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404. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ch. de Rémusat. Abélard, drame philosophique » pp. 237-250

Charles de Rémusat, le philosophe, — qui n’était pas seulement qu’un philosophe, mais un homme politique et un vaudevilliste, ce que j’estime infiniment plus (on a publié dernièrement quelques-unes de ses chansons), — Charles de Rémusat a voulu, par égard pour lui-même sans doute, que le mot de « philosophique » se retrouvât dans le titre d’un drame qu’il avait composé moins pour le théâtre et le grand public que pour se faire plaisir à lui-même, à sa famille et à ses amis. […] Quand Victor Hugo écrivait son Cromwell, il débordait de verve et de jeunesse, et il visait de ce coup de massue ce qu’on appelait alors : « le théâtre classique », pour en élever un autre sur ses débris. […] Quant au Moyen Âge sur lequel se détachent ses personnages, c’est le Moyen Âge ordinaire de tous les théâtres de Paris que Charles de Rémusat fréquentait ; car son fils nous apprend, dans son Introduction, qu’il eut l’idée de son Abélard en sortant d’un autre Abélard, joué à la Gaîté ou à l’Ambigu-Comique.

405. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DE LA LITTÉRATURE INDUSTRIELLE. » pp. 444-471

Au théâtre, les mêmes plaies se retrouveraient ; les mœurs ouvertement industrielles y tiennent une place plus évidente encore. Il en fut ainsi en tout temps : mais, dans une histoire du théâtre depuis dix ans, on suivrait le contre-coup croissant et désordonné de ce mauvais régime littéraire. […] Les théâtres s’en tirent parfois pourtant mieux que le reste. […] Au théâtre, elle a eu à sa dévotion la scène de la Renaissance : qu’en a-t-elle fait ? […] Le drame industriel a eu, à d’autres moments, d’autres théâtres encore, la Porte-Saint-Martin, l’Odéon, les Français même, qui, pour n’en pas subir les conditions ruineuses, ont dû bientôt l’éloigner ou ne s’y ouvrir qu’avec précaution.

406. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Voltaire établi aux portes de la cité de Calvin, conviant les citoyens à s’amuser chez lui, leur jouant la comédie, la leur faisant jouer, quand Genève ne tolérait pas encore de théâtre : il y avait là de quoi scandaliser les rigides calvinistes. […] Mais le théâtre et le roman, ce sont de trop grands genres, des ouvrages de temps et de patience : il faudra bien six jours pour faire Olympie. […] Il écrivit contre Dalembert qui voulait qu’on ouvrît un théâtre à Genève, et son ouvrage eut le malheur d’exciter l’austérité genevoise : il fut pour quelque chose dans les tracasseries qui forcèrent Voltaire de transporter à Ferney son théâtre et son domicile. […] Il aimait à faire sentir sa grande fortune, il recevait magnifiquement ; il donnait des fêtes, il avait un théâtre, où il jouait très mal et très passionnément, où les gens de sa maison, souvent les visiteurs jouaient ; il le démolit, puis il le rétablit par politesse pour Mlle Clairon qui venait à Ferney.

407. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE XIV »

Dumas a été souvent, au théâtre, un puissant et vigoureux inventeur : mais il n’a jamais été un poète. […] Dumas applique au théâtre. […] Cette voix doit se faire entendre sur la scène, et le théâtre lui a ménagé des échos dans les monologues et les apartés. […] s’écrie-t-elle. — Nous la garderons. » Le coup de théâtre est superbe, mais difficile à croire autant qu’un miracle. […] Je ne sais guère, dans le théâtre contemporain, de figure plus attendrissante que celle de Raymonde, plus amoureusement femme et mère, mieux relevée par le repentir.

408. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Gil Blas, par Lesage. (Collection Lefèvre.) » pp. 353-375

Il s’adonne aux petits théâtres, aux théâtres forains, et fait seul ou en société une centaine au moins de petites pièces qui représentent assez bien en germe, ou déjà même au complet, ce que sont aujourd’hui les vaudevilles, les opéras-comiques, nos pièces des Variétés et des Boulevards. […] Lesage fut quelque temps avant de pardonner à son fils de s’être fait comédien, et comédien surtout à la Comédie-Française, avec laquelle il était en guerre perpétuelle pour son Théâtre de la Foire. […] Ce chanoine, fils de Lesage, chez qui son vieux père alla finir ses jours, était un joyeux vivant lui-même : « il savait imperturbablement tout son Théâtre de la Foire et le chantait encore mieux que la Préface ». […] [NdA] Cette veine de Turcaret était neuve au théâtre et encore intacte même après Molière : « C’est une chose remarquable, dit Chamfort, que Molière, qui n’épargnait rien, n’a pas lancé un seul trait contre les gens de finance.

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