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901. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

Enfin, je considérais que, quoique exempt de l’ambition du cardinalat, toutefois, en le regardant comme le terme honorable de la carrière entreprise, l’auditorat de Rote m’y conduisait lentement, c’est vrai, mais certainement, sans avoir besoin de mendier la faveur ou la bienveillance de qui que ce fût, ni de faire la cour à personne, puisque le décanat de la Rote mène à la pourpre d’après l’usage, quand le doyen n’a pas démérité et que l’on n’a véritablement rien à lui reprocher. […] Après avoir organisé cet heureux plan, qui fut un pas décisif vers le terme de l’affaire, on lui fit remarquer qu’il était impossible de trouver le Pape dans le parti Mattei, soit parce que cette faction était trop peu nombreuse, soit parce que, après l’exclusion de Mattei lui-même et des quatre cardinaux déjà mis autrefois sur le tapis sans succès, ceux qui restaient avaient tous des exceptions personnelles auprès de la majorité des électeurs, sans en excepter quelques-uns de leur parti, à cause de leur âge ou pour d’autres circonstances qui rendaient chimérique l’espoir de réussir à leur sujet. […] Le plaisir infini qu’il en ressentit n’égala pas son étonnement et en même temps sa crainte très fondée que les choses n’arrivassent pas à bon terme, tant lui semblaient insurmontables les obstacles extrinsèques contre Chiaramonti.

902. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Le Misanthrope échappe à l’analyse ; on ne peut pas plus l’expliquer par les procédés du théâtre, qu’on n’explique par les procédés de la peinture certaines têtes de Raphaël, qui, selon les termes do l’école, sont faites avec rien. […] Il y avait des termes nobles et des termes bourgeois.

903. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Compayré à ce propos émet cette conjecture fort plausible : « C’est peut-être aux habitudes scolaires contractées dans des collèges où Aphtonius régnait en maître avec sa réglementation formaliste, avec son machinisme oratoire, qu’on doit attribuer en partie la régularité qui distingue la littérature du xviie  siècle. » Il est bien certain, en tout cas, que les traductions pomponnées qu’on appelait alors « les belles infidèles » concordent avec cette rhétorique à l’ancienne mode ; et qu’au contraire le souci de minutieuse exactitude, qui a primé et parfois remplacé celui du beau langage chez les maîtres épris, après la guerre de 1870, des mérites de l’érudition germanique, a maintes fois alourdi la prose française, encombré nos livres d’histoire d’un fouillis de notes parasites, ennuagé la philosophie d’un jargon apocalyptique, hérissé même des œuvres à prétentions littéraires d’une broussaille de termes épineux. […] D’une part, elle est un centre d’opposition aux idées neuves et aux mots nouveaux ; elle est un conservatoire de la littérature et de la langue nationales ; elle a écarté sans pitié un certain nombre d’hommes ou de termes qui effarouchaient par trop son attachement au passé. […] Le style académique travaille trop souvent à dire des riens en termes solennels ou alambiqués ; il se prête à mille petites perfidies habilement déguisées ; il est ennemi de la vigueur, de la simplicité, et il gâterait vite ceux qui le cultiveraient avec persistance.

904. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

Le mot, le terme, type venu on ne sait d’où, a la force de l’invisible, l’aspect de l’inconnu : De quelque mot profond tout homme est le disciple ; Rêveurs, tristes, joyeux, amers, sinistres, doux, les mots sont les « passants mystérieux de l’âme ». […]  » Il poursuit une fin que son passé renferme, Qui recule toujours sans lui jamais faillir ; N’ayant pas d’origine et n’ayant pas de terme, Il n’a pas été jeune et ne peut plus vieillir.  […] Inspirez du courage à l’être intelligent, donnez-lui de l’énergie ; qu’il ose enfin s’aimer, s’estimer, sentir sa dignité ; qu’il ose s’affranchir, qu’il soit heureux et libre ; qu’il ne soit jamais l’esclave que de vos lois ; qu’il perfectionne son sort ; qu’il chérisse ses semblables… Qu’il apprenne à se soumettre à la nécessité ; conduisez-le sans alarmes au terme de tous les êtres ; apprenez-lui qu’il n’est fait ni pour l’éviter ni pour le craindre. » Telle était la « prière de l’athée » au dix-huitième siècle.

905. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

Nous vous en demandons mille fois pardon ; mais tranquillisez-vous ; notre métaphysique n’empruntera point ces termes d’école et de pédagogie qui ne servent qu’à cacher le vide des idées sous le prestige des mots, et à obscurcir ce qu’il faut éclaircir ; notre métaphysique n’est que du bon sens exprimé en langue vulgaire. […] De là son désordre, sa vigueur et sa rigueur de termes, sa foudroyante brièveté. […] Cette double situation du prêtre orateur était une nouveauté que nous avons signalée ailleurs en ces termes : Bossuet en est le personnage culminant.

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