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542. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (3e partie) » pp. 161-219

« Rome, 30 septembre 1821. » VI Le duc d’Orléans, plus tard Louis-Philippe, lui écrit peu de temps après : « Éminence, « Le prince de Talleyrand, qui garde de vous le plus tendre souvenir, me disait dernièrement que votre seul plaisir était la culture des fleurs, et votre noble amie la duchesse de Devonshire a bien voulu me confirmer le fait. […] Me souvenant de la promesse que j’ai faite à mon bien-aimé frère André au lit de mort, lorsque, dans les derniers moments de sa vie, il me demanda qu’en signe du très tendre amour qui nous avait unis dans la vie, nos corps fussent unis dans la mort et renfermés dans le même sépulcre, je veux que si, à ma mort, ce sépulcre ne se trouve pas déjà préparé par moi, mon héritier en fasse faire un très modeste, et qui contiendra le cercueil de mon frère et le mien. » Après avoir pourvu aux besoins de son âme, réglé sa sépulture et spécifié avec une attention toute particulière les prières qu’il exige pour son salut, le cardinal Consalvi détermine les legs qu’il accorde à ses serviteurs. […] XV Sa vie privée, depuis sa plus tendre jeunesse jusqu’à sa mort, fut l’exemple de la plus touchante et de la plus constante amitié. […] Consalvi se sentit pris pour jamais de la plus tendre affection pour Cimarosa ; il parvint à le connaître ; ils contractèrent ensemble la plus impérissable affection.

543. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Taine est tendre. […] Lui, si pur, si délicat, si tendre ! […] L’histoire de la philosophie antique est menée comme un drame ; et quelle plus juste et plus expressive image que celle-ci (après la chanson des Epicuriens) : … Soudain, quand la joyeuse et misérable troupe Ne se soutenait plus pour se passer la coupe, Une perle y tomba, plus rouge que le vin… Ils levèrent les yeux : cette sanglante larme D’un flanc ouvert coulait, et, par un tendre charme, Allait rouvrir le cœur au sentiment divin. […] les dialogues où il exprime à Stella les inquiétudes de sa conscience et son dessein de redescendre sur la terre pour faire profiter les pauvres hommes de ce qu’il a appris dans un monde meilleur, et même, s’il le faut, pour souffrir encore avec eux… il y a dans tout cela une émotion, une beauté du sentiment moral, et comme un sublime tendre où M. 

544. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VII. Repos »

Elle est intéressante quand, oubliant de s’appliquer à bien exprimer ces natures basses, elle manifeste inconsciemment les noblesses sans raideur d’une âme devenue stoïcienne tout en demeurant, par je ne sais quel miracle, passionnée et tendre, gracieusement féminine. […] Il trouve chaude la fraîcheur exquise de son teint ; les yeux tristes, tendres et profonds deviennent dans ses litanies brillants et malicieux ; chez la svelte et souple enfant, il vante les qualités majestueuses et le puissant équilibre des matrones. […] Où trouver des grands vers plus chantants que ceux-ci : Les roses ont ouvert leurs lèvres de satin Devant la volupté des caresses nocturnes ; Et les lys, inclinant la blancheur de leurs urnes, Tendent leur pistil d’or au baiser clandestin. […] Il croit retrouver en elle, plus gaie, plus superficielle, moins dangereuse aussi, la promesse d’amour, l’illusion naïve et chantante à laquelle il tendit les bras en sa prime venue et qui, suivie par son regard, suivie par tout son corps oublieux de l’équilibre, fut pour beaucoup dans les brutalités de la chute.

545. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1883 » pp. 236-282

On parle du discours de Clemenceau, à la fin duquel l’orateur était très fatigué… Une conversation générale, où l’on entend la voix tendre du gros Spuller, disant à Berthelot : « Il a trouvé dans le cerveau de notre grand ami, une finesse… » Et les apartés se taisent, et l’on écoute Spuller parlant de son grand ami mort, avec un peu de la religion d’un amoureux. […] Au premier, les magasins : des pièces basses au plafond noirci par la lumière du gaz ; aux portes et aux plinthes peintes en noir, dans des encadrements dorés, aux murs tendus de verdures du vert le plus triste, et comme choisi exprès, à l’effet de faire ressortir la fraîcheur et la gaieté des soies et des satins pour robes. […] On part pour le Vésinet. » Et il me charge « s’il y avait accident », de porter à sa chère femme un petit mot, enfermé dans sa lettre, qu’il termine par cette tendre phrase : « Après son mari, ses enfants, papa et maman, vous êtes ce qu’elle aime le plus. » Cette lettre m’émotionne. […] Là, je trouve chez le mari, une prompte et sympathique compréhension de ma pensée, chez la femme une tendre estime pour le vieil écrivain, et chez tous les deux une amitié, égale, continue, et qui n’a ni haut ni bas dans l’affection.

546. (1707) Discours sur la poésie pp. 13-60

Pour les figures, ceux qui ne cherchent que la vérité, ne leur sont pas favorables ; et ils les regardent comme des piéges que l’on tend à l’esprit pour le séduire. […] La peinture a aussi ses régles, quoiqu’elle ne tende qu’à flater les sens par l’imitation de la nature. […] Pour moi je crois indépendamment des exemples, qu’il faut de la méthode dans toutes sortes d’ouvrages ; et l’art doit régler le désordre même de l’ode, de maniére que les pensées ne tendent toutes qu’à une même fin ; et que malgré la variété et la hardiesse des figures qui donnent l’ame et le mouvement, les choses se tiennent toujours par un sens voisin dont l’esprit puisse saisir le rapport sans trop d’étude et de contention. […] On voit assez par tous ces usages, que l’ode tend particuliérement au sublime.

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