seule pierre, déplacée dans ces carrières de pierres superposées étage à étage, ferait pencher ce monument et vous arriveriez en poussière impalpable dans la poudre et la ruine. […] « Le matérialisme, en effet, n’est arrivé à cette conception de matière pure que par l’abstraction, c’est-à-dire par la séparation graduelle de toutes les qualités ou propriétés qu’on observe aux divers degrés de l’échelle des êtres.

885. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre V : Règles relatives à l’explication des faits sociaux »

L’un cherchera à le changer pour le mettre en harmonie avec ses besoins ; l’autre aimera mieux se changer soi-même et modérer ses désirs, et, pour arriver à un même but, que de voies différentes peuvent être et sont effectivement suivies ! […] Ce qui a masqué aux yeux de tant de sociologues l’insuffisance de cette méthode, c’est que, prenant l’effet pour la cause, il leur est arrivé très souvent d’assigner comme conditions déterminantes aux phénomènes sociaux certains états psychiques, relativement définis et spéciaux, mais qui, en fait, en sont la conséquence. […] Nous arrivons donc à la règle suivante : La cause déterminante d’un fait social doit être cherchée parmi les faits sociaux antécédents, et non parmi les états de la conscience individuelle. […] Sans doute, il peut se faire, et il arrive en effet, que, par contre-coup, il y serve aussi à l’individu. […] C’est ce qui arrive aux hommes d’État et, plus généralement, aux hommes de génie.

886. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Crétineau-Joly »

ce qu’on appelle l’esprit d’une époque n’est guère redoutable que parce que ceux qui devraient le diriger se laissent emporter à son flot, par manque de hardiesse ou par manque de génie, et c’est là précisément ce qui arrivait en Europe vers l’année 1766. […] Pour arriver plus tard jusqu’à Rome, on devait d’abord passer sur le cœur des enfants de Loyola ; on devait diminuer Rome partout où elle était, et elle existait partout où il y avait des Jésuites. […] Ils arrivèrent. […] Le temps propice n’est pas encore arrivé pour vous, il viendra et il passera pour les autres. […] Alors on comprend les mots du Jésuite à ses frères : « Le temps propice n’est pas encore arrivé pour vous, il viendra et passera pour d’autres.

887. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

Moreau, comme Joseph-Bonaparte, voit dans sa tête toutes les choses qu’il craint, et les décrit comme si elles étaient arrivées. […] car Flaubert, comme les gens qui ne savent plus parler (infantes)>, en arrive à l’inarticulé et aux onomatopées ! […] Elle arrivait sur vous brutalement comme une tapisserie, et il ne la voyait bien qu’au microscope. […] Par quels procédés dégradants l’auteur de Madame Bovary, qui savait peindre ressemblants les bourgeois, est-il arrivé presque à les calomnier et à faire prendre parti pour eux ? […] peut-être arrêté et étranglé par l’ennui qu’il se causait à lui-même, et que le lecteur ne finira pas, à coup sûr, plus que lui, mais finira certainement bien avant d’être arrivé, comme lui, au chiffre affreux de quatre cents pages !

888. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — I. » pp. 234-253

Même après les avantages, on laisse souvent l’ennemi se retirer en bon ordre : « Il aurait été difficile de l’entamer, dit-il d’une de ces premières marches prussiennes dont il est témoin ; à la vérité nous n’étions pas entamants. » À une première affaire où il s’agit d’occuper une crête de hauteur, il y arrive avec son monde en même temps que l’ennemi : « Nous eûmes un moment de flux et de reflux comme au parterre de l’Opéra. » Cette image lui vient tout naturellement comme à une fête. […] Si l’on allait plus au fond, même sans prétendre au technique, on trouverait les caractères des divers généraux vivement dessinés d’après leurs actions mêmes : le maréchal Daun, prudent, circonspect, méthodique, à qui il arrive un jour de galoper pour la première et la dernière fois de sa vie, et qui, après la victoire de Hochkirch, se met à écrire à Marie-Thérèse pour sa fête de sainte Thérèse la relation de la victoire, au lieu de donner les derniers ordres pour la poursuivre ; il s’appuie sur une pierre pour écrire : « Cette pierre-là fut notre pierre d’achoppement », dit le prince de Ligne qui aimait les jeux de mots, surtout si dans ces gaietés sur le mot il y avait de l’imagination. […] Celui que Mme Du Deffand et Grimm faisaient d’abord quelque difficulté d’admettre comme de la pure race des esprits français, l’était si naturellement devenu, qu’écrivant en 1807 de Tœplitz à son compatriote le prince d’Arenberg, l’ancien ami de Mirabeau, et lui parlant de M. de Talleyrand, qui venait d’arriver : « Jugez, disait-il, de son plaisir d’être reçu par moi, car il n’y a plus de Français au monde que lui, et vous et moi, qui ne le sommes pas. » Et il disait vrai en parlant ainsi. […] Il n’est pas exclusif ; il serait bien fâché de bannir la ligne droite ; il ne veut pas substituer la monotonie anglaise à la monotonie française, ce qui de son temps arrivait déjà ; mais, en jardins comme en amour, il est d’avis qu’il ne faut pas tout montrer d’abord, sans quoi, le premier moment passé, l’on bâille et l’on s’ennuie.

889. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

L’enfant arriva donc, à neuf ans, rue de la Harpe par le coche. […] Les choses reprennent ensuite le même train, et préparent une nouvelle révolution qui arrive en France, où tout s’oublie, tous les quarante ans. […] Après avoir jeté en passant quelques idées sensées et pratiques sur la réforme à faire dans les études, il arrive à ses années de jeunesse proprement dite : elles furent plus ardentes que romanesques et délicates. […] Il eut de tout temps de ces mots et des plus heureux, comme lorsque plus tard un candidat à l’Académie lui donnant à entendre qu’il était malade, infirme, et qu’il n’occuperait le fauteuil que peu de temps, Duclos repartit : « L’Académie n’est pas faite pour donner l’extrême-onction. » Mais d’autres fois il manquait son effet et n’arrivait qu’à la crudité, lorsqu’il disait, par exemple, des drames larmoyants, alors à la mode : « Je n’aime pas ces pièces qui font tant pleurer : ça tord la peau. » On n’a ici que la rudesse de la secousse et le choc sans l’aiguillon.

890. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

. — Appliquez-vous toujours. » Ce sont les formes ordinaires de ce démonstrateur chrétien qui, de ces trois choses proposées à l’orateur ancien, instruire, plaire, émouvoir, ne songe qu’à la première, méprise la seconde, et est bien sûr d’arriver à la troisième par la force même de l’enseignement et la nature pénétrante de la vérité. […] Je sentais, au contraire, reparaître présente et vivante cette idée formidable de la mort au sens chrétien, idée souverainement efficace si on la sait appliquer à toutes les misères et les vanités, à toutes les incertitudes de la vie : ce fondement solide et permanent de la morale chrétienne m’apparaissait à nu et se découvrait dans toute son étendue par l’austère exposition de Bourdaloue, et j’éprouvais que, dans le tissu serré et la continuité de son développement, il n’y a pas un instant de pause où l’on puisse respirer, tant un anneau succède à l’autre et tant ce n’est qu’une seule et même chaîne : « Il m’a souvent ôté la respiration, disait Mme de Sévigné, par l’extrême attention avec laquelle on est pendu à la force et à la justesse de ses discours, et je ne respirais que quand il lui plaisait de finir… » À peine s’il vous laissait le temps de s’écrier, comme cela arriva un jour au maréchal de Grammont en pleine église : « Morbleu ! […] Lorsqu’il arrive à l’heure de cette conversion, il a un retour sur lui-même, comme il s’en permet peu d’ordinaire ; mais ici le mouvement est indiqué et comme irrésistible : Le dirai-je, chrétiens ? […] Combien de fois, Seigneur, m’est-il arrivé de goûter avec suavité l’abondance de ces consolations célestes dont vous êtes la source, et qui sont déjà sur la terre un paradis anticipé !

891. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — I » pp. 93-111

Elle arriva de son ambassade de Turin l’hiver de 1719, dans le temps que nous ne nous quittions guère Mme de … et moi. […] Comme elle arrivait ruinée de son ambassade, il fut question de raccommoder les affaires de sa maison : des amies complaisantes s’entremirent ; on la livra à M. le duc. […] Une fois pourtant il lui réussit peu de vouloir faire le courtisan trop zélé, et il le confesse ou plutôt il le raconte bonnement : Pendant que j’étais intendant du Hainaut, il arriva qu’un homme d’Avesnes, qui avait été au sacre du roi à Reims se faire toucher par le roi pour les écrouelles qu’il avait bel et bien, cet homme, dis-je, se trouva absolument guéri trois mois après. […] Il cherchait de lui-même à se rendre utile ; il composait des mémoires sur les différentes matières qui étaient alors en litige, notamment sur les démêlés parlementaires si vivement excités dans l’affaire ecclésiastique de la Constitution ; lorsqu’il s’élevait une difficulté nouvelle, il arrivait quelquefois que le roi disait : « N’y a-t-il pas là-dessus un mémoire de M. d’Argenson ? 

892. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — I » pp. 395-413

Je le répète encore, je n’écris que pour m’amuser, et je me fais un plaisir de ne rien cacher de tout ce qui m’est arrivé, pas même de mes plus secrètes pensées. Mais en écrivant ce qui lui est arrivé, elle raconte ce qu’ont fait les autres, ce qu’ils ont dit et machiné ; elle les peint et elle les montre à nu dans leurs intriguesah, dans leurs vices, dans leur nature fantasque ou brutale, dans leur fonds de grossièreté épaisse et encore mal civilisée. […] À peine monté sur le trône, il avait écrit à sa sœur (29 juillet 1740) : « Nos savants n’arriveront qu’à la fin de l’année, et, j’espère de recueillir à Berlin tout ce que ce siècle a produit de plus fameux. […] Vous me voyez encore effarouché (16 juin 1753) de mes aventures avec messieurs les beaux esprits ; mais j’ai essuyé quelques éclaboussures en passant, comme il arrive qu’on reçoit des coups en voulant séparer des gens qui se battent.

893. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

Cela renouvelle d’ailleurs, de s’occuper de ceux qui arrivent, même quand ces jeunes gens n’ont de la jeunesse que la force et se produisent déjà très faits et très mûrs. […] On arriverait par degrés à l’endroit où l’accord cesse (s’il doit cesser), à la limite. […] J’ai hâte d’arriver au second ouvrage de M.  […] Les arêtes sont tranchantes et dentelées comme les crêtes des flots soulevés ; ils arrivent de tous côtés, ils se croisent, ils s’entassent, hérissés, innombrables, et la houle de granit monte haut dans le ciel aux quatre coins de l’horizon.

894. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — II » pp. 18-34

Tous les bruits qui s’élèvent dans le lointain de la campagne arrivent à l’oreille à la faveur de ce silence : ce sont des chants de laboureurs, des voix d’enfants, des piaulements et des refrains d’animaux, et de temps à autre un chien qui aboie je ne sais où, et des coqs qui se répondent comme des sentinelles. […] Cependant ces joies de la famille, trop senties par un cœur à qui il n’était point donné de les goûter pour son propre compte, l’attendrissaient trop ; il en était venu, il nous le dit, à pleurer pour un rien, « comme il arrive aux petits enfants et aux vieillards ». […] Il arrive aussi que l’âme est pénétrée insensiblement d’une langueur qui assoupit toute la vivacité des facultés intellectuelles et l’endort dans un demi-sommeil vide de toute pensée, dans lequel néanmoins elle se sent la puissance de rêver les plus belles choses… Rien ne peut figurer plus fidèlement cet état de l’âme que le soir qui tombe en ce moment. […] J’ai connu de ces âmes-là, et il m’est arrivé à moi-même d’en décrire une autrefois, dans un roman que cette affinité secrète avait fait agréer de Guérin avec indulgence.

895. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Charles-Quint après son abdication, au monastère de Saint-Just »

Lorsqu’il arriva en Espagne au mois de septembre 1556, il ne trouva pas les choses prêtes comme il les avait recommandées : il avait choisi pour son dernier abri ici-bas le monastère de Saint-Just de l’Ordre de saint Jérôme, situé dans un site pittoresque de l’Estramadure ; il avait prescrit qu’on eût à y bâtir un édifice contigu où il pût vivre avec un petit nombre de serviteurs, à part bien qu’à portée de la compagnie des moines et à même, pour ainsi dire, de tous les exercices religieux. […] Mais d’autre part, depuis qu’on a pu lire les lettres nombreuses écrites en ce même temps par les personnes de l’entourage de Charles-Quint, les consultations à lui adressées sur toutes les affaires politiques de l’Europe et les réponses, on a un double jour ouvert sur la pensée du grand solitaire ; il n’a plus été possible de dire avec Robertson : « Les pensées et les vues ambitieuses qui l’avaient si longtemps occupé et agité étaient entièrement effacées de son esprit ; loin de reprendre aucune part aux événements politiques de l’Europe, il n’avait pas même la curiosité de s’en informer. » Et sans faire de lui le moins du monde un ambitieux qui se repent, ni sans accuser les bons moines d’avoir falsifié la vérité parce qu’ils en ont ignoré la moitié, on est arrivé à voir le Charles-Quint réel, naturel, non légendaire, partagé entre les soins qu’il devait encore au monde et à sa famille, traité et considéré par elle comme une sorte d’empereur consultant, et en même temps catholique fervent, Espagnol dévot et sombre, tourné d’imagination et en esprit de pénitence aux visions de purgatoire ou d’enfer, et aux perspectives funèbres. […] Mais si ce n’était ce jour-là, le lendemain il en arrivait d’autres ; la poste ne chômait pas ; les informations, les consultations se succédaient. […] Il n’avait qu’un désir étroit et timide au sujet de ce fils, c’est qu’arrivé à l’âge d’homme il prît le froc et se fît moine.

896. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

Arrivé auprès de nous, il s’écria : « Si j’en juge au train dont elles trottent, vos Seigneuries s’en vont, ni plus ni moins, prendre possession de quelque place ou de quelque prébende à la Cour, où sont maintenant Son Éminence de Tolède et Sa Majesté. […] Vous êtes venu bien mal à propos pour faire ma connaissance, car il ne me reste guère de temps pour vous remercier de l’intérêt que vous me portez. » — Nous en étions là quand nous arrivâmes au pont de Tolède ; je le passai et lui entra par celui de Ségovie. […] On a souvent raconté l’anecdote suivante : on était en 1615 ; une ambassade française venait d’arriver à Madrid ; le cardinal-archevêque de Tolède rendait sa visite à l’ambassadeur ; dans la conversation qui s’engagea entre les gentilshommes français et les gens de la suite du Cardinal, il fut question des livres nouveaux, et le nom de Cervantes fut prononcé. […] La parodie du Moyen-Age date de loin et remonte bien plus haut ; son livre, à lui, fut comme la cavalerie qui arrive tout à la fin de la bataille et qui donne à propos : une ou deux charges suffisent pour mettre en pleine déroute ce qui ne tenait déjà plus.

897. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Qu’arrive-t-il donc d’imprévu aujourd’hui ? […] C’est une suite de coups de trompette ; c’est à qui arrivera le premier. […] Dauban, l’éditeur actuel des Mémoires de Mme Roland et qui arrive à sa date, 71 ans après la mort de cette femme illustre, a beau jeu pour venir nous développer aujourd’hui sa doctrine austère ; il est bon, toutefois, de l’entendre à ce sujet. […] Dès que je suis libre, je remonte au cabinet commencer ou continuer d’écrire ; mais, quand le soir arrive, le bon frère nous rejoint ; on lit des journaux ou quelque chose de meilleur ; il vient parfois quelques hommes ; si ce n’est pas moi qui fasse la lecture, je couds modestement en l’écoutant, et j’ai soin que l’enfant ne l’interrompe pas, car il ne nous quitte jamais, si ce n’est lors de quelque repas de cérémonie : comme je ne veux point qu’il embarrasse personne ni qu’il occupe de lui, il demeure à son appartement ou il va promener avec sa bonne et ne paraît qu’à la fin du dessert.

898. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Exploration du Sahara. Les Touareg du Nord, par M. Henri Duveyrier. »

Les eaux qui coulent vers le nord de l’Afrique et vers la Méditerranée, sans y arriver pour cela, et celles qui, d’autre part, coulent sur les versants opposés et vont rejoindre le Niger, séparent, à leur source, les Touâreg du Nord d’avec ceux du Midi. […] « De 1826 à 1827, arrive à Ghadamès un chrétien recommandé par le consul général d’Angleterre à Tripoli : c’est le major Alexandre Gordon Laing. Il veut se rendre à In-Salah et de là tenter d’arriver à Timbouktou. […] Duveyrier arriva chez les Touâreg, il n’y avait pas moins de neuf ans qu’il n’avait plu, — sérieusement plu, — sur leur territoire ; on peut juger de l’aridité.

899. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire de la Grèce, par M. Grote »

Grote, doublé de notes savantes et comme escorté à tout instant de textes originaux, nous arrivât par les soins d’un traducteur familier avec la langue grecque ; et pour tout indianiste initié au sanscrit, le grec n’est qu’un développement relativement aisé et comme une branche collatérale et dérivée de ses premières et hautes études de linguistique. […] Arriverait-on, même avec l’esprit de divination le plus sagace, à dégager rien de raisonnable et de véritablement digne de l’histoire à travers ces récits vingt fois transformés et défigurés ? […] Grote envisage sous cet aspect les poëmes homériques, l’Iliade et l’Odyssée, et il arrive à des conclusions qui, par leur modération et leur plausibilité, m’ont beaucoup plu et m’ont paru apporter une certaine paix, une médiation conciliante, dans l’espèce de trouble et de partage où ont dû nous laisser en France les dernières guerres homériques engagées depuis plus de cinquante ans entre les savants d’outre-Rhin. […] Giguet, auteur d’une traduction d’Homère, et l’un des esprits les plus aiguisés et les mieux avisés sur la question, une lettre très-vive dont je citerai la partie essentielle : « Monsieur, veuillez ouvrir votre Iliade et lire : chant IV, les vers 512 et 513, — chant V, les vers 787 à 791, — chant VII, les vers 220 et 230 : — vous reconnaîtrez qu’entre les IIe et VIIIe chants, la colère d’Achille ne cesse pas un instant d’être le nœud du poëme. — Quant à l’ambassade conseillée (chant IX) par Nestor, rapprochez-la des vers de 105 à 110, chant XIII, et réfléchissez à ce qui fût arrivé si Agamemnon n’eût point montré de la bonne volonté, après la première défaite des Achéens.

900. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SOUZA » pp. 42-61

Comme on était mariée au sortir du couvent, par pure convenance, il arrivait que bientôt le besoin du cœur se faisait sentir ; on formait alors avec lenteur un lien de choix, un lien unique et durable ; cela se passait ainsi du moins là où la convenance régnait, et dans cet idéal de dix-huitième siècle, qui n’était pas, il faut le dire, universellement adopté. […] On lit des détails assez particuliers sur la vie et les sentiments de Mme de Flahaut à cette époque dans le Mémorial de l’Américain Gouverneur Morris qui arriva à Paris en février 1789 et ne tarda pas à être présenté chez elle (Voir, au tome I de l’édition française, les pages 236, 241, 249, 257, ne pas oublier la page 250). […] Mais quand les motifs sur lesquels l’auteur des Mémoires s’appuie ne seraient pas d’une exagération visible, son étonnement ne me paraîtrait pas plus fondé ; car, suivant moi, on n’est jamais en condition d’observer mieux, d’apprécier et de peindre plus finement ce monde-là (si on a. le tact) que lorsque, n’en étant pas tout à fait, de bonne heure on y arrive. […] Une fois, au retour d’un voyage à Berlin, Mme de Souza arrivait à Saint-Cloud pour voir l’impératrice Joséphine.

901. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 193-236

C’était Hyeronimo qui, entendant les cloches du supplice, et en ne me voyant pas arriver sur ses pas sous l’arche du pont, s’était défié enfin de quelque chose, était rentré dans Lucques, avait volé à la porte de la prison, et, apprenant là par le piccinino que les sbires me menaient mourir à sa place, avait volé comme le vent sur mes traces, et venait réclamer à grands cris son droit de mort, s’il était encore temps. […] que de bénédictions nous lui donnâmes, quand ce jour fut arrivé et quand la femme du bargello, sauvée de tous soupçons par ma ruse, revint avec eux me reprendre, huit jours après au couvent, pour rentrer ensemble dans notre demeure. […] Il était nuit quand j’arrivai à la ville, je me glissai à travers la porte à la faveur d’un groupe de familles connues des gardes de la douane qui rentraient, avant les portes fermées, dans la ville, sans être vue au visage, ni fouillée, ni interrogée ; j’en rendis grâce à la Madone dont la statue dans une niche, sous la voûte de la porte, était éclairée par une petite lampe. […] La concierge du couvent alla chercher la sage-femme ; mais quand elle arriva j’avais déjà un bel enfant sur mon sein.

902. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

Et si les belles phrases savantes et cadencées n’arrivent à leurs oreilles que par lambeaux confus, ils comprennent juste autant que s’ils entendaient. La nef centrale, où sont admis seulement les hommes est déjà à moitié pleine au moment où j’arrive. […] Enfin, comme c’est par l’accroissement de leur propre puissance qu’ils cherchent le bien spirituel des âmes, il leur arrive, à leur insu, de s’attacher au moyen plus qu’à la fin et de ne pas paraître entièrement désintéressés. […] Ajoutez qu’à défaut de l’histoire, qu’il savait juste assez pour l’interroger avec éloquence, Lacordaire se contentait parfois de l’anecdote et qu’il lui arrivait de prouver la vérité de la religion chrétienne par un mot de Jean-Jacques ou de Napoléon à Sainte-Hélène.

903. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Henry Rabusson »

Dès lors, qu’arrive-t-il ? […] Il arrive d’ailleurs presque toujours que celui qui nous fait des peintures du monde s’y complaît trop visiblement, se sait bon gré d’être si bien au courant des élégances, prodigue les détails qui nous les révèlent. […] Il arrive parfois à tel brave homme d’artiste, de savant ou d’écrivain, un peu gauche et taciturne, de s’émerveiller de la rapidité de conception et d’esprit de tel homme du monde et de se faire à lui-même l’effet d’un sot quand il voit cet agrément, cette finesse, cette abondance de conversation. […] Il aime sans aimer, il aime exprès : et c’est pourquoi il cesse d’aimer dès qu’arrive l’heure des résolutions suprêmes, du jour où son amour, en se prolongeant, risquerait de compliquer irrémédiablement sa vie, cesserait d’être un exercice agréable et ingénieux, une occasion d’expériences et de vérifications morales.

904. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « La Mare au diable, La Petite Fadette, François le Champi, par George Sand. (1846-1850.) » pp. 351-370

Cependant l’enfant fait sa prière, que lui souffle mot à mot la petite Marie, et, comme il est arrivé à un certain endroit de l’oraison où il s’endort régulièrement chaque soir, il ferme les yeux déjà ; mais ses idées à lui-même s’embrouillent un peu à ce moment de s’endormir, et, mêlant vaguement tout ce qu’il a vu et entendu durant cette soirée : « “Mon petit père, dit-il, si tu veux me donner une autre mère, je veux que ce soit la petite Marie.” — Et sans attendre de réponse, il ferma les yeux et s’endormit. » Touchante délicatesse que ce soit le petit Pierre, l’ange d’innocence, qui, le premier, exprime, en s’endormant, cette idée qui n’a été que vague et flottante jusque-là ! […] Germain en triomphe du moins, il respecte cette pureté de la jeune fille qu’il a étonnée un moment ; il achève son voyage, et n’arrive qu’au matin chez la veuve, la lionne de village, dont il est dégoûté, même avant de l’avoir vue. […] Quand l’expression manque, le petit Pierre arrive, et il est l’expression vivante. […] Comme il arrive toujours, on a fini par le plus simple.

905. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. » pp. 432-452

« Religion à part, dit M. de Chateaubriand (en un endroit où il parle de l’ivresse et de la folie), le bonheur est de s’ignorer et d’arriver à la mort sans avoir senti la vie. » Le plus souvent en effet, si l’on retranche cette parenthèse de religion qui est là comme pour la forme, on retrouve en M. de Chateaubriand tantôt une imagination sombre et sinistre comme celle d’Hamlet, et qui porte le doute, la désolation autour d’elle, tantôt une imagination épicurienne et toute grecque, qui se complaît aux plus voluptueux tableaux, et qui ira, en vieillissant, jusqu’à mêler les images de Taglioni avec les austérités de Rancé. […] En 1802, étant allé pour affaire à Avignon, il fit une excursion jusqu’à Vaucluse, et dans une lettre à Fontanes, datée du 6 novembre 1802, il disait : « J’arrive de Vaucluse ; je vous dirai ce que c’est. […] » qui se croit privilégiée en douleur, en malheur ; qui a des étonnements, des attendrissements sur elle-même, sur ses propres fortunes ; qui, à chaque chance humaine qui lui arrive, se dit : « Cela n’arrive qu’à moi ! 

906. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

En me livrant à la fois au souvenir de l’impression reçue et au sentiment présent, je peindrai doublement l’état de mon âme, savoir au moment où l’événement m’est arrivé et au moment où je l’ai décrit ; mon style inégal et naturel, tantôt rapide et tantôt diffus, tantôt sage et tantôt fou, tantôt grave et tantôt gai, fera lui-même partie de mon histoire. […] Lent à penser, prompt à sentir, avec des convoitises ardentes et rentrées, avec une souffrance et une contrainte de chaque jour, Rousseau arrive à l’âge de seize ans, et il se peint à nous en ces termes : J’atteignis ainsi ma seizième année, inquiet, mécontent de tout et de moi, sans goût de mon état, sans plaisirs de mon âge, dévoré de désirs dont j’ignorais l’objet, pleurant sans sujet de larmes, soupirant sans savoir de quoi ; enfin caressant tendrement mes chimères, faute de rien voir autour de moi qui les valût. […] Les lecteurs français, habitués à l’air factice d’une atmosphère de salon, ces lecteurs urbains, comme il les appelle, s’étonnèrent tout ravis de sentir arriver, du côté des Alpes, ces bonnes et fraîches haleines des montagnes, qui venaient raviver une littérature aussi distinguée que desséchée. […] Il a eu faim dans sa vie ; il note dans ses Confessions, avec un sentiment de bénédiction pour la Providence, la dernière fois où il lui est arrivé de sentir à la lettre la misère et la faim.

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