Le mémoire, conçu et commencé dans une intention toute particulière, mais bientôt, à mesure que l’auteur avançait et s’y développait, continué et composé réellement en vue du public, est fort utile et fort attachant. […] Mais l’abbé Bossuet, qui avait déjà ses vues et voulait être le maître, diminuait exprès et malicieusement le prix de mon travail et de mes assiduités auprès de M. de Meaux, de peur qu’il ne me fît de nouvelles grâces. […] Les dames que j’y ai vues, entre autres Mme la princesse de Soubise, étaient toutes vêtues de noir, des coiffes sur leurs têtes et la gorge couverte jusqu’au menton.
Il y a un côté par où M. de Mirabeau tomba dans la secte et fut un dévot au docteur Quesnay ; mais, en laissant ce côté particulier et ce coin de paradoxe économique, que d’idées fines et justes dans ses écrits, que de vues justifiées par l’expérience et que ne désavouerait pas le bon sens politique, soit qu’on le prenne dans son mémoire de début sur L’Utilité des États provinciaux (1750), soit dans maint chapitre de L’Ami des hommes (1756), soit dans la Théorie de l’impôt (1760) qui le fit mettre cinq jours au donjon de Vincennes, par un simulacre de châtiment et une concession faite aux puissances financières du temps ! […] Cette infirmité de vue le gênait même souvent pour écrire. […] C’est une lettre datée de Versailles qui opère cette espèce de changement à vue.
Ses vues s’agrandissant, il voulut fonder à Copenhague une sorte d’athénée, y devint professeur de belles-lettres françaises, y créa une feuille périodique littéraire, une gazette manuscrite, et publia un volume de Pensées, dont une, légère de ton, alla blesser Voltaire. […] On y aperçoit quelques vues ingénieuses, mais gâtées par du bizarre. […] Et dès la première lettre, nous allons juger à vue d’œil du procédé de La Beaumelle, procédé qui lui est cher et qu’il a constamment appliqué.
M. de Lévis, qui ne fit que la connaître en passant, a recueilli d’elle, pour les avoir vues encadrées dans la chambre d’une personne qui en faisait sa méditation quotidienne, une suite de Maximes qui sont tout un code de morale mondaine et de sagesse féminine, — pas trop féminine pourtant, car il y en a dans le nombre quelques-unes de viriles, et même d’un peu romaines ; voici au complet ce petit manuel de bienséance et de stoïcisme : « Dans la conduite, simplicité et raison. […] Croirait-on que jusqu’à ces derniers temps, l’existence de Mme de Boufflers, passé ce moment de 1789 et ce dernier voyage qu’elle fit en Angleterre, était restée un problème, et que cette figure si animée et si constamment en vue s’éclipsait totalement ? […] Elle habitait un appartement au dernier étage, d’où elle voyait d’une vue à demi obscurcie par les pleurs et par les années la maison et les jardins qui lui avaient appartenu ; c’était sa consolation dernière.
Des savants lettrés comme Biot devaient eux-mêmes s’en emparer et insérer des Vues dignes d’être citées, dans la relation de leurs voyages scientifiques. […] Entendant louer toujours la campagne romaine avec ses riches teintes, il avouait ingénument que ce genre de beauté pittoresque échappait tout à fait à ses yeux, « pour lesquels le rayon rouge n’existait pas. » Mais soit qu’il en fût autrement pour lui dans la jeunesse, soit que l’amour-propre du colon et du propriétaire aiguisât sa vue et suppléât à son organisation, il a su nous rendre parfaitement ce qu’il regardait tous les jours, et il s’y est glissé un éclair de poésie ou de sentiment de la nature qu’il n’a jamais retrouvé depuis. […] Si elle le voyait, par exemple, engoué à première vue de Benjamin Constant et tout disposé à lui donner cœur pour cœur, âme pour âme, elle l’avertissait et lui disait : « Tu vas me trouver pis que ridicule, mon Charles, si je me mêle encore de te donner des avis sur Constant.