Dans un admirable portrait de Wallenstein, ce glorieux généralissime de l’Empire assassiné par ordre de son maître, Richelieu, qui se reporte à sa propre situation de ministre calomnié et sans cesse menacé de ruine, trouve de magnifiques paroles pour caractériser l’infidélité et l’ingratitude des hommes ; et, après avoir raconté la vie de ce grand guerrier, après nous l’avoir montré avec vérité dans sa personne et dans son habitude ordinaire, il ajoute en une langue que Bossuet ne surpassera point : Tel le blâma après sa mort, qui l’eût loué s’il eût vécu : on accuse facilement ceux qui ne sont pas en état de se défendre. […] On a pu se demander déjà, et j’ai entendu faire l’objection : « Comment Richelieu trouva-t-il le temps d’écrire ses mémoires, et sont-ils bien, en effet, tout entiers de lui ? […] Il arrive à Angoulême le mercredi de la Semaine sainte (27 mars 1619), et là où il pensait toucher au port, « c’est où il trouve plus de tempête ». […] Si Luynes avait vécu, la fortune de Richelieu s’ajournait pourtant et pouvait manquer : aussi, quand Luynes disparaît, quand il est emporté d’une maladie soudaine (14 décembre 1621) au milieu de cette campagne qu’il avait entreprise sans pouvoir la mener à fin, Richelieu a pour peindre sa mort, son caractère et sa personne, des traits de couleur et de passion que Saint-Simon, un siècle après, aurait trouvés. […] Qui sait ce qu’on aurait fait de la politique de Henri s’il ne se fût pas trouvé là un homme capable d’en recueillir et d’en transmettre l’héritage ?
— Après cela, je trouverais Hugo bien osé de ne pas faire relier les Fleurs du mal en cuir de Cordoue, gaufré et ornementé1. […] Mais je trouve infiniment plus facile d’être votre Baudelaire, c’est-à-dire votre charge. […] 1er Tableau. — La Bohême travailleuse, complètement absorbée dans sa tâche ; celle qu’on trouve échelonnée, la tête entre ses mains, le long des tables de la bibliothèque Sainte-Geneviève, où elle use ses coudes luisants ; — La Bohême silencieuse et recueillie, fuyant les réunions aux expansions bruyantes ; la Bohême vivant par le cerveau et guère par le cœur, n’ayant pas de maîtresses, — peut-être par sagesse et par principes, mais peut-être aussi parce que le sens de l’amour lui manque ; ne se passant aucune faiblesse, mais impitoyable encore pour celles d’autrui. […] Ils ont des maîtresses qu’ils aiment sincèrement, sinon avec constance ; — forcés de se battre continuellement avec la nécessité, ils ne trouvent pas là un motif suffisant de mettre leur conscience aux enchères comme Lousteau, ou de draper « leur gueuserie avec leur arrogance » comme d’Arthez. […] Et je le trouve fort conséquent, quoi qu’on dise, d’aimer d’un amour égal Ingres et Delacroix : l’homme de style explique parfaitement le critique d’art.
Nos malheurs nous ont rendus, sinon plus sensés, du moins plus sérieux ; nos âmes, longtemps froissées par le choc des événements extérieurs, aiment davantage à rentrer, en elles-mêmes, pour y trouver quelque repos ; la religion a repris tout son empire, et la morale tous ses droits, ou du moins on n’outrage plus impunément l’une ni l’autre. […] Ils ne voient, dans le bonheur et dans le plaisir, que de la prose ; et ils ne trouvent de poésie que dans le malheur et dans l’affliction. […] On fait des expressions trouvées avec des barbarismes, des tours nouveaux avec des solécismes, et des idées neuves avec des termes impropres. […] Soyez religieux et graves dans vos écrits ; mais ne soyez pas éternellement tristes : rappelez-vous que, dans les livres sacrés, tout n’est pas du ton des lamentations de Jérémie, ou des plaintes de Job, et qu’on y trouve aussi des hymnes de bonheur ou des cantiques d’allégresse. […] Peignez la nature avec vérité, mais avec choix, et sans marquer minutieusement ses moindres traits, comme cet artiste sans génie, qui trouve avec raison plus facile de tromper l’œil que de le charmer.
Exagérant ou dénaturant en cela les doctrines de l’École décadente, il ne trouve rien d’exquis comme les amitiés célèbres de Patrocle et d’Achille, d’Oreste et de Pylade, de Nisus et d’Euryale. […] Les uns et les autres critiquent Sarcey : les Décadents, parce qu’ils le trouvent mauvais ; les Symbolistes parce qu’ils voudraient prendre sa place. » Les Symbolistes sont des poseurs, à preuve l’anecdote suivante que m’a contée un respectable bourgeois qui n’y comprit absolument rien : Un jour de l’été dernier, Léon Mateau et un poète de ses amis revenaient de la campagne où ils étaient allés, sans doute, commenter les derniers accidents de la vie d’Arthur Rimbaud. […] Ces gens qui se mangent le nez dans les journaux avaient trouvé à table leur véritable terrain de conciliation. […] Mais tous ceux qu’il avait indiqués comme faisant partie de sa combinaison ont protesté dans Le Figaro contre une tentative d’embauchage qu’ils ne trouvaient pas de leur goût. […] Néo-Décadents et Symbolistes Aujourd’hui que l’École décadente n’existe plus à Paris qu’à l’état de souvenir, elle semble trouver en province et à l’étranger des adeptes et des continuateurs qui sont comme un écho lointain du bruit qu’elle fit en 1886.
Ce rude et joyeux jaugeur, au bonnet bleu et à la branche de houx, ce chanteur de chansons, le soir, dans les granges, ce joueur de violon et de cornemuse — qui ne l’est pas qu’en vers — et qui faisait réellement danser dans leurs sabots les meunières et les batelières de l’Écosse, a toujours vécu sur le cœur de son pays, et il y a trouvé sa force et sa gloire. […] Dans des poésies du genre de celles de Brizeux, précisément, la couleur locale devrait avoir un profond, un bistré, un ton d’or noir, qui eût rappelé l’intérieur enfumé de ces fermes et de ces cabanes, qu’il n’aurait jamais dû quitter, et à la porte desquelles il aurait pu un jour trouver la gloire que Burns y trouva, l’heureux homme ! […] c’est du cidre breton, mais du mitoyen, que je trouve dans le verre de Brizeux. […] Les gens de Paris l’avaient trouvé si agréablement Breton qu’il s’est dit, connaissant peu son monde du reste, qu’il allait leur donner de la Bretagne ancienne avec de la Bretagne moderne, puisque la moderne leur avait plu ; et il se mit à écrire en vingt-quatre chants son poëme épique et populaire intitulé Les Bretons.