Bourdeau établit aisément que la constatation des faits par l’historien est toujours une opération malaisée et de succès incertain. […] Je ne croirai jamais au succès d’une école littéraire qui exprime des pensées difficiles dans une langue obscure.
Il n’en est pas moins vrai que pour se rendre compte de la vraie nature des concepts, pour aborder avec quelque chance de succès les problèmes relatifs aux idées générales, c’est toujours à l’interaction de la pensée et des attitudes ou habitudes motrices qu’il faudra se reporter, la généralisation n’étant guère autre chose, originellement, que l’habitude, remontant du champ de l’action à celui de la pensée. […] Le succès du positivisme et du kantisme, attitudes d’esprit à peu près générales quand nous commencions à philosopher, venait principalement de là. […] Quiconque s’est exercé avec succès à la composition littéraire sait bien que lorsque le sujet a été longuement étudié, tous les documents recueillis, toutes les notes prises, il faut, pour aborder le travail de composition lui-même, quelque chose de plus, un effort, souvent pénible, pour se placer tout d’un coup au cœur même du sujet et pour aller chercher aussi profondément que possible une impulsion à laquelle il n’y aura plus ensuite qu’à se laisser aller.
C’est ce sentiment du devoir qui les réunit, les inspira et les soutint, qui fit leur discipline, leur courage et leur audace, qui souleva jusqu’à l’héroïsme antique Hutchinson, Milton et Cromwell, qui provoqua toutes les actions décisives, toutes les résolutions grandioses, tous les succès extraordinaires, la déclaration de la guerre, le jugement du roi, la purgation du Parlement, l’humiliation de l’Europe, la protection du protestantisme, la domination des mers.
L’orgueil est immense de sa nature : il détruit tout ce qui n’est pas assez fort pour le comprimer ; de là encore les succès de ce prosélytisme.
On n’a jamais vu en Angleterre une plus copieuse et une plus véhémente analyse, une si pénétrante et si infatigable décomposition d’une idée en toutes ses parties, une logique plus puissante, qui enserre plus rigoureusement dans un réseau unique tous les fils d’un même sujet : Quoiqu’il ne puisse arriver à Dieu ni bien ni avantage qui augmente sa félicité naturelle et inaltérable, ni mal ou dommage qui la diminue (car il ne peut être réellement plus ou moins riche, ou glorieux, ou heureux qu’il ne l’est, et nos désirs ou nos craintes, nos plaisirs ou nos peines, nos projets ou nos efforts n’y peuvent rien et n’y contribuent en rien), cependant il a déclaré qu’il y a certains objets et intérêts que par pure bonté et condescendance il affectionne et poursuit comme les siens propres, et comme si effectivement il recevait un avantage de leur bon succès ou souffrait un tort de leur mauvaise issue ; qu’il désire sérieusement certaines choses et s’en réjouit grandement, qu’il désapprouve certaines autres choses et en est grièvement offensé, par exemple qu’il porte une affection paternelle à ses créatures et souhaite sérieusement leur bien-être, et se plaît à les voir jouir des biens qu’il leur a préparés ; que pareillement il est fâché du contraire, qu’il a pitié de leur misère, qu’il s’en afflige, que par conséquent il est très-satisfait lorsque la piété, la paix, l’ordre, la justice, qui sont les principaux moyens de notre bien-être, sont florissants ; qu’il est fâché lorsque l’impiété, l’injustice, la dissension, le désordre, qui sont pour nous des sources certaines de malheur, règnent et dominent ; qu’il est content lorsque nous lui rendons l’obéissance, l’honneur et le respect qui lui sont dus ; qu’il est hautement offensé lorsque notre conduite à son égard est injurieuse et irrévérencieuse par les péchés que nous commettons et par la violation que nous faisons de ses plus justes et plus saints commandements, de sorte que nous ne manquons point de matière suffisante pour témoigner à la fois par nos sentiments et nos actions notre bon vouloir envers lui, et nous nous trouvons capables non-seulement de lui souhaiter du bien, mais encore en quelque façon de lui en faire en concourant avec lui à l’accomplissement des choses qu’il approuve et dont il se réjouit831.