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871. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Alors elle n’est plus Diane, elle s’appelle Séléné, la Lune paisible et propice. […] Ils appelaient « doux » ses traits invisibles. « Ô ma mère !  […] Elles appellent « le chier sire », il apparaît tremblant et docile ! […] Maudite en haut, elle est, en bas, bien reçue, parfois appelée. […] La Mort musulmane s’appelle Azraël.

872. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Judith (1845-1917) »

Judith Walter a écrit, et cette strophe délicieuse et savante évoque son image, bien mieux que je n’ai su le faire : Derrière les treillages de sa fenêtre, une jeune femme qui brode des fleurs brillantes sur une étoffe de soie, écoute les oiseaux s’appeler joyeusement dans les arbres. […] Prisonnière de son temps et de son milieu, horrifiée par ce que nous appelons notre civilisation occidentale (agio, machinisme, canons perfectionnés), elle s’en évade pour revenir aux pays chatoyants de son rêve, la Perse antique, l’Égypte, l’Inde, le Céleste-Empire, le Royaume du Soleil-Levant.

873. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Introduction » pp. 5-10

Frapié que l’Académie Goncourt appelle encore un jeune. […] Il n’y avait pas lieu de tomber dans cette erreur qui fait appeler « jeunes » des écrivains illustres et âgés de plus de cinquante ans.

874. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « De la comédie chez les Anciens. » pp. 25-29

Enfin, cette ressource étant encore interdite aux poètes comiques, Ménandre et ses contemporains cherchèrent à intéresser le spectateur par une intrigue attachante et par la peinture des mœurs générales : c’est ce qu’on appelle la comédie nouvelle, que Plaute et Térence offrirent aux Romains. […] Des baladins allaient de ville en ville jouer des farces qu’ils appelaient comédies, dont les intrigues sans vraisemblance et les situations bizarres ne servaient qu’à faire valoir la pantomime italienne.

875. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre VII. Des Saints. »

Pythagore, Platon, Socrate, recommandent le culte de ces hommes, qu’ils appellent des héros. […] « Ces héros pleins de bonté et de lumière pensent toujours à leur Créateur, et sont tout éclatants de la lumière qui rejaillit de la félicité dont ils jouissent en lui. » — Et plus loin, « héros vient d’un mot grec qui signifie amour, pour marquer que, pleins d’amour pour Dieu, les héros ne cherchent qu’à nous aider à passer de cette vie terrestre à une vie divine et à devenir citoyens du ciel69. » Les Pères de l’Église appellent à leur tour les saints des héros : c’est ainsi qu’ils disent que le baptême est le sacerdoce des laïques, et qu’il fait de tous les chrétiens des rois et des prêtres de Dieu 70.

876. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Hallé  » pp. 127-130

Ces jugements d’après [lesquels] nous appelons beau dans la rue ce que nous appellerons laid dans l’atelier, et alternativement ne nous permettent pas d’avoir une certaine sévérité de goût.

877. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — I »

Et de là son horreur pour ce qu’il a appelé l’esprit jacobin, pour la prétention d’imposer un état de choses à un peuple avant qu’il y fût parvenu naturellement. […] Nous l’admirons comme un type, parce qu’il a manifesté, plus qu’aucun homme de notre connaissance, ce don singulier qu’on appelle l’imagination philosophique.

878. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

Il l’appelle « chétif insecte, excrément de la terre ». […] Point de colère ; il fléchit à l’instant le genou et appelle le nouveau roi par ses titres ; il a même voté pour lui. […] Le loup est procureur du roi, appelle l’âne « pelé, galeux », demande la tête du coupable, et veut sauver la société. […] Tel troque sa femme ; tel court celle d’autrui ; tel bat la sienne ; un autre, trompé, « vendique son bien de couchette, lui chante goguette, l’appelle tout franc et tout net », je n’ai pas besoin de dire comment. […] 105 La Fontaine aussi est un rieur ; n’a-t-il pas appelé sa fable une comédie ?

879. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Avant l’époque que la société moderne a nommée antique, il existe une autre ère, que les anciens appelaient fabuleuse, et qu’il serait plus exact d’appeler primitive. […] De quel droit cet acteur, qui s’appelle Pierre ou Jacques, prend-il le nom de Cid ? […] Cette Melpomène, comme elle s’appelle, frémirait de toucher une chronique. […] C’est une cloche de cuivre qui appelle les populations au vrai temple et au vrai Dieu. […] Il est temps que tous les bons esprits saisissent le fil qui lie fréquemment ce que, selon notre caprice particulier, nous appelons défaut à ce que nous appelons beauté.

880. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

Il aurait pu s’appeler, de son vrai nom, Noli tangere ; Gare à qui me touche ! […] Il y était appelé et désiré ; il était nommé, il allait l’être (juin 1753) ; on l’avait même dispensé cette fois des visites d’usage, lorsque les dévots agirent en Cour et qu’il y eut défense de passer outre. […] J’appelle cette dernière la reine des épigrammes. […] Ce nom même de de Bar n’était pas le sien ; Bar était son pays natal ; elle était d’un village proche de Bar-le-Duc : elle s’appelait de son nom Quenaudon, et elle avait eu un premier mari, natif de Copenhague. […] Mllede Bar l’appelle en un endroit « ce truand de Médalon. » Cela ne nous dit pas de quelle nature étaient ses provisions de voyage.

881. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

Thiers, dont on ne m’accusera pas de dénigrer les grandes œuvres historiques (voyez mes Entretiens sur l’Histoire de l’Empire, que j’ai appelée, le premier, le livre du siècle), M.  […] » Charles X appelait de ce nom tous les sentiments populaires qu’on lui prêtait pour attester son attachement à la charte libérale de Louis XVIII et tout le pacte moderne de la monarchie et de la liberté. […] Laffitte lut à haute voix la lettre à ses collègues ; ils en écoutèrent la lecture avec des marques d’assentiment unanime. « Qu’on appelle mon fils », dit le roi. […] Croyez maintenant à ces contre-vérités des partis qu’on appelle l’histoire ! […] Faut-il la braver, la dissoudre, et en appeler au pays dans une élection générale ?

882. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre III. De l’organisation des états de conscience. La liberté »

Et la manifestation extérieure de cet état interne sera précisément ce qu’on appelle un acte libre, puisque le moi seul en aura été l’auteur, puisqu’elle exprimera le moi tout entier. […] Pour fixer les idées, imaginons un personnage appelé à prendre une décision apparemment libre dans des circonstances graves ; nous l’appellerons Pierre. […] Bref, si la relation causale existe encore dans le monde des faits internes, elle ne peut ressembler en aucune manière à ce que nous appelons causalité dans la nature. […] Toutefois, entre l’idée et l’action sont venus se placer des intermédiaires à peine sensibles, dont l’ensemble prend pour nous cette forme sui generis qu’on appelle sentiment de l’effort. […] On appelle liberté le rapport du moi concret à l’acte qu’il accomplit.

883. (1904) Essai sur le symbolisme pp. -

D’autre part, si je déclare la poésie sœur de la métaphysique, c’est que je n’entends pas par poésie tout ce qu’on est convenu d’appeler des vers. […] pouvoir, savoir exprimer cette intuition constitue le poète, et j’appelle poésie l’extériorisation d’une conscience spontanée, le son direct d’une âme au contact des êtres. […] En choisissant les images aussi disparates que possible, on empêchera l’une quelconque d’entre elles d’usurper la place de l’intuition qu’elle est chargée d’appeler, puisqu’elle serait alors chassée tout de suite par ses rivales. […] Je ne sache pas que des romantiques aient existé qui n’aient pu s’appeler, en partie du moins, parnassiens ; ni qu’on rencontre aujourd’hui des poètes qui ne soient, — étant ce qu’on nomme poètes, — quelque peu symbolistes. […] André Gide dit de même : « J’appelle symbole tout ce qui paraît. » Traité du Narcisse.

884. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers, Tome xix. (L’île d’Elbe, — L’acte additionnel. — Le champ de mai.) » pp. 275-284

Edgar Quinet qui, le dernier de tous, dans un article écrit avec un certain feu, mais sans aucune logique (il serait trop aisé de le démontrer en détail), s’en vient plaider contre ce qu’il appelle la légende napoléonienne ; et qui prétend nous refaire un 1815 tout nouveau ! […] Ce dernier volume, par la vivacité des impressions, par la quantité de faits curieux qui y sont rassemblés et qui se déploient dans une trame facile, par la clarté qui y circule et qui y répand une sorte de sérénité inespérée, la seule possible avec Waterloo en perspective, par le talent enfin (car il faut appeler les choses par leur nom), mérite d’être signalé tout spécialement, même après les récents volumes, à l’attention et à la haute estime du public. […] Appelez cela un récit ou un tableau, peu m’importe !

885. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Virgile et Constantin le Grand par M. J.-P. Rossignol. »

Je ne suis pas un si fervent adorateur de Théocrite que l’était Huet, qui nous apprend lui-même que, dans sa jeunesse, chaque année au printemps, il relisait le poëte de Sicile ; j’ai pourtant fait plus d’une fois le charmant pèlerinage, et chaque fois, après avoir admiré la vivacité spirituelle et ingénue des personnages, la grâce piquante et naïve du dialogue, la vérité des peintures, je me suis préoccupé de la construction du vers, de ces ressorts cachés que le poëte met en jeu pour produire plusieurs de ses effets. » Le résultat de ces observations multipliées et patientes, c’est que le dactyle peut s’appeler l’âme de la poésie bucolique , et que, sans parler du cinquième pied où il est de rigueur, les deux autres places qu’il affectionne dans le vers pastoral sont le troisième pied et le quatrième, avec cette circonstance que le dactyle du quatrième pied termine ordinairement un mot, comme pour être plus saillant et pour mieux détacher sa cadence. […] Lucine, toute chaste que l’appelait le poëte ( casta, fave, Lucina ), n’est pas plus heureuse qu’Astrée ; elle disparaît pour devenir simplement la lune qui nous éclaire  ; et si, dans le texte primitif, on la suppliait de présider, comme déesse, à la naissance de l’enfant, le traducteur lui ordonnera d’ adorer le nourrisson qui vient de naître . […] Ce volume, qui doit être suivi d’une seconde partie, est un premier pas dans cette voie d’application où nos vœux l’appellent et où de plus compétents le jugeront.

886. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — George Sand. Cosima. »

On ne s’appelle pas George Sand impunément ; on n’a pas remué depuis huit ans toutes les imaginations, ravi bien des cœurs, offensé et flétri bien des égoïsmes, heurté plus d’une autorité et d’une croyance, déchaîné tous les enthousiasmes, toutes les curiosités, toutes les colères, pour venir ensuite débuter un soir par un drame indifféremment attendu, impartialement écouté, comme on ferait pour un auteur nouveau-né qui ne sera connu que demain. Non pas certes que nous prétendions, dans cet état de la salle que nous appelons le vrai prologue du drame, avoir découvert rien qui ressemblât nulle part à de la malveillance prononcée contre l’auteur. […] Et d’abord, ceux qui sont si chauds partisans de ce qu’on appelle la réaction classique, et qui la comprennent peu, ceux qui y voient autre chose que le noble plaisir d’entendre une jeune tragédienne de talent et de rapprendre, grâce à elle, ce qu’il n’aurait jamais fallu oublier, ce qu’il faut moins que jamais reproduire, ceux-là, épris contre le drame moderne d’une ferveur novice de croisés, et qui ne daignent plus faire de différence de Hernani à Vautrin, étaient quelque peu disposés d’avance à y confondre Cosima.

