M. le chancelier Pasquier ayant recouvré un manuscrit inédit de son ancêtre, manuscrit qui contenait des explications et leçons données par Étienne Pasquier à ses petits-fils sur le droit romain envisagé dans ses rapports avec nos vieilles coutumes françaises, en voulut faire jouir le public, et il en confia la publication et l’édition à M. […] Il conseille de recourir aux vieux auteurs et de s’en nourrir pour enrichir la langue par art et science, mais sans, pour cela, se rendre antiquaire ; c’est une affectation « qu’il faut fuir, dit-il, comme un banc ou écueil en pleine mer ». […] Pasquier n’était point partisan des états généraux ; dès l’abord, il n’augure rien de bon de ceux d’Orléans (1560) : « C’est une vieille folie qui court en l’esprit des plus sages François, qu’il n’y a rien qui puisse tant soulager le peuple que telles assemblées : au contraire, il n’y a rien qui lui procure plus de tort pour une infinité de raisons. » Et il ne se trompait pas trop alors, eu égard aux conditions de gêne où se trouvait le tiers état dans ces assemblées. […] En prenant pour texte et pour point de départ les Institutes de Justinien, le savant vieillard se montre attentif à saisir toutes les analogies ou même les oppositions qui peuvent se rencontrer entre l’ancien droit romain et notre vieux droit coutumier ; il éclaire, il explique l’un par l’autre, à l’aide d’un rapprochement continuel qu’il orne et relève d’érudition, et qui ne manque pas, jusqu’à un certain point, d’agrément.
C’était un grand maigre, un osseux, et presque une espèce de squelette, mais qui ne rougissait pas plus de sa maigreur qu’une vieille fille anglaise, et qui même eut l’idée d’en tirer parti. […] Mais Mérimée, dans ses Lettres à Panizzi, n’a plus l’âge qui fait pardonner leur impertinence aux gamins de la rue et de la libre-pensée : il est vieux, il a l’âge d’être grave, et, comme un vieillard affaibli, il bave sur le catholicisme à faire mal au cœur à ceux même qui pensent comme lui sur le catholicisme, parce qu’il faut de l’esprit à ceux-là mêmes qui se mêlent de nous insulter ! […] » Ailleurs, il dit encore, avec la même vieille ironie empruntée à Voltaire : « Si le Pape venait à manquer, croyez-vous qu’on en ferait un autre ? […] C’est l’écroulement de cette personnalité sèche, mais énergique, que fut Mérimée, et qui, matérialiste humilié et puni, meurt, dans ces Lettres à Panizzi, du dernier vice de la matière, la gourmandise égoïste d’un vieillard, se consolant de tout avec des ortolans, dans le monde en proie aux plus funèbres catastrophes, tout comme le vieux Saint-Évremond se consolait de son exil avec des huîtres vertes.
Le magnifique fleuve déploie le cortège de ses eaux bleues entre deux rangées de montagnes aussi nobles que lui ; leurs cimes s’allongent par étages jusqu’au bout de l’horizon dont la ceinture lumineuse les accueille et les relie ; le soleil pose une splendeur sereine sur leurs vieux flancs tailladés, sur leur dôme de forêts toujours vivantes ; le soir, ces grandes images flottent dans des ondulations d’or et de pourpre, et le fleuve couché dans la brume ressemble à un roi heureux et pacifique qui, avant de s’endormir, rassemble autour de lui les plis dorés de son manteau. […] Quel contraste entre nos fabliaux, nos romans du Renard et de la Rose, nos chansons de Gestes, et les Niebelungen, le Romancero, Dante et les vieux poëmes saxons ? Au lieu des grandes conceptions tragiques, des rêveries sentimentales et voluptueuses, des générosités et des tendresses du vieux poëme allemand ; au lieu de l’âpreté pittoresque, de l’éclat, de l’action, du nerf des récits espagnols ; au lieu de la farouche énergie, de la profondeur lugubre des hymnes saxonnes, vous rencontrez des épopées prosaïques et des contes frondeurs.
Leconte de Lisle, c’est toujours cette vieille histoire de la race d’Agamemnon « qui ne finit jamais », suivant le mot du poète. […] Leconte de Lisle l’ait vu surtout à travers le livre de Victor Hugo, qui s’est peint lui-même sous les traits prodigieux du vieux tragique grec. […] Eschyle et à créer une Orestie française, Leconte de Lisle se promenait, en causant avec le vieux combattant de Salamine et de Platée, dans le pays idéal de la Tragédie, tout à coup il s’aperçut que son compagnon de voyage était chauve à ce point, que les tortues pouvaient prendre son crâne pour un rocher poli.
Un idiot qui va, revient et glousse, Content, car les enfants sont à l’école ; À sa fenêtre une vieille qui tousse. […] Murs décrépits, lumière décrépite Que ce novembre épand sur cette place : Sur un balcon, du linge froid palpite, Pâle, dans la lumière décrépite, Et puis le son des cloches qui se lasse… Tout à coup, plus de cloches, plus de vieille, Plus de pauvre idiot, vaguement singe, Et l’on dirait que la ville sommeille, Plus d’idiot, de cloches, ni de vieille… Seul, maintenant, le blanc glacé du linge.