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370. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

Voltaire est le premier, et il demeure incomparable : vif, naturel, facile, toujours prêt, donnant au moindre compliment un tour aisé, une grâce légère, exprimant au besoin des pensées sérieuses, mais les déridant bientôt, et toujours attentif à plaire, à faire rire l’esprit. […] Il n’a pas ce tour qui est indépendant du fond, le secret de l’élégant badinage : il aime assez la joie, la jovialité, ce qui est tout différent. […] les expressions lui manquent, et la langue elle-même, qu’il possède si bien, lui fait défaut : Je n’écris jamais de sang-froid, s’écrie-t-il, dès qu’une fois mon cœur a prononcé le nom de ma grande amie ; mais aujourd’hui c’est une émotion, un transport, par l’espérance qu’elle me donne d’une faveur prochaine qui mettrait le comble à mon bonheur. « J’irai en pèlerinage à cette tour.

371. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet »

Dans le volume que j’annonce et que je ne parcourrai point en détail, je saisis ce qui me paraît le mieux et le plus vrai, le personnage du duc de Bourgogne, de ce petit-fils de Louis XIV, l’objet de tant d’espérances, tant promis au monde, tant regretté et pleuré, et j’en viens parler à mon tour après M.  […] Dans sa fureur la plus bizarre et la plus insensée, il est plaisant, éloquent, subtil, plein de tours nouveaux, quoiqu’il ne lui reste pas seulement une ombre de raison. […] A son reflet, comme à une torche agitée dans l’ombre, toutes ces tièdes peintures en grisaille s’illuminent et parlent à leur tour.

372. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Daphnis et Chloé. Traduction d’Amyot et de courier »

le premier jugement avait couru et court encore ; c’est le seul qu’on ait réimprimé et qui se lise en tête de toutes les éditions de Bayle qui, dans son Dictionnaire, s’autorise, sans la contrôler, de l’opinion de Huet, ne songe qu’à renchérir, à son tour, sur l’article des mœurs ; non qu’il en prenne la défense et qu’il fasse le rigoriste, mais en érudit qui ne se trouve pas souvent à pareille fête, il badine à sa façon derrière du latin et du grec, il se gaudit des légèretés du roman en y cherchant le graveleux et sans y soupçonner la délicatesse. […] Il y règne le jour le plus limpide ; on croit ne voir partout que des tableaux d’Herculanum, et ces tableaux ; réagissant à leur tour sur les pages du livre viennent on aide à notre imagination pour la lecture. » Que de chemin nous avons fait, que d’étapes et quel retour vers la vraie Grèce depuis Bayle et le docte évêque d’Avranches ! […] Chassang, qui paraît être d’avis que c’est bien une méprise et qu’il n’y a pas de Longus. — Je dois dire pourtant que cette conjecture, dès longtemps émise par Schoell, et qui s’appuie d’une citation légèrement inexacte, a paru invraisemblable à l’excellent critique Frédéric Jacobs, et qu’elle le paraît également à un savant grec, philologues des plus précis et des plus sagaces, qui s’occuper en ce moment à donner à son tour une édition critique de la jolie pastorale, le docteur Piccolo.

373. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [I] »

On partait chaque printemps ; chaque fleur de génération, chaque élite nouvelle s’envolait à son tour à travers le monde et par les vastes espaces de la terre habitable, comme disait Homère : on allait tout droit devant soi, au hasard, à la découverte, selon les versants et les pentes, à la rencontre d’un meilleur climat, d’un plus beau soleil, en quête des terres fécondes, des moissons et des vignes là où il y en avait ; on avait pour droit sa passion, sa jeunesse, l’impossibilité de vivre où l’on était, — le droit du plus jeune, du plus fort, du plus sobre, sur les races voluptueuses et amollies. […] Frédéric, à son tour, le roi-conquérant, le roi-capitaine, ne fit du moins ses entreprises et ne livra de sa personne tant de sanglantes batailles que dans une pensée politique semblable à celle de Richelieu, et pour asseoir puissamment son État et sa nation, pour créer une Allemagne du Nord antagoniste et rivale en face du Saint-Empire. […] Notez que si Jomini, à son début, profitait des illustres exemples du général Bonaparte pour éclairer ses récits et donner à ses jugements sur Frédéric tout leur relief, à sa théorie toute sa portée et son ouverture, il a lui-même en tant qu’écrivain militaire dû aider et servir à Napoléon, quand le captif de Sainte-Hélène s’est plu, à son tour, à retracer en quelques pages fermes l’histoire critique des campagnes de Frédéric.

374. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre III. Théorie de la fable poétique »

Si enfin l’usage impérieux nous contraint de la mettre à part, nous en ferons une exclamation, un regret, un souhait de poëte ; elle prendra un tour éloquent, comique ou touchant ; elle perdra son apparence didactique, en devenant un mouvement de l’âme ; on entendra, en l’écoutant, la voix passionnée d’un homme ; elle sera couverte sous un sentiment, et la poésie la revendiquera en jetant sur elle une poignée de ses fleurs. — Il sera facile alors d’animer le récit qui la confirme. […] Le singe de sa part disait : « Venez, de grâce, Venez, messieurs, je fais cent tours de passe. […] Votre serviteur Gille,          Cousin et gendre de Bertrand,          Singe du pape en son vivant,          Tout fraîchement en cette ville Arrive en trois bateaux exprès pour vous parler : Car il parle, on l’entend ; il sait danser, baller,          Faire des tours de toute sorte, Passer en des cerceaux, et le tout, pour six blancs.

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