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661. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

On y verrait la savante construction des Antonins crouler, la décadence de la civilisation antique devenir irrévocable, le christianisme profiter de sa ruine, la Syrie conquérir tout l’Occident, et Jésus, en compagnie des dieux et des sages divinisés de l’Asie, prendre possession d’une société à laquelle la philosophie et l’État purement civil ne suffisent plus. […] Grâce aux beaux travaux dont cette question a été l’objet depuis trente ans, un problème qu’on eût jugé autrefois inabordable est arrivé à une solution qui assurément laisse place encore à bien des incertitudes, mais qui suffit pleinement aux besoins de l’histoire. […] Je sais que plus d’une objection peut être opposée à ce raisonnement ; mais une chose au moins est hors de doute, c’est que l’auteur du troisième évangile et des Actes est un homme de la seconde génération apostolique, et cela suffit à notre objet. […] La lecture des évangiles suffirait pour prouver que leurs rédacteurs, quoique ayant dans l’esprit un plan très juste de la vie de Jésus, n’ont pas été guidés par des données chronologiques bien rigoureuses ; Papias, d’ailleurs, nous l’apprend expressément 82.

662. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 14 mars 1885. »

Nul héroïque intérêt n’est en jeu ; il ne s’agit ni de patrie, ni de guerre, ni de religion, ni de politique : il n’est question que des amours du chevalier Walter et de la fille d’un orfèvre, et ce cadre étroit suffit à l’évocateur infaillible pour concentrer tout un monde de sensations, de passions et d’idées. […] Cela ne suffit point. […] Bien d’autres voudraient se ranger sous le drapeau glorieux ; mais tant que nous n’aurons point un théâtre national de drame musical, nos oratorios, nos antiennes, nos glees et nos cantates ne suffiront pas à nous élever au premier rang des nations musicales. […] Mais enfin, rire ne suffit pas.

663. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

Chez les modernes, il suffit de rappeler les noms de Leibniz, Locke, Condillac et leurs disciples. […] Comment s’étonner dès lors qu’elle suffise à ses nombreux travailleurs et qu’ils ne cherchent rien au-delà de son horizon ? […] qu’elle révèle tout, suffit à tout ? […] L’observation intérieure seule ne suffit donc pas à la plus timide psychologie.

664. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse sociologique »

Enfin, pour faire justice d’une théorie qui se fonde sur la permanence des caractères de la race dans ses individus, il suffit d’observer que la ressemblance morale n’existe même pas dans la famille, entre parents et enfants. […] Qu’il suffise de rappeler qu’un lecteur animé de dispositions bienveillantes et humanitaires ne goûtera pas pleinement des livres exprimant une misanthropie méprisante, comme l’Éducation sentimentale ; de même, un homme à l’esprit prosaïque et précis sera difficilement saisi d’admiration à la lecture de poésies qui font appel au sens du mystère, ou essayent de susciter une mélancolie sans cause. […] Pour les autres genres, et, en général, les arts, la peinture, la sculpture, la musique, il suffira de raisonnements plus brefs. […] Ceux que nous donnons suffisent et sont probants : ils ne peuvent être expliqués ni par la théorie de la race, ni par la théorie du milieu.

665. (1856) Cours familier de littérature. II « XIe entretien. Job lu dans le désert » pp. 329-408

Il suffirait seul à servir d’épitaphe à l’humanité morte et à immortaliser à jamais le génie humain devant sa postérité inconnue. […] Quant à moi (toujours toute religion à part), cette condition de la vie physique, cette anthropophagie de toute la nature aurait suffi à elle seule pour me faire rejeter l’existence à un tel prix, et si jamais un doute impie effleura mon âme sur l’existence ou sur la nature du premier principe, c’est en réfléchissant à cette dépravation véritablement surhumaine, à cette méchanceté préméditée et sanguinaire de la nature ; c’est en me demandant avec une horreur éperdue, mais logique : Qui a donc inventé cette loi suprême de destruction ? […] … XIV Mais ce n’est pas tout ; les conditions que l’inévitabilité et la présence perpétuelle de la mort font à la vie suffiraient seules pour empoisonner mille vies si on les réunissait dans une. […] Ce petit mot de métaphysique, jeté en passant et dont je demande pardon au lecteur, suffit à établir que le grand philosophe poète ou le grand poète philosophe prend nécessairement son caractère, ses idées, ses images, dans la scène de la nature qu’il habite ou qu’il a le plus habituellement sous les yeux.

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