/ 1586
443. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

On fut si content de sa harangue en beau latin fleuri, plus que cicéronien et panaché de vers latins en guise de péroraison, qu’on l’admit tout d’une voix à compter lui-même parmi les candidats à la licence, de laquelle il s’était trouvé exclu par son voyage d’Italie. […] Dans une lettre de Rome, Janus Erythreus, c’est-à-dire Rossi, parlant d’un dernier voyage qu’y fit Naudé en 1643, pendant lequel le bibliothécaire infatigable achetait des livres à la toise pour le cardinal Mazarin et vidait tous les magasins de bouquinistes, nous le représente, au sortir de ces coups de main, tout poudreux lui-même de la tête aux pieds, tout rempli de toiles d’araignées à sa barbe, à ses cheveux, à ses habits, tellement que ni brosses ni époussettes semblaient n’y pouvoir suffire. […] Il rêve la bibliothèque publique et universelle avec la même persistance et la même chaleur que Diderot a pu mettre à l’Encyclopédie  ; il se consume à l’édifier par toutes sortes de travaux et de voyages ; il n’aime la gloire que sous cette forme, mais c’est à ses yeux une belle gloire aussi, et, au moment où il semble l’avoir atteinte, il échoue, ou du moins il peut croire qu’il a échoué. […] Son voyage d’Italie et le long séjour qu’il y fît achevèrent vite de l’aiguiser et de lui donner toute sa finesse morale. […] Mais, à travers ses relations resserrées avec ses amis de France, Naudé, tout occupé de former la bibliothèque du cardinal Mazarin, s’absentait encore pour de longs et nombreux voyages en Flandre, en Suisse, en Italie de nouveau, en Allemagne, rapportant de chaque tournée des milliers de volumes et des voitures tout entières.

444. (1864) Cours familier de littérature. XVII « Ce entretien. Benvenuto Cellini (2e partie) » pp. 233-311

Le cardinal Bembo les reçut à Padoue, lui fit faire son portrait, et lui donna trois chevaux turcs pour continuer son voyage. […] Arrivés à Isdevedra, nous fîmes une bourse commune pour la dépense du voyage, dont je fus chargé. […] « Je sortis du couvent de Viterbe avec mes compagnons de voyage, marchant tantôt devant, et tantôt derrière le train du cardinal ; de manière que nous arrivâmes le jeudi saint, vers le soir, à une poste en avant de Sienne. […] La femme de Cosme lui donna mille distractions et mille déplaisirs pour un diamant qu’elle désirait faire acheter à son mari, et que Benvenuto dépréciait ; à la fin il alla, pour se distraire, faire un voyage d’artiste à Venise. […] Il perdit son principal protecteur à la cour dans le cardinal Hippolyte de Médicis, qui prit la fièvre et la mort des maremmes de Toscane, dans un voyage où il accompagna le grand-duc son frère quelque temps après.

445. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (2e partie). Littérature de l’Allemagne. » pp. 289-364

C’étaient des études préparatoires pour exécuter avec utilité des voyages lointains ; j’avais cependant dans ces études un but plus élevé. […] « Dans des expéditions scientifiques, peu de voyageurs ont eu, au même degré que moi, l’avantage de n’avoir pas seulement vu des côtes, comme c’est le cas dans les voyages autour du monde, mais d’avoir parcouru l’intérieur de deux grands continents dans des étendues très considérables, et là où ces continents présentent les plus frappants contrastes, à savoir, le paysage tropical et alpin du Mexique ou de l’Amérique du Sud, et le paysage des steppes de l’Asie boréale. […] C’est assez d’indiquer la source de cette contemplation intelligente qui nous élève au pur sentiment de la nature, de rechercher les causes qui, surtout dans les temps modernes, ont contribué si puissamment, en éveillant l’imagination, à propager l’étude des sciences naturelles et le goût des voyages lointains. […] Le même soin des détails, sans que l’impression de l’ensemble en soit jamais troublée, sans que jamais la libre imagination du poète se lasse d’animer la matière qu’il met en œuvre, caractérise l’auteur d’Atala, de René, des Martyrs et des Voyages en Grèce et en Palestine.

446. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

Revenu à la santé, il pensa, pour se guérir, à faire un voyage en Angleterre. […] Il en « est tout rejoui », ayant si longtemps chômé ; et à tous les hôtels où ils s’arrêtaient, il consignait sur le papier tout ce qu’il avait ouï de son compagnon de voyage. […] Après des études hâtées, il visita les pays étrangers, et se fit donner le nom d’Aventureux à cause de son goût pour les voyages. […] En voici le début « A l’heure que j’ay ceste matiere encommencée, j’aproche quarante cinq ans, et ressemble le cerf ou le noble chevreul lequel ayant tout le jour brouté et pasturé diverses fueilles herbes, et herbettes, les unes cueillies et prises sur les hauts arbres, entre les fleurs et près des fruits, et les autres tirées et cueillies bas, à la terre, parmi les orties et les ronses aguës, ainsi que l’appetit le desiroitet l’adventure le donnoit après qu’iceluy se trouve refectionné, se couche sur l’herbe fresche, et là ronge et rumine, à goust et à saveur, toute sa cueillette et ainsi, sur ce my-chemin ou plus avant de mon aage, je me repose et rassouage sous l’arbre de congnoissance, et ronge et assaveure la pasture de mon temps passé, où je trouve le goust si divers et la viande si amère, que je pren plus de plaisir à parachever le chemin non cognu, par moy, sous l’espoir et fiance de Dieu tout puissant que je ne feroye et fust il possible de retourner le premier chemin et la voye dont j’ay desja achevé le voyage.

447. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mars 1886. »

» Voilà ce que j’entends dire par les plus fervents, les uns sincères, j’en suis persuadé, les autres peut-être seulement pour se donner la supériorité d’un voyage assez pénible. […] Du mois d’octobre date le voyage de M.  […] On avait fait grand bruit dans la presse des projets de voyage de MM.  […] Heureusement, mon ami Jauner, de Vienne, qui m’accompagnait, ne fut pas atteint, et moi-même j’en fus quitte pour une simple contusion : si les membres du Jockey-Club de Vienne, Wagnériens enragés, mais hommes de bonne éducation avant tout, ne m’avaient pas protégé contre cette foule imbécile, jamais je ne serais revenu vivant de ce petit voyage de désagrément.

/ 1586