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517. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Frédéric le Grand littérateur. » pp. 185-205

— Assez, lui dit Frédéric, qui reprend ici l’avantage du bon sens et du bon goût au moral : Je ne suis, je vous assure, ni une espèce ni un candidat de grand homme ; je ne suis qu’un simple individu qui n’est connu que d’une petite partie du continent, et dont le nom, selon toutes les apparences, ne servira jamais qu’à décorer quelque arbre de généalogie, pour tomber ensuite dans l’obscurité et dans l’oubli. […] Je crois être plutôt resté en deçà du vrai, quand j’ai dit que l’attrait de l’esprit entre ces deux hommes survécut même à l’amitié ; car il est évident, à lire de bonne foi toute la suite et la fin de cette correspondance, que l’amitié elle-même n’est pas morte entre eux, qu’elle a repris avec un reste de charme mêlé de raison, et qu’elle se fonde, non pas seulement sur l’amusement, mais sur les côtés sérieux et élevés de leur nature.

518. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Maintenon. » pp. 369-388

Il y a des moments même où l’on dirait qu’elle charme ; mais, dès qu’on la quitte, ce charme ne tient pas, et l’on reprend de la prévention contre sa personne. […] Près de quitter le moribond, elle voulut pourtant que son confesseur vît le roi et lui dît s’il y avait espoir qu’il reprît le sentiment. — « Vous pouvez partir, lui dit le confesseur, vous ne lui êtes plus nécessaire. » — Elle le crut, et elle obéit, partant aussitôt de Versailles pour Saint-Cyr.

519. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

Après avoir essayé de tous les raisonnements à la Sénèque, après s’être proposé des perspectives de loisir riant comme Atticus, d’Antin pose la plume pour cette fois, et il ne la reprend que quinze mois plus tard en revenant aux mêmes lieux, à ce château de Bellegarde ; mais quel changement dans l’intervalle ! […] Je suis bien persuadé que, malgré toutes mes résolutions et mes chagrins, je cherchais à les trouver telles. » Les compliments, les assurances de services qui lui pleuvent de toutes parts, lui sont un prétexte ; tout conspire avec son secret désir ; il se laisse reprendre plus que jamais au train de la Cour.

520. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — I. » pp. 322-340

Son second professeur de mathématiques, Labbey, ayant été nommé à l’École d’artillerie de Châlons, Courier l’y suivit (1791) ; mais, tout en poursuivant son dessein d’entrer dans une arme savante, il ne sacrifiait cependant point ses auteurs grecs et latins, et, à chaque moment de relâche, il leur laissait reprendre l’empire. […] En ces veines de dissipation, il est très humilié de ne pas savoir danser, condition alors essentielle pour un jeune homme ; il reprend un maître de danse, ce qu’il a fait bien des fois avec un médiocre succès39.

521. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

en considérant cette lignée de frères ressemblants et inégaux, il me semble que la nature, cette grande génératrice des talents, essayait déjà un premier crayon de Nicolas quand elle créa Gilles ; elle resta en deçà et se repentit ; elle reprit le crayon, et elle appuya quand elle fit Jacques ; mais cette fois elle avait trop marqué. […] Il reprend la loi de Malherbe et la remet en vigueur ; il l’étend et l’approprie à son siècle ; il l’apprend à son jeune ami Racine, qui s’en passerait quelquefois sans cela ; il la rappelle et l’inculque à La Fontaine déjà mûr63 ; il obtient même que Molière, en ses plus accomplis ouvrages en vers, y pense désormais à deux fois.

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