887. (1875) Premiers lundis. Tome III « L’Ouvrier littéraire : Extrait des Papiers et Correspondance de la famille impériale »

On n’entend parler ici ni des lettrés qui appartiennent à l’Université, ni de ceux qui font partie des Académies, mais de la très-grande majorité des écrivains composant ce qu’on appelle la Presse littéraire. […] Si le regard de l’empereur se portait sur cette classe de travailleurs appelés les gens de lettres, comme il s’est porté sur d’autres classes d’ouvriers et de travailleurs, cette supériorité souveraine, à qui la France doit tant, trouverait sans nul doute des moyens d’organisation relative et appropriée. […] On nous apprend à aimer le beau, l’agréable, à avoir de la gentillesse en vers latins, en compositions latines et françaises, à priser avant tout le style, le talent, l’esprit frappé en médailles, en beaux mots, ou jaillissant en traits vifs, la passion s’épanchant du cœur en accents brûlants ou se retraçant en de nobles peintures ; et l’on veut qu’au sortir de ce régime excitant, après des succès flatteurs pour l’amour-propre et qui nous ont mis en vue entre tous nos condisciples, après nous être longtemps nourris de la fleur des choses, nous allions, du jour au lendemain, renoncer à ces charmants exercices et nous confiner à des titres de Code, à des dossiers, à des discussions d’intérêt ou d’affaires, ou nous livrer à de longues études anatomiques, à l’autopsie cadavérique ou à l’autopsie physiologique (comme l’appelle l’illustre Claude Bernard) !

888. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Musset, Alfred de (1810-1857) »

Auguste Préault l’a très spirituellement appelé « Mademoiselle Byron » ; le mot est juste et lui restera. […] L’auteur de Faust l’appelle mon frère, l’auteur d’Hamlet l’appelle mon fils, et toutes les femmes de France, méritant vraiment le nom de femmes, ont un volume de lui sous les coussins où elles rêvent.

889. (1890) L’avenir de la science « I »

.) ; l’autre que l’on peut appeler idéale, céleste, divine, désintéressée, ayant pour objet les formes pures de la vérité, de la beauté, de la bonté morale, c’est-à-dire, pour prendre l’expression la plus compréhensive et la plus consacrée par les respects du passé, Dieu lui-même, touché, perçu, senti sous ses mille formes par l’intelligence de tout ce qui est vrai, et l’amour de tout ce qui est beau. […] J’ai la faiblesse de regarder comme de mauvais ton et très facile à imiter cette prétendue délicatesse, qui ne peut se résoudre à prendre la vie comme chose sérieuse et sainte ; et, s’il n’y avait pas d’autre choix à faire, je préférerais, au moins en morale, les formules du plus étroit dogmatisme à cette légèreté, à laquelle on fait beaucoup d’honneur en lui donnant le nom de scepticisme, et qu’il faudrait appeler niaiserie et nullité. […] Le profane, grâce aux instincts de la nature plus forts que les principes d’un ascétisme artificiel, ne fut pas entièrement banni ; on le tolérait, quoique vanité ; quelquefois, on s’adoucissait jusqu’à l’appeler la moins vaine des vanités ; mais, si l’on eût été conséquent, on l’eût proscrit sans pitié ; c’était une faiblesse à laquelle les parfaits renonçaient.

890. (1890) L’avenir de la science « IX »

Le XIXe siècle est appelé à la réaliser et à introduire le positif dans toutes les branches de la connaissance. […] De quel droit donc formerait-on un ensemble ayant droit de s’appeler philosophie, puisque cet ensemble, dans les seules limites qu’on puisse lui assigner, a déjà un nom particulier, qui est la psychologie 86. […] Celui qu’on regarde ordinairement comme le fondateur de la philosophie rationnelle, Thalès, ne serait plus aujourd’hui appelé philosophe.

891. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre huitième. »

La plaisanterie n’est point du tout mauvaise, surtout dans la bouche d’un de ces hommes que les anciens appelaient parasites. […] Voulez-vous qu’on l’appelle ? […] Il est plaisant d’avoir supposé que nos chiens appelés tourne-broches viennent de cette belle origine, comme d’avoir fait honneur au marmiton du surnom de son élève.

892. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Quatrième faculté d’une Université. Faculté de théologie » pp. 511-518

Il faudra puiser dans ces sources ce qu’il y a de plus intéressant pour en former ce que nous appelons de bons prolégomènes sur toute l’Écriture sainte. A ces auteurs je joindrais un petit ouvrage qui vient d’être nouvellement publié par un de nos professeurs de Sorbonne appelé Duvoisin103, De l’autorité des livres du Nouveau Testament contre les incrédides. […] Un jacobin appelé Melchior Canus110, a laissé des Lieux théologiques, ou de cette singulière logique, un traité qui a conservé de la réputation jusqu’à ce jour.

893. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Pélisson et d’Olivet »

Il a la petite camisole de force de son habit, il la sent sur lui, et il en est gêné… Lorsque les notices qu’il s’est permises sur ses confrères morts doivent être suivies de notices sur ses confrères vivants, quand il a épuisé la liste des extraits mortuaires, il s’arrête… Il voudrait peut-être aussi, lui, comme Pélisson, pour continuer, des arbres et des fontaines, et peut-être va-t-il les chercher ; car il termine brusquement son histoire, si l’on peut nommer du nom d’histoire ces anecdotes et ces commérages, choses trop petites pour n’avoir pas passé à travers les trous de ce crible qu’on appelle la mémoire des hommes, et qu’il était si peu nécessaire de ramasser ! […] Catalogués et numérotés par leur date d’admission à l’Académie française, tous ces esprits, qui, dans les lettres, expriment ce que Napoléon appelait de la chair à canon dans la guerre, et forment, pour ainsi parler, l’humus d’une littérature, comme la masse des soldats tués forme celui des champs de bataille, tous ces esprits n’auraient pas l’honneur de la place qu’ils occupent au petit soleil du livre de Livet s’il s’agissait individuellement d’eux, au lieu du corps dont ils ont fait partie. […] On continuera donc d’apprendre correctement et suffisamment l’histoire de l’Académie en son premier âge en lisant cet homme qu’on a appelé méchant et qui l’est comme la vérité ; car la vérité parfois est féroce, mais ce n’est pas sa faute, à elle !

894. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Laïs de Corinthe et Ninon de Lenclos » pp. 123-135

Laïs, Phryné, Ninon de Lenclos, Henriette Wilson, lady Hamilton, toutes les célèbres courtisanes qui ont fait boire les grands hommes ou les sots de leur temps dans cet abreuvoir de bêtes à cornes qu’on appelle la coupe de Circé, peuvent donc venir individuellement et tour à tour se ranger sous un regard grave, mais à la condition que ce regard, après s’être abaissé sur elles, saura se relever ! […] On a de lui beaucoup de livres, qu’il appelle avec assez de fatuité et de rengorgement les classiques du boudoir. […] Elles ne sont que la branche fleurie qui appelle l’oiseau, mais d’où il s’envole, et leur domination éphémère est beaucoup trop simple pour qu’on n’en déplace pas la cause… On la cherche vainement dans une existence qui ne pesa pas assez pour laisser des traces.

895. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Marie-Antoinette » pp. 171-184

Ces frères de Goncourt, qu’on aurait pu appeler les sœurs, les voilà qui ne chiffonnent plus dans l’Histoire, mais qui l’écrivent pour la première fois ! […] quand, plus tard, elle cherchait tous les maîtres capables de donner à l’enfant grandie ce qu’on appelait alors les grâces françaises, elle avait alors une magnifique prévoyance. […] Ils ont dit aussi, et parfois admirablement, les agonies et les déchirements de la mère, de la mère qui a le plus souffert certainement sur la terre, après celle qu’on appelle la Mère de Douleur.

896. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XII. Marie-Antoinette, par MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 283-295

Ces frères de Goncourt, qu’on aurait pu appeler les sœurs, les voilà qui ne chiffonnent plus dans l’histoire, mais qui l’écrivent pour la première fois ! […] quand, plus tard, elle cherchait tous les maîtres capables de donner à l’enfant grandie ce qu’on appelait alors les grâces françaises, elle avait alors une magnifique prévoyance. […] Ils ont dit aussi, et parfois admirablement, les agonies et les déchirements de la mère, de la mère qui a le plus souffert certainement sur la terre, après celle qu’on appelle la Mère de Douleur.

897. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Eugène Hatin » pp. 1-14

Assurément, l’auteur de l’Histoire de la Presse n’est pas ce qu’on pourrait appeler un esprit faux (le mal sans remède !) […] Hatin l’entend si bien ici, que son histoire s’ouvre au xviie  siècle et à l’avènement dans la publicité de Théophraste Renaudot, qu’il appelle le père du journalisme en France ; car le journalisme naquit presque le même jour par toute l’Europe. […] Hatin, jusqu’à la Révolution française, — qui déchaîna le journalisme, jusque-là contenu sous la main des gouvernements, — et son histoire, à cette grande presse dérisoire qui fut si peu de chose, n’aurait-elle pas été bientôt écrite, si l’auteur de l’Histoire de la Presse en France, tenant à justifier son titre, n’avait remonté les courants de la Fronde et de ses pamphlets pour y trouver ce qu’il appelle la petite Presse ?

898. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIV. M. Auguste Martin »

Jules Simon avec son Devoir, sa Liberté et sa Conscience, était un des philosophes actuels et présentement les plus comptés de cette morale par elle-même, de cet indépendant quelque chose qui s’appelle la morale, sans Dieu et sans sanction ! […] Louis-Auguste Martin, comme il s’appelle lui-même ! […] Une raison encore qu’il nous donne du peu d’influence de la morale chez les Chinois, ses civilisés et ses régnicoles, c’est ce qu’il appelle l’esclavage de la femme.

899. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXV. Le Père Ventura »

Il n’a pas craint de se placer aussi près de l’esprit que du cœur, aussi près des choses contemporaines que de celles de l’éternité en parlant à celui que nous pouvons appeler l’Homme du Temps. […] Le livre qui a recueilli ses discours s’appelle maintenant Le Pouvoir chrétien. […] Ils n’enseigneraient plus seulement une Royauté entre toutes ; l’Individu Royal, pour ainsi dire, mais ils referaient les notions défaites, et leurs sermons, comme ceux du père Ventura, s’appelleraient le pouvoir chrétien.

900. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

Il est des badauds ou des railleurs qui appellent cela donner une idée de la marche de l’esprit humain. II Parmi les tard venus à cette place, il en est un pour lequel le succès est partout venu vite, et qui pourrait s’appeler, comme Masséna, l’enfant chéri de la Victoire. […] Reboul, le célèbre boulanger de Nîmes, avait chance, à moins d’efforts qu’aucun autre écrivain, d’être personnel et original, pour peu qu’il eût dans la tête ce que madame de Staël appelait « l’étincelle divine  ».

901. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Henri Heine »

Mais ce que nous savons, c’est que c’était là une bonne occasion pour les batteurs d’œufs de cette omelette soufflée qu’on appelle l’actualité de reparler de Henri Heine, dont, sans cela, je vous en réponds ! […] Le xixe  siècle, que j’aurai l’insolence réfléchie d’appeler, malgré les positivismes qu’il invente et les prétentions qu’il affecte, le siècle du scepticisme absolu, du touche-à-tout philosophique, — et de l’écroulement de tout sous ses mains toucheuses, — n’a pas la cuirasse d’une seule conviction à lacer sur le sein nu et délicat de ses poètes… et Heine en a fait l’expérience. […] Les gens sans pensée qui picorent sur des mots, ont appelé Heine une âme païenne parce qu’il a fait jouer dans le diamant de son imagination réverbérante quelques formes du monde antique, mais il n’était pas plus païen que chrétien et que juif.

902. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (3e partie) » pp. 249-336

Lançant d’abord les chasseurs de sa garde, et quelques escadrons de dragons qui étaient à sa portée, pour ramener la cavalerie ennemie, il fit appeler Murat, et lui ordonna de tenter un effort décisif sur la ligne d’infanterie qui formait le centre de l’armée russe, et qui, profitant du désastre d’Augereau, commençait à se porter en avant. […] Ils appellent victoire dans Napoléon ce qu’ils auraient appelé désastre dans ses rivaux. […] Le général Haxo, après une soigneuse reconnaissance, avait découvert à une lieue et demie au-dessus de Kowno, vers un endroit appelé Poniémon, un point où le Niémen, formant un contour très prononcé, offrait de grandes facilités pour le passage. […] En un mot, ce qu’on appelle vertu publique se sera-t-il accru d’un atome dans votre âme et dans l’âme des générations à venir ? […] Après tant d’événements, après tant de bruit, après tant de mouvement, après tant de génie, après tant de cadavres et tant de ce que l’écrivain appelle gloire, on se demande : L’humanité a-t-elle grandi ?

903. (1899) Les industriels du roman populaire, suivi de : L’état actuel du roman populaire (enquête) [articles de la Revue des Revues] pp. 1-403

À la scène on appelle cela des coups de théâtre. […] Elle veut appeler… Les mots expirent sur ses lèvres. […] Il appelle à son secours un habile de la partie, qui ne sait rien, d’ailleurs, des suites à prévoir. […] On ne s’imaginerait point, si les exemples ne parlaient sous nos yeux, vivants et flagrants, jusqu’où peut aller l’indifférence esthétique de ceux que nous appelons des fabricateurs de littérature populaire. […] J’en appelle plutôt au témoignage de MM. 

904. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

Ribot appelle « extrinsèques, c’est-à-dire surajoutés ». […] Dans l’attention, surtout dans la volontaire, il y a toujours une idée maîtresse et directrice qui mérite de s’appeler une idée-force parce qu’elle devient un centre durable de tourbillon psychique et mécanique. […] Galton a reproduit artificiellement un travail analogue par des procédés purement mécaniques, en combinant plusieurs portraits de manière à former ce qu’il appelle un portrait générique ou typique. […] Tantôt enfin nous pensons soit des choses abstraites et générales, soit des choses en apparence toutes spirituelles ou intellectuelles ; mais, même alors, nous avons tout au moins dans l’esprit les images qu’on appelle mots ou signes. […] La liberté et le déterminisme, p. 147 : « L’élan par lequel je tends à persévérer dans une direction quelconque, à maintenir et à continuer mon action, diffère-t-il de ce qu’on appelle l’affirmation ?

905. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

C’est tout simplement une série de chapitres qui s’appellent l’un l’autre et n’excitent aucune curiosité. […] Il excite l’attention, tandis qu’il devrait éviter tout ce qui peut appeler les regards sur lui. […] Mais nous appellerons son attention sur le vrai caractère de l’histoire et des personnages historiques. […] Cet élément, que la préface de Cromwell avait négligé de signaler, s’appelle antithèse. […] Qu’il s’appelle prudence ou économie, dévotion ou probité, elle sait le démasquer et lui donner son vrai nom.

906. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

À la seconde lettre, il l’appelle mon maître. […] Dès sa première lettre à Vauvenargues, il en insère une qu’il vient de recevoir d’une ancienne maîtresse avec laquelle il a rompu et qui, en apprenant la mort de son père, le marquis Jean-Antoine, lui a écrit cette charmante et spirituelle épître de condoléance : Je n’ose vous appeler, monsieur, de ces noms tendres qui nous servaient autrefois ; ils ne sont plus faits pour moi ; j’ai fait pour les perdre tout ce que je voudrais faire à présent pour les ravoir. […] Voilà où se bornent mes soucis… Mirabeau toujours expansif, abondant dans son propre sens, et d’ailleurs aussi cordial en ceci que clairvoyant, pousse sa thèse et, imbu des idées du jour, il prononce le grand mot, celui des lettres dont l’avènement et le règne étaient prochains dans la société et qui allaient faire l’opinion publique, cette autre reine : Je sais, dit-il à Vauvenargues, que votre peu de disposition3 et de santé ne vous permet pas de courir ce que quelqu’un comme vous doit appeler fortune ; mais quelle carrière d’agréments ne vous ouvrent pas vos talents dans ce qu’on appelle la République des lettres ! […] Il voit son ami s’oublier à Bordeaux depuis un an, attaché par quelques liaisons qu’il appelle chaque fois des passions éternelles.

907. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

Il ne faut point prendre garde si tous ces anciens auteurs sont appelés profanes, et si quelques-uns ont quelques termes libres et impurs : le soleil jette ses rayons sur la boue, de même que sur les choses précieuses, sans être endommagé ; cet astre apporte du changement aux substances qu’il éclaire, et le sage en fait de même de tout ce qui est soumis à ses ordres. […] ce qui est même un secret de la Providence, dans laquelle nul de nous ne saurait pénétrer. » Et il en appelle, tout en s’humiliant, à cette justice tardive et à cette immortalité qui s’assied sur la tombe : Cineri gloria sera venit. […] On ne saurait se figurer ce que sont les vers de Marolles, « ces fruits tardifs d’une muse naissante dans un âge avancé » ; car c’est ainsi qu’il les appelle, et il les aime et les chérit par-dessus tout, en cette qualité de derniers nés. […] Chaque fois qu’il y est question de lui, elles sont animées de passion, de mépris, de colère : Chapelain y a même ce qu’on appelle de l’esprit. […] Un jour ce même Jean Rou, qui nous introduit si bien dans l’intimité du grand homme, comme il l’appelle rondement (on est toujours le grand homme de quelqu’un), Jean Rou passait à quatre heures du matin, au mois de mai, proche le quai des Quatre-Nations, devant la porte de Marolles33 ; il voit son domestique déjà habillé, debout, droit comme un cierge sur le seuil, et qui l’invite à monter chez son maître, lequel est, assure-t-il, encore plus matineux que lui.

908. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Au milieu de toutes leurs prévenances pour leurs nouveaux hôtes (car elle avait quelques amis de France avec elle), les Anglais faisaient leurs observations sur ce qu’on appelait la légèreté, la vivacité française, et ils ne la trouvaient pas tout à fait à la hauteur de sa réputation. […] Une foule considérable nous entourait et n’était pas peu surprise de cette scène grotesque. » On voit par là que Mme de Boufflers obtint mieux encore que ce qu’on a appelé « un grognement élogieux de Johnson » ; elle eut ses révérences et fit faire à Tours toutes ses grâces. […] Elle la voit journellement et elle la déteste, elle et tous ses amis et ses adhérents, toute la clique comme elle les appelle : « Haïssant les Idoles, écrit-elle à Walpole, je déteste leurs piètres et leurs adorateurs. […] Mme de Boufflers avait marié, dès 1768, son fils (bientôt colonel du régiment de Conti) à Mlle Des Alleurs, fille de l’ambassadeur à Constantinople et qui y était née elle-même : celle-ci, pour se distinguer des autres Boufflers, s’appelait la comtesse Amélie, et était célèbre par son talent sur la harpe ; on donnait de petits concerts autour du prince malade. […] cette femme si répandue, si fêtée et adorée, cette Idole, pour l’appeler encore une fois par son nom, qui, dans le plus éclairé des siècles, s’était attachée, par les liens durables de l’estime, des princes et des monarques, des philosophes et des lettrés célèbres ; qui faisait les délices ou l’envie du beau monde qui l’entourait ; que l’on cultivait et que l’on courtisai !

909. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Elle ne garda à Genève qu’une maison champêtre, Chêne, vendit le domaine principal et bien regretté, la maison patrimoniale de Châtelaine, un vrai « paradis perdu », et s’en alla émigrer non loin de Lucques et près de Pescia, où elle dressa sa tente dans une heureuse vallée, le val de Nievole, et dans un coin plus clos que les autres et appelé Valchiusa (val fermé ou Vaucluse). […] À peine revenu à Genève, et dans le premier ennui de l’isolement, il faillit faire ce qu’on appelle une sottise : il s’était amouraché d’une jeune fille d’une condition un peu inférieure, sans fortune, et il voulait l’épouser. […] Elle lui dit : « Qu’elle avait écrit, il est vrai, qu’il fallait se roidir contre l’opinion publique, mais non pas contre celle de ses parents ; que, d’après ce qu’on lui avait raconté, la demoiselle qu’il recherchait n’ajouterait par sa famille aucun lustre à la sienne, mais au contraire qu’elle ne lui apporterait aucune fortune et le mettrait dans la dépendance ; qu’elle regardait bien toutes ces distinctions de famille à Genève comme très-ridicules et de fort peu de poids ; mais que cependant elles en acquéraient davantage lorsque l’alliance que l’on contractait pouvait ouvrir ou fermer la porte de la meilleure compagnie et faire tourner la balance ; qu’il devait considérer la nature de son attachement et la personne qu’il aimait ; que si elle était telle qu’il crût réellement impossible de la remplacer, pour l’esprit et le caractère, par une autre qui lui fût égale, alors cette considération pouvait devenir la plus puissante de toutes ; mais, que s’il n’avait pas ce sentiment, il fallait peser toutes les autres convenances. » « J’ai répondu, poursuit Sismondi, que je jugeais en amant et que je ne pouvais éviter de voir cet accord parfait. — Elle a répliqué qu’un homme d’esprit, de quelque passion qu’il fût animé, conservait encore un sens interne qui jugeait sa conduite ; que toutes les fois qu’elle avait aimé, elle avait senti en elle deux êtres dont l’un se moquait de l’autre. — J’ai ri, mais j’ai senti que cela était vrai… » C’est là de la bonne foi, et c’est cette entière bonne foi, cette disposition naïve, italienne ou allemande comme on voudra l’appeler, mais à coup sûr peu française, qui, jointe à un grand sens et aux meilleurs sentiments, est faite pour charmer dans le Journal et dans la correspondance de Sismondi. — Et comment finit le roman d’amour ? […] Un second ouvrage sur la Richesse commerciale classa le jeune Sismondi parmi les disciples et sectateurs déclarés d’Adam Smith ; il en a appelé depuis. […] Revenu de tout cela, il n’a de sensibilité que celle des passions ; il fait tout avec de l’esprit, il en a infiniment ; mais ce qu’on appelle de l’âme, il n’en a point… » A la veille du voyage d’Italie, que Sismondi devait faire avec Mme de Staël (1804-1805), et au moment où il allait être tout à fait de sa suite et de sa cour, sa prudente mère lui écrivait encore : « Ah çà !

910. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par. M. le Chevalier Alfred d’Arneth »

Elle mourut avant d’avoir vu sa fille mère de celui qu’on appelait l’héritier du trône. […] Elle sait certainement, autant et mieux que personne, les heureuses et charmantes qualités de sa fille, de « cette gentille Antoinette », comme elle l’appelle ; est-ce à une mère tendre qu’il faut apprendre ces choses ? […] Les sermons de Marie-Thérèse à sa fille, comme elle-même les appelle, renferment donc bien du vrai et dénotent beaucoup de prévoyance. […] Le destin, ou ce qu’on appelle ainsi, ne vient jamais seul : on en est toujours, à quelque degré, complice. […] A la longue vous ne pouvez être heureuse que par cette tendre et sincère union et amitié. (30 mai 1776.) » Ne croyez pas cependant que tout cela passe sans réponse ; Marie-Antoinette qui n’a pas seulement de la grâce, mais qui a un bon jugement quand son attention est appelée sur un point, se justifie assez bien en général ; elle coule sur de certains reproches, elle se défend mieux sur d’autres, et, en ce qui est de l’exemple de ses deux belles-sœurs qu’on lui oppose, elle répond ici en vraie femme et avec beaucoup de finesse : « Je n’ai rien à dire contre mes belles-sœurs avec qui je vis bien ; mais, si ma chère maman pouvait voir les choses de près, la comparaison ne me serait pas désavantageuse.

911. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Dès qu’il l’eut vue, il lui porta un intérêt tout paternel, et touché de sa noble physionomie tout empreinte de mélancolie, il l’appelait « un petit roi détrôné ». […] Appelée à l’Odéon en 1813, elle y débuta le 27 mars dans le rôle de Claudine de la pièce de Pigault-Lebrun, Claudine de Florian. […] Mme Sophie Gay écrivait d’elle en octobre 1820, après avoir cité quelques-uns de ses vers : « Peut-on mieux peindre le charme de cette mélancolie que M. de Ségur appelait volupté du malheur ?  […] Je te crains ; j’ai peur de ma mémoire : Elle a gardé ta voix qui m’appelle souvent. […] que dis-tu de la séparation de Garat et de sa femme… c’est-à-dire sa femme… c’est égal, je l’appellerai toujours Mme Garat, c’est nécessaire pour la société.

912. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

Mais je voudrais appeler allégorie l’œuvre de l’esprit humain où l’analogie est artificielle et extrinsèque, et j’appellerai symbole celle où l’analogie apparaît naturelle et intrinsèque. […] Brunetière, qui n’en nie point la force, l’appelle non sans malice « l’épicuréisme de l’imagination ». […] Je ne sais si ce qu’il écrira doit toujours s’appeler proprement une allégorie ; mais si même on prononce apologue ou parabole, ce sont bien des espèces du genre allégorie et l’idée y apparaît distincte de sa forme musicale et plastique7. […] Selon le langage courant qui le doue d’une portée large et vague, à l’égal du mot signe, par exemple, il pourrait en certains cas servir à désigner ce que j’ai appelé symbole.

913. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

Au théâtre, comme dans la vie, le jeune homme a toujours souffert, plus ou moins, de la maladie qui rongeait Panurge, et que Rabelais appelle « faute d’argent ». […] La lionne pauvre est la courtisane du mariage ; c’est la femme qui spécule sur sa chute et vend l’adultère : vente au détail hypocrite, menteuse, clandestine, qui se solde en payements de mémoires, en acquits de fournisseurs ; qui introduit l’amant dans les secrets du foyer, et fait de lui le caissier de cette compagnie anonyme qui s’appelle le ménage à trois. […] La lionne pauvre du Vaudeville s’appelle Séraphine, de son petit nom. […] Cela pourrait s’appeler : les Égarements d’une femme et d’une Serviette d’avocat. […] Le soir venu, il se réfugie dans le seul asile qui lui reste, il entre chez Thérèse, tombe sur un fauteuil, brisé, glacé, mortellement malade ; et, là, entre sa fille adoptive et celui qu’il appelle son fils, ouvre son cœur gonflé et en laisse sortir tout ce qu’il tient de fiel et de larmes.

914. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

Quand il s’annonça au monde, la société en détresse appelait un sauveur ; la civilisation, épuisée par d’affreuses luttes, était à l’une de ces crises où ce sauvage, qu’elle porte toujours en son sein, se relève avec audace, et se montre tout prêt à l’accabler. […] Après l’admirable campagne d’Italie de 96, n’eut-on pas l’aventure d’Égypte, que j’appelle ainsi parce qu’il y avait bien des chances pour qu’il n’en revînt pas ? […] Là ressort encore ce qu’on peut appeler, en pareille matière, l’aventure. […] Le je ne sais quoi de gigantesque, comme je l’ai appelé, l’enlevait au-delà. […] À propos de ce mot qu’on vient de lire sur Tacite, je crois vrai de remarquer que l’éloquent historien que Racine appelait le plus grand peintre de l’Antiquité, l’historien philosophe, qui a été si en honneur durant, tout le xviiie  siècle, est moins en faveur depuis quelque temps.

915. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de La Tour-Franqueville et Jean-Jacques Rousseau. » pp. 63-84

Mme de Staël, Mme Roland, ne figureront-elles pas bientôt en première ligne dans le cortège de ce que j’appelle les femmes de Jean-Jacques ? […] Le nom de Julie, que Rousseau lui avait décerné d’abord, lui fut retiré ; il ne l’appela plus que Marianne. […] On se sent humilié pour ce qu’on appelle talent humain ou génie, de penser que c’est à partir de ce temps que Rousseau a écrit quelques-unes de ses plus divines pages, les premiers livres des Confessions, la cinquième promenade des Rêveries. […] Hume l’appelait le « joli petit homme » ; il ne voyait pas même trop d’affectation dans ce costume arménien que portait alors Rousseau sous prétexte de son infirmité. […] Elle eut à se séparer de son mari et crut devoir répudier même son nom ; elle se fit appeler Mme de Franqueville.

916. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Procès de Jeanne d’arc, publiés pour la première fois par M. J. Quicherat. (6 vol. in-8º.) » pp. 399-420

Michaud et Poujoulat, avaient pu mettre en goût les lecteurs ; mais autre chose est un extrait où l’on ne prend que les beautés et la fleur d’un sujet, autre chose une reproduction exacte et complète des textes latins dans toute leur teneur, et des instruments mêmes (comme cela s’appelle) d’une volumineuse procédure. […] À force d’ennui, il appelait des représailles. […] Un peu plus loin on arrivait, en montant, à la fontaine dite des Groseilliers, sous un hêtre séculaire appelé le beau Mai, l’arbre des Dames ou des Fées. […] Elle écrit aux villes d’ouvrir leurs portes à la Pucelle, sur le ton d’un chef de guerre et d’un envoyé d’en haut ; elle fait des sommations au duc de Bedford, au duc de Bourgogne, « de par le roi du ciel, mon droiturier et souverain Seigneur », comme elle l’appelle. […] Quicherat, que, bien que rédigé par les juges et les ennemis, il est plus à l’honneur de la véritable Jeanne que j’appelle primitive, et plus propre à la faire bien connaître, plus digne de confiance en ce qui la touche, que le procès de réhabilitation déjà imprégné et légèrement affecté de légende.

917. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Ninon fut des premières à s’émanciper comme femme, à professer qu’il n’y a au fond qu’une seule morale pour les hommes et pour les femmes ; qu’en réduisant, comme on le fait dans le monde, toutes les vertus du sexe à une seule, on le déprécie, et qu’on lui fait tort et injure ; qu’on semble l’exclure en masse de l’exercice de la probité, cette vertu plus mâle et plus générale, et qui les comprend toutes ; que cette probité est compatible chez une femme avec l’infraction même de ce qu’on est convenu d’appeler uniquement la vertu. […] Walckenaer, aux tomes I et IV de ses excellents Mémoires sur Mme de Sévigné, a très bien établi ce qu’on peut appeler la Chronologie de Ninon. […] La joie était le fond de son âme et comme l’expression de la santé de son esprit ; c’est elle qui a écrit à Saint-Évremond : « La joie de l’esprit en marque la force. » On a dit d’elle qu’à table, tant elle s’y montrait animée et enjouée, « elle était ivre dès la soupe » ; ivre de belle humeur et de saillies, car elle ne buvait que de l’eau, et les ivrognes, qu’on les appelât Chapelle ou Vendôme, furent toujours mal venus près d’elle. […] Il y en avait toujours dans ses récits : « ce qu’on appelle des contes dans la bouche des autres était dans la sienne des scènes parfaites », auxquelles, pour la ressemblance des caractères et pour le tour, il ne manquait rien. […] S’il est amoureux du mérite que l’on appelle ici distingué, peut-être que votre souhait sera accompli ; car tous les jours on me veut consoler de mes pertes par ce beau mot.

918. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Le duc de Lauzun. » pp. 287-308

Elle s’appelait Amélie. […] Ce gros amoureux, appelé sir Marmaduke, avait formé un projet des plus galants : « C’est dans quinze jours les courses d’Ipswich, écrivait miss Marianne à Lauzun ; il a fait faire une coupe d’or plus lourde que moi, qui sera gagnée par un cheval qui lui a coûté deux mille louis. » Il ne demandait que la faveur de mettre la coupe d’or aux pieds de sa belle. […] Au commencement de 89, ce fut ce même brillant Lauzun, alors duc de Biron, que le duc d’Orléans dépêcha un jour à Rivarol pour l’engager à publier une brochure sur ce qu’on appelait les dilapidations de la Cour. […] Compromis à tort, à la suite du duc d’Orléans, dans le torrent d’accusations que soulevèrent les journées des 5 et 6 octobre, on voulait le faire partir comme ce prince pour l’Angleterre : « M. de Biron sort de chez moi, écrivait Mirabeau au comte de La Marck ; il ne part point : il l’a refusé, parce qu’il a de l’honneur. » Devenu général de la République française37, tour à tour employé à l’armée du Nord, puis en chef à celle d’Italie, puis en Vendée, Biron désirait et appelait une occasion de se signaler qui recula toujours, et dont peut-être il n’était pas homme à profiter. […] Mme de Lauzun est appelée par Besenval, c’est-à-dire par l’homme qui flatte le moins les femmes de son temps, « un chef-d’œuvre d’éducation, et la femme la plus parfaite qu’il ait connue ».

919. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

Voltaire, ainsi interpellé, tressaillit et vibra : il appela sans retard auprès de lui la nièce de Corneille, et Le Brun resta, dans l’opinion, le médiateur honorable et comme le parrain qui avait amené cette adoption. […] Il sera toujours difficile de répondre à ce genre de plaisanterie, et même de n’y pas prendre part, lorsqu’on relit de sang-froid les odes, même célèbres, des modernes, où il entre tant d’emphase, de grands mots, d’images fastueuses, eu disproportion avec la réalité, et où il faut, pour se mettre au ton, imiter tout d’abord, en les récitant, ce qu’on a appelé le mugissement lyrique. […] Il avait terminé en 1787 cette ode qu’on imprime d’ordinaire à la fin des siennes, et qu’il appelait son Exegi monumentum. […] Je n’en citerai aucune après celle que j’ai rappelée l’autre jour à l’occasion de La Harpe (« Ce petit homme à son petit compas… ») : c’est ce qu’on peut appeler la reine des épigrammes. […] Le Brun, qui s’appelait l’homme des revanches, n’eut pas la sienne ce jour-là25.

920. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame de Motteville. » pp. 168-188

Je relève tout d’abord ce fonds de sagesse, qui semblait appartenir à la race : Mme de Motteville avait une sœur cadette que, dès son enfance, on appelait Socratine à cause de sa sévérité, et qui finit par se faire religieuse de la Visitation27. […] Le bas de la figure, pourtant, est peu agréable, et l’ensemble n’a rien qui appelle une attention marquée. […] Et très sensée et très sûre comme elle était, les plus honnêtes gens d’entre les initiés et les habiles, ceux que Retz appelle les d’Estrées et les Senneterre, aimaient à causer avec elle en passant. […] En parlant de Cinq-Mars, elle l’appelle « cet aimable criminel » ; en racontant les disgrâces de ceux que frappe la Fortune, elle s’attendrit sur « tant d’illustres malheureux » ; même jeune, elle regrette légèrement le temps d’autrefois. […] [NdA] [Corrigé conformément à l’Errata du tome VII (3e éd.), p. 537 :] Au tome V de cette troisième édition, p. 169, à l’article de Mme de Motteville, à propos de sa sœur cadette qu’on appelait Socratine à cause de sa sévérité, au lieu de ces mots : « et qui finit par se faire carmélite », il faut mettre : « et qui finit par se faire religieuse de la Visitation ».

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