A ce mérite se joint, chez les écrivains secondaires du xvie siècle, un mérite de nouveauté durable dans la langue qu’ils emploient à tous les usages et introduisent dans toutes les matières. […] Nous faisons grand usage ou grand abus de ce mot. […] Chemin faisant il parle à chacun selon ses besoins, s’aidant pour les persuader de tout ce qu’ils voient et de tout ce qu’ils aiment, tirant ses comparaisons des usages de leur vie, de leurs habitudes domestiques, de leurs souvenirs, rendant les enseignements sensibles en y intéressant leur imagination et leur cœur.
Il possède aussi le secret de la composition, quoiqu’il oublie souvent d’en faire usage ; il sait, quand il le veut, lier les épisodes dans la trame serrée du récit ; il a un dessein qu’il déroule, un but qu’il poursuit, et alors même qu’il se perd trop longtemps au détail des choses communes, il a le triste mérite de ne point ignorer où il va. […] Montesquieu avait dit : « Les anciennes mœurs, un certain usage de la pauvreté rendaient à Rome les fortunes à peu près égales ; mais à Carthage des particuliers avaient les richesses des rois. » Que ces traits simples et forts parlent bien autrement à l’imagination ! […] Il ne suffit pas de signaler ici une impropriété de termes qui blesse la grammaire universelle, il faut voir l’usage qu’en fait l’auteur, et dans quelle vue il provoque ainsi notre attention.
Voyez la scène des ruines où elle se fait porter par lui, qui lui dit les bêtises d’usage : « Vous êtes un démon ! […] Mais c’est là l’usage à cette heure ! […] un diable du tout, puisqu’il fait des romans où la vertu et la passion sont dosées en globules homéopathiques à l’usage des jeunes personnes, comme disent d’un air si renchéri mesdames leurs mères, a diminué les enluminures d’un style qui brossait le paysage avec l’aisance pittoresque d’un homme de ce temps, — si fort en paysages !
Nous avons déjà tant de peine à rendre l’aspect extérieur d’une terre étrangère, à comprendre à moitié les usages de ses habitants, leurs plaisirs, leur politesse et le goût particulier qu’ils trouvent à la vie ! […] Pour n’en prendre qu’un exemple, n’est-il pas d’un usage presque universel, dans le roman, le drame, la poésie, de conduire au couvent les héroïnes désespérées ? […] Brunetière, ont cet inconvénient qu’il n’y a rien de si difficile que de résister à la tentation de s’en servir. » Je réponds que cela dépend, et que s’il est un usage dangereux des notes, il en est un autre fort légitime et utile.
Pour beaucoup d’historiens de la littérature, le rôle des précieuses n’aurait consisté qu’à rayer quelques mots du vocabulaire, à y en introduire quelques autres, et surtout à remplacer l’usage habituel du terme propre, direct et précis, par l’emploi de la métaphore. […] Il y a donc un juge même de l’usage, quoi qu’on en ait pu dire. […] Quand ce ne serait que pour mieux distinguer entre eux les termes du bel air ou du bon usage, ne faut-il pas qu’on analyse les notions qu’ils expriment, ou, pour mieux dire encore, qu’on les « anatomise » ? […] Mais si la tragédie n’avait réussi à se constituer qu’en expulsant de sa définition l’usage du romanesque, il y rentre avec le noir poète, et même il y « coule à pleins bords ». […] La Préface elle-même nous signale les mots de Falbala, Fichu, Battant l’œil, Ratafia, Sabler ; et on le voit tout de suite, ce sont des termes populaires ou des termes concrets, tirés de l’usage de la vie commune.