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929. (1858) Du roman et du théâtre contemporains et de leur influence sur les mœurs (2e éd.)

Est-il possible d’outrager plus insolemment la conscience, et de travestir d’une façon plus impie ses notions les plus saintes ? […] La passion est bonne, légitime et sainte ; en se livrant à elle sans contrainte, l’homme atteint à la fois le bonheur et la vertu. […] Quels instincts d’amour pur, quelles notions de sainte fidélité ont pu résister à ce coup mortel ? […] Chez nous, l’esprit de famille a perdu il y a longtemps sa sainte autorité. […] Qu’avez-vous fait de ces nobles passions et de ces émotions saintes ?

930. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Sur la scène solennellement émouvante, où des personnages à la fois héroïques et criminels combattent pour le triomphe d’un droit saint en lui-même, mais inique en ce qu’il ne peut triompher que par la ruine d’un autre droit inviolable, plane, jusqu’à la catastrophe finale, l’ombre de la Némésis tragique, comme l’Harmonie suprême et la Justice absolue, qui brisera la justice relative de toutes les volontés particulières, pour rétablir l’accord rompu entre les idées morales, et opérer ainsi la réconciliation intérieure du Divin rentré dans son repos181. […] Pour avoir été juste, une barbare loi             Ordonne que je meure, Dieux saints ! […] Après lui, le mariage fut profané sur la scène, ce qu’il y a de plus saint au monde put être sérieusement joué, et la victoire impie de l’individu sur le Divin fut proposée aux spectateurs comme l’objet le plus digne d’exciter leurs éclats de rire et leurs battements de mains.

931. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

Ouvre la châsse que je puisse voir mon saint ! » Ce saint, ce sont des piles d’or, de joyaux, de vaisselle précieuse. […] Open the shrine, that I may see my saint.

932. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

» Dimanche 26 janvier Tissot nous contait ce soir, chez Daudet, qu’il avait été au moment d’acheter 7 000 francs, une petite montagne près de Jérusalem, et d’y bâtir un atelier, où il aurait imprimé et gravé son livre : un atelier, qui, disait-il, serait devenu un atelier d’art religieux, en même temps qu’une colonie française, faisant revivre l’influence de notre pays dans les lieux saints. […] À notre entrée le bruit terrestrement céleste d’un orgue-mélodium, dont joue l’artiste, et pendant qu’il vient à notre rencontre, les regards soudainement attirés par un trou illuminé, devant lequel est une aquarelle commencée ; un trou fait dans l’ouverture d’une étoffe jouant la toile levée d’un théâtre d’enfant, et dans lequel se voit figurée par de petites maquettes, une scène de la Passion, éclairée par une lumière semblable aux lueurs rougeoyantes éclairant un Saint-Sépulcre, le soir du Vendredi Saint. […] Mais les beaux, les touchants, les remuants dessins, ce sont les dessins du crucifiement, dessins très nombreux donnant presque, heure par heure, l’agonie du crucifié en haut du Golgotha, et les affaissements des saintes femmes, et l’étreinte amoureuse des bras de la Madeleine autour du bois de la croix.

933. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Une fois prononcée, la parole était pour eux sainte comme la religion, immuable comme le passé (fas, fatum, de fari). […] Alors revinrent les guerres pieuses de l’antiquité (pura et pia bella) ; mêmes cérémonies pour les déclarer : on appelait hors des murs d’une ville assiégée les saints, protecteurs de l’ennemi ; et l’on cherchait à dérober leurs reliques. — Les jugements divins reparurent sous le nom de purgations canoniques ; les duels en furent une espèce, quoique non reconnue par les canons. — Les brigandages et les représailles de l’antiquité, la dureté des servitudes héroïques se renouvelèrent, surtout entre les infidèles et les chrétiens. — Les asiles du monde ancien se rouvrirent chez les évêques, chez les abbés ; c’est le besoin de cette protection qui motive la plupart des constitutions de fiefs. Pourquoi tant de lieux escarpés ou retirés portent-ils des noms de saints ?

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